B B ET CU... Une très longue histoire par Marc MEYSKENS
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B B ET CU... Une très longue histoire par Marc MEYSKENS
Le 5 décembre 2000 Les orchidées de la BOUNTY Conférence de Marc MEYSKENS ***************************************************************************************** l aise et ne se B B et CU ANKS light cullata une très longue histoire.... Compagnons Rotariens, Il est des conférences bien structurées et droites comme une ligne à haute tension avec un départ, un milieu et une fin . Par contre, la causerie que je vous propose ce jour est semblable à une pelote faite de nombreux bouts de ficelle. Il faut choisir un bout après l’autre pour en trouver la fin . Le premier bout date de fin 1998 est un articulet parmi les 365 annuels qu’un plumitif signait sous le pseudonyme de LANCELOT dans le journal LE SOIR . Cet article attirait l’attention du lecteur sur un livre 1[1]consacré aux fleurs et entre autres aux « orchidées de la BOUNTY » . Ceci m’a fort intrigué car pour moi, et pour vous aussi, le nom de Bounty est lié pour toujours à celui de l’arbre à pain . Je tirais donc sur un second bout de ficelle et coûte que coûte, je me résolus à acheter un exemplaire du livre en question, puis je courrais l’échanger car la moitié du livre n ‘était pas imprimée et enfin une semaine plus tard je pouvais lire le texte original tel que l’a écrit Pierre MIQUEL chroniqueur à O F M 99.9 . Et en effet à mon grand étonnement, l’auteur ne voyait dans l’expédition de la Bounty qu’un seul et unique but la récolte d orchidées. Je cite ici un auteur : « Le capitaine menait durement ses hommes et rien ne les excédait plus que de recueillir en grimpant aux arbres de la forê des plants d'orchidées et de les entretenir à bord dans des caisses en bois, alignées sur le pont. Le capitaine provoqua une mutinerie et la cargaison d’orchidées ne devait pas atteindre, cette année là, les quais de Londres ». Comme cela ne correspondait nullement à mes lectures j’ai pour dissiper mes doutes tout d abord posé la question à l ‘auteur et ce à deux reprises la seconde fois en joignant un timbre pour la réponse, mais hélas sans résultat à ce jour . Il n' en fallait pas plus pour réveiller mon instinct de « jaghond 2[2] » et me décider a trouver le fin mot de cette affaire. Aussi durant plus de deux ans, j'ai frappé à de très nombreuses portes avec plus ou moins de chances et ce jusqu’au succès final . Voici, en résumé, le déroulement des opérations . J’ai tiré un autre bout de ficelle pour m’intéresser à cette orchidée et à son histoire. Tout d abord sachez que cette plante n' est qu’une orchidée parmi des milliers d'autres. Et le premier dessin de cette plante fut fait par le frère minime CHARLES PLUMIER EN 1689 3[3]durant ses voyages dans les INDES OCCIDENTALES .Car effet elle est originaire de cette région et particulièrement de Cuba Saint Vincent d’Haiti et nullement de Tahiti comme indiqué dans le livre. Elle peut atteindre 25 cm et le nom de BRASSAVOLA CUCULLATA lui fût donné d une part en mémoire d’Antonio Musa BRASAVOLA professeur de physique à Ferrare né le 16.1.1500 et décédé le 6 juillet1555. 4[4]5[5] Et d‘autre part, à cause de sa ressemblance à la cuculle courte tunique à capuchon portée surtout par la gente monastique Elle s'est nommée aussi HELLEBORINE FLORIBUS ALBIS EN 1703 EPIDENDRUM CUCULLATUM EN 1763 BLETIA CUCULLATA EN 1862 pour recevoir enfin en 1919 de SCHLECTER l’éminent spécialiste des orchidées son nom actuel de Brassavola cucullata. Son système de pollinisation fut étudié par Charles Darwin et est assez spécial . Les grains de pollen sont logés dans un conduit des plus étroits que seule la trompe de certains grands papillons et on ne sait pas encore le ou lesquels actuellement , peut atteindre. Aussi la fleur ne dégage t-elle une senteur que durant la nuit . Et comme le conduit est très long, la fleur ne secrète que peu de nectar pour inciter le papillon à bien toucher l’extrémité et ramener les grains de pollens . Disons tout de suite que mes contacts avec les jardins botaniques de MEISE et de KEW .6[6] furent décevants .