Chambre de Commerce et d`Industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin

Transcription

Chambre de Commerce et d`Industrie de Strasbourg et du Bas-Rhin
Chambre de Commerce et d'Industrie
de Strasbourg et du Bas-Rhin
INAUGURATION de la 71ème FOIRE EUROPEENNE
de STRASBOURG
le Vendredi 5 septembre 2003 à 16 h 00
Cour d’Honneur – Parc des Expositions à Strasbourg.
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ALLOCUTION
de
Monsieur Richard BURGSTAHLER
PRÉSIDENT
de la CHAMBRE DE COMMERCE ET D’INDUSTRIE
DE STRASBOURG ET DU BAS-RHIN
PRÉSIDENT
de la CHAMBRE REGIONALE DE COMMERCE ET D’INDUSTRIE
D’ALSACE
Peut-on concilier pragmatisme et valeurs ?
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Préfet de la Région Alsace,
Monsieur le Président du Conseil Régional d’Alsace,
Monsieur le Président du Conseil Général du Bas-Rhin,
Madame le Maire de la Ville de Strasbourg,
Monsieur le Président de la Communauté Urbaine de Strasbourg,
Mesdames et Messieurs les Elus, Députés, Sénateurs, Conseillers Régionaux,
Généraux, Communautaires,
Messieurs les Présidents des CCI de Colmar et de Mulhouse,
Messieurs les Présidents de la Chambre de Métiers et de la Chambre d’Agriculture,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Consuls en place à Strasbourg,
Mesdames et Messieurs,
Avant de répondre à cette question, je souhaite que cette 71e Foire Européenne
apporte à tous les exposants le meilleur succès. Je salue ici la présence de l’Algérie.
Nos entreprises y ont noué des relations d’affaires importantes : deux missions de
prospection successives de notre Chambre leur ont facilité la tâche.
Peut-on concilier pragmatisme et valeurs ?
Cette interrogation liminaire sur le thème « pragmatisme et valeurs » se pose avec
acuité à tous les décideurs. Accessoirement, dans ce monde complexe en mutation,
parfois brutale, qui peut, qui doit décider et de quoi ?
Dans un entretien récent, Philippe SEGUIN soulignait que paradoxalement c’est
lorsqu’une démocratie fonctionnait que les élus avaient le moins à décider. Il situait
cette problématique dans le contexte d’une mondialisation qui restreint les choix au
niveau local et génère le sentiment confus de nos concitoyens qu’en définitive si les
élus politiques n’ont que peu de prise sur le monde, à quoi bon les élire.
D’où le succès des altermondialistes qui sont, en fait, des antimondialistes qui « ne
proposent rien du tout ».
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Il est bien certain que nous ne pouvons pas souhaiter une chose et son contraire, le
libre échange et le maintien, en France, par exemple, de toutes nos industries
traditionnelles.
Que
donne
l’Alsace
aujourd’hui ?
Un
chômage
en
progression
de
17,8 % en rythme annuel, avec, pour la première fois, une évolution préoccupante
parmi les travailleurs frontaliers. L’ouverture de l’Europe centrale et orientale - notre
récent débat sur l’élargissement de l’Europe l’a bien indiqué - ne se fera pas sans
heurt.
Tous les secteurs sont, à des degrés divers, concernés. Au total, ce sont 6.000
emplois perdus dans l’industrie alsacienne au cours des 18 derniers mois. La
contrefaçon menace aujourd’hui la mécanique et la sous-traitance dans les biens
d’équipement. Les contraintes nouvelles d’assurance qualité, imposées aux soustraitants, sont une véritable bombe à retardement pour notre tissu économique. Le
FIST que nous organisons en septembre avec le soutien appréciable de la Région
Alsace constitue un atout que les entreprises de la sous-traitance utilisent pour
conquérir de nouveaux clients.
Il est dorénavant certain que la crise de notre économie régionale n’est pas
conjoncturelle, il s’agit d’une mutation structurelle.
Le plus bel atout pour réagir demeure la capacité des chefs d’entreprise à se
mobiliser. Encore faut-il que leur environnement soit favorable.
Comment la situation économique pourrait-elle être brillante lorsque l’on observe
comment notre pays s’est ingénié à tuer l’initiative et la croissance ?
