Le rapport

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Le rapport
Rapport_FT_Version finale_150610
RAPPORT DE FIN D’ENQUETE
2010
Fit-testing quantitatif des
masques de protection
respiratoire FFP2 chez les
soignants
GERES
Université Paris Diderot Paris 7 – UFR de Médecine site Bichat
16, rue Henri Huchard – 75890 PARIS Cedex 18
Tél. : 01 57 27 78 70 – Fax : 01 57 27 77 01
Site Internet : www.geres.org – E-mail : [email protected]
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
COORDINATION
Elisabeth BOUVET, GH Bichat – Claude Bernard, GERES
COMITE DE PILOTAGE
Elisabeth BOUVET, GH Bichat – Claude Bernard, GERES
Dominique ABITEBOUL, GH Bichat – Claude Bernard, GERES
Gérard PELLISSIER, GERES
Céline CIOTTI, GERES
Frank AJUELOS, 3M
Laurent HUBERT, TSI
Jean-Christophe LUCET, GH Bichat – Claude Bernard
REMERCIEMENTS
Nos remerciements vont tout particulièrement :
-
aux établissements participants, ainsi qu’aux coordinateurs et aux volontaires dans ces
établissements, pour leur investissement dans l’étude.
-
aux société TSI et 3M pour le prêt du compteur et du générateur de particules.
-
les sociétés 3M, Ansell, JSP, Molnlycke, Polysem-Groupe Didactic, pour avoir fourni les
masques nécessaires à l’étude.
-
aux membres du comité de pilotage pour leur travail lors de la mise en place de l’enquête.
-
à la DGS pour son soutien financier.
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
SOMMAIRE
RATIONNEL
1
OBJECTIFS
2
METHODES
2
Type d’étude
2
Population
3
Masques testés
3
Classification des masques
3
Taille de l’échantillon
3
Tests complémentaires
4
Conduite des tests
4
Reproductibilité des tests
5
Questionnaire de recueil des données
6
Conduite de l’étude
6
Confidentialité
6
Calendrier
7
RESULTATS
8
Données générales
8
Fit-test
8
DISCUSSION
12
CONCLUSION
15
BIBLIOGRAPHIE
16
ANNEXES
17
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
RATIONNEL
Plusieurs formes de masques de protection respiratoire coexistent sur le marché et ne s’adaptent pas
de la même manière à tous les types de visages. Si le masque n’est pas étanche, même avec le plus
haut niveau de protection existant, l’efficacité de ce dernier contre les aérosols est remise en
question.
Une étude conduite au CHU St Pierre à Bruxelles montre que 33% du personnel n’est pas
correctement protégé par le masque utilisé dans l’établissement1, après formation des personnels
aux bonnes pratiques de port de masques. La première enquête du GERES sur les masques de
protection respiratoire2 a montré qu’un quart des soignants ne sont pas protégés avec le modèle de
masque disponible dans l’établissement.
Les données de ces deux études montrent qu’en raison de la diversité des morphologies des visages
des personnels des établissements de santé, un seul type de masques de protection respiratoire dans
ces établissements ne suffit pas à protéger correctement l’ensemble du personnel. C’est pourquoi il
est important de considérer les différentes morphologies de visage et les formes des masques de
protection respiratoire dans le choix de ces derniers.
Ces deux enquêtes ont utilisé des tests différents : le fit-test dans la première et le fit-check dans la
seconde.
Le fit-check – en l’absence de fuite, à l’inspiration forcée, avec une feuille plastique ou les mains en
coquille sur le masque, le masque se plaque légèrement sur le visage – est un test qualitatif,
dépendant de la capacité à réaliser une inspiration forcée et de la volonté à inspirer fort à travers un
masque. Il permet de vérifier l’ajustement du masque à chaque port, mais son appréciation peut être
subjective.
Pour aller plus loin dans les résultats de sa première enquête, le GERES a décidé de tester
l’étanchéité des masques de protection respiratoire sur le terrain, c’est-à-dire chez des soignants qui
portent régulièrement un masque et ont des physionomies différentes, à l’aide d’un test objectif,
quantitatif et éprouvé tel que le fit-test.
