Rétrospective historique de la construction navale à Dunkerque
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Rétrospective historique de la construction navale à Dunkerque
Rétrospective historique de la construction navale à Dunkerque tirée du "Port de DK 1945-1955" Revue "Le Port de Dunkerque" Retranscrite par Danièle Poreye Dès le début de l'ère chrétienne, les habitants de la région des Flandres, qui devait devenir par la suite celle de Dunkerque, se sont intéressés aux questions maritimes. En effet, le littoral n'était pas un littoral stable, mais constituait un véritable marais qu'il fallut conquérir sur les eaux pendant près de mille ans. Fossés et canaux furent creusés et des associations se formèrent pour les entretenir (Les "Wateringues"). Vers le début du 10ème siècle, autour d'une chapelle et de quelques masures de pêcheurs, la Cité de Dunkerque se développa. Ce n'est qu'un siècle et demi plus tard que les premières entreprises maritimes se créèrent. Un petit havre fut construit et Philippe d'Alsace put y faire construire et équiper quelques-unes des 27 nefs qu'il envoyait à la conquête de la Terre Sainte. Un peut plus tard, il y construisit également une flotte, qu'il envoya contre les Normands. Ces réussites attirèrent l'attention du Comte de Flandre sur les marins et charpentiers de navires de Dunkerque. Par une Charte de 1183, il prit sous sa protection les bourgeois de la nouvelle cité et y établit un château fort. Les ressources des franchises qu'avait également accordées la Charte de 1183, ainsi que les premiers droits prélevés sur les marchandises embarquées et débarquées, permirent un développement rapide du port, qui comportait en particulier deux amorces de jetée ainsi que quelques ouvrages d'art. Danièle Poreye / Généalogie et Histoire du Dunkerquois / G.H.Dk. Page 1 Parallèlement au développement du port et de la ville, la construction des navires allait s'amplifiant de telle sorte qu'en 1520, les ateliers de construction de bateaux étaient si actifs que l'on arma 500 buses pour la pêche au hareng. C'étaient des navires ronds, d'environ 60 tonneaux. L'histoire nous a gardé les noms de "L'Aigle" et le "Dragon", qui furent lancés tous deux en 1548. Mais la piraterie fit disparaître peu à peu les bateaux de pêche dunkerquois, si bien qu'il ne restait plus rien de l'activité des pêcheurs dunkerquois vers la fin du 16ème siècle. Dès lors, les paisibles Dunkerquois durent se muer en Corsaires, et les charpentiers durent modifier l'ancienne flotte de pêche et créer des bâtiments de guerre, adaptés à la mer où ils combattaient. Ils construisirent, dès 1588, des vaisseaux si légers que, poursuivis par les Anglais, "ils leur échappaient facilement à la faveur de la marée ou de la nuit". Ils essayèrent ensuite de lancer des galères, mais celles-ci leur donnèrent des déboires, en raison du peu de profondeur d'eau des bancs, sur lesquels elles devaient s'aventurer, et plusieurs durent être transformées en pinasses. Les recherches des constructeurs de navires dunkerquois aboutirent à créer un nouveau bateau, la "Frégate" ; les chantiers en lancèrent 11 en 1609, qui furent terminés en un an environ. Devant le succès obtenu, ils activèrent ces constructions. Ces petits navires à voile "gréés comme des vaisseaux en miniature" portaient 10 à 15 pièces de canons. Ils étaient extrêmement maniables. Deux d'entre eux, le "Cygne" et le "Nicomédus" étaient considérés, en 1636, par les Anglais, comme les plus rapides des navires. Danièle Poreye / Généalogie et Histoire du Dunkerquois / G.H.Dk. Page 2 Ces constructions se développèrent jusqu'à la fin du 17ème siècle en s'alourdissant toutefois au point de jauger 125 tonneaux, et transporter 20 pièces d'artillerie. Sous le commandement de Jean Bart, les Corsaires dunkerquois se battirent pour le Roi de France avec enthousiasme, de sorte que lorsque le roi vint à Dunkerque, s'étant renseigné sur la valeur du port, il décida que l'on y pénètrerait entre deux jetées longues de 1 000 toises, grâce au percement du banc Schurken et deux forts construits sur pilotis en défendraient l'entrée. C'est à cette époque également que la construction navale se transforma, bien que les procédés empiriques aient permis la réalisation d'œuvres remarquables, telles que le "Soleil Royal". Le "Soleil Royal" L'ordonnance de 1673 devait standardiser les techniques de construction. En 1686, les progrès de nos constructions étaient déjà très nets. On aboutit finalement à la grande ordonnance de 1689, qui définissait les dimensions des vaisseaux, fixant, pour chacun, longueur, largeur et creux. Nos maîtres charpentiers étaient alors capables de tracer, dans chaque cas particulier, les vaisseaux que les larges directives de l'Etat Major Général leur demandaient. Leurs