Chapitre 5 - Précis d`anesthésie cardiaque

Transcription

Chapitre 5 - Précis d`anesthésie cardiaque
PAC
•
Précis d’Anesthésie Cardiaque
CHAPITRE 5
PHYSIOPATHOLOGIE
CARDIOVASCULAIRE
Mises à jour : Avril 2014, Novembre 2015
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
1
Table des matières
Couplage excitation – contraction
3
Déclenchement de la contraction
3
Relaxation et terminaison de l'effet
6
Stimulation β et β-blocage
9
Stimulation α–adré- et cholinergique
10
Croissance et apoptose
12
Insuffisance ventriculaire
14
Contraction myocardique
19
Physiologie
19
Situations pathologiques
20
Mécanique ventriculaire
22
Architecture fonctionnelle du VG
23
Contraction du VG
26
Squelette interne du VG
31
Relaxation diastolique
35
Contraction du ventricule droit
38
Notre cœur est-il une bonne pompe ?
41
Physiopathologie de la systole
55
Déterminants de la fonction systolique 55
Relation pression / volume
63
Couplage ventriculo-artériel
70
Fraction d’éjection
77
Adaptation à l'effort
79
Contrôle de la pression artérielle
80
Physiopathologie de la diastole
85
Relaxation et compliance
88
Dysfonction & insuffisance diastolique 93
Remplissage veineux
100
Régulation du retour veineux
100
Flux de remplissage
102
Précharge du cœur
Interactions cardio-respiratoires
Respiration spontanée
Ventilation en pression positive
Effets hémodynamiques
Evaluation dynamique de la volémie
Dysfonction ventriculaire gauche systolique
Insuffisance du VG
Remodelage ventriculaire
Stimulation neuro-humorale
Transport d'oxygène
Fonction du VD et circulation pulmonaire
Anatomie et physiopathologie
Dysfonction du VD
Hypertension pulmonaire (HTP)
Le monoxyde d'azote (NO)
Perfusion et ischémie coronarienne
Anatomie des coronaires
Flux coronarien
Apport et demande d’O2
Sténose coronarienne
Collatérales et phénomène de vol
Ischémie myocardique et infarctus
Hibernation et lésions de reperfusion
Préconditionnement
Infarctus postopératoire
Conclusions
Bibliographie
Auteur
104
110
110
114
119
124
128
128
132
138
141
144
144
153
156
168
171
171
173
179
183
189
190
196
199
203
208
209
224
Un aperçu du fonctionnement cellulaire, du mécanisme de la contraction ventriculaire et de la
régulation hémodynamique est nécessaire pour en comprendre les dérèglements. Ce chapitre est donc
consacré à une revue succincte de la physiologie cardiaque, ainsi qu’à un rappel de la
physiopathologie de l’insuffisance ventriculaire et de l’ischémie myocardique. Le fonctionnement
cardiaque est envisagé en relation avec les vaisseaux qui l’alimentent (remplissage) ou dans lesquels il
éjecte (couplage ventriculo-artériel), ainsi qu’en interaction avec la respiration et la ventilation
mécanique. Comme les traités d’électrocardiographie sont nombreux et le plus souvent excellents,
l’électrophysiologie n’est pas abordée dans ce chapitre (voir Chapitre 20 Anesthésie et arythmies). Le
propos de ces quelques éléments de physiologie est de mieux comprendre les mécanismes
physiopathologiques en jeu afin d’assurer une meilleure prise en charge des patients en anesthésie et
en réanimation.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
2
Couplage de l'excitation et de la contraction myocardiques
Pour coordonner la contraction myocardique au niveau cellulaire, il existe trois systèmes neurohumoraux comprenant chacun 1) un messager extracellulaire, 2) un récepteur membranaire et 3) une
cascade de transmetteurs intracellulaires qui règlent les variations de concentration du calcium ionisé
[Ca2+]i dans le sarcoplasme [428].

Système β-adrénergique
• Messager extracellulaire : amines β (isoprénaline, dobutamine, dopamine, adrénaline)
• Messager intracellulaire (2ème messager) : adénosine-monophosphate cyclique (AMPc)
• Effet cellulaire : augmentation de [Ca2+]i
• Effet clinique : augmentation de la contractilité myocardique, vasodilatation artérielle
 Système α-adrénergique
• Messager extracellulaire : amines α (noradrénaline, adrénaline, phényléphrine)
• Messager intracellulaire (2ème messager) : inositol-triphosphate (IP3)
• Effet cellulaire : augmentation de [Ca2+]i
• Effet clinique : augmentation de la contractilité, vasoconstriction artérielle
 Système cholinergique
• Messager extracellulaire : acétylcholine, NO•
• Messager intracellulaire : guanosine-monophosphate cyclique (GMPc)
• Effet cellulaire : diminution de [Ca2+]i
• Effet clinique : diminution de la contractilité myocardique, vasodilatation artérielle
Le cœur d'un jeune adulte est constitué pour 70% de myocytes ; la moitié du contenu de ceux-ci est
constitué de protéines contractiles et le quart de mitochondries. La proportion de myocytes et de
fibrocytes varie avec l'âge; elle est de 30/70 chez le nouveau-né, de 60/40 chez l’adulte et décline à
40/60 chez le vieillard [289]. Bien que ne représentant que 0.6% du poids du corps, le cœur consomme
11% de l’énergie totale de l’organisme.
Déclenchement de la contraction
La membrane des myocytes présente de longues et fines invaginations, les tubules T, qui amènent le
liquide extracellulaire au voisinage des organelles intracellulaires. Les récepteurs membranaires, qui
sont situés sur ces tubules T, se trouvent donc tout proches du réticulum sarcoplasmique (RS) et des
mitochondries. Deux voies sont possibles pour déclencher une contraction myocardique et gérer son
intensité : les récepteurs β et les canaux calciques L.
Voie des récepteurs β
Le récepteur β est un complexe protéique de sept spires à cheval sur la membrane cellulaire (Figure
5.1). Il est très stéréospécifique : il faut une configuration moléculaire précise pour le stimuler (la
meilleure spécificité est celle de l’isoprénaline). Il possède aussi une haute affinité : de faibles
concentrations circulantes de catécholamines (10-9-10-10 mol/L) suffisent à déclencher la stimulation. Il
comprend des zones fonctionnant comme agonistes et des zones dont la stimulation induit un effet
antagoniste. Il est couplé à deux protéines G intracellulaires, l’une stimulatrice (Gs) et l’autre
inhibitrice (Gi) (il existe plusieurs types de protéines G dont les principaux sont les types Gs, Gi et
Gq). Il possède également des points dont la phosphorylation induit sa désensibilisation par
découplage de la protéine Gs [290,428].
Dans les ventricules, le 80% des récepteurs est de type β1, à effet essentiellement inotrope positif,
alors que dans les oreillettes la proportion est de 60% β1 et 40% β2 (respectivement inotrope et
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
3
chronotrope) [97,205]. Ainsi une catécholamine à effet β1 pur comme la dobutamine a un effet
essentiellement inotrope, alors que les catécholamines à effet β2 provoquent en plus une tachycardie.
La plupart des récepteurs β non-cardiaques sont de type β2 ; leur stimulation cause une vasodilatation
artérielle et une accélération métabolique. Dans un cœur normal, les récepteurs β2 et α1 représentent
environ 10% chacun de la population totale. Il existe encore des récepteurs β3 (1%) qui ne sont actifs
que lors de fortes stimulations sympathiques ou dans l’insuffisance ventriculaire ; ils ont un effet
inotrope négatif et servent à limiter l’effet cardiostimulant des β1 et β2 [41,312].
Figure 5.1 :
Configuration
d’un
récepteur β. Il présente
une structure en sept
spires à cheval sur la
membrane cellulaire.
La stimulation de
certaines zones a un
effet agoniste, alors
que celle d’autres
zones a un effet
antagoniste.
Gs :
protéine
G
stimulatrice.
Gi :
protéine
G
inhibitrice.
P:
points
de
phosphorylation pour
la β-ARK (β-AgonistReceptor-Kinase) qui
désactive le récepteur
(voir texte).
Domaine
extracellulaire
β agoniste
β antagoniste
+
+
+
+
+
Gs
Domaine
cytoplasmique
Gi
P
β−ARK
P
© Chassot 2012
Lorsqu’il est stimulé, le récepteur β1 active la protéine Gs qui stimule un enzyme, l’adénylate-cyclase,
seul capable de produire de l'AMPc (second messenger) à partir de l’adénosine-triphosphate (ATP)
(Figure 5.2) [290]. L'AMPc, produit en concentration minime (10-10 mol/L), active la protéine-kinase
A (PK-A) qui va induire la phosphorylation de plusieurs protéines et enzymes intracellulaires, dont les
récepteurs ryanodine (R-Ry) situés sur le réticulum sarcoplasmique (RS) ; ces derniers, une fois
activés, permettent la libération de Ca2+ à partir du RS [22]. Les R-RY sont inhibés par le tacrolimus et
le sirolimus utilisés dans les stents actifs.
Le taux d'AMPc est maintenu très bas par l’activité des phospho-diestérases-3 (PDE-3), qui sont
responsables de la dégradation de l'AMPc en AMP inactif. Leur inhibition par les anti-PDE-3
(amrinone, milrinone) maintient un taux élevé d'AMPc par un circuit indépendant des récepteurs β, et
provoque de ce fait un effet inotrope positif non-catécholaminergique.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
4
Figure 5.2 :
Schématisation
du
couplage excitation contraction
myocardique par la
voie des récepteurs β
et par celle des
canaux calciques L
dépendant
de
la
dépolarisation
systolique (ΔV de
l’onde
QRS)
(description détaillée
dans le texte).
Gs :
protéine
G
stimulatrice.
Gi :
protéine
G
inhibitrice.
cAMP :
adénosine
monophosphate
cyclique.
ATP :
adénosine
triphosphate.
RS :
réticulum
sarcoplasmique.
R-Ry :
récepteurs
ryanodine.
++
[Ca ] 10
++
Récepteur
β1 β2
-
Canal Ca
ΔV dépendant
Echange
+
++
Na /Ca
[Ca ]
[Ca ]
3
Adénylate
cyclase
Gs
Gi
++
++
ATP
Phosphodiestérases
AMP
cAMP
P
↑ [Ca ]
++
Protéine-kinase A
Mi
t
P
Récepteurs ryanodine
RS
++
↑ [Ca ]
-3
++
[Ca ] 10
Troponine C
R-Ry
-5
10
++
[Ca ]
-6
10
-7
Actine - myosine
10
© Chassot 2012
Voie des canaux calciques L
La dépolarisation électrique de la membrane cellulaire par le potentiel d’action ouvre les canaux
calciques L, ou canaux voltage-dépendents, pendant 0.2 msec [418]. Une petite quantité de Ca2+
pénètre alors dans la cellule, et a pour effet de stimuler une libération de Ca2+ par le RS qui est 100
fois plus importante (calcium-induced calcium release) ; cette libération se fait par les récepteurs
ryanodine (R-RY). Ce système amplificateur, qui prend 40-100 msec à une fréquence cardiaque de
60/min, permet d’obtenir une élévation importante de la concentration de Ca2+ libre dans le
cytoplasme sans pour autant requérir un important passage de Ca2+ à travers la membrane cellulaire
[22].
Variations de la [Ca2+]
Seule une fraction minime du Ca2+ entre et sort du cardiomyocyte lors de la contraction; la majeure
partie (> 90%) ne fait que des allers-retours entre le cytoplasme et le RS. Dans ce dernier, la [Ca2+] est
la plus élevée de la cellule: 10-3 M; elle est voisine de celle qui règne à l’extérieur de la membrane
cellulaire [21]. Au repos, la [Ca2+]i est très basse: 10-7 M; elle s'élève à 10-5 M pendant 50-200 msec en
systole.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
5
L’intensité de la contraction myocardique est fonction directe de l’amplitude de la variation du taux de
Ca2+ libre dans le sarcoplasme.
L’ajustement global de la quantité de Ca2+ présent dans la cellule se fait par deux voies :
 les canaux calciques L qui laissent entrer le Ca2+ lors du potentiel d’action ;
 les canaux Na+-Ca2+ qui échangent le Ca2+ et le Na+ et rejettent le premier à
l’extérieur pendant la diastole.
Ces canaux ne sont responsables que du 7-8% du trafic calcique total. La capacité des mitochondries à
repomper le Ca2+ est très limitée, car une concentration trop élevée de Ca2+ y freine la production
d’ATP ; la [Ca2+]m y est voisine de celle du cytoplasme.
Le calcium ionisé libéré par la stimulation se fixe sur la troponine-C (TnC), ce qui modifie la
configuration de la tropomyosine liée à l’actine et lève l'inhibition mécanique que cette dernière
exerce sur le complexe actine-myosine ; la contraction est déclenchée (voir Contraction myocardique).
Une stimulation β augmente ce processus : c’est l’effet inotrope positif.
La stimulation β a aussi la propriété de faciliter la phosphorylation de la troponine I (TnI inhibitrice)
par la PK-A et la PK-C générées par l'AMPc ; la TnI abaisse l’affinité de la TnC pour le Ca2+, ce qui
facilite leur dissociation à la fin de la systole. Cette amélioration de la relaxation diastolique
correspond à l’effet lusitrope positif des amines [266]. L'énergie consommée pendant la contraction
est fournie par hydrolyse de l'ATP au moyen d'une ATPase qui fait partie de la myosine et dont
l'activité est elle aussi réglée par le taux de Ca2+.
Déclenchement de la contraction
Deux voies: récepteurs β (catécholamines) et canaux calciques L (dépolarisation électrique).
Récepteurs intraventriculaires (cœur normal): 80% de récepteurs β1 (effet inotrope positif), 10% de
récepteurs β2 (effet chronotrope) et 10% de récepteurs α1 (inotrope positif).
La stimulation β et/ou électrique provoque l'activation de l'AMPc et une libération de Ca2+ à partir du
réticulum sarcoplasmique. Lorsque la [Ca2+] passe de 10-7 M à 10-5 M dans le cytoplasme, la
contraction musculaire est déclenchée.
Relaxation et terminaison de l’effet
La relaxation est assurée par le repompage du Ca2+ libre par le RS au moyen d’un enzyme appelé
SERCA (SarcoEndoplasmic Reticulum Ca ATPase) qui constitue le 90% du contenu protéique du RS
(Figure 5.3). L’activité de ce dernier est normalement inhibée par le phospholamban. C’est la
phosphorylation du phospholamban par la protéine-kinase C (PK-C) activée par l'AMPc qui lève cette
inhibition et permet la diastole [199]. La stimulation β accélère donc la chute de la [Ca2+]i dont elle
avait provoqué l'augmentation et facilite la relaxation diastolique. Le SR est ainsi rechargé en Ca2+, ce
qui assure une réserve pour pouvoir en libérer une quantité suffisante lors de la stimulation suivante.
Le phospholamban, qui inhibe la recapture du Ca2+, agit donc comme un répresseur critique de la
relaxation et de la contractilité ; il est particulièrement actif dans l’insuffisance ventriculaire [208]. La
recapture du Ca2+ par le RS est un processus qui consomme de l’ATP ; elle représente 15% de la
consommation d’O2 de la cellule myocardique [96]. Lors de tachycardie, la fréquence élevée et la
briéveté de la diastole dépassent les capacités de repompage du Ca2+ ; celui-ci s’accumule et augmente
ainsi la force de contraction.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
6
Figure 5.3 :
Schématisation de la
relaxation diastolique
et de la baisse de la
concentration
de
calcium ionisé dans le
sarcoplasme ([Ca++]i)
(description détaillée
dans le texte).
Gs :
protéine
G
stimulatrice.
Gi :
protéine
G
inhibitrice.
cAMP :
adénosine
monophosphate
cyclique.
ATP :
adénosine
triphosphate.
RS :
réticulum
sarcoplasmique.
R-Ry :
récepteurs
ryanodine.
SERCA :
SarcoEndoplasmic
Reticulum Ca ATPase.
++
[Ca ] 10
Adénylate
cyclase
++
Récepteur
β1 β2
-3
Gs
Canal Ca
ΔV dépendant
Echange
+
++
Na /Ca
[Ca ]
[Ca ]
Gi
++
++
ATP
Phosphodiestérases
AMP
cAMP
↓ [Ca
Protéine-kinase C
++
]
P
P
Mi
t
Phospholamban
SERCA
++
↓ [Ca ]
++
-3
[Ca ] 10
Troponine C
R-Ry
-5
10
++
[Ca ]
-6
10
-7
Actine - myosine
10
© Chassot 2012
Un système aussi complexe de va-et-vient du Ca2+ pourrait facilement s’emballer s’il n’existait pas
une série de freins. Trois rétro-actions permanentes permettent de maintenir la stabilité de la
contraction myocardique (Figure 5.4).
 La stimulation du récepteur β déclenche secondairement l’activité d’un enzyme inhibiteur (βAgonist-Receptor-Kinase ou β-ARK, actuellement appelé complexe GRK2 – GRK5) qui
découple le récepteur de la protéine Gs et bloque ainsi la synthèse de l'AMPc. Elle sensibilise
également le récepteur aux arrestines, protéines qui découplent la protéine Gs de l’adénylatecyclase, ce qui aboutit également à la chute de l'AMPc. La PK-A et la PK-C elles-mêmes
contribuent au processus en phosphorylant une spire intracellulaire du récepteur β. Ces
systèmes agissent dans l’ordre de la minute ; une stimulation β induit donc très rapidement un
frein limitant les risques de surexcitation [175].
 La persistance d’un taux élevé de Ca2+ libre dans le cytoplasme active la calmoduline qui
stimule les PDE-3 (dégradation accélérée du cAMP). Ce mécanisme se met en place en 10
minutes environ.
 Lorsque la stimulation β est prolongée, le récepteur est internalisé, et les lysosomes du
sarcoplasme le fragmentent. Cela prend de 8 à 24 heures [163]. Alors que les deux premiers
processus correspondent à une désensibilisation aiguë, ce dernier est un phénomène chronique
qui est à la base de la dérégulation (downregulation) des récepteurs [41].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
7
Le renouvellement des récepteurs β est constant. Leur demi-vie moyenne est de 8 à 12 heures [37,38].
Même si leur nombre n’est pas modifié, leur sensibilité aux catécholamines peut varier
considérablement selon les circonstances ; après une CEC, par exemple, la réponse à l’isoprénaline est
diminuée de 30% [407a]. Le système des récepteurs membranaires est donc très dynamique et très
modulable en fonction du taux de catécholamines circulantes, le but étant de maintenir l’homéostasie
de la contraction myocardique. Il est prévisible que la réponse aux catécholamines sera variable dans
le temps et sera rapidement atténuée en cas d'administration prolongée.
Figure 5.4 :
Schématisation de
l’inhibition
du
système
des
récepteurs β par la
β-ARK (β-AgonistReceptor-Kinase) et
les arestines, par la
calmoduline et par
internalisation
du
récepteur
(description détaillée
dans le texte).
Gs : protéine G
stimulatrice.
Gi : protéine G
inhibitrice.
cAMP : adénosine
monophosphate
cyclique.
ATP :
adénosine
triphosphate.
RS :
réticulum
sarcoplasmique.
R-Ry :
récepteurs
ryanodine.
SERCA :
SarcoEndoplasmic
Reticulum
Ca
ATPase.
Récepteur
β1 β2
Adénylcyclase
Gs
Internalisation
Gi
Gs
β−ARK
↓ cAMP
Arrestines
PDE-3
↑ [Ca ]
++
Calmoduline
R-Ry
++
[Ca ]
SERCA
Troponine C
R-Ry
-5
10
++
[Ca ]
-6
10
-7
Actine - myosine
10
© Chassot 2012
Les récepteurs β1 et β2 déclenchent tous deux des effets inotrope et lusitrope positifs, mais par des
voies différentes (Tableau 5.1) [428]:





β1 : Gs → cAMP → PK-A ;
β2 : polymorphisme de proteines G stimulées ;
Gs → cAMP → PK-A ;
Gi → PLC → PK-C ;
Gq / Gγ → canaux KATP, effets cytoprotecteurs et anti-apoptotiques.
Les récepteurs β3 sont liés à la protéine Gi et au NO• ; ils déclenchent une voie qui mène au cGMP et
à la PK-G à effet inotrope négatif ; ils réduisent les variations de [Ca2+]i. Leur nombre et leur
expression, normalement non significatifs, sont fortement accentués dans le ventricule insuffisant [5].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
8
Relaxation et terminaison de l'effet
Pendant la diastole le réticulum sarcoplasmique repompe le Ca2+ et se recharge pour la systole
suivante. Cette activité est inhibée par le phospholamban. Trois systèmes permettent de limiter les
effets d'une stimulation β.
- Déclenchement rapide (1 minutes) d'un enzyme inhibiteur du récepteur β (β-ARK)
- Stimulation des phosphodiestérases qui catabolisent l'AMPc (10 minutes)
- Internalisation et destruction du récepteur β (24 heures) (downregulation)
La demi-vie des récepteurs β est de 8-24 heures. Leur taux et leur activité sont très modulables, ce qui
tend à atténuer l'effet des catécholamines avec le temps.
Tableau 5.1
Voies de signalisation intracellulaire
Récepteurs
Voies de signalisation
Fonctions et effets
β1
Gs – AC – cAMP – PKA
inotrope, lusitrope,
chronotrope
β2
Gs – AC – cAMP – PKA
Gi – PLC – DAG – PKC
Gγ - PI3K – PDK – PKB
inotrope, lusitrope,
chronotrope,
vaso- bronchodilatation
β3
Gi – PLC – DAG – PKC
Gi – NO – GC – cGMP - PKG
inotrope négatif
α1
Gq – PLC – IP3 – Ca2+
inotrope positif
vasoconstriction
α2
Gi – AC (inhibition)
inhibition sympathique
présynaptique
Abbréviations. Gs : protéine G stimulatrice. Gi : protéine G inhibitrice. AC : adénylate-cyclase.
PKA (PKB, PKC, PKG): protéine kinase A (B, C, G). PLC : phospholipase C. DAG : diacylglycérol.
PI3K : phosphoinositide 3 kinase. PDK : phosphoinositide dependent kinase. GC : guanylyl cyclase.
IP3 : inositol triphosphate (d’après réf. 428).
Stimulation β et β-blocage
Les catécholamines β vont stimuler le récepteur en fonction de leur stéréo-spécificité, et déclencher la
cascade d’évènements conduisant à l’élévation du taux d'AMPc et de protéine-kinase A (PK-A), et à la
libération de Ca2+ par les canaux ryanodine du RS. La PK-A va également activer les canaux calciques
L, ce qui amplifie l’effet de la stimulation par dépolarisation membranaire. Le résultat est une
amplification des variations de la [Ca2+]i et donc une stimulation de la contraction accrue des
myofibrilles ; dans une préparation isolée, leur vélocité de contraction augmente de 40%. La
stimulation de la protéine-kinase active également la phosphorylation du phospholamban, ce qui lève
le frein que ce dernier exerce sur la SERCA : la recapture du Ca2+ par le RS est facilitée, d’où l’effet
lusitrope des catécholamines. La séquence complète de ces événement est réalisée en 15 secondes
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
9
environ [290]. La stimulation adrénergique agit presque exclusivement par une intensification des
variations de la [Ca2+]i : la puissance augmente, la relaxation est favorisée, les variations sont plus
rapides et l’accélération du rythme devient possible [428]. Les modifications aiguës de la performance
ventriculaire sont presque entièrement assurées par le système de stimulation β.
Mais une stimulation β continue comme une perfusion de catécholamine, par exemple, va également
mettre en marche les systèmes inhibiteurs de la β-ARK et de la calmoduline ; sur un cœur sain, la
tolérance s’installe alors en moins d’une heure [175]. L’internalisation et la régulation à la baisse
(down-regulation) des récepteurs β est l’affaire de 24 heures à quelques jours [41]. Il est donc naturel
qu’il n’y ait pas de dosage fixe pour les catécholamines, et que l’efficacité de ces substances se
modifie rapidement avec le temps. Il en est de même lors de la stimulation sympathique chronique
engendrée par l’insuffisance cardiaque.
Les β-bloqueurs occupent les récepteurs sans les stimuler, ce qui inhibe tout le système. Mais ils
diminuent aussi l’expression de la β-ARK et augmentent de ce fait la sensibilité des récepteurs β à
toute nouvelle stimulation importante. D’autre part, le nombre de récepteurs augmente sous β-blocage,
et leur demi-vie est prolongée (up-regulation), car la cellule tend à ré-équilibrer son fonctionnement.
A l’arrêt des β-bloqueurs, elle est hypersensible aux catécholamines circulantes pendant quelques
jours puisqu’elle dispose momentanément de trop de récepteurs.
Comme les récepteurs β-adrénergiques présentent un important polymorphisme génétique, la réponse
aux catécholamines et aux β-bloqueurs peut varier significativement entre les populations. Bien qu’il
ne soit pas une cause directe de maladie, ce polymorphisme est un facteur de risque cardiovasculaire
majeur, notamment dans le degré de protection offert par les β-bloqueurs en périopératoire ou dans
l’efficacité de la réponse aux agents inotropes en cas de défaillance ventriculaire [407a].
Administration de catécholamines β
La stimulation des récepteurs β provoque une augmentation de la [Ca2+]i et une activation des
mouvements de Ca2+ à partir du réticulum sarcoplasmique (effets inotrope, lusitrope et chronotrope
positifs). Une stimulation catécholaminergique continue met en marche les systèmes inhibiteurs, ce
qui tend à atténuer rapidement l'effet des amines.
Stimulations α-adrénergique et cholinergique
Le système α-adrénergique est présent essentiellement dans la musculature lisse des vaisseaux, où il
induit une vasoconstriction, et ne présente qu’un rôle mineur dans la contraction myocardique (Figure
5.5) ; il représente moins de 10% de tous les récepteurs adrénergiques du coeur. Toutefois, son effet
inotrope positif devient significatif en cas d’insuffisance ventriculaire, lorsque le taux de récepteurs β
est diminué [174]. Le récepteur α est lié à une protéine G particulière (Gq) qui active la phospholipase
C (PL-C), laquelle active un 2ème messager spécifique, l’inositol-triphosphate (IP3) conduisant à
l’activation de la PK-C (Tableau 5.1). Cette voie est donc indépendante de celle des récepteurs β ; elle
reste fonctionnelle lorsque les récepteurs β sont désensibilisés (β-blocage, insuffisance ventriculaire
chronique) [399]. La phospholipase C est également activée par l’angiotensine II et l’endothéline qui
ont un effet vascoconstricteur sur les vaisseaux périphériques, et un effet stimulant sur la synthèse
protéique et l’hypertrophie des cellules myocardiques [145]. La surexpression de la protéine Gq est
typiquement présente dans la cardiomyopathie dilatative [338].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
10
Le système cholinergique comprend un récepteur muscarinique (M2) sensible à l’acétylcholine
circulante (Figure 5.6). La stimulation de ce système, qui passe par la protéine G inhibitrice (Gi), a
pour effet d'augmenter la synthèse de NO•, de freiner la libération de cAMP et de stimuler celle de
cGMP. Ce dernier a un effet inotrope négatif et vasodilatateur car il abaisse la [Ca2+]i [352]. Dans le
nœud du sinus, il inhibe la dépolarisation spontanée et provoque une bradycardie.
Figure 5.5 : Schématisation
de la stimulation α. Par
l’intermédiaire de la protéine
Gq, le récepteur α active la
phsopholipase C et le 2ème
messager IP-3 (inositoltriphosphate) ; il s’ensuit une
libération du Ca2+ à partir du
réticulum
sarcoplasmique
(RS), sans activation des
canaux L. L’augmentation de
la [Ca2+]i provoque la
contraction de la musculature
lisse. La phospholipase C
peut être activée par d’autres
récepteurs membranaires, tels
ceux de l’angiotensine II et
de l’endothéline. Dans le
cœur, les récepteurs α ont un
effet inotrope positif ; ils
représentent le 10% des
récepteurs
catécholaminergiques
du
ventricule ; cette proportion
augmente
en
cas
de
régulation à la baisse des
récpteurs β (insuffisance
ventriculaire).
Canal
KATP
Récepteur
α
Gi
Gq
Angiotensine II
Endothéline
Phospholipase C
IP-3
↑ [Ca ]
++
P
++
[Ca ]
ATP
RS
[CaS ] 10
++
-3
S
Contraction de la
musculature lisse
© Chassot 2012
Le NO• est libéré par l’endothélium vasculaire lorsque le flux sanguin est augmenté ou la charge
cardiaque accrue. Il facilite la transmission cholinergique à la terminaison nerveuse et dans la cellule
par la production de cGMP qui est le principal transmetteur parasympathique ; il inhibe le trafic de
Ca++ intracellulaire. L’exercice et l’entraînement augmentent la production de NO• [297] ; il est
possible que de petites « bouffées » de NO• soient libérées pendant la diastole pour la prolonger et
améliorer le remplissage ventriculaire [306]. La sécrétion permanente de NO• par l’endothélium est un
élément essentiel dans le maintien actif de la vasodilatation physiologique des vaisseaux pulmonaires.
Il existe donc de multiples réseaux de signalisation intracellulaire dont le but est de régler finement les
variations de la concentration en Ca++ ionisé. Ils permettent d’amplifier les signaux faibles et de limiter
les signaux excessifs, ce qui assure à la cellule un fonctionnement stable malgré les oscillations du
milieu. Leur redondance garantit une grande sécurité de fonctionnement. Contrôler cet équilibre des
stimulations sympathique et parasympathique pendant le stress chirurgical est une des tâches majeures
de l’anesthésiste. En effet, le degré d’activité du système sympathique est un des prédicteurs majeurs
de mortalité [111].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
11
Récepteur
muscarinique
Figure 5.6 :
Schématisation de la
stimulation
cholinergique.
L’acétylcholine se fixe
sur le récepteur M2,
couplé à une protéine G
inhibitrice
(Gi) ;
il
s’ensuit une sécrétion de
NO• et de GMPc et une
baisse de AMPc. Le
résultat
est
une
diminution de la [Ca2+]i.
Le résultat est un effet
inotrope négatif dans le
ventricule,
une
bradycardie au niveau du
noeud sinusal (inhibition
de la dépolarisation
spontanée par l’ouverture
du canal KG) et une
vasodilatation dans les
vaisseaux.
Acétylcholine
NO
•
ATP
++
Canal
KACh
Canal Ca
ΔV dépendant
M2
Gi
GTP
NO
↓ cAMP
P
•
[Ca ]
++
cGMP
↓ [Ca ]
++
++
[Ca ]
ATP
RS
++
-3
[Ca ] 10
Musculature lisse
contractée → relâchée
© Chassot 2012
Stimulations α-adrénergique et cholinergique
Les récepteurs α provoquent une augmentation de la [Ca2+]i et une contraction de la musculature lisse
des vaisseaux. Dans le cœur, ils ont un effet inotrope positif indépendant de la voie des récepteurs β.
La stimulation cholinergique (acétylcholine, NO•) libère le GMPc et diminue la [Ca2+]i; elle conduit à
une relaxation de la musculature lisse et à un effet inotrope négatif.
Le NO• est sécrété par l'endothélium vasculaire proportionnellement à la tension de paroi, à la
pulsatilité et aux forces de cisaillement. Il provoque une vasodilatation.
Croissance et apoptose
La vie de toute cellule est un équilibre dynamique entre les facteurs qui assurent sa croissance et les
processus qui programment sa mort (apoptose).
 L’hormone de croissance, l’insuline et l’angiotensine II sont les principaux facteurs
anabolisants qui stimulent la transcription du mRNA et la synthèse protéique ; outre la
croissance cellulaire, ils sont responsables de l’hypertrophie des myocytes et de l’hyperplasie
des fibroblastes en réponse à une surcharge de pression ou de volume [78,416].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
12
 La programmation des gènes, les mutations, les erreurs de transcription, les irradiations
(ionisantes, UV), les polluants et les accidents comme l’ischémie ou l’hypoxie aboutissent à la
formation de protéines dysfonctionnelles et à l’intoxication par des superoxydes. En effet, 12% des électrons qui suivent la chaîne d’oxydo-réduction dans la mitochondrie s’échappent
dans le cytoplasme et donnent naissances à des ROS (Reactive Oxygen Species) ou
superoxydes (radicaux libres : O2•-, NO•, H2O2, OH•) toxiques pour les protéines et les lipides
[69,84]. Ils sont normalement réduits par des enzymes (superoxide dismutase), mais, en trop
grande quantité, ils lèsent le DNA et le RNA de la cellule, ce qui conduit à des mutations et à
des erreurs de transcription qui s’accumulent avec l’âge [84,262].
Dans les cellules myocardiques ischémiques et dans celles de ventricules insuffisants ou dilatés, on
trouve un excès de cytochrome C et de cytokines échappés des mitochondries, dont la production
d’ATP est fortement diminuée (Figure 5.7) [118]; accompagnées de ROS, ces substances activent des
enzymes, les caspases, qui sont responsables de la lyse cellulaire. Lorsque ces caspases sont en petit
nombre, l’apoptose est simplement accélérée, mais lorsque leur activation est massive, la nécrose de la
cellule s’ensuit. Par l’ouverture plus ou moins large des canaux qui règlent la sortie des ROS et du
cytochrome C (canaux MPTP), la mitochondrie joue un rôle clef dans la décision de survie ou de mort
de la cellule [84].
Figure 5.7 : Schématisation
de
l’apoptose.
La
mitochondrie laisse fuir (par
le canal MPTP) des agents
oxydants
comme
le
cytochrome
C,
les
ROS (Reactive
Oxygen
Species) ou superoxydes et
des cytokines, qui vont
freiner la synthèse d’ATP et
activer les caspases qui
digèrent la cellule (voir
description détaillée dans le
texte). e• : chaîne d’oxydoréduction de la mitochondrie.
MTPT :
mitochondrial
permeability transition pore.
Le
préconditionnement
prévient
partiellement
l’apoptose en agissant sur
deux points au niveau des
mitochondries : 1) ouverture
des
canaux
potassiques
dépendants de l’ATP (KATP),
ce qui diminue la charge en
calcium ionisé (Ca2+) dans le
cytosol mitochondrial, et 2)
fermeture des canaux de
perméabilité MPTP, ce qui
diminue le taux de capsases
cytoplasmiques [426,427].
Ischémie
Mitochondrie
ATP
Peroxidation
lipides
ROS
e
•
-
Oxydation
DNA
Super O
dismutase
Cytochrome C
Transcription
de gènes
apoptotiques
↑ ROS
Canal
MPTP
Canal
KATP
Cytokines
↓ ATP
Caspase
s
↑ [Ca ]
++
Transitoire: apoptose
Définitif: nécrose
Insuff ventric
Préconditionnement
Actine - myosine
© Chassot 2012
MPTP: mitochondrial permeability transition pore
Les ROS produits dans les cellules myocardiques et vasculaires, ainsi que dans les leucocytes, sont au
centre des lésions d’ischémie et de reperfusion (voir Lésions de reperfusion). Ils sont également
libérés par la CEC et par certaines substances. Leur production est liée à la sidération, à la nécrose et
aux arythmies. Bien que de nombreuses études animales aient montré que leurs dégats peuvent être
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
13
diminués par des antioxydants (allopurinol, mannitol, N-acétylcystéine, déferoxamine, vitamines C et
E), aucun bénéfice sur la morbi-mortalité n’a été constaté dans l’utilisation clinique de ces substances
[196a]. Certains agents d’anesthésie comme le propofol se sont révélés être des anti-oxydants, sans
toutefois présenter d’effet cardioprotecteur significatif. Les halogénés, qui ont un effet
cardioprotecteur par le biais du préconditionnement (voir Préconditionnement), ont la particularité de
déclencher la production de ROS en petites quantités. Il semble ainsi que les ROS soient protecteurs à
concentration physiologique (comme l’est le NO•) et toxiques lorsque leur présence dépasse les
possibilité de contrôle de la cellule.
Croissance et apoptose
L’hormone de croissance, l’angiotensine II et l’insuline sont les principaux agents anabolisants
(hypertrophie des myocytes, hyperplasie des fibrocytes). Les superoxydes (ROS : Reactive Oxygen
Species) sont des sous-produits toxiques de l’oxydo-réduction mitochondriale, normalement inhibés
par les anti-oxydants cellulaires. Produits en trop grande quantité (mutations, polluants, ischémiereperfusion), ils conduisent à l’apoptose et à la nécrose.
Insuffisance ventriculaire
Au niveau cellulaire, l’insuffisance ventriculaire se caractérise par de nombreux dysfonctionnements,
dont les quatre principaux sont directement liés aux processus précédemment décrits (Figure 5.8).
 La recapture du Ca2+ par le RS est diminuée à cause d'une suractivité du phospholamban, qui
inhibe l’activité de la SERCA [40,208,272]. Les réserves de Ca2+ du RS sont insuffisantes
pour assurer un relargage adéquat lors de la systole (faible calcium-induced calcium release).
Les récepteurs R-Ry laissent fuir du Ca2+ en diastole, ce qui surcharge de cytoplasme [242].
 L’activité de la β-ARK est excessive à cause de la stimulation sympathique β permanente. Le
récepteur β est découplé de la protéine Gs, donc la chaîne qui mène à la synthèse d'AMPc
devient insuffisante. L’activité de la protéine Gi (inhibitrice) est prépondérante [179].
 Sur les récepteurs β, la protéine G inhibitrice a un effet prédominant ; de ce fait, la quantité
d’AMPc synthétisé est moindre, ce qui conduit à une plus faible quantité de Ca2+ libéré dans le
sarcoplasme lors de chaque stimulation. Les variations de la concentration de Ca2+ sont moins
amples, et la force de contraction des myofibrilles diminue.
 La sur-stimulation sympathique chronique entraîne une désensibilisation et une diminution du
nombre des récepteurs β1 (down-regulation). Ils représentent moins de 40% du total des
récepteurs (au lieu de 80%, une diminution de moitié) [311]. La proportion des récepteurs β2
(chronotropes positifs) augmente à 40% et celle des récepteurs α1 (inotropes positifs) à 20% ;
les récepteurs β3, inotropes négatifs couplés au NO•, sont beaucoup plus nombreux
[29,38,39,41,360].
Ces phénomènes conduisent à une diminution de la réserve en Ca2+ du RS et à une diminution de
l’amplitude des variations de la [Ca2+]i. La force de contraction en est affaiblie d’autant (insuffisance
systolique). La stagnation du Ca2+ dans le sarcoplasme conduit à une insuffisance diastolique et à une
accumulation de Ca2+ dans les mitochondries, ce qui abaisse la production d’ATP [235]. Le cœur
défaillant retourne à une expression génique de type fœtal, dont un marqueur est la production
excessive de Brain natriuretic peptide (BNP) par le ventricule. Celui-ci perd de son efficacité
énergétique en mobilisant trop d’acides gras pour son métabolisme à cause de la sur-stimulation
sympathique [235,429]. Le taux de noradrénaline dans le sinus coronaire de cœurs en insuffisance
congestive est de 50 fois la norme, ce qui indique bien que le myocarde ne répond plus correctement à
la stimulation sympathique [428]. Le NO• a une relation biphasique avec la fonction myocardique :
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
14
une faible et constante production de NO• est bénéfique au fonctionnement cellulaire systolique et
diastolique ; elle a une action cardioprotectrice et vasodilatatrice. Une production élevée, au contraire,
inhibe la respiration mitochondriale, freine la contractilité, bloque l’activité des amines β et induit une
vasoplégie massive [104].
++
Figure 5.8 :
Schéma
des
modifications
du
couplage excitation –
contraction en cas
d’insuffisance
ventriculaire.
Les
variations
de
la
([Ca++]i)
sont
diminuées par une
série
de
processus (voir
description
détaillée
dans le texte).
Canal Ca
ΔV dépendant
Récepteurs β ↓
↑ βARC
G
s
Echange
+
++
Na /Ca
Gi G
i
[Ca ]
++
[Ca ]
++
ATP
Phosphodiestérases
AMP
P
cAMP ↓
Protéine-kinase A
++
↓ Δ [Ca ]
Mit
P
R-Ry
Phospholamban
++
++
↓ Δ[Ca ]
SERCA
R
S
↑ [Ca ]
↓ ATP
++
↓ [Ca ]
R-Ry
Troponine C
++
[Ca ]
-5
10
-6
10
-7
Actine - myosine
10
© Chassot 2012
Dysfonction ventriculaire
Au niveau cellulaire, l'insuffisance ventriculaire se caractérise par:
- Activité excessive du phospholamban: inhibition des mouvements du Ca2+ du réticulum
sarcoplasmique
- Activité excessive de la β–ARK: inhibition des récepteurs β
- Hyperactivité de la protéine inhibitrice Gi et frein de la synthèse d'AMPc (baisse de Ca2+)
- Désensibilisation et baisse du taux de récepteurs β (downregulation)
La concentration myocardique des récepteurs β1 baisse de moitié. La compensation est une
augmentation du taux de récpeteurs β2 (chronotropes et inotropes positifs) et α (inotropes positifs).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
15
Traitement de l’insuffisance ventriculaire: les β-bloqueurs
Les β-bloqueurs font très logiquement partie de la première ligne de traitement de l’insuffisance
cardiaque parce qu’ils contrecarrent plusieurs dysrégulations pathognomoniques de la dysfonction du
ventricule (Figure 5.9) [38,294,424].
 Diminution de l’activité de la β-ARK ; cet effet rétablit la sensibilité des récepteurs β aux
catécholamines endogènes.
 Maintien du nombre des récepteurs β par compétition avec l’excès d’amines circulantes qui
induisent une baisse des β1 myocardiques.
 Augmentation de l’activité de la SERCA, donc accélération de la recapture du Ca2+ par le RS,
et diminution de la fuite diastolique de Ca2+ par les canaux R-Ry. La contraction et la fonction
diastolique sont améliorées par baisse du taux résiduel de Ca2+ dans le cytoplasme et
augmentation du Ca2+ à disposition dans le RS pour la libération systolique.
 Déplacement du métabolisme mitochondrial vers une utilisation du glucose plutôt que des
acides gras, ce qui augmente le taux d’ATP produit par rapport à la quantité de substrat
utilisée.
 Augmentation de la sécrétion d’ANF (Atrial natriuretic factor) et de BNP (voir Modifications
neuro-endocrines).
Récepteur
α-β
↑ récepteurs
Echange Na/Ca
↑ sensibilité
Gs
↓ βARC
Gi
[Ca ]
++
[Ca ]
++
Figure 5.9 :
Schématisation de
l’action
des
βbloqueurs
dans
l’insuffisance
cardiaque
pour
rétablir
une
augmentation
des
variations de la
[Ca++]i.
ATP
Phospho
diestérases
AMP
cAMP
↑ ATP
Protéine-kinase C
++
↑ Δ [Ca ]
Traitement de l’insuffisance cardiaque
: les substances inotropes
Mit
 pleinement efficaces (adrénaline).
P
Phospholamban
R-Ry
++
↑ Δ++[Ca ]
[Ca
]
SERCA
++
-3
[Ca ] 10
Troponine C
R-Ry
Traitement de l’insuffisance cardiaque10:-5 les substances
inotropes
++
[Ca ]
-6
10
-7
Actine - myosine
10
© Chassot 2012
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
16
Les agents inotropes positifs agissent par la voie commune d’une augmentation de la libération du
Ca2+ par le RS lors de la systole (Figure 5.10) [149].
Catécholamines
Figure 5.10 :
Schématisation
des
points d’impact des
différents
agents
inotropes positifs. A
l’exception
du
levosimendan qui agit
au niveau de la
fixation du Ca++ sur la
troponine
C,
tous
aboutissent
à
une
augmentation
des
variations de la [Ca++]i.
IPDE-3 : inhibiteur des
phosphodiestérases-3
(amrinone, milrinone).
Les β-bloqueurs sont
mentionnées ici à
cause de leur impact
dans le traitement de
l’insuffisance ventriculaire chronique.
Echange Na/Ca
récepteurs β,
α
β-bloqueurs
Adénylate
cyclase
Calcium
Digitale
Gs
[Ca ]
++
[Ca ]
++
ATP
IPDE-3
cAM
cAMP
↑P
AMP
Protéine-kinase A
↑ [Ca ]
++
P
Mi
t
Phospholamban
↑ [Ca ]
++
Troponine C
R
S
↑ [Ca ]
++
β-stimul
Levosimendan
Contrôle
Actine - myosine
© Chassot 2012
Contractionrelaxation
 Les catécholamines agissent par le biais d’une augmentation de l'AMPc en stimulant
l’adénylate-cyclase; en cas d'inhibition des récepteurs β1, seules les amines à effet β2 et alpha
restent pleinement efficaces (adrénaline).
 Les anti-phospho-diestérases-3 (amrinone, milrinone) inhibent la dégradation de l'AMPc.
Agissant par une autre voie que les amines β, ces substances restent efficaces même en cas de
β-blocage profond ou de régulation à la baisse des récepteurs β.
 La combinaison adrénaline – milrinone est particulièrement indiquée en cas d'insuffisance
ventriculaire chronique avec dowregulation des récepteurs β.
 La digitale intervient sur les canaux échangeurs Na+/ Ca2+ de la membrane cellulaire en
favorisant l’entrée de Ca2+.
 Le levosimendan fonctionne comme un sensibilisateur calcique; il interagit directement avec
la troponine C et stabilise sa liaison avec le Ca2+, ce qui amplifie et prolonge la contraction
[391]. Cet effet dépend de la [Ca2+]i, mais non de l'état du système β-adrénergique. De plus, le
levosimendan agit sur les canaux KATP membranaires (canaux potassiques ATP-dépendants)
qui, dans les cellules musculaires lisses des artères, provoquent une relaxation et une
vasodilatation.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
17
Implications pour le traitement de la dysfonction ventriculaire
L'efficacité des amines β1 (dobutamine, dopamine) est faible à cause de la diminution des récepteurs
β1. L'adrénaline (stimulant β1, β2 et α) reste efficace, de même que les substances qui agissent par
une autre voie: antiphosphodiestérases-3 (milrinone), sensibilisateur calcique (levosimendan).
Les β-bloqueurs inhibent les systèmes de régulation à la baisse des récepteurs β et maintiennent une
stimulation moycardique adéquate.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
18
La contraction myocardique
Physiologie
Les myofibrilles des sarcomères sont constituées de chaînes d’actine et de myosine. L’actine est une
torsade de deux chaînes hélicoïdales enroulées autour d’un squelette de tropomyosine et ancrées sur
les disques Z. La myosine est un ensemble d’environ 300 longues molécules terminées chacune par
une tige surmontée d’une tête bilobée ; elle est parcourue par la connectine (ou titine) qui est attachée
aux disques Z (Figure 5.11 et Figure 5.12). La connectine est la plus longue molécule connue (1
µm) ; elle assure l’élasticité du myofibrille [290]. En systole, elle est comprimée comme un ressort et
restitue cette énergie en se redéployant lors de la diastole (Figure 5.11); elle contribue ainsi à la
succion ventriculaire en diastole (voir Mécanique ventriculaire). En diastole, elle est étirée entre les
disques Z comme un élastique ; plus l’élongation est importante, plus elle est tendue et plus son
élasticité contribue à l’effet Frank-Starling lorsqu’elle reprend sa forme [381]. L’énergie pour la
contraction des cardiomyocytes provient de l’hydrolyse de l’ATP en ADP et Pi par une ATPase située
dans les têtes de myosine. Dans un coeur adulte normal, la réserve énergétique ne dépasse pas une
vingtaine de battements, bien que les sarcomères ne développent que le 25% de leur puissance
maximale dans les conditions physiologiques de base [371].
Figure 5.11 : Schéma
de la structure et de la
contraction
d’un
myofibrille. L’actine
est ancrée sur les
bandes Z. La myosine
est parcourue par la
titine (ou connectine)
qui va d’une bande Z à
l’autre ;
elle
est
comprimée et repliée
sur elle-même lors de
la contraction, et se
redéploie
élastiquement en diastole.
Bande Z
Bande Z
Actine
Myosine
Actine
Connectine
Contraction
© Chassot 2012
Pendant la systole, les deux filaments d’actine et de myosine coulissent l’un sur l’autre sans qu’aucun
des deux ne se contracte réellement. Le mouvement primaire de la contraction a lieu au niveau des
tiges portant les têtes de myosine (Figure 5.12). Lorsque la [Ca2+]i est basse en diastole, la
tropomyosine est inhibée par la troponine I (TnI): sa configuration est telle que les têtes de myosine ne
peuvent pas interagir avec l’actine. L’augmentation soudaine de la [Ca2+]i locale agit sur la troponine
C (TnC), avec pour effet, via la levée de l’effet de la TnI, de modifier la configuration de la
tropomyosine et de supprimer l’inhibition que celle-ci exerce sur les ponts actine – myosine. Ces
derniers entrent alors dans leur configuration serrée, et chaque tête de myosine tire l’actine sur une
faible distance (10 nm) vers le centre du sarcomère par flexion de sa tige. La contraction survient. Le
processus diffuse ensuite de voisinage en voisinage [372]. Le nombre de têtes de myosine recrutées est
fonction du taux de [Ca2+]. L’ATP est nécessaire pour débloquer ces ponts serrés et relâcher la
contraction. La phosphorylation de la troponine I par la PK-A et la PK-C induites par l'AMPc baisse
l’affinité de la TnC pour le Ca2+, ce qui facilite leur dissociation à la fin de la systole (effet lusitrope
positif) [266]. Bien que de très nombreux liens successifs surviennent entre actine et myosine pendant
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
19
une seule contraction systolique, seule la moitié des sites contractiles est activée dans une contraction
normale. En diastole, la [Ca2+] s’abaisse et l’activité de liaison actine – myosine cesse [290].
Diastole
Figure
5.12 :
Schématisation de la
contraction et de la
relaxation d’un couple
actine-myosine.
Le
bascule des têtes de
myosine fait coulisser
les
deux
bandes
moléculaires l’une par
rapport à l’autre. La
course
de
ce
déplacement
est
augmentée si l’actine
et la myosine sont plus
rapprochées.
Actine
Têtes de myosine
Myosine
Complexe de troponines
Tropomyosine
Contraction
Actine
↑ Ca
++
Myosine
© Chassot 2012
La cellule myocardique dispose de quatre moyens pour modifier sa force de contraction :