( le jardin de MEISE consulté ne possède qu’une seule référence à ce sujet .7[7] ) Par contre certains amateurs fanatiques la cultivent8[8] et une firme brésilienne 9[9]qui en exporte des variétés m'a bien confirmé que cette plante était cultivée au Brésil et serait selon lui native de l ‘Amérique Centrale. Ce qui est assez loin de Tahiti . Tirant une autre ficelle, j’ai demandé à une relation botanique pratiquant en plus la technique Internet de m'aider et j'ai enfin eu connaissance d'un article traitant de l'historique de la Brassavola. Mais il fallait avoir une copie de ce texte. De nouveau, j'ai frappé à la porte de la Bibliothèque Royale mais sans réponse. J’ai eu plus de chance avec la British Library qui m'a dit qu ‘elle était « so sorry » mais n'avait pas ces revues dans son stock . Enfin j'ai trouvé moi même sur le "net" l'adresse de la revue Orchid diggest et 12 heures après mon premier courrier, j'avais les 10 pages de texte en main et les réponses tant recherchées dans un article écrit par Nathalie Warford en 1994. Voici donc le fin mot de cette histoire10[10] Non cette orchidée ne vient pas de Tahiti mais de Saint Vincent et de la Jamaïque. Non elle n’a pas été récoltée au péril de la vie des marins mais mise en pots par les jardiniers des stations botaniques de ces deux îles .11[11] Non ce n est pas la Bounty qui a embarqué ces pots en 1787 mais la Providence 12[12] en 1793 Et enfin bien que Robert Brown 13[13] écrive qu'elle fut introduite en 1793 par William Bligh , la liste de Broughton 14[14] ne la reprend pas nommément mais SIMS 15[15] écrit dans le Botanical Magazine de 1801 qu elle a fleuri en 1794 dans la collection royale. Aussi semble t-il qu’elle ait été embarquée par hasard et identifiée par la suite . Ainsi donc j'étais satisfait sur ce point mais je laisse à d'autres le soin de vérifier la véracité des anecdotes qu'un auteur consacre aux 99 autres .16[16] fleurs . Comme vous le voyez, tout dans l’aventure de la Bounty et de son capitaine William Bligh est toujours source d'émotions, de susceptibilités voire de controverses. Maintenant, en quelques mots, voici une histoire de la BOUNTY. Tout d'abord la période 1788-1789. Aux Etats Unis, le 21 juin 1788, la Constitution est ratifiée par 9 Etats. En France, le 8 Août 1788, LOUIS XVI annonce la convocation des Etats Généraux. Le 14 juillet 1789, Prise de la Bastille et le 2 novembre l’assemblée constituante met les biens du clergé à la disposition de la nation ou du moins d’une certaine partie de la nation. Bref, on peut dire que les esprits oisifs étaient un peu échauffés mais cependant, en dépit de cette agitation, des hommes faisaient progresser la connaissance et la technique . Et notamment en Angleterre Sir Joseph Banks 17[17] dont l intérêt pour l'utilisation économique de plantes étrangères était tel qu’un groupe de planteurs des West INDIES lui demanda de transporter ce fameux arbre à pain poussant naturellement dans les îles du PACIFIQUE pour servir de nourriture aux esclaves noirs des plantations . Qu’est ce que cet arbre à pains Il s'agit du jacquier ou artocarpe dont la pulpe farineuse du fruit donne une pâte qui après avoir subi une fermentation de quelques jours est cuite dans un four comme du pain . D’où une source bon marché de nourriture pour les esclaves noirs . Aussi l'expédition fut-elle préparée avec un luxe de soins tant sur le plan du matériel que sur celui des hommes . Tout d abord le navire, une frégate de 250 tonneaux ( ou 220 tonnes ) 25 mètres de long bordée de cuivre et fraîchement révisée par les chantiers de Deptford . Le seul aménagement spécial était dans l'entrepont dont le sol avait été