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S U J E T 05_FRA060627_05C.fm Page 44 Lundi, 30. juillet 2007 1:14 13 5 FRANCE MÉTROPOLITAINE • JUIN 2006 QUESTIONS 6 POINTS « J’aime la poésie… » Documents A – Paul Verlaine, « L’échelonnement des haies », Sagesse, III, 1881. B – Colette, Les Vrilles de la vigne, 1908. C – Marcel Proust, Sodome et Gomorrhe, 1921. D – Gustave Roud, « Extrême-automne », Air de solitude, 1945. E – Charles Dantzig, Dictionnaire égoïste de la littérature française, 2005. m 1. Dégagez les points communs et les différences entre les quatre premiers textes du corpus. (3 points) m 2. Reformulez trois des idées essentielles du texte de Charles Dantzig. (3 points) Après avoir répondu à ces questions, vous devrez traiter au choix un des trois sujets nos 6, 7 ou 8. Document A L’échelonnement des haies L’échelonnement des haies Moutonne à l’infini, mer Claire dans le brouillard clair Qui sent bon les jeunes baies. 5 10 Des arbres et des moulins Sont légers sur le vert tendre Où vient s’ébattre et s’étendre L’agilité des poulains. Dans ce vague d’un Dimanche Voici se jouer aussi De grandes brebis aussi Douces que leur laine blanche. © Hatier 2007 44 S U J E T « J’AIME LA POÉSIE… » • QUESTIONS • SUJET 15 5 Tout à l’heure déferlait L’onde, roulée en volutes1, De cloches comme des flûtes Dans le ciel comme du lait. Stickney, 75. Le théâtre Paul Verlaine, Sagesse, III, 1881. La poésie 05_FRA060627_05C.fm Page 45 Lundi, 30. juillet 2007 1:14 13 1. En volutes : en spirales. 15 20 Colette, Les Vrilles de la vigne, 1908. © Hatier 2007 45 S U J E T Le roman 10 Sujets d’oral 5 J’appartiens à un pays que j’ai quitté. Tu ne peux empêcher qu’à cette heure s’y épanouisse au soleil toute une chevelure embaumée de forêts. Rien ne peut empêcher qu’à cette heure l’herbe profonde y noie le pied des arbres, d’un vert délicieux et apaisant dont mon âme a soif… Viens, toi qui l’ignores, viens que je te dise tout bas : le parfum des bois de mon pays égale la fraise et la rose ! Tu jurerais, quand les taillis de ronces y sont en fleurs, qu’un fruit mûrit on ne sait où – là-bas, ici, tout près –, un fruit insaisissable qu’on aspire en ouvrant les narines. Tu jurerais, quand l’automne pénètre et meurtrit les feuillages tombés, qu’une pomme trop mûre vient de choir, et tu la cherches et tu la flaires ici, là-bas, tout près… Et si tu passais, en juin, entre les prairies fauchées, à l’heure où la lune ruisselle sur les meules rondes qui sont les dunes de mon pays, tu sentirais, à leur parfum, s’ouvrir ton cœur. Tu fermerais les yeux, avec cette fierté grave dont tu voiles ta volupté, et tu laisserais tomber ta tête, avec un muet soupir… Et si tu arrivais, un jour d’été, dans mon pays, au fond d’un jardin que je connais, un jardin noir de verdure et sans fleurs, – si tu regardais bleuir, au lointain, une montagne ronde où les cailloux, les papillons et les chardons se teignent du même azur mauve et poussiéreux, tu m’oublierais, et tu t’assoirais là, pour n’en plus bouger jusqu’au terme de ta vie ! Les réécritures Dans le chapitre intitulé « Jour gris », la narratrice évoque la région de son enfance. Convaincre… Document B 05_FRA060627_05C.fm Page 46 Lundi, 30. juillet 2007 1:14 13 « J’AIME LA POÉSIE… » • QUESTIONS • SUJET 5 Document C Le narrateur part se promener sur une petite route normande. 