Augmenter l’amplitude et la durée de l’élévation systolique de la [Ca2+]i;
Augmenter la sensibilité de la TnC au Ca2+ ;
Recruter davantage de ponts actine – myosine;
Augmenter la course de la flexion de têtes de myosine.
L’étirement de la structure actine – myosine – connectine sensibilise les myofibrilles aux variations de
la [Ca2+]. En effet, l’étirement longitudinal de n’importe quel tissu a tendance à l’amincir. Ainsi, la
distension ventriculaire augmente le rayon de la cavité, allonge la paroi myocardique et diminue son
épaisseur, ce qui rapproche les structures longitudinales de l’actine et de la myosine et facilite la
création de ponts actifs entre les deux. De plus, le rapprochement des filaments d’actine et de myosine
augmente la course de la translation lors de la flexion des têtes de myosine [129,178]. Ces
phénomènes sont la base structurelle du principe de Frank-Starling (voir Déterminants de la fonction
systolique).
Une stimulation β-adrénergique augmente la force de contraction par recrutement de davantage de
ponts actine – myosine ; cela est du à l’accroissement de la quantité de Ca2+ libéré et à l’augmentation
d'AMPc qui facilite l’action de l’ATPase de la myosine. De plus, le fort taux d'AMPc facilite la
phosphorylation de la troponine I via les protéine-kinases, ce qui accélère la relaxation.
Situations pathologiques
Pendant un événement ischémique, les myofibrilles sont désensibilisés au Ca2+ par l’augmentation du
taux d’ions H+ et de phosphate inorganique (Pi). D’autre part, le taux d’ATP à disposition diminue et
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
20
peut devenir insuffisant pour rompre les ponts actifs entre l’actine et la myosine, d’où l’apparition
d’une rigidité myocardique (stone heart).
Le signal biochimique induisant l’hypertrophie consécutive à une tension de paroi excessive
(surcharge chronique de pression ou de volume) est probablement relayé par des mécano-senseurs
situés aux attaches de la connectine dans les lignes Z [204]. La cardiomyopathie hypertrophique est
caractérisée par des mutations dans la structure des protéines contractiles et de la troponine T [322] ; la
faiblesse de la contraction des myofibrilles atteints induit une hypertrophie compensatrice des fibres
normales. La cardiomyopathie dilatative s’explique plutôt par des modifications du cytosquelette
protéique [240].
Contraction myocardique
Les myofibrilles sont constitués de chaînes d'actine et de myosine. L’augmentation soudaine de la
[Ca2+]i locale lève de l’effet inhibiteur de la TnI et modifie la configuration de la tropomyosine: les
ponts actine – myosine peuvent se former. Chaque tête de myosine tire l’actine par flexion de sa tige.
La force de contraction augmente par 4 phénomènes: ↑ [Ca2+]i, ↑ sensibilité de la troponine au Ca2+,
↑ nombre de ponts actine-myosine, ↑ course de flexion des têtes de myosine.
Causes de l'effet Frank-Starling (la force de contraction du myocarde dépend de la tension de paroi
télédiastolique):
- Amincissement de la paroi et diminution de l'espace entre les filaments d'actine et de
myosine (↑ course de flexion et ↑ nombre de ponts actine-myosine)
- Traction sur la connectine qui restitue l'énergie élastique en systole.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
21
Mécanique ventriculaire
Le cœur des mammifères est constitué de 4 chambres formant deux ensembles parallèles fonctionnant
sous deux régimes de pression différents. L’anatomie de chaque ventricule est particulière. Le
ventricule gauche (VG) ressemble à un ellipsoïde tronqué de section grossièrement circulaire (Figure
5.13B) ; sa paroi est épaisse (12-15 mm). Cette forme en obus permet d’utiliser des simplifications
géométriques pour évaluer sa fonction (fraction d’éjection, par exemple). Le ventricule droit (VD) est
enroulé en croissant autour du VG ; sa section est en demi-lune et sa forme générale complexe (Figure
5.13A); elle n’est pas réductible à une figure géométrique habituelle, ce qui complique singulièrement
l’évaluation de sa fonction. D’autres éléments distinguent la physiologie du VG de celle du VD.
 Normalement, le régime de pression du VD est environ 1/5ème de celui du VG.
 Le volume télédiastolique du VD est sensiblement plus grand que celui du VG ; sa fraction
d’éjection (FE) est donc plus basse afin de maintenir le même débit.
 Le débit du VD est peu sensible aux variations de précharge, alors qu’il est très sensible à une
augmentation de postcharge ; au contraire, le débit du VG varie directement avec la précharge,
mais est peu modifié par une augmentation physiologique de la postcharge.
 La précharge du VD est extrathoracique, alors que celle du VG est intrathoracique ; la
postcharge du VD est intrathoracique, alors que celle du VG est extrathoracique. Cette
situation fait que les variations respiratoires de la pression intrathoracique ont des effets
opposés sur les deux ventricules.
AP
VTr
CCVD
Admission
VD
Septum
VG
Apex
A
C
VAo
Figure 5.13 : Anatomie des
ventricules. A : schéma de la
configuration du VD, en forme de
croissant enroulé autour du VG.
B : schéma de la configuration du
VG, en forme d’obus conique
surmonté d’une chambre de
chasse. C : emboîtement du VG et
du VD ; ce dernier a une section
en croissant de lune, alors que
celle du VG est circulaire.
VM
CCVG
Apex
B
© Chassot 2012
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
22
Ceinturés par le péricarde, les ventricules ont une expansion limitée. Lorsque leur remplissage est
faible (PtdVG < 10 mmHg), la pression de contact avec le péricarde est nulle ; ils fonctionnent
indépendamment l’un de l’autre. Lorsqu’ils sont remplis (PtdVG > 20 mmHg, PtdVD > 15 mmHg), ils
sont au contact du péricarde, ce qui empêche leur dilatation et induit une interdépendance entre eux :
toute augmentation de volume d’un côté se traduit par un bascule du septum en direction de l’autre ; le
couplage est alors de 1/1 [13].
Architecture fonctionnelle du VG
Les anciens anatomistes avaient déjà remarqué que l’architecture des fibres myocardiques était
particulièrement complexe (Figure 5.14) [48a,356].
F sous-épicardiques
A
Fibres circulaires
F sous-endocardiques
CCVG et
V aortique
Epicarde
Endocarde
VD
VG
B
G
© Chassot 2012
Figure 5.14 : Structure des fibres myocardiques. A : Les fibres sous-épicardiques (vertes) sont arrangées en une
hélice lévogyre (direction des doigts d’une main gauche dont le pouce est dans le long axe du VG). Les fibres
sous-endocardiques (bleues) sont orientées en une hélice dextrogyre (direction des doigts d’une main droite dont
le pouce est dans le long axe du VG) ouverte en direction de la CCVG. L’angle d’hélice est de 60° et l’obliquité
des ces deux couches de fibres longitudinales les rend approximativement perpendiculaires l’une à l’autre. Les
fibres circulaires transverses (jaunes) prédominent au centre de la paroi et dans la moitié basale du ventricule.
B : cet arrangement est visible sur une image d’échocardiographie bidimensionnelle standard, ici au niveau du
septum interventriculaire ; les fibres circulaires (flèche jaune) sont plus échogènes que les fibres obliques
(flèches verte et bleue) parce qu’elles sont perpendiculaires aux ultrasons (flèche blanche) alors que les secondes
sont plus parallèles, donc donnent moins d’écho.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
23
 Dans le sous-endocarde, les fibres dominantes sont longitudinales - obliques, arrangées en une
hélice dextrogyre, c’est-à-dire une hélice dont les fibres ont la direction des doigts d’une main
droite dont le pouce serait dans la direction du long-axe ventriculaire ; l’arrangement est tel
que la contraction de ces fibres dirige le sang vers la chambre de chasse du VG (CCVG).
 Dans le sous-épicarde, les fibres sont aussi longitudinales - obliques, mais arrangées en une
hélice lévogyre, correspondant aux doigts d’une main gauche dont le pouce serait dans la
direction du long-axe ventriculaire.
 L’angle moyen de ces fibres obliques avec l’axe ventriculaire est de 60° ; les fibres sousendocardiques et les fibres sous-épicardiques sont à peu près perpendiculaires.
 Les fibres circulaires sont au centre de la paroi; elles prédominent à la base, où elles sont en
continuité entre les deux ventricules, et dans la partie médioventriculaire; elles sont peu
présentes à l'apex.
Cet arrangement est visible sur une image échocardiographique des ventricules (Figure 5.14B). Le
septum interventriculaire, par exemple, présente une zone hyper-échogène en son centre ; celle-ci
représente les fibres circulaires, dont l’écho est puissant parce qu’elles sont perpendiculaires aux
ultrasons. De chaque côté, les fibres obliques donnent des échos plus faibles parce que celles-ci sont
davantage parallèles aux ultrasons.
C’est un cardiologue espagnol, Francisco Torrent-Guasp, qui a pour la première fois trouvé une
cohérence à cet enchevêtrement de fibres [393,394]. Avec une technique de préparation particulière ne
préservant que les faisceaux musculaires, il a émis l’hypothèse que la musculature ventriculaire était
constituée d’une seule longue bande musculaire doublement enroulée sur elle-même [394,396]. C’est
une bande spiralée à deux tours, pliée à 180° en son milieu (Figure 5.15). Cette bande est constituée
de quatre segments successifs en partant de l’artère pulmonaire et en allant jusqu’à l’aorte, que l’on
peut déplier au cours de la dissection (Figure 5.16):





Segment droit (1), boucle basale.
Segment gauche (2), boucle basale.
Pli à 180° entre la boucle basale et la boucle apicale.
Segment sous-endocardique (3), boucle apicale.
Segment sous-épicardique (4), boucle apicale.
Fibres
sousendoc
1
2
Ao
1
Fibres
sousépicar
d
Fibres
sousépicard
Fibres
sousendoc
3
4
Figure 5.15 : Représentation de la musculature myocardique sous forme d’une seule longue bande musculaire
enroulée sur elle-même en double spirale et pliée à 180° en son milieu, selon Torrent-Guasp [48,396]. Le
déroulement progressif de cette bande obtenue par dissection anatomique met en évidence sa constitution en
quatre segments successifs en partant de l’artère pulmonaire et en allant jusqu’à l’aorte. Les deux premiers
segments (segments 1 et 2) forment la musculature circulaire, les deux derniers segments forment la musculature
longitudinale oblique sous-endocardique (segment 3) et sous-épicardique (segment 4).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
24
AP
Ao
1
Figure 5.16 : La bande
musculaire,
selon
l’hypothèse de TorrentGuasp,
forme
schématiquement
une
double hélice pliée en
son
milieu
(flèche
blanche). Les segments 1
et
2
forment
la
musculature circulaire, le
segment 3 la musculature
sous-endocardique et le
segment 4 la musculature
sous-épicardique [394].
2
4
Ao
AP
1
2
4
3
Les deux premiers segments forment la musculature circulaire de chaque ventricule, les deux derniers
segments forment la musculature longitudinale sous-endocardique et sous-épicardique. Cette
reconstruction séduisante ne correspond que partiellement à l’embryogenèse et à la stimulation
électrique, mais elle a le mérite de proposer un modèle architectural simple pour suivre la contraction
myocardique du VG. L’implantation de cristaux sonomicrométriques, l’IRM marquée, le Doppler
tissulaire et la technique échocardiographique du speckle-tracking ont permis d’explorer la séquence
mécanique de la contraction et d’affiner le modèle de la bande musculaire.
Architecture fonctionnelle des ventricules
Forme
Paroi
Structure
Pression développée
Vol télédiastolique
Fraction d'éjection
Débit
Précharge
Postcharge
Contraction
VG
conique en obus
épaisse (12 mm)
1 couche circulaire entre
2 couches longitudinales
120-200 mmHg
40-80 mL/m2
0.6 – 0.7
dépend de la précharge
intrathoracique (poumons)
extrathoracique (RAS)
circulaire (80% de l’éjection)
VD
croissant enroulé autour du VG
mince (4 mm), très trabéculée
1 couche circulaire externe + 1 couche
longitudinale profonde
25-40 mmHg
50-100 ml/m2
0.5 – 0.6
sensible à la postcharge
extrathoracique (VCI)
intrathoracique (RAP)
longitudinale péristaltique (60% de l’éjection)
apport du VG : 40% de l’éjection
Le VG est constitué de trois types de fibres myocardiques:
- Sous-épicardiques longitudinales-obliques en hélice lévogyre orientée vers la chambre de
chasse (angle d'hélice 60°)
- Sous-endocardiques longitudinales-obliques en hélice dextrogyre (angle d'hélice 60°)
- Circulaires au centre de la paroi (peu développées à l'apex)
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
25
Contraction du VG
La contraction systolique du VG comprend quatre mouvements distincts (Figure 5.17) [375]:
 Epaississement de paroi de 30-40%.
 Raccourcissement radial concentrique de 20-35%.
 Raccourcissement longitudinal de 15-20% ; la base (jonction atrio-ventriculaire) se déplace
vers l’apex, qui reste immobile ; ce mouvement contribue au remplissage de l’OG pendant la
systole du VG, comme si le plancher auriculaire descendait brusquement à la manière d’un
piston.
 Torsion de 15-20° autour du long-axe [230].
Le résultat est une fraction d’éjection globale de 65%. A noter que le raccourcissement de chaque
sarcomère individuel n’est que de 15%.
Figure 5.17 : La contraction du VG
comprend 4 mouvements distincts. 1 :
raccourcissement radiaire (concentrique,
selon le court-axe). 2 : épaississement de
paroi. 3 : raccourcissement longitudinal
(selon le long-axe). 4 : rotation globale
anti-horaire. La contraction commence
dans le sous-endocarde et à l’apex ; elle
se propage du sous-endocarde vers le
sous-épicarde et de l’apex vers la base.
L’apex reste immobile, car c’est la base
du VG qui se déplace en direction de
l’apex ; ce mouvement est visible à
l’échocardiographie par la descente
systolique de l’anneau mitral (environ 1
cm).
Diastole
1
2
Base
3
Systole
4
Apex
© Chassot 2012
Le raccourcissement circulaire du myocarde (selon le court-axe du VG) est responsable de plus de
80% du volume éjecté; le raccourcissement longitudinal (long-axe du VG) ne contribue que pour 1520% à l'éjection; l'apex restant immobile, c'est essentiellement la descente de l'anneau mitral qui joue
le rôle de piston. La contraction du VG n’est pas anatomiquement uniforme. Si l’on divise la paroi
ventriculaire en quatre quadrants (latéral, antérieur, postérieur et septal), on voit que le degré de
torsion et le déplacement concentrique de chacun des quadrants est différent (Figure 5.18) [230,236]:




Paroi latérale : torsion 20-34°, raccourcissement concentrique 45% ;
Paroi antérieure : torsion 17-23°, raccourcissement concentrique 38% ;
Paroi postérieure : torsion 9-15°, raccourcissement concentrique 25% ;
Paroi septale : torsion < 5°, raccourcissement concentrique 18%.
La contribution de chaque quadrant à l’éjection du volume systolique est donc inégale : la
participation de la paroi latérale est maximale, suivie de celle de la paroi antérieure ; la paroi
postérieure est moins importante, et le septum contribue peu à l’éjection gauche. De plus, la rotation et
le raccourcissement radial de la paroi postérieure sont plus marqués à l’apex qu’à la base ; la partie
postéro-basale est donc relativement hypokinétique par rapport au reste du ventricule. Ce moindre
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
26
déplacement physiologique de la paroi postérieure est une garantie contre l’effet CMO (subobstruction
dynamique de la CCVG analogue à la cardiomyopathie obstructive dite CMO), parce que le feuillet
antérieur de la valve mitrale est ainsi maintenu éloigné de la CCVG pendant la systole (voir Figure
5.24 page 32). Enfin, la déformation systolique est toujours plus marquée dans le sous-endocarde que
dans le sous-épicarde. On voit donc que la perte de fonctionnalité par un infarctus ou une ischémie
aiguë n’aura pas le même retentissement hémodynamique selon la localisation de la lésion. Il en est de
même pendant les pontages aorto-coronariens à cœur battant : l’immobilisation et la compression de la
paroi latérale compromettent davantage le débit cardiaque que celles de la paroi postérieure [270].
Figure 5.18 : Raccourcissement
radiaire et rotation selon les 4
quadrants du VG : latéral, antérieur,
postérieur et septal. Le degré de
contraction est le plus important
dans le quadrant latéral, un peu
moins dans le quadrant antérieur, et
nettement plus faible dans les
quadrants postérieur et septal. Le
degré de raccourcissement de la
paroi postéro-basale est plus faible
que le reste du VG, raison pour
laquelle
elle
paraît
souvent
hypokinétique
à
l’échocardiographie. Le degré de rotation suit le
même dégradé que le raccourcissement : plus important à l’apex
qu’à la base et presque nul au niveau
du septum [230,236].
Lat
Ant
Post
Sept
Base
Mi-VG
Apex
40
20
40
20
40
20
40
20
Raccourcissement radiaire (%)
Torsion du VG
La torsion du VG sur lui-même est due à l’obliquité des fibres longitudinales sous-endocardiques et
sous-épicardiques. Elle consiste en une rotation globale anti-horaire de 15-20° en regardant le VG
depuis l’apex. C’est un mécanisme qui comprend plusieurs éléments (Figure 5.19 et Figure 5.20)
[23,128,230,355,378].
 Légère rotation horaire pendant la contraction isovolumétrique, due à la contraction initiale
des fibres sous-endocardiques ;
 Torsion globale anti-horaire due à la contraction de la musculature sous-épicardique ; celle-ci
est plus oblique, plus longue et offre davantage de couple que la musculature sousendocardique, raison pour laquelle elle est dominante, quoique tardive ;
 Rotation horaire de la base (+ 5°) pendant l’éjection ;
 Rotation anti-horaire de l’apex (- 12°) pendant l’éjection.
L’obliquité des fibres sous-épicardiques et sous-endocardiques les rend pratiquement perpendiculaires
entre elles ; de ce fait, leur effet sur la torsion du VG est opposé et la contration sous-endocardique
diminue le degré de rotation imposé par la contraction sous-épicardique plus puissante [425b]. Cette
torsion est plus marquée à l’apex qu’à la base, et plus accentuée dans la zone sous-endocardique (19°)
que dans la zone sous-épicardique (10°). Entre la télédiastole et la télésystole, un point situé sur
l’endocarde a parcouru un angle double de celui parcouru par un point épicardique, vu que le rayon du
premier est la moitié du second. De ce fait, le cisaillement reste identique sur toute l’épaisseur de
paroi, ce qui minimise les forces de friction entre fibres myocardiques (Figure 5.20) [46,378]. La
torsion contribue ainsi à l’homogénéité des déformations systolo-diastoliques au sein de la paroi
ventriculaire [46,425b]. Plus on se déplace de la base vers l’apex, plus la rotation augmente. Celle-ci
est proportionnelle à la taille du VG, car l’angle de torsion est de 2.3° par cm de long axe ventriculaire
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
27
(Figure 5.19B) [166]. Cette valeur est la même pour les cœurs de tous les mammifères ; les grands
cœurs ont donc davantage de rotation que les petits. Le degré de torsion est fonction de la contractilité
myocardique, dont elle est un indice plus fin que la fraction d’éjection. Elle augmente avec la
précharge (effet Starling) et la stimulation β, diminue avec la dysfonction et l’ischémie [165]. En cas
d’ischémie transmurale la rotation cesse dans le segment concerné, mais en cas d’ischémie sousendocardique, la torsion sous-épicardique anti-horaire n’est plus contrebalancée par la torsion sousendocardique dans le sens horaire et la rotation globale augmente [358]. Cette dysfonction sousendocardique avec torsion accentuée se retrouve dans l’hypertrophie ventriculaire concentrique, le
diabète et le vieillissement. La torsion est au contraire diminuée dans l’insuffisance ventriculaire, dans
la dysfonction diastolique restrictive et lors de rejet dans la transplantation [425b].
Figure 5.19 : Rotation du VG.
Pendant l’éjection, le VG subit
une torsion sur son long axe :
rotation horaire de la base (+
5°) et rotation anti-horaire de
l’apex (- 12°). En observant 3
points alignés en télédiastole
(en violet), on voit que leur
position a changé en télésystole
(en vert) mais qu’ils sont
toujours alignés sur une droite.
Plus on se déplace de la base
vers l’apex, plus la rotation
augmente. Celle-ci est proportionnelle à la taille du VG, car
l’angle de torsion est de 2.3°
par cm de long axe ventriculaire
[166]. Chez l’homme, où le
long-axe mesure 8-9 cm, la
rotation globale est de 15-20°.
Figure 5.20 :
Rotation
systolique du VG A :
rotation horaire due à la
contraction
initiale des
fibres sous-endocardiques
(1) et torsion globale antihoraire due à la contraction
sous-épicardique (2) ; cette
dernière
musculature
a
davantage de couple; elle est
dominante [48]. B : Entre la
télédiastole et la télésystole,
un
point
situé
sur
l’endocarde a parcouru un
angle θ double de celui
parcouru par un point
épicardique, vu que le rayon
(r) du premier est la moitié
du second. De ce fait,
l’angle γ qui représente le
cisaillement reste identique
sur toute l’épaisseur de
paroi, ce qui minimise les
forces de friction entre
fibres myocardiques [46].
© Chassot 2012
Base
r
S-épi
S-endo
γ endo = γ épi
A
h
θ endo > θ épi
2
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
1
r
Apex
θ
B
28
Le résultat hémodynamique de cette torsion est une propagation spiralée du flux sanguin bien visible
dans l’aorte thoracique : le volume sanguin avance selon un mouvement tournant en sens anti-horaire
(Figure 5.21) [125,197]. Ce flux hélicoïdal présente 3 avantages.
 Diminution des forces de cisaillement et de friction lors de virages, donc diminution des pertes
d’énergie hydraulique ; si le front d’onde était fixe, les couches de sang devraient ralentir le
long de la petite courbure de la crosse aortique et accélérer le long de la grande courbure, d’où
partent les vaisseaux de la gerbe.
 Amélioration du flux dans les vaisseaux de la gerbe, dont l’axe est toujours en regard du flux
tournoyant ; le risque de perte de pression de perfusion en cas d’accélération du flux aortique
est supprimé.
 Diminution de stress sur les parois aortiques.
Figure 5.21 : Flux spiralé dans l’aorte
descendante. A : vue transoesophagienne
court-axe de l’aorte descendante. En
tournant sur lui-même dans le sens antihoraire, le flux change de couleur au
Doppler : rouge dans la partie où il se
rapproche du capteur et bleu dans celle
où il s’en éloigne. B : Si le front du flux
était fixe, les couches de sang situées à
l’intérieur de la crosse devraient ralentir
et celles de l’extérieur accélérer, d’où
cisaillements et perte d’énergie hydraulique. C : Un flux spiralé évite ces déperditions d’énergie dans les virages et
augmente le flux dans les vaisseaux de la
gerbe puisque à tout instant une partie du
flux se dirige vers leurs abouchements.
B
Capteur
A
Flux
s’éloignant
du capteur
Flux se
rapprochant
du capteur
C
Séquence contractile du VG
Le déroulement de la contraction du VG suit plus ou moins celui de la bande musculaire [48]. Pendant
la contraction isovolumétrique (80-100 msec), la pression augmente sans raccourcissement des parois ;
la valve mitrale se ferme, et la valve aortique reste occluse. Les fibres longitudinales sousendocardiques et les fibres circulaires commencent à se contracter mais pas encore les fibres sousépicardiques. Comme la paroi se contracte sans diminution du volume sanguin, lequel est
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
29
incompressible, l’épaississement ne peut se faire que vers l’extérieur (Figure 5.22). Les fibres sousépicardiques sont donc étirées et subissent un effet Starling proportionnel à l’intensité de la
contraction sous-endocardique et circulaire ; ce phénomène de mise sous tension permet d’ajuster la
contraction sous-épicardique ultérieure à l’intensité de la contraction isovolumétrique des couches
profondes du myocarde [56]. Il est bien illustré par une image Doppler tissulaire de l’anneau mitral, où
l’on voit clairement que la contraction isovolumétrique s’accompagne d’un raccourcissement et d’un
allongement simultané selon la localisation des fibres (Figure 5.23) [11,358]. L’augmentation de
pression intraventriculaire (dP/dt) est de 1’200-2'000 mmHg/s.
La dépolarisation électrique et la contraction des fibres myocardiques suivent deux parcours
simultanés :
 Elles se propagent du sous-endocarde vers le sous-épicarde ;
 Elles se propagent de l’apex vers la base, se terminant dans la CCVG.
Le raccourcissement longitudinal du VG débute au cours de la phase de contraction isovolumétrique
parce que les fibres longitudinales sous-endocardiques se contractent avant les fibres circulaires, ce qui
rend le VG plus sphérique au moment où l’éjection commence [165]. Le raccourcissement des fibres
longitudinales est de 20% et celui des fibres circulaires de 25-35% [48]. D’autre part, les muscles
papillaires se contractent après la paroi sur laquelle ils sont implantés, de manière à permettre le
déplacement des feuillets mitraux jusqu’à l’occlusion avant de tendre les cordages [11].
Figure
5.22 :
Déplacements
respectifs de la musculature sousendocardique (trait rouge) et sousépicardique (trait bleu) de la paroi
antérieure du VG. Pendant la phase
de contraction isovolumétrique (1),
les fibres sous-endocardiques se
contractent (A) alors que les fibres
sous-épicardiques sont distendues
(B) et ne se contractent que plus
tardivement pendant la phase
d’éjection
(2) ;
d’autre
part,
l’importance de leur déplacement
(en mm) est plus faible que celui des
fibres sous-endocardiques [356].
Figure
5.23 :
Vélocité
des
déplacement de l’anneau mitral au
Doppler
tissulaire,
avec
la
composante systolique S (descente de
l’anneau mitral), et les deux
composantes diastoliques E’ et A’.
Pendant la phase de contraction
isovolumétrique (CI), on aperçoit
deux mouvements distincts : la
contraction
sous-endocardique
précoce (A) et la dilatation sousépicardique (B). Pendant la phase de
relaxation isovolumétrique (RI), on
remarque la contraction postsystolique de la musculature sousépicardique (C) [354].
Temps
B
D
é
p
l
a
c
e
m
e
n
t
Sous-épicarde
A
Sous-endocarde
Diastole
S
C
A
B
A’
CI
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
RI
E’
30
Pendant l’éjection (de l’ouverture à la fermeture de la valve aortique, 220-300 msec), la contraction du
VG n’est pas homogène [354,356].
 La déformation est plus importante dans le sous-endocarde que dans le sous-épicarde ;
 La déformation est plus marquée à l’apex qu’à la base ;
 La déformation circulaire est plus importante que la déformation longitudinale ;
 Les fibres sous-épicardiques commencent à se contracter 80-100 msec après les fibres sousendocardiques et les fibres circulaires ; leur contraction perdure en début de diastole ;
 Le raccourcissement s’accompagne d’une torsion due à l’obliquité des fibres longitudinales.
La contraction n’est donc pas un simple épaississement, mais un effet du cisaillement des fibres
perpendiculaires les unes par rapport aux autres. Le volume systolique est propulsé comme on essore
un linge mouillé, en le comprimant et en le torsadant [137].
Contraction du VG
La contraction ventriculaire gauche est constituée de 4 mouvements différents:
- Epaississement de paroi (30-40%)
- Raccourcissement radiaire (20-35%); il propulse 80% du volume systolique
- Raccourcissement longitudinal (15-20%) par descente de l'anneau mitral (l'apex reste
immobile); il propulse 20% du volume systolique
- Rotation 15-20° autour du long-axe; elle est responsable du flux spiralé dans l'aorte
La course radiaire et la rotation sont plus importantes dans les parois latérale et antérieure que dans les
parois postérieure et septale, et dans les couches sous-endocardiques que dans les couches sousépicardiques. La participation à l'éjection du volume systolique est par ordre décroissant d'importance:
paroi latérale, antérieure, postérieure, septale.
Contraction isovolumétrique (80-100 msec): contraction des fibres sous-endocardiques et circulaires,
distension des fibres sous-épicardiques;
Ejection: contraction des fibres sous-épicardiques, raccourcissement de toutes les fibres; contraction
radiaire, longitudinale et rotation; le VG se contracte comme on essore un linge mouillé.
Persistance de la contraction sous-épicardique en protodiastole.
La contraction se propage de l'endocarde vers l'épicarde et de l'apex vers la base.
Squelette interne du VG
Pour propulser le volume systolique à travers la valve aortique sans se torchonner sur lui-même, le VG
dispose d’un squelette interne assuré par l’ensemble de la valve mitrale, des cordages et des piliers. En
effet, la pression exercée sur le sang contenu entre les parois ventriculaires pousse les deux feuillets de
la valve mitrale et les appuie l’un contre l’autre au niveau de leurs extrémités (zona rugosa) ; la
hauteur de cette surface d’appui est de 8-10 mm (Figure 5.24A). Ils sont maintenus dans le plan de la
valve par la traction exercée par les cordages et la contraction des muscles papillaires. Cet équilibre
entre les forces d’occlusion et les forces de traction maintient la forme générale du VG et lui permet de
propulser le sang en direction de la chambre de chasse (CCVG), qui se contracte en dernier.
Le plan de la valve aortique et celui de la valve mitrale forment normalement un angle très ouvert
(angle ≥ 150°) ; le flux d’admission à travers la valve mitrale et le flux d’éjection à travers la chambre
de chasse sont presque parallèles (angle < 25°). Ils ne sont séparés que par le feuillet mitral antérieur.
La zone de coaptation de la valve mitrale est maintenue éloignée postérieurement de la zone d’éjection
aortique, qui est antérieure, par plusieurs éléments (Figure 5.24A).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
31
 La longueur du feuillet antérieur est plus grande que celle du feuillet postérieur.
 La course radiaire de la paroi postérieure est plus faible que celle des parois antérieure et
latérale ; la zone postéro-basale est relativement hypokinétique par rapport au reste du
ventricule.
 La paroi postéro-basale est activée électriquement en dernier.
A
B
OG
Point
fixe
Aorte
Aorte
CCVG
MPP
MPP
MPA
Ant
Post
Ant
HVG
Post
©
Chassot 2012
ゥ Chassot
2010
Figure 5.24 : Contraction du VG. A : L’augmentation de la pression intra-ventriculaire en systole applique les
deux feuillets de la valve mitrale l’un contre l’autre (flèches violettes) ; la contraction de la paroi et des muscles
papillaires (MPA : muscles papillaire antérieur, MPP : muscle papillaire postérieur) tend les cordages et
maintient la valve mitrale dans son plan d’occlusion (flèches vertes). Ceci constitue le squelette interne du
ventricule. Le sang est expulsé dans la chambre de chasse du VG (CCVG). La contraction débute à l’apex et se
termine dans la chambre de chasse. B : Si la course de la paroi postérieure et du MPP est trop longue
(stimulation béta-adrénergique) ou si le VG est trop petit (hypovolémie, hypertrophie concentrique), la paroi
postérieure se déplace vers l’avant (flèche verte) ; le point de coaptation de la valve mitrale est déplacé antérieurement vers l’aorte et se rapproche de la CCVG. Le feuillet antérieur est alors repoussé vers la CCVG lorsque la
pression intraventriculaire augmente pendant la systole (flèche violette). Traitillé blanc : angle mitro-aortique.
Effet CMO
Certaines conditions peuvent déplacer antérieurement la zone de coaptation mitrale et la rapprocher de
la zone d’éjection (Figure 5.24B).
 Diminution de taille de la cavité ventriculaire : hypertrophie ventriculaire concentrique,
hypovolémie ;
 Augmentation de la course systolique de la paroi postérieure : sur-stimulation β, baisse de
postcharge (vasoplégie) ;
 Anneau mitral restrictif lors de plastie mitrale.
Dans ces conditions, l’angle mitro-aortique se referme et la zone de coaptation se rapproche de la zone
d’éjection parce que la paroi postérieure est déplacée vers l’avant en systole. En effet, l’angle mitroaortique est un point fixe puisqu’il est situé au niveau du trigone fibreux, qui est le centre de gravité
mécanique du cœur sur lequel sont ancrées les valves mitrale, aortique et tricuspide (Figure 5.25).
L’anneau mitral ne peut se rétrécir qu’au niveau de sa partie postérieure, qui est fine et essentiellement
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
32
musculaire. La diminution de taille de la cavité ventriculaire se traduit donc par un déplacement
antérieur des structures postérieures. Ce mouvement a 4 effets en systole.
 Déplacement antérieur de la zone de coaptation mitrale ;
 Occlusion mitrale entre l’extrémité distale du feuillet postérieur et le corps du feuillet
antérieur et non plus bord-à-bord ;
 Augmentation de la course des cordages du pilier postérieur permettant davantage de
déplacement antérieur des feuillets ;
 Partie distale du feuillet antérieur flottant à l’intérieur de la cavité du VG en protosystole.
Antérieur
Figure 5.25 : Schéma de la
position des valves et du trigone
fibreux. L’angle mitro-aortique
est un point fixe puisqu’il est
situé au niveau du trigone
fibreux, qui est le centre de
gravité mécanique du cœur sur
lequel sont ancrées les valves
mitrale, aortique et tricuspide.
Si l’anneau mitral se rétrécit, le
seul déplacement possible est
celui de sa partie postérieure,
qui
est
essentiellement
musculaire, et qui se retrouve
alors tirée vers l’avant.
Trigone
fibreux
AP
Ao
V tr
VM
Zone musculaire
Postérieur
En diastole, le flux mitral est normalement dirigé vers la paroi postéro-latérale et non vers l’apex ; de
cette manière, le vortex qui se forme dans le VG amène le sang en regard de la chambre de chasse et
en avant du feuillet mitral antérieur ; dès que la pression monte en systole, cette masse de sang pousse
le feuillet en arrière jusqu’à l’occlusion (Figure 5.26A) [223]. Dans le cas d’un rétrécissement de la
cavité ventriculaire, au contraire, le flux diastolique est dirigé trop vers l’avant, et forme son vortex en
arrière du feuillet antérieur ; dans ces conditions, la pression de la phase de contraction
isovolumétrique va pousser le feuillet vers l’avant en direction de la CCVG (Figure 5.26B). Dès que
l’éjection commence, la partie distale de ce feuillet peut être aspirée dans la CCVG par effet Venturi et
induire un phénomène appelé systolic anterior motion (SAM). Le feuillet antérieur vient alors occlure
partiellement la CCVG et le débit systolique baisse brusquement. C’est l’obstruction dynamique de la
CCVG ou effet CMO, appelé ainsi par analogie au mécanisme de la cardiomyopathie obstructive
(Figure 5.27). L'aspiration du feuillet mitral dans la CCVG a pour effet de rouvrir la valve en
mésosystole et de provoquer une insuffisance mitrale méso-télésystolique. Cliniquement, l'effet CMO
se caractérise par une hypotension artérielle et un bas débit cardiaque qui ne réagissent pas aux
catécholamines; le seul traitement est une hypervolémie, une vasoconstriction et une diminution de
l'effet β (β-bloqueur).
La proximité de la chambre d’admission et de la chambre d’éjection caractéristique du cœur des
mammifères les rend sujets à cette obstruction dynamique de la chambre de chasse dès que la cavité
ventriculaire se rétrécit et/ou que la stimulation β est intense. En clinique, il faut en général une
combinaison de plusieurs éléments pour voir s’installer une instabilité hémodynamique sévère liée à
un effet CMO :