recouvert de plomb et muni d'un caillebotis destiné à maintenir fermement les pots de plantes cette astuce permettait de récupérer l excès d'eau d'arrosage . Le chronomètre de bord était le K2 de Larcum Kendall horloger de LONDRES et qui est en fait une copie simplifiée du H 4 que John Harrison a construit en 1759. Le commandement avait été confié au jeune William Bligh ( 1754 - 1815 ) âgé alors de 33 ans à l'avenir prometteur nommé pour la circonstance capitaine .. Ce dernier débuta dans la marine marchande à l'échelon le plus bas puis entra dans la marine de guerre en qualité de maître principal. Il navigua sous les ordres de COOK, lors de son second voyage autour du monde 1772 1774 sur la Résolution et reçu le titre de lieutenant. Par la suite, il participa à plusieurs campagnes militaires. Après l incident de la Bounty, il reprit la mer sur la PROVIDENCE et en 1794, il réussit à amener ces fameux arbres à pains aux INDES OCCIDENTALES. Par la suite il se distingua lors de la fameuse mutinerie de NORE à l'embouchure de la Tamise en 1797. En 1801lors de la bataille de Copenhague Nelson le remercie personnellement. En 1805, nommé gouverneur des NOUVELLES GALLES, une colonie pénitentiaire, il essaie maladroitement de contrer des importations massives d'eaux de vie de contrebande et fût emprisonné par les amis des fraudeurs du 26 janvier 1808 jusqu’en mars 1810. Libéré, il termina sa carrière Contre-amiral de l'escadre bleue. Donc, le capitaine avait et la pratique de la chose marine et les meilleures connaissances techniques et cartographiques de l’époque. Pour les 46 membres de l’équipage la sélection fut aussi méticuleuse que possible . Tout d'abord, pour s'occuper des arbres à pains un nom s’imposait David NELSON jardinier expérimenté de Kew Gardens ayant déjà navigué avec Cook dans les mers du Sud et son assistant. L ‘équipage comptait un boucher, un charpentier, un armurier, un voilier et un médecin et son assistant Disons tout de suite que ce médecin nommé Thomas Huggan était un grand buveur et détestait tellement un exercice qu'on ne put jamais le persuader durant tout le voyage de marcher plus de douze fois de suite d un bout à l'autre du pont soit 12 x 25 m = 300 mètres et il restait habituellement au lit quinze heures sur vingt quatre. Sa première intervention fut de saigner le matelot Jacques Valentin qui s’était plaint d'une légère indisposition. Ce dernier décéda par suite d'une enflure du bras ? Quant à l'homme de l‘art il mourut à TAHITI d un très fort accès d intempérance . Pour le reste l'âge moyen connu était de 26 ans. Le plus âgé un voilier avait 40 ans, le plus jeune, un aspirant, avait 15 ans. C’est sous ces auspices favorables que le navire quitta Spithead le 23 décembre 1787. Mais la vie à bord d' un navire à voile n'avait rien d'une croisière. Soucieux de son équipage, le capitaine répartit ses hommes en trois bordées au lieu des deux traditionnelles 18[18]; de plus lorsque le temps le permettait le navire était aéré de même que les effets des matelots. Chaque soir, les cales étaient ventilées par des pompes . Après une malheureuse tentative de passage du Cap HORN le navire fit demi tour pour atteindre le Cap de BONNE Espérance le 23 mai et après une escale d'environ un mois le navire reprit la mer faisant uniquement une autre escale en Tasmanie pour y faire de l'eau et du bois. Enfin, le 26 octobre, la pointe Venus se dessinait à l'horizon et TAHITI était atteinte après avoir parcouru 50.163 Kilomètres à une moyenne de 200 kilomètres par jour . Durant 6 mois, des boutures d'arbres à pains furent préparées et enfin le 4 avril 1789 la Bounty quitta Tahiti avec 1015 plants d arbres à pains et quelques autres arbres tels que bananier etc. Est-ce le souvenir de la vie libre à Tahiti ou la discipline du navire ou l'attitude du capitaine, son caractère son statut social, et celui de ses officiers, mais le19[19] le 