Pablo Picasso (1881-1973) Projet de Monument à Apollinaire
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Pablo Picasso (1881-1973) Projet de Monument à Apollinaire
Pablo Picasso (1881-1973) Projet de Monument à Apollinaire Œuvre conçue en octobre 1928 Agrandissement posthume de la maquette originale de 1928, réalisé par l’Ecole de maîtrise des ouvriers métallurgistes de Longwy en 1985 Acier. H 460 x L 120 x P 300 cm Dépôt temporaire du Musée National Picasso, Paris, Inv. MP 1985-73 La réalisation de cette sculpture a été rendue possible grâce à la générosité de Mme Maya RuizPicasso Widmaier, Mme Paloma Ruiz-Picasso Lopez-Sanchez, Melle Marina Ruiz-Picasso, M. Bernard Ruiz-Picasso. Attention, le Musée National Picasso a indiqué qu’il est interdit de photographier cette œuvre. Pablo Picasso (1881-1973) en très bref Peintre et sculpteur, originaire d’Andalousie, Picasso grandit et se forme à Barcelone. Il s’installe en France en 1904. En 1907, il crée Les Demoiselles d’Avignon, œuvre fondatrice du cubisme. Puis il collabore aux Ballets russes avant de se rapprocher en 1925 du surréalisme. En 1937, il peint Guernica, œuvre conçue comme un « instrument de guerre » contre le nazisme et le franquisme, et se rapproche du Parti communiste. En 1948, il s’installe à Vallauris en Provence et devient céramiste. Plein de vitalité, cherchant et se renouvelant en permanence, il a contribué à toutes les inventions esthétiques de son siècle. L’oeuvre En 1927, Pablo Picasso est sollicité pour créer un monument funéraire à son ami, le poète Guillaume Apollinaire, mort pour la France en 1918. Guillaume Apollinaire (1880-1918) est un poète français majeur du début du 20e siècle, auteur du célèbre poème Le Pont Mirabeau (mis en musique par Léo Ferré), issu du recueil Alcools. Il expérimenta les Calligrammes, poèmes dont la disposition graphique forme un dessin, en rapport avec le sujet ou l’esprit du texte. Critique d’Art, il soutint les avant-gardes artistiques de son temps, en particulier le cubisme. Il fut un précurseur du surréalisme. Pablo Picasso s’est vraisemblablement souvenu d’un passage du Poète assassiné (publié en 1916), dans lequel Apollinaire narre les aventures du poète Croniamantal, personnage dans lequel il a mis beaucoup de lui-même. Les personnages du recueil sont des avatars de vraies personnes : Cronamantial fréquente l'Oiseau du Bénin (Pablo Picasso) et souffre de son amour pour la volage Tristouse Ballerinette (Marie Laurencin, femme peintre, maîtresse d’Apollinaire). Après que Cronamantial a été lynché par la foule, Tristouse se rend à Montmartre, où habite l'Oiseau du Bénin, et tous deux décident de lui ériger une statue : Notice Valérie Montalbetti, mars 2015 « Il faut que je lui fasse une statue, dit l'Oiseau du Bénin. Car je ne suis pas seulement peintre, mais aussi sculpteur. - C’est ça, dit Tristouse, il faut lui élever une statue. […] - Une statue en quoi ? demanda Tristouse. En marbre ? En bronze ? - Non, c’est trop vieux, répondit l'Oiseau du Bénin, il faut que le lui sculpte une profonde statue en rien, comme la poésie et comme la gloire. - Bravo ! Bravo ! dit Tristouse en battant des mains, une statue en rien, en vide, c’est magnifique, et quand la sculpterez-vous ? » Picasso, qui n’est pas seulement peintre, mais aussi sculpteur, dessina quatre projets, procédant tous du même esprit : une statue en rien, en vide. Les maquettes des quatre projets sont réalisées en 1928 par son ami catalan Julio Gonzalez (18761942), lequel, grâce à son expérience d’ouvrier métallurgiste, était un pionnier de la sculpture en métal soudé. Les tiges de métal circonscrivent un espace vide et créent une œuvre transparente, sans consistance matérielle. L’œuvre occupe toutefois un volume sanctuarisé par les tiges de métal. On sait par des carnets de dessins, que Picasso s’intéressait alors aux constellations d’étoiles dans le ciel, figures créées par l’imagination de l’observateur, en reliant par des traits les points des étoiles. Toutefois la sculpture n’est pas abstraite, elle représente un personnage debout, un peu raide, les bras tendus en avant, semblant tenir des rênes. Le visage est stylisé par un disque avec trois points pour les yeux et la bouche. Picasso était passionné l’Art antique. Or la posture du personnage fait irrésistiblement penser à une célèbre sculpture de la Grèce antique, l’Aurige de Delphes (bronze, v. 478 ou 474 av. J.C., H. 180 cm, Musée archéologique de Delphes). Le Monument ne fut jamais érigé. En 1962, Picasso fit un agrandissement intermédiaire de deux mètres de haut, de deux des maquettes, dont le modèle de notre Monument. En 1972, il fit procéder à l’agrandissement de l’un d’eux (conservé à New York, Museum Of Modern Art). Il meurt en 1976 sans avoir procédé à l’agrandissement de l’autre maquette. Notre Monument est l’agrandissement de l’autre maquette, réalisé en 1985 pour l’ouverture du Musée Picasso à Paris, par l’Ecole de maîtrise des ouvriers métallurgistes de Longwy. Notice Valérie Montalbetti, mars 2015