Sujet :La complicité en Droit pénal Introduction Le Droit pénal est

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Sujet :La complicité en Droit pénal Introduction Le Droit pénal est
Sujet :La complicité en Droit pénal
Introduction
Le Droit pénal est comme ces mouvements célèbres que
chacun croit connaître sans jamais les voir visités.
Généralement, en évoquant l’idée de droit, certains ne pensent
qu’à cette seule branche. C'est qu’en réalité, le Droit pénal pose
des interdits fondamentaux qui sont la condition même de toute
vie en société, et en plus, les questions qui y sont abordées
n’intéressent pas que les juristes. Enfin, cette familiarité avec le
Droit pénal s’explique par que son application est plus
spectaculaire que celle des autres branches du droit. Mais il
reste que cette connaissance approximative est parfois pire que
l’ignorance et peut conduire à de graves erreurs d’application. Il
faut donc avant tout cerner cette notion.
Le Droit pénal est généralement défini comme
« l’ensemble des règles qui organisent la réaction de l’Etat visà-vis des infractions des délinquants »1 ou comme « le droit de
l’infraction et de la réaction sociale qu’elle engendre »2, ou
encore comme l’ensemble de moyens juridiques qui
réglementent le recours de l’Etat à la sanction pénale. Mais une
définition plus étroite retient que le Droit pénal est l’ensemble
des règles ayant pour but de déterminer les actes antisociaux,
de désigner les personnes pouvant en être responsables, et de
fixer les peines qui leur sont applicables. De cette définition, il
ressort trois grandes idées à savoir : la loi pénale, la
responsabilité pénale et les peines. Ainsi, après s’être demandé
s’il existe un texte régulièrement applicable aux faits qui lui
sont soumis, le juge cherchera si la personne qui lui est déférée
est responsable, avant de lui appliquer une peine. Notre sujet
nous situe au cœur de la deuxième étape qui est relative à la
responsabilité.
1 Merles et Vitu, Droit pénal général.
2 Jean Pradel, Droit pénal général, 10e éd., Cujas 1995.
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La responsabilité pénale a pour objet la détermination des
personnes pouvant être déclarées responsables d’une violation
de la loi pénale, et donc passible d’une peine. Ainsi, le Droit
pénal distingue, à côté de l’auteur et des coauteurs de
l’infraction qui ont en quelque sorte agi au premier plan, les
complices dont le rôle est moins apparent, et par là même, a
priori, moins important. Le complice est parfois défini
négativement comme celui qui n’a pas commis les éléments
matériels et intellectuels de l’infraction tel que défini par la loi
ou le règlement, mais qui a toutefois participé dans certaines
conditions à la commission de celle-ci. Par ailleurs, le Lexique
des termes juridiques de Raymond Gullien et Jean Vincent
définit la complicité comme étant la situation de celui qui, par
aide ou assistance, facilite la préparation ou la consommation
d’une infraction sans en réaliser lui-même les éléments
constitutifs, ou encore qui provoque une infraction ou donne
des instructions pour la commettre3. De cette définition, on note
que la complicité a un rôle secondaire, mais qui, dans la réalité,
peut être déterminant dans la commission de l’infraction. On se
demande donc s’il faut réserver un sort particulier par rapport à
l’auteur ou au coauteur. Il est donc important, pour mieux
cerner le problème, de faire une distinction entre la complicité
et les notions voisines.
En premier lieu, la complicité doit être distinguée de la
coaction. Ce dernier concept désigne la participation à une
infraction de manière déterminante et nécessaire qui donne lieu
à une poursuite de l’agent comme coauteur dans les mêmes
conditions que les auteurs. En deuxième lieu, la complicité se
distingue du recel. En effet, tandis que l’intervention du
complice est par principe4 antérieure ou concomitante à la
consommation de l’infraction, le recel n’intervient qu’après la
consommation de l’infraction et pour poser des actes
limitativement énumérés par le législateur5. Enfin, le complice
est distinct du comparse. Le comparse en effet est celui qui a
3 Cette définition, à quelques nuances près, se retrouve dans les Code pénal camerounais
à l’article 97.
4 La complicité pourra intervenir après l’infraction lorsqu’il y a eu entente avec l’auteur
avant la commission de l’infraction.
5 Article 100 du Code pénal.
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participé à un crime ou à un délit sous une forme qui ne se
retrouve pas dans celles limitativement énumérées par le
législateur. Sa participation demeure donc hors du spectre de la
loi.