5 10 15 […] Mais, dès que je fus arrivé à la route, ce fut un éblouissement. Là où je n’avais vu, avec ma grand-mère, au mois d’août, que les feuilles et comme l’emplacement des pommiers, à perte de vue ils étaient en pleine floraison, d’un luxe inouï, les pieds dans la boue et en toilette de bal, ne prenant pas de précautions pour ne pas gâter le plus merveilleux satin rose qu’on eût jamais vu et que faisait briller le soleil ; l’horizon lointain de la mer fournissait aux pommiers comme un arrière-plan d’estampe japonaise1 ; si je levais la tête pour regarder le ciel entre les fleurs, qui faisaient paraître son bleu rasséréné2, presque violent, elles semblaient s’écarter pour montrer la profondeur de ce paradis. Sous cet azur, une brise légère mais froide faisait trembler légèrement les bouquets rougissants. Des mésanges bleues venaient se poser sur les branches et sautaient entre les fleurs, indulgentes, comme si c’eût été un amateur d’exotisme et de couleurs qui avait artificiellement créé cette beauté vivante. Mais elle touchait jusqu’aux larmes parce que, si loin qu’elle allât dans ses effets d’art raffiné, on sentait qu’elle était naturelle, que ces pommiers étaient là en pleine campagne, comme des paysans sur une grande route de France. […] Marcel Proust, Sodome et Gomorrhe, II, chapitre premier, 1921. 1. Estampe japonaise : gravure représentant souvent un paysage stylisé. 2. Rasséréné : ravivé, encore plus bleu. Document D 5 10 Extrême-automne Qu’il est donc rapide, le glissement d’une saison moribonde vers la saison future ! Hier encore (il semble que c’était hier), ce grand pays sous le soleil sec de septembre s’abandonnait aux charrues. Elles ouvraient dans l’herbe rase des prairies de longues blessures roses d’heure en heure élargies. À la pointe du dernier sillon, Fernand, l’épaule nue et dorée comme au plein de l’été, une main sur le soc1 éblouissant, portait de l’autre à ses lèvres une pomme si rouge que le ciel autour d’elle avivait son bleu trop doux. Les chevaux las s’endormaient au repos et leurs crinières, en se penchant vers le sommeil, démasquaient par à-coups le ruban © Hatier 2007 46 S U J E T « J’AIME LA POÉSIE… » • QUESTIONS • SUJET 5 d’horizon, ses pans de collines, ses villages minuscules délicatement dessinés, avec le compte exact des toitures et des arbres, leurs couleurs posées côte à côte sans une bavure, à peine amorties au fond de l’air mûri comme un vin d’or. […] La poésie 05_FRA060627_05C.fm Page 47 Lundi, 30. juillet 2007 1:14 13 Gustave Roud, Air de solitude, 1945. 15 20 Charles Dantzig, Dictionnaire égoïste de littérature française, 2005. 1. Balzac (1799-1850) : romancier français. 2. Tous les noms cités dans cette phrase sont ceux de devins ou de mages censés prédire l’avenir. 3. Mallarmé (1842-1898) : poète français. 4. Jules Huret (1863-1915) : journaliste à L’Écho de Paris. Il fit paraître, en 1891, une enquête sur l’évolution de la littérature. © Hatier 2007 47 S U J E T Le roman 10 Sujets d’oral 5 POÉSIE : […] La poésie n’existe pas à l’état naturel. Loin d’être un fait qui préexisterait à l’homme et que celui-ci découvrirait, elle est sa création et son triomphe. Quand Balzac1 parle de poésie du commerce, ce n’est pas qu’elle s’y trouve, c’est qu’il l’y met. Sa sensibilité lui fait transfigurer certains éléments du commerce que les autres ne regardaient même pas. La poésie est la forme supérieure de l’imagination. C’est pour cela qu’on la croit apparentée à la divination. Or, elle n’a rien à voir avec la Pythie, les mystères d’Eleusis, Dr Imbéné Ravalavanavano amour argent examens2. La poésie, c’est du travail. Il en résulte un chant faisant croire qu’elle se passe dans le ciel. Le poète marche sur une corde. Elle est posée par terre. La poésie ne se trouve pas que dans les vers. Elle est là où le talent la met. La poésie est le résultat de toute bonne littérature. Mallarmé3 : « Mais, en vérité, il n’y a pas de prose » (réponse à l’Enquête de Jules