Le parc et les acteurs du nucléaire nord-américain

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Le parc et les acteurs du nucléaire nord-américain
Le parc et les acteurs du nucléaire
nord-américain : perspectives pour
l’industrie française
Service nucléaire,
Ambassade de France à Washington
Octobre 2013
Table des matières
1 Récapitulatif des acteurs industriels
2
1.1 Dynamique industrielle : exploitants, vendeurs de réacteur, firmes d’EPC,
fournisseurs de composants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.2 Vendeurs de réacteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.2.1 Réacteurs de génération III dont la construction est envisagée aux
États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.2.2 Westinghouse Electric Company et l’AP1000 : liens entre Westinghouse, Toshiba, Shaw, CB&I, Stone&Webster, Technip . . . . . . 3
1.2.3 Babcock&Wilcox . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.2.4 GE-Hitachi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.2.5 Areva Inc. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.2.6 Candu Energy, AECL, SNC-Lavalin . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.3 Architectes-ensembliers, "engineering, procurement and construction" (EPC) 6
1.4 Vendeurs de composants, autres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
2 Augmentation de la capacité du parc
2.1 Nouveau nucléaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.1.1 Quatre AP1000 en construction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.1.2 Autres projets de réacteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.1.3 Le problème particulier de la participation étrangère . . . . . . . .
2.1.4 Quelques élements sur le "design" des nouveaux réacteurs et les
fournisseurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.2 Achèvement de construction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.3 Augmentation de puissance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.3.1 Régulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.3.2 Précisions par réacteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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3 Parc actuel - maintenance et fermetures définitives
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3.1 "Engineering, procurement and construction" (EPC) . . . . . . . . . . . . 15
3.1.1 Contrats importants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
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3.1.2 Cas particuliers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Générateurs de vapeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.2.1 Réacteurs concernés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.2.2 Crystal River-3 : un remplacement de GV fissure l’enceinte de
confinement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.2.3 San Onofre : installation de GV défectueux . . . . . . . . . . . .
Instrumentation et contrôle (I&C), un sujet qui gagne en importance . .
Post-Fukushima . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.4.1 Estimation des coûts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.4.2 Réaction de l’industrie : le programme FLEX . . . . . . . . . . .
3.4.3 REB : La question particulière des filtres dans les systèmes de
ventilation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Réfections de Candu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.5.1 Bruce, Bruce Power, Ontario, 8 Candus . . . . . . . . . . . . . .
3.5.2 Point Lepreau, NB Power, Nouveau Brunswick, 1 Candu . . . . .
3.5.3 Darlingon, OPG, Ontario, 4 Candus . . . . . . . . . . . . . . . .
3.5.4 Gentilly-2, HydroQuébec, Québec, 1 Candu ; fermeture définitive
. 16
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Introduction
Champ d’étude Ce document présente un état des lieux du marché de l’ingénierie
nucléaire en Amérique du Nord (type, volume des contrats). Il s’appuie essentiellement sur
nos archives de presse (Nuclear News Flashes et Nucleonics Week, de l’agence Platts) et nos
précédentes notes. Nous rapportons, sur 2011-2013, quelques signatures de contrats marquantes entre les acteurs de l’électronucléaire. Malheureusement, de nombreux montants
restent confidentiels.
Nous ne prétendons pas à l’exhaustivité et en particulier, ce document ne traite pas les
problématiques d’ingénierie liées au transport, au cycle du combustible ou aux réacteurs
innovants ("Small Modular Reactors" [SMR] et génération IV). Sur les SMR, on pourra
consulter le rapport du service nucléaire de Washington. Nous nous concentrons donc
plutôt sur les problèmes liés aux réacteurs existant en Amérique du Nord ou à ceux en
construction.
La première partie liste les entreprises mentionnées par la suite, le lecteur pourra s’y
référer au cours de la lecture. Nous présentons ensuite les activités industrielles liées à
l’augmentation de la capacité nucléaire américaine, puis les activités liées à la maintenance
du parc actuel.
En règle générale, nous désignons les réacteurs par les trois éléments suivants : nom du
réacteur, exploitant, État fédéré où il se trouve.
L’objectif général de cette étude est d’ouvrir de nouvelles perspectives de marché pour
les entreprises françaises.
Généralités sur les perspectives d’ingénierie dans le domaine du nucléaire en Amérique
du Nord Le développement des gaz de schiste a fait fortement chuter le prix du gaz
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Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
naturel aux États-Unis, si bien que pour la création de nouvelles capacités de production
électrique, le nucléaire est dans une situation difficile. Les mesures post-Fukushima de renforcement de la sûreté participent également au renchérissement de l’électricité nucléaire
et à la perte de dynamisme du secteur. 100 réacteurs sont aujourd’hui en exploitation. 4
réacteurs sont en construction sur le sol étasunien : deux à Vogtle (Southern, Géorgie) et
deux à Summer (SCE&G, Caroline du Sud). Depuis début 2013, quatre réacteurs ont
définitivement fermé et un autre, Vermont Yankee, fermera d’ici fin 2014.
Au Canada, 19 réacteurs Candu sont aujourd’hui en exploitation. 18 d’entre eux sont
répartis en 3 centrales dans la provinde de l’Ontario, 1 dans le Nouveau Brunswick. Un
réacteur a fermé au Québec fin 2012. En Ontario, la construction de deux nouveaux
réacteurs est parfois envisagée.
1 Récapitulatif des acteurs industriels
1.1 Dynamique industrielle : exploitants, vendeurs de réacteur, firmes
d’EPC, fournisseurs de composants
Pour les choix industriels concernant les réacteurs du parc nord-américain, le maître
d’ouvrage est toujours un vendeur d’électricité (appelé aussi "exploitant", "électricien",
"operator" ou "utility" en anglais, etc.). En cas d’accident, c’est lui qui endosse la
responsabilité juridique. Ils sont régulés :
• Par la "Nuclear Regulatory Commission" (NRC) et par elle seulement sur les questions
de sûreté nucléaire. Il s’agit d’une agence fédérale.
• Par la "Public Sevice Commission" (PSC) de l’État fédéré dans lequel le réacteur en
question est exploité, pour les questions de mode de financement en particulier.
On compte aujourd’hui environ 25 exploitants de réacteurs nucléaires aux États-Unis.
Ceux-ci se sont fortement regroupés au cours de la décennie passée. Ils se réunissent au
sein de l’"Institute of Nuclear Power Operators" (INPO), pour de l’échange de bonne
pratiques. L’INPO est très actif sur les questions de sûreté.
Le Canada, depuis la fermeture de Gentilly-2, compte trois exploitants de réacteurs.
Pour la maintenance du parc existant, l’exploitant passe un contrat avec un maître
d’œuvre, architecte-ensemblier ("engineering, procurement and construction" : EPC).
Celui-ci dirige les opérations industrielles, en particulier le remplacement des composants
(turbines, pompes, etc.), qu’il se fournit auprès de différents fournisseurs.
Pour la construction de nouveaux réacteurs, le futur exploitant signe un contrat avec
un vendeur de réacteur, lequel est très souvent déjà en consortium étroit avec une
entreprise d’EPC spécifique.
Les industriels du nucléaire américain (y compris de nombreuses entreprises étrangères)
se réunissent au sein d’un groupe officiel de lobbying, le "Nuclear Energy Institute" (NEI).
1.2 Vendeurs de réacteurs
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1.2.1 Réacteurs de génération III dont la construction est envisagée aux
États-Unis
Le tableau ci-dessous présente tous les types de réacteurs de génération III présentés à
la NRC pour l’obtention d’une "design certification" (DC). On distingue les réacteurs à
eau pressurisée (REP) et les réacteurs à eau bouillante (REB).
Vendeur
Réacteur Caractéristiques
DC de la NRC
Westinghouse
Déposée en 2002
Electric
AP1000
REP, 1100 MWe
Accodée en décembre 2011
Company (WEC)
GE-Hitachi
ESBWR
REB, 1600 MWe
Demande déposée en août 2005
Areva Inc.
US-EPR
REP, 1600 MWe
Demande déposée en déc. 2007
Mitsubishi
US-APWR
REP, 1530 MWe
Demande déposée en déc. 2007
DC obtenue par GE en 1997
Séparément
pour 15 ans
Toshiba
Demande de renouvellement
ABWR
REP, 1100 MWe
et GE-Hitachi
en 2010 par GE-Hitachi
et Toshiba séparément
Candu Energy
EC-6
Candu, 700 MWe
Demande déposée en déc 2007
1.2.2 Westinghouse Electric Company et l’AP1000 : liens entre Westinghouse,
Toshiba, Shaw, CB&I, Stone&Webster, Technip
"Westinghouse Electric Company LLC" est la filiale de Westinghouse qui vend l’AP1000,
produit-phare pour l’industrie nucléaire américaine. Elle est basée en Pennsylvanie. Les
premiers échanges de lettres entre Westinghouse et la NRC sur le "design" de l’AP1000
semblent remonter à 2000. Quatre AP1000 sont aujourd’hui en construction aux ÉtatsUnis.
En janvier 2012, Westinghouse a ouvert des bureaux au Canada (dans l’espoir sans
doute de vendre des AP1000 dans le cadre de l’appel d’offres de Darlington [Ontario]).
Westinghouse développe également un modèle de petit réacteur, Westinghouse SMR.