Au vu de ces développements, il convient, afin de lever
tout équivoque sur la notion de complicité en Droit pénal,
d’étudier son régime juridique. Ainsi, on admet que, pour
réprimer la complicité (II), il faut préalablement l’incriminer (I).
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I.
L’incrimination à la complicité
La complicité est accessoire à une infraction principale, par
conséquent, son établissement dépend au préalable de
l’existence d’une infraction principale (A) avant que l’existence
d’un acte de complicité en propre soit démontrée (B).
A.
L’existence d’une infraction principale : préalable à
toute forme de complicité
La complicité est subordonnée à une incrimination
principale (1), peu importe qu’elle soit ou pas réprimée (2).
1.
Nécessité d’incrimination principale
Le préalable d’une incrimination principale comme
condition à la complicité s’explique par la théorie de l’emprunt
de criminalité. Selon cette théorie, le complice emprunte sa
criminalité de l’auteur de l’infraction principale. Par conséquent,
un individu ne peut être poursuivi comme complice que si une
infraction a d’abord été commise. L’on dira à cet effet que le
complice et l’auteur sont : « cousu dans le même sac »6. Il faut
savoir dans ce sens que les divers actes de complicité que la loi
énumère ne sont pas en eux-mêmes des actes illicites, c'est
l’infraction principale à laquelle ils sont accessoires qui les rend
illicites. Par exemple, prêter une voiture à quelqu’un ne devient
un acte de complicité, donc illicite, que si cette voiture a été
prêtée dans le but de commettre un vol. Dans le même sens, il
n’y a pas de complicité si le fait principal n’est qu’un acte
préparatoire, qu’une tentative que la loi ne punit pas ou si le
fait principal a été amnistié.
6 Jean Carbonnier, Du sens de la répression applicable aux complices selon l’article 59 du
Code pénal », J.C.P, 1952, p. 1034.
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Le fondement de cette théorie est non seulement le rejet
de l’idée selon laquelle le complice est l’auteur d’une infraction
autonome, mais aussi l’idée selon laquelle il y aurait autant
d’infractions que de participants. La logique poursuivie ici est
celle d’unité d’infraction et de diversité de participants à celleci.
La théorie de l’emprunt de criminalité se manifeste en
droit positif de deux manières : premièrement, la complicité et
le fait principal ont la même qualification : exemple, le meurtre
et la complicité de meurtre ; deuxièmement, la complicité n’est
punissable que si le fait principal est une infraction : par
exemple, on ne peut parler de complicité de suicide, le suicide
n’étant pas une infraction.
La théorie de l’emprunt de criminalité a le mérite de
permettre la répression de l’auteur intellectuel ou complice
d’une infraction. En effet, le complice, sans avoir
personnellement commis l’infraction principale l’a tout de
même voulue, et par cela l’a faite sienne. Dans le même ordre
d’idées, il est bien que le complice soit puni en ce sens que sur
le plan matériel, celui-ci est quand même aussi à l’origine de la
survenance de l’infraction principale, surtout si l’on se place
sous l’angle de la théorie de l’équivalence de conditions.
Néanmoins, le mérite de la théorie n’a pas empêché
qu’elle essuie des critiques acerbes. Ces critiques sont basées
sur le résultat poursuivi par la théorie, à savoir la répression du
complice. En réalité, l’on se rend compte qu’en appliquant cette
théorie, l’on aboutit souvent à un résultat contraire, c'est-à-dire
la relaxe, voire l’immunité du complice qui, pourtant, a
manifesté son caractère dangereux. Il s’agit par exemple des
cas d’une tentative non punissable et d’une infraction
amnistiée. Dans le premier cas, le complice ne peut être
poursuivi, puisque l’infraction n’a pas été réalisée. Dans le
second cas, la criminalité de l’infraction principale a été effacée
et, automatiquement, celle du complice. Dans le cas d’espèce,
la criminalité du complice est effectivement manifeste, mais la
théorie de l’emprunt de criminalité, malheureusement,
l’immunise injustement.
