Mise en page 1

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LA RE P U BLI QUE ET L E S G R A N DS H OM M ES > balades du patrimoine
>>> (5ème) >>>
Fronton du Panthéon,
place du Panthéon
>>> Pierre-Jean David d’Angers >>>
U N N O U V E A U R E G A R D S U R L E PAT R I M O I N E PA R I S I E N
23 LA REPUBLIQUE ET LES GRANDS HOMMES
D U PA N T H É O N À L ’ I N S T I T U T
Les balades du patrimoine
➦
>>> Le culte des grands hommes, tel qu’il se manifeste dans les
monuments sculptés, se répand en Europe au XIXe siècle. La monarchie
absolue n’autorisait la représentation publique que du seul
monarque mais les valeurs d’égalité, issues du Siècle des Lumières,
transforment le rapport au pouvoir et sa traduction dans l’art
monumental. Reconnaître et honorer une personne selon les seuls critères
du mérite présente ainsi une signification politique implicite.
>>> Sous la Monarchie de Juillet, le désir de réconciliation et l’exaltation
du passé national contribuent à l’élaboration d’un panthéon de
référence dont le sculpteur David d’Angers fixe une première typologie
d’ensemble.
>>> Dans les années 1880, l’érection de monuments aux grandes figures
qui ont contribué à fonder la République permet, par la pédagogie
de l’image, d’en affirmer les grands principes. A chacun des grands
hommes est ainsi confié l’illustration d’une idée-clé : à Rousseau
la démocratie, à Danton la défense nationale, à Condorcet l’instruction
publique par exemple.
>>> De même, le choix de l’emplacement répond autant à des préoccupations pratiques, liées à l’aménagement des voies publiques,
qu’à un goût pour les mises en scènes symboliques. Ainsi les abords
du Panthéon, de la Sorbonne ou de l’Institut, le quartier des Ecoles,
offrent des lieux privilégiés de regroupement de statues, en évocation
d’épisodes historiques et biographiques ou en écho symbolique
de valeurs républicaines comme le savoir, la science et l’éducation.
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(1788-1856)
Aux grands hommes,
la Patrie reconnaissante
Le Panthéon fut construit de 1764 à 1790,
selon les plans de l’architecte Soufflot, en
remplacement de l’ancienne église SainteGeneviève. Au XIXe siècle, l’édifice est dédié
tour à tour au culte catholique ou à celui
des grands hommes. La Monarchie de Juillet,
désireuse de prouver son inspiration libérale,
reprend l’idée de la Constituante et fait inscrire
au fronton la devise républicaine : « Aux grands
hommes, la Patrie reconnaissante » que le
sculpteur David d’Angers (1788–1856) est
chargé d’illustrer.
Au centre du fronton, la Patrie distribue des
couronnes que lui remet la Liberté, assise à
sa droite. L’Histoire, assise à gauche, inscrit
sur ses tables les noms des grands hommes,
dignes de la reconnaissance nationale. On
reconnaît au 1er rang, Malesherbes, Mirabeau
Monge et Fénelon. Au 2e, Lazare Carnot,
Berthollet et Laplace. Au 3e, Louis David,
Cuvier et Lafayette et, enfin, Voltaire et
Rousseau assis, regards opposés. À droite du
groupe central, un Bonaparte très républicain
emmène une armée de soldats anonymes
aux sons du tambour d’Arcole.
En 1837, le gouvernement tente de faire
supprimer l’effigie de Lafayette, ce que David
refuse avec obstination, appuyé en cela par la
presse libérale. Aussi le fronton est-il dévoilé
sans cérémonie officielle.
La composition d’un style presque naïf, où
les figures sont aisément reconnaissables,
témoigne du goût de David d’Angers pour
un art didactique, moral et politique. Dès les
années 1830, le fronton du Panthéon fixe ainsi
une typologie des portraits commémoratifs
qui inspirera les monuments de la seconde
partie du siècle.
>>> (5ème) >>>
Place du Panthéon
(1712-1778)
>>> écrivain et philosophe >>>
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Rousseau
La statue de Rousseau, œuvre du sculpteur
Antoine Bizette-Lindet, est une commande
de l’État remplaçant un bronze, détruit sous
l’Occupation. Cédée à la Ville de Paris, la
sculpture est mise en place en 1952 sur
l’ancien socle, non loin du Panthéon où les
cendres du philosophe reposent depuis la
Révolution. La première statue, érigée en
hommage à l’auteur de l’Émile et du Contrat
social avait été inaugurée en février 1889,
en ouverture des célébrations du premier
centenaire de la Révolution française. Dans
un climat politique différent, l’immédiat aprèsguerre s’est attaché principalement à rendre
hommage au talent littéraire du philosophe.
Place de la Sorbonne
>>> philosophe français >>> (1798-1857)
>>> (5ème) >>>
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Auguste Comte
Créateur de la science sociale et de la philosophie positive fondée sur la raison et
la foi dans le progrès, Auguste Comte
incarne ces idées républicaines que la
Troisième République tenta d’instituer en
valeurs collectives.