Le fit-test est un mode opératoire qui permet d’évaluer l’étanchéité d’un masque de protection
respiratoire sur un individu de manière :
-
qualitative : test basé sur la perception du goût sucré ou amer à travers le masque pendant la
réalisation de quelques exercices. Toute fuite au niveau du visage se manifeste par la
perception du goût ;
1
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
-
ou quantitative : test consistant en la mesure de la concentration en particules à l’intérieur et
à l’extérieur du masque pendant la réalisation de quelques exercices. Toute fuite au niveau
du visage se traduit par une augmentation de la concentration en particules à l’intérieur du
masque.
Le fit-test permet d’évaluer quel masque est le mieux adapté à quelle morphologie et a un rôle
formateur vis-à-vis du bon ajustement des masques de protection respiratoire. Ces tests sont
obligatoires ou fortement recommandés aux Etats-Unis et en Grande Bretagne, à la fois dans le
milieu industriel et hospitalier. En Europe, la réalisation de fit-Test est recommandée depuis 2006
par la norme EN 529 : « Recommandations pour le choix, l’utilisation, l’entretien et la maintenance
d’un APR (Appareil de Protection Respiratoire) ». Mais peu d’établissements de santé, voire aucun,
a connaissance de cette recommandation et pratique ces tests.
OBJECTIFS
-
Evaluer l’étanchéité des masques de protection respiratoire FFP2 sur le terrain en mesurant
la concentration particulaire à l’intérieur et à l’extérieur du masque.
-
Évaluer si dans les établissements de santé, les soignants sont tous protégés avec le seul type
de masque de protection respiratoire disponible dans l’établissement, et si non, tester chez
ces soignants différents masques de protection respiratoire de formes différentes.
-
Evaluer l’impact de la formation à la bonne mise en place du masque sur l’étanchéité de ce
dernier.
METHODES
Type d’étude
L’étude, est une étude multicentrique, qui s’est déroulée dans les trois centres suivants :
-
le GH Bichat – Claude Bernard (Paris XVIIIème),
-
le GH de La Pitié – Salpêtrière (Paris XIII ème),
-
le CM de Bligny, (Briis sous Forges).
2
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Population
Le personnel a été recruté sur la base du volontariat dans les services où le port de masques de
protection respiratoire est une pratique courante (maladies infectieuses, pneumologie, sanatorium),
le but de cette étude n’étant pas d’évaluer si les soignants savent mettre un masque de protection
respiratoire, mais de vérifier l’étanchéité des masques de protection respiratoire quand ils sont
correctement ajustés au visage.
Masques testés
9 masques de protection respiratoire FFP2 ont été testés. Ces masques sont les plus répandus sur le
marché et dans les stocks « Pandémie grippale », selon la précédente enquête du GERES2. Il s’agit
des masques 3M, Euromedis, JSP Martcare, Kimberly-Clark PFR P2 62408, Molnlycke, Sup-Air,
Venitex et Willson 4000. Le masque Kimberly-Clark Technol Fluidshiel PCM2000, certifiés
masques de protection respiratoire selon la norme américaine (classe de performance N95), mais ne
répondant pas à la norme EN 149 : 2001, a été également testés, car il est utilisé comme masque de
protection respiratoire.
Classification des masques
Les masques testés ont été classés selon leur forme en 3 types : les masques « coquille dure », les
masques « bec de canard » et les masques « à plis » (cf. Annexe 2).
Taille de l’échantillon
Chaque référence de masques a été testée 10 fois (comme dans la norme EN 149 : 2001).
3 masques ont été testés par établissement : celui présent dans l’établissement, plus deux autres tirés
au sort, de façon à ce que dans chaque établissement soient testés un masque « coquille dure », un
masque « bec de canard » et un masque « à plis ». Mais n’ayant à disposition que deux références
de masques « à plis », dans un des 3 établissements nous avons testé 2 masques « bec de canard ».
Nous avons donc testé : 3 masques « coquille dure », 4 masques « bec de canard » et 2 masques « à
plis ».
10 soignants volontaires, dont au moins un homme, ont été recrutés dans chaque établissement.
Chacun a testé les trois masques, soit un total de 30 tests dans un établissement.
3
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Tests complémentaires
Pour augmenter la puissance statistique et consolider les résultats obtenus dans le cadre de l’enquête
conduite selon le protocole initial, il a été décidé de pratiquer des tests complémentaires.
4 masques ont été testés :
- les masques 3M et Willson 4000, dont les résultats des premiers tests se sont conclus par 60% de
réussite pour chaque masque.
