Apprendre à «nager» dans l`océan audiovisuel

Transcription

Apprendre à «nager» dans l`océan audiovisuel
Vincent Adatte* Chronique
Apprendre à «nager»
dans l’océan audiovisuel
Dès son plus jeune âge, l’enfant vit dans un monde foisonnant d’images et de films. Le club de
cinéma pour enfants «La Lanterne Magique» lui permet de se divertir et de s’émouvoir!
Si l’enfant perçoit, tout d’abord, en sa qualité de spectateur, ce Depuis bientôt vingt ans, La Lanterne Magique s’efforce de
monde visuel en fonction de sa sensibilité, de son histoire, de donner aux plus jeunes les rudiments indispensables qui
son milieu social, il ne peut seul acquérir la compétence qui, leur permettront de faire preuve de plus de discernement
par la suite, lui permettra de faire de vrais choix. Il appartient dans leurs pratiques de consommateurs d’images. Basée sur
donc à des institutions publiques ou privées de l’amener à se l’autonomie, cette éducation à l’image voit tous les membres
forger un sens critique et une véritable culture cinémato­ du club recevoir avant chaque séance un journal personna­
graphique. La tâche est urgente. En dix ans, les nouvelles lisé et assister aux projections sans leurs parents, en dehors
technologies de diffusion ont considérablement évolué avec du cadre scolaire, mais avec des camarades du même âge.
l’avènement d’Internet. Les écrans se
Elle favorise aussi cette autonomie la
sont multipliés (cinéma, télévision, télé­
«Dans l’espoir de toucher, à spécificité d’un concept ludique et
phones portables, ordinateurs), per­
­pé­da­gogique, lequel prépare en amont
travers les enfants, des
mettant aux enfants et aux adolescents adultes dont les connaissance l’en­fant à découvrir le film, avant la
un accès toujours plus facilité aux
­projection proprement dite, tout en le
en matière de cinéma
­images. Usagers très précoces, ils sont
laissant ­rentrer de la séance complète­
deviennent toujours plus
aujourd’hui exposés, comme jamais
ment libre de ses réactions et apprécia­
relatives.»
­auparavant, à une consommation audio­
tions criti­ques. L’expérience montre que
visuelle sans discernement, avec les risques de troubles ou de bien des enfants parlent après coup du film découvert à La
manipulations que cela suppose.
Lanterne Magique, en famille avec leurs parents. Cette parti­
Dans le même intervalle de temps, le marché du cinéma cularité a le don d’engendrer une éducation cinématogra­
­destiné au jeune public a connu une évolution majeure. Le phique spontanée, inédite et fascinante, des parents par
nombre de films pour enfants qui sortent en salles a littéra­ leurs propres enfants. En effet, de plus en plus nombreux
lement explosé, correspondant à environ un cinquième de sont les pères et les mères qui téléphonent à La Lanterne
l’offre en Suisse, ce qui représente une augmentation radi­ ­Magique pour savoir s’il existe un DVD du film dont leurs
cale par rapport à la situation qui prévalait il y a deux décen­ ­enfants ne cessent de leur parler et qui leur est inconnu, à
nies. Soulignons qu’il s’agit presque exclusivement de films l’exemple de «Jiburo, sur le chemin de la maison» de la
d’animation américains. Cette tendance massive indique ­cinéaste sud-coréenne Lee Jung-Yiang ou des «Histoires du
que les enfants sont devenus de véritables prescripteurs en bazar» du réalisateur ira­nien Abdollah Alimorad, ou des
matière d’audience, décidant souvent pour leurs parents du chefs-d’œuvre de Charlie Chaplin, Buster Keaton, Fritz Lang,
choix des films, DVD, séries ou téléfilms. En regard de ce Wolfgang Staudte, Tsian Min-ling ou Jacques Tati. ❖
changement capital, il importe d’inculquer aux plus jeunes
*Vincent Adatte, codirecteur de La Lanterne magique
les fondaments d’une culture cinématographique basée sur
est né en 1959 à Neuchâtel. Cofondateur de La Lanterne
la diversité et selon une perspective historique en me­sure de
magique, scénariste et journaliste cinématogaphique,
relativiser les effets de mode, dans l’espoir de toucher, à
il travaille régulièrement pour différents médias de Suisse
romande. Pour plus d’infos sur La Lanterne Magique:
­travers les enfants, des adultes dont les connaissances en
www.lanterne-magique.org
matière de cinéma deviennent toujours plus relatives.
Février 2013-62_Kidy swissfamily
9

Documents pareils