2000, le groupe Shaw se diversifie dans le nucléaire avec l’achat de Stone&Webster :
Alors que la firme d’ingénierie et gros travaux Stone&Webster faisait face à d’importantes
difficultés financières, Shaw (basée en Louisiane, EPC sans spécialisation nucléaire) a
racheté Stone&Webster (basée dans le Massachusetts, EPC avec une spécialisation sur les
centrales électriques, nucléaires comprises) pour 163 MUSD.
2005, Rapprochement Shaw-Westinghouse : En 2005, Stone&Webster, filiale de Shaw,
a rejoint le consortium formé par Westinghouse et Mitsubishi Heavy Industries qui visait
à vendre 4 AP1000 en Chine. Par la suite, la collaboration entre Westinghouse et Shaw
sur l’AP1000 est devenue de plus en plus étroite.
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2006, Rapprochement Shaw-Toshiba, rachat de Westinghouse par les deux groupes :
En 2006, Shaw et Toshiba ont formé un partenariat avec le Japonais IHI Corp. Toshiba
a racheté Westinghouse à la "British Nuclear Fuels PLC" pour 5,4 Mds USD. Elle a
immédiatement revendu 20% des parts à Shaw, 3% à IHI, Shaw ayant réglé la transaction
par l’émission d’obligations en yens.
En novembre 2010, Shaw signe avec Toshiba un contrat d’exclusivité pour les travaux
d’EPC sur son réacteur ABWR. Cela concerne en particulier le projet South Texas Project
(voir 2.1.3).
2011, Shaw se retire de Westinghouse : En septembre 2011, Shaw a annoncé qu’elle
exercerait son pouvoir d’imposer à Toshiba de lui racheter ses 20% de parts dans Westinghouse avant octobre 2012. En effet, l’appréciation du yen face au dollar depuis 2006 avait
fait augmenter la valeur des obligations en yens émises par Shaw de plus de 600 MUSD,
les portant à 1,7 Mds USD. Le rachat des parts par Toshiba a été finalisé en janvier 2013.
Shaw a alors perdu son statut de sous-traitant EPC exclusif de Westinghouse, sauf pour
les AP1000 déjà en construction.
2012 : rachat de Shaw par CB&I : En juillet 2012, on a appris que Shaw allait être
racheté par CB&I. "Sur le terrain", CB&I avait plutôt tendance à être le sous-traitant de
Shaw et Westinghouse. En août 2012, Shaw a revendu Stone&Webster à Technip (EPC
basée à Paris, chiffre d’affaires 8,2 Mds EUR). Le rachat de Shaw par CB&I, lui, a été
finalisé en février 2013. Dans ce qui suit, on désigne le groupe Shaw (1986-2013) par
Shaw/CB&I.
CB&I ("Chicago Bridge and Iron"), comme son nom ne l’indique pas, est une multinationale basée aux Pays Bas et spécialisée dans l’EPC pour l’énergie. Son chiffre d’affaires
en 2012 avoisinnait 5,5 Mds USD, pour 50 000 employés environ.
1.2.3 Babcock&Wilcox
B&W est un vendeur traditionnel de réacteurs nucléaires aux États-Unis qui, pour
ce qui est du nouveau nucléaire, semble aujourd’hui vouloir se concentrer sur les petits
réacteurs.
B&W, en mai 2011, a obtenu le N-stamp de l’"American Society of Mechanical Engineers" (ASME) pour son usine d’Euclid (Ohio), garantissant la qualité de l’équipement
nucléaire produit. L’installation d’Euclid vient rejoindre à ce titre quatre autres usines
Babcock&Wilcox en Amérique du Nord.
Le 11 janvier 2012, B&W a fait savoir qu’elle restructurait sa branche "opérations
nucléaires commerciales", pour traduire l’effort important que la compagnie fait porter
sur le développement du mPower, son modèle de "small modular reactor" (SMR), le plus
avancé aujourd’hui aux États-Unis.
Il y a donc création de deux filiales :
• Babcock&Wilcox Modular Nuclear Energy Inc. : recherche SMR.
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• Babcock&Wilcox Nuclear Energy Inc. : services nucléaires, manufacture d’équipements commerciaux, vente, etc.
1.2.4 GE-Hitachi
2006, rapprochement GE et Hitachi : En novembre 2006, General Electric et Hitachi
ont annoncé leur intention de rapprocher leurs activités nucléaires : GE prendrait une
participation de 20% dans les activités nucléaires d’Hitachi, Hitachi prendrait une participation de 40% dans les activités nucléaires de GE. Au lieu de cela, en 2007, les deux
entreprises ont formé deux coentreprises :
• GE-Hitachi aux États-Unis : détenue à 60% par GE, 40% par Hitachi.
• Hitachi-GE au Japon : détenue à 80% par Hitachi, 20% par GE.
Les deux compagnies sont complémentaires, notamment sur les REB. La NRC a donc
transféré les permis accordés à GE à la coentreprise GE-Hitachi, laquelle a son siège social
en Caroline du Nord.
Un catalogue fourni : En plus des efforts pour la commercialisation de l’ESBWR en
Amérique du Nord, on peut remarquer que :
• GE a obtenu en 1997 une DC de la NRC pour un ABWR codéveloppé avec Toshiba.
Cette DC a une durée de vie de 15 ans. En 2010, les deux compagnies ont, séparément,
fait une demande de renouvellement.
• GE-Hitachi développe un petit réacteur, PRISM.
Aux États-Unis, c’est sur l’ESBWR que GE-Hitachi fait porter ses efforts : il s’agit
d’un "design" dérivé de l’ABWR.
1.2.5 Areva Inc.
Areva Inc. est la filiale étasunienne d’Areva.
Areva a été formée en 2001 par fusion de :
• Framatome ANP, maintenant Areva NP, pour la construction des réacteurs, les services à l’exploitant et les composants : Framatome, la "FrancoAméricaine de Constructions Atomiques", avait un lien fort avec les États-Unis. En
1958, Framatome a été créée pour exporter le REP Westinghouse en Europe. Ce
n’est qu’en 1981 que Westinghouse a revendu l’intégralité de ses parts. Début 2001,
Framatome a également récupéré la branche nucléaire de l’Allemand Siemens pour
donner Framatome ANP (détenue à 34% par Siemens jusqu’à ce qu’Areva rachète
ses parts pour 1,52 Mds EUR nets en 2011).
• Cogema, maintenant Areva NC, pour le cycle du combustible : Formée en
1976, elle reprend les activités de production d’uranium du CEA.
• Technicatome, maintenant Areva TA : Fondée en 1972 à partir de la branche
piles du CEA.
Framatome ANP puis Areva ont fourni de très nombreux services aux réacteurs de la
flotte nucléaire américaine (maintenance, combustible, augmentations de puissance, etc.).
Areva et URS Corporation (firme d’EPC basée à San Francisco, 10 Mds USD de
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chiffre d’affaires en 2012) ont formé SGT en 1992, une coentreprise spécialisée dans le
remplacement de générateurs de vapeur pour les REP. L’entreprise s’est ensuite diversifiée
et remplace aujourd’hui d’autres pièces délicates, comme les têtes de cuve. Voir 3.2.
En août 2009, Areva a formé une coentreprise avec Day&Zimmerman (EPC, basée en
Pennsylvanie, chiffre d’affaires de 2,2 Mds USD en 2012), Areva DZ, pour des services à
l’exploitant.
En juillet 2011, Areva a ouvert des bureaux dans le Tennessee, principalement pour se
rapprocher de TVA, l’un de ses gros clients (services sur le combustible et la maintenance).
En février 2013, elle a ouvert des bureaux dans l’Arizona.
En mars 2013, Areva Inc. a déplacé son siège social à Charlotte, en Caroline du Nord
(elle était auparavant à Bethesda, dans le Maryland, en banlieue de Washington D.C.),
pour se rapprocher de ses activités de terrain et d’ingénierie et de ses clients. Charlotte
est un pôle important pour le nucléaire américain.
1.2.6 Candu Energy, AECL, SNC-Lavalin
Candu Energy, à l’origine la branche réacteurs d’"Atomic Energy of Canada Limited"
(AECL), a été rachetée en juin 2011 à prix cassé (15 MCAD) par l’entreprise de travaux
publics SNC-Lavalin.
AECL est une corporation fédérale de la Couronne, dont le cœur d’activité est aujourd’hui la recherche et la production d’isotopes médicaux à Chalk River (Ontario).
SNC-Lavalin, basée à Montréal avec un chiffre d’affaires de 7 Mds USD en 2011, est la
plus grande entreprise de travaux publics du Canada.
1.3 Architectes-ensembliers, ”engineering, procurement and construction”
(EPC)
On s’aperçoit que les compagnies d’EPC sont, à l’exception peut-être de Bechtel,
tournées vers un constructeur de réacteur en particulier :
• Bechtel : plus grosse compagnie d’EPC des États-Unis, basée à San Francisco, 37
Mds USD de chiffre d’affaires en 2012, 52 000 employés à travers le monde. Transversal
quant au type de réacteur
• Sargent&Lundy : davantage orientée conseil. Transversale.
• Shaw/CB&I, CB&I, Stone&Webster : Voir 1.2.2 pour les différents acquisitions : ce sont les entreprises d’EPC qui ont des partenariats importants avec
Westinghouse pour l’AP1000.
• Fluor : Basée au Texas, 27 Mds de chiffre d’affaires en 2012. Ses activités nucléaires
consistent en des services de nettoyage pour le "Department of Energy" et en une
participation à 55% dans le développeur de SMR NuScale. Sur le nouveau nucléaire,
Fluor est en lien avec GE-Hitachi et l’EPC de l’ESBWR (Pologne, North Anna [voir
2.1.2]).
