Planifier et mettre en

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Planifier et mettre en
Dossier pression
Planifier et mettre en œuvre
les étalonnages des capteurs industriels
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La pression est avec la température le paramètre le plus mesuré sur les procédés. Les capteurs doivent être régulièrement
contrôlés et étalonnés afin de garantir leurs performances. Une opération qu’il faut mener avec des calibrateurs raccordés
aux étalons nationaux. Pour être prises en compte par la version 2000 des normes ISO 9000, ces opérations doivent être
planifiées et renouvelées régulièrement. Prestataires de services et logiciels arrivent sur le marché pour gérer ces
contraintes.
our assurer le bon déroulement et la
qualité de ses fabrications, l’industriel doit régulièrement vérifier le
bon fonctionnement de ses équipements
de production. Les capteurs et transmetteurs n’échappent pas à la règle et encore
moins les équipements de mesure de pression. « La plupart de nos clients profitent des arrêts
techniques pour contrôler leurs capteurs de pression,
explique Colette Démoulin, responsable
produits pression chez Emerson Process Management. Ils vérifient sur place le fonctionnement du
transmetteur. En cas de problème, ils le démontent et
envoient l’instrument vers un laboratoire compétent
pour faire un étalonnage ».
L’étalonnage industriel nécessite plusieurs
cycles de mesure et la possession d’un
appareil raccordé à l’étalon du BNM par
l’intermédiaire d’un laboratoire Cofrac. Luc
P
Les fournisseurs de calibrateurs de pression proposent
souvent des logiciels de suivi
d'étalonnage afin de faciliter
la traçabilité des étalonnages.
Dargent, directeur commercial et marketing à DH-Budenberg explique : « Pour faire un
étalonnage,il faut d’abord réaliser un cycle de réception,
suivi éventuellement par une phase de réglage. Puis, de
nouveau entre un et trois cycles de mesure selon la répétabilité recherchée. » Pour ceci, le capteur est
soumis à une pression de référence mesurée à la fois par un capteur étalon et l’appareil à contrôler. Le capteur de transfert
qui sert sur le site doit être régulièrement
comparé à un étalon de référence, validé
par un laboratoire accrédité Cofrac pour la
grandeur “pression”. Cette opération peut
être faite sur site, mais ce n’est pas toujours
facile car on ne peut échapper à l’environnement industriel qui perturbe la qualité
de l’étalonnage. Il est encore aujourd’hui
plus pratique de démonter le transmetteur
et de réaliser l’étalonnage en laboratoire.
Cependant, le démontage est une opération lourde qu’il n’est pas nécessaire de faire subir à des capteurs en bon état de fonctionnement. Pour ces derniers, un simple
constat de vérification suffit. Il s’agit alors
de contrôler l’appareil pour voir s’il est
conforme à ces prescriptions d’origine. « Ce
constat de vérification est en général mené sur le site à
l’aide d’un capteur de référence lui aussi raccordé à
l’étalon primaire.La linéarité du capteur est comparée
sur dix points », explique Jean-Marie Clay, responsable SAV et formation chez Leybold. « Le
contrôle in situ est rapide. Quelques points suffisent
pour s’assurer que le transmetteur est dans sa tolérance », confirme M. Dargent (DH-Budenberg).
Mais attention ! « Il sera impossible de faire un
étalonnage sur place,si l’on n’a pas prévu (au moment
de la conception de l’installation) des prises de test permettant d’isoler le capteur et de mettre en place le calibrateur, commente Claude Schelcher, responsable produits capteurs de pression chez
Endress+Hauser ; si ces conditions ne sont pas respectées, il faut profiter d’un arrêt du procédé,démonter le
capteur puis le remplacer par un autre équipement de
secours ».
Pour assurer ces opérations, l’industriel doit
s’équiper d’un calibrateur de pression.
Bourdon Haenni
S’équiper d’un calibrateur
de pression
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Cet appareil assure à la fois la génération
de pression et la mesure de référence. Il
doit être raccordé périodiquement à l’étalon national.
La grande tendance est aux appareils modulaires. Ceci permet d’utiliser le même appareil de base dans une large gamme de pressions. Par exemple, sur son modèle MC5,
Bourdon-Haenni peut installer jusqu’à trois
modules de pression interne pour couvrir
de –1 bar à 160 bars et à l’aide de modules
externes atteindre les 1 000 bars. De plus,
le module barométrique permet d’exprimer les données en pression absolue. Cet
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Druck
Dossier pression
Les calibrateurs d'instruments de pression peuvent adopter de multiples présentations, qui vont de l'appareil de terrain au banc d'étalonnage complet, en passant bien sûr par les appareils de table.
appareil, doté d’une communication HART,
supporte les ordres lecture/écriture utilisés habituellement pendant l’étalonnage et
transmis par protocole HART. Dans le
même esprit, Mensor, représenté par DHBudenberg, a développé un calibrateur de
pression à capteur interchangeable sous
pression.