- les masques Kimberly-Clark, PFR P2 62408 et Fluidshield PCM 2000, dont les résultats étaient
discordants alors que ces masques sont semblables en tout point à l’exception d’un film plastique
qui recouvre le contour intérieur du masque PCM 2000.
Les autres masques n’ont pas été re-testés car les premiers résultats étaient homogènes : les tests se
sont conclus presque tous par un échec (48/50).
Les tests ont été conduits à l’hôpital Bichat où nous avons recruté 10 femmes et 10 hommes dans
une volonté de pouvoir comparer les résultats obtenus pour les hommes et les femmes. Les masques
ont été testés à nouveau 10 fois chacun, 5 fois chez une femme et 5 fois chez un homme. Chaque
participant a testé deux masques.
Conduite des tests
Principe général
Une sonde, connectée à un compteur de particules est fixée au masque, de façon à ne pas perdre
l’étanchéité de ce dernier (cf. Annexe 3). Après avoir calibré le compteur, une mesure de la
concentration en particules à l’intérieur et à l’extérieur du masque est effectuée pendant la
réalisation d’exercices.
Afin d’obtenir un nombre suffisant de particules, nous utilisons un générateur de particules (cf.
Annexe 3).
Le rapport entre la concentration à l’extérieur et à l’intérieur du masque est appelé facteur
d’adéquation ou fit-factor. Un masque de protection respiratoire FFP2 est considéré comme étanche
quand le fit-factor obtenu est supérieur ou égal à 100.
1ère phase : vérification de la bonne mise en place du masque
Pour garantir la bonne mise en place du masque avant de débuter les tests, une mesure du fit-factor
en temps réel est effectuée. Cette mesure permet de visualiser, par l’intermédiaire d’une jauge, la
valeur du fit-factor lors de l’inspiration/expiration. Elle permet de se rendre compte des défauts de
mise en place du masque.
4
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
2ème phase : quantification de l’étanchéité du masque
Les tests sont réalisés selon le protocole de l’OSHA (Occupational Safety & Health
Administration)3.
Ce protocole comprend 8 exercices :
-
exercice 1 : respiration normale en restant immobile,
-
exercice 2 : respiration profonde en restant immobile,
-
exercice 3 : respiration normale en tournant la tête d’un côté et de l’autre,
-
exercice 4 : respiration normale en bougeant la tête de bas en haut,
-
exercice 5 : parler à voix haute,
-
exercice 6 : grimace,
-
exercice 7 : respiration normale en se penchant pour toucher ses orteils,
-
exercice 8 : respiration normale en restant immobile.
Chaque exercice dure 86 secondes à l’exception de l’exercice 6 qui ne dure que 22 secondes.
Un test entier dure ainsi entre 10 à 15 min (connexion du masque au compteur de particules, mise
en place du masque et vérification de l’ajustement, test, rendu des résultats).
Les tests peuvent se conclure de deux façons :
-
réussite : fit-factor global obtenu supérieur ou égal à 100. On dira lors que le fit-test est
positif,
-
échec : fit-factor global obtenu inférieur à 100. On dira que le fit-test est négatif.
Les tests ont été réalisés par le Technicien d’Etude Clinique du GERES, préalablement formé à
l’utilisation du compteur de particules et du logiciel.
Reproductibilité des tests
Pour vérifier la reproductibilité du fit-test, nous avons testé 3 fois le même masque chez une même
personne. Nous avons testé deux masques « bec de canard » et deux masques « à plis ». Les
résultats de ces tests sont présentés dans le Tableau 1. On constate que les résultats sont
reproductibles, à la fois pour les tests négatifs et les tests positifs.
5
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Tableau 1 : Reproductibilité du fit-test
Masque
Bec de canard 1
Bec de canard 2
A plis 1
A plis 2
Test 1
10
10
107
3
Test 2
17
17
128
7
Test 3
21
20
187
11
Questionnaire de recueil des données (cf. Annexe 1)
Ce questionnaire a permis de relever :
-
des données générales et morphologiques sur les soignants : sexe, année de naissance, poids,
taille, forme du visage, présence de barbe, port de lunettes et traits de visage particuliers ;
-
les éventuels défauts d’ajustement des masques après mise en place correcte appréciés
visuellement ;
-
les résultats du test.