• CH2M Hill : Compagnie d’EPC basée dans l’Oregon, avec un chiffre d’affaires de
5,5 Mds USD en 2011. Aux États-Unis dans le domaine du nucléaire, se concentre
aujourd’hui sur le démantèlement pour le compte du DOE, mais montre de l’intérêt
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Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
pour le nouveau nucléaire (projet de contruction de réacteurs aux Émirats Arabes
Unis).
• SNC-Lavalin : Maison mère de Candu Energy, voir 1.2.6.
1.4 Vendeurs de composants, autres
Il est difficile, à partir de la presse, de tracer les vendeurs de composants pour le parc
américain.
Mitsubishi Heavy Industries : MHI est un géant industriel japonais qui a fourni tous
les réacteurs à eau pressurisée du Japon. Basée à Tokyo, son chiffre d’affaires de 2011
était de 35 Mds USD.
En mai 2011, MHI a fait savoir qu’elle ouvrirait un centre de 135 employés à Charlotte
(Caroline du Nord), dans le but d’assurer ses activités de prestataire de services et
de fournisseur de composants. De plus, le centre visait sans doute à faire construire
l’US-APWR de Mitsubishi sur le sol américain (voir le cas de North Anna en 2.1.2).
C’est MHI qui a fourni les générateurs de vapeur de San Onofre (voir 3.2.3).
Siemens : turbines Siemens, conglomérat allemand, chiffre d’affaires de 73 Mds USD
environ en 2011. Siemens fournit de nombreuses tubines et composants pour les réacteurs
américains.
Curtiss-Wright : En décembre 2011, la compagnie a annoncé qu’elle rachetait deux
compagnies d’inspection et de test de composants (Anatec International et Lambert,
MacGill, Thomas). Le montant du rachat n’est pas connu, mais les chiffres d’affaires
d’Anatec et Lambert s’élèvent ensemble à 28 MUSD. Ainsi, Curtiss-Wright se positionne
comme fabricant de pompes, valves et composants pour l’industrie nucléaire ; et comme
prestataire de services. Curtiss-Wright est basée dans l’État de New-York et affichait 2,5
Mds USD en 2012.
Lockheed-Martin : C’est une compagnie américaine spécialisée dans l’équipement de
pointe, en particulier pour l’aéronautique et la défense, qui se diversifie dans les systèmes
d’instrumentation et de contrôle des centrales. La compagnie est basée dans le Maryland
et affichait en 2011 un chiffre d’affaires de 46 Mds USD.
Newport News Nuclear : Filiale de Huntington Ingalls (dont le corps de métier est la
construction navale). NNN a été fondée avec le "Department of Energy" comme principal
client et fabrique des composants de l’AP1000. Huntington Ingalls est basée en Virginie,
avec 6,7 Mds USD de chiffre d’affaires en 2012.
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Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
2 Augmentation de la capacité du parc
En 2012, l’"Energy Information Administration" (EIA), rattachée au DOE, a estimé
que la capacité nucléaire américaine augmenterait de 4% d’ici 2025, passant de 101 à
115 GW. Cette augmentation viendrait non seulement de la construction de nouveaux
réacteurs, mais aussi d’augmentations de puissance des réacteurs existants. Si la fermeture
de quatre réacteurs en 2013 aux États-Unis incite à revoir cette estimation à la baisse,
on constate que trois chantiers de construction sont actifs, et que des augmentations de
puissance sont en cours. Ces nouvelles constructions marquent la volonté américaine, en
dépit du très bas prix du gaz aux États-Unis, de conserver à l’énergie nucléaire sa place
dans le bouquet énergétique américain de demain et de rester un concurrent actif sur les
marchés à l’export.
2.1 Nouveau nucléaire
Nous le verrons, plusieurs électriciens envisagent ou ont envisagé de construire des
réacteurs de génération III en Amérique du Nord. Cela passe par une candidature auprès
de la NRC pour l’obtention d’une "combined Construction and Operating Licence" (COL).
De même que l’AP1000 de Westinghouse est le seul "design" a avoir pour l’heure été
certifié par la NRC, seules deux COL ont été accordées, et deux chantiers AP1000 sont
lancés.
2.1.1 Quatre AP1000 en construction
Deux projets distincts de construction de deux AP1000 chacun sont menés en parallèle
par des électriciens différents, en Géorgie et en Caroline du Sud. Il s’agit de "têtes de
série" sur le sol américain (d’autres unités sont en construction en Chine), ce sont les
premiers réacteurs en construction depuis 30 ans.
Les industriels doivent compenser une perte de savoir faire et les deux chantiers affichent
retards et surcoûts (raisonnables, semble-t-il, pour des "têtes de série"). Les partenaires
des projets se rejettent la responsabilité de ces surcoûts et ont porté leur différend devant
la justice. Aux États-Unis, ce type de procédure judiciaire est mauvais signe pour l’avenir
d’un projet industriel et les parties, conscientes des enjeux, s’activent en coulisse pour
trouver un accord amiable.
Pour l’instant, les calendriers des chantiers n’ont que quelques semaines d’écart.
2 réacteurs en construction en Géorgie (Vogtle-3 et 4, Southern) Southern a déposé
une demande COL auprès de la NRC en 2008, pour deux AP1000 sur le site de Vogtle
(Géorgie). Au plan financier, le projet Vogtle s’est vu accorder une garantie de prêt
de 8,3 Mds USD de la part du DOE en février 2010, mais les conditions d’attribution
définitive de cette garantie sont toujours en cours de finalisation.
La NRC a délivré la COL en février 2011. Le projet est détenu à 45,7% par Georgia
Power, filiale de Southern, à 30% par Oglethorpe Power, à 22,7% par MEAG Power et à
1,6% par la municipalité de Dalton.
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Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
Figure 2.1: À Vogtle, mars 2013, travail sur le "premier béton"
Le CEO de Southern a alors indiqué que 4 Mds USD avaient déjà été dépensés, sur un
coût total estimé à 14 Mds USD. La NRC avait en effet autorisé Southern à commencer
les premiers travaux sur le site (excavation, etc). La mise en service était alors prévue en
2016 pour le premier réacteur, 2017 pour le second.
On parle aujourd’hui de surcoûts de 900 MUSD et d’un retard d’un an (janvier 2018
pour Vogtle-3). Le retard est notamment lié à des changements de "design" (contradiction
dans le dossier certifié sur le ferraillage du radier de l’îlot nucléaire ["rebar"]) et aux délais
nécessaires à l’obtention des autorisations correspondantes auprès de la NRC.
Le radier de Vogtle-3 a finalement été coulé en mars 2013, et le fond de la cuve a été
posé le 3 juin.
2 réacteurs en construction en Caroline du Sud (Summer-3 et 4, SCE&G) Moins de
deux mois après Vogtle, c’est le projet à 55%-45% de "South Carolina Electric and Gas"
(SCE&G) et Santee Cooper ("state owned electric utility") à Summer (Caroline du Sud)
qui reçoit la COL de la NRC, également pour 2 AP1000 de Westinghouse.
SCE&G et "Santee Cooper" ont alors indiqué que 1000 personnes travaillaient déjà à
la préparation du site. Les mises en service étaient prévues initialement pour fin 2016 et
2019. Elles sont aujourd’hui prévues pour 2017 et 2018. Les estimation des coûts sont
plus optimistes qu’à Vogtle : le projet était chiffré à 10 Mds USD, et SCE&E parle d’un
surcoût de 200 MUSD lié aux délais rencontrés jusqu’à présent.
En mars 2011, SCE&G a signé un contrat de 275 MUSD avec Pike Electric pour
l’amélioration des lignes de transmission dans le but de connecter les deux nouveaux
réacteurs au réseau.
Le radier de Summer-3 a été coulé en mars 2013 également, et le fond de l’enceinte de
confinement a été posé le 22 mai.
10
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
Le problème de la modularité, surcoûts et retards Le processus de fabrication des
enceintes de confinement des AP1000 est nouveau et modulaire : des modules sont
fabriqués en composite béton-acier, contenant des cloisons, des câbles, de la tuyauterie,
etc. Ces modules sont ensuite assemblés sur site pour constituer l’îlot nucléaire. Leur
soudure est déterminante pour le respect des délais des projets. Cette "modularité" est
censée faciliter la mise en place de la chaîne d’approvisionnement.
En 2011, l’usine chargée de fabriquer les modules était l’installation de Shaw/CB&I
à Lake Charles (Louisiane). En avril, après de premiers délais liés à des problèmes
d’assurance qualité et de management, Shaw/CB&I prévoyait que son usine tournerait à
un "haut niveau de production" en juin. En octobre, elle parlait de décembre.
Les problèmes n’ont pas été résolus. En avril 2013, CB&I a achevé l’acquisition du
groupe Shaw et a donc récupéré la tâche de fabriquer les modules.
Les maîtres d’œuvre CB&I et Westinghouse ont fini par passer temporairement le relais
à Newport News en remplacement de Shaw/CB&I, qui a commencé la pré-fabrication
de modules fin 2012. En effet, à Lake Charles, la NRC a relevé en avril 2012 que
l’environnement de travail n’incitait pas les employés à soulever d’éventuels problèmes
de sûreté. Les sous-modules déjà livrés sur sites par CB&I présentent des problèmes de
soudures, en cours de correction sous le contrôle de la NRC.
2.1.2 Autres projets de réacteurs
Le nucléaire fait face à d’importants défis pour la construction de nouvelles capacités
électriques et le lancement de projets à court et moyen terme est incertain aux États-Unis.