Hypertrophie ventriculaire concentrique (HVG) ;
Hypovolémie ;
Vasoplégie ;
Stimulation β excessive.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
33
A
B
OG
OG
Aorte
Aorte
CCVG
Ant
Ant
Post
HVG
Post
© Chassot 2012
Figure 5.26 : Flux mitral diastolique. A : normalement, le flux mitral est dirigé vers la paroi postéro-latérale et
non vers l’apex ; de cette manière, le vortex qui se forme dans le VG amène le sang en regard de la chambre de
chasse et en avant du feuillet mitral antérieur ; dès que la pression monte en systole, cette masse de sang pousse
le feuillet en arrière jusqu’à l’occlusion [223]. B : dans le cas d’un rétrécissement de la cavité ventriculaire, au
contraire, le flux diastolique est dirigé trop vers l’avant, et forme son vortex en arrière du feuillet antérieur ; dans
ces conditions, la pression de la phase de contraction isovolumétrique va pousser le feuillet vers l’avant en
direction de la CCVG.
A
B
OG
IM
Aorte
CCVG
Ao
OD
CCVG
MPP
Ant
HVG
VG
Post
VD
© Chassot 2012
Figure 5.27 : Obstruction dynamique de la CCVG (effet CMO) en cas de restriction de la cavité ventriculaire
gauche et d’avancement excessif de la paroi postérieure. A : la pression de la phase de contraction
isovolumétrique pousse le feuillet vers l’avant en direction de la CCVG. Dès que l’éjection commence, la partie
distale de ce feuillet peut être aspirée dans la CCVG par effet Venturi et induire un phénomène appelé systolic
anterior motion (SAM). Le feuillet antérieur vient alors occlure partiellement la CCVG et le débit systolique
baisse brusquement. C’est l’effet CMO, appelé ainsi par analogie avec le mécanisme de la cardiomyopathie
obstructive. La réouverture de la valve mitrale en mésosystole provoque une insuffisance mitrale mésotélésystolique (IM). B : illustration échocardiographique transoesophagienne ; la flèche indique la coudure du
feuillet mitral antérieur (SAM) qui vient obstruer la chambre de chasse gauche (CCVG). Les deux flèches
blanches indiquent la position de l’anneau mitral (anneau de Carpentier restrictif après plastie mitrale).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
34
Le diagnostic ne peut être posé que par l’échocardiographie. La thérapeutique consiste en une
augmentation de la précharge et de la postcharge, et en une diminution de la fonction inotrope.
Squelette interne du VG
L'appareil sous-valvulaire de la valve mitrale est un squelette interne pour le VG pendant la systole. La
pression intraventriculaire appuie les deux feuillets mitraux l'un contre l'autre le long de leur extrémité,
et la traction exercée sur les cordages par la contraction ventriculaire empêche la valve mitrale de
basculer dans l'OG. Ce système maintient la forme du VG pendant l'éjection vers la CCVG.
Normalement, la zone de coaptation des feuillets mitraux est maintenue éloignée postérieurement de la
chambre de chasse:
- Le feuillet postérieur est plus court que le feuillet antérieur
- La paroi postéro-basale a peu de course radiaire en systole
- La paroi postéro-basale est activée électriquement en dernier
La zone de coaptation mitrale peut être déplacée antérieurement par diminution du volume de la cavité
ventriculaire (hypovolémie, HVG concentrique, vasoplégie), par course excessive de la paroi
postérieure (stimulation β) ou par restriction de l'anneau mitral (plastie). Ceci a 3 effets en systole:
- Occlusion de l'extrémité du feuillet postérieur contre le corps du feuillet antérieur, perte de
la surface d'occlusion des feuillets
- Augmentation de la course des cordages du pilier postérieur
- Flottement de la partie distale du feuillet antérieur dans la cavité ventriculaire; cette partie est
poussée en direction de la CCVG lorsque la pression s'élève dans le VG en systole
En cours d'éjection, le feuillet mitral antérieur est en plus aspiré dans la CCVG par effet Venturi
(SAM: systolic anterior motion). Le résultat est une subobstruction dynamique de la CCVG (effet
cardiomyopathie obstructive ou effet CMO) et une réouverture mésosystolique de la valve mitrale avec
insuffisance (IM).
Relaxation diastolique
Les fibres sous-épicardiques, qui se sont distendues pendant la contraction isovolumétrique et qui se
sont contractées tardivement (80-100 msec après les couches profondes), prolongent leur contraction
pendant le début de la diastole [356]. Cette contraction postsystolique est bien visible au Doppler
tissulaire (Figure 5.28) ; son importance est proportionnelle à l’effet Starling subi par les fibres
pendant la phase isovolumétrique, donc à la contractilité globale du VG. D’autre part, ces fibres sousépicardiques se relâchent en commençant à la base pour finir à l’apex, contrairement aux couches
sous-endocardiques et circulaires qui se relâchent comme elles se sont contractées, c’est-à-dire de
l’apex vers la base. La relaxation sous-épicardique a donc lieu en dernier à l’apex [355].
Pendant l’éjection, les fibres sous-épicardiques, plus longues et plus obliques que les fibres sousendocardiques, ont pris une configuration en « S » forcée. En protodiastole, leur contraction
persistante alors que tout le reste du VG s’est relâché va détordre le ventricule et l’allonger, de
manière analogue à celle de la musculature paravertébrale d’un serpent lorsqu’il se dresse sur ses
anneaux (Figure 5.29) [48,395]. Le fait que leur contraction se prolonge à l'apex (relaxation de la base
vers l'apex) permet un remplissage optimal du VG jusqu'à sa pointe.
La contraction sous-épicardique se poursuit jusqu’au nadir de la pression intraventriculaire, synchrone
avec le pic de vélocité du flux mitral protodiastolique (flux E). Elle est visible sur un tracé du
mouvement de l’anneau mitral en mode Doppler tissulaire sous forme d’un pic de raccourcissement
pendant la phase de relaxation isovolumétrique (voir Figure 5.23 page 30) [358]. Ce phénomène
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
35
correspond à la phase de relaxation protodiastolique dite « active », parce qu’elle consomme 15% de
la mVO2 [96,355]. Comme l’avaient déjà exprimé de nombreux physiologistes, la protodiastole est
une phase qui devrait être considérée comme partie intégrante de la systole, puisqu’elle consomme de
l’O2, qu'elle répond de la même manière aux stimuli physiologiques (effet Starling, inotropisme, etc)
et qu'elle est altérée très précocement dans l'ischémie myocardique. Il s’agit en fait d’un phénomène
de Systolic ventricular filling.
Figure 5.28 : Déformation de la
musculature sous-épicardique
(courbe rouge) par rapport à la
déformation moyenne (courbe
bleue) de la paroi antérieure du
VG (Doppler). Les fibres sousépicardiques, distendues pendant la contraction isovolumétrique (CI) et contractées
tardivement (80-100 msec après
les couches profondes), prolongent
leur
contraction
pendant le début de la diastole.
L’importance de cette contraction postsystolique est proportionnelle à l’effet Starling subi
pendant la phase isovolumétrique [355]. S : systole. RI :
relaxation isovolumétrique. R :
remplissage diastolique. CA :
contraction auriculaire.
Déformation
moyenne
D
é
f
o
r
m
a
t
i
o
n
Déformation
sous-endoc
Contraction
post-systolique
CI
S
RI
R
CA
Ejection
Relaxation
Figure
5.29 :
Pendant
l’éjection, les fibres sousépicardiques, plus longues et
plus obliques que les fibres
sous-endocardiques, ont pris
une configuration en « S »
forcée. En protodiastole, leur
contraction persistante alors
que tout le reste du VG s’est
relâché va détordre le
ventricule et l’allonger, de
manière analogue à celle de
la musculature paravertébrale
d’un serpent lorsqu’il se
dresse sur ses anneaux
[48,394].
S-endo
S-épi
S-endo
Contraction
en systole
S-épi
Diastole
En protodiastole, la pression intraventriculaire baisse en dessous de la pression intrathoracique (Figure 5.30). Cet effet de succion (relaxation active) est lié à deux phénomènes distincts
[146,358] :

La contraction post-systolique des fibres sous-épicardiques ; les β-stimulants ont un effet
accélérateur sur la chute de pression (- dP/dt) ; le fait que cette contraction se termine à l’apex
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
36
assure un meilleur remplissage puisque l’aspiration du sang est plus longue dans la partie
apicale du VG.
 Le ressort élastique de la connectine, qui restitue en se déployant l’énergie emmagasinée
pendant sa compression en systole ; la connectine, squelette interne de la myofibrille, est une
macroprotéine fixée aux disques Z qui traverse toute la chaîne de myosine. La matrice de
collagène ne participe pas au retour élastique en protodiastole mais limite l’expansion du
volume en télédiastole.
Pressions
PVG
OG
POG
Aorte
PVG <
Contraction
Rempliss
POG
auriculaire
précoce
< Pit
Ant
Post
A
≥ 75%
rempliss
Flux mitral
E
© Chassot 2012
Figure 5.30 : Remplissage diastolique du VG. En protodiastole, le VG fonctionne comme une pompe aspirante
grâce à la contraction sous-épicardique résiduelle et à l’elasticité de la connectine (voir Figure 5.11 page 19) ; la
pression intraventriculaire descend en dessous de la pression intrathoracique. Ce phénomène crée un fort
gradient de pression entre l’OG et le VG (surface jaune), qui assure > 75% du remplissage pendant le flux mitral
E. La contraction auriculaire (surface verte, flux A) complète le remplissage et fournit l’élévation de la pression
télédiastolique.
Figure 5.31A : Coulissage de
l’anneau mitral autour du volume
de sang qui est au niveau de la
valve et qui se retrouve passer de
l’OG dans le VG sans avoir à se
déplacer. L’anneau mitral, qui est
descendu vers l’apex pendant la
contraction
longi-tudinale,
remonte jusqu’à sa position
télédiastolique en 2 étapes,
pendant la phase de relaxation
protodiastolique (relâchement des
fibres
sous-endocardiques
et
contraction sous-épicardique postsystolique) et pendant la phase de
contraction auriculaire (traction
par les fibres musculaires de
l’OG).
Systole
Diastole
OG
OG
Aorte
Aorte
VG
VG
© Chassot 2012
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
37
De plus, l’anneau mitral, qui est descendu vers l’apex pendant la contraction longitudinale, remonte
jusqu’à sa position télédiastolique en 2 étapes, pendant la phase de relaxation protodiastolique
(relâchement des fibres sous-endocardiques et contraction sous-épicardique post-systolique) et
pendant la phase de contraction auriculaire (traction par les fibres musculaires de l’oreillette).
L’anneau mitral coulisse ainsi autour du volume de sang qui est au niveau de la valve et qui se
retrouve passer de l’OG dans le VG sans même s'être déplacé (Figure 5.31A).
Il existe donc 3 phénomènes distincts pour expliquer le remplissage ventriculaire en début de diastole :
la contraction de la musculature sous-épicardique, le ressort élastique de la connectine et le coulissage
de l’anneau mitral. Comme ils dépendent des mêmes stimuli que la contraction systolique, ces trois
phénomènes permettent d’accélérer le remplissage du VG à l’effort sans augmentation de la pression
auriculaire gauche. En effet, cette dernière ne s’élève qu’à l’effort extrême ou dans des conditions
pathologiques (dysfonction diastolique, hypervolémie, etc).
En diastole, le flux mitral fait un large vortex dans la région apicale, de manière à amener le sang en
regard de la chambre de chasse et en avant du feuillet mitral antérieur ; dès que la pression monte en
systole, cette masse de sang est éjectée en direction de la valve aortique et repousse le feuillet mitral
en arrière jusqu’à l’occlusion [174a]. Dans un tel système, le flux est continu, laminaire et
ininterrompu ; la poussée hydrodynamique est longitudinale, allant de la mitrale vers l’apex et de
l’apex vers la chambre de chasse. La perte d’énergie est minimale, le risque de thrombose est nul.
Dans le cas d’un remodelage de la cavité ventriculaire à cause d’une cardiomyopathie, d’une
dyskinésie ou d’une dilatation, le flux diastolique forme des vortex dispersés dans la cavité
ventriculaire. Au lieu d’être strictement longitudinale, la poussée a des composantes transversales ou
circulaires qui se croisent ; le désordre et l’instabilité de cette situation entraîne un gaspillage
d’énergie, et le risque de stagnation locale augmente celui de thrombose (Figure 5.31B) [299a]. La
présence de vortex anormaux à l’IRM cardiaque à contraste de phase est un signe avant-coureur de la
cardiopathie structurelle [299a].
Relaxation diastolique
La protodiastole est caractérisée par un effet de succion intraventriculaire (la pression du VG est
inférieure à la pression thoracique): le VG fonctionne comme une pompe aspirante. Ceci est lié à 3
phénomènes:
- Persistance de la contraction sous-épicardique alors que les couches sous-endocardiques et
circulaires se sont relâchées; cette contraction détord et allonge le VG comme sa
musculature paravertébrale redresse le serpent
- Déploiement élastique de la connectine
- Coulissage de l'anneau mitral autour du volume de sang situé au niveau de la valve
Ces phénomènes dépendent des mêmes stimuli que la contraction systolique et permettent d'accélérer
le remplissage à l'effort sans augmentation de la POG.
Contraction du VD
L’architecture du VD est différente de celle du VG, car son origine embryologique n’est pas la même.
Alors que le VG provient du tube cardiaque primitif retourné sur lui-même, le VD est issu du champ
cardiaque antérieur situé dans le mésoderme pharyngien, en continuité avec le VG du côté céphalique
(voir Annexe D Figure D.13) ; ce champ donne naissance à la majeure partie du VD et aux deux
chambres de chasse. Le VD est constitué d'une chambre d’admission basée sur l'anneau tricuspidien,
d’un corps central très trabéculé enroulé en forme de croissant autour du VG, et d'une chambre de
chasse (CCVD) cylindrique connectée à l’AP. Sa section transverse est en forme de demi-lune (voir
Figure 5.13 page 22). La masse musculaire du VD est 1/6ème de celle du VG ; l’épaisseur de la paroi
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
38
libre du VD est de 4-5 mm environ. Les fibres musculaires longitudinales sont sous-endocardiques et
les fibres circulaires disposées à l’extérieur : le VD ne possède que deux couches de fibres
myocardiques, contrairement au VG qui en a trois. La contraction du VD est liée à plusieurs
mécanismes (Figure 5.32) [158,159,344].
Dysfonction
diastolique
OG
Aorte
Ant
Post
ゥ Chassot 20
Ant
Post
Dilatation
© Chassot 2015
ゥ Chassot
201
Figure 5.31B : Flux diastoliques intraventriculaires. En situation normale, le flux
mitral est dirigé légèrement postérieurement de
manière à tournoyer à l’apex et à remonter vers
la chambre de chasse ; le flux est continu et
régulier, la perte d’énergie est minimale. En cas
de dysfonction diastolique, la direction du flux
mitral n’est plus homogène, il se crée des
vortex irréguliers, et certaines composantes
sont amenées à se croiser, ce qui représente une
perte d’énergie hydraulique. Lors de dilatation
ventriculaire, les flux sont chaotiques, la perte
d’énergie est considérable et le risque de
thrombose devient élevé [299a].
Ant
Post
© Chassot 2015
ゥ Chassot
201

Contraction longitudinale base → apex → CCVD séquentielle en un mouvement péristaltique
autour du VG ; c’est l’élément principal. La contraction longitudinale du VD débute à la
chambre d’admission (région sous-tricuspidienne) et se propage jusqu’à la CCVD en 80 msec.
 Raccourcissement radiaire de la paroi libre ; ce raccourcissement en court-axe dû aux fibres
circulaires est peu important.
 Le VD subit une torsion anti-horaire globale de 20-25° due à l’obliquité de sa musculature
longitudinale ; elle consiste en une brève rotation horaire à la base suivie d’une rotation antihoraire majeure.
 Epaississement du septum interventriculaire dû à la contraction du VG, qui fournit 40% de la
pression systolique du VD et assure une compression transverse de la cavité droite.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
39

Le VG contribue également à la contraction de la paroi libre du VD par la traction des fibres
communes aux deux ventricules au niveau des sillons interventriculaires ; à la base et à l’apex,
une partie des fibres circulaires établit une continuité entre les deux ventricules.
B
A
5
AP
3
CCVD
V
D
4
OD
Ch
adm
2
V
G
VG
1
5
© Chassot 2012
Figure 5.32 : La contraction du ventricule droit est le résultat de 5 composantes. A : VD en position anatomique
[404]. B : coupe en court-axe des deux ventricules. 1 : contraction longitudinale de type péristaltique de la
chambre d’admission (ch adm) jusqu’à la chambre de chasse (CCVD) ; c’est la composante majeure. 2 : torsion
du VD en sens anti-horaire (20°). 3 : contraction radiaire de la paroi libre ; elle est peu importante. 4 :
compression par l’épaississement septal lié à la contraction du VG ; c’est le facteur principal dans la
compression en court-axe. 5 : traction exercée par le VG sur les points d’ancrage du VD.
En cas d’insuffisance ventriculaire droite, seule la contraction de la paroi libre du VD donne une idée
réelle de sa dysfonction, parce que la contractilité des autres régions est soit soutenue par celle du VG
(fibres circulaires communes à la base, contraction du septum) soit augmentée à cause de sa richesse
en récepteurs β (chambre de chasse droite).
Le pic de pression systolique est plus tardif que dans le VG (voir Figure 5.103 page 148). La phase de
contraction isovolumétrique est quasi-inexistante, parce que la pression du VD atteint rapidement la
valeur de la PAP ; l’éjection débute beaucoup plus tôt que celle du VG, et se poursuit pendant la phase
de relaxation isovolumétrique. Le volume télédiastolique du VD est plus grand que celui du VG (50100 mL/m2 versus 40-80 ml/m2) ; de ce fait, sa fraction d’éjection est plus basse (0.4 à 0.6) puisque les
deux ventricules doivent maintenir un débit/minute rigoureusement identique [159]. Lorsqu’il
s’hypertrophie parce qu’il fonctionne comme ventricule systémique (transposition des gros vaisseaux,
par exemple), le VD présente une contraction à prédominance radiaire/circulaire et perd son
mouvement de rotation [303]. Plus il est hypertrophié, plus sa physiologie ressemble à celle du VG.
Contraction du VD
La contraction du VD comprend 4 mouvements différents:
- Contraction longitudinale péristaltique de la base vers l'apex et la CCVD; mouvement de
propulsion principal
- Contraction radiaire de la paroi libre; contribution peu importante au volume systolique
- Torsion de 20-25°
- Apport important du VG: épaississement du septum et traction sur les fibres circulaires
communes aux 2 ventricules; 40% de l'éjection systolique du VD est fournie par le VG
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
40
Notre cœur est-il une bonne pompe ? (voir Annexe D)
Un système à quatre chambres, connecté à deux circulations en série de même débit mais de pressions
différentes, est-il le plus adéquat ? Pour répondre à cette question, l’évolution qu’ont parcourue les
différentes espèces animales nous offre 800 millions d’années d’expérimentation sur les divers
systèmes circulatoires possibles [98]. Il est donc intéressant de se pencher un instant sur la
paléontologie du cœur et sur les modifications de l’hémodynamique au cours de l’évolution animale.
Pour davantage d’information, on se référera à l’Annexe D, où le sujet est traité de manière extensive.
A partir des cellules eukaryotes et des bactéries apparues il y a 1.5 milliard d’années, se sont
développés des organismes pluricellulaires et organisés de symétrie radiaire comme les cnidaires
(corail, méduses), puis de symétrie bilatérale avec un axe antéro-postérieur (Bilateria). De là,
l’évolution a bifurqué dans deux directions : les invertébrés et les vertébrés (Figure 5.33). Le premier
cœur tubulaire est apparu probablement il y a 600-800 millions d’années chez les Bilateria ; il devait
être animé de mouvements péristaltiques et propulsait un liquide dans un espace péricellulaire sans
vaisseaux [26a].
Oiseaux
Mammifères
Céphalopodes
Crustacés
Reptiles
Insectes
Amphibiens
Vers
Mollusques
Arthropodes
Poissons
Amniotes
Annelidés
Echinodermes
Protostomes
Chordés
Deutérostomes
Bilateria
Cnidaires
Eponges
Coraux
Méduses
Metazoaires
Bactéries Protozoaires
© Chassot 2014
Figure 5.33 : Schéma simplifié de l’évolution animale. Les flèches bleues représentent les invertébrés et les
flèches rouges les vertébrés. Protostomes et deutérostomes, respectivement ancêtres des invertébrés et des
vertébrés, sont issus d’animaux ayant acquis une symétrie bilatérale, alors que les protozoaires et les cnidaires
ont une symétrie radiaire. Les amniotes se caractérisent par la présence d’une poche liquidienne (amnios)
assurant la protection de l’embryon et permettant de pondre des œufs hors de l’eau.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
41
Tant que les êtres vivants étaient des amas de cellules comme les métazoaires, la simple diffusion de
l’oxygène et des nutriments suffisait à leurs besoins. Augmentant de taille et multipliant les organes,
les animaux ont dû organiser un système de transport pour apporter les éléments nutritifs et l’O2, et
évacuer les déchets et le CO2. Le système circulatoire peut être conçu sur deux modes.

