Do It Yourself ! Autodétermination et culture punk
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Do It Yourself ! Autodétermination et culture punk
EN LIBRAIRIE le 7 juin 2012 un livre de Fabien Hein Do it yourself! Autodétermination et culture punk aux éditions le passager clandestin 128 pages et 16 photos 12 euros ISBN : 978-2-916952-70-3 En décembre 1976, le fanzine britannique Sideburns publie une illustration sous forme de tablatures présentant trois accords auxquels sont adjointes les explications suivantes : « Voici un accord, en voici un autre, en voilà un troisième, maintenant monte ton propre groupe ». Pas de grands discours : place à l’action. Dans un contexte de crise économique, d’avènement du néolibéralisme et de violence politique, l’idée d’autonomie s’impose sur le devant de la scène musicale anglo-saxonne à travers le mouvement punk : autodétermination de l’action et de la création, refus du leadership, développement de la coopération et partage des compétences, rejet des logiques capitalistes... Plutôt que « No Future », c’est l’expression « Do It Yourself » (« Fais le toi-même ») qui s’impose comme le mot d’ordre de la première vague punk. Il le restera jusqu’à aujourd’hui pour nombre de punks à travers le monde. Car davantage qu’un slogan, cette formule désigne un régime d’action propre et une invitation à l’autodétermination. Rejet du système, refus de toute autorité de toute tutelle, musicale y compris, tel est le leitmotiv des acteurs du DIY : « There is no authority but yourself » scande à la fin des années 1970 le groupe mythique Crass. Autodétermination, donc, et par conséquent autoproduction. « La pratique punk permet de construire, d’apprendre, d’expérimenter, de bricoler, de participer, de réfléchir, d’imaginer, de mobiliser, de rêver, de coopérer, de connecter, d’innover, de créer, etc. Ce faisant, la pratique punk exalte la conscience des individus. Elle accroît leur pouvoir. Elle les encourage à s’approprier leurs vies afin d’en tirer des possibilités d’existence nouvelles. La pratique punk suscite à la fois le désir et le plaisir de l’action. » Fabien Hein Dès janvier 1977, les Buzzcocks sortent le premier disque entièrement autoproduit du punk rock (Spiral Scratch). En six mois, grâce à un large réseau de disquaires indépendants, ils en écoulent plus de 16 000 exemplaires. « Le fort désir émancipateur du punk rock va se trouver expressément renforcé par la démarche des Buzzcocks. Puisqu’il est désormais possible de publier un disque par ses propres moyens, on peut donc y faire figurer exactement ce que l’on veut, comme on veut ». Création de nouveaux groupes, de labels, de fanzines, répétitions, dates de concerts… Éditions le passager clandestin 12, rue Saint-Bernard 75011 Paris www.lepassagerclandestin.fr Contact Presse Frédérique Giacomoni [email protected] 06 12 96 83 58 D I F F U S I O N P O L L E N Tél. 01 43 58 74 11 Fax 01 72 71 84 51 Le punk, éloge de l’action Le livre de Fabien Hein détaille les logiques artistiques, mais aussi politiques et économiques de cet impératif catégorique du punk rock. Il étudie les ressorts d’une dynamique foncièrement antisystème, mais aussi les contradictions et les circonstances de son échec. Il le fait à travers les parcours de nombreux acteurs majeurs du punk rock : des artistes (Ramones, Sex Pistols, Bad Brains, Profane existence, Riot Grrrls …), des fanzines (Sideburns, Sniffin’ Glue, Stains…) et des labels (New Hormones, Rough Trade, Crass Records, Dischord Records…). L’auteur montre ainsi que l’anticapitalisme punk, souvent présenté comme un rejet stérile, s’exprime pourtant aussi dans la mise en place d’un système de solidarité économique érigé en marché, et perçu par nombre de punks comme une alternative au marché capitaliste. Et de questionner la place de ce contre-marché : se dissout-il dans le capitalisme ou est-il à même d’imposer de nouveau régimes d’action et de création ? Est-il synonyme de contre-culture ou ne constitue-t-il qu’une étape nécessaire avant la signature de « gros contrats » et le ralliement aux majors ? Face à la pluralité des parcours, des démarches et des postures éthiques et musicales qui la compose, la scène punk rock développe très vite ses propres discours et ses propres pratiques : elle offre une place de choix et une tribune à des catégories sociales dominées (prolétaires, femmes, homosexuels, immigrés…). Elle développe aussi ses propres instances de consécration (dont l’autoritaire et tout puissant magazine MaximumRockNRoll constitue le plus bel exemple), dessinant un nouveau champ de possibles en même temps qu’elle impose une définition légitime de l’artiste punk, indépendant, autoproduit et affranchi