D’après le Président du NEI, si cela devait se faire, ce serait sans doute dans le Sud-Est
(marchés régulés).
Depuis la mise en place du système de permis par COL, la NRC a reçu 18 candidatures.
7 d’entre elles sont aujourd’hui suspendues, indiquant plus ou moins l’abandon du projet.
Sur les 11 restantes, 5 portent sur l’AP1000 (seul réacteur de génération III ayant la
"design certification" de la NRC, 2 COL ont été accordées), 1 sur l’ABWR de Toshiba, 2
sur l’ESBWR de GE-Hitachi, 1 sur l’US-APWR de Mitsubishi, 2 sur l’US-EPR d’Areva.
Ainsi donc, si la finalisation des projets est incertaine, le processus de délivrance de
permis continue. Le déroulement de la construction des 4 AP1000 sera sans aucun doute
déterminant pour donner de l’impulsion à ces projets plus lointains.
Les projets les plus significatifs sont :
• North Anna-3, Dominion, Virginie, US-APWR puis ESBWR : Dominion
attend sa COL pour fin 2015 et prendra sa décision de construire ou non en 2016.
L’US-APWR de Mitsubishi avait été sélectionné en 2010, mais en avril 2013, Dominion
a changé ses informations à la NRC pour poser l’ESBWR de GE-Hitachi en "design"
favori. Dominion a passé un contrat avec GE-Hitachi et Fluor (EPC).
• Floride : FP&L pour deux réacteurs à Turkey Point ; Duke Energy pour
deux réacteurs à Levy County, 4 AP1000 : Les deux compagnies ont déposé
des demandes de COL à la NRC mais ne prévoient pas une mise en service avant
le début des années 2020. Duke avait signé fin 2008 un contrat d’EPC de 7.65 Mds
USD avec Westinghouse et Stone&Webster pour deux AP1000, et parle d’une mise
11
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
en ligne en 2024. En 2013, Duke a dissous ce contrat, même s’il poursuit la procédure
de COL et pourrait à l’avenir redémarrer le projet.
• William States Lee-3, Duke, Caroline du Sud, 2 AP1000 : L’examen de
la demande de COL prend plus de temps que prévu, notamment à cause d’un
déplacement de l’emplacement prévu pour l’îlot nucléaire. Si Duke construisait les
réacteurs, ce serait pour une mise en ligne dans les années 2020.
• Fermi, DTE Energy, Michigan pour un ESBWR : L’obtention du permis est
susceptible d’être très longue et DTE a annoncé que, vraisemblablement, le projet
ne pourrait être mené à bien qu’avec un prix sur le carbonne et une garantie de prêt
fédérale.
• Canada, OPG pour quatre réacteurs, 4800 MW d’ici 2018 sur le site de
Darlington, Ontario : Un appel d’offres a été lancé en mars 2008 par OPG. Les
trois dossiers de candidature seront rejetés en 2009 (à cause des incertitudes sur
l’avenir d’AECL). Les trois réponses à l’appel d’offre de 2008 étaient :
– Areva (US EPR, 1650 MW) ;
– Westinghouse (AP1000) ;
– AECL (ACR-1000).
En juin 2012, OPG annoncé la signature gré à gré d’un accord entre OPG et
Westinghouse d’une part, SNC-Lavalin d’autre part, pour préparer des devis détaillés
(vraisemblablement de l’AP1000 et de l’ACR-1000) pour un montant de 26 MUSD.
2.1.3 Le problème particulier de la participation étrangère
Calvert Cliffs-3, 1 EPR d’Areva, UniStar, Maryland UniStar a été fondée en 2007
comme une coentreprise entre EDF et Constellation Energy, dans le but de construire
une flotte EPR aux États-Unis. En parallèle, Areva travaillait avec Bechtel au "design"
américanisé du réacteur. UniStar a déposé une demande de COL en juillet 2007 pour la
construction d’un EPR sur le site de Calvert Cliffs (Maryland, détenu par Constellation).
Areva a déposé sa candidature à la DC en décembre de la même année.
En octobre 2010, EDF a racheté la part de Constellation dans UniStar, faisant donc
passer sa propre part à 100%.
À l’été 2012, un organe juridique interne à la NRC ("atomic safety and licencing board",
ASLB) a fait savoir que cette propriété étrangère était rédhibitoire pour l’obtention de la
COL, indépendamment des considérations techniques. En effet, l’"Atomic Energy Act"
de 1954 stipule qu’il est interdit qu’une installation nucléaire sur le sol américain soit
contrôlée par des intérêts étrangers. C’est la notion de "foreign ownership, control and
domination" (FOCD).
Le sujet n’est pas clos, puisque malgré un appel rejeté d’UniStar auprès de l’ASLB,
la NRC s’est engagée à revoir sa politique en matière de FOCD. Le NEI souhaite
l’assouplissement de la régulation et effectue un lobbying actif en ce sens.
South Texas Project -3 et 4, 2 ABWR de Toshiba, NINA, Texas En avril 2011, un
mois après Fukushima, l’électricien américain NRG Energy a annoncé qu’il se retirait
de la coentreprise "Nuclear Innovation North America joint venture" (NINA, formée en
12
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
2008 comme coentreprise à 88% NRG et à 12% Toshiba). NINA développait un projet
de construction de 2 ABWR Toshiba sur le site de STP où "STP Nuclear Operating
Company" exploite deux réacteurs à eau pressurisée Westinghouse.
Le projet est donc quasiment abandonné, et il est également concerné par des problèmes
de FOCD (participation japonaise).
2.1.4 Quelques élements sur le ”design” des nouveaux réacteurs et les
fournisseurs
AP1000 : C’est Curtiss-Wright qui fournit les pompes à caloporteur de l’AP1000. En
juin 2012, Westinghouse et Curtiss-Wright ont annoncé un partenariat sur la fourniture
de composants et des services de remise à neuf.
ESBWR : En février 2011, Lockheed Martin a annoncé qu’elle venait de signer avec
GE-Hitachi pour fournir le système d’instrumentation et de contrôle (I&C) de l’ESBWR,
ainsi que les services associés de formation et de simulation.
US-EPR : Le système d’I&C constitute toujours un écueil pour Areva dans l’obtention
de la "design certification" de l’US-EPR. Dès 2010, la NRC a fait savoir que l’I&C de
l’EPR manquait de robustesse et était trop complexe. En juillet 2013, la NRC a fait savoir
que des progrès avaient été effectués mais que le problème persistait pour partie.
2.2 Achèvement de réacteurs dont la construction a été interrompue, TVA
La "Tennessee Valley Authority", une "corporation fédérale", s’est lancée dans les
années 1960 dans la construction d’une flotte de réacteurs nucléaires. Elle en exploite 6
aujourd’hui. Toutefois, dans les années 1980, après l’accident de Three Mile Island, elle
a annulé 12 projets et a interrompu en particulier la construction de deux réacteurs :
Watts Bar-2 (Tennessee) et Bellefonte-1 (Alabama). Depuis 2007, TVA a entrepris des
démarches pour achever la construction des réacteurs.
Watts Bar-2, REP Westinghouse, 1180 MWe : La construction a été interrompue en
1985. En 2007, dans un contexte de "renaissance nucléaire", TVA a annoncé son intention
d’achever la construction, initialement pour 2,5 Mds USD et une mise en service en 2012.
C’est Bechtel qui est chargé de l’EPC. Day&Zimmerman emploie également de nombreux
employés sur le chantier.
Westinghouse, de son côté, a décroché en janvier 2008 un contrat initialement évalué
à 200 MUSD environ pour le remplacement des système d’I&C, la livraison de pompes
primaires, des services sur les générateurs de vapeur et les systèmes de commande des
barres de contrôle, des améliorations diverses, du "probabilistic risk assessment" ainsi
que des services sur les procédures d’autorisation et des études de sûreté. Mi-2011, TVA
disait que le travail d’ingénierie était avancé à 85%, et la construction à 62,5%.
Un premier dépassement de budget a été évoqué en août 2011 par TVA. La mise en
service a été reportée à 2013.
13
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
En octobre 2011, TVA a repris la gestion du projet à Bechtel et a annoncé des
suppressions d’emplois (800 environ, laissant 2500 employés environ sur le chantier), ainsi
qu’un ralentissment du rythme.
Depuis avril 2012, la mise en service est prévue pour fin 2015, pour un coût total de
4,2 Mds USD.
Bellefonte-1, REP Babcock&Wilcox, 1250 MWe : La construction a été interrompue
en 1988, elle était alors complète à 80%. Aujourd’hui, on estime qu’elle est complète à 50%
(certains éléments ont été retirés ou bien sont tombés en désuétude [I&C, générateurs de
vapeur]). En août 2011, TVA a annoncé qu’elle comptait également achever la construction
de Bellefonte-1 pour 4,9 Mds USD. Les travaux ne commenceront pas avant que Watts
Bar-2 n’ait reçu son premier chargement de combustible. À la même époque, TVA a
proposé de vendre des parts du projet Watts Bar afin de financer le projet Bellefonte.
En octobre 2010, il a été convenu que B&W Canada livrera deux générateurs de vapeur
en 2015. On sait que le montant du contrat est inférieur à 248 MUSD.
En septembre 2012, Areva a obtenu un contrat d’EPC et de services pour le combustible
à Bellefonte-1 (Areva avait ouvert des bureaux dans le Tennessee en juillet 2011, voir 3.1).
Ce contrat pourra se chiffrer jusqu’à 1 Md USD et impliquera en particulier la livraison
d’une salle de contrôle. Areva sera chargée de l’ingénierie et de la construction de l’ilôt
nucléaire.