Pour les gros parcs de capteurs, la tendance est à l’automatisation de l’étalonnage. Pour aider l’industriel dans cette
démarche, DH-Budenberg commercialise
depuis dix ans Pascal, un logiciel de
conduite du process d’étalonnage. Il
intègre une bibliothèque de procédure
et de conduite d’étalonnage, il analyse
les résultats et édite un certificat d’étalonnage.
Pour tous, la périodicité de l’étalonnage
du calibrateur dépend de la technologie
du capteur qu’il intègre. « La périodicité
raisonnable, explique M Dargent, c’est une
fois par an. Cependant, certains calibrateurs du
marché ont besoin d’être réétalonnés tous les
90 jours, c’est un problème ». Il existe en effet
plusieurs gammes d’appareils :
• L’entrée de gamme, avec un capteur basée
sur la technologie jauges de contraintes.
Ce type d’équipement est principalement
réservé au contrôle des manomètres et des
capteurs dont la précision ne dépasse pas
0,1 % à 0,5 %.
• Le moyen de gamme équipé de capteurs
silicium précis de 2 à 2,5.10-4
• Le haut de gamme avec les capteurs à
quartz dont la précision atteint 10-4.
« La technologie silicium a fait de gros progrès ces
dernières années. Elle est très prometteuse et pourrait
bien dépasser le quartz, poursuit M. Dargent.
Déjà, elle présente l’avantage du prix car le procédé
de fabrication se prête aux grandes séries. De plus, son
temps de réponse est deux fois plus court que celui
du quartz, 30 secondes au lieu d’une minute » .
Du choix du calibrateur dépend la périodicité d’étalonnage.
La périodicité d’étalonnage
« Pour le vide, la fréquence des étalonnages est
très variable suivant le type de pression, le gaz
réactif ou corrosif en contact avec le capteur »,
commente Olivier Dulac, directeur des
ventes chez MKS Instruments. « C’est à l’utilisateur de définir sa périodicité d’étalonnage.
Celle-ci doit être définie en fonction des besoins
et des équipements qu’il a mis en place », surenchérit M. Schelcher (Endress+Hauser).
Par exemple, un industriel qui achète
des capteurs de 0,1 % de précision,
alors que ces besoins sont de 0,5 %,
pourra se contenter d’un étalonnage
tous les trois ans, alors que pour un
même investissement et un besoin de
0,1 %, il devra contrôler son capteur
tous les ans. Dans les faits, le DKD
(équivalent allemand du Cofrac) et la
norme européenne préconisent d’étalonner chaque année les capteurs dont
la précision est inférieure à 0,5 % et
une fois tous les deux ans ceux dont la
précision est supérieure à 0,5 %. De
même, pour les manomètres, les équipements de classe 0,6 seront vérifiés
une fois par an alors que ceux dont la
classe est supérieure à 0,6 ne le seront
que tous les deux ans. Reste le cas des
nouveaux capteurs qui apparaissent sur
le marché avec des garanties de leurs
performances métrologique sur 10 ans
(Série 3051S d’Emerson Process, EJA110A
de Yokogawa)… Dans les faits, seul l’utilisateur peut définir le nombre de recalibrages en fonction des exigences de
son procédé. Et, si la démarche “étalonnage” n’est pas encore systématique
chez les industriels français, il y a tout
de même une prise de conscience qui
n’existait pas il y a quelques années.
Une solution de gestion du parc d’instrument
« Plus de 80 % de nos clients
n’ont pas d’inventaires des
instruments qu’ils
utilisent » : ce constat fait
par les ingénieurs d’Endress+Hauser a amené l’entreprise à proposer une
solution de gestion du
parc installé. Appelée IMS,
comme “Instrument Mana-
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gement Solution”, elle se
propose, après un inventaire de la base installée,
d’analyser avec l’industriel
les points de mesure critiques et d’élaborer un
plan de maintenance curative, préventive et de remplacement des appareils
en y intégrant un plan de
standardisation et une
analyse approfondie du
stock. Ce travail qui porte
sur l’ensemble des capteurs, y compris sur ceux
de la concurrence, aboutit
à un rapport détaillé. Ce
document est destiné à
vivre au fil des temps,
reprenant l’état des équi-
pements, leur age, leur
maintenabilité. Selon une
étude menée par l’ARC
(centre de recherche en
automation), l’économie
totale procurée par la
démarche pourrait
atteindre 20 % du budget
maintenance.