Huret4). Le poème est l’objet ; la poésie, éventuellement, le résultat. La poésie est même le résultat de tout art réussi : un tableau est de la poésie, un beau vêtement bien porté est de la poésie, etc. Est poésie le résultat de toute activité humaine menée à bien. Un geste gracieux est de la poésie, un mouvement de troupe bien accompli est de la poésie. […] Les réécritures Document E Convaincre… Le théâtre 1. Soc : fer de charrue servant à labourer. S U J E T 08_FRA060627_08C.fm Page 68 Lundi, 30. juillet 2007 1:14 13 8 FRANCE MÉTROPOLITAINE • JUIN 2006 ÉCRITURE D’INVENTION 16 POINTS m Pour une revue de poésie créée avec des camarades, vous devez écrire un article intitulé : « Je n’aime pas les vers : j’aime la poésie ! » Rédigez cet article en l’illustrant de citations tirées des textes du corpus et en vous aidant de vos lectures de classe ou personnelles. Vous donnerez à votre prose un ton convaincu, sans aucune familiarité. Vous pouvez vous appuyer sur les textes du corpus reproduits pp. 44 à 47. LES CLÉS DU SUJET ■ Comprendre le sujet Analysez les mots de la consigne pour faire la « définition » (guide méthodologique) du texte à produire et cerner les contraintes. • Sujet / thème du texte : « la poésie ». • Genre du texte à produire : un « article » dans une « revue de poésie » : vous devez respecter la forme de l’article de presse ; cela suppose un titre – qui vous est imposé –, une structure en paragraphes, éventuellement avec des « sous-titres », si possibles « accrocheurs », qui portent l’idée directrice du paragraphe. • Type de texte (ou forme de discours) : – « Je n’aime pas… ; j’aime » → texte argumentatif dont la thèse vous est fournie par le titre de l’article et qui paraît claire. Mais attention, prendre au pied de la lettre la première partie du titre est très sectaire et réducteur – peut-être est-ce un contresens : faire un réquisitoire contre les vers aboutirait à refuser en bloc toute la poésie jusqu’au XIXe siècle et une bonne partie de celle du XXe siècle… Ce n’est vraisemblablement pas l’objectif du sujet. Ce titre a le ton d’une boutade dont il faut bien comprendre le sens : il ne s’agit sans doute pas d’opposer catégoriquement poésie en vers et poésie en prose, ou de faire uniquement un réquisitoire contre les vers, mais de montrer que ce que vous aimez dans la poésie, ce n’est pas tant sa forme que ses autres caractéristiques (à déterminer). © Hatier 2007 68 S U J E T La thèse est à clarifier pour vous : « Ce que j’aime dans la poésie, ce ne sont pas (tant) les vers, c’est, quelle que soit sa forme… (à vous de préciser) » ou : « La poésie n’est pas dans les vers mais dans… ». Mais le titre suggère aussi que vous revendiquiez le droit à la variété, à la liberté en poésie. Cela rejoint le sujet de la dissertation. • Le registre ne vous est pas indiqué ; vous avez le choix. Mais le titre de l’article, provocateur, vous suggère de prendre un ton enlevé, peutêtre polémique. Le verbe « aimer » et l’expression « ton convaincu » vous indiquent que vous défendez votre goût : vous devez donc faire preuve de subjectivité, d’enthousiasme, de force de conviction. • La situation d’énonciation : – Qui ? → « vous » (qui devient « je ») ; vous pouvez garder votre identité de lycéen (ce que suggère le mot « camarades ») mais pas forcément ; être un poète (qui fait partie d’un cercle de poètes). – À qui ? → à des lecteurs, sans doute cultivés. • Niveau de langue : « sans aucune familiarité » ; si vous gardez votre identité de lycéen, le ton peut être courant ; si vous adoptez l’identité d’un poète, il peut être soutenu. Le théâtre 8 Convaincre… « J’AIME LA POÉSIE… » • INVENTION • SUJET