28 avril la mutinerie éclata. Par suite du manque de courage des officiers le capitaine et 18 hommes d’équipage furent jetés dans la chaloupe de 7 m sur 2 avec 68 kilos de pain20[20] 9 kilos de porc sale 6 litres de rhum 6 bouteilles de vin 3 tonnelets d eau soit 120 litres au total un sextant 4 sabres une petite caisse de pharmacie et un coffre de menuisier et les journaux de bord .C’est à dire tout bonnement condamnés à une mort lente . Une autre croisière commençait qui durant 41 jours mena cette chaloupe de Tofoa à Timor soit 8.334 kilomètres. Tout en luttant contre la faim, les indigènes et les éléments hostiles, le capitaine eu cependant le réflexe d’établir les premières cartes de ces régions, cartes qui font encore autorité.21[21] Un seul un marin mourut JOHN NORTON, lapidé par les indigènes à Tofoa .Malheureusement et par la suite, 6 autres marins moururent également soit par épuisement, soit surtout à cause du climat malsain de Timor où ils étaient cependant arrivés vivants. Et notamment David NELSON22[22] le botaniste inhumé à Timor . Donc sur les 19 passagers de la chaloupe 12 ont survécu . Quant aux autres marins… La taille réduite de la chaloupe ne permettant pas d'emmener tous les marins restés fidèles au capitaine, trois reçurent de lui, l'ordre de rester à bord et mention en fut faite sur le livre de bord . Donc, sur les 44 membres d équipage et dans le feu de l'action 19 prirent place dans la chaloupe, 3 restèrent à bord. Donc, c’est 50 % de l équipage qui était fidèle au capitaine. Etait-ce là une mutinerie générale? Pour l'histoire, sachez enfin qu’une expédition punitive fut ordonnée avec comme but la capture des mutins. 16 furent capturés dont 4 se noyèrent durant le naufrage du PANDORE qui les ramenait à Londres et 2 s'entre-tuèrent. Restèrent donc 10 mutins dont 3 furent pendus, 3 graciés et 4 acquittés. Pour les autres restés maîtres de la Bounty, 9 seulement atterrirent à l île de PICTAIRN 23[23] et brûlèrent la Bounty . Celle-ci a d'ailleurs été reconstruite en 1962 pour les besoins du film « mutinerie sur la Bounty » avec MARLON Brando Trevor Howard et Tarita . . Après bien des luttes, tous les tahitiens mâles et les mutins furent tués à l'exception d’un seul homme Adams JOHN repris sur le livre de bord sous le nom de SMITH ALEXANDER. Sous sa direction, la colonie prospéra et fut redécouverte le 14 mai 1809 par le capitaine Folger du Topaz. Notons que Smith a remis au capitaine Folger le fameux chronomètre Kendall que le gouverneur Juan Fernandez s'est immédiatement approprié: ces sacrés collectionneurs d'horloges ! Disons tout de suite que ce chronomètre est depuis 1843 au National Marine Muséum de Greenwich près de la K1et du premier chronomètre de John Harrison ( poids 33 kilos ). L île de PICTAIRN est actuelle possession britannique et son entretien ne coûte rien au trésor car la totalité des revenus proviennent uniquement des ressources générées par les émissions philatéliques . En conclusion la pour une réponse . seule chose à retenir est l'entêtement des Anglais qui, dit-on, ne prennent jamais non Entêtement à introduire l'arbre à pains dans les West INDIES [MM1]24[24]. En JAMAIQUE il ne poussa jamais à cause du climat Par contre aux Antilles il s’acclimata parfaitement mais les esclaves noirs refusèrent d'en manger car ils n'en supportaient pas le goût. Coût: deux expédiions et un navire perdu. Commentaire [MM1]: Entêtement à poursuivre les mutins, un navire perdu , un jugement pour finalement pendre trois mutins. Enfin, cette aventure passionnée et passionnante a conduit à la rédaction de divers livres historiques, d'aventures dont un par Jules Vernes, humoristique par Mark Twain et de quatre films. Et également à la rédaction de ce texte qui je l'espère vous aura emmenés pendant quelque temps vers des horizons lointains et ensoleillés. Merci pour votre attention et votre silence . Marc Meyskens