la strada - Opéra national du Rhin

Transcription

la strada - Opéra national du Rhin
Dossier pédagogique
Saison 2014-2015
Pistoni
la strada
En deux mots
Mario Pistoni adapte en ballet le film de Fellini, La Strada, racontant l’histoire de Gesolmina. Vendue par sa mère à
Zampanò, un forain ambulant spécialisé dans les tours de force, Gesolmina voyage avec lui dans sa carriole. Sa vie est
scandée par les numéros du briseur de chaînes, jusqu’à sa rencontre avec Il Matto (le fou), un funambule, seul à pouvoir
comprendre la jeune femme brutalisée…
Contacts
Flora Klein • tél + 33 (0)3 88 75 48 54 • courriel • [email protected]
Hervé Petit • tél + 33 (0)3 88 75 48 79 • courriel • [email protected]
Opéra national du Rhin • 19 place Broglie
BP 80 320 • 67008 Strasbourg
Photo Nis & For
www.operanationaldurhin.eu
Ballet en douze tableaux sur un sujet
de Federico Fellini et Tullio Pinelli
STRASBOURG
opéra
me 14 janvier 20 h
je 15 janvier 14 h 30* & 20 h
ve 16 janvier 14 h 30* & 20 h
sa 17 janvier 20 h
di 18 janvier 15 h
Mulhouse
la filature
sa 24 janvier 20 h
di 25 janvier 15 h
ma 27 janvier 14 h 30* & 20 h
Chorégraphie Mario Pistoni
Musique Nino Rota
Direction musicale Myron Romanul
Costumes, décors Philippe Miesch
d’après Mario Pistoni
Mise en répétition Guido Pistoni
Ballet de l’Opéra national du Rhin
Orchestre philharmonique de Strasbourg
Casa Ricordi Milano
COLMAR
Théâtre
di 1 février 15 h**
ma 3 février 14 h 30* & 20 h**
er
Créé au Théâtre de la Scala, Milan
* Représentations réservées
aux groupes scolaires.
Réservations : département jeune public
** Représentations données avec
une musique enregistrée
Tarif spécial
Durée approximative : 1 h 10 (sans entracte)
Conseillé à partir de 8 ans : élémentaire, collège et lycée
En quelques mots
Gesolmina, jeune femme naïve et innocente, est vendue par sa propre mère à l’effroyable Zampanò. Voilà le cadre d’une
cruelle et sombre intrigue… mais ne nous y trompons pas, le scénario fellinien – typique du néoréalisme italien – offre une
poésie irrésistible. Mario Pistoni a su s’en saisir pour créer le ballet le plus emblématique de la scène italienne. Immortalisée
par l’interprétation de la danseuse étoile Carla Fracci, en 1967, la chorégraphie connaît un succès retentissant dès sa première
représentation, chaleureusement applaudie par Fellini et sa muse, Giulietta Masina. Tournée dans le monde entier, La Strada,
très peu reprise dans l’hexagone, est enfin remise à l’honneur par une compagnie française.
Le film de Fellini
Le ballet de Mario Pistoni est une adaptation du film de Federico Fellini, La Strada, réalisé en 1954.
L’histoire est ainsi entièrement reprise : celle de Gelsomina, servante de Zampanò, un briseur de
chaînes. Celui-ci était déjà accompagné par la sœur de Gelsomina (Rosa) décédée sur le chemin.
Zampanò achète ainsi Gelsomina pour la remplacer. Elle apprend à danser et jouer de la trompette
pour accompagner les numéros du briseur de chaînes. Le reste du temps, Zampanò l’utilise comme
bonne à tout faire, sans lui accorder d’attention, il la contraint par la cruauté et la domination mais
elle parvient à s’échapper. Elle rencontre alors un autre forain, Il Matto (dit « le Fou »), un funambule.
Zampanò récupère de force la jeune femme et l’emmène avec lui dans un cirque ambulant dans lequel
travaillait autrefois Il Matto. Les deux hommes se battent et le briseur de chaînes assassine le Fou.
Gelsomina est désespérée et Zampanò décide de l’abandonner. Celui-ci apprend avec effroi, quelques
années plus tard, la mort de la jeune femme.
La production de ce film a été, plus que ses autres œuvres, importante pour Fellini. Il considère cet
ouvrage comme « un catalogue complet de [son] monde mythologique ». La réalisation n’a pas été sans problèmes : difficultés
financières, de casting, blessures, météo capricieuse qui contribuèrent à rallonger la durée du tournage. À sa sortie, la critique est
mauvaise et provoque une controverse au Festival du film de Venise en 1954 : si le jury accorde le « lion d’argent » à La Strada
en ignorant la nomination de Luchino Visconti avec Senso, le public n’en siffle pas moins Fellini. C’est un film imprégné de
néoréalisme italien, mais qui intervient à un moment où Fellini commence à se détacher de ce courant. R.-M. Arlaud écrit en mars
1955 : « La Strada se place dans l’étoile des quelques films italiens issus du néoréalisme mais le dépassant pour redevenir création,
transposition, composition, enfin tout ce qui sépare un art d’un reportage ».