Complexité administrative, insécurité juridique, fiscalité déraisonnable et confiscatoire,
l’apothéose ayant bien sûr été la fameuse loi sur les 35 heures, dont nous n’avons
pas fini de recenser les conséquences, et qui représente l’archétype de l’entêtement
dogmatique quasi dictatorial.
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Peut-on demander plus aux entreprises ?
raisonnable.
La
productivité
française
dans
Honnêtement, ce ne serait pas
les
secteurs
traditionnels
est
exceptionnelle, puisque la main d’œuvre est devenue un coût insupportable. Est-ce à
dire que les salariés sont trop bien lotis en France ? Certainement pas, et nous
savons bien comment, en fait, la réduction du temps de travail, censée créer de
l’emploi, a créé essentiellement du stress, une complexité administrative effrayante, et
généré des tensions internes aux entreprises qui n’avaient aucune raison d’être.
Il est un peu désespérant de constater que, lentement mais sûrement, la France perd
de sa compétitivité par rapport à des pays comme l’Italie, le Royaume-Uni, décourage
les salariés et en particulier les jeunes cadres qui partent massivement à l’étranger.
Nous croyons, Monsieur le Ministre, que votre Gouvernement est parfaitement
conscient de la situation et déterminé à réagir. Les chefs d’entreprise ne peuvent que
vous encourager à poursuivre, à accélérer les réformes indispensables.
Cela fait 20 ans que le problème des retraites est posé. Il était certainement opportun
d’attaquer ce chantier en priorité. Qu’il soit permis sur ce dossier particulier de
dénoncer l’irresponsabilité de ceux qui prétendent qu’il y avait, ou qu’il y aurait
d’autres voies possibles.
A contrario, nous saluons la responsabilité et l’honnêteté intellectuelle de ceux qui,
dans l’opposition, ont confirmé qu’il n’y avait effectivement pas d’autre voie.
Permettez également de saluer la détermination à baisser la fiscalité, et à surprendre
agréablement tous ceux qui s’interrogeaient pour savoir si, une fois de plus, les
promesses électorales resteraient lettre morte.
Savoir s’affranchir des règles technocratiques pour respecter un engagement, savoir
prendre des mesures qui vont dans le sens de l’intérêt général, mais difficiles à
défendre, voilà la grandeur du politique.
Alors qu’attendent les entreprises ?
Une assurance tous risques ? Une protection face à la mondialisation ?
Souhaitent-elles un saupoudrage d’aides financées en définitive par l’impôt ?
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Certainement pas. Elles souhaitent toutes les réformes difficiles, mais indispensables,
dont notamment l’assurance maladie.
Ce qui nous réunit aujourd’hui, c’est en définitive cette préoccupation commune
d’avoir en France, en Alsace, à Strasbourg, un environnement favorable pour le plus
grand bien de l’économie et donc de nos concitoyens.
Personne ne sera surpris ici si j’évoque à titre d’illustration le transport aérien. Les
chefs d’entreprises, élus de la CCI, réunis hier en Assemblée Plénière, se sont
interrogés. Pourquoi notre Région doit-elle toujours payer pour tout, se résigner à
être inaccessible ? Peut-on accepter aujourd’hui d’être privé d’une desserte
internationale à la hauteur de nos besoins ? Faut-il accepter poliment d’être étranglé ?
Un consensus constant depuis 1971 a permis, concrètement à Strasbourg, d’assumer
sa vocation européenne, et c’est ainsi qu’en 1978 déjà le contrat triennal « Strasbourg
Ville Européenne » a formalisé les participations des uns et des autres.
La réglementation de 1994 a conduit aux appels d’offres européens pour la desserte
de Strasbourg.
C’est dans ce contexte que la CCI a proposé à tous ses partenaires, réunis au sein du
Comité de Pilotage, de tout entreprendre pour le développement international de
notre plate-forme. Nous avons essayé le « rendez-vous aérien de Strasbourg »
permettant de coordonner les dessertes de villes françaises et de plusieurs capitales
européennes. Mais ce projet a été contrarié par la stratégie des compagnies
nationales de concentrer leur trafic sur les plates-formes nationales principales. La
desserte de Strasbourg - Londres affichait alors un trafic de plus de 50.000 passagers
par an ; c’est dire que le potentiel commercial ne faisait pas de doute.