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C'est pourquoi la jurisprudence et la loi ont parfois écarté
l’application de cette théorie. La jurisprudence, lorsque le fait
principal échappe à la réalisation pour une raison personnelle
de l’auteur principal (mort, démence, minorité…), punit toujours
le complice. Il s’agit par exemple d’un adulte qui incite un
enfant de 7 ans à commettre un vol. Celui-ci sera bien poursuivi
en tant que complice du vol. Pour ce qui est de la loi, elle érige
dans certains cas un acte de complicité en infraction autonome,
donc indépendamment de l’existence d’un fait principal
punissable. C'est le cas en France de la provocation au suicide.
Tout compte fait, malgré les critiques, ce système reste
appliqué au Cameroun et en France.
Cela
étant,
l’infraction
principale
nécessaire
à
l’établissement de la complicité doit retenir l’attention par la
nature. Pour cela, il faut distinguer selon que cette infraction est
un crime, un délit ou une contravention. La complicité est
toujours punissable pour une infraction qualifiée de crime ou de
délit. En Droit pénal camerounais, la complicité en matière
contraventionnelle est totalement exclue. En droit français
néanmoins, il est des cas où la complicité en matière
contraventionnelle est punissable. En ce sens, la complicité par
instigation est toujours réprimée, même en l’absence de texte 7,
tandis que la complicité par aide ou assistance est punie à titre
autonome, par exemple faciliter sciemment par aide ou
assistance la préparation ou la consommation de violences de
5e classe est réprimée. Dans le cas d’espèce, on parle d’auteur
au lieu de complice, puisque c’est une infraction à part entière.
Le crime, le délit voire la contravention, dans certains cas
établis, il importe peu que ceux-ci soient effectivement punis
pour que la complicité soit retenue.
2.
L’indifférence quant
l’infraction principale
à
la
répression
effective
de
7 Article 121-7 alinéa 2 et R. 610-2 Code pénal français.
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L’acte de complicité dépend de l’acte principal constitutif
d’une infraction et non de l’auteur de cette infraction. C'est
pourquoi le complice est puni même si l’auteur n’a pas, pour
des circonstances liées à sa personne, purgé sa peine. Ainsi, si
l’auteur n’a pas été poursuivi pour une circonstance de fait, par
exemple la fuite de l’auteur ; ou une circonstance de droit, par
exemple l’amnistie à titre personnel, le complice pourra
néanmoins être poursuivi8. La condamnation du complice
nécessite en quand même que le juge établisse l’existence
matériel du fait principal en respect au principe d’emprunt de
criminalité9.
De même, si l’auteur de l’infraction principale a bénéficié
d’une décision de non-lieu ou de relaxe fondée sur une cause
personnelle telle la démence, le complice reste punissable. Il
s’agit également du cas où l’auteur est relaxé pour défaut
d’éléments intentionnels, le complice de cette infraction
involontaire pourra être condamné. Par exemple, un individu qui
fait transporter à l’autre la cocaïne sans que celui qui la
transporte ne soit au courant. Ici, l’accent est mis sur l’élément
matériel seul. Parfois, l’accent est mis à la fois sur les éléments
matériel et intentionnel. Mais toutefois, dans l’objectif de punir
le complice qui, en l’espèce, garde sa criminalité, la solution qui
le condamne nonobstant, l’élément intentionnel est louable,
d’autant plus que c'est la matérialité d’infraction qui plus
importante pour établir la complicité et non l’élément moral qui
est rattaché à l’auteur.
Dans le même ordre d’idées, il est un cas exceptionnel qui
consiste à poursuivre le complice même si l’auteur a bénéficié
d’un non-lieu ou d’une relaxe sur l’inexistence du fait principal.
En effet, en l’espèce, des juges distinguent selon que le
complice et l’auteur on fait ou non l’objet d’une même
poursuite. Dans le premier cas, le complice sera relaxé,
l’emprunt de criminalité jouant de plein droit en sa faveur. Dans
le second cas au contraire, le complice pourra être poursuivi à
cause de l’effet relatif de la chose jugée au pénal sur le pénal
8 Crim. 12 mai 1970, B.C. n° 158, répression du complice alors que l’auteur est resté
inconnu ; 28 mai 1990 ; B.C., n0 2114, alors que l’auteur n’a pu encore être poursuivi.
9 Crim., 2 juillet 1958, B.C. n° 513.
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(l’exigence de l’identité des parties) et de la volonté des juges à
ne pas laisser les complices impunis.
Eu égard à tout ceci, l’on peut dire que l’infraction
principale n’a pas à être effectivement punie, mais plutôt
objectivement punissable. Cela veut dire que le fait principal
doit faire l’objet de sanctions concrètes.
