Charleroi

Transcription

Charleroi
Charleroi
Type : remaniement d’enceinte et agrandissement urbain.
Province / Région : Province de Hainaut, Région de Wallonie
Pays : Belgique
Coordonnées : 50°24’40’’ N ; 4°26’46’’ E
Charleroi, plan gravé du siège de Vauban par Le Pautre, 1693, collection Philippe Bragard.
Historique et description
Situé en bordure gauche d’un méandre de la Sambre, sur une colline entre deux ruisseaux (Ry de
Lodelinsart et Ry de Spiniat) terminée abruptement par une pente, le site de Charleroi est fortifié en
1666 par les ingénieurs Hispanowallons. Dessinée par les ingénieurs Jean Boulangier et Salomon Van Es,
la première forteresse est composée d’un hexagone régulier à une porte (celle de Bruxelles sur le flanc
nord-ouest), doté de six bastions à flancs droits, cinq demi-lunes et d’un ouvrage à corne à double
bastion et demi-lune sur son flanc sud-ouest. Des étangs défensifs sont prévus sur les ruisseaux et un
plan radioconcentrique est dessiné pour l’aménagement urbain interne. La forteresse est prise par les
Français le 2 juin 1667, au début de la Guerre de Dévolution.
Réparée rapidement, Charleroi est réaménagée à partir de 1668. Les chantiers sont confiés à l’ingénieur
Thomas de Choisy (1632-1710), collaborateur de Vauban, et à l’architecte Charles Chamois. Thomas de
Choisy achève les chantiers entrepris par les Pays-Bas en créant les deux premiers étangs défensifs,
rectifie le tracé de l’ouvrage à corne de Salomon van Es et y perce la porte de France. Les terrains de la
Ville Haute sont mis en lotissement. Ce lotissement est achevé en 1672, début de la Guerre de Hollande,
au premier siège avorté hollandais. Vauban n’intervient qu’à partir de 1672. Il dessine l’ouvrage à
couronne de la Ville Basse, située sur la rive droite de la Sambre et doté de trois bastions à flancs droits.
Il ajoute les fronts bastionnés de l’Entre-Villes afin de verrouiller la route Mons-Namur entre les deux
fortifications précédentes. Il place la redoute de Dampremy pour protéger le barrage de l’étang de
Lodelinsart à l’ouest et les glacis de l’ouvrage à corne de la Ville Haute. Pour protéger la Ville Basse,
Vauban perce un canal (appelé Louvoise, hommage au Marquis de Louvois, Ministre de la Guerre de Louis
XIV) et aménage un troisième étang, celui de Marcinelle, alimenté par le ruisseau de l’Eau-d’Heure, autre
affluent de la Sambre. Les chantiers sont achevés en 1675, année du second siège hollandais avorté. La
Ville Basse est lotie entre 1675 et 1678 selon un plan orthogonal irrégulier, et le quartier de l’EntreDeux-Villes est édifié à la même époque. Il est défendu par deux fronts bastionnés à demi-lunes et
redoutes avancées. Charleroi est rétrocédée aux Espagnols en 1678 par le traité de Nimègue. De 1678 à
1693, année du siège commandé par Vauban lui-même, Charleroi subit quelques modifications. Un
quatrième étang défensif, dit du Piéton, est mis en eau entre le barrage de l’étang de Lodelinsart et la
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Sambre. Son remplissage est en partie assuré par un canal de dérivation des eaux du ruisseau du Piéton,
autre affluent de la Sambre, sur le modèle de l’étang de Marcinelle. Hormis cela, des redoutes carrées
sont édifiées pour défendre les zones inondables. Prise par Vauban en 1693, Charleroi voit ses étangs
défensifs ouest et est doublés de longueur par deux barrages supplémentaires, en amont des étangs
précédents. Les défenses terrestres orientales et méridionales sont renforcées par des ouvrages de terre et
fascines supplémentaires. Cédée en 1697 aux Pays-Bas espagnols, à la fin de la Guerre de la Ligue
d’Augsbourg, Charleroi ne connaît plus de modifications notables après 1698.
Intégrée en 1715 dans la première Barrière des Pays-Bas, désormais autrichiens, Charleroi est prise en
1746 par les troupes françaises de Louis XV et partiellement démolie. Restaurée de manière inconnue, la
ville fortifiée est démilitarisée en 1782 par Joseph II d’Autriche qui ordonne la démolition de la majorité
des fortifications et le lotissement des terrains. Décision confirmée par la Convention française en 1795.