Les critères année de naissance, poids, taille, forme du visage et traits de visage particuliers ne
correspondent pas à des critères morphologiques précis et n’ont pu être exploités.
Conduite de l’étude
L’étude a été réalisée sous la responsabilité scientifique du GERES : rédaction du protocole,
information des établissements et des soignants, recrutement des personnels, conduite des tests,
saisie et analyse des données, rédaction d’un rapport d’étude.
Confidentialité
Afin de garantir la confidentialité des données, les informations recueillies ont été anonymisées et
analysées de façon globale.
6
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Calendrier
Année
Trimestres
2008
4
2010
2009
2
1
3
4
1
2
Mise en place de l’étude (réunion du comité de
pilotage, rédaction du protocole, etc.)
Recrutement des établissements et des
volontaires
Conduite des tests
Conduite des tests complémentaires
Saisie et analyse des données
Rédaction du rapport d’étude
Présentation des résultats au Comité de Pilotage
Diffusion des résultats et rédaction d’un article
1
2
Calendrier prévisionnel
Calendrier effectif
1
Présentation des résultats à la SFHH
2
Présentation des résultats à la 19ème Journée du GERES
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Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
RESULTATS
Données générales
50 personnes ont été recrutées: 30 personnes pour la première phase de tests et 20 personnes pour
les tests complémentaires.
31 personnes sont issues d’un service de Maladies infectieuses, 10 d’un sanatorium, 3 d’un service
de Pneumologie et 6 d’autres services (laboratoire, médecine du travail, service d’hygiène).
31 des participants sont des femmes et 19 des hommes, dont 7 portent une barbe de quelques jours.
17 participants portent des lunettes.
Il n’a pas été montré d’impact du port de barbe et du port de lunettes sur les résultats des fit-tests.
Pour tous les résultats, aucune différence significative n’a été relevée entre les hommes et les
femmes.
Fit-test
90 tests ont été menés pour la première phase et 40 tests complémentaires soit un total de 130 tests
réalisés : 30 tests avec des masques « coquille dure », 60 tests avec des masques « bec de canard »
et 40 tests avec des masques « à plis ».
26,9% des tests se sont conclus par une réussite – fit-test positif (35/130), c’est-à-dire que le fitfactor obtenu est supérieur ou égal à 100 [minimum : 101 – maximum : 200].
Si l’on regarde le pourcentage de fit-tests positifs en fonction du type de masque (cf. Tableau 2), on
note qu’il est plus important avec les masques « à plis » (57,5%) qu’avec les masques « bec de
canard » (18,3%) et les masques « coquille dure » (3,3%).
Tableau 2 : Pourcentage de fit-tests positifs en fonction du type de masque
Type de masques
Coquille dure
Bec de canard
A plis
Fit-tests réalisés
30
60
40
Fit-tests positifs
% (n)
3,3 (1)
18,3 (11)
57,5 (23)
8
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Pour les 95 tests s’étant conclus par un échec – fit test négatif [minimum : 2 – maximum : 99], la
présence de fuites est notée :
-
au moins au niveau du nez pour 81 tests.
-
au moins au niveau du menton pour 58 tests.
-
au moins au niveau des joues pour 17 tests.
Le total est supérieur à 95 car un lors d’un même test le masque peut fuir en différents endroits
(ex : nez et menton, nez et joues, etc.).
Les fuites relevées en fonction du type de masques sont présentées dans le Tableau 3. On note que
pour les fuites sont localisées principalement :
-
au niveau du nez, du menton et des joues pour les masques « coquille dure »,
-
au niveau du nez et du menton pour les masques « à plis »,
-
au niveau du nez pour les masques « bec de canard ».
Tableau 3 : Fuites relevées en fonction du type de masques
Fuites
Nez
Menton
Joues
Coquille dure (N = 29)
93,1 (27)
96,6 (28)
51,7 (15)
Masques
% (n)
Bec de canard (N = 49)
87,6 (43)
38,8 (19)
4,1 (2)
A plis (N = 17)
64,7 (11)
64,7 (11)
(0)
La Figure 1 illustre la distribution des fit-factors en fonction du type de masques testés. On constate
que pour une même forme de masque les fit-factors obtenus ne sont pas homogènes. Les masques «
à plis » donnent de meilleurs résultats que les masques « coquille dure » et les masques « bec de
canard ». Cependant, si on regarde les moyennes des fit-factors supérieur à 100 obtenus pour les
masques « à plis » et les masques « bec de canard », on note que certains masques « bec de canard »
donnent des résultats comparables aux masques « à plis ». A l’exception d’un test, les fit-factors
obtenus avec les masques « coquille dure » ne sont pas supérieur à 25.