Par conséquent, cela implique que la répression du
complice est impossible dans le cas d’un fait principal prescrit,
effacé par voie d’amnistie réelle, ou justifié 10. Dans le même
sens, en cas de tentative non punissable, c'est-à-dire lorsque
l’auteur a volontairement désisté à la commission de
l’infraction, le complice n'est pas punissable. Cela a été le cas
dans l’affaire de Lacour où, en l’espèce, un individu a passé un
contrat pour que son contractant assassine une personne, ce
dernier n’exécuta pas, de sa propre initiative, la sale besogne.
La complicité du commanditaire de l’assassinat ne fut pas
retenu, motif pris qu’il n’existait pas un fait principal
punissable11. Seulement, dans le cas de « l’assassinat sur
contrat », la jurisprudence et la loi ont trouvé des palliatifs à
cette impunité du commanditaire de l’assassinat. Ainsi, les
juges répriment ce dernier en faisant appel au délit
d’association de malfaiteurs, pourvu encore que les faits
constitutifs de cette infraction soient établis. Le législateur
français a prévu dans ce cas spécifique des infractions
autonomes qui permettent de poursuivre le commanditaire. Il
s’agit par exemple de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1981 sur
la liberté de la presse qui punit ceux qui, par certains moyens
énumérés, « auront directement provoqué, dans le cas où cette
provocation n’aurait pas été suivi d’effet, à commettre l’une
des infractions suivantes : 1° les atteintes volontaires à la vie
… ».
En outre, cela implique que l’acte de complicité d’une
infraction principale réalisée à l’étranger ne soit pas punissable
en vertu du principe de territorialité. L’infraction principale
10 Crim., 17 février 1981.
11 Crim., 25 octobre 1962.
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n’étant pas susceptible d’être réprimée sur le territoire national,
il serait illogique que le complice de cette infraction, même si la
complicité est réalisée sur le territoire national, puisse y être
poursuivi, puisque la complicité est subordonnée au fait
principal. Pour y remédier, la législation camerounaise exige
que l’infraction12 principale soit punissable au Cameroun et à
l’étranger.
En fin de compte, la condition préalable à l’incrimination
de la complicité est l’existence d’une infraction principale
susceptible d’être réprimée. La deuxième, non moins
importante, est l’existence d’un acte de complicité.
B.
L’existence d’un acte de complicité
Il résulte de l’article 87 du Code pénal camerounais que
l’acte de complicité comporte comme tout acte infractionnel, à
la fois un élément matériel (1) et un élément moral (2).
1.
L’élément matériel de la complicité
L’élément matériel de la complicité se résume en la
participation par l’un des cas de complicité à la commission
d’une infraction. Il est décrit dans notre droit, dans l’article 97
du Code pénal qui nous permet de savoir en quoi consiste
matériellement la complicité, quels sont les modes de la
complicité, ce qu’elle est en elle-même. Il ressort de ce texte
que le complice est celui qui accomplit l’un des actes visés à
l’article 97, à savoir la provocation, l’instruction, l’aide. Il
importe de préciser que, tout d’abord, la liste de l’article précité
est limitative, en conséquence, toute participation qui ne serait
pas comprise dans l’un des cas visés par ce texte ferait de son
auteur un simple comparse.
12 Article 9 (b) Code pénal camerounais.
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Ensuite, il est important de souligner que l’article 97 reste
imprécis et aux contours flous. Nécessité s’impose donc au
législateur pénal de le revoir plus minutieusement.
L’analyse de l’élément matériel de la complicité soulève
un problème important à savoir celui de la complicité par
abstention.
Dans le principe, il n’y a pas de complicité par abstention.
De ce fait, celui qui assiste passivement à la commission d’une
infraction n'est pas le complice : Crim. 30 novembre 1810.
Cette conception est illustrée par l’article 5 de la Déclaration
des Droits de l'Homme qui décide que : « La loi n’a le droit de
défendre que des actions nuisibles à la société… » mais, de nos
jours, ce point de vue connaît un recul certain. La complicité est
punissable lorsqu’il s’agit de fausses abstentions. L’exemple
caractéristique est le cas où le prévenu, par sa seule présence,
apporte une caution morale ou un encouragement à l’auteur
principal : le cas d’un amant qui assiste sa maîtresse pendant
l’avortement : Crim., 5 novembre 1941.