Un système ouvert à basse pression donnant la priorité au flux, analogue à un ventilateur dans
une chambre. Ce système est fonctionnel sur de courtes distances ; il constitue la circulation
périphérique chez les annélidés (vers), les arthropodes (insectes), les mollusques noncéphalopodes et les tuniqués. Le volume circulant est considérable (jusqu’à 50% du poids
corporel) et consiste en un mélange de sang et de lymphe appelé hémolymphe.
 Un système fermé sous haute pression (analogue à la pompe-à-vélo), permettant de propulser
le flux sur de longs trajets et de suivre les variations de la demande. On le rencontre chez tous
les vertébrés, mais aussi chez les céphalopodes (poulpes) et les échinodermes (oursins). Le
volume circulant est faible (6-8% du poids corporel) et ne contient que du sang.
Il existe essentiellement trois types de pompes utilisées dans la nature.
 Propulsion péristaltique, analogue à celle du tube digestif ; le flux est continu, lent et de basse
pression (< 15 mmHg) ; on trouve cette circulation chez les annélidés (vers).
 Compression par une musculature extrinsèque (cœur caudal de lamproie) ; la pression générée
est faible ; chez l’homme, c’est la manière dont est assurée la circulation veineuse dans les
membres inférieurs. Des valves sont nécessaires pour assurer la direction du flux.
 Chambre contractile, unique (ventricule) ou multiple (renflements aortiques en série des
arthropodes) avec des valves ; ce système permet de hautes pressions mais implique une
circulation pulsatile ; c’est le système le plus fréquemment utilisé dans le monde animal.
Le cœur fait circuler le sang toujours dans la même direction, sauf chez les tuniqués, ou urochordés,
qui sont un groupe d'animaux ressemblant à des sacs fixés sur le fond marin. Ils ont un cœur en forme
de tube péristaltique sans valve et une circulation ouverte. Après quelques dizaines de contractions
péristaltiques propulsant le liquide dans un sens, le cœur fait une pause, puis se contracte dans l'autre
sens, et fait circuler le liquide en direction opposée. Ce cas de circulation bidirectionnelle est la seule
exception connue à la règle du flux dirigé vers les tissus et revenant à la pompe par un circuit veineux.
Plusieurs montages circulatoires sont possibles pour assurer les échanges métaboliques et les échanges
gazeux (Figure 5.34).
 Les échanges gazeux peuvent avoir lieu à travers la peau (annélidés), par des pores
abdominaux (insectes), par des branchies (mollusques, poissons) ou par des poumons
(reptiles, oiseaux, mammifères).
 Les branchies peuvent être montées sur le retour veineux (mollusques) ; le cœur reçoit du sang
oxygéné qu’il propulse vers les tissus.
 Les branchies peuvent être placées entre le cœur et les tissus (poissons) ; le cœur reçoit alors
du sang veineux ; cependant, il est lui-même perfusé par du sang oxygéné en provenance
directe des branchies.
 Les animaux plus évolués ont deux circulations séparées (systémique et pulmonaire) ; elles
peuvent avoir la même pression (reptiles, amphibiens) ou des pressions différentes (oiseaux,
mammifères). Dans le premier cas, le cœur ne possède qu’un seul ventricule, dans le
deuxième il en possède deux.
La présence d’un transporteur d’O2 augmente 20-40 fois la capacité du sang à acheminer l’O2 aux
cellules. Deux pigments hèmes différents sont utilisés dans la nature.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
42
 L’hémocyanine à base de cuivre (Cu2+), d’où la couleur verdâtre du sang de la plupart des
invertébrés ; elle n’existe que sous forme dissoute et transporte 4-5 vol% d’O2.
 L’hémoglobine à base de fer (Fe2+), dont il existe plusieurs variétés et qui est commune à tous
les vertébrés ; elle est enfermée à haute concentration dans les globules rouges et transporte
environ 20 vol% d’O2.
Il est intéressant d’examiner quelques exemples de différents types de circulation sélectionnés en
remontant la chaîne de l’évolution [349].
A
Figure 5.34 : Différents
montages
circulatoires
utilisés dans la nature.
A : circulation simple ;
les
branchies
sont
montées sur le retour
veineux (mollusques) ; le
cœur reçoit du sang
oxygéné qu’il propulse
vers les tissus. B : les
branchies sont placées
entre le cœur et les tissus
(poissons) ; le cœur
reçoit alors du sang
veineux ; il est lui-même
perfusé par du sang
artérialisé
venant
directement
des
branchies. C : deux
circulations
séparées
(systémique
et
pulmonaire) ;
elles
peuvent avoir la même
pression
(reptiles,
sauriens)
ou
des
pressions
différentes
(oiseaux, mammifères).
Dans le premier cas, le
cœur ne possède qu’un
seul ventricule, dans le
deuxième il en possède
deux.
Tissus
Branchies
Coeur
B
Branchies
Tissus
Coeur
C
Poumons
Tissus
Cœur D
Cœur G
© Chassot 2014
Invertébrés
Les annélidés (vers) possèdent une seule circulation faite de deux tubes péristaltiques (ventral et
dorsal) et de connexions latérales (Figure 5.35A) ; c’est un système de perfusion lent (6-8 ondes
péristaltiques par minute), continu, à basse pression (≤ 12 mmHg), ne permettant guère de variations
de débit, et ne s’accommodant que d’un métabolisme très bas. Les annélidés respirent par la peau.
Les arthropodes (insectes, arachnidés) ont une série de renflements pulsatiles abdominaux (cœurs en
série) le long d’un vaisseau dorsal (aorte) et respirent par des opercules situés latéralement sur
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
43
l’abdomen (Figure 5.35B) [365a]. Les cœurs synchronisés propulsent le sang dans l’aorte en se
contractant ; leur remplissage est assuré par des muscles suspenseurs fixés aux parois de l’abdomen.
En périphérie, la circulation est ouverte, le liquide circulant librement dans l’espace interstitiel à
l’intérieur de la carapace et des organes, où il est dirigé par un réseau de membranes. C’est un système
à basse pression (20/10 mmHg), qui ne permet pas de dépasser une taille de 15 cm parce que la
diffusion interstitielle ne peut se faire que sur de courtes distances. A la base des ailes, certains
insectes comme les mouches et les abeilles, présentent des renflements circulatoires particulièrement
développés, appelés cœurs accessoires, assurant un débit plus élevé dans les ailes, dont le métabolisme
est très élevés pendant le vol. Les insectes sauteurs ont le même arrangement au niveau des pattes.
Chez les insectes, le sang ne joue pas de rôle particulier dans la respiration; le transport des gaz est
fourni jusqu'en périphérie par un réseau de tubes très fins où le déplacement de l'air est assuré par la
contraction et la relaxation de l'abdomen. Ces mouvements de l’abdomen apportent une aide
considérable au flux sanguin et sont essentiels au brassage de l’hémolymphe pendant les efforts. Chez
les arachnidés (araignées, scorpions), le système circulatoire est identique mais le sang participe au
transport d'O2 par un pigment d'hémocyanine, et on trouve le premier développement d'organes
respiratoires où le sang entre en contact avec l'air.
Figure 5.35 : Systèmes
circulatoires des annélidés
et des insectes.
A:
chez
les
vers
(annélidés), la circulation
suit un mode péristaltique
de long de deux tubes
(dorsal et ventral) reliés par
des circuits collatéraux au
niveau de chaque anneau.
La respiration est cutanée.
B : chez les arthropodes
(insectes, araignées), des
cœurs
abdominaux
propulsent le sang dans
l’aorte,
la
circulation
périphérique est ouverte
(absence de capillaires) ;
certains ont des cœurs
accessoires au niveau des
ailes, des pattes ou des
antennes. La contractionrelaxation
abdominale
apporte
une
aide
considérable
au
flux
sanguin.
A
Vaisseau dorsal
Connections
segmentaires
Respiration cut
Vaisseau ventral
Tube digestif
Corde neurale
B
© Chassot 2013
Cœurs acessoires
Aorte
Circulation
ouverte en
périphérie
Coeurs
Ostia
Corde
neurale
Septa
Les crustacés (crabes, homards) présentent un cœur unique constitué d’une seule cavité contractile
suspendue au péricarde par des ligaments élastiques qui assurent l’expansion diastolique (Figure
5.36). Le sang revient dans le péricarde et baigne la masse contractile ; en diastole, il pénètre dans la
cavité ventriculaire par des canaux traversant la paroi myocardique ; en systole, la contraction obture
ces orifices et le sang est éjecté dans l’aorte. Des branchies pour les échanges gazeux sont placées sur
le circuit de retour veineux au cœur, qui est lui-même vascularisé par du sang artériel. Le pigment
transporteur d’O2 est de l’hémocyanine.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
44
Coeur
Aorte post
Sinus
ventral
CP
C
Aorte Branchies
antérieure
Vaisseaux
branchiaux
Artère
abdominale
VB
Figure 5.36 : Système circulatoire des crustacés. Ils présentent un cœur unique constitué d’une seule cavité
contractile suspendue au péricarde par des ligaments élastiques (en vert) qui assurent l’expansion diastolique
[Extrait de: Schmidt-Nielsen K. Réf 349]. Le sang revient dans le péricarde (pointillé rouge CP) et baigne la
masse contractile ; en diastole, il pénètre dans la cavité ventriculaire par des ostia traversant la paroi
myocardique (flèche rouge) ; en systole, la contraction obture ces orifices et le sang est éjecté dans l’aorte. Des
branchies pour les échanges gazeux sont placées sur le circuit de retour veineux au cœur [98]. VB : vaisseaux
branchiaux. C : cœur. CP : cavité péricardique.
A
Figure 5.37 : Système
circulatoire
des
mollusques.
A : cœur d’escargot à
deux chambres, un
ventricule
et
une
oreillette séparés par
une
valve
directionnelle.
B : circulation des
céphalopodes,
avec
deux cœurs accessoires
à basse pression (BP)
sur le retour veineux
vers les branchies, et
un cœur systémique
perfusant les organes à
haute pression (HP).
Aorte
Ventricule
Pericarde
Oreillette
Veine centrale
B
Cœur HP
Branchies
Branchies
Cœur BP
Cœur BP
Tissus
© Chassot 2014
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
45
Les mollusques (escargots, moules) ont subi une très longue évolution (500 millions d’années), et
présentent différents systèmes circulatoires (Figure 5.37). Ils sont les premiers à posséder un cœur à
deux chambres constitué d’un ventricule et d’une oreillette. Celle-ci constitue un double avantage
hémodynamique: 1) elle fonctionne comme un réservoir-tampon entre le retour veineux continu et
l’éjection pulsatile, et 2) sa contraction permet d'élever la pression télédiastolique ventriculaire sans
augmenter la pression veineuse moyenne. Le pigment transporteur d’O2 est également de
l’hémocyanine. A l'exception des céphalopodes, les mollusques ont un système circulatoire ouvert en
périphérie.
Les céphalopodes (poulpes, calmars), les plus évolués d’entre les mollusques, possèdent une
circulation fermée avec un réseau de capillaires, et une double hémodynamique. Premièrement, un
cœur bicavitaire recueillant le sang des branchies le propulse dans la circulation systémique à haute
pression (50-75 mmHg), et, deuxièmement, deux cavités pulsatiles accessoires (droite et gauche)
poussent le sang dans les branchies latérales sous un régime à plus basse pression (20 mmHg). Il y a
donc un seul circuit en série, mais deux régimes de pression différents. C’est la première apparition
d’une circulation respiratoire à basse pression pour faciliter les échanges gazeux et d’une circulation
systémique à plus haute pression pour assurer plus efficacement les besoins métaboliques. Le pigment
est aussi de l’hémocyanine.
Vertébrés
Les ancêtres des vertébrés sont les chordés, qui ressemblent à des petits poissons ou à des vers marins,
mais qui présentent un système nerveux dorsal protégé par une enveloppe fibreuse ancêtre de la
colonne vertébrale, et un cœur fait de plusieurs chambres pulsatiles se succédant le long d’un tube
circulatoire. Ces chambres vont donner successivement le sinus venosus et l’oreillette pour le flux
d’admission, le canal auriculo-ventriculaire valvé, le ventricule et le conus arteriosus pour le flux
d’éjection. On retrouvera les mêmes formations au cours de l’embryogenèse de tous les vertébrés. Au
cours de l’évolution, le tube cardiaque va se plier sur lui-même de manière à amener l’oreillette
d’abord en arrière du ventricule, puis à côté de la chambre d’éjection (Figure 5.38) [265a,363a].
L’avantage de cette configuration est d’éviter que le sang s’arrête et redémarre entre la diastole et la
systole, mais au contraire qu’il soit animé en permanence d’un mouvement tournoyant évitant la perte
d’énergie cinétique et plaçant le volume sanguin toujours en ligne avec la chambre suivante [197a].
Les cyclostomes (lamproie), qui sont des poissons primitifs ressemblant aux anguilles, possèdent
plusieurs cœurs dont un cœur caudal longiligne constitué de deux chambres parallèles entourant un
cartilage central ; la contraction alternée de deux muscles externes longitudinaux fait basculer le
cartilage d’un côté et de l’autre, ce qui vide une chambre et remplit simultanément l’autre. Ce système
ne doit pas être très performant, car il n’a pas été retenu dans l’évolution et n’est présent que chez ces
animaux hors d’âge.
Les poissons (téléostes) présentent un cœur à deux chambres et une circulation unique cœur →
branchies → tissus (Figure 5.39). Un sinus veineux précédant l'oreillette fait office de réservoirtampon sur le retour veineux et un cône artériel très élastique amortit la pulsatilité du sang artériel à la
sortie du ventricule (pression artérielle: 30/15 mmHg). Parmi les poissons, les élasmobranches
(requins) ont un péricarde cartilagineux rigide. De ce fait, la pression intrapéricardique devient
négative (- 4 mmHg) lorsque le ventricule diminue de taille en systole; ce mécanisme facilite
l'aspiration du sang dans l'oreillette en déplaçant le liquide péricardique autour du ventricule et en
dégageant l'oreillette. En diastole, le liquide est refoulé par la dilatation ventriculaire autour de
l'oreillette, ce qui facilite la vidange de celle-ci dans le ventricule. Les squales disposent en plus d’un
système original : la persistance du canal péricardo-péritonéal permet d’évacuer momentanément le
liquide péricardique dans l’abdomen pour augmenter le volume des cavités cardiaque comme on
draine une tamponnade [162b].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
46
Figure
5.38 :
Evolution anatomique
du cœur chez les
vertébrés.
A : poissons primitifs
(cyclostomes)
et
actuels.
B:
amphibiens
(grenouilles)
et
amniotes
(reptiles,
oiseaux
et
mammifères).
Par
rapport
au
tube
primitif, le cœur se plie
progressivement
sur
lui-même pour amener
la
chambre
d’admission
et
la
chambre de chasse
côte-à-côte en position
céphalique
[265a,363a].
C et D : représentation
schématique des flux à
l’intérieur du cœur de
mammifère ;
le
tournoiement continu
est de plus en plus
efficace pour limiter la
perte
d’énergie
cinétique
et
pour
placer
le
volume
sanguin en face de la
chambre
suivante
[197a]. SV : sinus
venosus. O : oreillette.
V : ventricule. CA :
conus arteriosus. Ao :
aorte.
O
O
SV
SV
CA
CA
V
A
Cyclostomes
V
Poissons
O
O
CA
B
Ao
V
Amphibiens
O
CA
Amniotes
SV
O
V
C
V
Poissons
Ao
V
Reptiles
OG
OG
VG
VG
Ao
D
Mammifères : diastole
Mammifères : systole
© Chassot 2014
Les amphibiens (grenouilles, salamandres) ont un cœur à trois chambres (2 oreillettes et 1 ventricule) ;
une oreillette reçoit du sang veineux des tissus et l’autre du sang oxygéné des poumons (Figure 5.40).
Dans le ventricule, ces sangs circulent en parallèle et ne se mélangent pratiquement pas : le sang
veineux est expulsé dans une artère pulmonaire, et le sang artérialisé dans une aorte. Comme il
n’existe qu’un seul ventricule, la pression est identique dans le circuit pulmonaire et dans le circuit
systémique. Chez les amphibiens, cela n’est pas un inconvénient pour deux raisons :
 La pression du système circulatoire est basse (systole : ≤ 40 mmHg, diastole : ≤ 30 mmHg) ;
 Un circuit cutané est monté en dérivation du circuit pulmonaire, car les batraciens assurent
leurs échanges gazeux par la peau lorsqu'ils sont sous l'eau ; ce circuit présente des résistances
vasculaires identiques aux résistances systémiques, donc plus élevées que celles du circuit
pulmonaire.
L’artère pulmonaire est dotée d’une puissante musculature circulaire (C, Figure 5.40). En plongée, sa
constriction diminue le flux pulmonaire, et le sang est dirigé vers la circulation cutanée.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
47
CPP
LP
O
O
SV
SV
CA
CA
V
A
CPP
LP
Systole
V
Diastole
B
© Chassot 2014
Figure 5.39 : Cœur de poisson comprenant deux chambres (oreillette O et ventricule V) et une valve
directionnelle. Chez les requins, il baigne dans un liquide péricardique (LP) qui se déplace selon le rythme
cardiaque. A : en systole, la contraction de ce dernier fait de la place dans le péricarde et le liquide décomprime
l’oreillette, dont le remplissage est facilité. B : en diastole, le ventricule occupe davantage de volume, le liquide
est refoulé autour de l’oreillette, dont la compression accélère la vidange dans le ventricule. CPP : canal
péricardo-péritonéal permettant le drainage du liquide péricardique dans l’abdomen [162b]. SV : sinus venosus.
A
B
Conus
arteriosus
(CA)
C
Ventricule
Oreillette
gauche
Poumons
Coeur
Oreillette
droite
Figure 5.40 : Cœur d’amphibien. A : cœur à 3
chambres (1 ventricule et 2 oreillettes) ; une
oreillette reçoit du sang veineux et l’autre du sang
oxygéné [Extrait de Réf 349]. B : Dans le ventricule,
ces sangs circulent en parallèle et ne se mélangent
pratiquement pas : le sang veineux est expulsé dans
une AP, et le sang artérialisé dans une aorte. Comme
il n’existe qu’un seul ventricule, la pression est
identique dans le circuit pulmonaire et dans le circuit
systémique. La circulation pulmonaire comprend un
circuit cutané (25% des échanges gazeux). Il existe
un sphincter (C) à l’origine de l’AP qui abaisse le
flux pulmonaire et le dévie vers la peau en plongée.
Peau
Tissus
© Chassot 2012
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
48
Les reptiles présentent une transition entre le cœur à trois chambres des amphibiens et la circulation
double avec un cœur à quatre chambres des oiseaux et des mammifères. Ils varient d’un ventricule
unique partiellement divisé par un septum interventriculaire (tortues), à deux ventricules différents
reliés par une communication interventriculaire (pythons, varans) ou à deux ventricules complètement
séparés (crocodiles) (Figure 5.41A). Pour éviter que la pression pulmonaire soit identique à la
pression systémique, une crête musculaire surmontant le septum interventriculaire se contracte en
systole et obstrue plus ou moins complètement la communication entre les deux ventricules. Celle-ci
maintient un shunt, qui peut être droit-gauche ou gauche-droit selon le jeu des pressions. Le shunt est
important chez les tortues, mais minime chez les pythons et les varans [182a]. Les reptiles possèdent
une seule artère pulmonaire mais deux aortes (droite et gauche). Les crocodiliens ont un cœur à quatre
chambres complètement séparées ; toutefois, leur aorte gauche est issue du ventricule droit et
communique avec l’aorte droite (issue du VG) par un orifice appelé foramen de Panizza (Figure
5.41B). La présence d’un shunt variable chez les reptiles est peut-être un reliquat évolutif, mais il a
l’avantage de maintenir une certaine indépendance entre les débits du cœur droit et du cœur gauche,
qui peuvent varier selon les modifications des résistances artérielles pulmonaires et systémiques
lorsque l’animal passe de la respiration en surface à la plongée. Lorsque les deux circulations sont
totalement séparées comme chez les oiseaux et les mammifères, le débit droit et le débit gauche
doivent être rigoureusement identiques.
RA
AP
OD
LA
AoG
AoD
LAo
OG
AoG
RAo
PA OD
OG
AP
AoD
CV
CV
CV
CP
CA
CP
MR
CM
CA
IVS
CP
CA
CM
SIV
SIV
Tortue
Python
© Chassot 2014
Figure 5.41 A : cœurs de reptiles. Chez la tortue, le ventricule est partiellement divisé en cavum pulmonaire
(CP) et cavum arteriosum (CA) par un septum interventriculaire (SIV) laissant une large communication
interventriculaire (CIV) sous les deux aortes, appelée cavum venosum (CV). L’alignemnt des flux fait que le
sang veineux désaturé va principalement dans l’AP et le sang oxygéné principalement dans les aortes. Le shunt
D – G apparaît dès que la pression augmente dans l’AP, comme en plongée. L’anatomie est plus perfectionnée
chez les pythons et les varans : en systole, la contraction de la crête musculaire (CM) sitée à l’extrémité du
septum obstrue complètement la CIV et sépare le sang veineux du sang artérialisé. Le shunt est quasi-inexistant.
De plus, la pression est 2-3 fois plus élevée dans le cavum arteriosum, équivalent au VG, que dans le cavum
pulmonale, équivalent au VD.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
49
AP
AoG AoD
AP
AoG AoD
OG
OD
OG
OD
FP
FP
*
SM
VaD
VaD
VG
VG
VD
VD
SIV
Surface
SIV
Plongée
© Chassot 2014
Figure 5.41 B : cœur de reptiles : crocodiles. Les ventricules sont complètement séparés, mais l’aorte gauche
provient du VD, alors que l’aorte droite provient du VG. A leur racine, le foramen de Panizza (FP) les fait
communiquer entre elles. La valve dentée (VaD) est un ensemble de nodules fibreux situés dans la chambre de
chasse droite. Lorsque le crocodile respire à l’air (Surface), la VaD est ouverte et le flux est libre dans l’artère
pulmonaire (AP), qui reçoit tout le sang veineux désaturé. Comme la pression du VG est plus élevée que celle du
VD, la pression dans l’AoG est plus élevée que celle du VD et sa valve est fermée (*) ; le flux de l’AoG provient
de l’AoD par le foramen de Panizza. En plongée, la contraction de la VaD obstrue complètement le flux vers
l’AP ; de ce fait, la pression monte dans le VD et l’éjection est possible du VD vers l’AoG, qui reçoit alors du
sang désaturé. Il se crée un shunt droite - gauche. AoG : aorte gauche. AoD : aorte droite. SM : septum
membraneux. SIV : septum interventriculaire.
Les oiseaux et les mammifères sont les seuls homéothermes : au prix d’une très forte demande
métabolique, ils maintiennent leur température corporelle aux environs de 37°C, ce qui rend leur
activité indépendante de la température du milieu ambiant. Il sont aussi les seuls à posséder un cœur à
quatre cavités et deux circulations complètement séparées (voir Figure 5.34C page 43).
 Un circuit systémique à haute pression pour répondre aux besoins métaboliques élevés :
120/60 mmHg chez les mammifères, 160/40 mmHg chez les oiseaux ; certaines espèces
d’oiseaux ont une pression systolique jusqu’à 250 mmHg ;
 Un circuit pulmonaire à basse pression pour faciliter les échanges gazeux : 25/15 mmHg chez
les mammifères, 20/10 mmHg chez les oiseaux ; les poumons de ces derniers assurent des
échanges gazeux 50% plus efficaces que ceux des mammifères.
Le point crucial de ce système est l’interdépendance des deux circulations : les deux ventricules
doivent battre de manière synchrone et avoir rigoureusement le même volume systolique,
contrairement aux reptiles dont la CIV permet une ré-équilibration des volumes éjectés en cas de
variations. Le phylum des mammifères s’est détaché des premiers vertébrés terrestres il y a 300
millions d’années, alors que les oiseaux sont les descendants des reptiles. On voit ainsi que l’évolution
suit des voies parallèles dans des branches différentes, et répond aux mêmes contraintes (haut débit
systémique et basse pression pulmonaire) avec des solutions identiques (cœur à 4 chambres séparées).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
50
La masse du cœur représente le 0.6% du poids du corps chez tous les mammifères, y compris
l’homme; dans l'échelle animale, elle varie de 0.8% chez les oiseaux à 0.2% chez les poissons. Le
volume systolique est de 12 mcL chez la musaraigne et de 350 L chez la baleine, mais son rapport à la
masse corporelle est pratiquement identique. La fréquence cardiaque est fonction inverse de la taille :
600 battements par minute au repos chez la musaraigne, 25 chez l’éléphant et 6-12 chez la baleine
bleue. Ceci est lié au fait que la surface corporelle augmente par rapport à la masse du corps lorsque la
taille diminue ; par rapport à la taille, la surface varie au carré mais le volume au cube. Chez les
animaux de petite taille, le maintien de l’homéothermie devient plus dispendieux en énergie à cause de
la déperdition calorique due à une relativement grande surface corporelle par rapport à la taille,
comme c’est le cas chez les nouveau-nés humains. La fréquence est donc réglée sur la consommation
d'O2. L’espérance de vie des mammifères est inversément proportionnelle à leur fréquence cardiaque
au repos (Figure 5.42A). Les gros animaux ont une fréquence basse et vivent plus longtemps, mais le
nombre total de battements au cours de l’existence est étonnament semblable entre les espèces ; il est
de 6-12 • 108, malgré de larges variations de fréquence et de durée de vie (Figure 5.42B) [76a]. Chez
l’homme actuel, le nombre de battement au cours d’une vie est de l’ordre de 2 • 109, parce que
l’hygiène et les soins allongent artificiellement la durée de l’existence.
-1
Fréquence cardiaque (b min )
Durée de vie (ans)
A
1000
500
100
Souris
Hamster
Homme
60
Singe
300
Rat
Marmotte
Chien
100
30
Chat
Giraffe
Cheval
Homme
Tigre
50
5
Lion
Ane
20
Baleine
Eléphant
10
20
30
40
50
10
60
70
80
Durée de vie (ans)
2
Baleine
Cheval
Eléphant
Lion
Chien, tigre
Giraffe, âne
Singe
Marmotte
Rat
Hamster
Souris
10
4
10
6
10
8
10
10
10
12
Battements par existence
Figure 5.42 : A. Relation entre la fréquence cardiaque et la durée de vie chez les mammifères. Sur une échelle
semilogarithmique pour la fréquence, la relation est inversement proportionnelle et presque linéaire. Les
hommes en divergent parce qu’ils utilisent des moyens artificiels pour prolonger l’existence. B. Relation entre la
durée de vie et le nombre de battements cardiaques au cours de leur existence individuelle chez les mammifères.
Cette valeur est pratiquement constante ; elle voisine un milliard (10 • 108) [76a].
L’évolution de l’hémodynamique
De nombreux systèmes circulatoires ont été adoptés dans le règne animal, mais on voit que l’évolution
présente toujours des tendances identiques, même au sein d’ordres animaux aussi différents que ceux
des arthropodes, des céphalopodes, des oiseaux ou des mammifères. Le débit cardiaque passe de 25
ml/min/kg chez les poissons (poïkilothermes) à 75-100 ml/min/kg chez les mammifères et 100-150
ml/min/kg chez les oiseaux (homéothermes). L’augmentation progressive des besoins métaboliques
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
51
pousse à accroître constamment la pression systémique, seule solution capable de répondre à une
demande de plus en plus élevée et à une activité physique de plus en plus variable. Parallèlement, on
voit se différencier un système à basse pression dévolu aux échanges gazeux ; en effet, ces derniers
sont d’autant plus performants que les gradients de pression alvéolo-capillaires sont bas (facilitation
des échanges, membranes alvéolaires/branchiales fines). Cette différenciation existe déjà chez les
poulpes et les calmars, mais est la plus marquée chez les oiseaux : leur pression systémique est en
moyenne 160/40 mmHg, alors que leur pression pulmonaire n’est que 20/10 mmHg. De ce point de
vue, les oiseaux sont les animaux les plus accomplis (Figure 5.43) [98]. La pression critique pour la
circulation pulmonaire semble se situer entre 40 et 50 mmHg. En effet, les animaux dont la pression
systémique est inférieure à 40 mmHg (arthropodes, amphibiens, reptiles) n’ont pas de circuit
pulmonaire différencié. Mais dès que la pression systémique dépasse 50 mmHg, comme chez les
céphalopodes, les mammifères et les oiseaux, on voit apparaître une circulation séparée à basse
pression pour les échanges gazeux. Il est intéressant de noter que, chez l’homme, 50 mmHg est
également la limite de pression artérielle pulmonaire au-delà de laquelle apparaissent les problèmes
cliniques sérieux liés à l’hypertension pulmonaire. Il s’agit probablement d’une limite physiologique
commune à tous les animaux.
Figure
5.43 :
L’augmentation progressive
des besoins métaboliques
pousse
à
accroître
constamment la pression
systémique (traits rouges).
Parallèlement, on voit se
différencier un système à
basse pression dévolu aux
échanges gazeux (traits
bleus). Cette différenciation
existe déjà chez les poulpes,
mais est la plus marquée
chez les oiseaux. La
pression critique pour la
circulation
pulmonaire
semble se situer entre 40 et
50 mmHg : les animaux
dont la pression systémique
est < 40 mmHg n’ont pas de
circuit
pulmonaire
différencié, mais ceux dont
la
pression
systémique
dépasse 50 mmHg, comme
chez les céphalopodes, les
mammifères et les oiseaux,
bénéficient d’une circulation
séparée à basse pression
pour la respiration [98].
Pression (mmHg)
16
0
Pression systemique
150/50
Pression pulmonaire
14
0
120/70
12
0
10
0
80/40
8
0
70/30
60/30
6
0
40/30
4
0
30/20
25/10
20/10
2
0
20/10
25/10
20/10
10/2
30/15
0
Ver Insecte Poisson Tortue Croco Pieuvre Python Mammifère Oiseau
© Chassot 2013
Le ventricule pulsatile est la pompe la plus couramment utilisée dans l’échelle animale, car elle offre
la possibilité de hauts débits sous haute pression. Toutefois, la pulsatilité n’est pas une nécessité pour
les organes périphériques, comme le prouve l’excellente survie à long terme des patients porteurs
d’assistances circulatoires de type turbine à flux continu [366]. La pulsatilité diminue certes le risque
de thrombose périphérique et améliore le flux lymphatique, mais elle est surtout une nécessité absolue
au niveau du cœur pour deux raisons [14,366] :
 Un temps diastolique est obligatoire pour assurer le remplissage de la cavité contractile ;
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
52
 La pompe doit se perfuser elle-même ; la diastole est capitale pour permettre la perfusion
myocardique. En effet, il faut un temps pendant lequel il existe un gradient de pression
suffisant entre l’aorte et la pression sous-endocardique pour garantir l’apport de sang au
ventricule systémique. Une pompe continue ne pourrait pas s’autoperfuser puisqu’il n’y aurait
aucun ΔP entre sa pression d’éjection et celle de sa paroi.
D’ailleurs, la pulsatilité impose deux contraintes majeures qui ont été résolues de manière astucieuse
au cours de l’évolution.
 Au niveau du circuit veineux, l’oreillette est un réservoir-tampon qui permet de passer d’un
retour continu à une éjection cyclique ;
 Au niveau du circuit artériel, l’élasticité des grandes artères et les résistances artériolaires
élevées sont des moyens de dépulser le flux de manière à ce qu’il devienne aussi continu que
possible au niveau capillaire. Chez l’homme, on sait qu'une pulsatilité artérielle élevée
restreint la longévité, puisque la valeur de la pression pulsée (PAsyst – PAdiast) est le facteur
le plus directement lié aux complications cardiovasculaires [291]. Il semble bien que l’arbre
artériel se soit développé de manière à absorber la pulsatilité systolique et à tamponner les
variations systolo-diastoliques en périphérie.
Les coronaires n’apparaissent que lorsque la pression ventriculaire et le métabolisme basal sont élevés.
Chez les poissons et les amphibiens, le myocarde est majoritairement de type trabéculé ; il est perfusé
par des canaux transpariétaux issus de la cavité ventriculaire ; leur flux est assuré par la compressionrelaxation exercée par les fibres musculaires. Chez les reptiles et les sauriens, la proportion de
myocarde compact s’accroît dans la zone sous-épicardique. Chez les oiseaux et les mammifères, tout
le myocarde est de type compact. C’est pour vasculariser ce dernier type de myocarde que le réseau
coronaire s’est développé chez ces animaux.
Conclusions
Le cœur tel que nous le connaissons paraît donc un aboutissement logique de l’évolution pour des
animaux à sang chaud, mais il serait vain de penser que les mammifères sont les rois de la nature.
Même s’ils affichent les records de poids, ce ne fut pas toujours le cas : les dinosaures étaient bien
plus grands que les éléphants. Ils ne dominent pas non plus par le nombre: il en existe à peine plus de
4'000 espèces, alors qu’il y a 9'700 espèces d’oiseaux, 7'000 espèces de reptiles, 45'000 espèces de
poissons, et que les arthropodes (insectes, arachnides, myriapodes et crustacés) représentent environ
un million et demi d’espèces différentes [220]. Le succès des mammifères supérieurs tient
probablement à leur polyvalence et aux prestations de leur cerveau. Toutefois, les êtres complexes sont
l’exception dans la nature, dont la plus grande masse animale est constituée de bactéries, de
protozoaires et de cnidaires. Ce qu’on dessine comme un arbre de l’évolution dirigé vers les
mammifères supérieurs (Figure 5.33 page 41) est en réalité un buisson immense et touffu, dont
émergent quelques branches frêles dont le seul mérite est de produire parfois de jolies fleurs.
Les modifications progressives de l’appareil circulatoire montrent que tous les embranchements des
animaux évoluent en fonction des mêmes contraintes et aboutissent à des résultats similaires, un
phénomène appelé convergence. Chaque phylum développe des espèces de plus en plus sophistiquées
marquées par une augmentation constante du métabolisme, de la complexité et de l’indépendance visà-vis de l’environnement. Pour chaque espèce, le succès tient à un équilibre réussi entre sa
spécialisation ou sa complexité d’une part, et sa flexibilité ou sa robustesse de l’autre.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
53
L'hémodynamique dans l'évolution animale
L’augmentation progressive des besoins métaboliques pousse à accroître constamment la pression
systémique. Dès que celle-ci dépasse 50 mmHg, on voit apparaître une circulation séparée à basse
pression pour les échanges gazeux. La chambre contractile (ventricule) est le système de pompe le
plus performant, mais il implique une pulsatilité périphérique. Plusieurs types de cœur existent dans la
nature: tubes péristaltiques (vers), cœurs en série montés sur l'aorte (insectes), chambre contractile
unique (crustacés), cœur à deux chambres (une oreillette et un ventricule, chez les mollusques et les
poissons), cœur à trois chambres (deux oreillettes et un ventricule, chez les amphibiens), cœur à quatre
cavités et deux circulation séparées (oiseaux, mammifères). Chez les mammifères, le cœur représente
0.6% de la masse corporelle. La fréquence cardiaque de base est directement proportionnelle à la
consommation d'O2 et inversement proportionnelle à la taille.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
54
Physiopathologie de la systole
La fonction myocardique systolique est déterminée par six facteurs principaux: la précharge, la
postcharge, la contractilité, la fréquence, la synchronisation et l'apport d'oxygène. La performance de
ces éléments est réglée par trois systèmes : le mécanisme de Frank-Starling, les catécholamines
circulantes et l’innervation autonome sympathique et parasympathique.
Déterminants de la fonction systolique
La précharge
Le volume de remplissage télédiastolique du ventricule détermine le degré d'étirement des fibres
musculaires avant leur contraction: c'est la précharge, ou tension de paroi ventriculaire en télédiastole.
Le volume et la pression intracavitaire ne présentent pas une relation linéaire entre eux ; leur rapport
est défini par la compliance de la chambre cardiaque (voir Figure 5.67 page 87). Pour le même
volume, les pressions de remplissage varient selon l'élasticité de la cavité concernée, son volume et le
degré de tension de sa paroi; la courbe de compliance est curvilinéaire. De ce fait, la mesure statique
de la pression auriculaire droite (PVC) ou gauche (PAPO) est un critère de remplissage très peu
pertinent.
Les déterminants de la précharge ventriculaire sont nombreux et pas tous mesurables en clinique: le
volume circulant, la pression endothoracique, la pression intrapéricardique, la pression abdominale, la
pression critique de fermeture de la veine cave inférieure, le tonus veineux central, le débit veineux
périphérique (activité musculaire de pompe), la résistance veineuse, la contraction auriculaire et la
position du corps.
Principe de Frank-Starling
La loi de Frank-Starling (Frank 1895, Starling 1918) illustre la relation qui existe entre l'étirement des
fibres musculaires et leur performance contractile (relation force – longueur) : un muscle isolé se
contracte d’autant plus puissamment qu’il est au préalable lesté d’un poids plus important. Pour le
cœur, cette loi exprime le rapport entre la tension de paroi (volume ou pression télédiastoliques) et la
performance systolique fournie : la force contractile du VG dépend directement de la tension des
fibres myocardiaques en fin de diastole ; elle est donc proportionnelle au volume télédiastolique
(VtdVG) (Figure 5.44). Cette relation force – longueur suit une pente de recrutement jusqu'à un
plateau au-delà duquel il n'y a plus de modification : une augmentation de volume ne conduit plus qu'à
une augmentation des pressions de remplissage, mais non à une amélioration de la performance
systolique. A haut volume de remplissage, la courbe de Starling du cœur sain ne redescend pas au-delà
du plateau, mais il peut arriver que la surcharge liquidienne occasionne une dilatation du VD et un
empiètement du septum interventriculaire dans la cavité du VG ; le remplissage diastolique de ce
dernier est alors freiné ; en fait, le VG recule sur sa courbe normale puisque son Vtd réel diminue
[365]. Le cœur normal fonctionne sur le dernier tiers de la partie ascendante de la courbe, ce qui lui
offre une certaine réserve de précharge.
Les sarcomères myocardiques opèrent normalement près de leur longueur maximale (2.2 µm): à 80%
de celle-ci, ils ne développent encore que 10% de leur puissance [290]. L’activation contractile avec
l’étirement des myofibrilles est le fruit d’une sensibilisation progressive des sarcomères au Ca2+, et
non à une plus grande amplitude des variations de la [Ca2+]i comme c’est le cas lors d’une stimulation
β, par exemple [130]. Le mécanisme principal est lié au fait qu’une fibre musculaire étirée devient
plus fine ; les éléments des sarcomères disposés en parallèle sont ainsi rapprochés les uns des autres,
ce qui facilite les interactions actine – myosine et augmente l’affinité de la TnC pour le Ca2+
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
55
[129,178]. De plus, le rapprochement des filaments d’actine et de myosine augmente la course de la
translation lors de la flexion des têtes de myosine. La dysfonction systolique rencontrée
habituellement en sortant de CEC pourrait être liée à l’œdème myocardique (volume liquidien de la
CEC, cardioplégie, etc) qui augmente l’espace interstitiel entre les fibres d’actine et de myosine, et
diminue la course des têtes de myosine. Un deuxième mécanisme est lié à la connectine; cette longue
molécule qui parcourt le filament de myosine d'un disque Z à l'autre est étirée comme un élastique en
diastole ; plus l’élongation est importante, plus elle est tendue et plus son élasticité contribue à l’effet
Frank-Starling lorsqu’elle reprend sa forme [381]. Il est surprenant de constater que des matériaux dits
intelligents comme le nitinol (alliages nickel – titanium), susceptibles de se contracter brusquement
sous l’effet d’une stimulation thermique ou électrique, présentent également un phénomène de
Starling : leur étirement au repos augmente leur force de contraction [397].
Volume
systolique
Normal
Dysfonction
diastolique
ΔVS
Dysfonction
systolique
ΔP
VD
© Chassot 2012
Volume télédiastolique
Figure 5.44 : Courbes de Frank-Starling du VG illustrant la relation entre la précharge (pression ou volume
télédiastolique) et la performance systolique (débit cardiaque ou volume systolique). La courbe normale (en
jaune) présente une partie ascendante (phase de recrutement, pente accentuée) où les variations de la précharge
(ΔP) modifient de manière importante le volume systolique (ΔVS) ; le genou de la courbe est suivi d’un plateau.
Les flèches verticales indiquent le point auquel cesse le recrutement du volume systolique par l’augmentation de
la précharge. En cas de dysfonction systolique (en rouge), la courbe est déplacée vers le bas et aplatie (les ΔVS /
ΔP sont faibles), le genou est déplacé vers la droite, et la courbe redescend après son point d’inflexion (flèche
verticale rouge) à cause de la dilatation ventriculaire. En cas de dysfonction diastolique (en bleu), la courbe est
très verticale (le VS dépend fortement de la précharge) ; elle est déplacée vers la droite (pression de remplissage
élevée). La courbe de Starling du VD (en pointillé) est très plate, ce qui signifie que le débit du VD normal ne
dépend que très peu de la précharge.
Plus la pente de la courbe de Frank-Starling est raide (phase de recrutement), plus le volume éjecté est
dépendant du remplissage. Plusieurs types de courbes peuvent se présenter (Figure 5.44).
 VG normal : pente de recrutement (volume systolique dépendant de la précharge, de petites
variations de remplissage entraînent de grandes variations de volume systolique) et plateau
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
56
horizontal (absence d’effet du remplissage). Le genou de la courbe représente la précharge
nécessaire à obtenir le volume systolique maximal.
 Dysfonction diastolique : pente de recrutement très redressée (haute dépendance du volume
systolique par rapport à la précharge) et déplacée vers la droite (pression de remplissage
élevée) ; plateau peu marqué (le VS reste précharge-dépendant même à haut remplissage).
 Dysfonction systolique : pente très faible (peu d’amélioration de la performance systolique par
augmentation du remplissage), genou abaissé et déplacé vers la droite, et redescente de la
courbe au-delà du genou car la surcharge liquidienne entraîne une dilatation du VG et une
péjoration de sa fonction.
 VD normal : courbe beaucoup plus horizontale que celle du VD, ce qui signifie que le VD
maintient le même débit systolique sur une vaste plage de volumes de précharge différents.
La courbe la plus rigoureuse est obtenue en affichant le volume télédiastolique (Vtd) en abscisse et le
volume systolique (VS) en ordonnée. En effet, la pression de remplissage est liée au volume par la
compliance et ne traduit qu’indirectement la précharge. D’autre part, la performance systolique est
mieux définie par le volume systolique, qui est une donnée première indépendante, alors que le débit
cardiaque est une valeur qui dépend de la fréquence ; or les variations de cette dernière maintiennent le
débit stable lorsque le volume systolique change.
Déterminants de la fonction systolique (I)
La fonction systolique est déterminée par six facteurs principaux: la précharge, la postcharge, la
contractilité, la fréquence, la synchronisation et l'apport d'oxygène.
Principe de Frank-Starling: la force de contraction du myocarde dépend de la tension de paroi
télédiastolique. La courbe de Starling du VG présente une pente importante (phase de recrutement),
où le volume systolique (VS) augmente avec le volume télédiastolique (Vtd), jusqu'à un genou au-delà
duquel sa pente devient nulle et où les variations de Vtd ne modifient plus le VS (plateau). Formes
particulières de la courbe de Starling:
- Insuffisance systolique: courbe très aplatie, pente faible, genou déplacé vers la droite,
redescente au-delà du genou; le VS dépend peu du Vtd
- Insuffisance diastolique: courbe très redressée, pente forte, absence de plateau; le VS est
hautement dépendant du Vtd
- VD: courbe très plate; le VS varie très peu avec la précharge
La postcharge
La postcharge est la force de résistance que rencontrent les fibres myocardiques lors de leur
contraction. Pour le coeur, cette force est définie comme la tension de paroi ventriculaire maximale en
cours de systole (σ); c'est une force par unité de surface (dynes/cm2); elle est le facteur déterminant de
la consommation d'oxygène du myocarde (mVO2). La fraction de raccourcissement du myocarde et sa
vélocité de contraction sont inversément proportionnels à la postcharge; la baisse de performance
causée par une augmentation de postcharge peut être contre-balancée jusqu'à un certain point par un
recrutement de précharge; ceci rétablit le volume systolique (VS). Le VG est d'autant plus sensible à la
postcharge que sa performance globale est abaissée ; c’est la base de la thérapeutique de l’insuffisance
ventriculaire par des vasodilatateurs. Le VD est très sensible aux variations de sa postcharge ; sa
performance systolique baisse considérablement lorsque les résistances artérielles pulmonaires
augmentent (Figure 5.45). L'état contractile du myocarde détermine la force télésystolique à laquelle
le raccourcissement cesse.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
57
Index
cardiaque
2
(L/min/m )
Figure
5.45 :
Effet
de
l’augmentation de la postcharge
sur le débit systolique du VG.
Alors que le VG normal est peu
sensible à la postcharge dans les
limites physiologiques (en jaune),
le ventricule insuffisant (en rouge)
diminue nettement sa performance
lorsque la résistance à l’éjection
augmente. Le VD (en pointillé)
est
très
sensible
à
une
augmentation de postcharge, qui
provoque
une
dilatation
ventriculaire et une baisse
importante du débit.
3
Norma
l
2
Dysfonction VG
VD
1
50
0
100
0
150
200
-5
0
RAS (dynes
• s • cm0 )
La tension de paroi du ventricule (σ) est directement proportionnelle à la pression et au diamètre du
VG, et inversement proportionnelle à son épaisseur de paroi: c'est la loi de Laplace. Dans la mesure où
le ventricule peut être assimilé à une sphère, elle se formule mathématiquement de manière simple:
σ = (P • r) / 2h
où:
σ : tension de paroi (dynes/cm)
P: pression intraventriculaire (mm Hg)
r: rayon interne du VG (cm)
h: épaisseur de paroi (cm)
Le VG étant un ellipsoïde, la formule appropriée s’écrit :
σ = ( P • D • 0.33 ) / 4 h (1 + [ h / D] )
La tension de paroi est une force exercée par unité de longueur d'une circonférence, exprimée en
gm/cm ou en dynes/cm (1 gm = 981 dynes); le stress de paroi est une force exercée sur une surface,
exprimée en dynes/cm2. Comme les dimensions du ventricule changent au cours de la systole, le stress
de paroi varie considérablement pendant l'éjection (Figure 5.46). Le stress protosystolique est le
double du stress télésystolique, puisque la cavité a diminué de volume et que la paroi s’est épaissie au
cours de l'éjection [206]. Cette variation est plus ample que celle des pressions au cours de la systole;
de ce fait, les résistances vasculaires périphériques surestiment les baisses de postcharge secondaires à
une vasodilatation, mais sous-estiment les augmentations liées à une vasoconstriction [219].
Dans un système pulsatile comme la circulation artérielle, la postcharge est représentée par cinq
composantes.
 L’impédance aortique (Z0) est le rapport entre la pression instantanée et le flux ; elle est
compliquée à calculer et sa mesure n’est pas réalisable en clinique :
Z0 = ( ρ • √ Vmax • ΔP ) ( π • r2 ).
Elle représente la postcharge des gros vaisseaux pulsatiles. On peut en avoir une
approximation par l’image des modifications du flux aortique à l’échocardiographie (Figure
5.47).
 La résistance artérielle systémique (RAS) calculée par la loi d’Ohm ; elle ne s’applique qu’à
un système non-pulsatile et représente la postcharge due aux petites artérioles périphériques :
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
58
RAS = ( PAM - POD ) / DC
où:
PAM: pression artérielle moyenne
POD: pression de l'oreillette droite
DC: débit cardiaque
 L’onde réfléchie par la périphérie artérielle (voir Couplage ventriculo-artériel), qui représente
10% de la postcharge totale.
 La compliance artérielle (Ca); son calcul peut être simplifié en mesurant le rapport entre le
volume systolique (VS) et la pression artérielle différentielle (PAdiff = PAsyst – PAdiast) :
Ca = VS / PAdiff [68].
 La viscosité sanguine ; l'hématocrite idéal (32-35%) est une pondération optimale entre le
transport d'O2 maximal pour le travail cardiaque minimal.
Figure
5.46 :
Evolution
schématique de la pression
intraventriculaire gauche (P), de
l'épaissaur
de
la
paroi
ventriculaire (h), du diamètre de
la cavité, et de la tension de paroi
ou stress pariétal (σ) au cours de
la contraction isovolumétrique (A)
et de la phase éjectionnelle (B) de
la systole. Le stress de paroi, qui
est la postcharge réelle du VG,
diminue au cours de l'éjection ; en
protosystole, il est le double de sa
valeur en télésystole. Le calcul du
stress maximal doit se faire avec
la pression systolique maximale
mais avec la mesure du diamètre
télédiastolique qui est celui de la
protosystole,
avant
son
raccourcissement
pendant
l’éjection :
σmax = (PAsyst • Dtd) / 2 h.
Tension de
paroi (σ)
Pression intraventriculaire
Epaisseur de
paroi
ventriculaire
Diamètre
A
A
B
B
290 ms
530 ms
Figure 5.47 : Images échocardiographiques trasoesophagiennes (vue transgastrique) du flux aortique. A : Flux
normal ; la vélocité maximale (Vmax) à travers la valve aortique est de 130 cm/s, la durée d’éjection de 290
msec. B : Lors du clampage de l’aorte thoracique basse, la Vmax baiss à 60 cm/sec et la durée d’éjection est
ralentie à 530 msec. C’est l’illustration du retentissement hémodynamique de l’augmentation du stress de paroi
sous l’effet d’une augmentation aiguë de l’impédance aortique.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
59
L'impédance et la résistance ne sont identiques que si la fréquence est nulle et le système dépulsé. Les
unités utilisées traditionnellement sont les dynes • sec • cm-5, mais on peut simplifier le calcul en
utilisant les unités Wood: mmHg/L/min; la conversion des unités Wood en unités standard se fait en
multipliant par 80. Comme elles varient de manière inversément proportionnelle à la surface
corporelle, les résistances sont de préférence indéxées à cette dernière.
La postcharge et le volume éjecté avec une certaine vélocité par le ventricule déterminent la pression
artérielle. La pression artérielle moyenne (PAM) est le produit du débit cardiaque et des RAS. La
pression systolique (PAsyst) dépend de l’élasticité artérielle et des caractéristiques d’éjection du VG.
La pression diastolique dépend des RAS, de l’élasticité artérielle et de la durée de la diastole. La
pression pulsée ou différentielle (pulse pressure) (PP = PAsyst – PAdiast) dépend de la différence de
volume sanguin présent dans une artère entre la systole et la diastole (ΔV) et de la compliance de cette
artère (ΔV/PP) [406].
La dimension du ventricule est le point majeur dans la détermninbation de la postcharge: le stress de
paroi est directement proportionnel au rayon et inversement proportionnel à l’épaisseur de la paroi.
Deux ventricules de tailles différentes, respectivement de 4 et 7 cm de diamètre, fournissant les mêmes
prestations hémodynamiques (PAM 75 mmHg, DC 5 L/min, RAS 1200 dynes•s•cm-5) ont un stress de
paroi très différent : le σ du plus petit (rayon 2 cm) est de 45 dynes•cm-2, alors que le σ du plus grand
(rayon 3.5 cm) est de 126 dynes•cm-2, soit le triple [348]. La même résistance à l'éjection représente
une postcharge d'autant plus élevée que le ventricule est plus grand. Ainsi la taille du ventricule est un
facteur majeur de sa consommation d’O2. La dilatation est donc toujours dangereuse ; elle est un
déterminant primordial du pronostic clinique.
La postcharge détermine la répartition du travail ventriculaire entre l'élévation tensionnelle
isométrique et le raccourcissement des fibres provoquant l'éjection (voir Relation pression/volume).
Elle détermine également l’un des éléments de la contractilité: une soudaine élévation de postcharge
induit une distension ventriculaire et une baisse de la vélocité d’éjection momentanées, suivies d'une
augmentation persistante de la contractilité; c'est l'effet Anrep [264]. Il est plus prononcé sous
anesthésie ou lors d'insuffisance cardiaque. Il est probablement dû à une augmentation du Ca2+
sarcoplasmique sous l’effet du stress de paroi. Face à une augmentation aiguë de postcharge, la
dilatation est caractéristique du VD mais non du VG ; ce dernier baisse sa performance systolique sans
variation notable de dimension.
Déterminants de la fonction systolique (II)
La postcharge est la tension de paroi maximale en systole. Par simplification, elle peut se définir par la
loi de Laplace: σ = (P • r) / 2 h. Elle est composée de 5 éléments:
- Impédance aortique (pression/flux instantané), résistance dans un système pulsé
- Résistance périphérique (RAS = (PAM – POD) / DC), basée sur la loi d'Ohm pour un
système non-pulsé
- Onde de pression réfléchie
- Compliance artérielle (VS / PAdiff)
- Viscosité sanguine
La postcharge effective augmente linéairement avec les dimensions du ventricule. La même pression
artérielle représente une postcharge d'autant plus grande que le ventricule est plus dilaté. Le VG est
d'autant plus sensible à la postcharge que sa performance systolique est abaissée. Le VD se dilate
immédiatement lorsque sa postcharge augmente de manière aiguë.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
60
La fréquence
La fréquence augmente le débit cardiaque jusqu'à 120-180 battements/minute; au-delà, le débit effectif
baisse [141]. La fréquence maximale baisse avec l’âge à cause de la dysfonction diastolique et du
risque ischémique. Lors d'une accélération du rythme cardiaque, les quantités de calcium libres
sarcoplasmiques dépassent les possibilité de récupération des pompes du reticulum sarcoplasmique,
donc les taux augmentent: c'est l'effet inotrope positif de la fréquence, ou effet Bowditch ou Treppe
Phenomenon [247]. Le bénéfice de ce phénomène est perdu lorsque la fréquence devient telle que
l'accumulation diastolique de Ca2+ rigidifie le ventricule et que l’accélération du rythme raccourcit la
diastole à tel point que le remplissage du ventricule devient insuffisant. Cet effet inotrope est
inexistant lors de dysfonction ventriculaire, car la [Ca2+] est trop basse dans le reticulum
sarcoplasmique.
La tachycardie peut être le seul moyen de compensation d'une insuffisance ventriculaire peu apparente
(exemple: cardiomyopathie alcoolique). Comme la tachycardie raccourcit proportionnellement
beaucoup plus la diastole que la systole, la perfusion coronarienne peut être rapidement compromise.
Le myocarde pâtit doublement de la tachycardie à cause de l'augmentation de sa consommation d'O2
(↑mVO2) et du raccourcissemnt du temps de perfusion coronarienne diastolique (↓DO2 ). Lors d'une
bradycardie, le long temps de remplissage permet l'accumulation d'un fort volume télédiastolique,
mais la tension de paroi nécessaire à l'éjecter va augmenter (loi de Laplace); le ventricule se distend, le
travail cardiaque et la mVO2 s'élèvent. Ce risque de dilatation est particulièrement élevé en présence
d’une insuffisance aortique, même discrète.
Moins il est compliant (insuffisance diastolique), moins le coeur peut varier son volume d'éjection,
donc plus il dépend de la fréquence pour assurer son débit et de la contraction auriculaire pour
maintenir son remplissage. Dans l’insuffisance diastolique (défaut de compliance ventriculaire), la
relation de la fréquence au débit cardiaque est double :