9
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Figure 1 : Distribution des fit-factors en fonction des formes de masque
200
Fit-Factor
150
100
50
0
0
1 dure
Coquille
Bec de2canard
A3
plis
4
Type de masques
Distribution
Moyenne globale
Moyenne des Fit-factor < 100
Moyenne des Fit-factor ≥ 100
Le Tableau 4 présente, par établissement, le nombre de personnes obtenant un fit-test positif en
fonction du nombre de masques testés, lors de la 1ère phase de tests. Dans un des établissements,
60% des fit-tests sont positifs avec le masque disponible dans l’établissement, qui est un masque
« bec de canard ». Dans les 2 autres établissements, aucun fit-test n’est positif avec le masque en
place dans l’établissement. Ce masque est dans un cas un masque « bec de canard », différent de
celui cité ci-dessus et dans l’autre cas un masque « coquille dure ».
Ces résultats montrent également qu’en augmentant le nombre de masques testés, le pourcentage de
soignants obtenant un fit-test positif augmente. Cette augmentation est importante avec les masques
« à plis » ou les masques « bec de canard ». Elle est beaucoup plus faible avec les masques
« coquille dure ».
10
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Avec trois types de masques testés, le pourcentage de soignants protégés est compris entre 30 et
90%, selon les établissements.
Tableau 4 : Nombre de personnes obtenant un fit-test positif en fonction du nombre de masques
testés
Personnes obtenant un fit-test positif
Nombre de masques testés
% (n)
Etablissement 1 Etablissement 2 Etablissement 3
1 masque
0C
60% (6/10)B
0B
Masque disponible dans l’établissement
2 masques
60% (6/10)P
10% (1/10)B
90% (9/10)P
3 masques
70% (7/10)C
30% (3/10)B
90% (9/10)C
C
: Masque « coquille dure »
: Masque « bec de canard »
P
: Masque « à plis »
B
11
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
DISCUSSION
Pour les masques « bec de canard » et les masques « à plis », les fit-factors obtenus sont très
variables. Pour les masques « coquille dure » au contraire les résultats sont homogènes. Ceci
pourrait s’expliquer par le fait que le résultat du fit-test, et donc l’étanchéité du masque, est le
résultat de l’adéquation entre le type de masque et son adaptation à la morphologie des visages. En
raison de la diversité des morphologies des personnels des établissements de santé, un seul type de
masques de protection respiratoire dans ces établissements ne suffit pas à protéger correctement
l’ensemble du personnel. En effet ici, dans un seul des 3 établissements 60% des soignants sont
protégés avec le masque disponible, et dans les 2 autres établissements, aucun des soignants ayant
participé à l’étude n’est protégé avec le masque disponible. Une autre étude1, menée au dans le
CHU Saint Pierre de Bruxelles, conforte nos résultats montrant que 67% du personnel est protégé
par le masque disponible dans l’établissement. Ces résultats par établissement montrent qu’il serait
judicieux de mettre à disposition des soignants au moins deux types de masques, masques « à plis »
et/ou « bec de canard ». Ces masques semblent adaptés aux soignants, car étant souples, ils sont
plus facilement ajustables aux visages des soignants qui ont globalement des visages fins. Mais tous
les masques « bec de canard » ne se valent pas en terme d’étanchéité, ceci en partie à cause de la
conception elle-même du masque. Tous les masques « bec de canard » ont effectivement la même
forme, mais pas la même qualité de joint, d’élastiques, de barrette nasale, etc. Les masques «
coquille dure » quant à eux ne semblent pas adaptés au milieu de soins car trop rigides pour être
ajustables et trop grands. Une taille différente serait certainement plus adaptée. Mais pour un test le
fit-factor était de 200, ce qui montre que si un masque est adapté au visage il est susceptible de
protéger le porteur. Dans tous les cas, dans le choix d’un masque de protection respiratoire il faut
prendre en compte à la fois la forme du masque et la morphologie du visage de celui qui le porte.
Cette adéquation conditionne l’étanchéité optimale du masque et dons la protection optimale du
porteur.