Le néoréalisme italien
Le néoréalisme italien est un mouvement cinématographique apparu en Italie dans en 1943, pendant la Seconde Guerre mondiale.
Il reste influent jusqu’en 1955. Ce courant se caractérise par son vérisme cru, frappant. Le néoréalisme veut représenter la vie
quotidienne en l’état, se situant entre scénario, réalité et documentaire. Ce vérisme se caractérise notamment par le recours à des
amateurs, des gens de la rue pour remplacer les acteurs professionnels. Ce mouvement naît à la fin de la période fasciste et fait
face à un manque cruel de financements. Le néoréalisme redonne de l’importance à la collectivité en montrant que l’individu
existe à travers son contexte social. Il est même considéré comme « l’école italienne de la libération » (selon André Bazin).
Il agit ainsi comme un mouvement de libération face à l’occupation allemande et au gouvernement fasciste, et permet aux
cinéastes italiens de se débarrasser des codes et conventions filmiques de la propagande fasciste.
Federico Fellini, Tullio Pinelli et Ennio Flaiano
La Strada de 1954 est réalisé par Fellini, en coproduction avec Pinelli et Flaiano.
Federico Fellini (20 janvier 1920 - 31 octobre 1993) est un réalisateur et scénariste
italien. Il est considéré comme un des plus grands réalisateurs italiens du XXe siècle, un des
cinéastes les plus illustres de l’histoire du cinéma, égalant Hitchock ou Chaplin. Son style
se caractérise par un mélange de réalisme, de fantaisie et d’imagerie baroque ; par l’absence
de frontière entre le rêve et le monde réel. Il gagne la Palme d’Or au Festival de Cannes de
1960 pour La Dolce Vita ainsi que quatre fois l’Oscar du meilleur film en langue étrangère à
Hollywood (pour La Strada et d’autres films). C’est avec La Strada qu’il obtient son premier
succès international, dans lequel il reste encore très proche du mouvement néoréaliste.
Il s’en écarte progressivement dans les années 1960 par un style plus poétique et mélancolique
qui influencera le monde du cinéma. Il reçoit, l’année de sa mort, un Oscar d’honneur pour
l’ensemble de sa carrière, « en appréciation de l’un des maîtres-conteurs de l’écran », attribué par l’Académie des arts et sciences
du cinéma.
Tullio Pinelli collabore avec Fellini en tant que scénariste sur La Strada, Les Vitelloni,
La dolce vita et Huit et demi. Il est né en 1908 et mort en 2009 à Rome. Tullio rencontre Fellini en
1947, à un kiosque, alors qu’ils lisaient les pages opposées d’un même journal. Ce sera pour lui une
rencontre exceptionnelle, « comme un coup de foudre créatif . Parlant le même langage et rêvant des
mêmes scénarios qui étaient alors à l’exact opposé de la mode du moment : l’histoire d’un employé de
bureau découvrant qu’il pouvait voler, s’échappant alors par la fenêtre ».
Ennio Flaiano collabore également en tant que scénariste. Il était un romancier, journaliste et
critique dramatique italien, né en 1910 et mort en 1972. Sa renommée tient surtout de sa collaboration avec
Fellini dans La Strada, La Dolce Vita et Huit et demi. Il remporte le prix Strega en 1947 pour son roman
Tempo di uccidere et écrit pour des journaux italiens célèbres en ce temps comme Oggi, Il Mondo ou
Il Corriere della Sera.
Nino Rota, compositeur
Né en décembre 1911 et mort en avril 1979, Giovanni « Nino » Rota est un compositeur
italien, pianiste et chef d’orchestre connu principalement pour ses compositions pour le
cinéma. Il compose ainsi pour Federico Fellini ou Luchino Visconti. Il reçoit notamment
l’Oscar de la meilleure bande originale pour Le Parrain 2 en 1974. Nino Rota ne s’est pas
uniquement consacré au cinéma : il compose 10 opéras, 5 ballets et une douzaine d’autres
musiques orchestrales, chorales ou de chambre. Il est aussi lié au théâtre puisqu’il élabore la
musique des productions théâtrales de Visconti, Zeffirelli et Eduardo De Filippo. C’était ainsi
un compositeur très actif, ayant écrit plus de 150 partitions pour des productions italiennes
et internationales des années 1930 jusqu’en 1979, tout en étant professeur au Liceo Musicale
de Bari, en Italie.