2.3 Augmentations de puissance de réacteurs existants
Les efforts d’augmentation de puissance des réacteurs existants participent aussi à
l’augmentation de la capacité nucléaire américaine, d’autant plus que les conditions sont
difficiles pour construire un nouveau réacteur.
En juin 2011, la NRC estimait qu’elle recevrait avant 2015 des demandes pour 1840 MW
d’augmentation de puissance environ, alors que ses équipes étudiaient déjà des demandes
pour 1372 MW d’augmentation de puissance. À la même époque, le CEO de Shaw/CB&I
a estimé le marché de l’augmentation de puissance entre 5 et 8 Mds USD sur dix ans aux
États-Unis. Exelon se disait prête à dépenser 475 MUSD sur l’année 2011.
2.3.1 Régulation
Pour un réacteur, la NRC distingue trois types d’augmentations, qui nécessitent que
l’autorisation d’exploiter le réacteur soit amendée :
• "Stretch" (S) : en deçà de 7%, qui nécessitent principalement des modifications de
l’instrumentation ;
• "Extended" (E) : au-delà de 7%, qui nécessitent des changements importants de
matériel, turbines, pompes, générateurs, etc.
• "Measurement Uncertainty Recapture" (MU) : en deçà de 2%, correspond à
une modification du permis d’exploitation afin de refléter une façon plus moderne de
modéliser le cœur, elles ne correspondent pas à une modification physique du cœur.
14
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
La liste des autorisations d’augmentation de puissance délivrées par la NRC est consultable à l’adresse : http://www.nrc.gov/reactors/operating/licensing/power-uprates/
status-power-apps/approved-applications.html. Le tableau 2.2 présente les autorisations accordées depuis début 2008.
Réacteur
Susquehanna 1
Susquehanna 2
Vogtle 1
Vogtle 2
Hope Creek
Comanche Peak 1
Comanche Peak 2
Cooper
Davis-Besse
Millstone 3
Calvert Cliffs 1
Calvert Cliffs 2
North Anna 1
North Anna 2
Prairie Island 1
Prairie Island 2
%
d’augmentation
13
13
1.7
1.7
15
4.5
4.5
1.6
1.6
7.0
1.4
1.4
1.6
1.6
1.6
1.6
MW supplémentaires
Date
d’autorisation
Type
Réacteur
463
463
60.6
60.6
501
154
154
38
45
239
37
37
47
47
27
27
01/30/08
01/30/08
02/27/08
02/27/08
05/14/08
06/27/08
06/27/08
06/30/08
06/30/08
08/12/08
07/22/09
07/22/09
10/22/09
10/22/09
08/18/10
08/18/10
E
E
MU
MU
E
S
S
MU
MU
S
MU
MU
MU
MU
MU
MU
LaSalle 1
LaSalle 2
Surry 1
Surry 2
Limerick 1
Limerick 2
Point Beach 1
Point Beach 2
Nine Mile Point 2
Harris 1
Turkey Point 3
Turkey Point 4
St. Lucie 1
Grand Gulf 1
St. Lucie 2
McGuire 1
McGuire 2
%
d’augmentation
1.6
1.6
1.6
1.6
1.6
1.6
17
17
15
1.6
15
15
11.9
13.1
11.9
1.7
1.7
MW supplémentaires
Date
d’autorisation
Type
57
57
41
41
57
57
260
260
521
48
344
344
320
510
320
58
58
09/16/10
09/16/10
09/24/10
09/24/10
04/08/11
04/08/11
05/03/11
05/03/11
12/22/11
05/30/12
06/15/12
06/15/12
07/09/12
07/18/12
09/24/12
05/16/13
05/16/13
MU
MU
MU
MU
MU
MU
E
E
E
MU
E
E
E
E
E
MU
MU
Figure 2.2: Liste des réacteurs ayant obtenu depuis 2009 une autorisation de la NRC pour une
augmentation de puissance
2.3.2 Précisions par réacteurs
La décision de mener véritablement l’augmentation de puissance à bien est assez tardive,
et les exploitants ne se privent pas de revenir sur leur démarche. Certaines augmentations
de puissance qui ont été achevées depuis 2011 sont (exhaustivité non garantie) :
• Point Beach-1 et 2, NextEra Energy, Wisconsin : En mai 2011, la NRC a
donné son accord pour une augmentation de puissance des deux réacteurs de 17%.
Les deux unités ont été mises à niveau dans l’année ; elles ont subi des remplacements
de pompes, de valves, de turbines, etc.
• Harris-1, Progress, Caroline du Nord : En juin 2011, le réacteur a été reconnecté
après 3 mois de mise à l’arrêt pour une augmentation de puissance de 30 MWe.
• Grand Gulf-1, Entergy, Mississippi : Le réacteur est passé de 1320 MWe à
1498 MWe à l’été 2012, devenant le plus gros réacteur en exploitation du pays.
• St. Lucie-1 et 2 , Turkey Point-3 et 4, FP&L, Floride : 125 MWe environ ont
été ajoutés en 2012-2013 à chaque réacteur, pour un total de 500 MWe additionnels.
En avril 2012, FP&L estimait le coût total des travaux pour les quatre réacteurs
à 3 Mds USD. Elle estime également que l’opération économise 3,8 Mds USD en
combustible fossiles et autres coûts.
15
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
Quelques projets d’augmentation de puissance plus incertains ou abandonnés depuis
2011 :
• Clinton (Illinois), Three Mile Island-1 (Pennsylvanie), Exelon : En juillet
2011, Exelon a annoncé qu’elle revenait sur son intention d’augmenter la puissance de
ces deux réacteurs. En effet, ce ne sont pas, économiquement, les meilleurs candidats
de la flotte Exelon à l’augmentation de puissance puisqu’ils ont isolés et ne bénéficient
pas d’économies d’échelle.
• Fort Calhoun, OPPD, Omaha : En avril 2011, OPPD a signé un contrat avec
Siemens Energy pour la livraison d’une turbine à haute pression pour une valeur de
18,4 MUSD. OPPD n’excluait pas, à terme, de mener une augmentation de puissance
de 20%. En février 2012, OPPD a renoncé à augmenter la puissance de son réacteur.
• Cook-1 et 2, Michigan, Indiana Michigan Power : En avril 2012, Indiana
Michigan Power est revenue sur son idée d’augmenter la puissance des réacteurs de
Cook.
• Prairie Island-1 et 2, Xcel Energy, Minnesota : En avril 2012, Xcel est passé
de l’objectif d’une augmentation totale de la puissance de 146 MW (1,6%) pour 322
MUSD à celui d’une augmentation de 116 MW pour 310 MUSD, en raison d’un
affaiblissement de la demande. Au final, en octobre, la compagnie est revenue sur
l’idée d’augmenter la puissance de la centrale.
• Limerick-1 et 2, Pennsylvanie et Lasalle-1 et 2, Illinois, Exelon : En novembre 2012, Exelon a annoncé qu’elle repoussait l’augmentation de puissance des
quatre réacteurs pour des raisons économiques (de 2017 et 2018 à 2020 et 2021),
ce qui lui permettrait d’économiser 2,4 Mds USD d’ici 2015. Ces opérations ajouteraient 300 à 340 MWe à chaque centrale. Le CEO d’Exelon a alors annoncé que ces
augmentations de puissance ne se feraient pas sans une reprise du marché.
• Cooper, NPPD, Nebraska : En août 2013, NPPD a renoncé à ajouter 146 MW
à son réacteur. Le coût du projet était estimé à 409 MUSD.
3 Parc actuel - maintenance et fermetures définitives
100 réacteurs sont aujourd’hui en exploitation aux États-Unis (99 bientôt) : 35 REB et
65 REP. Les travaux de maintenance consistent à changer des composants ayant subi une
usure (en particulier pour les REP, avec le changement des générateurs de vapeur, mais
aussi tête de cuve, pompes, valves, transformateurs, turbines, etc.). Le réacteur est alors,
en général, arrêté. D’autre part, des tâches spécifiques sont liées à l’effort post-Fukushima,
en particulier pour les REB (problème de la ventilation de l’enceinte de confinement du
cœur).
En plus des fermetures assez techniques de Gentilly-2 (voir 3.5.4), Crystal River-3 (voir
3.2.2) et San Onofre-2 et 3 (voir 3.2.3), il est à noter que deux réacteurs américains isolés
ont fermé définitivement pour des raisons directement économiques en 2013 :
• Kewaunee, Dominion, Wisconsin (REP Westinghouse, 556 MWe, mise en
service en 1974) : annonce de la fermeture en mai 2013.
• Vermont Yankee, Entergy, Vermont (REB GE, 620 MWe, mis en service
16
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
en 1972) : annonce en août 2013 de la fermeture avant fin 2014.
3.1 ”Engineering, procurement and construction” (EPC)
3.1.1 Contrats importants
Les exploitants passent des contrats de "maintenance" et "outage services" avec de
grandes compagnies d’EPC. Les chantiers sont particulièrement actifs pendant les phases
d’arrêt programmé des réacteurs pour rechargement en combustible. C’est alors que sont
effectués les "outage services" : remplacements des composants usés et mise à niveau des
infrastructures. Pour les REP, voir 3.2 sur les remplacement des générateurs de vapeur.
Ce sont ces entreprises d’EPC qui, également, sont maîtres d’œuvre lorsque l’exploitant
décide de se lancer dans une augmentation de puissance (voir 2.3). En particulier :
• Flotte Xcel, 3 réacteurs : En février 2011, Xcel a annoncé avoir signé un contrat
d’EPC sur 5 ans avec Bechtel pour les réacteurs de Monticello et Prairie Island-1 et
2 (Minnesota).