La poésie 08_FRA060627_08C.fm Page 69 Lundi, 30. juillet 2007 1:14 13 Article littéraire (genre) qui soutient une conception (type de texte) de la poésie (thème), éventuellement blâme de la forme versifiée (type de texte / thèse), définition de la poésie (type de texte : argumentatif), ? (registre), convaincu pour redéfinir la poésie et éventuellement revendiquer la liberté en poésie (buts). Le roman ■ Définition du texte © Hatier 2007 69 S U J E T Les réécritures • Le fond Les idées Inspirez-vous du corrigé de dissertation. Vous y trouverez : – des arguments « contre » les vers : trop éloignés de notre quotidien, peu compréhensibles ; artificiels et contraignants ; obstacle à la spontanéité et à l’imagination ; monotones ; parfois contrainte vidée de son intérêt, simple jeu sur le langage… ; – des concessions : il serait en effet judicieux et habile de faire des concessions à la forme versifiée et d’en montrer quelques bons côtés ; – des pistes de définition de la poésie. Pour la poésie en prose ; plus souple, proche de notre réel, variée, compréhensible par tous ; capable d’autant d’effets que le vers… Sujets d’oral ■ Chercher des idées 08_FRA060627_08C.fm Page 70 Lundi, 30. juillet 2007 1:14 13 « J’AIME LA POÉSIE… » • INVENTION • SUJET 8 Pour la revendication de la liberté en poésie : le poète est un être original, il doit pouvoir exprimer cette originalité (s’affranchir des règles) ; l’expression libre de l’imagination ; le domaine de la fantaisie ; les thèmes poétiques n’ont pas de limites : la poésie est partout… Les exemples Utilisez les textes du corpus, mais aussi vos lectures de l’année. Il serait bon que vous citiez des extraits de poèmes que vous connaissez. Quelques citations : – « Art poétique » de Verlaine : « Ô qui dira les torts de la Rime ! ». – Platon : « Le poète est chose légère, ailée… ». – Baudelaire : « qu’est-ce qu’un poète […] si ce n’est un traducteur, un déchiffreur ? ». – Proust : Grâce à la poésie, « le monde (qui n’a été créé qu’une fois, mais aussi souvent qu’un artiste original est survenu) nous apparaît entièrement différent de l’ancien mais parfaitement clair » (Le Côté de Guermantes, II, chap. 1, 1920). – Le poète mexicain Octavio Paz : « La création poétique est d’abord une violence faite au langage. Son premier acte est de déraciner les mots. Le poète les soustrait à leurs connexions et à leurs emplois habituels » (L’Arc et la Lyre). – Le poète Saint-John Perse : « Poète est celui-là qui rompt avec l’accoutumance ». – Le poète Théodore de Banville : « La poésie est à la fois Musique, Statuaire, Peinture, Éloquence ; elle doit charmer l’oreille, enchanter l’esprit, représenter les sons, imiter les couleurs, rendre les objets visibles, et exciter en nous les mouvements qu’il lui plaît d’y produire ; aussi est-ce le seul art complet, nécessaire, et qui contienne tous les autres » (Petit traité de poésie française). – Le poète Arthur Rimbaud : « Je dis qu’il faut être voyant, se faire voyant. / Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens » (« Lettre à Paul Demeny », 1871). • La forme, l’écriture – Ne composez pas votre texte comme une dissertation (connecteurs logiques, par exemple) mais « habillez » vos arguments en style journalistique. – Pour convaincre et persuader, utilisez des procédés rhétoriques : exclamations, anaphores, questions rhétoriques, images (vous êtes poète…) ; impliquez directement votre lecteur (mots mélioratifs, péjoratifs, 1re personne…). – N’oubliez pas de faire figurer le titre. Réussir l’écriture d’invention : voir guide méthodologique. La poésie, le poème en prose : voir lexique des notions. © Hatier 2007 70 S U J E T