En 1815, le Génie belgo-hollandais décide de reconstruire une nouvelle forteresse, chantier achevé en
1821. Cette nouvelle forteresse, trois fois plus vaste que la précédente, est composée d’une Ville Haute
en décagone irrégulier à huit bastions de formes multiples et six demi-lunes plus ou moins régulières, de
six lunettes de maçonnerie, d’une Ville Basse en ouvrage à couronne, et de trois étangs défensifs moins
étendus que leurs prédécesseurs. Elle est réalisée selon le tracé de Cormontaigne. Prise sans combat par
les révolutionnaires belges en 1830, la forteresse est modifiée en 1840-1843 par le recul des deux fronts
de la Ville Basse pour permettre le percement de l’actuel cours de la Sambre et l’installation de la
première gare ferroviaire.
Vue aérienne de Charleroi, GoogleEarth, 30/05/2011.
Etat actuel
De l’œuvre de Vauban à Charleroi, il ne subsiste rien de visible. La mémoire de Vauban subsiste de façon
immatérielle par les noms des rues et la présence d’une école : L’Athénée Vauban. La place forte
hollandaise a été démantelée de 1867 à 1875 pour être remplacé par des boulevards arborés et trois
gares ferroviaires (deux subsistent aujourd’hui, celle du Sud et celle de l’Ouest). Le ravin oriental et
l’ancien méandre de la Sambre ont été comblés, modifiant le relief local. Il ne subsiste comme vestiges
qu’un puits de siège au centre de la place centrale de la Ville Haute et quelques tronçons de souterrains
et fondations retrouvés au gré des chantiers urbains. Des circuits de visite guidée sont possibles sur
è
renseignements à l’office de tourisme local. Le plan relief de 1696 au 1/600 , réparé en 1789 et 1949,
est conservé au Musée des Beaux-Arts de Lille. Une copie de ce plan a été réalisée en 1996 et est
accessible au public sur demande auprès de l’Hôtel de Ville.
Charleroi ne présente qu’un faible intérêt dans l’œuvre de Vauban en tant que place remaniée.
Cependant, elle témoigne de l’œuvre fortifiée de Thomas de Choisy, l’un de ses collaborateurs les plus
importants et également de celle des ingénieurs des Pays-Bas espagnols Salomon Van Es et Jean
Boulangier. Ce dernier est considéré par les spécialistes comme le meilleur homologue espagnol de
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Vauban. La forteresse belgo-hollandaise de 1815 témoigne de sa postérité, les ingénieurs de cette
er
époque ayant été formés sous Napoléon I et utilisant la méthode de Louis de Cormontaigne, le principal
héritier de la pensée « vaubanienne ». La disparition de ces deux forteresses successives en rend l’étude
difficile.
Orientation bibliographique
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BRAGARD (P.), L’œuvre de Vauban en territoire belge, dans Vauban militaire et économiste
sous Louis XIV, t. II : Vauban et Longwy à Louis XIV. Les Guerres de Louis XIV, Luxembourg,
2009, p. 181-216, (actes du colloque de la Commission lorraine d’Histoire militaire des 29 et
30 septembre 2007 à Longwy).
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Caroloregium Valde Concelebratur, MDCLXVI-MCMLXVI, bilan de trois siècles de vie urbaine
par l’administration communale de la ville de Charleroi, Charleroi, MCMLXVI.
-
Le plan en relief de Charleroi levé par des ingénieurs français en 1696, dans Plans en reliefs de
villes belges levés par des ingénieurs français : XVIIe-XIXe siècles, Bruxelles et Paris, 1965.
-
VERSCHUEREN (L.), Les fortifications de Charleroi au XIXe siècle : leur insertion dans la
tradition des villes fortifiées des Temps Modernes et la gestion de leurs vestiges, Louvain-laNeuve, UCL, FLTR, ARKE, 2008-2009 (Mémoire de Maîtrise en Histoire de l’Art et Archéologie
inédit).
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WARMOES (I.), Les plans en relief dans les collections du musée des Beaux-Arts de Lille, LilleParis, 2006, p. 72-73.
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