• Flotte Entergy, 11 réacteurs : Areva DZ, coentreprise entre Areva Inc. et
Day&Zimmerman ECM, a signé en juin 2011 un contrat pour cinq ans avec Entergy,
également pour de la maintenance et la mise à niveau de sa flotte de 11 réacteurs.
• Flotte NextEra, 5 réacteurs : En juin 2011, Shaw/CB&I a décroché un contrat
de trois ans avec NextEra pour de la maintenance et des augmentations de puissance
sur cinq réacteurs (quatre réacteurs FP&L en Floride [St. Lucie et Turkey Point] et
Seabrook dans le Massachusetts).
• Flotte Exelon, 17 réacteurs : Le contrat de Shaw/CB&I pour la maintenance de
la flotte d’Exelon (17 réacteurs) a été renouvelé en novembre 2011 ; il a cours depuis
2001. Le montant de ce contrat n’est pas connu. Shaw/CB&I, à la mi-2011, était
chargé de la maintenance de 41 des 104 réacteurs américains alors en exploitation.
• Palo Verde-1, 2 et 3, APS, Arizona : Shaw/CB&I a signé un contrat avec APS
en décembre 2011 avec APS pour de la maintenance et de la construction, faisant
passer à 44 le nombre de réacteurs américains maintenus par l’entreprise.
• Flotte Progress (qui fusionna avec Duke en 2012, voir 3.2.2), 12 réacteurs
à la fin 2011 : Une coentreprise entre Babcock&Wilcox et Bartlett Holdings (BWB
Maintenance Services) a décroché un contrat pour la maintenance sur cinq ans de la
flotte de Progress en décembre 2011.
• PSEG nuclear, 3 réacteurs : Le 4 septembre 2013, Areva a remporté un contrat
pour des services de maintenance pendant les arrêts de Salem-1 et 2 et Hope Creek
(New Jersey).
3.1.2 Cas particuliers
• Susquehanna-2 et 1, PPL, Pennsylvanie : En mai 2011, PPL a repéré des fissures
sur les lames d’une turbine à basse pression de l’unité 2, lesquelles présentaient une
usure avancée. La compagnie estimait le coût des réparations entre 20 MUSD et 30
MUSD. Après avoir découvert des défauts similaires sur l’unité 1, PPL a entrepris
le remplacement des lames et les deux unités sont retournées en service en juin.
17
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
L’estimation de l’impact financier a été révisée et portée à 50 à 60 MUSD.
• Fort Calhoun, OPPD, Nebraska : Le réacteur de Fort Calhoun a été mis à l’arrêt
en avril 2011 pour rechargement et maintenance. La rivière Missouri est entrée en
crue en juin de la même année, entraînant des feux électriques et nécessitant une
réévaluation des composants. Une digue coûtant 400 000 USD a dû être remplacée.
• Bruce-3, Bruce Power, Ontario : Babcock&Wilcox Canada a remporté un contrat
de 40 MCAD en août 2011 pour des opérations de maintenance sur les canaux de
combustible du réacteur, sur une période d’arrêt de six mois.
• Byron-1, 2 et 3, Exelon, Illinois : En juillet 2012, on a apris que pendant les
arrêts programmés des deux réacteurs de Byron (automne 2012 et printemps 2013),
la société SPX Marley mettrait à jour les cheminées de refroidissement. D’autres
réacteurs de la flotte Exelon devraient subir le même sort.
• Cooper, NPPD, Nebraska : En avril 2011, NPPD a signé avec Siemens pour la
livraison d’une turbine à haute pression à l’automne 2016.
3.2 REP : Remplacement des générateurs de vapeur (GV)
Pour les REP, le remplacement de GV se fait en général une fois dans la vie du réacteur.
Au sein de la NRC existe une "steam generators task force", chargée de l’évaluation de la
sûreté des GV. Une polémique prend en ce moment de l’ampleur autour du comportement
de l’exploitant et du fabricant à San Onofre (voir 3.2.3).
Bechtel et SGT (coentreprise Areva et URS corporation) ont effectué la quasi-totalité
des 59 remplacements de GV déjà effectués aux États-Unis (nous n’avons pas rencontré
de contre-exemple, à l’exception de Crystal River-3, voir 3.2.2 ; et Prairie Island-2, qui
n’a pas encore démarré). SGT indique avoir effectué 21 remplacements.
Figure 3.1: SGT livre un GV pour Three Mile Island-1 en octobre 2009
18
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
3.2.1 Réacteurs concernés
La NRC nous a fourni la liste ci-dessous des réacteurs dont les générateurs de vapeur
ont été remplacés.
Réacteur
Date
Réacteur
Date
Surry 2
Surry 1
Turkey Point 3
Turkey Point 4
Point Beach 1
Robinson 2
Cook 2
Indian Point 3
Palisades
Millstone 2
North Anna 1
Summer
North Anna 2
Ginna
Catawba 1
Point Beach 2
McGuire 1
Salem 1
McGuire 2
St. Lucie 1
Byron 1
Braidwood 1
South Texas 1
Farley 1
Cook 1
ANO 2
Indian Point 2
Farley 2
Kewaunee
9/80
7/81
4/82
5/83
3/84
10/84
3/89
6/89
3/91
1/93
4/93
12/94
5/95
6/96
9/96
12/96
5/97
7/97
12/97
1/98
1/98
11/98
5/00
5/00
12/00
12/00
12/00
5/01
12/01
Harris
Calvert Cliffs 1
South Texas 2
Calvert Cliffs 2
Sequoyah 1
Palo Verde 2
Oconee 1
Oconee 2
Prairie Island 1
Oconee 3
Callaway
ANO 1
Palo Verde 1
Bvr. Valley 1
Watts Bar
Ft. Calhoun
Comanche Peak 1
St. Lucie 2
Palo Verde 3
Diablo Canyon 2
Salem 2
Diablo Canyon 1
TMI-1
San Onofre 2
San Onofre 3
Sequoyah 2
Waterford
Crystal River 3
12/01
6/02
12/02
5/03
6/03
12/03
1/04
6/04
11/04
12/04
11/05
12/05
12/05
4/06
11/06
12/06
4/07
1/08
1/08
4/08
5/08
3/09
1/10
4/10
2/11
1/13
1/13
Figure 3.2: Liste des réacteurs ayant connu un remplacement de générateur de vapeur
Sur notre période d’intérêt, on peut mentionner :
• Sequoyah-2, TVA, Tennessee : Le réacteur a été mis à l’arrêt en octobre pour
rechargement et remplacement de ses quatre GV. Les travaux ont été rapides et
menés par SGT et les nouveaux GV ont été conçus par Westinghouse, fabriqués par
Doosan, et les tubes ont été fabriqués par le Suédois Sandvik. On sait que la valeur
maximale du contrat pour SGT était de 130 MUSD.
• Prairie Island-2, Xcel, Minnesota : En janvier 2010, SNC-Lavalin a remporté un
conrat pour le remplacement des GV du réacteur. Les travaux sont censés démarrer
fin 2013.
• Davis-Besse, First Energy, Ohio : Bechtel a décroché un contrat en octobre 2010
pour le remplacement début 2014 des GV et de la tête de la cuve.
19
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
• Beaver Valley-2, FirstEnergy, Pennsylvanie : Bechtel a remporté en juin 2013
le contrat pour le replacement des trois GV du réacteur en 2017. En 2006, Bechtel
avait déjà remplacé les trois GV de l’unité 1, ainsi que la tête de la cuve du réacteur
pour 300 MUSD environ, sur 65 jours (11 jours de moins que prévu).
• Trois réacteurs ont fermé à cause d’un mauvais remplacement de GV :
Crystal River-3 (Progress Energy puis Duke, Floride, voir 3.2.2) et San Onofre-2 et 3
(SCE, Californie, voir 3.2.3).
3.2.2 Fermeture de Crystal River-3 (919 MWe, Progress puis Duke, Floride) : un
remplacement de GV fissure l’enceinte de confinement
2009-2011, fissures dans l’enceinte de confinement : Crystal River-3, réacteur à
eau pressurisée de Babcock&Wilcox, a été mis à l’arrêt en septembre 2009 pour un
remplacement de générateur de vapeur. L’exploitant est alors Progress Energy, avec
à la maîtrise d’œuvre non pas SGT ou Bechtel, mais Sargent&Lundy, une entreprise
d’ingénierie sans expérience préalable dans le remplacement de GV. Selon Progress, la
découpe de l’enceinte de confinement préalable à l’opération de remplacement a entraîné
une mauvaise répartition des contraintes mécaniques dans la structure, créant des fissures.
Il était inenvisageable de redémarrer le réacteur.
Or, en mars 2011, alors que les travaux de réparation touchaient à leur fin, une seconde
fissure est apparue. Il commence à être clair qu’il faut choisir entre la fermeture définitive
ou la poursuite de l’effort de réparation, alors estimé entre 900 MUSD et 1,3 Mds USD
pour une remise en service en 2014. Progress annonce que son option "préférée" est la
réparation.
Montant des pertes : Progress a alors dépensé, jusqu’à août 2011, 214 MUSD pour
combler les fissures et 439 MUSD en rachat d’électricité de remplacement. Sur cette
somme, elle espérait récupérer 308,6 MUSD auprès de son assureur (remboursement
plafonné à 490 MUSD pour le rachat d’électricité, 2,25 Mds USD pour les travaux).