On peut supposer que pour les quelques fit-factors proches de 100 (6 fit-factors compris entre 82 et
99), une meilleure mise en place du masque pourrait faire basculer le fit-test de négatif à positif.
Cette meilleure mise en place pourrait être obtenue avec des formations pratiques au port de
masque. Différentes études1,4 montrent que lorsque les soignants ne reçoivent pas d’indications
particulières, 50% à 64% d’entre eux ne mettent pas le masque correctement.
12
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Aux Etats-Unis, la commercialisation d’un masque de protection respiratoire de classe N95,
équivalents à un masque de classe FFP2, est possible après la seule évaluation de l’efficacité du
matériau filtrant selon la norme américaine8. La réalisation de fit-tests est fortement recommandée
pour choisir le modèle adapté à l’utilisateur, à la fois dans le milieu industriel et hospitalier7. De
plus, un texte du National Institute of Occupational Safety and Health (NIOSH) rend obligatoire les
fit-tests chez toute personne exposée à la tuberculose9. De plus, aux Etats-Unis, les soignants ne
disposent pas seulement de masques de formes différentes mais aussi de tailles différentes.
En Europe la mise sur le marché d’un masque de protection respiratoire passe par l’évaluation de
l’efficacité globale du masque selon la norme européenne EN 149 : 2001. Cette norme comprend
l’évaluation de :
- l’efficacité du filtre. Les masques de protection respiratoire sont ainsi divisés en trois classes de
protection, fonction de la capacité de filtration du masque : FFP1 (80% d’un aérosol de diamètre
moyen de 0,6 micron arrêté), FFP2 (94% de cet aérosol arrêté) et FFP3 (99% de cet aérosol arrêté).
- la fuite totale vers l’intérieur qui est composée:
- de la pénétration maximale du média filtrant, c'est-à-dire 20% pour le FFP1, 6% pour le
FFP2 et 1 % pour le FFP3
- de la « fuite au visage » qui correspond à un passage de l’air ambiant lors de l’inspiration
entre le masque et le visage. Cette fuite est de 2% pour les FFP1 & FFP2 et de 1% pour le FFP3.
La norme EN 149 : 2001 intègre ces deux composantes et c’est la somme de la pénétration
maximale et de la fuite au visage qui définit le minimum de protection respiratoire ou classe de
chaque masque, soit 78 % pour le FFP1, 92% pour le FFP2 et 98 % pour le FFP3. Ces mesures sont
réalisées à partir d’un panel de sujets choisis exposés à un aérosol durant une série d’exercices.
Il n’existe ainsi aucune obligation de vérifier l’étanchéité des masques auprès de chaque personne
amenée à porter un masque de protection respiratoire, dont les soignants.
En France les masques de protection respiratoire dans les hôpitaux sont de taille unique, alors que
dans l’industrie plusieurs tailles existent. Il est tout à fait envisageable que les fournisseurs de
masques dans les établissements de santé français, qui fournissent également les Etats-Unis et/ou
l’industrie française, proposent aux soignants au moins deux tailles de masques.
13
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Dans un premier temps, il pourrait être envisagé de réaliser des fit-tests au moins chez les personnes
les plus exposées au risque infectieux respiratoire dont la tuberculose, comme cela est fait aux
Etats-Unis9, dans les établissements de santé français. Il est cependant difficile de demander aux
établissements de s’appareiller et de former du personnel pour réaliser des fit-tests. Une solution
serait d’introduire la réalisation de fit-tests par le fournisseur de masques dans le cahier des charges
des appels d’offres. Dans les industries, ce sont effectivement les fournisseurs de masques qui
réalisent les fit-tests. Les fit-tests qualitatifs sont moins contraignants et moins coûteux en
équipements10 que les fit-tests quantitatifs. Les fit-tests qualitatifs au Bitrex® (goût amer) donnent
de meilleurs résultats que ceux à la saccharine10. Cependant les fit-tests quantitatifs sont plus
performants pour identifier les fuites au visage que les fit-tests qualitatifs11.
Or un masque adapté à une morphologie, choisi avec un fit-test, n’est efficace que s’il est mis
correctement. Il est donc indispensable de former les soignants au port et à l’ajustement du masque.
Cette formation doit être renouvelée régulièrement, surtout chez les personnels les plus exposés5,6.