Une souscription pour l’érection d’un monument à sa mémoire est ouverte en 1899 à
l’initiative de la Société positiviste d’enseignement populaire supérieur. Le monument
est installé en 1902, place de la Sorbonne,
dans ce quartier où le philosophe a vécu
depuis son entrée à l’École polytechnique,
en 1814, jusqu’à sa mort, rue Monsieur-lePrince, en 1857. Rappelons également qu’il
a habité au 5 de l’ancienne rue NeuveRichelieu, aujourd’hui 7 place de la
Sorbonne. La position initiale du monument
sur la place, dans l’axe de la façade de la
Sorbonne, confirmait symboliquement le
rôle assigné à l’éducation.
Le monument, œuvre du sculpteur Antonin
Injalbert et de l’architecte Lemaresquier,
accorde une place de choix aux figures allégoriques du piédestal : à droite, le Travailleur
(intellectuel et manuel) fait pendant à
l’Humanité reconnaissante qui présente la
palme de la Gloire sous le buste du philosophe.
>>> (6ème) >>>
Carrefour de l’Odéon
>>> homme politique français >>>
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Boulevard Saint-Germain
>>> écrivain et philosophe français >>> (1713-1784)
>>> (6ème) >>>
(1759-1794)
Danton
Dès le début des années 1880, l’intérêt
porté au conventionnel s’inscrit dans le
grand mouvement d’historiographie révolutionnaire vivifié par l’échéance du premier
centenaire. Pour la Troisième République,
célébrer Danton présente aussi un double
intérêt idéologique et politique : anticlérical,
antimonarchiste, il est aussi le promoteur
des lois sur l’instruction publique et le héros
de la défense nationale de 1792.
Un concours entre artistes, voté par le
Conseil municipal en 1888, couronne le projet du sculpteur Auguste Paris qui présente
un groupe alliant force narrative et unité
symbolique : deux jeunes volontaires (celui
au tambour et celui au fusil) se redressent
vers la figure de l’orateur qui appelle au
courage et à la défense de la patrie.
Le monument, inauguré le 14 juillet 1891,
est érigé non loin de la maison de Danton –
celle-là même où il fut arrêté – qui se trouvait
près du carrefour, dans la partie de la cour
du Commerce démolie par le percement du
boulevard Saint-Germain. Comme celle de
Diderot, la statue de Danton fut épargnée
par la vague de destruction qui, sous
l’Occupation, priva Paris de la plupart de
ses bronzes. Au-delà de son sens historique,
ce géant héroïque, témoin silencieux de
bien des événements, reste l’une des figures
les plus familières du Quartier Latin.
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Diderot
>>> (6ème) >>>
Square Honoré Champion
(1694-1778)
>>> écrivain français >>>
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Cette statue fut créée à l’instigation d’un
Comité pour la Libre pensée en vue du premier centenaire de la mort du philosophe,
en 1884. Le sculpteur Jean Gautherin - premier recalé du concours du monument de la
République - exécute pour la célébration un
modèle provisoire en plâtre installé place
Saint-Germain-des-Prés. La statue définitive,
en bronze, est inaugurée le 14 juillet 1886
sur l’un des terre-pleins du boulevard, face
à la rue Saint-Benoît. En 1940, des aménagements de voirie entraînent le transfert à
son emplacement actuel du Diderot qui fait
partie des rares figures historiques à avoir
échappé à la destruction, sous l’Occupation.
Ce portait assis frappe par son dynamisme
et son efficacité pédagogique : la plume
brandie vers l’avant et le buste, fortement
penché et désaxé, expriment l’engagement
de l’écrivain dont la Troisième République
glorifiait le rôle de précurseur de la Révolution
française plutôt que celui, plus neutre - que
l’on retient aujourd’hui - du critique d’art ou
de l’Encyclopédiste.
Voltaire
Cette statue de Voltaire par Léon Drivier fut
commandée par l’État français en remplacement de celle de Caillé, refondue en 1942. La
nouvelle effigie, en pierre, devait initialement
reprendre le socle de l’ancienne statue, sur le
quai Malaquais, mais son échelle plus modeste,
son style qualifié alors de moderne et le
désir de certains académiciens de dégager
les abords de l’Institut aboutirent, non sans
polémiques, à reléguer le grand homme dans
l’un des petits squares nouvellement créés, à
l’arrière de l’Institut. D’âpres débats esthétiques mêlés de considérations politiques,
en retardent la mise en place, si bien que
l’œuvre de Drivier, conçue au lendemain de
la guerre, ne sera finalement installée dans
son nouveau cadre de verdure qu’en 1962,
bien après la mort du sculpteur.
>>> (6ème) >>>
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Quai Malaquais
La République
Au lendemain de la Révolution de février
1848, le Gouvernement provisoire décide
d’ouvrir un concours pour la représentation
de la République : figure peinte, figure sculptée et médaille. Jean-François Soitoux, lauréat
du concours de sculpture, est chargé d’exécuter la version monumentale de l’allégorie.