La "Public Service Commission" (PSC) de Floride a accepté en novembre 2011 que les
pertes soient récupérées par FP&L auprès des consommateurs. Ceux-ci seraient toutefois
susceptibles d’être remboursés si FP&L s’avérait être responsable des dégâts causés lors
du remplacement des GV.
Fusion de Progress Energy et Duke Energy à l’été 2012 : La situation du réacteur
était l’un des principaux points de tension entre Duke et Progress lors de la fusion des
deux entreprises à l’été 2012, laquelle avait donné naissance à un nouveau groupe Duke.
Le 2 juillet, le jour même de la fusion, Bill Johnson, ancien CEO de Progress Energy,
nommé à la tête du tout nouveau groupe Duke, avait été démis de ses fonctions par son
Conseil d’administration.
Jim Rogers, l’ancien CEO de Duke Energy qui avait alors remplacé B. Johnson à la
tête du nouveau Duke, avait été auditionné le 10 juillet par le régulateur de Caroline
du Nord, lequel avait marqué son mécontentement face à ce qu’il estimait constituer un
manque de transparence. M. Rogers avait expliqué que le Conseil d’Administration de
20
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
l’ancien Duke en était venu à douter des capacités de M. Johnson à diriger le groupe,
principalement à cause des déboires de Progress dans la gestion de son parc nucléaire. En
particulier, le cas du réacteur de Crystal River-3 semblait avoir été jugé préoccupant.
5 février 2013, annonce de la fermeture définitive de Crystal River-3 : Le 5 février
2013, Duke Energy a annoncé qu’elle fermerait le réacteur de Crystal River-3 (réacteur à
eau pressurisée, Babcock&Wilcox , Floride, opéré par la filiale Progress Energy Florida).
Le démantèlement devrait s’étaler sur 40 à 60 ans.
3.2.3 Fermeture de San Onofre (SCE, Californie) : installation de GV défectueux
2009-2011, remplacement des GV : San Onofre est une centrale nucléaire à trois
réacteurs dont deux en exploitation jusqu’à cette année, San Onofre-1 étant à l’arrêt
définitif depuis 1992.
SCE était en contrat avec Bechtel pour l’EPC de la centrale jusqu’en 2009. À cette
date, SCE a signé avec Shaw/CB&I, mais a gardé Bechtel pour les travaux sur les GV.
Les 2 GV de chaque unité 2 et 3 ont été remplacés en 2009 et 2011 respectivement (par 4
GV de Mitsubishi Heavy Industries (MHI), coût total de 671 MUSD).
2012, les GV de remplacement sont très endommagés : Le 31 janvier 2012, une fuite
a été détectée au niveau d’un GV de l’unité 3, et le réacteur mis à l’arrêt. Le réacteur 2
était déjà en arrêt programmé depuis début janvier pour rechargement et remplacement
de la tête de la cuve du réacteur. Puisque les GV des deux unités (2 GV par réacteur)
avaient récemment été remplacés, la NRC a craint un problème générique et a interdit le
redémarrage des deux réacteurs.
À l’été 2012, l’inspection de la NRC et de SCE a conclu que certains des tubes des GV
des réacteurs 2 et 3 présentaient des signes d’usure précoce à cause de vibrations, ces
anomalies étant plus nombreuses au niveau de l’unité 3. Il n’est pas anormal d’avoir à
boucher un tube de GV si celui-ci s’avère défectueux ; cette opération est obligatoire si
l’amincissement des parois est de plus de 35%. D’après les données fournies par SCE à la
NRC, sur les 20 000 tubes des deux GV de l’unité 2, 1595 présentaient des signes d’usure,
515 ont été bouchés (contre 807 pour l’unité 3), 6 d’entre eux étaient usés à plus de 35%.
Plan de SCE pour redémarrer l’unité 2 et annonce de la fermeture : Le 4 octobre,
SCE a demandé à la NRC l’autorisation de redémarrer l’unité 2, sous surveillance accrue,
à 70% de puissance pendant 5 mois. La NRC s’est alors donné plusieurs mois pour donner
un avis sur ce programme de redémarrage. Elle envisageait de modifier les termes de
l’autorisation d’exploitation du réacteur de San Onofre-2 ("licence amendment", procédure
lourde).
Le 26 décembre 2012, la NRC a formulé une demande d’informations supplémentaires
auprès de SCE sur le plan de redémarrage du réacteur de San Onofre-2. Le 25 janvier, la
NRC a annoncé qu’elle ne prendrait pas sa décision sur le redémarrage de l’unité 2 avant
le printemps.
21
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
SCE a annoncé en juin 2013 qu’elle fermait définitivement les deux réacteurs de San
Onofre.
Un parfum de scandale : Le 8 novembre 2012, à la demande de l’association écologiste
“Friends of the Earth”, la NRC a accepté de “passer en revue” la centrale de San Onofre
(Californie, opérée par Southern California Edison [SCE]) afin de déterminer s’il y avait
eu des irrégularités dans l’interaction entre SCE et la NRC.
Le 30 novembre, SCE a annoncé qu’elle avait découvert lors d’une inspection de routine
que du liquide de refroidissement de moteur avait été déversé dans le circuit d’huile d’un
moteur diesel et qu’elle soupçonnait un acte de sabotage.
La NRC a rendu public le 8 mars 2013 un rapport de “Mitsubishi Heavy Industries”
(MHI) qui établit que la cause première de l’usure des tubes des générateurs de vapeur
(GV) quasi-neufs à San Onofre, c’est-à-dire les vibrations liées aux débits de vapeurs
élevés, n’avait pas pas été envisagée dans le “design” des GV. Ce rapport, de plus,
évoque des irrégularités dans l’interaction des industriels avec la NRC, puisque les GV de
remplacement étaient très différents des GV autorisés à l’origine, sans que SCE n’en ait
fait part au régulateur.
En juillet, SCE s’est lancée de façon très agressive dans des attaques contre MHI, et
la question de savoir qui supportera les coûts de ce chapitre reste à trancher, peut-être
devant la justice.
La crainte d’un problème générique : Fin septembre 2013, la NRC a écrit à MHI en
relevant que ses méthodes de modélisation étaient douteuses puisqu’elles n’avaient pas
anticipé le problème rencontré à San Onofre, ce qui remettait en question la sûreté de
quatre centrales aujourd’hui en exploitation dans le monde, en plus de San Onofre. Parmi
celles-ci, la seule centrale américaine est Fort Calhoun, OPPD, Nebraska. Ces quatre
autres centrales ont elles aussi reçu des GV de remplacement Mitsubishi à "maillage
triangulaire". MHI, quant à elle, avance que le problème se situe ailleurs et que SCE
partage la responsabilité dans la mesure où l’équipe de "design" des GV était mixte
SCE-MHI. Il est à noter que pour l’heure, le type de vibrations "in-plane" constaté à San
Onofre n’a pas été observé sur un autre réacteur.
3.3 Instrumentation et contrôle (I&C), un sujet qui gagne en importance
En juin 2011, Duke Energy a mené à bien la première modernisation complète des
systèmes d’I&C d’un réacteur nucléaire américain, à Oconee-1 (centrale de 3 réacteurs,
Caroline du Sud). En effet, c’est la première fois que le système d’arrêt automatique des
réacteurs est basé sur un microprocesseur et non un système analogique. L’installation de
systèmes d’I&C digitaux sur les réacteurs 2 et 3 est prévue pour 2013 L’opération coûtera
250 MUSD pour les trois unités (chiffre de 2011).
22
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
3.4 Post-Fukushima
Les industriels, dès 2011, ont commencé à se préparer pour répondre à une demande
spécifique d’équipements plus sûrs, en tentant d’anticiper sur les demandes à venir de la
NRC. Shaw/CB&I, Toshiba et Babcock&Wilcox fournissent des services et des composants
à Tepco au Japon.
3.4.1 Estimation des coûts
En novembre 2012, on a appris que l’électricien Duke pensait dépenser "plusieurs
millions" de dollars par réacteur. De son côté, le NEI mettait la NRC en garde sur
la cherté des mesures qu’elles proposait pour l’industrie. Marvin Fertel, CEO du NEI,
attirait par exemple l’attention sur le fait que demander à l’industrie de raisonner par
"probabilistic risk assessment" (PRA) coûterait une centaine de MUSD à l’industrie prise
dans sa globalité.
En avril 2013, l’électricien Dominion parlait d’une dépense de 40 MUSD par réacteur
liée au post-Fukushima (flotte de sept réacteurs après la fermeture de Kewaunee). Pour
Dominion, 65% des dépenses iront vers le programme FLEX (voir le paragraphe qui suit)
et vers l’instrumentation des piscines de combustible usé. Les 35% restants iront dans des
études de sûreté réclamées par la NRC.
En juin 2013, Platts parlait de 3,5 Mds USD de dépenses pour l’ensemble de l’industrie
sur 3 à 5 ans.
Certains fournisseurs réagissent en se positionnant sur le post-Fukushima, comme
Curtiss-Wright, qui a remporté 11 MUSD de contrats au second trimestre 2013. La
compagnie estime pouvoir récolter encore 34 MUSD de contrats sur les deux prochaines
années.
3.4.2 Réaction de l’industrie : le programme FLEX
Les industriels ont mis en place la stratégie FLEX de prévention des risques radiologies.
Celui-ci repose en particulier sur la création de deux centres régionaux à partir desquels du
matériel lourd de réponse d’urgence à un accident nucléaire pourra être déployé n’importe
où sur le territoire en 24h. Ces centres se situeront à Memphis (Tennessee) et Phoenix
(Arizona).