Et pour s’assurer de la bonne mise en place et de la bonne étanchéité de leur masque à chaque port
les soignants devraient pratiquer un fit-check7.
Par ailleurs avant que la réalisation de fit-tests soit possible dans les établissements de santé, il
pourrait être envisagé de commencer par mettre à disposition des soignants des masques de formes
et de tailles différentes, comme c’est le cas dans l’industrie.
Dans un deuxième temps, la norme EN 149 : 2001 pourrait être révisée pour mettre plus en avant
l’importance de tester l’étanchéité d’un masque de protection respiratoire avant de le porter
régulièrement.
Par ailleurs, les masques de protection respiratoire étant des équipements de protection individuelle,
ils sont commandés dans la plupart des cas, par les lingeries, les services économiques, etc.,
contrairement aux dispositifs médicaux qui sont gérés par des pharmaciens. De ce fait, les
personnes en charge des masques de protection respiratoire n’ont aucune notion des besoins des
soignants en matière de protection respiratoire. La gestion des masques de protection respiratoire
par différents acteurs (pharmaciens, hygiénistes, médecins du travail, cadres de soins, etc.)
permettraient peut être aux soignants d’avoir accès à des masques plus adaptés à leurs besoins.
14
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
CONCLUSION
En conclusion, cette enquête a montré qu’un seul masque ne suffit pas à protéger tous les soignants
dans un établissement de santé et encore moins si sa forme et/ou sa taille n’est pas adaptée. La
formation pratique au port de masques de protection respiratoire est essentielle, mais n’a d’intérêt
que si le masque est parfaitement ajustable au visage.
Les recommandations françaises doivent donc évoluer pour offrir à tous les soignants un niveau de
protection maximal vis-à-vis du risque infectieux respiratoire. Les masques « coquille dure »
proposés actuellement dans les établissements de santé n’apportent pas une sécurité suffisante car
trop grands et ne devraient pas être utilisés pour les soins avec risque de transmission aérienne ou
aéroportée telle que la tuberculose.
15
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
BIBLIOGRAPHIE
1.
Gérard M, Suys M. Fit-testing des masques respiratoires FFP2. Une expérience de terrain.
Noso-Info. 2006; X: 2-3.
2.
Ciotti C, Pellissier G, Balty I, Bayeux MC, Bouvet E, Abiteboul D et al. La protection
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16
Fit-testing des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
ANNEXES
Annexe 1 : Questionnaire de recueil des données
Annexe 2 : Les différentes formes de masques de protection respiratoire
Annexe 3 : Appareillage nécessaire à la réalisation d’un fit-test quantitatif
17
ANNEXE 1
Fit-Test quantitatif des masques de protection respiratoire FFP2 chez les soignants
Questionnaire de recueil des données
1. Etablissement : ___________________________________________________
1 4
2. Numéro d’anonymat : /_//_/
2 44
3. Service : Maladies infectieuses
Pneumologie
Sanatorium
3 4
Autre : _________________________________________________
4. Données générales et morphologiques
4a. Sexe : Homme
Femme
4a 4
4b. Année de naissance : /_//_//_//_/
4b 4444
4c. Poids : /_//_//_/ kg
4c 444
4d. Taille : /_//_//_/ cm
4d 444
4e. Port de lunettes : Oui
4f. Barbe : Oui
Non
4e 4
Non
4g. Si oui : naissante
4f 4
de quelques jours
fournie
4g 4
4h. Traits de visage particuliers :
4h 4444
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
5. Test
5a. 1er test
2ème test
3ème test
5a 4
5b. Masque testé : ____________________________________________________
5b 4
5c. Défauts d’ajustement : aucun
5c 4
5d. Résultat du test : Réussite
menton
joues
nez
Echec
5d 4
5e.Fit-Factor global : /_//_//_/
5e 444
6. Commentaires
6 4444
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
___________________________________________________________________
ANNEXE 2
Les différentes formes de masques de protection respiratoire
Coquille « souple »
Coquille « dure »
« Bec de Canard »
ANNEXE 3
Appareillage nécessaire à la réalisation d’un fit-test quantitatif
Tubulure de mesure de la concentration
en particules à l’intérieur du masque
Tubulure de mesure de la concentration
en particules dans l’air ambiant
Compteur de particules
Sonde de raccordement du masque
au compteur de particules
Générateur de particules

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