Au-delà de la complicité par abstention, l’étude de
l’élément matériel et la complicité soulève le problème de la
périodicité de l’acte de complicité. En fait, à quel moment de la
commission de l’infraction l’acte d’un tiers peut être qualifié
d’acte de complicité ? Ici, les réponses sont quasi-identiques au
sein de la doctrine. L’acte de complicité doit être antérieur ou
concomitant à l’infraction. Il n’y a pas de complicité postérieure
à l’infraction. L’aide ou assistance doit en effet avoir été fournie
soit au stade des actes préparatoires, soit au stade du
commencement d’exécution, soit enfin pendant l’exécution.
Cette règle découle du principe même de la criminalité
d’emprunt.
En gros, l’élément matériel de la complicité suppose un
acte positif, exceptionnellement une abstention antérieure,
concomitante à la commission de l’infraction. Cet acte doit être
posé en connaissance de cause.
2.
L’élément intellectuel de la complicité
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C'est la participation du complice en connaissance de
cause à l’infraction principale. Le complice doit avoir voulu
favoriser l’infraction, de ce fait, une négligence ne suffit. Cela
suppose une bonne maîtrise du résultat de l’infraction rejeté de
la part du complice. Ce denier doit intentionnellement poser son
acte, ce qui exclut de la liste des complices le banquier qui
subit les actes de violence pour l’ouverture du coffre fort de la
banque.
L’étude de cet élément moral soulève une multitude de
problèmes. D’abord, il se pose le problème du repentir du
complice avant la commission de l’infraction. Si le complice,
après avoir fourni son aide se retire et ne dénonce pas l’auteur
principal avant la commission de l’infraction, il reste punissable,
mais ne l’est pas s’il dénonce ce dernier, soit aux autorités, soit
en informant la victime : ce qu’on appelle le repentir actif. Le
repentir n’est pas à confondre avec le remord qui est toujours
tardif. Cependant, le repentir soulève le problème de la
tentative de complicité. En Droit pénal camerounais, l’alinéa 2
de l’article 97 du Code pénal précise que la tentative de
complicité est considérée comme la complicité elle même.
Autrement dit, elle est punissable. Sur ce point, nécessité de
précision s’impose au législateur. Quant au Droit français, la
nuance faite sur ce point est correcte. La tentative de
complicité n'est pas punissable en l’absence de fait principal
punissable.
Le second problème soulevé est celui de la discordance
entre l’infraction envisagée et l’infraction commise. Soulignons
que l’infraction commise diffère de l’infraction rejetée quand
l’auteur est allé au-delà des prévisions du complice. Dans ce
cas, le complice est-il punissable ? La réponse reste nuancée au
sein de la doctrine.
D’abord, pour le Professeur Jean Pradel, si la différence
entre les deux infractions tient à leurs éléments constitutifs, et
si, par conséquence, les valeurs sociales protégées ne sont pas
les mêmes, la complicité n'est pas punissable : Crim., 13 janvier
1955, affaire Nikolaï.
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Ensuite, si les deux infractions diffèrent uniquement par
leurs circonstances, l’une seule comportant une circonstance
aggravante, le complice supporte l’aggravation.
Bien plus, si l’infraction commise est différente de
l’infraction de projeter soit l’identité de la victime, soit alors, par
les modes d’exécution de l’infraction, le complice reste impuni.
Grosso modo, il ressort d’après nos analyses que les
éléments constitutifs de la complicité vont de l’exigence d’une
infraction principale punissable à l’exigence d’un acte de
complicité antérieur ou concomitant à l’infraction mère. La nonexistence d’un seul de ces éléments empêche qu’on parle de
complicité. Mais si ces différentes conditions sont observées, la
complicité existe et reste réprimée par la loi.
II.
La répression de la complicité
En la matière, deux thèses s’affrontent : celle de l’emprunt
de pénalité et celle de l’assimilation du complice à l’auteur
principal. Entre ces deux thèses, le législateur camerounais a
opté pour la première (A) qui n'est pourtant pas à l’abri des
critiques (B).
A.
Le système de l’emprunt de pénalité
Relativement à ce système, le complice sera passible de la
même peine que l’auteur principal. La notion de « même
peine » mérite qu’on s’y attarde (1). Par ailleurs, cette thèse
pose le problème de l’incidence des circonstances modifiant la
peine initialement prévue (2).