Il fait la connaissance de Fellini alors que celui-ci travaille sur son second long métrage,
Le Cheik blanc. Il collaborera avec le cinéaste jusqu’à son décès. Son travail musical est
considéré comme apportant de la « cohérence » à la mise en scène fellinienne.
La musique de Nino Rota dans La Strada
Nino Rota compose la musique pour le film La Strada pendant le tournage. La partition est directement introduite dans la mise
en scène du film. Certains personnages jouent des instruments de musique : le Fou joue le thème principal sur un violon,
Gelsomina le jouera après avec une trompette. On compte quatre thèmes récurrents tout au long du film, agissant comme des
leitmotive. Le compositeur articule et modifie ces différents thèmes en fonction des séquences. Ils prennent ainsi une véritable
valeur communicative, pouvant expliquer des émotions et des intrigues qui ne sont pas explicites dans les images ou le dialogue.
C’est cette musique qui est utilisée pour l’adaptation en ballet de Mario Pistoni.
Fellini avait utilisé, en musique, une variation d’Arcangelo Corelli pour le tournage. Rota n’était pas de cet avis et écrit ainsi
une musique originale, reprenant des thèmes de Dvořák et son Opus 22, Sérénade pour cordes en mi majeur et la rythmique
de la variation de Corelli afin de coordonner les mouvements de Gelsomina et du Fou lorsqu’ils jouaient avec des instruments
de musique.
La danse néoclassique
« Il s’agit d’une conception de la danse classique qui se développe au XXe siècle. Répondant à des préoccupations esthétiques qui
diffèrent de celles des chorégraphes du XIXe siècle, la danse néoclassique prend naissance avec les Ballets russes de Diaghilev,
tout particulièrement dans le travail de M. Fokine, prolongé de manières diverses par Leonid Massine, Brovislava Nijinska,
Georges Balanchine, Ninette de Valois, Antony Tudor, Serge Lifar, entre autres. Elle débouche dans la seconde moitié du XXe
siècle sur la naissance d’une « danse classique contemporaine », qui se caractérise par des métissages variés faisant appel à
des formes empruntées aussi bien à la danse jazz, aux techniques modernes qu’au folklore mondial ou à l’acrobatie, tendance
qu’illustrent différemment des chorégraphes comme Jerome Robbins, Roland Petit, Janine Charrat, Agnès De Mille, Kenneth
MacMillan, Maurice Béjart, John Neumeier, Hans Van Manen, Jiři Kylián, Mats Ek, Nacho Duato, Thierry Malandain ou
William Forsythe.
Sur le plan technique, d’une manière générale, la danse néoclassique se démarque de l’esthétique corporelle linéaire du ballet
prévalant avant le XXe siècle, en intégrant des formes angulaires : mouvements et poses en plié, pointes « outrepassées »,
articulations cassées. Le référentiel d’espace traditionnellement dessiné par les horizontales et les verticales est déplacé par des
arabesques étirées, un travail des pointes hors de l’axe poussé parfois jusqu’au déséquilibre, le passage au sol. Des positions non
en dehors sont intégrées au vocabulaire […], voire des positions en dedans, tandis que tout le corps est mis à contribution (mains,
bouche, regard, voix). Cette évolution technique est soulignée par l’usage régulier du justaucorps et du collant, qui exaltent les
lignes du corps, mais c’est surtout l’abandon de la narration comme processus chorégraphique dominant – et par conséquent de
la pantomime – qui caractérise, sur le plan esthétique, l’avènement du ballet néoclassique. Ouvrant sur l’apparition du ballet à
thèse ou d’atmosphère, cette rupture avec la narration ne signifie pas pour autant que la danse soit conçue comme une abstraction :
Georges Balanchine, par exemple, récuse ce terme, considérant que si c’est le mouvement en soi qui devient l’unique moteur,
le corps reste cependant une réalité concrète. La mutation du référentiel technique et esthétique opérée par la danse néoclassique
trouve sa meilleure traduction dans les transformations apportées au pas de deux. Celui-ci perd sa structure fixée par Marius Petipa
(adage1, variation de l’homme, variation de la femme, coda2) pour chercher une véritable complémentarité entre la danseuse et
le danseur, ce dernier n’étant plus réduit au simple rôle de porteur. Il cesse, de plus, d’être une cellule autonome, clé de voûte
de l’architecture chorégraphique, pour se fondre dans l’ensemble de celle-ci. Le pas de deux peut en outre être exécuté par
deux hommes ou deux femmes et intégrer sensualité, voire se sexualiser nettement, outrepassant ainsi les conventions du genre.