des modes et du business. Le genre succombera pourtant aux sirènes de l’industrie musicale. Des premiers artistes « signés », dès 1977 (les Sex Pistols chez Virgin) jusqu’aux grandes tournées du merchandising punk des années 2000 (Vans, Converse…), en passant par le développement d’une iconologie punk prisée par la publicité (dont Iggy Pop et les Galeries Lafayette ne sont que le dernier avatar), tout se passe comme si la scène punk tout entière avait été retournée comme un gant par la main invisible du marché. De « Fuck the system ! », on est passé insensiblement à « Punk is the new cool ! ». « [Le punk] démystifie le processus de production culturelle en soulignant que désormais, chacun est en capacité de passer à l’acte. Ce qui constitue, à ce titre, une véritable incitation à l’action. De même qu’une opposition frontale à la passivité et à toute conception spectatrice de la culture. L’effet produit est d’autant plus remarquable qu’il ne touche pas uniquement la création artistique mais qu’il s’étend à l’ensemble de la chaîne de production culturelle : les maisons de disques, les structures de distribution, le marketing, la presse et les disquaires notamment.» Fabien Hein « Ce qui m’a plu dans le punk, ce que j’en ai compris, c’était vraiment ça : fais ton groupe, fais ton label, sois indépendant, arrête de consommer comme un idiot en ouvrant le bec et en gobant tout.» Loran, guitariste du groupe français Bérurier Noir « Le punk rock apparait en effet comme un pendant anglo-saxon, artistiquement parlant, de l’esprit de révolte qui traverse le monde occidental au même moment. Il en rejoue la plupart des dimensions, y compris – sur un mode euphémisé – celle de la violence. [C’est dans un] contexte de contestation généralisée que l’éruption punk rock prend forme. Un contexte où s’expriment les frustrations d’une frange de la jeunesse, le désir d’action et l’inclination à la violence de classes longtemps dominées. Où la rage et le désespoir se mêlent à une grande défiance vis-à-vis des institutions. Et de ce mélange explosif d’intense humeur libertaire, de désir profond de changement et de déchainement créatif inégalé naissent des formes inédites d’autodétermination et d’action artistique.» Fabien Hein « Avant le punk, les gens avaient peur de tenter quoi que ce soit – ils étaient tellement opprimés et étouffés. Tout ce qu’il fallait, c’est des gens qui disent : “Merde, essayez”. C’est aussi simple que ça.» Paul Cook, batteur des Sex Pistols « Si vous pensez pouvoir faire mieux, lancez votre propre activité.» Joe Strummer L’entreprenariat punk Pourtant, certaines radicalités punks, mieux armées que d’autres, sont parvenues à résister à ce mouvement général. Fabien Hein en distingue deux principales et non exclusives : une radicalité anarchiste et révolutionnaire, dont la principale figure est le groupe anglais Crass (anarcho-punk), l’autre plus pragmatiste et plus communautaire, représentée par les Américains Fugazi (Straight edge). Ces deux tendances adoptent des attitudes différentes face à la récupération par le système économique (les premiers préférant se saborder, tandis que les seconds parviennent, grâce à leur succès, à entretenir jusqu’à aujourd’hui le principe de l’autodétermination). Elles ont cependant en commun un certain « esprit punk », dont le développement de la participation et de la libre diffusion des savoir-faire – le DIY est ici un moyen et une fin, un outil d’émancipation collective –, la frugalité des moyens d’existence et de création, le fonctionnement au plus près de la valeur d’usage et l’exigence artistique sont quelques-uns des principaux traits. Véritables politiques en actes, ces expériences singulières se sont imposées comme des exemples à suivre pour tout un pan de la scène punk rock et au-delà. Puissante invitation à l’action, cette sociologie historique étudie la possibilité et les conditions de réalisation d’un devenir culturel et social indépendant des systèmes productifs dominants. De manière originale, dans une langue nerveuse et rythmée, Fabien Hein met en lumière une acception de la notion d’entreprise, non plus instrument de domination fondé sur la recherche du profit, mais outil d’émancipation tout entier tourné vers « l’accroissement de la puissance d’agir et d’exister ». Il montre comment le DIY ouvre aux individus tout un champ des possibles, et peut à ce titre contribuer à inverser le déséquilibre social, et constituer le support d’une mobilisation, où, à travers le partage du savoir et la participation à l’action collective, se dessineraient de nouvelles formes de solidarités et de justice sociale. Fabien Hein nous explique comment le punk met en œuvre un processus visant