1.
La notion de même peine
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Aux termes de l’article 98 du Code pénal, les coauteurs et
complices sont passibles de la même peine que l’auteur
principal. Ainsi, le complice qui prête une arme au meurtrier en
sachant l’usage qu’il va en faire est passible des mêmes peines
que le meurtrier lui-même. Cela veut dire qu’il doit y avoir
égalité de droit au point de vue des pénalités applicables à l’un
et à l’autre. En d’autres termes, le complice est passible d’une
peine de même nature et de même taux maximum et minimum
que celle prévue par la loi pour le fait principal.
Cette égalité dans les pénalités applicables au complice et
à l’auteur s’étend, non seulement aux peines principales, mais
aussi aux peines accessoires ou complémentaires. Mais, des lois
spéciales prévoient parfois des peines principales différentes
pour l’auteur et pour le complice. Cet état de chose trouve son
fondement dans la formule in fine de l’article 98, alinéa 1 er qui
prévoit : « … sauf dans les cas où la loi en dispose autrement ».
Le juge devra donc avoir à l’esprit le souci d’appliquer le
principe de l’individualisation de la peine.
2.
L’incidence des circonstances personnelles et réelles sur
la peine encourue
Les circonstances personnelles sont celles qui ne
concernent que la qualité de l’agent, par exemple, le récidiviste.
Aux termes de l’article 98, alinéa 2, ces circonstances non
d’effet qu’à l’égard de l’auteur ou du complice en la personne
de qui elles se retrouvent, qu’elles aient eu pour effet
d’exonérer, d’exempter, d’atténuer ou d’aggraver la peine du
délinquant. Ainsi, en cas de meurtre, si la victime est le père
soit de l’auteur principal, soit du complice, seul le fils est
passible de la peine de mort, bien que les coauteurs ou
complices aient eu la connaissance de cette circonstance.
Pour ce qui est des circonstances objectives ou réelles, ce
sont celles qui concernent la matérialité de l’acte. Ces
circonstances n’ont d’effet à l’égard du complice que s’il
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pouvait les prévoir. Ainsi, en cas de vol à mains armées, tout
complice qui a pu connaître l’existence de l’arme est passible
de l’aggravation de peine quel que soit celui qui détenait
effectivement l’arme. De même, dans le cas de l’aggravation en
raison de la minorité de la victime, tous ceux qui auraient pu
connaître son âge sont passibles de l’aggravation, cette
circonstance étant certes personnelle à l’égard de la victime,
mais réelle à l’égard des coupables.
S’agissant enfin des circonstances mixtes, ce sont celles
qui concernent à la fois la personne et l’acte. Procédant de la
personne de l’auteur, elles touchent à l’infraction principale
elle-même. Ces circonstances modifient légalement la pénalité
applicable à l’auteur et au complice.
Le système de l’emprunt de pénalité ainsi présenté mérite
d’être apprécié.
B.
La critique du système de l’emprunt de pénalité
Il est nécessaire de le rappeler, le système de l’emprunt de
pénalité postule que les complices encourent les mêmes peines
que les auteurs principaux. Ce principe connaît des critiques à
cause des inconvénients qui découlent de son application (1).
C’est pourquoi on propose son abandon pour aller vers le
système de l’assimilation du complice à l’auteur principal (2).
1.
Les inconvénients de ce système
L’application de la théorie de l’emprunt de pénalité recèle
des difficultés à plusieurs niveaux.
D’abord, lorsqu’il existe des causes d’aggravation, de
diminution de peines ou d’irresponsabilité, le législateur a
essayé de tempérer ces difficultés en distinguant les
circonstances réelles et celles personnelles. Malgré cet effort,
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des difficultés subsistent, et le système aboutit à des
incohérences. Par exemple, celui qui est complice de meurtre
de son père ne sera pas condamné pour parricide, mais comme
complice d’un meurtre simple. Le système ne permet donc pas
de punir équitablement ces personnes qui, du point de vue
criminologique, sont parfois plus dangereuses que les auteurs,
et mériteraient d’être sanctionnés avec plus d’énergie.
Ensuite, il est difficile d’appliquer ce système à la
complicité des personnes morales. On sait que de telles
personnes peuvent être complices de personnes physiques et
vice versa. Or, elles encourent des peines spécifiques distinctes
de celles applicables aux personnes physiques. Il serait illogique
de dire en pareil cas que le complice est passible de la même
peine que l’auteur principal.