Mise en dépôt sous le Second Empire, la statue
L A R E PU B L I QUE ET LES GRANDS HOMMES > balades du patrimoine
>>> (6ème) >>>
Quai Conti
>>> philosophe, mathématicien et homme
politique français >>> (1743-1794)
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Condorcet
La statue du philosophe, mathématicien et
homme politique, est inaugurée quai Conti
le 14 juillet 1894. Le choix de l’emplacement
se justifie par la proximité de l’Hôtel de la
Monnaie, dont Condorcet fut le directeur,
et par celle de l’Institut, dont il fut membre
et secrétaire perpétuel de l’Académie des
sciences. Surtout, le site offre à l’époque la
possibilité d’une mise en scène symbolique
puisque, depuis 1880, se dresse devant
TOUTES LES BALADES SONT DISPONIBLES SUR LE SITE
:
www.culture.paris.fr
La Direction des Affaires Culturelles de la Ville de Paris entretient
à travers la capitale environ six cent statues et monuments
commémoratifs qui appartiennent au patrimoine municipal.
Ces oeuvres qui, pour la plupart, datent des débuts de la Troisième
République, sont le fruit d’une politique active de commande
destinée, selon les voeux des élus parisiens, à pourvoir au décor
des squares ou de la rue. Parmi elles, figurent quelques-uns
des chefs-d’oeuvre de la sculpture française : La fontaine
des quatre parties du monde de Carpeaux ou Le Triomphe de
la République de Dalou.
Le XXe siècle a longtemps été plus hésitant dans ce domaine,
mais depuis une vingtaine d’années, la Ville de Paris a renoué
avec la tradition de la commande publique. En 2004, elle a
mis en place un Comité de l’Art dans la Ville, comité consultatif,
rassemblant élus et experts, chargé de donner des avis
sur la politique menée dans ce domaine. Avec lui, la Ville de Paris
a ainsi réalisé 35 commandes publiques d’œuvres pérennes ou
éphémères entre 2004 et 2008. De la Tour d’exercice de Wang Du
(Paris 17ème), à la Danse de la fontaine émergente de Chen Zhen
(Paris 13ème) ou à la Forêt de candélabres du collectif berlinois
Inges Idee (Paris 19ème), elles sont à découvrir à travers Paris…
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l’Institut, face au Pont des Arts, La République
de Soitoux et qu’en pendant à la statue de
Condorcet, côté quai Malaquais, a été inaugurée le 14 juillet 1885 la statue de Voltaire
par le sculpteur Caillé.
Le rapprochement de la statue de l’un des
premiers défenseurs de la République, apôtre de l’Instruction publique, trouve son
sens à côté de l’image du régime et près
d’un autre philosophe des Lumières qui
mena le même combat pour la tolérance et
la justice sociale. Les deux figures sont
également complémentaires puisque leur
rapport symétrique peut s’interpréter comme
celui des sciences (Condorcet) et des lettres
(Voltaire).
L’œuvre, due au sculpteur Jacques Perrin,
montre une grande simplicité de moyens,
livrant le portrait d’un homme du XVIIIe siècle
sans préciosité ni anecdote. L’étirement de
la silhouette confère à la figure une élégance et une réelle prestance, affirmant
de cette manière sa présence dans l’espace.
La recherche d’expression passe également
par l’accentuation des traits du visage
(grand front, arcades sourcilières saillantes) ;
le regard profond et fixe, menton rentré,
disent la force morale, toute intériorisée du
philosophe.
La statue initiale en bronze fut détruite en
1943 mais elle a été restituée à son ancien
emplacement en 1991, dans le prolongement des célébrations du Bicentenaire de
la Révolution française.
Mairie de Paris / Directions des affaires culturelles - Conception graphique :
Crédits photographiques : Ville de Paris – C. Fouin, J.M. Moser, C. Pignol
est cédée en 1879 par l’État à la Ville de
Paris qui la place devant la façade de
l’Institut et l’inaugure le 24 février 1880, en
souvenir des journées historiques qui ont
présidé à sa création. Déposée à Amboise
entre 1962 et 1988, La République est
remise en place dans la capitale en 1992,
sur le côté droit de l’Institut, non loin de son
ancien emplacement.
De nombreux attributs confèrent un certain
didactisme à la figure : le faisceau d’armes
foulant la couronne royale brisée (l’unité
républicaine et la liberté), l’épée et le triangle (la justice et l’égalité), la ruche (le travail), l’étoile sur la couronne de chêne (la
raison et la sagesse). L’ample drapé et l’attitude hiératique, d’un classicisme très
antiquisant, l’identifient comme l’image
officielle du pouvoir mais sans caractérisation plus précise. En 1879, pour le nouveau
concours de la statue de la République, le
bonnet phrygien sera imposé comme symbole du nouveau régime.