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DH-Budenberg
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base de données », confirme Jérôme Ignacio (Druck). De tels logiciels d’étalonCertains calibrateurs de terrain ne sont pas sans rappeler les multimètres de
nage sont proposés par les fournisseurs
poche. Les appareils peuvent aussi bien étalonner l'électronique des appareils
de calibrateurs, certains fournisseurs de
que l'appareil complet. Le générateur de pression est soit intégré soit externe.
capteurs de pression mais aussi des
Sensibilisé par les normes d’assurance sociétés indépendantes telles que Félix
qualité, l’industriel sait que l’instru- Informatique et Implex.
mentation placée sur les points critiques Exemple parmi d’autres, citons le logide son process nécessite vérifications, ciel QM6 de Beamex, une société finlanvalidations et étalonnages réguliers. Et daise distribuée par Bourdon Haenni. Ce
qu’elle doit être tracée.
logiciel gère l’ensemble des capteurs
d’un site industriel. Un plan de l’usiLa traçabilité impérative dans le
ne divisé en différentes zones permet
cadre de l’ISO 9000
de repérer rapidement l’emplacement
« Sur un site de production, l’étalonnage des cap- du capteur. Une fonction permet la
teurs est une opération contraignante qu’il faut création automatique, dès l’ouverture
gérer et tracer afin de répondre aux contraintes de d’une base de données, d’une liste des
traçabilité des productions. L’utilisation d’un logi- calibrateurs, des points de mesure et
ciel de gestion est devenue nécessaire », sou- des instruments à étalonner. L’utilisaligne M. Schelcher (Endress+Hauser). tion des requêtes permet d’afficher uni« Pour gérer le parc de capteurs, il existe des logi- quement les données sélectionnées
ciels qui, en plus de la récupération des informa- d’après des critères pré-définis. Tous les
tions mémorisées sur les appareils, jouent le rôle de nouveaux éléments répondant à ces critères sont stockés par le logiciel au sein d’un fichier. Le
QM6 gère différents fichiers
tels que des fichiers statisRedistribution des cartes
tiques et d’historiques. L’ention exclusive des calibraLe monde des systèmes
semble de ces fichiers,
teurs de la société finlandaid'étalonnage et des calibraconfrontés les uns aux
se Beamex, jusque là repréteurs de pression est en
autres, aide à améliorer le
sentée par EMT.
pleine effervescence. La
système de gestion. Cet outil
Autre annonce importante,
principale nouvelle conceroffre la possibilité d’éditer
ne évidemment le rachat de DH-Budenberg (anciennedes fiches de contrôle
ment Desgranges et Huot)
Druck par General Electric.
contenant les informations
vient d'être choisi par la
Une autre a été l'implantade l’instrument à étalonner.
société américaine Mensor
tion en France du fabricant
Toutes les informations liées
pour l'ensemble de l'Euroitalien Eurotron. Du coup,
aux mises à jour de la base
pe. On notera enfin que la
Bourdon-Haenni, qui avait
de données et aux intervensociété américaine Furness
quelques produits Eurotron
Controls vient de créer une
en complément de sa
tions (dates, nom de l’utilifiliale en France. Elle était
propre gamme, a cessé sa
sateur, type d’intervenjusque là représentée par
collaboration et s'est rattration…) sont tracées. Le
Ets Mesureur.
pé en prenant la distriburegistre permet donc d’établir le rapport d’audit destiné à la gestion des modi-
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AOIP
Fluke
Les besoins en étalonnage sont très variés, selon l'incertitude
désirée, selon que l'étalonnage doit être réalisé en laboratoire
ou sur site. Les spécialistes de l'étalonnage, même les plus
prestigieux, sont ainsi conduits à diversifier leur offre, quitte à
s'associer à des partenaires s'ils ont un trou dans leur
gamme.
Si les bancs d'étalonnage de laboratoire permettent d'étalonner plusieurs capteurs simultanément, ce n'est évidemment
pas le cas des appareils de terrain, où l'étalonnage est pratiqué
au cas par cas, en nécessitant pas mal d'opérations manuelles.
fications (OSHA, FDA). L’étalonnage
en ligne permet de contrôler l’ensemble du processus d’étalonnage, voire même d’étalonner de nombreux instruments de base de façon
quasi-automatique.
L’étalonnage est une affaire de spécialistes. De nombreux industriels préfèrent externaliser cette tâche auprès
d’entreprises compétentes.
Externaliser le suivi du parc
de capteurs de pression
Depuis quelques années, DH-Budenberg
a considérablement développé son service d’étalonnage. Celui-ci représente
aujourd’hui de l’ordre de 30 à 40 %
du chiffre d’affaires de la société.
Accrédité Cofrac depuis 1977, l’entreprise réétalonne environ 600 étalons
de transfert ou primaires et des bancs
automatiques. Nombreuses sur les
rangs sont les sociétés à proposer ce
service. Outre tous les laboratoires
accrédités Cofrac dans le domaine de la
pression, les entreprises s’en mêlent
aussi. Kimo offre des prestations sur site.
FGP Instrumentation propose un service
étalonnage en laboratoire. Endress+Hauser se lance dans le service d’étalonnage sur site et la gestion de parc installé. « Nous allons sur site faire des étalonnages
quand les exigences du client ne sont pas trop
importantes, explique M. Schelcher ; si les
spécifications sont sévères, ou si les paramètres
d’environnement sont trop difficiles, nous nous
tournons vers un laboratoire accrédité ».
Marie-Odile Mizier
Technoscope
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