Ne pouvant guère varier son volume télédiastolique, le ventricule dépend de la fréquence pour
assurer son débit ; ce dernier baisse en cas de bradycardie (comme chez le nouveau-né) ;
 Le remplissage diastolique étant lent à cause du manque de compliance, la tachycardie
diminue le volume systolique ; le débit baisse en cas de tachycardie.
Il existe donc une fréquence optimale pour chaque condition hémodynamique; en éloigner un malade
souffrant de dysfonction ventriculaire peut le décompenser.
Déterminants de la fonction systolique (III)
La tachycardie raccourcit proportionnellement davantage la diastole que la systole; la fréquence
maximale au-delà de laquelle le débit cardiaque baisse varie entre 120 et 180 batt/min selon l'âge;
l'augmentation de fréquence a un effet inotrope positif. La tachycardie augmente la mVO2
myocardique et baisse le DO2 coronarien (risque ischémique élevé). La bradycardie risque de dilater le
ventricule à cause du long temps de remplissage (particulièrement dangereux en cas d'insuffisance
aortique).
En cas d'insuffisance diastolique (défaut de compliance ventriculaire), le débit est étroitement
dépendant de la normocardie; il baisse lors de tachycardie (temps de remplissage insuffisant) et de
bradycardie (impossibilité d'augmenter le Vtd pour maintenir le débit cardiaque).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
61
La synchronisation
La systole auriculaire contribue normalement pour 15-20% au remplissage ventriculaire, mais cette
proportion peut augmenter jusqu'à 50% dans les cas de très mauvaise compliance diastolique
(hypertrophie ventriculaire, par exemple). Le passage en rythme nodal ou en FA perturbe d'autant plus
la performance systolique que le ventricule est plus rigide. D'autre part, la perte du rythme sinusal
oblige à augmenter la pression moyenne de l'oreillette (remplissage) pour maintenir la même pression
télédiastiolique ventriculaire.
Les arythmies ventriculaires (extrasystoles, tachycardies) et les blocs de conduction modifient la
géométrie et la vitesse de la contraction, donc diminuent le volume systolique effectif et la vélocité
d'éjection. Il en est de même pour les zones akinétiques ou dyskinétiques. Dans ces différentes
conditions, la contraction du VG ne progresse plus de l’apex vers la CCVG mais démarre n’importe
où dans la paroi et se propage par des voies aberrantes. Il arrive qu’une paroi se contracte avant ou
après les autres, ce qui amène à un bascule du volume sanguin à l’intérieur du ventricule sans qu’il n’y
ait d’éjection. La correction de ce Pendelblut est à la base de la thérapeutique de l’insuffisance
ventriculaire par resynchronisation avec un pace-maker triple chambre (voir Chapitre 12, Chirurgie de
l’insuffisance cardiaque).
La contractilité
La contractilité est la capacité inhérente du myocarde à se contracter indépendamment des conditions
de charge. C’est la force de raccourcissement par unité de temps. Elle est l’équivalent d’une puissance.
La définition physique de la puissance est le travail effectué dans un certain laps de temps :
 Travail / Temps
 Pression • Débit
 Pression • Flux
en : g • cm / s
en : (g/cm2) • (cm3/s) = g • cm / s
en : (g/cm2) • (cm3/s) = g • cm / s
Elle définit la quantité de travail que le myocarde peut fournir pour une charge donnée par unité de
temps. A fréquence, précharge et postcharge constantes, elle est d'autant meilleure que la contraction
maximale et le pic de pression généré sont atteints plus rapidement.
La contractilité est tributaire de la précharge et de la postcharge, mais elle dépend aussi de
l’imprégnation neuro-humorale de l’organisme : tonus sympathique central, taux de catécholamines
circulantes, frein parasympathique et cholinergique. Le ventricule est également sensible à plusieurs
hormones qui modifient sa contractilité: angiotensine II, vasopressine, facteur natriurétique auriculaire
(ANF), prostaglandines, sérotonine, thyroxine. Celles-ci ont des effets différents selon que l'endocarde
est intact ou non, ce qui tend à démontrer le rôle important de ce dernier comme modulateur de la
fonction cardiaque et comme médiateur de l'action des substances circulantes. D'autre part, les
recherches menées sur l'endothélium vasculaire ont attiré l'attention sur le rôle possible de l'endocarde
comme lieu de sécrétion paracrine: l'endothéline qu'il produit a un effet inotrope positif puissant par
sensibilisation des protéines contractiles au Ca2+ [257]. Cet effet semble être complémentaire à l'effet
Frank-Starling, car il se traduit par une prolongation de la durée de contraction, alors que l'étirement
des fibres augmente le pic et la vélocité de la contraction [90]. Inversement, les cytokines (TNFα,
interleukines, par exemple) ont un effet inotrope négatif marqué par le biais d'une synthèse accrue de
NO• endocardique [119].
On ne dispose malheureusement d'aucune mesure de contractilité indépendante des conditions de
charge qui soit applicable en clinique. Un certain nombre de mesures s’en approche : vélocité de
raccourcissement circonférentiel, indice de Tei, puissance éjectionnelle maximale, élastance
ventriculaire maximale. Elles sont détaillées au Chapitre 6 (voir Monitorage de la fonction systolique
du VG). Bien qu’étant l'indice de fonction systolique le plus couramment utilisé, la fraction d'éjection
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
62
n’est pas une mesure de la contractilité ventriculaire, car elle dépend entièrement des conditions de
charge (voir Fraction d’éjection); elle se rapproche plutôt d'une mesure de travail.
Déterminants de la fonction systolique (IV)
La systole auriculaire contribue pour 15-20% au remplissage du ventricule; cette proportion augmente
jusqu'à 50% en cas d'insuffisance diastolique. La perte du rythme sinusal oblige à augmenter la POG
moyenne pour maintenir la même Ptd ventriculaire.
Les blocs de branche désynchronisent la contraction et diminuent l'efficacité de l'éjection.
Contractilité: capacité inhérente du myocarde à se contracter indépendamment des conditions de
charge, équivalant à une puissance (travail / temps): raccourcissement / temps, pression • débit.
Difficile à mesurer en clinique indépendamment des conditions de charge; approximations possibles:
vélocité de raccourcissement, puissance éjectionnelle, Emax. La fraction d'éjection n'est pas une
mesure de contractilité.
Relation pression – volume (P/V)
Boucle Pression / Volume
La définition physique du travail est le produit d’une force (F) par un déplacement (D) ou d'une
pression (P) par un volume (V):
 Travail = Force • Distance
 Travail = Pression • Volume
en : g • cm
en: (g / cm2) • cm3 (= g • cm)
Un graphique comportant le volume ventriculaire en abscisse et la pression générée en ordonnée
illustre un cycle cardiaque sous la forme d’un quadrilatère dont la surface est l’équivalent du travail
éjectionnel et dont les côtés correspondent à la contraction isovolumétrique, à l’éjection systolique, à
la relaxation isovolumétrique et au remplissage diastolique (Figure 5.48A).
En variant la précharge de l’individu observé, on obtient une famille de courbes isomorphes mais de
surfaces différentes correspondant à des remplissages différents. Cependant, tous les points
télésystoliques (points 3) apparaissent alignés sur une quasi-droite (Figure 5.48B). Cette courbe est
l’élastance maximale (Emax) du ventricule, dont la pente est une expression de la contractilité du
ventricule ; sa valeur normale est 4.0 - 5.5 mmHg/ml pour le VG [10,341]. Elle a été dénommée
élastance par analogie à un élastique qui serait tendu en télédiastole et dont le retour à la dimension de
base représenterait l’éjection systolique. Elle est indépendante de la précharge, mais faiblement
sensible à la postcharge. Cette ligne ne rejoint pas l'abscisse (volume) au zéro de l'ordonnée (pression),
mais à un point V0 non-nul, qui représente le volume ventriculaire résiduel; ce dernier varie selon le
degré de dilatation du ventricule, et déplace l'ensemble de la boucle vers la droite lorsqu'il augmente
[341].
Une augmentation de la précharge déplace le point télédiastolique (point 1) vers le haut et vers la
droite en suivant la relation pression-volume diastolique qui n’est autre que la compliance
ventriculaire. Cette dernière est curvilinéaire : très horizontale à bas volume de remplissage, elle se
redresse progressivement lorsque le volume ventriculaire augmente (voir Figure 5.67 page 87). Si la
contractilité reste inchangée, une diminution de postcharge augmente le volume éjecté alors qu'une
augmentation le diminue; ce dernier phénomène est beaucoup plus marqué à basse contractilité,
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
63
puisque la pente Emax est faible et que de petites variations de l'ordonnée (pression) se traduisent par
de fortes variations de l'abscisse (volume) [188].
A
Pression
B
Pression
Emax
2
3
1
4
Compliance
V0
Volume
© Chassot 2012
Compliance
Volume
V0
Figure 5.48 : Boucle pression – volume. A : Boucle posée sur la courbe de compliance diastolique. 1 : point
télédiastolique. 1 → 2 : contraction isovolumétrique. 2 : début de l’éjection. 2 → 3 : phase de l’éjection
systolique. 3 : point télésystolique. 3 → 4 : relaxation isovolumétrique. 4 : début du remplissage. 4 → 1 :
remplissage diastolique. B : Construction de la pente d’élastance maximale Emax (en bleu) par l’alignement des
points télésystoliques d’une famille de courbes obtenues à des précharges différentes chez le même individu.
V0 : volume ventriculaire résiduel.
Pression
A
Pression
Emax
B
Emax
Téj
Téj
Tpr
V0
Tpr
Compliance
VS
Compliance
Volume
© Chassot 2012
V0
VS
Volume
Figure 5.49 : Définition du travail ventriculaire (Pression • Volume). A. Le travail éjectionnel externe (Téj) est
équivalent à la surface du quadrilatère de la boucle P • V. Le travail interne de pression (Tpr) est équivalent à la
surface du triangle compris entre la pente Emax, la courbe de compliance et le point V0 correspondant au
volume ventriculaire à pression nulle. Flèche jaune : volume systolique (VS). B. Travail ventriculaire lors
d’augmentation de la postcharge (hypertension artérielle, sténose aortique, clampage de l’aorte). La pente Emax
(contractilité) est identique. La surface du quadrilatère reste la même, mais il est allongé vers le haut (haute
pression) et déplacé vers la droite ; le travail externe (Téj) reste le même, mais le volume éjecté est plus faible
(flèche jaune, VS). Par contre, le triangle représentant le travail de pression (Tpr) a considérablement augmenté.
Le rapport Téj / Ttotal est plus faible, donc l’efficience du moteur ventriculaire a baissé. La mVO2 augmente
pour fournir le même travail éjectionnel.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
64
Le travail cardiaque externe (TCE) est défini par la surface de la boucle pression-volume (Travail =
Pression • Volume) ; c’est le travail fourni lors de l’éjection. Le travail cardiaque interne (TCI) est
représenté par la surface triangulaire comprise entre la compliance, l'élastance et la ligne de relaxation
isovolumétrique (triangle compris entre les points 0 – 4 – 3) (Figure 5.49A). Il représente le travail
nécessaire à la mise sous pression du système ventriculaire. D'un point de vue énergétique, le travail
cardiaque externe nécessité par l'éjection consomme les 30-40% de la mVO2 totale. Le travail interne
de pression consomme également 30-40% de la mVO2, et les flux ioniques intracellulaires le 20%
restant. Seule la composante éjectionnelle fournit un travail externe. L’efficience du moteur
ventriculaire est le rapport du travail fourni (éjection) par rapport à la mVO2 totale (TCE + TCI) ; elle
est donc de 30-40%, ce qui est un bon rendement pour un moteur [290]. Une surcharge de pression
déplace la boucle P/V éjectionnelle vers le haut et vers la droite (Figure 5.49B); pour conserver la
même surface (travail éjectionnel identique), la boucle devient plus étroite. Le volume éjecté est alors
plus petit. Par contre, le travail interne de pression a augmenté de manière considérable. L’efficience
du ventricule a diminué. La surcharge de pression est énergétiquement plus coûteuse qu'une surcharge
de volume, et la postcharge a une influence considérable sur l'efficience mécanique du myocarde et
sur sa consommation d’O2. Les ventricules sont plus performants comme pompe-volume que comme
pompe-pression. On comprend dès lors l'importance de baisser la postcharge lors d'insuffisance
ventriculaire.
Pression
Figure
5.50 :
Boucle Pression •
Volume
lors
d’insuffisance
ventriculaire. La
baisse de la pente
Emax
et
la
restriction de la
compliance
ventriculaire
diminuent
le
volume éjecté et le
travail
externe
fourni.
Trois
exemples
de
boucles Pression •
Volume illustrent
cette
variation
chez un même
patient [142]: en
situation normale,
sous stimulation
catécholaminergiq
ue et sous βbloqueur ;
cette
dernière image est
identique à celle
de l’insuffisance
ventriculaire.
Emax
Emax ↓
VS ↓
Compliance
Volume
V0
Contrôles
Stimulation β
β −blocage
Lorsqu’on dispose d’un cathéter pulmnaire de Swan-Ganz, on peut calculer le travail ventriculaire par
la formule : LVSW (left ventricular stroke work) = [1.36 • (PAM – PAPO) • VS] / 100 (en g•m).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
65
La relation pression-volume télésystolique est un excellent indice de l'état inotrope du ventricule: une
intervention inotrope positive augmente la pente de la courbe Emax, donc augmente le travail fourni et
la pression télésystolique (Pts) atteinte par le ventricule, alors qu'un effet inotrope négatif les abaisse.
La pente de la courbe diastolique (compliance) peut être modifiée par la pathologie ou la
thérapeutique; un effet lusitrope positif déplace la relation pression-volume diastolique vers le bas et
vers la droite (compliance augmentée). Un effet lusitrope négatif déplace la courbe vers le haut et vers
la gauche (compliance diminuée): les pressions de remplissage sont plus élevées. Lors d’insuffisance
cardiaque, la pente Emax est abaissée et la courbe de compliance élevée (Figure 5.50). Le volume
systolique est abaissé, et le travail éjectionnel fourni est minime. Dans un ventricule insuffisant,
l’efficience devient très faible parce que le volume éjecté est petit mais les pressions de remplissage
élevées ; le TCE est beaucoup plus petit que le TCI.
Valvulopathies
La boucle P/V est très utile pour illustrer les conditions hémodynamiques créées par les
valvulopathies.

Sténose aortique (Figure 5.51) : surcharge de pression. L’augmentation du stress de paroi
oblige le VG à travailler à très haute pression ; à travail externe identique, le volume éjecté est
plus faible. Le travail interne de pression étant très augmenté, l’efficience du VG est diminuée
bien que la pression générée soit élevée ; la compliance est diminuée à cause de l’hypertrophie
concentrique.
Figure 5.51 : Boucle pressionvolume en cas de sténose
aortique. L’augmentation de
postcharge déplace la boucle
PV vers le haut et vers la droite.
La
pente
de
l’élastance
maximale
(Emax)
est
inchangée, mais la courbe de
compliance est anormale. A
surface équivalente (travail
externe inchangé), la boucle est
plus étroite, donc le volume
éjecté est plus petit (VS :
volume systolique). Alors que
la performance éjectionnelle
diminue, le travail de pression
est très augmenté, comme le
montre l’augmentation de la
surface du triangle contenu
entre l’Emax, la compliance et
la boucle PV (pointillé bleu
pâle). L’efficience dynamique
est très diminuée, même si la
pression développée est plus
haute.
Pression
Emax
Sténose
aortique
Boucle PV
normale
Compliance
Volume
V0
VS

Sténose mitrale (Figure 5.52) : précharge restrictive. Le remplissage du VG est défectueux, le
volume éjecté est faible, le VG est petit ; le travail externe est faible.
 Insuffisance mitrale (Figure 5.53) : surcharge de volume à basse pression. La précharge est
élevée mais elle a lieu sous faible pression (pression moyenne de l'OG) ; la postcharge est très
basse et la phase de contraction isovolumétrique est quasi-absente parce que l’IM laisse fuir le
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
66
volume éjecté dès que la PVG dépasse la POG, largement avant l’ouverture de la valve aortique.
Les conditions de travail du VG sont excellentes (postcharge basse, précharge élevée) et le
volume éjecté est élevé (mais une partie retourne en arrière dans l’OG); la fraction de
régurgitation est proportionnelle à la PA systémique: l'IM augmente si les RAS s'élèvent.
Figure 5.52 : Boucle pressionvolume en cas de sténose
mitrale. La restriction au
remplissage
ventriculaire
conduit à un tout petit volume
ventriculaire placé sur des
valeurs
d’Emax
et
de
compliance encore normales.
Cela n’est cependant pas
toujours le cas : lors de
myocardite rhumatismale, par
exemple,
le
VG
est
dysfonctionnel, la pente Emax
est diminuée et la courbe de
compliance est redressée. Le
volume systolique (VS) et le
travail éjectionnel sont réduits,
mais le travail de pression est
normal.
Pression
Emax
Sténose
mitrale
Boucle PV
normale
Compliance
Volume
V0
Pression
Emax
Boucle PV
normale
Insuffisance
mitrale
Compliance
Volume
V0
VS
© Chassot 20112
Figure 5.53 : Boucle pression - volume en cas d’insuffisance mitrale chronique (IM). La pente Emax et la
courbe de compliance sont normales, mais le volume éjecté (VS, rouge) est très augmenté par rapport à la
normale (double flèche jaune). Comme la valve mitrale fuit dès que la pression monte dans le VG, la phase de
contraction isovolumétrique est quasi-inexistante et le VG régurgite dans l’OG avant même d’éjecter dans
l’aorte ; c’est la raison de la pente oblique de cette phase (flèches blanches). Le travail de pression (triangle
pointillé bleu clair) est abaissé par rapport à la normale. L’IM représente une surcharge de volume à postcharge
basse, situation énergétiquement très favorable pour le VG. Dans l’IM aiguë, la dilatation ventriculaire n’existe
pas, le volume est à la limite supérieure de la normale, mais la pression télédiastolique est très élevée.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
67

Insuffisance aortique (Figure 5.54) : surcharge de volume à pression aortique diastolique. La
précharge est excessive à cause du remplissage diastolique par la fuite aortique qui a lieu sous
une pression élevée (PA diast), ce qui déplace la courbe de compliance vers le haut. Le
volume du VG est très augmenté (l’IA induit les plus volumineux VG); le stress de paroi est
augmenté à cause de la dilatation ventriculaire. La postcharge, qui dépend des résistances
artérielles, règle le volume éjecté. Si les RAS s’élèvent, la régugitation augmente.
Pression
Emax
Insuffisance
aortique
Boucle
PV
normale
Compliance
Volume
V0
VS
Figure 5.54 : Boucle pression-volume en cas d’insuffisance aortique (IA) chronique. La courbe de compliance
est déplacée vers la droite à cause de l’augmentation de volume diastolique due à la régurgitation qui se fait à la
pression diastolique de l’aorte, mais sa pente reste très plate car le VG est encore souple. Le volume éjecté est
immense (VS) par rapport à sa valeur normale (jaune), car l’IA provoque les plus fortes dilatations ventriculaires
que l’on rencontre en clinique (cœur bovin). Le travail de pression (triangle pointillé bleu clair) est augmenté à
cause de la tension de paroi élevée (dilatation) en protosystole. En cas d’IA aiguë, le volume du VG est à la
limite supérieure de la normale, mais n’a pas le temps de s’agrandir ; par contre, l’excès de remplissage
diastolique avec une compliance normale conduit à une augmentation très importante de la pression diastolique ;
la boucle PV est réduite, mais surélevée.
Comme l’illustrent les boucles P-V, chaque valvulopathie présente des caractéristiques
hémodynamiques particulières. En clinique, ceci implique de rechercher les conditions
hémodynamiques qui sont favorables à l’équilibre circulatoire. Pour l’anesthésiste et le réanimateur, il
est capital de comprendre ces contraintes afin d’assurer la meilleure stabilité dans la prise en charge
des malades. D’une manière générale, il faut maintenir une précharge et postcharge élevées et une
fréquence normale dans les sténoses (Figure 5.55), mais une postcharge basse et une fréquence élevée
dans les insuffisances (Figure 5.56). Vu les conditions de charge particulières, les dimensions du
ventricule sont le meilleur critère pronostique du point de vue fonctionnel : diamètre télédiastolique
dans les sténoses et diamètre télésystolique dans les insuffisances. Plus le VG est grand, plus le risque
de dysfonction est élevé.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
68
Hémodynamique à rechercher
Caractéristiques
Figure 5.55 :
Caractéristiques
hémodynamiques et
situations
à
rechercher chez les
malades souffrant de
sténose valvulaire.
DC :
débit
cardiaque.
D : diamètre. HVG :
hypertrophie
ventriculaire gauche.
VS :
volume
systolique.
HTAP :
hypertension
artérielle
pulmonaire.
OAP : œdème aigu
du poumon.
Sténose aortique
HVG concentrique
Dysfonction diastolique
Précharge ↑
DC dépend de précharge et de
contraction auriculaire
Risque ischémique
Fonction: D télédiast VG
Précharge élevée
Fréquence 50 - 65 b/min
Vasoconstriction systémique
Plein - régulier - fermé
Sténose sous-aortique dynamique
HVG concentrique
Petite cavité VG (hypovolémie,
vasoplégie, ↓ postcharge, ↑ contract)
Gradient > 25 mmHg ds CCVG
Précharge élevée
Vasoconstriction systémique
Contractilité diminuée
Plein - mou - fermé
Sténose mitrale
Vasoconstriction systémique
Pas de tachycardie ni de bradycardie
Maintien précharge
Ventilation contrôlée bénéfique
VS fixe et bas
DC ↓ si fréquence ↑ ou ↓
Précharge élevée
HTAP, OAP
Plein - normocarde - fermé - ventilé
Précharge & postcharge
élevées
Fréquence normale
© Chassot 2012
Figure
5.56 :
Caractéristiques
hémodynamiques
et
situations à rechercher
chez
les
malades
souffrant d’insuffisance
valvulaire.
DC : débit cardiaque.
D : diamètre.
HVD :
hypertrophie
ventriculaire
droite.
HVG :
hypertrophie
ventriculaire
gauche.
VS : volume systolique.
IM : insuffisance mitrale.
IA :
insuffisance
aortique.
IT :
insufffisance
tricuspidienne.
PAP :
presion
artérielle
pulmonaire.
PA : pression artérielle
systémique.
IPPV : ventilation en
pression positive.
ALR : anesthésie locorégionale.
Hémodynamique à rechercher
Caractéristiques
Insuffisance mitrale
HVG excentrique, dilatation VG
Précharge élevée
IM ↑ si PA systémique ↑
IM fonctionnelle proportionnelle à PA
DC dépend de postcharge basse
Fonction systolique surestimée
Fonction: D télésyst VG
Normovolémie
Vasodilatation systémique
Stimulation inotrope
IPPV bénéfique
Plein - tonique - ouvert
Insuffisance aortique
HVG excentrique, dilatation max VG
Précharge élevée
IA ↑ si PA diastolique ↑
Bradycardie ↑ volume régurgité
Fonction diminuée (D télésyst VG)
Précharge élevée
Vasodilatation systémique
Tachycardie
Stimulation inotrope
Plein - rapide - ouvert
Insuffisance tricuspidienne
HVD, dilatation VD (effet Bernheim)
IT ↑ si PAP ↑
Précharge selon fonction VD
Valvulopathie gauche dominante
Vasodilatation pulmonaire
Précharge ↑ si HVD
Précharge ↓ si insuff congestive VD
PAP basse - IPPV à basse
Pression - ALR
Précharge élevée & postcharge basse
Fréquence ↑ si fuite diastolique
© Chassot 2012
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
69
Relation Pression / Volume
La boucle P/V est une représentation graphique des conditions de travail ventriculaire au cours d'un
cycle cardiaque. Le travail du VG est réparti en travail externe d'éjection (30-40% du travail total),
travail interne de pression (40-50%) et en travail biochimique cellulaire (20%). La pente de la courbe
d'élastance maximale (Emax) est un excellent indice de contractilité. La forme de la boucle et la
répartition du travail externe/interne sont typiques de chaque cardiopathie (dysfonction ventriculaire,
valvulopathies).
Couplage ventriculo-artériel
Pression artérielle
La pression artérielle est le résultat de la mise sous tension et de l’éjection du volume ventriculaire
gauche contre les parois artérielles et les embranchements vasculaires périphériques (volume contre
résistance). Elle comprend deux composantes : la pression moyenne (PAM), qui assure un flux distal
continu et reste pratiquement identique tout au long de l’arbre artériel, et la pression pulsée (ou
pression artérielle différentielle : PP = PAsyst - PAdiast) qui reflète l’intermittence de l’éjection
ventriculaire. A partir du calcul des résistances artérielles (RAS = (PAM – PVC) / DC) et sans tenir
compte de la pression veineuse, on peut déduire que la pression est le produit des résistances
artérielles et du débit cardiaque : PAM = RAS • DC. L’arbre artériel consiste en deux entités
anatomiques différentes.
 L’aorte est ses principales branches ont une grande visco-élasticité grâce à leur haute teneur en
élastine, ce qui leur permet d’emmagasiner une partie de l’énergie systolique en se dilatant ;
cette énergie est restituée en diastole sous forme de pression et de flux ; elles ont une fonction
de tampon sur la pulsatilité ventriculaire. Cela a pour effet de diminuer la pression systolique
et d’augmenter la pression diastolique (contre-pulsion physiologique). Ce phénomène de
tamponnement disparaît lorsque les vaisseaux se sclérosent et se calcifient avec l’âge et
l’athéromatose. Ainsi la pression systolique de la personne âgée s’élève parce que ses
vaisseaux sont rigides, mais sa diastolique baisse parce qu’il n’y a plus de restitution de
pression en diastole.
 Les artères périphériques agissent comme des conduits de résistance élevée ; elles sont riches
en collagène et en musculature lisse. Leurs embranchements sont le lieu de réflexion de l’onde
de pression.
Le volume et la pression d’éjection du ventricule sont conditionnés par l’impédance et la résistance
exercée par l’arbre vasculaire. Plusieurs phénomènes interviennent lorsque le volume systolique
parvient dans les troncs artériels (Figure 5.57) : visco-élasticité de l’aorte, onde réfléchie, impédance
et résistance artérielles, compliance artérielle globale, volume éjecté, viscosité (hématocrite).
Pression réfléchie
La mise sous tension du volume sanguin pendant la contraction isovolumétrique provoque une
secousse qui va cheminer dans l’arbre vasculaire sous forme d’une onde de pression, qui ne
correspond pas au déplacement du volume éjecté mais le précède (Figure 5.58). Cette onde de
pression avance à 3-4 m/s chez le jeune, mais jusqu’à 10 m/s chez le vieillard, car son arbre vasculaire
calcifié transmet mieux les pressions que les vaisseaux souples du jeune homme [227,228]. Le volume
sanguin avance beaucoup moins vite : il est éjecté par le VG avec une vélocité de 1.0 - 1.5 m/s, et la
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
70
vélocité moyenne du flux dans l’aorte est de 0.5 – 1.0 m/s. L’onde de pression se réfléchit en
périphérie lorsque les artères se divisent en artérioles et que les résistances augmentent soudainement ;
le coefficient de réflexion est de 80%; il baisse en cas de vasodilatation et augmente en cas de
vasoconstriction [293]. Cette réflexion va renvoyer l’onde de pression en direction du cœur, pour qui
elle représente 10% de la postcharge (Figure 5.59) (303). Elle y parvient normalement en
protodiastole, mais sa progression est plus ou moins rapide selon le degré de vasoconstriction. Lorsque
l’arbre vasculaire est rigide, le retour est plus précoce, et l’onde de pression réfléchie vient se
superposer à la pression systolique engendrée par le volume sanguin éjecté du ventricule.
Résistance
Résistance
Artérioles
Artérioles
Aorte & gros
vaisseaux
Aorte & gros
vaisseaux
Impédance
Impédance
VG
VG
A
B
© Chassot 2012
Figure 5.57 : Impédance et résistance artérielles. A : En systole, l’élasticité de l’aorte et des grandes artères
emmagasine de l’énergie en se dilatant. L’impédance se définit comme le rapport entre la pression instantanée et
le flux à cet instant (temps t) (Pt / Ft) ; elle varie au cours de la systole. B : En diastole, cette énergie est restituée
sous forme d’une augmentation de la pression et du flux diastolique. La résistance a lieu dans les artérioles et les
capillaires. Elle est définie par la loi d’Ohm, mais ne s’applique qu’à un flux continu non-pulsé. La flèche bleue
à contre-courant illustre l’onde de pression rétrograde.
La courbe de pression artérielle est différente selon l’endroit de l’arbre vasculaire où elle analysée
(Figure 5.60). En avançant vers des zones de moins en moins compliantes, le bolus sanguin rencontre
des résistances de plus en plus élevées. Sa synchronisation avec l’onde de pression est différente selon
l’endroit où on l'observe. Il est donc normal que les valeurs de la pression systolique (PAs) et de la
pression diastolique (PAd) soient différentes selon le point de mesure (Figure 5.61A) : la PAs est plus
basse dans l’aorte que dans l’artère radiale, alors que la PAd est plus haute [275]. Ce phénomène est
accentué lorsque les RAS augmentent. Un cathéter fémoral lit la pression dans l’artère iliaque externe,
qui est un vaisseau élastique ; cette pression est plus proche de celle de l’aorte (donc de celle du
cerveau, des reins et des coronaires) que la pression lue dans l’artère radiale, qui est un vaisseau
musculaire périphérique soumis aux effets de la vasodilatation ou de la vasoconstriction. Lors d’une
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
71
choc hypovolémique ou après une CEC en hypothermie profonde, par exemple, il arrive que la
vasoconstriction soit telle que la pression lue dans l’artère radiale est la moitié de celle enregistrée
dans l’artère fémorale. Cette dernière est donc un meilleur guide dans les conditions hémodynamiques
difficiles.
A
B
C
Figure 5.58 : Onde de pression et flux artériel systolique. A : En protosystole, la mise sous tension du volume
systolique crée une onde de pression qui se propage dans l’arbre vasculaire en fonction de sa rigidité (flèche
violette) ; cette progression est plus rapide en cas d’hypertension ou d’artériosclérose. Elle varie de 4 à 10 m/s.
B : L’onde de pression est réfléchie en périphérie au niveau de l’embranchement des artérioles ; elle revient vers
le cœur pendant que l’onde de flux commence sa progression (vélocité : 0.5-1.5 m/s). C : L’onde de pression et
le bolus systolique se croisent, créant localement une surpression [227]. Les vélocités normales et les distances
sont telles que l’onde de pression revient à la racine de l’aorte en protodiastole. Si l’arbre vasculaire est rigide,
l’onde de pression chemine plus rapidement et revient à l’aorte en systole ; elle se superpose alors à l’onde de
flux sur la courbe artérielle.
Figure 5.59 : Enregistrements décomposés
de l’onde de pression antérograde et de
l’onde de pression rétrograde dans l’aorte ;
leur somme donne la courbe de pression
effectivement enregistrée par le cathéter
intra-aortique [Extrait de: Yin FCP, ed.
Ventricular/vascular coupling. Clinical,
physiological and engineering aspects.
New York: Springer Verlag, 1987, Figure
6.6. Réf 275].
+
L’image de la courbe artérielle sur l’écran du moniteur est très instructive, pour autant que son
amplification permette une lecture adéquate. Une artère normale se distingue nettement d’une artère
rigide caractérisée par un double pic systolique, typique du patient âgé dont les vaisseaux sont
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
72
calcifiés (Figure 5.61B) ; dans ce cas, le moniteur enregistre la pression maximale, mais cette dernière
correspond à l’onde de pression, non au flux sanguin. Elle ne traduit donc pas une pression de
perfusion réelle pour les organes. Dans un état de choc, la vasoconstriction augmente la réflexion de
l’onde de pression, mais l’hypotension en diminue la vélocité [291] ; la courbe artérielle apparaît alors
bifide dans une artère périphérique (fémorale ou radiale) (Figure 5.61C). C’est une image que l’on
constate fréquemment chez les patients en choc hypovolémique.
Figure 5.60 : Variations de la
forme analogique de la courbe
de pression artérielle selon la
localisation de l’analyse. A :
Image de la courbe de pression
normale depuis la racine de
l’aorte
ascendante
jusqu’à
l’artère fémorale [Extrait de:
Yin
FCP,
ed.
Ventricular/vascular coupling.
Clinical, physiological and
engineering aspects. New York:
Springer Verlag, 1987, Figure
6.5. Réf 275]. B : Image
schématique
d’une
courbe
artérielle
dans
l’aorte
ascendante
(ponction
peropératoire directe) et dans
l’artère radiale (cathéter). La
pression systolique enregistrée
dans la radiale est plus élevée,
mais la diastolique est plus
basse ; la pression différentielle
(Psyst – Pdiast) est agrandie.
Figure 5.61 : A. Image d’une courbe
artérielle dans l’aorte ascendante et dans
l’artère fémorale ou radiale. La pression
systolique enregistrée dans la radiale est
plus élevée, mais la diastolique est plus
basse ; la pression différentielle est
agrandie. La pression moyenne est
pratiquement identique dans les trois
vaisseaux B. Comparaison d’une artère
normale et d’une artère rigidifiée par
une athéromatose diffuse. Le retour de
l’onde de pression (onde réfléchie,
flèche violette) survient plus tôt dans le
deuxième cas et donne un crochetage sur
le pic systolique. Bien qu’enregistré
comme la pression systolique par le
moniteur, cet effet ne correspond pas à
une pression de perfusion réelle mais à
un simple pic de pression.
C:
Comparaison de la pression dans l’aorte
et dans l’artère fémorale en cas de choc
hypovolémique. L’onde réfléchie est
importante
à
cause
de
la
vasoconstriction périphérique, mais elle
progresse plus lentement à cause de
l’hypotension
(parois
vasculaires
molles) ; elle est donc très marquée mais
décalée dans le temps (courbe bifide).
A
Aorte ascend
Crosse
Ao descendante
Ao diaphragm
Ao abdominale
Artère iliaque
Artère fémorale
B
Aorte ascendante
Artère radiale
A
Aorte ascendante
Artère radiale
Artère fémorale
C
B
Choc: aorte
Artère normale
© Chassot 2012
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
Artère rigide
Choc: artère
fémorale
73
On voit de ces exemples que l’image analogique de la courbe artérielle offre de nombreux
renseignements (Figure 5.62). La surface sous la courbe est proportionnelle au volume systolique. La
pente ascensionnelle (dP/dt) est le reflet de la performance systolique du ventricule, pour autant qu’il
n’y ait pas d’obstacle sur entre le VG et le cathéter (sténose aortique). La pente télésystolique et la
position du dicrotisme sont fonction des RAS.
A
B
1
Amplitude
Pression pulsée
(~ rigidité)
dP/dt
2
3
PAM
Artère
normale
Artère
rigide
Surface sous
la courbe
(~ Vol systol )
Pente téléyst
& dicrotisme
(~ RAS)
© Chassot 2012
Figure 5.62 : Aspect analogique de la courbe artérielle. A : courbe normale. La pente ascensionnelle est fonction
du dP/dt intraventriculaire (pour autant qu’il n’y ait pas de pathologie valvulaire aortique). La surgace sous la
courbe systolique est proportionnelle au volume systolique, la pente télésystolique et le niveau du dicrotisme
sont fonction des résistances artérielles périphériques (RAS), l’amplitude est fonction de la rigidité des parois
mais aussi de la volémie et des RAS. La pression artérielle moyenne (PAM) est calculée selon la formule : PAM
= (PAsyst + 2 PAdiast) / 3. B : comparaison d’une courbe artérielle normale (en rouge) et de la courbe d’un
patient souffrant d’athéromatose (en bleu), dont l’aorte est devenue rigide. 1 : augmentation de la pression
systolique due à la superposition de l’onde réfléchie. 2 : augmentation de la postcharge du VG. 3 : diminution de
la pression de perfusion coronarienne en diastole.
Pression pulsée et pulsatilité
Les invertébrés les plus évolués (crabes, poulpes) et l’ensemble des vertébrés disposent d’un
ventricule sous-aortique pulsatile comme pompe motrice pour la circulation artérielle. La pulsatilité
est une nécessité pour assurer un temps pour le remplissage ventriculaire et pour permettre la
perfusion myocardique, puisque le ventricule systémique doit se perfuser lui-même. Seule la diastole
garantit un gradient de pression suffisant entre l’aorte et le myocarde pour assurer la perfusion de la
paroi ventriculaire. Même si elle diminue le risque de thrombose et améliore le flux lymphatique
[420], la pulsatilité n’est pas essentielle à la perfusion des organes, comme le prouve l’excellente
tolérance à long terme des assistances ventriculaires gauches à flux continu [366]. De fait, elle
présente deux inconvénients majeurs.
 Elle représente une augmentation de 15-20% de l’énergie hydraulique totale (PH = Pmoy •
Flux) nécessaire par rapport à un flux continu de même débit, puisque la masse sanguine est
accélérée et décélérée pendant chaque cycle ;
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
74
 Le flux capillaire doit être aussi stable que possible pour faciliter les échanges et minimiser le
stress de paroi sur l’endothélium et la membrane basale.
C’est pourquoi tout l’arbre artériel est construit pour dépulser au mieux le flux systolo-diastolique
éjecté par le ventricule. Par leur expansion en systole, l’aorte et les grandes artères amortissent le pic
de pression systolique, baissent la postcharge du VG et emmagasinent de l’énergie qu’elles restituent
en diastole sous forme d’une augmentation de pression et de flux. Elles fonctionnent ainsi comme un
réservoir-tampon couplé aux artérioles distales à résistance élevée. Cet ensemble permet de fournir un
flux quasi-dépulsé dans les capillaires. Pour éviter la dilatation et la rupture, les grandes artères
présentent une élasticité non-linéaire : leur compliance est maximale aux dimensions et pressions
normales grâce à leur forte teneur en élastine, une macroprotéine très élastique, mais leur rigidité
augmente au-delà de ces valeurs à cause de la mise sous tension du collagène qui fonctionne comme
une butée. Leur courbe pression/volume a une forme en "J" [359a]. Plus on s’éloigne du cœur, moins
les artères sont élastiques : il y a deux fois plus d’élastine que de collagène dans l’aorte thoracique,
mais deux fois moins dans l’aorte distale. Tous les vertébrés et les invertébrés les plus évolués
disposent d’une mécanique vasculaire identique, sauf que la transition entre la zone de pression à
haute compliance et la zone de pression élevée où la paroi devient rigide varie selon la pression
moyenne des animaux.
Le degré de pulsatilité est fonction de la performance ventriculaire, de la compliance artérielle et des
résistances périphériques. L’amortissement de la pulsatilité dans l’aorte disparaît lorsque les vaisseaux
sont tendus à cause d’une hypertension artérielle et lorsqu’ils se sclérosent avec l’athéromatose ou se
calcifient avec l’âge. Ainsi la pression systolique de la personne hypertendue ou artériosclérotique
s’élève parce que ses vaisseaux sont rigides, mais sa diastolique s’abaisse parce qu’il n’y a plus de
restitution de pression en diastole : la pression différentielle, ou pression pulsée, augmente. Cette
augmentation de la pression pulsée (PP normale : 40-60 mmHg), est directement liée au risque
d’accident cardio- et cérébrovasculaire [291]. La mortalité cardiaque postopératoire double lorsque la
PP dépasse 80 mmHg. La pression pulsée est l’élément pronostique majeur dans l’hypertension
artérielle. En effet, les vaisseaux artériolaires du cerveau, des reins et du cœur ont des résistances plus
basses que celles des autres organes et reçoivent un flux encore largement pulsatile ; lorsque la
pulsatilité centrale augmente, ils n’en sont pas protégés par la vasoconstriction artériolaire systémique,
d’où la fragilité de ces organes face à l’hypertension et à l’âge [291].
La perte d’élasticité artérielle engendrée par l’âge, l’athéromatose et l’hypertension a trois
conséquences qui sont bien visibles si l'on superpose les courbes de pression enregistrées dans une
artère normale et dans une artère rigidifiée (Figure 5.62B) :