En octobre 2012, c’est un consortium Areva/Peico qui a été choisi pour fournir ces
centres de réponse d’urgence.
3.4.3 REB : La question particulière des filtres dans les systèmes de ventilation
Nous évoquerons ici la question des filtres sur les systèmes de ventilation des réacteurs
à eau bouillante, qui illustre bien les problèmes qui se posent vis-à-vis du post-Fukushima
et a fait couler beaucoup d’encre depuis 2011.
2011-2012, la NRC explore différentes approches Les équipes de la NRC ont finalisé
un rapport le 12 juillet 2011 intitulé "Recommandations for enhancing reactor safety in
23
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
the 21st century", lequel conclut en listant 12 recommandations sur le court terme. La
cinquième d’entre elles vise à rendre obligatoire l’installation de systèmes de ventilation
"fiables et renforcés" sur les REB dont les enceintes de confinement sont de type Mark I
ou Mark II. 31 réacteurs américains sont concernés.
Le 3 octobre, dans un rapport sur la prioritisation des mesures précédemment listées
(SECY-11-0137), les équipes de la NRC ont classé la recommandation sur les systèmes de
ventilation dans le "Tier 1", qui regroupe les mesures les plus urgentes.
Le 12 mars 2012, la NRC a notifié les électriciens que les REB dont l’enceinte de
confinement est de type Mark I ou Mark II, doivent être munis de systèmes de ventilation
"fiables et renforcés".
À l’été 2012, les équipes et les Commissaires de la NRC en sont venus à penser que
non seulement la question de la ventilation, mais aussi celle du filtrage des gaz ventilés,
doit être étudiée avec attention.
En novembre 2012, les équipes de la NRC ont finalisé une "policy issue" (SECY-120157) ayant pour sujet la "considération d’exigences additionnelles pour les systèmes de
ventilation des enceintes de confinement des REB dotés d’une enceinte de type Mark I ou
Mark II". Quatre options y sont envisagées sur la question de la ventilation et des filtres :
• 1/ le maintien du status quo : La NRC se tiendrait à l’expression "fiables et
renforcés" au sujet des systèmes de ventilation.
• 2/ estimée à 2 MUSD par réacteur : Rendre obligatoire l’installation de systèmes de ventilation sans filtres capables d’opérer "sous conditions d’accident grave".
• 3/ préférée par les équipes de la NRC, estimée à 16 MUSD par réacteur :
Rendre obligatoire l’installation de systèmes de ventilation capables d’opérer "sous
conditions d’accident grave" dotés en plus de filtres conçus pour être efficaces sous
différents scénarios de lâchers de vapeur volontaires.
• 4/ "performance-based approach" : Réguler la fonction plutôt que l’organe, en
fixant des critères d’acceptabilité d’une stratégie de confinement des particules
radioactives, stratégie qui serait proposée par l’opérateur réacteur par réacteur.
Ces propositions ont suscité un débat important.
Différents points de vue sur l’installation obligatoire de filtres Au sein de la NRC,
les opinions divergent : les équipes préfèrent l’option (3), les membres de l’"Advisory
Committee on Reactor Safeguards" (ACRS), un panel indépendant, semblent privilégier
l’option (4).
Les industriels, par la voix du NEI, ont adressé le 5 octobre 2012 une lettre à David
Skeen, président du "Japan Lessons Learned Directorate" de la NRC, qui rejette l’option
(3) et prône également une approche plus globale type (4). La question des coûts est
évidemment centrale, et le NEI dit croire que ceux-ci sont sous-estimés dans les travaux
des équipes de la NRC.
Un autre argument est qu’en se concentrant trop sur la question des filtres, la NRC risque
d’occulter trois questions tout aussi importantes liées au risque de rejet de particules :
• ce qui se passe en cas d’un événement non prévu dans les scénarios de base ("beyond
design") ;
24
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
• la question de la gestion du risque en amont ;
• les conséquences économiques de la contamination de l’environnement.
La NRC choisit d’attendre En mars, les Commissaires de la NRC ont rendu leur décision
et temporisent par un processus en deux temps. D’abord, à court terme, il sera demandé
aux exploitants de REB de garantir que leurs systèmes de ventilation fonctionnent en
situation extrême. Ensuite, d’ici quatre ans, les équipes de la NRC devront dire si, sur
le long terme, il est plus pertinent d’imposer un équipement particulier à l’industrie (ici
des filtres à particules coûteux), ou bien des critères de performance plus généraux en
matière de confinement des particules radioactives.
3.5 Réfections de Candu
Les réacteurs Candu nécessitent de subir une réfection de demie-vie. Le "design" du
cœur repose effectivement sur des tubes de force horizontaux qui doivent être changés au
bout de 25 ans d’exploitation du réacteur environ, afin de prolonger la durée de vie du
réacteur de 25 ans environ.
3.5.1 Bruce, Bruce Power, Ontario, 8 Candus
Bruce-1 et 2 ont été arrêtés dans les années 1990 par manque de demande, ils ont
subi leur réfection à partir de 2006. Ils ont été redémarrés et raccordés au réseau à
l’automne 2012 après 15 ans d’arrêt pour Bruce-1, 17 ans pour Bruce-2. La réfection et le
redémarrage des deux réacteurs aura coûté 4,8 Mds CAD.
Les six autres réacteurs doivent encore être remis à neuf. En 2011, Bruce Power parlait
d’étaler ces réfections sur la période 2015-2025.
3.5.2 Point Lepreau, NB Power, Nouveau Brunswick, 1 Candu
Le réacteur a à nouveau produit de l’électricité en novembre 2012, avec trois ans de
retard, après avoir été à l’arrêt pour réfection depuis mars 2008. Le projet était initialement
estimé à 1,4 Mds CAD, mais une estimation de juillet 2013 donne un coût compris entre
2,4 et 3,3 Mds CAD. AECL était le maître d’œuvre.
Les travaux ont été émaillés de plusieurs incidents. En 2009 notamment, deux turbines
Siemens à 10 MCAD chacune ont coulé au fond du port de St John lors de leur transport.
Elles ont finalement été réparées et utilisées. En 2010, NB Power a annoncé qu’AECL
allait devoir recommencer l’opération de positionnement des tubes de force.
3.5.3 Darlingon, OPG, Ontario, 4 Candus
En mars 2012, "Ontario Power Generation" (OPG), a plannifié la réfection de ses
quatre réacteurs de Darlington, lesquels seront séquentiellement mis à l’arrêt à partir de
2016, pour 3 ans et demi de travaux chacun. Réacteur 2 en 2016, réacteur 1 en 2018,
réacteur 3 en 2020 et réacteur 4 en 2021.
25
Agnès Casenave, Cyril Pinel, Octobre 2013
Une coentreprise SNC-Lavalin Nuclear et Aecon Construction Group a décroché un
contrat de 600 MCAD pour la phase d’étude et de planification.
En avril 2013, c’est Alstom qui a décroché un contrat de 350 MCAD pour la réfection
de Darlington.
3.5.4 Gentilly-2, HydroQuébec, Québec, 1 Candu ; fermeture définitive
Début 2012, la seule centrale nucléaire du Québec, Gentilly-2, était exploitée par
HydroQuébec, une "société de la Couronne" contrôlée par le gouvernement provincial
québécois. La centrale compte un unique réacteur de type CANDU-6 pour une capacité
de 675 MWe, sa construction avait commencé en 1973 et son raccordement au réseau avait
eu lieu en 1983. Sa licence avait été renouvelée en 2011 pour une exploitation jusqu’en
2016.
Pauline Marois, nouvelle Première Ministre du Québec (Parti Québécois) entrée en
fonctions le 19 septembre 2012, a annoncé dès son premier Conseil des Ministres, soit le
20 septembre, son intention de fermer la centrale de Gentilly-2.
À l’opposé, le gouvernement sortant de Jean Charest (Parti Libéral Québécois) avait
décidé en 2008 de lancer des travaux de réfection de la centrale pour 2 Mds CAD. Suite à
l’accident de Fukushima et étant donnés les dépassements de coûts constatés lors de la
réfection de la centrale de Point Lepreau, ces travaux avaient été interrompus en 2011. Des
rapports sur l’évaluation des coûts et des conséquences du projet avaient été commandés.
Jean Charest avait déclaré en août 2012 avoir un "préjugé favorable".
Gentilly-2 constituait un îlot nucléaire dans un océan hydroélectrique : HydroQuébec
produit environ 37 GW d’électricité en moyenne annuelle. 97,2% de cette électricité est
d’origine hydroélectrique, 1,9% était fourni par Gentilly-2, le 0,2% restant correspondant
à l’énergie thermique et aux autres formes de renouvelables. Il est à ce stade difficile de
se faire une idée du calendrier de démantèlement du réacteur.
Conclusion
On l’a vu, l’industrie électronucléaire américaine compte de nombreux acteurs (vendeurs
de réacteurs, de composants, entreprises de gros travaux, prestataires de services). Les
contrats passés sont divers et traduisent le dynamisme du secteur, malgré une conjoncture
délicate. La question du démantèlement des centrales nucléaires n’a pas été traitée ici
mais constitue un marché important, en Amérique du Nord comme ailleurs, et est estimé
aujourd’hui à 300 Mds USD globalement.
De nombreuses entreprises étrangères ont pénétré le marché du nucléaire nord-américain,
dont Areva et Alstom. Toutefois, aux États-Unis, il reste toujours impossible pour une
entreprise étrangère de devenir exploitant d’un réacteur.
26