à produire des mutations de conscience, à infléchir des dispositions et, en suscitant la coopération, en mettant en commun les ressources et en plaçant l’indépendance au principe de l’action, à créer des expériences collective inédites qui se présentent comme autant d’espaces où peuvent se déployer des pratiques artistiques et des modes de vie partiellement affranchies des tutelles extérieures (« There is no authority but yourself » rappelait incessamment Crass). « La politique punk, à travers le DIY, est une politique en actes.» « La vulgate punk ne fait jamais que confirmer le passage d’une culture de la consommation à une culture de la participation. Elle souligne le plaisir de la participation à l’existence multiple mais indivisible du monde.» Fabien Hein « Pour moi, le punk a été le moyen d’échapper à un boulot très chiant dans une banque. Il m’a offert une chance de créer et de partager mes idées avec d’autres gens qui avaient l’air d’être sur la même longueur d’onde… j’ai cru que j’allais pouvoir changer le monde. On était en chemin ; on avait le temps ; on avait la clairvoyance.» Mark Perry, éditeur de Sniffin’ Glue « Être punk c’est en premier lieu avoir conscience de sa capacité à agir (sinon de devoir agir). » Fabien Hein « On n’est peut-être pas très loin, sur le plan économique, des présupposés actuels de la démarche dite « sociale et solidaire » : primauté de l’homme sur le capital, absence de buts lucratifs, mise au service de l’intérêt général et pratique de la délibération collective et démocratique. » Fabien Hein « Les valeurs et les pratiques sur lesquelles reposent les expériences de Crass et Crass Records ou Fugazi et Dischord Records, si elles ne sauraient évidemment s’abstraire totalement des règles du jeu de l’économie dans laquelle elles se déploient, ne visent pas moins à en proposer aussi souvent que possible, des définitions propres : la recherche de l’indépendance et l’autogestion plutôt que l’acceptation de la tutelle d’une grosse maison de disque, la coopération plutôt que la concurrence dans la fabrication des objets culturels, le libre partage des savoirfaire et une démarche participative plutôt que la quête personnelle du succès, la commercialisation au plus près de la valeur d’usage plutôt que la recherche du profit…. » Fabien Hein EN LIBRAIRIE le 7 juin 2012 Do it yourself! aux éditions le passager clandestin 128 pages et 16 photos 12 euros ISBN : 978-2-916952-70-3 Fabien Hein est maître de conférences à l’Université de Lorraine et chercheur au Laboratoire lorrain de Sciences Sociales (2L2S). Il a publié Ma petite entreprise punk. Sociologie du système D (Kicking Books, 2011). « Rimbaud [Crass] et MacKaye [Fugazi] ont amplement fait la démonstration qu’il était possible de vaincre l’impuissance au moyen du DIY. Ils ne changent certes pas le monde, mais ils parviennent tout au moins à inventer leur monde, c’est-à-dire un espace de pratiques et de valeurs partagées, partiellement indépendant de la société dans laquelle il s’inscrit. » Fabien Hein « We’re tired of living up to other people’s expectations when our own are so much higher » (« Nous en avons assez de vivre à la hauteur des espérances des autres alors que les nôtres sont tellement plus élevées »). Penny Rimbaud, Crass, « Yes, Sir, I Will » « Signer avec une major aurait été la plus stupide et la plus autodestructive des choses à faire. C’était comme si on nous avait demandé : “Voulez-vous sauter d’une falaise ?” Cela n’avait aucun sens pour nous ». Guy Picciotto, Fugazi « Les punks incarnent les espoirs du futur et révèlent les failles du passé. Ne leur dites pas ce qu’ils doivent faire. Ils ont déjà pris les devants » Greg Graffin, Bad Religion « On a également affaire à des fondateurs inventifs et déterminés d’expériences économiques et sociales singulières. Des entrepreneurs culturels dont les labels sont devenus des modèles pour les uns et des rampes de lancement pour d’autres. Des employeurs conscients de leurs responsabilités sociales. » Fabien Hein « Si l’expérience punk est une vitalité, alors le DIY est une intensité, qui consiste précisément à prendre les choses en main. Fermement. C’est ainsi que le punk rock peut être objectivement structurant. Il enrichit l’expérience immédiate de ses acteurs, stimule et vivifie leur créativité, les pousse à réaliser leurs potentiels. Il génère du lien, encourage l’autodidaxie et produit de la conscience en accroissant l’intensité de l’expérience. Lorsqu’il est vécu sur ce mode, le punk rock n’est sans doute rien moins qu’une expansion de la puissance d’agir et de vivre.» Fabien Hein Éditions le passager clandestin 12, rue Saint-Bernard 75011 Paris www.lepassagerclandestin.fr