Augmentation de la pression systolique centrale ; le risque d’accident vasculaire cérébral et la
néphropathie hypertensive sont liés à ce phénomène ;
 Augmentation de la surface sous la courbe en systole ; elle élève la postcharge du VG et induit
une HVG concentrique ;
 Diminution de la surface sous la courbe en diastole ; elle provoque une baisse de la perfusion
coronaire diastolique et contribue à l’augmentation de la pulsatilité.
Les personnes âgées sont le plus souvent hypertendues et souffrent en général d’athéromatose
aortique. Ces deux phénomènes augmentent l’onde réfléchie et font apparaître un second pic de
pression en systole. La vasodilatation liée à l’anesthésie diminue la réflexion en périphérie mais la
pression artérielle élevée maintient la vitesse de propagation de l’onde de pression. A l’induction, on
voit donc s’amenuiser le pic de l’onde réfléchie sans que sa synchronisation se modifie (Figure 5.63).
Comme le moniteur de pression enregistre la valeur maximale comme PAsyst, cette dernière baisse
considérablement, alors que la pression due à l’éjection du volume systolique dans le système artériel
ne se modifie presque pas. La perfusion des organes ne souffre donc pas de cette chute de la pression
systolique réfléchie.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
75
En plus d’être pusatile, le flux dans l’aorte est laminaire et avance avec un mouvement spiralé dû à la
torsion du VG sur lui-même pendant la phase d’éjection (voir Figure 5.21 page 29). Le sang tournoie
en sens anti-horaire [197]. Cette propulsion spiralée présente un double avantage :
 Les forces de cisaillement sont réduites lorsque le sang prend un virage comme la crosse de
l’aorte ; si le flux était rectiligne, les couches parallèles auraient des vitesses différentes dans
une courbe, celles de l’extérieur devant avancer plus rapidement que celles de l’intérieur.
 La perfusion des vaisseaux de la gerbe (carotides et sous-clavières) est assurée sans perte de
charge, car le flux n’a pas à prendre un angle droit par rapport à sa progression dans l’aorte
comme ce serait le cas s’il était rectiligne.
Le remodelage du VG dans l’hypertrophie, la dilatation ou la cicatrisation après infarctus altère sa
capacité de torsion et perturbe la géométrie du flux aortique ; la performance hémodynamique est
altérée, même si les mesures de pression et de débit restent satisfaisantes.
A
B
Figure 5.63 : Courbes de pression artérielle avant (A) et après (B) l’induction chez un patient de 80 ans dont les
vaisseaux artériels sont athéromateux et rigides. L’induction de l’anesthésie a provoqué une baisse des
résistances artérielles périphériques ; cette vasodilatation a diminué considérablement l’intensité de l’onde
réfléchie (flèche violette), mais non sa synchronisation parce que la pression artérielle différentielle liée au flux
sanguin (premier pic systolique) n’a pas changé (flèches blanches). Le moniteur de pression affiche la valeur
maximale de la pression comme valeur systolique ; on note donc une chute importante de la PAsyst, alors que la
pression due à l’éjection du volume systolique dans les artères ne s’est presque pas modifiée.
Elastance artérielle
L’élastance du ventricule (Emax) traduit la manière dont celui-ci chasse le volume systolique dans
l’arbre vasculaire, qui se dilate selon ses propriétés visco-élastiques. Cette dilatation peut être décrite
par l’élastance artérielle (Ea), propriété analogue à l’Emax mais qui évolue de manière inverse : l’une
augmente lorsque l’autre diminue. Sur une boucle P/V, l’Ea apparaît comme une quasi-droite en
miroir de l’Emax (Figure 5.64) : elle s’élève pendant la systole et rejoint l’Emax au point
télésystolique ; sa pente est proportionnelle à la résistance artérielle [382].
Comme le travail ventriculaire augmente avec les RAS, le cœur a intérêt à ce que la pente d’Ea soit
faible ; il faut toutefois qu’elle représente une résistance suffisante pour maintenir la pression de
perfusion adéquate dans l’organisme. La boucle P/V d’un cœur normal montre que la pente d’Ea est
un peu plus faible que la pente d’Emax. Cela a pour effet d’assurer un volume éjecté (Vtd – Vts) plus
grand que le volume résiduel (Vts – V0). La fraction d’éjection (FE) est définie par le rapport entre le
volume éjecté (Vtd – Vts) et le volume télédiastolique (Vtd). La FE est donc définie par l’équilibre
entre la fonction ventriculaire (Emax) et la fonction artérielle (Ea), et n’est pas en soi un indice de
contractilité.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
76
Ea’
Figure 5.64 : Définition de l’élastance
artérielle (Ea) sur un diagramme
Pression – Volume. La courbe de l’Ea
est une quasi-droite en miroir de
l’Emax. Elle passe par les points
télésystolique et télédiastolique. Sa
pente est légèrement plus faible que
celle d’Emax ; de ce fait le volume
éjecté (Vtd – Vts, flèche jaune) et un
peu plus grand que le volume résiduel
(Vts – V0, flèche violette). La fraction
d’éjection FE = (Vtd – Vts) / Vtd est
donc supérieure à 0.5 (normale : 0.55 0.75). En pointillé figure la valeur de
l’élastance artérielle (Ea’) en cas
d’hypertension artérielle ; la pente de
l’Ea est plus importante.
Pression
Emax
Ea
Pt
s
Compliance
V0
© Chassot 2012
Vts
Vtd
Volume
Couplage ventriculo-artériel
La pression artérielle est le résultat de l'éjection ventriculaire contre les résistances artérielles. Les
grandes artères très élastiques (aorte et ses branches) emmagasinent une partie de la pression et du
volume d'éjection systolique (abaissement de la PAsyst) et les restituent en diastole (augmentation de
la PAdiast). Les artérioles périphériques offrent une grande résistance et dépulsent partiellement le
flux. La PAM est identique dans tout l'arbre artériel, alors que la PAsyst augmente en périphérie et que
la PAdiast y diminue.
L'onde de pression générée par le ventricule se propage dans l'arbre vasculaire plus vite (4-10 m/s) que
le flux artériel (1.0 m/s); elle est réfléchie en périphérie en fonction du degré de vasoconstriction et
revient au cœur en protodiastole. Sa vitesse de déplacement augmente lorsque les vaisseaux sont
rigides et la pression artérielle élevée; elle se superpose alors à la pression systolique.
La rigidité de l'arbre artériel causée par l'athéromatose, l'âge et l'hypertension augmentent la PAsyst et
baissent la PAdiast parce que l'amortissement élastique des grandes artères est supprimé; cette
augmentation de la pression pulsée (PAsyst – PAdiast) est directement liée aux complications cardioet cérébrovasculaires.
L'élastance artérielle (Ea) figurée sur la boucle PV est l'équivalent inverse de l'Emax ventriculaire; sa
pente est proportionnelle aux résistances artérielles. La fraction d'éjection est la variable d'ajustement
entre la performance systolique du ventricule et la résistance à l'éjection de l'arbre artériel.
Fraction d'éjection (FE)
Dans la relation P-V, la fraction d’éjection (FE) est définie par le rapport entre le volume éjecté (Vtd –
Vts) et le volume télédiastolique (Vtd – V0) :
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
77
 FE = (Vtd – Vts) / (Vtd – V0)
 Comme V0 n’est pas connu en clinique : FE = (Vtd – Vts) / Vtd
Sa valeur normale est de 0.55 - 0.75 (moyenne 0.67) [334]. On a pu démontrer mathématiquement que
l'efficience mécanique du ventricule, qui est le rapport entre le travail externe fourni et la
consommation d'oxygène, est au maximum lorsque la vidange systolique correspond aux 2/3 du
volume diastolique (Véj = Vtd • FE) [53]. Augmenter la FE au-delà de 75% diminue l’efficacité du
système pour trois raisons.
 Augmentation de l’énergie mécanique, donc de la mVO2, pour comprimer le myocarde et sa
structure collagéno-fibreuse jusqu'à un volume télésystolique quasi-nul ;
 Gain minime en volume éjecté, car la cavité ventriculaire est devenue petite en télésystole ;
 Allongement nécessaire de la diastole pour arriver à un remplissage ventriculaire adéquat.
La fraction d'éjection ( FE = [Vtd - Vts] / Vtd ) représente le degré de vidange du ventricule, qui est
fonction de l'équilibre dynamique entre cinq éléments [334].





La contractilité: elle est représentée par la pente Emax sur le diagramme pression-volume; le
calcul de la FE y est d'autant plus sensible que l’Emax est faible, ce qui signifie que la FE est
un meilleur critère de contractilité lorsqu'elle est basse (< 0.5) que lorsqu'elle est normale (>
0.6). Elle peut aussi être exprimée par le dP/dt sur une courbe de pression systolique.
La postcharge: mesurée par la pression télésystolique maximale (Pts), elle agit en équilibre
avec la contractilité pour déterminer la FE. L'impédance à l'éjection du ventricule est une
variable modifiée physiologiquement pour maintenir la FE en dépit des variations de
précharge et de contractilité de chaque ventricule. La sensibilité de la FE et du Véj à
l'augmentation de la Pts est d'autant plus marquée que la FE est basse (Emax de pente faible).
Le volume télésystolique (Vts): plus il diminue (hypovolémie, par exemple), plus la FE
augmente, sans que la contractilité change. Si le Vts tend vers 0, la FE tend vers 1 (ou 100%),
car (Vtd – 0) / Vtd = 1.
Le volume initial (V0): plus il augmente (dilatation ventriculaire, anévrysme, zone akinétique,
sidération, surentraînement), plus la FE baisse, mais la pente Emax peut ne pas être modifiée
et le Véj peut rester inchangé [187].
La précharge (Vtd): elle détermine l'effet Starling (augmentation de la force de contraction par
augmentation du Vtd). Elle modifie peu la FE au sein des valeurs normales, et agit en
équilibre avec la postcharge. La FE reste constante si le Vtd et la Pts augmentent
parallèlement, alors qu'elle baisse si la Pts s'élève lorsque le Vtd est bas (exemple:
hypovolémie chez un hypertendu). La FE devient indépendante de la précharge lorsque le V0
tend vers 0.
La fraction d'éjection (normale 0.65) reste étonnamment constante pour un individu sur une large
plage de valeurs de précharge et de postcharge différentes. C'est le reflet de la régulation intégrée du
volume systolique dans des conditions de contractilité, de précharge et de postcharge données: la FE
quantifie la capacité du système ventricule - vaisseaux à maintenir un débit cardiaque adéquat en cas
de variations des conditions de charge et/ou de contractilité [334]. Lorsqu'elle est basse, on peut
prévoir que tout stress imposé au système cardiovasculaire peut devenir catastrophique, bien que les
conditions hémodynamiques au repos paraissent satisfaisantes.
La valeur préopératoire de la FE est un excellent facteur pronostique des complications cardiaques
per- et postopératoires pour la chirurgie cardiaque ou non-cardiaque, en l'absence de pathologie
valvulaire [334,408]. S'il faut choisir un seul élément pronostique cardiaque, la FE est certainement le
plus pertinent. Ceci n'est pas dû à sa valeur comme marqueur de la contractilité, mais à sa qualité
d'indice de performance cardiaque dans des conditions de travail variables. Elle chiffre la réserve
fonctionnelle et l'adaptabilité aux conditions hémodynamiques si celles-ci se modifient (précharge,
postcharge, stimulation, arythmies) et quantifie l'atteinte pathologique du système ventricule -
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
78
vaisseaux - volume circulant. Elle n’est toutefois pas applicable aux malades qui souffrent de certaines
conditions:
 Valvulopathies sévères (remodelage et modifications majeures des conditions de charge);
 Altérations de la cinétique segmentaire (akinésie, dyskinésie);
 Remodelage du VG (anévrysme, dilatation sphérique, forme anormale dans les cardiopathies
congénitales).
Fraction d'éjection (FE)
FE = (Vtd – Vts) / Vtd (normal: 0.55 – 0.75). La FE résulte de l'équilibre de 5 éléments:
- La contractilité
- La postcharge
- Le volume télésystolique
- Le volume télédiastolique
- Le volume intial
La FE n'est pas une mesure de contratilité, mais une mesure de la réserve fonctionnelle de l'ensemble
ventricule – volémie – artères. Elle n'évalue pas la fonction ventriculaire en cas de valvulopathie ni de
remodelage important du ventricule (akinésie, dilatation sphérique, malformation).
Adaptation à l’effort
A la question déjà posée à propos de l’évolution – notre cœur est-il une bonne pompe ? –, on peut
répondre en citant les capacités que développe un athlète de compétition, dont le débit s’élève
momentanément à 25 L/min et quelquefois jusqu’à 40 L/min. La VO2 susceptible d’être soutenue sur
le long terme (marathon, Iron-man) n’est cependant que le 45% de la VO2 maximale utilisable pendant
un effort court [85]. L’augmentation du débit cardiaque à l’effort est dépendant de plusieurs facteurs.
 L’augmentation de la fréquence ; la fréquence théorique maximale est calculée par la formule
220 – âge (pour la femme : 200 – âge). La fréquence utile maximale est d’environ 170
battements/min chez l’adulte. La fréquence est l’élément principal dans l’augmentation du
débit. La baisse du tonus vagal assure des fréquences jusqu’à 110 min-1 ; la décharge
d’adrénaline (taux augmenté de 15 fois) est responsable de l’augmentation au-delà de cette
valeur [135].
 L’augmentation du retour veineux dilate le ventricule et lui permet de monter sur la courbe de
recrutement (effet Starling).
 Lors d’exercices dynamiques, la postcharge baisse car les vaisseaux musculaires sont
vasodilatés à l’effort par l’effet des métabolites (le pH du sang peut baisser de 0.4 unités) et
par la stimulation β [4] ; la pression systolique s’élève parce que le débit cardiaque augmente,
mais la diastolique tend à diminuer.
L’exercice isométrique (poids et haltères) s’accompagne d’un faible travail externe avec très peu de
modification du débit cardiaque mais d’un important travail interne avec augmentation de la pression
artérielle ; la fréquence se modifie peu. L’exercice isotonique (course, natation) s’accompagne au
contraire d’un haut débit (travail externe augmenté) et d’une vasodilatation avec baisse de la pression
diastolique (travail interne diminué). Par rapport au travail fourni, la mVO2 est bien plus élevée dans la
première situation que dans la deuxième [135]. Les performances d’un individu β-bloqué sont
diminuées de 25% environ [110].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
79
Les variations de la fraction d'éjection à l'effort, lorsque le débit cardiaque triple, varient selon
l'entraînement du sujet [135,290].
 Sujet jeune, non-entraîné: fraction d'éjection peu augmentée (+ 15%), volume télédiastolique
augmenté (+ 26%), fréquence très augmentée (+ 80%).
 Athlète entraîné: la fraction d'éjection augmente (+ 30-45%). Comme le volume ventriculaire
est augmenté (diamètre télédiastolique du VG : 6-7 cm) et le myocarde hypertrophié, une FE
basse suffit à maintenir le débit cardiaque au repos (FE 0.4-0.5); à l’effort, elle retrouve une
valeur normale-élevée et correspond à un très grand volume systolique. Le volume des
oreillettes est élevé (> 80 mL), ce qui accroît le risque de fibrillation auriculaire.
Chez l’athlète, le recrutement de débit par la fréquence est plus efficace car la fréquence basale est
lente ; elle est abaissée par la prépondérance du tonus vagal au repos. L’athlète se caractérise aussi par
une récupération plus rapide après l’effort. Son cœur hypertrophié est parfaitement adapté. Il se
distingue d’une HVG liée à une pathologie (HTA, insuffisance mitrale) par l’amélioration de la
relaxation protodiastolique [347]. L’absence d’exercice physique régulier est au contraire un facteur
déterminant de risque cardiovasculaire. Les bénéfices d’une activité sportive sont multiples [359,385]:







Baisse de la pression artérielle ;
Baisse de la sécrétion endogène de catécholamines par le cœur ; baisse de l’arythmogénicité ;
Augmentation du tonus vagal de base ;
Augmentation du flux coronaire collatéral ;
Vasodilatation coronarienne ;
Maintien de la compliance artérielle à un âge avancé;
Augmentation du métabolisme glucidique et diminution de la résistance à l’insuline
(syndrome métabolique) ;
 Augmentation de la durée de vie de 2-4 ans.
Cependant, le sport d’endurance extrême peut faire basculer le « cœur d’athlète » dans une pathologie
ressemblant à la cardiomyopathie arythmogénique (voir Chapitre 13, Dysplasie arythmogène du VD) :
hypertrophie, zones de fibrose, dépôts lipidiques, arythmies ventriculaires, risque de mort subite
augmenté de > 2.5 fois. Les arythmies sont en général originaires du VD, dont la postcharge augmente
proportionnellement davantage que celle du VG lorsque le débit cardiaque est très élevé parce que les
vaisseaux pulmonaires sont déjà vasodilatés au repos alors que les résistance artérielles systémiques
baissent à l’effort isotonique [212b]. Les sports d’endurance prolongent l’espérance de vie, mais
peuvent accroître le risque de certaines arythmies.
Adaptation à l'effort
A l'effort avec entraînement, le DC peut quintupler pendant une durée brève et doubler sur le long
terme. L'adaptation à l'effort se fait par une augmentation de la fréquence et du volume télédiastolique;
la FE augmente peu, sauf chez l'athlète qui présente une hypertrophie ventriculaire. Les exercices
dynamiques (course) augmentent le DC mais baissent la PA; les efforts isométriques (haltères)
augmentent la PA mais non le DC.
Contrôle de la pression artérielle
La valeur de pression artérielle maximale considérée comme normale chez un adulte est 130/80
mmHg. Au-delà commence le domaine de la pré-hypertension (jusqu’à 140/90 mmHg) et de
l’hypertension (≥ 140/90 mmHg). Ces valeurs peuvent paraître basses, mais la préhypertension double
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
80
le risque cardiovasculaire à 10 ans [403]. Le meilleur prédicteur du risque cardio-vasculaire est la
pression pulsée, ou PA différentielle (PAsyst – PAdiast). Sa valeur normale est 50-60 mmHg ; le
risque d’accident cardio-vasculaire augmente significativement lorsqu’elle est > 80 mmHg [291]. Cela
tient au fait que dans le cœur, le cerveau et les reins, les RAS locales sont basses ; la pulsatilité
artérielle s’y propage très distalement, alors que le flux est quasi-dépulsé au-delà des petites artérioles
dans les muscles et les viscères. Si la pulsatilité augmente, ces organes souffrent tout particulièrement
et réagissent en augmentant l’épaisseur de paroi de leurs vaisseaux, mais le stress subi à chaque cycle
cardiaque augmente le risque d’accident vasculaire (infarctus, ictus, néphropathie).
Le moteur ventriculaire n’est pas le seul élément à intervenir dans le contrôle de la pression artérielle.
Il existe encore une série d’éléments qui se manifestent à différents niveaux.
Baroréflexes
Les fibres efférentes du sinus carotidien et des barorécepteurs de l’arc aortique cheminent par le nerf
glossopharyngien (IX) jusqu'au ganglion pétreux, et de là à l'hypothalamus (noyau solitaire). Elles
sont stimulées par une distension de la paroi vasculaire et par la pulsatilité du flux au niveau du
récepteur. Par réflexe, ceci conduit à une stimulation vagale (via le nerf vague, X) qui induit
rapidement une bradycardie et une vasodilatation artériolaire (Figure 5.65). Le délai de la boucle
réflexe est bref: 1 à 2 secondes [228]. A l'inverse, une hypotension ou une dépulsation artérielle au
niveau du sinus carotidien fait cesser l'émission de ce dernier, ce qui lève le frein parasympathique et
provoque une augmentation du tonus sympathique (tachycardie, vasoconstriction artériolaire,
veinoconstriction centrale). Cela survient en cas d'hypotension ou d'hypovolémie.
Le baroréflexe est particulièrement sensible aux variations de pression; son émission est maximale
pendant l'ascension de la valeur de pression artérielle. Lorsque la pression se stabilise, l'intensité de
l'émission diminue. Après une quinzaine de minutes, le système se règle sur cette nouvelle valeur et la
maintient (resetting). Le baroréflexe est donc efficace pour la régulation et le maintien de la pression à
court terme [106].
A
B
Stimulation
Figure 5.65 : Enregistrements de la pression artérielle illustrant le baroréflexe. A: Emissions d'un sinus
carotidien de chat lorsque la pression augmente ou diminue; la fréquence des signaux émis est maximale lors de
la montée de pression; elle diminue lorsque la pression est stable. Une chute de pression inhibe momentanément
les émissions du sinus. B: Effet sur la pression artérielle et la fréquence cardiaque d'une stimulation électrique du
sinus carotidien chez le chien (entre les deux flèches); les intervalles de temps représentent 0.2 seconde [Extrait
de: Levick JR. An introduction to cardiovascular physiology. 2nd edition. Oxford: Butterworth-Heinemann,
1995, Figures 14.3 et 14.5. Réf 228].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
81
Le glomus carotidien se situe dans le voisinage du sinus, à l'origine de la carotide interne. Ses cellules
sont sensibles à la pO2. Il est stimulé par une hypoxie locale; via le nerf glosso-pharyngien, ceci
entraîne une stimulation sympathique et une hypertension. L'effet hémodynamique est donc l'inverse
de celui d'une stimulation du sinus carotidien [423].
Du côté veineux, des récepteurs situés dans les oreillettes et dans l’artère pulmonaire sont sensibles à
la tension de la paroi. Ils sont stimulés par l’hypervolémie, envoient des signaux par le nerf vague
jusqu’à l’hypothalamus et inhibent la stimulation sympathique et la sécrétion de rénine. Ils contrôlent
le remplissage veineux. Ils sécrètent le facteur natriurétique auriculaire (Atrial natriuretic peptide ou
ANF), qui a un effet diurétique, natriurétique et bradycardisant. La libération de BNP (Brain natriretic
peptide) par le ventricule est aussi l’effet de la tension de paroi, mais cette fois-ci dans les myocytes
ventriculaires. Le BNP provoque une diurèse et une natriurèse, et possède également des effets
vasodilatateurs artériels et veineux (baisse de précharge et de postcharge) ; il inhibe la sécrétion de
rénine [192]. Les taux circulants de BNP sont directement proportionnels au degré de surcharge de la
paroi ventriculaire, ce qui explique leur valeur prédictive pour le diagnostic de l’insuffisance
ventriculaire [361].
D’autres récepteurs cardiaques sont sensibles à l’hypovolémie. Une brusque chute dans la tension de
la paroi ventriculaire sur une baisse de précharge déclenche le réflexe de Bezold-Jarisch qui associe
une bradycardie vagale, une hypotension et une vasodilatation artérielle ; au niveau cardiaque, il est
accompagné d’une vasodilatation coronarienne et d’un effet inotrope négatif [436]. La finalité de ce
réflexe vagal est de maintenir le remplissage ventriculaire en ralentissant la fréquence. Normalement,
il s’associe aux autres baroréflexes pour contrôler la pression et le débit artériel [182]. Mais il peut
dominer la régulation lorsque le retour veineux est diminué de manière soudaine, comme lors de
l’appui d’un utérus gravide sur la veine cave inférieure chez la parturiente en décubitus dorsal. Il peut
aussi se déclencher en cas d’hypovolémie lorsque le retour veineux est compromis par une surpression
abdominale ; le bas débit associé à l’hypotension est alors potentialisé par la bradycardie. Comme les
récepteurs cardio-inhibiteurs sont les plus nombreux dans la paroi inféro-postérieure du VG, il n’est
pas rare de voir une bradycardie et une hypotension accompagner un infarctus dans cette localisation
[331]. Ce réflexe participe à la bradycardie qui peut se déclencher lors de bloc spinal, mais n’est pas
seul en cause dans ce contexte [182]. Il est en effet associé au réflexe de Bainbridge et au réflexe
"inversé" de Bainbridge. Le réflexe de Bainbridge consiste en une tachycardie associée à une
augmentation du remplissage vasculaire central, expliquée par une suppression du tonus vagal. Cette
régulation fait varier la fréquence de 20% chez l’homme, mais de 100% chez le chien [81a]. Il est à
l’origine de la l’augmentation de fréquence cardiaque associée à l’inspirium. Le réflexe "inversé" de
Bainbridge est caractérisé par une bradycardie engendrée par la baisse du retour veineux et va dans le
même sens que le réflexe de Bezold-Jarish, mais il est déclenché par les récepteurs au volume situés
dans les veines centrales et l’OD, alors que le second est déclenché par les récepteurs situés
principalement dans le VG [81a].
Contrôle neuro-humoral de la pression
L’angiotensine II (AT-II) est issue de la transformation de la rénine sécrétée par l’appareil
juxtaglomérulaire rénal en réponse à trois stimuli : une stimulation β- adrénergique, une chute de
pression dans l’artère rénale et une fuite tubulaire de sodium. L’AT-II provoque une série d’effets
[373]:
 Vasoconstriction artérielle par effet direct sur les cellules musculaires lisses, par facilitation de
la sécrétion de nor-adrénaline dans les fibres sympathiques efférentes et par stimulation de la
production d’endothéline par l’endothélium vasculaire ;
 Régulation des baroréflexes à un niveau de pression supérieur ;
 Vasoconstriction de l’artériole efférente des glomérules (augmentation de la filtration
glomérulaire) ;
 Rétention tubulaire de sodium ;
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
82
 Stimulation de la sécrétion d’aldostérone par la corticosurrénale (résorbtion de sodium et
d’eau) et d’ADH par la posthypophyse (rétention d’eau) ;
 Activation de la croissance et de l’hypertrophie myocardique.
La dysautonomie est caractérisée par une mauvaise régulation de la pression artérielle, se présentant
sous forme d’hypotension orthostatique (baisse de > 20/10 mmHg à la station verticale). Elle est due à
un niveau de nor-adrénaline anormalement bas. De ce fait, les récepteurs adrénergiques vasculaires
sont en grand nombre (upregulation), ce qui entraîne une hypersensibilité aux agents vasopresseurs
[276a]. Outre ses formes familiale et idiosyncrasique, la dysautomie se rencontre dans une série
d’affections : diabète, sénescence, maladie de Parkinson, lésion médullaire, amyloïdose.
Contrôle périphérique des résistances
La variation du diamètre des petits vaisseaux est une manière très efficace de modifier les résistances
(RAS), puisque celles-ci varient avec la quatrième puissance du rayon d’un tube (loi de Poiseuille).
Plusieurs systèmes sont en cause pour régler localement les RAS.
 Récepteurs vasoconstricteurs : α1-adrénergiques, récepteurs à l’angiotensine (AT-II),
endothéline.
 Système vasodilatateur du cGMP de la cellule musculaire lisse: récepteurs β2-adrénergiques,
NO•.
 Facteurs endothéliaux : production de NO• (vasodilatateur) et d’endothéline (vasoconstricteur).
 Autres vasodilatateurs : prostacycline, bradykinine, histamine, adénosine, ions H+ liés à
l’activité métabolique locale.
Rôle de l’endothélium
Longtemps considéré comme un simple revêtement anti-thrombogène, l’endothélium est au centre
d’une cascade de régulations métaboliques, hémostatiques, immunitaires, inflammatoires et
hémodynamiques. Il participe à la régulation des résistances artérielles par plusieurs mécanismes
[134].
 NO• : synthétisé à partir de la L-arginine par la NO-synthase en fonction de l’augmentation du
flux sanguin, de sa pulsatilité et des forces de cisaillement exercées sur l’endothélium, il est un
puissant vasodilatateur local qui ajuste le diamètre du vaisseau au débit. Il freine l’adhésivité
plaquettaire et la réponse inflammatoire.
 Endothéline : puissant vasoconstricteur par stimulation des récepteurs ETA de la musculature
lisse, elle induit aussi une hyperplasie cellulaire (cellules musculaires lisses et fibroblastes).
 Prostacycline : produite en réponse à une stimulation inflammatoire (TNFα, IL-1), elle est un
puissant vasodilatateur.
Ceci fonctionne lorsque l’endothélium est normal ; si ce dernier est lésé ou athéromateux, il produit de
l’endothéline au lieu de NO• lorsque le stress de paroi augmente [346]. La perte de production de NO•
est un des premiers indices de dysfonctionnement dans l’artériosclérose ; les statines ont la capacité
d’augmenter cette production [245].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
83
Contrôle de la pression artérielle
La PA normale maximale est 130/80 mmHg; la PA différentielle normale maximale est 60 mmHg.
Hypertension artérielle: PA > 140/80, PAdiff > 80 mmHg.
Le sinus carotidien et les barorécepteurs aortiques sont stimulés par la distension de la paroi artérielle
et par la pulsatilité; ils déclenchent une stimulation vagale (hypotension et bradycardie).
Le glomus carotidien est stimulé par l'hypoxie; il déclenche une stimulation sympathique.
La distension des parois auriculaires provoque la sécrétion d'ANF (diurétique et bradycardisant).
La distension des parois ventriculaires provoque la sécrétion de BNP (diurétique et vasodilatateur).
La baisse brusque de la précharge induit le réflexe de Bezold-Jarish (bradycardie, vasodilatation
artérielle); en cas d'hypovolémie, il associe une bradycardie à l'hypotension.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
84
Physiopathologie de la diastole
Concentrée sur les débits et les pressions systoliques, la physiologie a longtemps considéré la diastole
comme un temps mort juste nécessaire à l'amorçage des ventricules. Or, il n'en est rien. La diastole est
un temps actif, consommateur d'énergie, très vite modifié par la pathologie (ischémie, par exemple),
tributaire de l'anatomie fonctionnelle comme des conditions hémodynamiques. La fonction diastolique
normale est la capacité du ventricule à accepter un volume de remplissage dans les limites
physiologiques sans augmentation de pression, ni au repos ni à l’exercice.
Il existe plusieurs définitions de la diastole, toutes basées sur l'alternance systole-diastole du ventricule
(Figure 5.66). Physiologiquement, on devrait inclure dans la systole toutes les phases consommatrices
d’O2, dont la phase de relaxation ventriculaire active jusqu’au pic du flux mitral E protodiastolique, et
ne réserver le terme de diastole qu’aux temps strictement passifs (depuis la phase de décélération du
flux E jusqu’à la fermeture de la valve mitrale) [44,395]. Cependant, nous utiliserons ici la définition
clinique classique, qui fait débuter la diastole à la fermeture de la valve aortique.
Figure 5.66 : Définitions
de la systole (flèches
rouges) et de la diastole
(flèches bleues). De haut
en bas: ECG, pression
intraventriculaire,
flux
mitral.
A: définition clinique.
B: définition physiologique.
C:
définition
de
Brutsaert.
D : définition selon la
mVO2. 1: contraction
ventriculaire
isovolumétrique.
2:
phase
d'éjection ventriculaire.
3: relaxation isovolumétrique. 4: remplissage
rapide. 5: diastasis. 6:
contraction auriculaire.
OA: ouverture de la
valve
aortique.
FA:
fermeture de la valve
aortique. OM: ouverture
de la valve mitrale. FM:
fermeture de la valve
mitrale. E: flux mitral
protodiastolique
(en
jaune). A: flux mitral de
la contraction auriculaire
(en vert).
ECG
Pression
intraventriculaire
gauche
Flux
mitral
A
1
2
E
3
4
A
5
6
A
B
C
D
FM OA
FA OM
FM
© Chassot 2012
Subdivisions de la diastole
Classiquement, on divise la diastole en quatre phases, calquées sur le flux à travers la valve mitrale en
relation avec les pressions ventriculaire et auriculaire (voir Figure 5.68A page 88) [284]. Ces phases
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
85
correspondent à des processus physiologiques différents, et peuvent être altérées de manière sélective
par la pathologie.
 1 – Phase de relaxation isovolumétrique (RI, 60-100 msec) : processus actif situé entre la
fermeture de la valve aortique et l'ouverture de la mitrale. La pression intraventriculaire baisse
rapidement et exponentiellement, en grande partie par un effet de succion du VG. Ce
processus implique plusieurs mécanismes différents. La durée de cette phase est inversement
proportionnelle à la POG ; plus cette dernière est élevée, plus la RI est courte ; en effet, le
temps mis par la relaxation ventriculaire pour atteindre la valeur de la POG est d’autant plus
bref que celle-ci est plus haute, et la valve mitrale s’ouvre d’autant plus vite. Par contre, la
durée de la RI est allongée en cas de défaut de relaxation myocardique (voir Figure 5.72 page
95).
 2 - Phase de remplissage rapide (180-200 msec) : la mitrale est ouverte, le sang coule selon le
gradient de pression entre l'oreillette et le ventricule ; normalement, 70-80% du remplissage a
lieu pendant cette phase. La partie ascendante du flux mitral E, jusqu’à son pic de vélocité,
dépend de la relaxation myocardique active consommatrice d’O2. La phase de décélération du
flux E (tDE, 140-220 msec) dépend de la souplesse et de l’élasticité du VG (relaxation
passive) ; elle est allongée lors de défaut de relaxation et raccourcie lorsque le VG est rigide.
 3 - Diastasis: le flux auriculo-ventriculaire diminue, voire cesse, car les pressions s'égalisent
progressivement entre l'OG et le VG; < 5% du remplissage a lieu pendant cette phase. Dans
certains cas de dysfonction diastolique (POG élevée), une petite onde de flux est visible au
cours du diastasis.
 4 - Phase de contraction auriculaire: un deuxième pic de flux (flux mitral A, 20-25% du
remplissage total) survient lorsque l'oreillette se contracte. La pression télédiastolique (Ptd)
s'établit à l'équilibre entre l’oreillette et le ventricule (pic de l’onde de pression "a"). La
contraction auriculaire permet d’augmenter la Ptd du ventricule tout en maintenant la pression
auriculaire moyenne plus basse, ce qui facilite le retour veineux. Plus sa compliance est basse
ou sa rigidité élevée, plus le ventricule dépend de cette phase pour arriver à son volume de
remplissage et à la tension de paroi nécessaire à le placer au point optimal de la courbe de
Starling. Un ventricule peu compliant (HVG, par exemple) perd plus de 40% de son débit
systolique lors d'un passage en rythme nodal ou en FA.
Le gradient de pression auriculo-ventriculaire est déterminant pour la vitesse du flux diastolique et
pour le volume transvasé entre les deux cavités ; le pic de vélocité du flux est synchrone avec le pic de
pression de l’oreillette (voir Figure 5.71 page 95). Les phases de la diastole, définies ici en suivant le
flux mitral, sont exactement les mêmes au niveau de la valve tricuspide, à la seule différence que les
valeurs de pression et de vélocité sont plus faibles. On peut grouper les nombreux facteurs qui
modifient les caractéristiques de la diastole ventriculaire en quatre catégories selon la composante sur
laquelle ils agissent, pour autant que les valves mitrale et tricuspide soient normales:




Effets sur la relaxation protodiastolique, phénomène actif ;
Effets sur la compliance méso-télédiastolique, phénomène passif ;
Effets de la durée de diastole sur l'expansion diastolique ;
Effets des structures externes sur l'expansion diastolique.
Compliance
La courbe pression-volume diastolique (compliance) est curvilinéaire : sa pente se modifie avec
l'augmentation de volume (Figure 5.67) [138]. A faible remplissage, la courbe a très peu de pente :
une variation de volume se traduit par une minime variation de pression ; de ce fait, la PVC ou la
PAPO sont de médiocres critères de remplissage en hypovolémie ; l'adage "pressure does'nt mean
volume" est particulièrement pertinent dans cette situation. En hypervolémie, au contraire, la relation
entre la pression et le volume devient fiable (partie droite de la courbe) parce que la courbe se
redresse. Ceci provient du fait que la compliance, ou variation de volume en fonction de la variation
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
86
de pression (ΔV/ΔP), baisse au fur et à mesure que le ventricule se remplit. Le VD est normalement
plus compliant que le VG parce que sa paroi est plus mince ; les volumes télédiastoliques des
ventricules sont 50-100 mL/m2 pour le VD et 40-80 mL/m2 pour le VG, et leurs pressions
télédiastoliques 6-8 mmHg et 12-15 mmHg, respectivement. La compliance est elle-même la
résultante de deux composantes, l’élasticité et la distensibilité. Une compliance anormale se traduit par
une élévation des pressions de remplissage pour les mêmes volumes, et une plus forte variation de
pression pour la même variation de volume [138].
Pression
Compliance
diminuée
Compliance
normale
P’
’
P
’
V’
V’’
V
V’’
Volume
© Chassot 2012
Figure 5.67 : Représentation schématique de la courbe de compliance normale du VG (en bleu) et lors de
dysfonction diastolique (en rouge). La courbe est curvilinéaire. A faible remplissage, la courbe a très peu de
pente : une variation de volume se traduit par une minime variation de pression. De ce fait, la pression veineuse
centrale (PVC) ou la pression artérielle pulmonaire d’occlusion (PAPO) sont de médiocres critères de
remplissage en hypovolémie. En hypervolémie, au contraire, la relation entre la pression et le volume devient
fiable (partie droite de la courbe). La courbe lors d’insuffisance diastolique (compliance diminuée) se redresse et
se déplace vers le haut et vers la gauche. La même variation de volume se traduit par une variation de pression
plus importante que lorsque la compliance est normale. A la pression P correspond un volume ventriculaire plus
petit (V’) que la norme (V) ; le sujet peut être hypovolémique avec une POD (PVC) ou une POG (PAPO) normale.
La normovolémie d’un sujet souffrant de dysfonction diastolique (V’’ rouge) est une pression de remplissage
(P’) qui correspond à une hypervolémie (V’’ bleu) chez un sujet normal.
Fonction diastolique normale (I)
La fonction diastolique est la capacité du ventricule à se remplir d’un volume adéquat sans
augmentation de pression, au repos comme à l’effort. La diastole comprend 4 phases, définies par les
composantes du flux mitral:
- Relaxation isovolumétrique
- Remplissage protodiastolique (succion ventriculaire, flux mitral E, 80% du remplissage)
- Diastasis
- Contraction auriculaire (flux mitral A, 20% du remplissage)
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
87
Fonction diastolique normale (II)
La courbe pression-volume diastolique (compliance) est curvilinéaire : sa pente se redresse avec
l'augmentation de volume. A faible remplissage, la pente est minime : une variation de volume
significative se traduit par une variation de pression négligeable ; la PVC et la PAPO ne sont pas des
critères de remplissage en hypovolémie. A remplissage élevé, la pente est importante et la relation
entre la pression et le volume devient fiable; la PVC et la PAPO sont d'excellents critères de
remplissage en hypervolémie. Une compliance anormale (dysfonction diastolique) se caractérise par
des pressions plus élevées pour le même volume de remplissage et par des variations de pression plus
importantes pour la même variation de volume.
Relaxation et compliance
Du point de vue physiologique, il est plus logique de subdiviser la diastole selon les trois différents
phénomènes qui s’y déroulent plutôt que selon les phases du flux mitral (Figure 5.68B).
Figure 5.68 : Phases de la diastole.
A : en fonction du flux mitral et des
gradients de pression OG-VG. 1: phase
de relaxation isovolumétrique (tRI). 2:
phase de remplissage protodiastolique,
flux mitral E. 3: diastasis. 4: contraction
auriculaire, flux mitral A. La partie
supérieure de l'image représente les
gradients de pression instantanés entre le
le VG (courbe rouge) et l'OG (courbe
bleue). La phase de flux protodiastolique
(relaxation) est représentée en jaune, le
diastasis (équilibre des pressions OG –
VG) en bleu et la phase de contraction
auriculaire (distensibilité) en vert.
B : subdivision physiologique en
fonction de la mVO2 et de la compliance.
I : relaxation active consommatrice
d’O2 ; elle comprend la phase de
relaxation isovolumétrique et la phase
d’accélération du flux E jusqu’à son pic
de vélocité. II : élasticité, ou relaxation
passive; elle comprend la phase de
décélération du flux E et le diastasis. III :
distensibilité, ou capacité du ventricule à
augmenter passivement de volume sous
l’effet du volume propulsé par la
contraction auriculaire. Les phases II et
III correspondent à la compliance
passive du ventricule.
1
2
3
A
4
PVG
PO
G
POG
G
Flux
protodiast
Diastasis
E
A
Flux
auriculaire
tDE
I
II
III
B
Relaxation
active
(mVO 2 +)
Elasticité
E
A
Distensibilité
© Chassot 2012
 Relaxation active ; processus actif de succion qui consomme 15% de la mVO2 totale, au cours
duquel la pression intraventriculaire baisse en-dessous de la pression intrathoracique [44] ; elle
comprend la phase de relaxation isovolumétrique et la phase d’accélération du flux mitral E
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
88
jusqu’à sa Vmax (correspondant au pic de l’onde "v" auriculaire) ; le flux protodiastolique
progresse rapidement de manière laminaire jusqu’à l’apex du VG.
 Elasticité, ou relaxation passive ; c’est la propriété d'un matériau déformé de retrouver sa
forme initiale lorsque le stress cesse; elle est le facteur dominant pendant la phase de
décélération du flux mitral protodiastolique E et pendant le diastasis diastasis ; le flux de
remplissage ralentit.
 Distensibilité ; elle traduit la capacité d'une structure à augmenter passivement de volume sous
l'effet d'un remplissage; elle caractérise la troisième phase de la diastole (remplissage pendant
la contraction auriculaire, onde de pression "a") ; le flux ré-accélère, mais reste moins rapide
que le flux E.
Pendant le diastasis, les mécanismes d’élasticité et de distensibilité se confondent, puisque les
pressions de l’OG et du VG s’équilibrent pendant cette phase. Toutefois si la POG est élevée, il arrive
de remarquer un pic de flux au cours du diastasis. Elasticité et distensibilité peuvent se regrouper sous
le terme de compliance puisque tous deux sont des phénomènes mécaniques passifs de la paroi
ventriculaire liés à la structure du myocarde et à ses propriétés visco-élastiques ; ils permettent le
remplissage au cours de période correspondant à la phase de décélération du flux E (tDE), au diastasis
et à la contraction auriculaire (flux mitral A).
Relaxation protodiastolique
La phase de relaxation protodiastolique est une phase active consommatrice d’O2 (mVO2 +). L'effet
lusitrope positif correspond à une accélération de ce processus. En cas d’ischémie, ce phénomène est
ralenti. Cette relaxation diastolique active comprend plusieurs événements [433].
 La capture active par le réticulum sarcoplasmique (RS) du Ca2+ libéré lors de l’excitation
contractile (voir Figure 5.3 page 7). En cas de dysfonction diastolique, cette recapture est
incomplète, d'où retard de relaxation et rigidité myocardique.
 L'effet de succion: en protodiastole, la pression intraventriculaire chute brusquement et
devient momentanément inférieure à la pression intrathoracique [425]. Ce phénomène
s'explique par la contraction tardive de la musculature sous-épicardique qui se prolonge
pendant la protodiastole, et par la disposition de ses fibres en hélice lévogyre qui provoque
une ouverture de la cavité ventriculaire lorsque le reste de la musculature est déjà relaché (voir
Figure 5.29 page 36) [395].
 L’ascension de l’anneau auriculo-ventriculaire ; le sang qui se trouvait dans l’OG au début de
ce mouvement se retrouve dans le VG à la fin de celui-ci ; le volume ventriculaire s’est
agrandi de 15% (VG) à 20% (VD) par simple coulissage de la base autour du volume sanguin
sans que celui-ci ne se soit lui-même déplacé (voir Figure 5.31 page 37).
 Effet lusitrope positif: les anticalciques (↓ concentration de Ca2+ libre), les inhibiteurs de la
phosphodiestérase-3 (↑ activité de l'AMPc) et les catécholamines (↑ recapture du Ca2+)
accélèrent la relaxation diastolique [433].
 Effet lusitrope négatif: la relaxation est ralentie par la digitale, les halogénés, l'ischémie et
l'insuffisance systolique [136,295].
A ces phénomènes se joignent d’autres éléments qui ne participent pas à la mVO2 parce qu’ils sont
énergétiquement passifs.
 L'élasticité de la connectine (elastic recoil): lors de la contraction, la structure élastique de
cette molécule géante est comprimée comme un ressort, qui se détend en début de diastole et
amorce le remplissage [138]; plus la contraction a été puissante (Vts bas, FE élevée), plus cet
effet est important (voir Figure 5.11 page 19).
 L'élasticité propre du myocarde: plus il est souple et compliant, plus la relaxation est rapide.
Lors d'hypertrophie ventriculaire ou en cas de tissu fibreux abondant (nouveau-né, cicatrice
d'infarctus, par exemple), cette phase est ralentie. Chez l’adulte, le 60% du myocarde est
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
89
constitué de myocytes, mais cette proportion tombe à 40% chez le vieillard et 30% chez le
nouveau-né; ce qui signifie que, respectivement, 40%, 60% et 70% du myocarde sont
constitués de fibrocytes non compliants.
 L'homogénéité géométrique: les zones akinétiques (ischémie, infarctus) ou dyskinétiques
(anévrysme ventriculaire) ne participent pas au remplissage proto-diastolique ou le
contrecarrent. Un bloc de branche ou un entraînement électrosystolique (pace-maker)
désordonnent la relaxation [138].
 Le gradient de pression auriculo-ventriculaire: bien que n'étant pas en soi-même un facteur de
relaxation, la pression de remplissage de l'oreillette (↓ par hypovolémie, ↑ par haut débit
veineux) est déterminante pour la vitesse du flux diastolique et pour le volume transvasé entre
les deux cavités.
La vitesse de relaxation du VG se mesure par la constante de temps τ (tau) de la relaxation calculée
entre la valeur maximale du – dP/dt et une valeur arbitraire de 5 mmHg à la fin de la phase de
relaxation isovolumétrique : P(t) = P • e-t/tau (Figure 5.69) [284]. Elle est accélérée par les substances
lusitropes positives, la stimulation sympathique et la tachycardie; elle est diminuée par effet lusitrope
négatif.
Figure 5.69 : Constante de
temps de relaxation τ (tau).
C'est une valeur mesurant la
vitesse de la baisse de
pression dans le VG pendant
la relaxation isovolumétrique
(- dP/dt) (d’après réf 284).
τ
p(t) = p • e
–t/τ
Chez l’individu normal (jusqu’à environ 50 ans), le remplissage ventriculaire protodiastolique est
assuré par l’aspiration active du sang par le VG et non par le gradient de pression entre l’OG et le VG.
Comme l’exercice physique a un effet lusitrope positif, la relaxation est améliorée, et la pression de
l’OG ne monte pas à l’effort malgré l’augmentation du débit cardiaque. Avec l’âge et l’HVG,
toutefois, la relaxation devient de moins en moins efficace et le remplissage dépend de plus en plus du
gradient de pression OG – VG ; dans ces conditions, la POG s’élève avec l’effort.
Elasticité et distensibilité
L’élasticité et la distensibilité méso-télédiastoliques, réunies sous le terme de compliance, sont des
phénomènes essentiellement passifs, dans lesquels interviennent plusieurs éléments [138,434].
 Dimensions ventriculaires: la courbe de compliance étant curvilinéaire, la distensibilité
physiologique baisse lorsque le volume diastolique augmente; un ventricule dilaté opère sur la
portion verticalisée de la courbe.
 Souplesse de la paroi: la rigidité myocardique représente la résistance du muscle cardiaque à
la distension lorsqu'on l'étire; on parle de visco-élasticité lorsque cette résistance est fonction
du degré et de la vitesse d'étirement. Les infiltrations (fibrose cicatricielle, collagène,
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
90
amyloïdose) et l'oedème interstitiel (post-CEC, choc anaphylactique, anasarque, crise de rejet
d'un transplant) diminuent la souplesse de la paroi ventriculaire. Une augmentation d'épaisseur
de la paroi (hypertension artérielle, HVG, par exemple) en diminue l’élasticité et la
distensibilité.
 Rapport myocytes / fibrocytes: la compliance baisse lorsque la proportion de tissu fibreux est
très élevée (≥ 60%) comme chez le nouveau-né ou le vieillard.
 Température: le refroidissement profond de la cardioplégie en CEC diminue la souplesse du
myocarde.
 Contraction auriculaire: ce facteur, accompagné d’une seconde ascension de l’anneau mitral
agrandissant longitudinalement la cavité du VG, est capital pour assurer une pression
télédiastolique suffisante. Toutefois, lorsque la distensibilité est très altérée, l’oreillette n’a pas
la puissance nécessaire pour propulser suffisamment de sang contre la résistance élevée du
myocarde ; sa contribution au remplissage devient faible.
La compliance de la cavité est la variation de volume en fonction de la pression (dV/dP), alors que sa
rigidité est le rapport inverse : dP/dV, ou variation de pression par unité de volume. Les altérations de
l’élasticité et de la distensibilité se traduisent par une baisse de la compliance et par un redressement
de sa courbe. La silhouette de la courbe de pression intraventriculaire varie selon le type de pathologie
diastolique (Figure 5.70) [434].
Pression VG
Figure 5.70 : Courbes
Pression – Volume du
ventricule gauche dans
différentes situations de
dysfonction diastolique.
A: Défaut de relaxation
(protodiastolique).
B: Restriction péricardique.
C: Défaut de distensibilité
(télédiastolique).
D: Dilatation ventriculaire.
Traitillé
bleu:
courbe
normale;
trait
rouge:
courbe
pathologique
(d'après réf 434).
A
B
C
D
Volume ventriculaire gauche
Fréquence cardiaque
La tachycardie réduit le temps à disposition pour le remplissage ventriculaire pendant la diastole. Le
diastasis (phase 3) disparaît et la vélocité du flux protodiastolique (phase 2) diminue ; la composante E
du flux auriculo-ventriculaire (phase 2) fusionne progressivement avec la composante A de la
contraction auriculaire (phase 4). Il ne subsiste alors plus qu’une seule composante télédiastolique
parce que l’oreillette n’a pas le temps d’être remplie avant la fin de la diastole. Comme le remplissage
devient davantage dépendant de la contraction auriculaire, la tachycardie est moins bien supportée
lorsque le rythme cardiaque n’est pas sinusal. En cas de dysfonction diastolique (ventricule peu
compliant), la tachycardie diminue davantage le volume systolique parce que le manque de souplesse
du ventricule réclame une longue diastole et une pression élevée pour atteindre un volume
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
91
télédiastolique suffisant. La bradycardie allonge le diastasis et augmente le volume télédiastolique.
Elle est dangereuse en cas de dysfonction du VG ou d’insuffisance aortique car elle conduit à une
dilatation ventriculaire.
Facteurs extrinsèques
Toute une série de facteurs non-myocardiques interfèrent avec la fonction diastolique des ventricules.
Citons parmi eux:
 Le péricarde est inextensible; il assure une contention externe lorsque le volume cardiaque
augmente; il provoque une inflexion brusque et une pente quasi-verticale de la courbe
pression-volume. La présence d'un épanchement ou d’une péricardite constrictive restreint
l'expansion diastolique et interrompt le remplissage en cours de diastole [138] (Figure 5.70B).
 Interdépendance ventriculaire: les deux ventricules partagent le même septum; en cas de
surcharge droite, la distension du VD empiète sur le volume diastolique du VG, car le septum
est déplacé vers la gauche (effet Bernheim). L'inverse est aussi possible en cas de dilatation
gauche; l'insuffisance d'un ventricule entraîne donc un défaut de remplissage de l'autre [117].
 Compression extrapéricardique: tumeurs ou épanchements thoraciques peuvent limiter
l'expansion ventriculaire diastolique; une pression intrathoracique élevée a le même effet
(Valsalva, PEEP).
 Une surcharge aiguë de volume ou de pression prolonge la contraction ventriculaire ; elle
retarde et raccourcit la relaxation.
 Réseau coronaire: lorsqu'il est mis sous tension par une pression artérielle diastolique élevée,
l'arbre coronaire extra- et intra-myocardique se comporte comme un squelette rigide qui
diminue l'élasticité de paroi (effet tuyau d'arrosage ou effet Gregg) [147].
 Une insuffisance ventriculaire droite provoque une hypertension auriculaire droite et un
engorgement du sinus coronaire; cette hypertension veineuse conduit à une diminution de la
distensibilité des deux ventricules [411]. L'élévation chronique de la PVC freine le drainage
lymphatique cardiaque; la stase veineuse et lymphatique contribue à la formation d'oedème
interstitiel.
Déterminants de la fonction diastolique
La relaxation protodiastolique est un processus actif de succion qui consomme 15% de la mVO2
totale; elle comprend différents éléments:
- Succion active par la contraction de la musculature sous-épicardique
- Déploiement de la connectine (elastic recoil)
- Recapture du Ca2+ par le réticulum sarcoplasmique
- Ascention de l'anneau mitral
- Elasticité de la paroi (proportion myocytes/fibrocytes, cicatrices, akinésies)
- Homogénéité de la paroi (bloc de branche, pace-maker)
- Effet lusitrope positif (anti-PDE3, catécholamines) ou négatif (digitale)
- Gradient de pression OG → VG
L’élasticité et la distensibilité méso-télédiastoliques, ou compliance, représentent la capacité du
ventricule à augmenter passivement de volume sous l'effet du remplissage; elles dépendent de:
- Dimension et épaisseur de paroi du ventricule
- Souplesse de la paroi (diminuée par cicatrices, infiltrations, œdème, hypothermie)
- Rapport myocytes/fibrocytes
- Contraction auriculaire
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
92
Déterminants extrinsèques de la fonction diastolique
Des facteurs extrinsèques modifient la performance diastolique: restriction péricardique,
interdépendance ventriculaire, compression extra-cardiaque, surpression dans les coronaires (HTA) ou
dans le sinus coronaire (POD élevée).
La tachycardie raccourcit principalement le diastasis; le flux protodiastolique E vient progressivement
fusionner avec le flux A de la contraction auriculaire; le flux mitral présente une seule composante
télédiastolique. En cas d'insuffisance diastolique le débit est étroitement dépendant de la normocardie;
il baisse lors de tachycardie, de bradycardie et de rythme non-sinusal.
Dysfonction et insuffisance diastoliques
La dysfonction diastolique se réfère à une anomalie asymptomatique dans les indices
échocardiographiques du remplissage ventriculaire, alors que l’insuffisance diastolique, responsable
de 40% des insuffisances cardiaques congestives, est un syndrome clinique qui se caractérise par une
dyspnée et une élévation chronique des pressions de remplissage (POG > 16 mmHg) en présence d’une
fonction systolique préservée (FE > 0.5).
Dysfonction diastolique
Normalement, le ventricule est capable de se remplir adéquatement sans augmentation importante de
pression, au repos comme à l'exercice. La dysfonction diastolique (DD) est caractérisée par une
anomalie des indices échocardiographiques du remplissage ventriculaire qui reste cliniquement
asymptomatique au repos ou à l’effort modéré Dans l’insuffisance diastolique (ID), la situation évolue
vers une stase en amont du VG, avec dilatation auriculaire et accumulation liquidienne interstitielle
dans les poumons ; cliniquement, l'ID se caractérise par la dyspnée; c'est l'insuffisance cardiaque
congestive à fonction systolique conservée (HFpEF : heart failure with preserved ejection fraction).
Une dysfonction diastolique est toujours présente en cas d’insuffisance ventriculaire systolique. La
cardiomyopathie diastolique semble être liée à un défaut en biodisponibilité du NO endothélial dans
les microvaisseaux coronariens, qui est corrélé avec un état inflammatoire systémique comme on le
rencontre dans la sénescense, l’obésité, l’hypertension, le diabète, le syndrome métabolique, le BPCO
et l’insuffisance rénale, comorbidités qui lui sont étroitement associées. Le manque de NO lève
l’inhibition physiologique de l’hypertrophie et de la fibrose, dont le développement rend le myocarde
rigide. Le processus consiste en un excès dans le dépôt de collagène et en une altération dans la
structure de la connectine, gigantesque molécule qui constitue l’armature des filaments d’actine et de
myosine [297a]. Cette étiologie se retrouve à l’identique dans le vieillissement des fibres cardiaques ;
l’insuffisance diastolique est en quelque sorte une « presbycardie » exagérée. La rigidité du myocarde
influence l’éjection systolique, car elle empêche le VG d’atteindre un petit volume en télésystole et
réduit de ce fait le VS à l’effort. La faible disponibilité en NO se traduit également par un défaut de
vasodilatation artériolaire à l’exercice qui contribue à la rigidité vasculaire, à l’hypertension artérielle
et à l’instabilité hémodynamique [30b].
Les trois processus de relaxation active, élasticité et distensibilité sont altérés dans la dysfonction
diastolique. Ainsi, le remplissage du VG ne dépend plus de son effet de succion et de sa souplesse,
mais de la pression auriculaire qui doit pousser le sang dans le ventricule ; la relaxation active, qui
s’accélère normalement à l’effort, ne permet plus un remplissage rapide et la capacité d’exercice
s’effondre ; la POG augmente au point de frôler la stase pulmonaire. Le flux protodiastolique est lent
et s’arrête à mi-ventricule [210a]. Au lieu de 20% normalement, le remplissage par la contraction
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
93
auriculaire contribue pour 40-50% au remplissage total [30b]. Schématiquement, les modifications de
la performance diastolique peuvent se classer en trois catégories, selon une grille de lecture basée sur
les modifications du flux mitral et du flux veineux pulmonaire à l’échocardiographie (voir Figure
25.81) [433].

Le défaut de relaxation protodiastolique, caractéristique de l’hypertrophie ventriculaire
(hypertension artérielle, sténose aortique), du vieillissement, de l’ischémie, de l’obésité, du
syndrome d’apnée du sommeil et de l’effet lusitrope négatif de certaines substances. La POG
est normale au repos mais s’élève à l’effort. Le défaut de relaxation est une altération fréquente
et bénigne, mais qui peut évoluer vers la restriction dans 10% des cas.
 La restriction par perte de compliance ventriculaire (défaut d’élasticité et de distensibilité),
caractéristique des cardiomyopathies restrictives, des infiltrations (collagénoses, amyloïdose,
œdème post-CEC) et de la dilatation majeure du ventricule. La POG est élevée au repos, et
l’effort est extrêmement limité. Il s'agit d'une situation sévère de mauvais pronostic, conduisant
à l’oedème pulmonaire, même si la fonction systolique est conservée.
 Entre les deux, se trouve une catégorie de pseudonormalisation, ainsi nommée parce que la
silhouette du flux mitral (rapport E/A) paraît normale à cause d’une élévation déjà significative
de la POG ; la clinique est intermédiaire entre les deux situations précédentes.
Lors de dysfonction diastolique, la rigidité du ventricule se traduit par une fixité du volume
diastolique, par un déplacement vers le haut et vers la droite de la courbe de compliance, et par un
redressement de la phase de recrutement de la courbe de Starling (Figure 5.44 page 56). Cela implique
trois conséquences cliniques.
 Au même volume de remplissage correspond une pression plus élevée que la norme ; un
malade peut être hypovolémique avec une PVC et une PAPO normales. Comme la courbe de
compliance est redressée, la même variation de volume se traduit par davantage de variation
dans la pression de remplissage. L’individu devient intolérant aux variations de volémie.
 La modulation du volume télédiastolique est très limitée; le volume systolique (VS) devient
très dépendant de la précharge parce que la courbe de Starling est très verticale. Le VS est donc
très sensible aux variations de la pression intrathoracique ; la ventilation en pression positive et
la PEEP baissent significativement le VS et la pression artérielle. Le même degré
d’hypovolémie provoque une hypotension plus profonde.
 La normocardie est impérative pour maintenir le volume systolique ; la tachycardie, la
bradycardie et la perte du rythme sinusal abaissent le débit cardiaque. En cas de tachycardie, le
ventricule ne peut pas accélérer son remplissage pour compenser le raccourcissement de la
diastole ; en cas de bradycardie, il ne peut pas se dilater pour augmenter le VS. En cas de
rythme nodal ou de FA, le remplissage par la contraction auriculaire est perdu; or celui-ci
contribue pour 40-50% au remplissage total, vu le défaut de relaxation protodiastolique.
A défaut de pour pouvoir construire des courbes pression-volume (Figure 5.70) en clinique, on a
recours à l'échocardiographie Doppler, qui permet, de manière non-invasive, d'étudier la vitesse des
flux intracardiaques et leurs morphologies (voir Chapitre 25, Fonction diastolique). Pour autant que les
valves auriculo-ventriculaires soient normales, la dysfonction diastolique se traduit par des
modifications des flux de remplissage que l'on peut observer dans les veines pulmonaires et les veines
caves, ou à travers la valve mitrale et la valve tricuspide (Figure 5.71) [285]. L'évolution de la
dysfonction diastolique est bien observable sur les modifications du flux mitral (Figure 5.72) [284].

Défaut de relaxation : allongement de la phase de relaxation isovolumétrique, diminution de
vélocité du flux mitral E, diminution de la vélocité du déplacement de l'anneau mitral (E'),
augmentation de la contribution auriculaire (flux A) au remplissage, rapport E/A inversé
(Figure 5.73).
 Pseudo-normalisation : l'augmentation progressive de la pression auriculaire gauche rétablit le
gradient de pression OG – VG ; la vélocité du flux E augmente et retrouve sa valeur normale,
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
94
mais sa morphologie est pathologique (pente d'accélération et de décélération accentuées) ; la
relaxation isovolumétrique est raccourcie.
Figure 5.71 : Pressions et flux de
remplissage du VG. Les flux sont représentés par leurs vélocités pendant un cycle
cardiaque. La vélocité est fonction du
gradient de pression instantané entre la
cavité d'amont et la cavité d'aval. Les pics
de flux veineux pulmonaire correspondent
aux moments où la pression dans l'OG est
la plus basse; le flux veineux pulmonaire
comprend une composante systolique (S)
bifide (S1 : descente a-c, S2 : descende x),
une composante diastolique (D, descente y)
et une composante rétrograde pendant la
contraction auriculaire (Ar). Le flux mitral
comprend
une
composante
protodiastolique (E) et une composante produite
par la contraction auriculaire (A). La
couleur rouge marque la phase systolique,
la jaune la phase proto-mésodiastolique, et
la verte la phase de la contraction
auriculaire. Ce schéma est basé sur les
données d’échocardiographie transoesophagienne ; le flux veineux pulmonaire
apparaît en dessus de la ligne de base car il
se rapproche du capteur alors que le flux
mitral apparaît en dessous de la ligne de
base car il s’en éloigne.
Figure 5.72 : Modifications du flux mitral
selon l'évolution de la dysfonction
diastolique en ETO (le flux mitral apparaît en
dessous de la ligne de base car il s’éloigne
par rapport au capteur situé dans
l’oesophage). A: Flux normal. B: Défaut de
relaxation; allongement de la phase de
relaxation isovolumétrique, diminution de
vélocité du flux mitral passif (E),
augmentation de la contribution auriculaire
(flux A ↑). C: Pseudo-normalisation;
l'augmentation progressive de la pression
auriculaire gauche rétablit le gradient de
pression OG – VG; la vélocité du flux E
augmente et retrouve sa valeur normale, mais
sa morphologie est pathologique: pentes
d'accélération et de décélération accentuées,
raccourcissement
de
la
relaxation
isovolumétrique. D: Restriction; c'est la
situation la plus grave; le ventricule devient
tellement rigide et la pression auriculaire
tellement haute que la vélocité du flux E
devient très élevée et sa décélération très
brutale; l'onde A de la contraction auriculaire
est minime parce que le ventricule n'est plus
distensible en fin de diastole. RI : phase de
relaxation isovolumétrique.
ECG
Pression
auriculaire
c
a
v
y
x
Flux veineux
pulmonaire
S
D
Ar
Ar
Flux mitral
A
E
© Chassot 2012
A
A
E
E
RI
RI
A
B
A
A
E
E
RI
RI
C
D
© Chassot 2012
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
95

Restriction : c'est la situation la plus grave ; le ventricule devient tellement rigide et la
pression auriculaire tellement haute que la vélocité du flux E devient très élevée et sa
décélération très brutale ; l'onde A de la contraction auriculaire est minime parce que le
ventricule n'est plus distensible en fin de diastole. Par contre, la proportion du flux qui recule
dans les veines pulmonaires pendant la contraction auriculaire est très importante
(augmentation du flux A rétrograde) (Figure 5.74).
A
B
E
E A
A
Figure 5.73 : Contribution de la contraction auriculaire au remplissage diastolique du ventricule gauche. La
courbe représente l'évolution de la surface ventriculaire au cours du cycle cardiaque au moyen de la définition
automatiqaue des contours endocavitaires à l'échocardiographie transoesophagienne (AQ™). A: situation
normale; la majeure partie du remplissage a lieu pendant l'onde E; l'onde A représente moins de 20% du gain en
volume télédiastolique. B: insuffisance diastolique; l'onde A est responsable de la moitié du remplissage.
Figure 5.74 : Flux dans les
veines pulmonaires (A) et à
travers la valve mitrale (B) en
situation normale et lors
d'insuffisance
diastolique
restrictive sévère. Au cours
de la contraction auriculaire,
le flux rétrograde (Ar) dans
les veines pulmonaires est
faible; la majeure partie du
flux (A) coule à travers la
valve mitrale car le ventricule
est très compliant. Lors de
restriction, le flux rétrograde
(Ar) est plus important que le
flux antérograde (A), à cause
de non-distensibilité du VG.
A
S
D
D
S
Ar
Ar
Ar
B
E
Flux
normaux
A
E
A
Flux
restrictifs
© Chassot 2012
Comme elle est directement proportionnelle au gradient de pression entre l'amont et l'aval du point de
mesure, la vélocité d'un flux de remplissage est tributaire de la pression qui règne dans les veines
pulmonaires et dans l'OG (ou dans les veines caves et dans l'OD). Il existe donc des interférences de
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
96
mesure majeures entre la fonction diastolique d'une part, et la volémie ou la précharge d'autre part
(voir Chapitre 25 Flux de remplissage). Pour éviter ce piège, on peut utiliser des techniques
échocardiographiques peu dépendantes de la précharge comme la vitesse de propagation du flux mitral
(voir Figure 25.82 page 110), le rapport E/E', la pente de décélération du flux E mitral ou du flux D
veineux pulmonaire, la différence entre la durée de l’onde A rétrograde dans les veines pulmonaires et
celle de l’onde A antérograde à travers la valve mitrale (voir Figure 25.84, page 113). Le rapport E/E’
(voir Figure 12.11) entre la vélocité maximale du flux mitral protodiastolique (E) et celle du
mouvement simultané de l’anneau mitral (E’) permet une évaluation de la POG, qui est > 18 mmHg
lorsque ce rapport est > 15. Associé à la durée de décélération du flux mitral (Etd), ce rapport permet
également de construire un algorithme simple pour stratifier les patients selon le degré de leur atteinte
diastolique [383a].
 Vélocité E’ ≥ 10 cm/s : situation normale ;
 Vélocité E’ < 10 cm/s :
o E/E’ < 8, Etd > 200 ms : défaut de relaxation ;
o E/E’ 9-12, Etd 160-200 ms : pseudonormalisation ;
o E/E’ > 13, Etd < 160 ms : restriction.
La prévalence de la dysfonction diastolique est de 20% en chirurgie vasculaire, de 50% chez les
malades de plus de 70 ans, et de 30-70% chez les patients cardio-chirurgicaux [121,433]. La DD est le
premier élément qui apparaît lors d'ischémie aiguë: la phase de relaxation est immédiatement
prolongée [150]. L'atteinte diastolique est beaucoup plus marquée dans l'ischémie par demande
excessive d'O2 (demand ischemia), telle l'exercice ou l'élévation de postcharge (clampage de l'aorte,
par exemple), que dans l'ischémie par apport insuffisant (supply ischemia lors d'hypotension ou
d’occlusion coronarienne) [434]. Ce ralentissement de la relaxation diminue encore la perfusion
coronaire, car la contraction persiste en phase protodiastolique, comprime les vaisseaux intramyocardiques et raccourcit le temps de perfusion efficace. Lors d'un infarctus, l'élasticité du ventricule
commence par augmenter parce que la paroi s'amincit et que le ventricule se dilate; elle diminue lors
de la phase de cicatrisation et de fibrose en fonction de l'étendue de la lésion [295].
L’élévation de la POG produit le même degré d’hypertension pulmonaire postcapillaire que lors de
défaillance systolique gauche ou de pathologie mitrale ; elle est également accompagnée d’une
hypertension artérielle pulmonaire réactionnelle dans la moitié des cas (voir Hypertension pulmonaire)
[30b]. Tous ces phénomènes se retrouvent à des degrés divers dans le vieillissement (voir Chapitre 21
Le patient âgé). La pathologie diastolique a été décrite essentiellement pour le VG, mais la rigidité
atteint également le VD ; toutefois, la dysfonction diastolique droite est difficile à diagnostiquer.
Dysfonction diastolique
La dysfonction diastolique est caractérisée par une élévation des pressions de remplissage pour les
mêmes volumes ventriculaires. Elle se subdivise en deux entités:
- Défaut de relaxation protodiastolique, fréquent et bénin (âge, HVG, ischémie)
- Défaut de distensibilité holodiastolique, rare et de mauvais pronostic (cardiomyopathie
restrictive, infiltrations, œdème)
La dysfonction diastolique a quatre conséquences hémodynamiques:
- Pression de remplissage plus élevée pour le même volume (PVC et PAPO ↑)
- Volume télédiastolique fixe
- Volume systolique et pression artérielle très dépendants de la précharge
- Volume systolique et pression artérielle très dépendants de la normocardie
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
97
Insuffisance diastolique
L'insuffisance diastolique se définit comme une insuffisance cardiaque congestive avec dilatation de
l'oreillette et stase en amont, mais sans altération de la fonction systolique (FE > 0.5) [433]. Au niveau
du VG, elle se traduit par une accumulation de liquide interstitiel pulmonaire, un frein aux échanges
gazeux et une dyspnée, d'abord à l'effort puis au repos. Au niveau du VD, elle cause une
hépatomégalie, de l'ascite et des oedèmes périphériques. L'insuffisance diastolique à fonction
systolique conservée représente 25-40% des cas d'insuffisance cardiaque congestive [20b,402]. Par
rapport à celle de l’insuffisance systolique, qui est de 10-15%, la mortalité annuelle de l’insuffisance
diastolique est inférieure d’un tiers : 5-12% (OR 0.68) ; par rapport à la population générale, par
contre, sa présence augmente de 2.5 fois le risque de décès [20b,249a,433]. Elle est plus fréquente
chez la femme que chez l’homme. Elle est un facteur de mortalité en cas de choc septique et de
chirurgie cardiaque [20,45,274]. En chirurgie générale, elle double le risque d'accident
cardiovasculaire et triple la mortalité postopératoire [121]. Elle augmente les difficultés
hémodynamiques au sortir de CEC [98a]. L'insuffisance diastolique se développe très tôt dans
l'évolution de l'HVG sur hypertension, alors que l'insuffisance systolique est plus tardive [369].
Il est difficile de mettre en évidence cliniquement une insuffisance diastolique. Il s'agit avant tout d'un
diagnostic de présomption basé sur la présence de dyspnée. On ne peut l'objectiver que par une
échocardiographie, une ventriculographie ou une IRM. Comme cette notion est importante pour la
prise en charge hémodynamique périopératoire des patients chirurgicaux, il faut garder à l'esprit les
situations dans lesquelles la diastole est très probablement perturbée.
 Augmentation de la masse myocardique et du réseau collagéno-fibreux : hypertrophie
concentrique du VG (hypertension artérielle, sténose aortique, cardiomyopathie
hypertrophique) ;
 Perte de myocytes et augmentation des fibrocytes: nouveau-né, vieillard, ischémie aiguë,
infarctus étendu, cardiomyopathie restrictive ;
 Infiltrations myocardiques : collagénoses, amyloïdose, œdème post-CEC ;
 Augmentation de la tension de paroi ventriculaire : insuffisance cardiaque systolique avec
dilatation ventriculaire ;
 Hypertrophie ventriculaire droite (BPCO, hypertension pulmonaire) ;
 Syndrome inflammatoire-métabolique : obésité, diabète, syndrome métabolique, insuffisance
rénale ;
 Comorbidités : apnée du sommeil, anémie, cachexie ;
 Pathologie péricardique.
La baisse de compliance modifie la relation qui lie la pression et le volume. La courbe étant déplacée
vers le haut et vers la droite, au même volume correspond une pression plus élevée (voir Figure 5.67).
Un patient peut devenir sévèrement hypovolémique avec des POD et POG normales. A l’inverse, une
faible surcharge de volume augmente substantiellement la POG et peut conduire à la stase et au préœdème pulmonaire. Peu perceptible cliniquement sauf à l'effort, l'insuffisance diastolique est très
sensible aux modifications des conditions de remplissage cardiaque et des régimes de pression
endothoracique parce que la pente de la courbe de Starling est ici très verticale. Aux mêmes variations
de pression ou de volume endothoracique correspondent des variations très grandes du volume
systolique qui se traduisent par d’amples variations de la pression artérielle systolique sous ventilation
contrôlée en pression positive (IPPV) (Figure 5.44). L’insuffisance diastolique va induire des
perturbations hémodynamiques majeures lors de modifications apparemment peu significatives des
régimes de pression et de précharge (intolérance à l'hypovolémie). Lors de l’induction de l’anesthésie
et de la curarisation, elle retentit durablement sur le débit systolique et la pression artérielle (voir
Interaction cardio-respiratoires, Effets hémodynamiques). D'autre part, les difficultés du remplissage
ventriculaire imposent une contrainte de temps à la diastole. La tachycardie ne peut pas compenser
adéquatement la baisse du volume systolique, parce que le manque de souplesse du ventricule ne
permet pas de raccourcir la diastole ; le débit cardiaque baisse. La bradycardie n’est pas mieux
supportée, car le volume télédiastolique n’augmente pas malgré la longueur de la diastole à cause de la
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
98
non-distensibilité du ventricule ; le débit cardiaque baisse également. Vu son manque de distensibilité,
le ventricule dépend largement de la contraction auriculaire pour atteindre son Vtd optimal. L’impact
hémodynamique de l'insuffisance diastolique porte sur quatre points.