Pourtant, nous avons constaté une dégradation progressive de ce trafic. A l’inverse,
de 30.000 passagers par an pour Strasbourg - Bruxelles, sous obligation de service
public, nous avons vu plus de 100.000 passagers par an dès que la ligne a été
exploitée dans un cadre pleinement concurrentiel. Il fallait donc essayer de trouver
une Compagnie basée. Mais les mouvements de restructuration, fusion, n’ont pas
permis cette réponse.
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Le paysage européen du transport aérien connaît des mutations profondes qui
invitent à mettre le droit en accord avec les faits. Le Livre Blanc des 10 premiers
aéroports français auquel nous avons activement participé contient des propositions
sur les modernisations indispensables en France. Il s’agit, ni plus ni moins, de
permettre à l’industrie aéroportuaire française de rester compétitive.
Forte de ce constat, la CCI s’est intéressée au marché émergeant des low cost. La
preuve a été apportée qu’une desserte Londres -Strasbourg permet :
Un nouveau marché avec les retombées économiques pour l’ensemble de la
région ;
Un apport de trafic capable de rentabiliser les infrastructures ;
Une perspective enfin de développement pour des liaisons avec d’autres
métropoles en Europe.
Je remercie très vivement le Conseil de la Communauté Urbaine de Strasbourg du
soutien qu’il a décidé d’apporter à cette initiative, et en particulier, je remercie de leur
engagement personnel Monsieur le Président de la CUS et Madame le Maire de
Strasbourg.
Les résultats sont là. Pour 1,4 millions d’euros de prestations, les retombées
économiques sont évaluées à 23 Millions d’euros par an, particulièrement
appréciables dans un contexte économique déprimé. Cela correspond aux dépenses
des touristes britanniques qui représentent 65 % des 200.000 passagers.
Certains reprochent à la Compagnie low cost de gagner de l’argent. Tous les
gestionnaires d’Aéroports aimeraient avoir comme partenaires des Compagnies
rentables, c'est le gage de la pérennité et de la solvabilité. Certains sont choqués par
une politique des Compagnies low cost pas assez sociale ; d’autres trouvent que le
libéralisme est mis à mal. Pendant que nous avons ce genre de débats d’idées, nous
observons que tous les pays européens s’empressent d’accueillir les Compagnies low
cost et qu’une fois de plus, c’est la compétitivité même de notre territoire qui est en
jeu. Nous avons commencé à transmettre au Gouvernement des propositions
permettant de développer, comme il se doit, nos plates-formes.
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Outre la création de sociétés aéroportuaires, il est possible de voir les compagnies
traditionnelles et les compagnies low cost se développer conjointement et en parfaite
équité. Il suffit de permettre effectivement aux gestionnaires d’aéroports en France de
disposer des mêmes latitudes commerciales que partout en Europe.
Ces adaptations sont indispensables à l’accueil des flux de fréquentation dont notre
région ne peut se passer. Cette démocratisation en profondeur du transport aérien, à
portée de main, est encouragée par l’Europe toujours soucieuse de l’intérêt du
consommateur.
Par ailleurs, dans le cas particulier de Strasbourg, la CCI attend avec impatience le
TGV Est-Européen, mais nous savons bien que cette arrivée se traduira par 600.000
passagers en moins sur la ligne Strasbourg – Paris.
Que voulons-nous pour la région ?
Un aérodrome ou un outil permettant d’être cohérent entre l’ambition affichée et les
moyens qui vont de pair.
On voit bien sur différents sujets : aménagement du temps de travail, réforme des
retraites, compétitivité de nos infrastructures, qu’il est non seulement possible mais
qu’il est devenu indispensable d’être pragmatique pour défendre nos valeurs.
Pas d’idéologie, pas de dogmatisme, quels sont les faits ? Pourquoi ?
Votre action, Monsieur le Ministre, saluée par-delà les clivages traditionnels, prouve à
l’évidence que cela est possible.
Les chefs d’entreprise attendent des politiques qu’ils votent les bonnes lois, avec des
textes précis qui favorisent un environnement motivant pour leurs entreprises, dans
lesquelles des salariés bien formés auront plaisir à travailler, le tout dans un contexte
d’infrastructures de qualité.
Voilà, M. le Ministre, un programme qui contribuera à la joie de vivre en France.
Je vous remercie de votre attention.
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