Enfin, en tenant compte du principe du caractère
individuel de la responsabilité pénale selon lequel nul n'est
pénalement responsable que de son propre fait, il est de bon
ton que la mesure de la répression de la complicité soit
déterminée en considérant la personne du complice et non pas
celle de l’auteur principal.
C'est sans doute au vu de ces inconvénients que le
législateur français a évolué vers le système de l’assimilation
du complice à l’auteur principal.
2.
Vers l’assimilation du complice à l’auteur principal
Selon le nouvel article 121-6 du Code pénal français :
« Sera puni comme auteur le complice de l’infraction ». Cette
formule signifie que le complice sera puni comme s’il était luimême l’auteur principal de l’infraction. Dans l’application de ce
principe, il apparaît que les circonstances aggravantes liées à la
personne de l’auteur principal n’aggravent pas la peine du
complice. Il n'est donc plus opportun de distinguer entre
circonstances personnelles et circonstances mixtes, puisque les
conséquences sont désormais les mêmes.
Ainsi, le complice d’un parricide sera puni comme s’il avait
lui-même commis le forfait, et donc pour meurtre simple, sans
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qu’on puisse lui appliquer l’aggravation résultant du meurtre
commis sur un ascendant. Par contre, le complice pourra voir sa
peine aggravée par des circonstances qui lui sont personnelles
et qui ne concernent pas l’auteur principal. Ainsi, le fils qui fait
tuer son père sera condamné pour parricide. Ce système
permet donc une répression plus équitable et plus cohérente
que celui applicable dans notre pays. Mais ce système recèle
quelques difficultés.
En effet, l’application de ce système est complexe dans
l’hypothèse de la personne complice d’une infraction qu’elle ne
peut juridiquement commettre en tant qu’auteur principal. Le
cas du viol est très éclairant à cet effet. En réalité, la définition
restrictive de ce crime n’envisage pas sa punition par une
femme. Mais il est certain que la complicité d’un viol est
passible de la même peine que l’auteur principal. Or, dans ce
système, le complice étant passible des peines qu’il aurait
encourues s’il avait été l’auteur principal, des problèmes
peuvent survenir lorsqu’une telle infraction nécessite une
pénalité particulière qui n’est pas présente par le complice. La
difficulté apparaît dans les infractions qui ne peuvent être
commises entre autres que par des fonctionnaires. Mais,
l’ampleur de cette difficulté peut être atténuée en considérant
que certaines de ces infractions peuvent être considérées
comme des circonstances aggravantes des infractions
commises par des particuliers.
Il faudrait donc éviter de penser que la répression de la
complicité de certaines infractions serait impossible dans un tel
système. On devrait donc considérer que la seule conséquence
qui découle de cette nouvelle règle est la non-applicabilité au
complice d’éventuelles circonstances aggravantes liées à la
qualité de l’auteur principal. Dans un tel système, il faudrait
toujours considérer qu’aucune exception au caractère général
de la complicité « ne saurait résulter du fait que le délit
principal ne peut être commis que par des personnes
déterminées », et que la circonstance, que la qualité
personnelle de l’’auteur de l’infraction est un élément
constitutif et nécessaire de celle-ci n’exclut en rien la complicité
des tiers13.
13 Crim., 13 mars 1936, B.C. n° 33.
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Conclusion
Parvenus au terme notre analyse autour de la complicité
en droit pénal, il apparaît que son régime juridique est fondé sur
deux règles principales, à savoir celle de la criminalité
d’emprunt au niveau de l’incrimination de la complicité, et celle
de la pénalité d’emprunt lorsqu’on est au stade de la
répression.
Si la première règle, bien que critiquée, demeure
appliquée dans plusieurs systèmes juridiques, le second a déjà
été remplacé dans certains systèmes à l’instar du système
français, par celle de l’assimilation du complice à l’auteur
principal. Mais ce dernier système recèle des inconvénients, si
bien que nous proposerons que le législateur camerounais opte
pour le système de l’assimilation comme principe, le système
de l’emprunt de pénalité devant suivre dans les hypothèses où,
de par la typologie de l’infraction, le complice ne pourra pas
logiquement être l’auteur de l’infraction.
Ainsi espérons-nous que l’impératif d’une répression
équitable du complice tant recherché par le corps social, sera
atteint.
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