Actualisation régulière de la tradition académique héritée des siècles précédents, la danse néoclassique s’affirme comme un
langage vivant du XXe siècle, tentant de rendre compte de la complexité des mutations et de la profondeur des fractures qui
le traversent. »
1. Adage : première partie du pas de deux.
2. Coda : troisième et dernière partie d’un pas de deux ou final, au cours duquel les interprètes reviennent en scène.
Marie-Françoise Bouchon et Sylvie Jacq-Mioche, Dictionnaire de la Danse, sous la direction de Philippe Le Moal,
p. 610, éditions Larousse, 1999.
Biographies
Myron Romanul
Direction musicale
Né à Baltimore, Myron Romanul étudie le piano à Boston et fait ses débuts de soliste au Boston
Symphony Orchestra. Cymbaliste américain reconnu, il joue et enregistre notamment avec le
Speculum Musicae sous la direction de Pierre Boulez. Parallèlement, il mène une carrière de chef
d’orchestre après des études au Berkshire Music Center à Tanglewood avec Seiji Ozawa, André
Watts et Gunther Schuller. Devenu chef d’orchestre du Boston Ballet, il part ensuite pour l’Europe.
De 1985 à 1990, il est chef d’orchestre et pianiste au Staatstheater de Stuttgart, et travaille avec
le Stuttgart Ballet. Il fait ensuite partie de la direction musicale des opéras de Karlsruhe, Mainz
et Essen. Il est alors invité dans les grands orchestres en Allemagne et dans le monde entier.
Aujourd’hui chef d’orchestre au Nationaltheater de Munich, il est aussi à la tête du Massachusetts
Symphony Orchestra et chef d’orchestre invité de l’Opernhaus Halle et du Oper Leipzig où il dirige
le Gewandhaus Orchester. Au cours de la saison 2012-2013, il dirige l’Orchestre philharmonique
de Strasbourg pour Don Quichotte ou l’illusion perdue par le Ballet de l’Opéra national du Rhin.
Son talent et son expérience lui permettent de maîtriser aussi bien les œuvres pour grands orchestres,
les opéras, opérettes, ballets et les comédies musicales.
Mario Pistoni
Chorégraphie
Né en 1932 à Rome, Mario Pistoni, danseur et chorégraphe, se forme à l’Opéra de Rome et devient
premier danseur en 1951. En 1953, il rejoint La Scala de Milan et devient très rapidement soliste.
Il y interprète les grands ballets du répertoire (Giselle, Petrouchka, Roméo et Juliette…). En 1960,
il fonde le groupe « les solistes de La Scala » et compose une nouvelle version du Fils Prodigue
de Prokoviev, débutant ainsi une œuvre chorégraphique très féconde dont on peut citer Francesca
da Rimini (musique Piotr Ilitch Tchaïkovski, mise en scène Bruno Menegatti), Conceto dell’albatro
(Luca Ghedini) et son chef-d’œuvre La Strada (Nino Rota) créé en 1966 et tourné dans le monde
entier depuis.
Prolongements pédagogiques
Arts du son
> La suite de ballet de La Strada, s’imprégner des thèmes et des atmosphères musicales passant du rire aux larmes
> Lien étroit entre la musique et la chorégraphie (rapport image/son)
> Chanson d’Edith Piaf, Le Chemin des forains
> Musique et arts du cirque ou arts forains :
Les Forains d’Henri Sauguet, La Ballade des baladins de Gilbert Bécaud, etc.
> Les musiques de films célèbres de Nino Rota : Le Parrain et Le Parrain II de Coppola,
Roméo et Juliette de Zeffirelli, Le Guépard ou Rocco et ses frères de Luchino Visconti
Arts du langage
> Portraits des personnages du ballet
> Adaptation théâtrale : Gelsomina de Pierrette Dupoyet (Festival d’Avignon, 1992)
> Le thème de la vie itinérante en littérature (exemple : Sans famille d’Hector Malot)
> En histoire : le néoréalisme, mouvement cinématographique qui apparaît en Italie
pendant la Seconde Guerre mondiale
> Le vérisme à l’opéra et au cinéma
Arts du spectacle vivant
En EPS :
> Arts du cirque sur des extraits de la musique du ballet La Strada
> élaborer une chorégraphie à partir de deux passages musicaux contrastés (mise en valeur de différentes atmosphères)
> Mario Pistoni, chorégraphe et danseur exceptionnel
> éléments, repères chorégraphiques de La Strada
Arts du visuel
> Affiches et arts forains
> Cinéma : un ballet élaboré d’après le film de Federico Fellini, La Strada (site Ciné-Ressources)
> Films The Circus (1928) avec Charlie Chaplin ou La Monstrueuse Parade de Tod Browning (1932)
> Federico Fellini et le cinéma italien
> Le cinéma italien et la représentation du quotidien : un art politique et social (« il faut descendre dans les rues,
dans les casernes, dans les gares : ainsi seulement, pourra naître un cinéma à l’italienne », Leo Longanesi dans L’Italiano)