connaissances n'étaient pourtant que le résultat d'une longue pratique, puisque tracé géométrique d'une carène, résistance des matériaux, stabilité, restaient à cette date, autant de questions à élucider. Danièle Poreye / Généalogie et Histoire du Dunkerquois / G.H.Dk. Page 3 En fait, les constructeurs à la fin du 17ème siècle n'avaient fait que codifier leurs méthodes empiriques. Celles-ci avaient donné des résultats probants, réguliers et satisfaisants. A Dunkerque, la création de l'Arsenal à l'emplacement actuel du Parc de la Marine, devait également contribuer au développement de la construction navale. En effet, en 1670, trois cales pour les vaisseaux et trois cales pour les frégates furent établies définitivement. Les bâtiments s'élevèrent rapidement sur tout le parc. Le port lui-même s'anima, puisqu'une escadre lui fut affectée. Les travaux du port ne furent pas poussés avec la même activité et il fallut attendre 1678 pour que le chenal d'accès au bassin de l'Arsenal fût livré à la navigation. Danièle Poreye / Généalogie et Histoire du Dunkerquois / G.H.Dk. Page 4 "l'Amphytrite" Malheureusement les vicissitudes historiques allaient, au début du 18ème siècle, pendant la fin du règne de Louis XIV, apporter un arrêt au développement de la ville, de son activité portuaire et de la construction navale. Aux termes de l'Armistice de Londres du 7 juillet 1712, louis XIV s'engageait à remettre Dunkerque aux mains des Anglais. L'article 9 du traité d'Utrecht stipulait que le roi ferait raser les fortifications de la ville de Dunkerque, combler le port, ruiner les écluses, le tout à ses dépens et sous 5 mois. Mais l'astuce et la vaillance des Dunkerquois permirent bientôt de tourner les stipulations du traité, de sorte que les travaux de démolition furent bientôt arrêtés sous prétexte de permettre l'évacuation des eaux des wateringues. Une bienheureuse tempête perça le batardeau qui bouchait l'entrée du port, lequel, dans l'entre-temps, avait été relié à la mer par le canal de Mardyck. De nouveau, les vaisseaux de 250 tonneaux purent pénétrer directement dans le port. Louis XV contribua à relever Dunkerque de ses ruines et les charpentiers de navires purent armer de nouveau des navires à la course, mais le traité de Paris ruina ces espérances. Pendant un certain temps on n'arma plus que quelques bâtiments pour la pêche à la morue. La lourde hypothèque anglaise sur Dunkerque ne fut finalement levée qu'à la suite de la guerre d'Indépendance Américaine. La course reprit durant celle-ci avec plus de fougue que jamais. Les Chantiers des Frères Denys lancèrent, en 1779, des Frégates comme le "Rohan-Soubise" de 400 tonneaux, monté par 205 hommes. Après la révolution, le port allait connaître un développement continu jusqu'à nos jours. Danièle Poreye / Généalogie et Histoire du Dunkerquois / G.H.Dk. Page 5 Un constructeur de valeur, Gaspard Malo, créa de magnifiques modèles de bateaux de pêche, suivant ainsi les traces des charpentiers de navires qui avaient mis au point le bateau de guerre adapté à la course, qu'avait été la Frégate. C'était une belle goélette de 140 tonneaux de jauge. Les armateurs adoptèrent ce modèle et, en peu de temps, les 16 maîtres constructeurs dunkerquois, dont plusieurs étaient des hommes de valeur, lancèrent les 140 goélettes que comportait la flotte. Mais les constructeurs ne s'intéressaient pas à l'utilisation du fer, leurs entreprises virent leur prospérité décliner. Danièle Poreye / Généalogie et Histoire du Dunkerquois / G.H.Dk. Page 6 Il fallut attendre 1855 pour voir la firme Ziegler s'intéresser aux nouveaux procédés de construction. Finalement, la Chambre de Commerce facilita, en 1900, l'installation à Dunkerque de la Société des Ateliers et Chantiers de France, à l'emplacement même de ce qui était, sous Louis XIV, un important chantier de navires de pêche. Cette rétrospective est tirée du "Port de DK 1945-1955" Revue "Le Port de Dunkerque" Editions assurée par Monsieur Ferdinand-Marie SCHIPMAN Directeur propriétaire de la Revue Le numéro a été imprimé sur les presses de l'Imprimerie Pierre LANDAIS à Malo les Bains Les images proviennent d'un autre ouvrage (sauf la goélette : carte postale) : Dunkerque et ses chantiers de constructions navales de l'origine à nos jours. Présentation d'Albert SEBILLE, peintre du Département de la Marine Et de M. MOREEL membre de la commission historique du Nord Commandant DENOIX Jean LATTY ingénieur en Chef des Constructions Navales Lucien LEFOL Président des Ateliers et Chantiers de France Edité en juin 1950 "Tant que vivra le dernier vétéran du chantier dunkerquois, la flamme du souvenir ne s'éteindra pas. Quand, cet homme aura disparu, il n'y aura plus que l'écrit." Danièle Poreye / Généalogie et Histoire du Dunkerquois / G.H.Dk. Page 7