Fiche de synthèse
Transcription
Fiche de synthèse
La colchicine : un médicament de second choix dans la goutte à ne pas banaliser La colchicine est un alcaloïde tricyclique extrait de la Colchicum autumnale. Son absorption orale rapide est très variable (de 24 à 88 % de la dose administrée)1, sa distribution est importante, sa métabolisation hépatique, son élimination est fécale (60 à 80%) et rénale (10 à 20%)2. Sa demi-vie d’élimination varie de 20 à 40 h. Elle semble métabolisée par l’isoenzyme CYP 3A4 et est un substrat de la glycoprotéine P. Elle a un index thérapeutique étroit dont il faut tenir compte. Certains effets indésirables sont graves, parfois mortels. Indications Elle est utilisée de manière traditionnelle dans la crise de goutte, la chondrocalcinose articulaire, la maladie périodique, la maladie de Behçet, la sclérodermie et certaines formes cliniques de sarcoïdose. Son utilisation dans la crise de goutte est la plus fréquente, elle diminue la réaction inflammatoire provoquée par les urates notamment par diminution de l’afflux leucocytaire mais, n’a pas d’effet antalgique propre. Elle ne peut plus être considérée comme le traitement standard en raison des effets indésirables quasi systématiques pour des doses efficaces, en particulier la diarrhée ; c’est pourquoi on lui préfère les AINS. Elle est cependant une alternative chez les patients qui présentent une contre-indication aux AINS. Doses dans la crise aiguë de goutte En principe, débuter par 1 mg suivi de 0,5 mg toutes les 2 à 3 heures jusqu’à diminution des douleurs ou apparition de diarrhées ou vomissements. La dose maximale par 24h est de 6 à 8 mg durant maximum quelques jours. Les doses préconisées doivent être réduite en cas d’insuffisance rénale modérée. En cas d’insuffisance rénale grave, la colchicine est contreindiquée.3 Effets indésirables Les effets indésirables dose-dépendants sont : Diarrhées La diarrhée est fréquente parfois avant l’effet thérapeutique. Les effets indésirables Nausées, vomissements digestifs peuvent être les signes avantcoureurs d’une intoxication. Dépression médullaire (agranulocytose, Parfois mortelle thrombopénie, anémie) En cas de traitement au long cours Myopathie Neuropathie périphérique Situations à haut risque d’effets indésirables graves4 Vu l’index thérapeutique étroit et la pharmacovigilance, certaines situations sont considérées à risque : • Insuffisance rénale : la colchicine est éliminée par voie rénale, une diminution de la clearance peut entraîner un surdosage. • Insuffisance hépatique 1 Revue du rhumatisme 2006, vol73, n°12, pp 1338-1345 www.biam2.org 3 SSPF La prise en charge de la goutte. Dr Beuken 2011 4 Prescrire n°325 p.827. Novembre 2010 2 e-news médecins-pharmaciens Février 2011 • • Interaction médicamenteuse : Les interactions pharmacocinétiques potentielles avec d’autres médicaments se font au niveau du CYP3A4 et/ou de la glycoprotéine P provoquant une diminution de l’élimination hépatique ou rénale. Age > 75 ans En cas d’intoxication, la sévérité de l’intoxication ainsi que le taux de mortalité sont directement liés à la dose ingérée. Le surdosage résulte le plus souvent de la prescription d’une trop forte dose chez un insuffisant rénal ou hépatique, de l’ingestion d’une trop forte dose ou d’une interaction médicamenteuse. Interactions médicamenteuses Les interactions sont nombreuses avec de surcroît des médicaments courants. 1. + médicaments inhibiteurs du CYP3A4 par ex : macrolides (sauf spiramycine), amiodarone, ciclosporine, ciprofloxacine, diltiazem, les antifongiques azolés, fluoxétine, fluvoxamine, norfloxacine, vérapamil, … : risque de surdose 2. + les médicaments inhibiteurs de la glycoprotéine P (avec diminution de l’élimination rénale et hépatique) : diltiazem, vérapamil, amiodarone, atorvastatine, clarithromycine, erythromycine, antifongiques azolés (itraconazole, kétoconazole),… : risque de surdose 3. + médicaments qui causent des atteintes musculaires : les statines, les fibrates, ciclosporine, tacrolimus,… : risque de myopathie, voire rhabdomyolyse 4. + médicaments pouvant induire une agranulocytose : cytotoxiques, terbinafine, des immunosuppresseurs (méthotrexate, sirolimus, évérolimus, azathioprine,…) 5. + lopéramide et autres opioïdes : risque de masquer la diarrhée qui est un effet indésirable d’alerte5. 6. + antivitamines K : risque d’hémorragies Surdose6 Les effets indésirables sont dépendants de la dose ingérée. Lorsque la dose est inférieure à 0,5 mg/kg, l’évolution est généralement favorable en 4 à 5 jours. Toutefois des décès ont été relatés en cas de prise en charge différée. Les effets indésirables sont vomissements et diarrhées profuses parfois sanglantes qui peuvent mener à une déshydratation. Entre 0,5 et 0,8mg, une aplasie médullaire s’ajoute après 3 à 4 jours, une alopécie, une neuropathie des membres inférieurs ainsi qu’une hyponatrémie. 10% des décès sont d’origine infectieuse ou hémorragique en relation avec l’aplasie médullaire. Une dose > 0,8 mg/kg est pratiquement toujours mortelle dans les 72 heures (détresse respiratoire, choc cardiogénique, IR aiguë). Une administration de charbon actif peut être envisagée dans les heures qui précèdent les vomissements, sinon un lavage gastrique est requis. En pratique Mieux vaut ne pas banaliser la colchicine, y compris pour d’autres pathologies que la goutte. Dans la prise en charge d’une crise aiguë de goutte, en cas de contre-indication à la prescription d’AINS, le paracétamol et l’application de glace peuvent être conseillés. Si toutefois la colchicine est envisagée, il faudra tenir compte de l’âge du patient, de l’état de la fonction rénale et hépatique ainsi que de l’historique médicamenteux afin d’écarter tout risque d’interactions. Il est également important de prévenir et d’éviter une automédication ! 5 6 Prescrire Eviter les effets indésirables par interactions médicamenteuses 2011. p.357 D’après Prescrire n°324 p.796 e-news médecins-pharmaciens Février 2011