Modification de la compliance (relation P-V diastolique) :
• Pressions de remplissage élevées ;
• Stase pulmonaire, dyspnée ;
• Hypovolémie à PVC ou PAPO normales ;
• Elévation excessive des pressions de remplissage lors d’hypervolémie.
 Dépendance accentuée de la précharge :
• Intolérance à la baisse de précharge (hypovolémie) ;
• Variations respiratoires très marquées de la PA en IPPV.
 Intolérance à la tachycardie et à la bradycardie :
• Lenteur du remplissage ventriculaire ;
• Fixité du volume télédiastolique à cause de la rigidité du ventricule.
 Dépendance de la systole auriculaire :
• Contraction auriculaire fournissant jusqu’à 50% du remplissage ventriculaire ;
• Volume systolique très abaissé en cas de perte du rythme sinusal.
Les critères diagnostics de l’insuffisance congestive à fonction systolique préservée sont [298] :




Symptômes d’insuffisance cardiaque congestive (stase, dyspnée) ;
FE > 0.5 ;
Dilatation de l’OG (surface > 15 cm2/m, volume > 32 mL/m2) ;
Rapport E/E’ > 15 (rapport entre la vélocité maximale du flux mitral protodiastolique E et
celle du mouvement de l’anneau mitral E’ à l’échocardiographie) (voir Chapitre 12, Figure
12.11) [9a] ; alternative : PAPO > 15 mmHg ;
 NT-proBPN > 220 pg/ml, BNP > 200 pg/ml ;
 Absence de valvulopathie.
Sur une courbe de PAPO, la non-distensibilité télédiastolique se manifeste par une onde « a »
proéminente (voir Chapitre 6, Figure 6.23) ; l’importance de l’onde « v » est fonction de la compliance
de l’oreillette gauche. La distension de l’OG caractéristique de l’insuffisance diastolique (> 32 mL/m2)
est le marqueur d’une élévation chronique de la POG. En cardiologie comme après chirurgie
cardiaque, elles est directement associée à la fibrillation auriculaire, dont l’incidence augmente de 4
fois (OR 4.1) [10a,15b].
Insuffisance diastolique
Environ 40% des insuffisances cardiaques congestives caractérisées par une stase et une dyspnée sont
des insuffisances diastoliques à fonction systolique conservée (FE > 0.5).
L'insuffisance diastolique est fréquente en cas de: HVG concentrique, âge avancé, ischémie, dilatation
VG/VD, HVD. Elle est pathognomonique de: nouveau-né, infiltrations (fibrose, œdème),
cardiomyopathie restrictive, restriction péricardique.
Impact hémodynamique en clinique:
- Pression de remplissage élevée (PVC, PAPO ↑)
- Dépendance accentuée de la précharge, intolérance à l'hypovolémie et à l’hypervolémie
- Intolérance à la bradycardie et à la tachycardie
- Dépendance du rythme sinusal
Même paucisymptomatique, l'insuffisance diastolique double le risque cardiovasculaire et triple la
mortalité opératoire.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
99
Remplissage veineux
Régulation du retour veineux
Modèle classique
Le système veineux contient 70% du volume sanguin. Il fonctionne comme une capacitance très
élastique, qui contient encore un volume résiduel important lorsque sa pression transmurale est nulle
(volume veineux fixe). Il est classiquement représenté par un réservoir drainé à mi-hauteur par le
réseau veineux cave [156,233]. La hauteur du volume disponible au dessus de l’orifice de vidange est
la pression de remplissage systémique moyenne (PRSm) (Figure 5.75). Le flux du retour veineux
(QRV) est déterminé par la PRSm, la pression dans l’OD (POD) et la résistance du système veineux
(Rv) [114] :
QRV = (PRSm - POD) / Rv
Pression de
remplissage
moyenne
Volume veineux disponible
Volume veineux fixe
Coeu
r
Pression OD
Figure 5.75 : Le système veineux fonctionne comme une capacitance très élastique, constituée d’un volume
veineux disponible et d’un volume veineux fixe ; ce dernier est le volume résiduel à pression transmurale nulle.
Il est classiquement représenté par un réservoir drainé à mi-hauteur par le réseau veineux cave [156,233]. La
hauteur du volume disponible au-dessus de l’orifice de vidange est la pression de remplissage systémique
moyenne (PRSm). Le flux du retour veineux (QRV) est déterminé par la différence entre la PRSm et la pression
dans l’OD, divisée par la résistance du système veineux. La seule manière dont le débit cardiaque peut
directement influencer le retour veineux est de baisser la POD (augmentation de QRV). Augmenter la hauteur du
réservoir veineux disponible (augmentation de la PRSm) demande un volume que le lit artériel ne peut pas
fournir, puisque le 70% du volume circulant est dans le circuit veineux et seulement 30% dans le circuit artériel.
Par analogie au robinet d’une baignoire, le débit artériel n’influence pas directement le retour veineux. Celui-ci
dépend de la POD et de la résistance du système veineux.
Il ressort de cette équation que le retour veineux augmente si la POD baisse, pour autant que PRSm et
Rv restent constants. Ceci est vrai tant que la POD ne descend pas en dessous d’une valeur critique
(Pcrit), habituellement voisine de la pression atmosphérique. Lorsque cette limite est franchie, la
pression transmurale de la veine cave devient négative et celle-ci collabe ; le flux veineux n’augmente
plus. En dessus de la Pcrit, le retour veineux diminue de manière linéaire avec l’augmentation de la
POD ; le QRV cesse lorsque la POD et la PRSm sont identiques (Figure 5.76A). L’hypervolémie
déplace la courbe vers le haut et vers la droite, et l’hypovolémie vers le bas et vers la gauche.
Toutefois, le remplissage n’est efficace que si la PRSm augmente davantage que la POD, sans quoi le
retour veineux (QRV) n’augmente pas. La seule manière dont le débit cardiaque peut directement
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
100
influencer le retour veineux est de baisser la POD (augmentation de QRV). Augmenter la hauteur du
réservoir veineux disponible (augmentation de la PRSm) demande un volume que le lit artériel ne peut
pas fournir puisque le 70% du volume circulant est dans le circuit veineux et seulement 15-20% dans
le circuit artériel. Par analogie au robinet d’une baignoire, le débit artériel n’influence pas directement
le retour veineux. Celui-ci dépend de la POD, de la résistance du système veineux et de la PRSm.
Cette dernière est essentiellement due à la pression exercée par l’élasticité des grandes veines sur le
volume sanguin [233].
Bien qu’ils puissent varier sur quelques battements cardiaques, le retour veineux et le débit cardiaque
doivent être identiques à long terme. On peut ainsi superposer graphiquement la courbe de Starling et
la courbe du retour veineux pour définir le point auquel opère le cœur dans des conditions définies
(Figure 5.76B). Une augmentation de la performance cardiaque (courbe de Starling redressée et
déplacée vers le haut) ne peut améliorer le retour veineux que par le biais d’une baisse de la POD ;
mais si celle-ci descend en dessous de la Pcrit, le flux veineux devient indépendant de la fonction
cardiaque. Il faut alors ajouter du volume circulant pour rétablir la relation. Lors de dysfonction
ventriculaire, la courbe de Starling s’aplatit et se déplace vers le bas ; elle intercepte la courbe de
retour veineux à une POD plus élevée.
Flux veineux
Courbes de
retour veineux
Courbes de
Starling
Flux veineux
Débit cardiaque
Inotrope positif
3
2
Normal
Hypervolémie
1
Inotrope
négatif
Normovolémie
A
P crit
Pression OD
B
P crit
Pression OD
Figure 5.76 : Retour veineux et débit cardiaque. A : le retour veineux (ligne bleue) augmente linéairement si la
POD baisse, pour autant que la PRSm reste constante et que la POD ne descende pas en dessous d’une valeur
critique (Pcrit), habituellement voisine de la pression atmosphérique. Lorsque cette limite est franchie, la
pression transmurale de la veine cave devient négative, celle-ci collabe et le flux veineux n’augmente plus. En
dessus de la Pcrit, le retour veineux diminue de manière linéaire avec l’augmentation de la POD ; le QRV cesse
lorsque la POD et la PRSm sont identiques. L’hypervolémie déplace la courbe vers le haut et vers la droite
(pointillé bleu), et l’hypovolémie vers le bas et vers la gauche. B : le retour veineux et le débit cardiaque doivent
être identiques à long terme. On peut ainsi superposer graphiquement la courbe de Starling (violette) et la courbe
du retour veineux pour définir le point auquel opère le cœur dans des conditions définies (1). Une augmentation
de la performance cardiaque (pointillé violet) ne peut améliorer le retour veineux que par le biais d’une baisse de
la POD ; mais si celle-ci descend en dessous de la Pcrit, le flux veineux devient indépendant de la fonction
cardiaque (2) ; la situation est rétablie par du remplissage liquidien (3). Lorsque la fonction cardiaque baisse
(traitillé violet), la POD correspondante augmente ; sur la partie horizontale de la courbe de Starling, augmenter
la POD ne modifie plus le débit cardiaque [114,233].
Rôle de l’oreillette
Pour pouvoir éjecter, une pompe doit d’abord être correctement remplie. A cet effet, les oreillettes ont
deux fonctions essentielles.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
101
 Conduits entre les grandes veines et le ventricule, elles fonctionnent comme réservoir-tampon
entre le retour veineux continu et l’éjection pulsatile, à l’instar du ballon sur un circuit
respiratoire.
 La contraction auriculaire permet d’augmenter la pression télédiastolique du ventricule sans
que la pression auriculaire moyenne ne soit élevée ; en fin de diastole, il est ainsi possible de
régler la tension de paroi et la force de contraction du ventricule tout en maintenant une
pression auriculaire moyenne basse pour faciliter le retour veineux.
Ce dernier effet est perdu lorsqu’un patient passe en rythme nodal ou en FA ; il est alors nécessaire
d’augmenter son remplissage pour maintenir le même débit. D’autre part, la contribution de la
contraction auriculaire est d’autant plus importante que le ventricule est moins souple. Normalement,
la contraction auriculaire ne fournit que 20% du remplissage ventriculaire, car la majorité de celui-ci a
lieu pendant la phase de relaxation protodiastolique. En cas de dysfonction diastolique, comme dans
l’hypertrophie ventriculaire par exemple, elle apporte 40-50% du volume ventriculaire ; la perte du
rythme sinusal diminue d’autant le volume systolique, donc le débit cardiaque [433].
Lorsque le VG est en systole, l’oreillette gauche (OG) entre en diastole. Le remplissage auriculaire est
alors facilité par la descente de l’anneau mitral dû à la contraction longitudinale du ventricule, qui
agrandit brusquement l’OG et baisse sa pression. La course de l’anneau mitral est de l’ordre de 1 cm.
Ce phénomène est moins marqué au niveau de l’anneau tricuspidien. Lors de la relaxation
ventriculaire protodiastolique, l’anneau remonte. En fin de diastole, la contraction auriculaire tire
l’anneau mitral vers le haut, complétant le retour de ce dernier en position haute télédiastolique. Au
cours de ces deux séquences, l’anneau coulisse autour du volume de sang situé à son niveau ; ce
volume passe ainsi de l’OG au VG sans même s’être déplacé (Figure 5.31 page 37).
Retour veineux
La VCI représente 70% du retour veineux et la VCS 30% (petit enfant: 50/50).
Le retour veineux au cœur (QRV) dépend de la pression de remplissage veineuse moyenne (PRVm),
de la POD et de la résistance sur le circuit veineux (Rv): QRV = (PRVm - POD) / Rv.
Le retour veineux n'est possible que si: PRVm > POD et POD > Pcrit (pression critique de fermeture).
La Pcrit de la VCI est franchie si son remplissage diminue ou si la Pabd augmente (Ptm ↓).
Le retour veineux augmente si PRVm ↑ (remplissage) et/ou POD ↓ (↑ fonction cardiaque).
Rôle de l'oreillette:
- Réservoir-tampon entre retour continu et éjection cyclique
- Sa contraction augmente la Ptd ventriculaire sans augmentation de la Pmoy auriculaire
- Perte du rythme sinusal: ↑ remplissage pour maintenir la Ptd ventriculaire
Flux de remplissage
Le remplissage veineux a lieu en continu aux deux temps du cycle cardiaque, alors que le débit des
ventricules est alterné entre une période de remplissage et une période d’éjection (Figure 5.71 page
94). Le flux veineux central dans les veines caves et les veines pulmonaires présente une silhouette
caractéristique [284].
 Un premier flux survient pendant la descente "x" de la pression auriculaire, qui se produit en
deux temps: d'abord la relaxation auriculaire proprement dite, puis l’abaissement de la valve
auriculo-ventriculaire dans le ventricule pendant le raccourcissement de ce dernier en systole.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
102
Dans les grandes veines centrales, ce premier flux est la composante systolique (S); un aspect
bifide (S1 et S2) est en général visible à l’écho Doppler dans les veines pulmonaires:
• S1 : relaxation auriculaire ;
• S2 : abaissement de la valve auriculo-ventriculaire dans le ventricule
(raccourcissement longitudinal) ;
• Chute du flux entre S1 et S2 : décrochement "c" de la pression (habituellement non
visible sur la POD).
 Le deuxième flux veineux se place pendant la descente "y" de la pression: la vidange de
l’oreillette dans le ventricule pendant la protodiastole lui permet de se remplir à nouveau
depuis les veines centrales caves ou pulmonaires. C'est le flux veineux diastolique (D), qui
s'écoule selon le gradient de pression qui règne entre les veines centrales, l'oreillette et le
ventricule, tous trois étant en libre communication pendant cette phase puisque les valves
mitrale et tricuspide sont ouvertes.
 Le troisième flux est un petit flux rétrograde (Ar) dû à la contraction auriculaire, puisqu'il n'y a
pas de valve sur les veines centrales. Il dépend de la force de contraction de l'oreillette et
augmente d'importance lorsque le ventricule devient rigide (dysfonction diastolique). Il
disparaît en l'absence de rythme sinusal.
Ces pics de flux se retrouvent de manière identique dans les veines caves et dans les veines
pulmonaires; seule leur vélocité maximale est différente. La pression moyenne de l’OG est supérieure
à celle de l’OD, mais l'amplitude des oscillations de pressions est plus ample dans l’OG; les pics de
pression y sont donc supérieurs à ceux de l’OD, alors que les nadirs de pressions y sont inférieurs,
renversant momentanément le gradient de pression entre les deux oreillettes [18]. Ce renversement est
particulièrement marqué en protosystole lors de la descente de l’anneau mitral (1-1.5 cm), qui diminue
brusquement la POG. Le gradient de pression trans-septal entre l’OD et l’OG s’inverse donc deux fois
au cours d’un cycle cardiaque (Figure 5.77) :
 Ondes "a" et "v" :
 Nadirs "x" et "y" :
POG > POD
POG < POD
Figure 5.77 : courbes de pressions
auriculaires. En rouge, pression dans
l’OG, en jaune (traitillé), pression
dans l’OD. Pendant les pics de
pression, la pression est plus élevée
dans l’OG que dans l’OD, alors que
pendant les nadirs de pression, la
pression de l’OG est plus basse que
celle de l’OD. La membrane de la
fosse ovale oscille en fonction du
gradient de pression qui règne entre
les deux oreillettes [80].
Ces gradients de pression commandent les oscillations de la membrane de la fosse ovale (septum
interauriculaire) et le flux des communications interauriculaires. Celles-ci ont deux composantes
majeures gauche → droite pendant les pics de pression a et v, et deux composantes mineures droite →
gauche pendant les nadirs de pression x et y.
Pendant la première partie de la diastole ventriculaire, l'oreillette se vide passivement à travers la valve
auriculo-ventriculaire selon le gradient de pression existant entre l’oreillette et le ventricule: c’est le
flux E (voir Figure 5.71). Après une courte période d’équilibration (diastasis), survient la contraction
auriculaire, qui engendre un deuxième pic de flux, ou flux A; celui-ci s’arrête lorsque commence la
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
103
contraction isovolumétrique. C'est donc le pic "a" de la pression auriculaire qui correspond le mieux à
la pression télédiastolique du ventricule.
Flux veineux centraux
Flux dans veines caves et veines pulmonaires:
- Composante systolique, correspond à la descente x de la pression auriculaire
- Composante diastolique, correspond à la descente y de la pression auriculaire
- Composante rétrograde due à la contraction auriculaire
Dans les oreillettes, les variations de pression sont plus amples dans l'OG que dans l'OD.
- Pendant les pics de pression a et v: POG > POD
- Pendant les nadirs de pression x et y: POG < POD
Ces gradients de pression entre les oreillettes commandent les mouvements du septum interauriculaire
(oscillations cardiogéniques) et le flux des communications interauriculaires (CIA, FOP).
Précharge du coeur
Volume intrathoracique
La précharge d’un ventricule ne se résume pas à la seule volémie. La précharge du VG se situe dans
l’enceinte thoracique, puisqu’elle est constituée par le débit des veines pulmonaires; elle est donc
tributaire du régime de pression pulmonaire. La précharge du VD est assurée par le retour veineux des
veines caves. La cave supérieure (VCS) est en majeure partie intrathoracique, et représente moins du
tiers du débit auriculaire droit chez l'adulte (la moité chez le petit enfant) [389]. La plus grande partie
du retour veineux droit est donc assuré par le débit de la veine cave inférieure (VCI), qui provient de la
cavité abdominale, laquelle a son propre régime de pression. Le trajet intrathoracique très court de la
VCI n'est pas significativement influencé de la Pit.
Le volume sanguin intrathoracique (VSit) représente environ 20% de la volémie. Celle-ci est répartie
pour 63% dans le système veineux systémique, pour 15% dans les grosses et petites artères, pour 9%
dans la circulation pulmonaire et pour 8% dans le cœur en diastole [406]. Les 4/5èmes du volume total
sont donc dans un compartiment à basse pression (5-12 mmHg). La précharge du VG, représentée par
le VSit, est tributaire du régime de pression ventilatoire. La relation entre les pressions pulmonaires et
la volémie est décrite par les zones pulmonaires de West (Figure 5.78) [415] :
 Zone I : la pression alvéolaire (Palv) est plus élevée que la pression artérielle pulmonaire
(PAP) et que la pression la pression veineuse pulmonaire (Pvp) (Palv > PAP > Pvp) ; le flux
est interrompu.
 Zone II : la PAP est plus élevée que la Palv, mais celle-ci reste supérieure à la Pvp ; le flux est
diminué, mais la pression artérielle pulmonaire d’occlusion (PAPO) mesurée par le cathéter de
Swan-Ganz reflète la Palv et non la pression de l’OG.
 Zone III : la PAP est plus élevée que la Pvp, qui est plus haute que la Palv (PAP > Pvp >
Palv) ; le flux est libre et la PAPO reflète la POG.
En hypovolémie, la Pvp est si basse que la majeure partie des poumons passe en zone I ou II ; la
PAPO reflète alors la pression de ventilation (Palv).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
104
Zone I
Zone II
OG
VG
Zone III
PAP
Palv
PVP
Figure 5.78 : Zones pulmonaires de West. PAP: pression artérielle pulmonaire. Palv: pression alvéolaire. PVP:
pression veineuse pulmonaire.
Dans la zone I:
Palv > PAP > PVP
Dans la zone II:
PAP > Palv > PVP
Dans la zone III:
PAP > PVP > Palv
La pression alvéolaire représente un obstacle (zone I) ou non (zone III) à la transmission des pressions selon le
degré de remplissage vasculaire.
Zones vasculaires abdominales et pompe diaphragmatique
La pression abdominale et la volémie sont les déterminants majeurs du débit de la VCI, donc de la
précharge droite. La contraction du diaphragme lors de l'inspirium spontané crée une surpression intraabdominale et une dépression endothoracique. En situation de normo- et d'hypervolémie, le retour
veineux à l'OD est augmenté, car la pression intravasculaire sous-diaphragmatique (PVCI) augmente
alors que la POD baisse [389]. L'élévation de la pression abdominale agit comme un piston lorsque la
VCI est remplie (PVCI haute). A l'inverse, si la VCI et l'OD sont peu remplies à cause d'une
hypovolémie, la surpression abdominale fait collaber le réseau veineux cave qui atteint sa pression
critique de fermeture (Pcrit) au niveau du diaphragme: le flux de la VCI baisse. Lors d'un inspirium
profond, le flux veineux cave inférieur peut cesser momentanément. La différence entre la pression
dans la VCI et la Pabd est la pression transmurale (Ptm) de la VCI (Ptm = PVCI – Pabd). Toute
élévation de la Pabd augmente le retour veineux par la VCI si Ptm > Pcrit, mais elle le freine ou
l’interrompt si Ptm < Pcrit.
Par analogie avec les zones pulmonaires de West, on peut décrire des zones hémodynamiques
vasculaires intra-abdominales pour expliquer ce phénomène [390] : la pression d'amont est représentée
par la pression veineuse fémorale (PVF), analogue à la pression artérielle pulmonaire (PAP). La
pression d'aval est la POD, analogue à la pression veineuse pulmonaire (PVP). La pression environnante
est la pression abdominale (Pabd), analogue à la pression alvéolaire (PAlv) (Figure 5.79). Les trois
zones se définissent comme suit [332] :
 Zone I: la pression abdominale est plus élevée que la pression veineuse fémorale et que la POD:
Pabd > PVF > POD; le flux sanguin est stoppé.
 Zone II: la pression abdominale est plus basse que la pression auriculaire droite, mais reste
inférieure à la pression fémorale: PVF > Pabd < POD; le flux est bloqué à l'inspirium
spontané lorsque la POD baisse et que la Pabd augmente sous l'effet de la contraction
diaphragmatique (collapsus veineux car Pabd > P critique de fermeture de la VCI).
 Zone III: la pression abdominale est basse, la PVCI est plus élevée que la pression auriculaire
mais inférieure à la pression veineuse fémorale: PVF > POD > Pabd; le sang coule librement à
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
105
travers la cavité abdominale puisque la pression dans la VCI est supérieure à la somme de sa
pression critique de fermeture (Pcrit) et de la pression abdominale: PVCI > Pcf + Pabd; le
flux vers l’OD est augmenté lorsque le diaphragme se contracte.
Patm
Pvf
Pabd
Pit
P
it
Volume
splanchnique
Volume
périphérique
VCI
V
CI
Ao
POD
VD
VG
Pcf
Diaphragme
© Chassot 2010
Figure 5.79 : Variations de la pression abdominale et retour veineux cave inférieur, ou zones de West
abdominales (d'après réf 390). La pression critique de fermeture (Pcf) est fonction de la pression dans la veine
cave inférieure et de la pression qui l'entoure (pression abdominale Pabd); la veine collabe lorsque la Pcf est
atteinte, et le retour veineux à l'OD cesse momentanément. Le volume périphérique représente le réseau veineux
en amont de l'abdomen (membres inférieurs, etc). Le volume splanchnique représente le réseau veineux intraabdominal mésentérique, porte, cave inférieur, etc. PVF: pression en veine fémorale. La contraction inspiratoire
du diaphragme (flèche brune) augmente la pression abdominale simultanément à la baisse de la pression
thoracique.
Une élévation de la pression abdominale, quelle qu’en soit la cause (inspirium spontané, laparoscopie,
ascite, obésité, contraction pariétale, G-suits), augmente le retour veineux par la VCI à l’entrée du
thorax si la pression transmurale de cette dernière est plus élevée que sa pression critique de fermeture
(hypervolémie, zone III). Mais elle bloque le retour veineux si la pression transmurale de la VCI est
inférieure à la pression critique de fermeture (hypovolémie, zone II), car le vaisseau collabe au niveau
diaphragmatique. Le compartiment veineux abdominal peut donc fonctionner comme une capacitance
(zone III) ou comme une résistance collabable (zone II), selon que la pression transmurale de la VCI
au niveau du diaphragme est supérieure ou inférieure à sa pression critique de fermeture.
Inversement, si l’on relâche une Pabd chroniquement élevée (curarisation, drainage d’ascite,
laparotomie pour iléus, etc), la décompression de la VCI permet à cette dernière de se dilater
soudainement, puisque sa Ptm augmente instantanément. Ce phénomène diminue son débit vers l’OD
car le sang est momentanément stocké dans ce lit vasculaire dilaté, dont la pression est abaissée: POD
> PVCI ; le retour au coeur droit s’effondre. Il faut encore noter que la compression exercée par le
diaphragme sur le foie peut induire une augmentation de pression veineuse dans le parenchyme
hépatique et accroître le retour par les veines sus-hépatiques même si le débit porte distal est abaissé
par l’augmentation de la pression abdominale [389]. Le diaphragme est donc une pompe essentielle
pour assurer la précharge du cœur droit.
Chez un malade curarisé et ventilé en pression positive (Intermittent Positive Pressure Ventilation,
IPPV), le mouvement du diaphragme est passif, et l’effet de pompe est perdu. Lors de l’inspirium, la
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
106
Pabd n’augmente pas parce que la musculature de la paroi abdominale est paralysée. Simultanément,
la pression intrathoracique (Pit) est élevée par l’IPPV. Le retour veineux par la VCI est donc diminué
significativement puisque sa pression d’amont (Pabd) est basse et sa pression d’aval (Pit) est haute.
Ceci est d’autant plus marqué que le remplissage est faible. Les effets de la respiration spontanée et de
la ventilation en pression positive sont donc potentialisés chez un patient hypovolémique par le
développement d’un effet de cascade (vascular waterfall) au niveau du diaphragme (Figure 5.80). Il
est donc normal, après une induction très stable, de voir la pression artérielle chuter au moment de la
curarisation, alors que le curare choisi n’a en lui-même aucun effet hémodynamique. Plusieurs
phénomènes interviennent :




Augmentation de la Pit moyenne ;
Baisse de la Pabd ;
Stockage de sang dans le lit splanchnique et baisse du volume sanguin intrathoracique ;
Disparition de la contention musculaire des grandes veines des membres (pooling veineux).
Figure 5.80 : Effet de
cascade
(vascular
waterfall) appliqué aux
zones
virtuelles
abdominales. En zone
I, il n'y a pas de flux
possible des veines
fémorales
jusqu'à
l'OD. En zone II, le
flux est fonction de la
différence de pression
Pvf – Pabd. En zone
III, le flux est tributaire
du gradient Pvf –
POD,
la
pression
critique de fermeture
de la VCI n'est pas
atteinte.
Pabd
Pvf
Zone I
Pabd > Pvf > POD
POD
Pvf
Pabd
Zone II
Pvf > Pabd > POD
POD
Pvf
POD
Pabd
Zone III
Pvf > POD > Pabd
Chez un malade curarisé, la position de Trendelenburg n’a que peu d’effet sur la précharge effective
du cœur, parce que le poids des viscères abdominaux appuie sur le diaphragme qui est paralysé et
augmente ainsi la pression intrathoracique (Pit). Cette élévation de la Pit est du même ordre de
grandeur que l’augmentation du retour veineux vers l’OD : la pression transmurale de l’OD, qui
représente sa précharge effective, ne se modifie pas. Au contraire, la simple élévation des jambes
augmente le retour veineux d’au moins 500 mL chez un adulte sans modifier la Pit si l'abdomen et le
thorax restent horizontaux. Cette autotransfusion est donc la parade la plus efficace à l’hypotension
chez un patient curarisé. La position de Trendelenburg n'est opérante qu'en respiration spontanée.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
107
Diagramme de Wiggers
Conçu par Wiggers en 1915 [419], ce diagramme représente la synchronisation des événements
mécaniques du cycle cardiaque (Figure 5.81). En lui ajoutant les flux tels qu’on peut les enregistrer
par échocardiographie, il résume assez succinctement les traits essentiels de la dynamique cardiaque.
ECG
Art
VG
a
a
c
v
S1
Ar
OG
y
x
S2
D
Ar
VP
VM
A
A
E
1
FM OA
2
3
FA OM
4
5
6
FM
© Chassot 2012
Figure 5.81 : Diagramme de Wiggers augmenté des flux de remplissage. Art : courbe artérielle systémique. VG :
pression intraventriculaire gauche. OG : pression de l’oreillette gauche. VP : flux dans les veines pulmonaires.
VM : flux à travers la valve mitrale. 1: contraction ventriculaire isovolumétrique. 2: phase d'éjection
ventriculaire. 3: relaxation isovolumétrique. 4: remplissage rapide. 5: diastasis. 6: contraction auriculaire. OA:
ouverture de la valve aortique. FA: fermeture de la valve aortique. OM: ouverture de la valve mitrale. FM:
fermeture de la valve mitrale. La même synchronisation et les mêmes variations de pression et de flux se
retrouvent dans les cavités droites, mais à des régimes de pression et de vélocités inférieurs.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
108
Précharge cardiaque
Volume sanguin: 70% dans le système veineux, 15-20% dans le système artériel, 10% dans la
circulation pulmonaire. La veine cave inférieure (VCI, 70% du retour à l'OD) a un trajet
intrathoracique très court et n'est pas influencée par la pression thoracique (Pit). Son débit dépend de
la pression abdominale (Pabd). La précharge du cœur gauche est le volume sanguin intrathoracique
(20% de la volémie).
La contraction diaphragmatique a un effet de pompe pour le retour veineux:
- ↑ Pabd
- ↓ Pit
- ↑ retour veineux à l'OD si Pabd < Pcrit VCI
Toute élévation de la Pabd augmente le retour veineux par la VCI si la pression transmurale (Ptm) de
la VCI reste supérieure à sa pression critique de fermeture (Ptm > Pcrit), donc si la VCI est remplie,
mais elle le freine ou l’interrompt si Ptm < Pcrit (hypovolémie).
Si IPPV et curarisation: perte de la pompe diaphragmatique (↓ retour veineux):
- ↑ Pit
- ↓ Pabd
- Stockage de volume dans VCI
- Perte de contention veineuse par les muscles
Après curarisation, le poids des viscères abdominaux augmente la Pit en position de Trendelenburg; la
Ptm de l'OD (précharge effective) n'augmente pas malgré l'augmentation du retour veineux par la VCI.
Sous curare, seule l'élévation des membres inférieurs élève la précharge réelle de l'OD parce que le
retour par la VCI augmente sans que la Pit ne se modifie (thorax et abdomen horizontaux).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
109
Interactions cardio-respiratoires
Les ventricules sont des pompes-pression situées dans une enceinte de pression, la cage thoracique.
Ceci implique trois données fondamentales [301,302,305] :
 La pression de référence pour les chambres cardiaques est la pression intrathoracique (Pit) et
non la pression atmosphérique (Patm). La pression de travail est la pression transmurale
(Ptm), qui est la différence entre la pression intracardiaque (Pic) et la Pit (Ptm = Pic - Pit).
 La précharge du cœur droit et la postcharge du cœur gauche sont extrathoraciques, donc sous
le régime de la Pabd et de la Patm, respectivement.
 La postcharge droite et la précharge gauche sont intrathoraciques, donc régies par la Pit.
L'équilibre des pressions n'est réalisé qu'en apnée, la trachée ouverte et les poumons au volume
résiduel fonctionnel (Figure 5.82). Les variations physiologiques de la pression intrathoracique
représentent environ la moitié de la valeur des pressions de remplissage auriculaire. Elles ont
davantage d'effet sur le cœur droit, dont la paroi est mince et les pressions basses, que sur le cœur
gauche, dont la paroi est plus épaisse et les pressions plus élevées.
Figure 5.82 : . Interactions
cardiorespiratoires. La pression
mesurée dans les cavités
cardiaques (Pic) est mesurée par
rapport à la pression atmosphérique (ΔP = Pic - Patm)
(double flèche noire). Or la
pression qui règne réellement
dans une chambre cardiaque est
la différence entre la pression
intracavitaire (Pic) et la
pression intrathoracique (Pit).
C'est la pression transmurale
(Ptm) : Ptm = Pic – Pit (double
flèche bleue). La pression
transmurale et la pression
mesurée par rapport à la Patm
ne sont équivalentes qu’en
apnée. La différence entre la
pression intrathoracique (zone
verte) et la pression intrapéricardique (zone jaune) n'est
que de 1-2 mmHg, donc
négligeable
en
situation
clinique normale. VCS: veine
cave supérieure. VCI: veine
cave inférieure. VP: veines
pulmonaires.
AP:
artère
pulmonaire. Jaune: péricarde.
Patm
APNEE
Pit
VCS
Poumon
s
AP
VCI
VP
Ao
OD
OG
Pabd
Pi
c
Cage thoracique
Ptm
ΔP
ic-atm
© Chassot 2012
Respiration spontanée
Inspirium spontané
Pendant un inspirium spontané, la Pit baisse en dessous de la Patm (Pit négative) par agrandissement
de la cage thoracique ; les cavités cardiaques se dilatent comme si elles étaient « aspirées » par leur
environnement (Figure 5.83). La Ptm augmente :
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
110
Ptm = Pic - (- Pit) = - (Pic + Pit)
Patm
Pit ↓
VCS
AP
VCI
OD
VP
OG
Ao
Pabd ↑
Vol VD ↑
Vol VG ↓
© Chassot 2012
Figure 5.83 : Inspirium en respiration spontanée. La pression intrathoracique (Pit) diminue à cause de
l’expansion de la cage thoracique (flèches vertes), les cavités cardiaques sont « décomprimées » par la
dépression ambiante (flèches blanches). Comme la pression dans l’OD baisse par rapport à la Patm et à la Pabd,
la précharge droite et le volume du VD augmentent ; le sang est aspiré dans les poumons et le flux dans l’AP est
élevé. La situation est inverse dans le coeur gauche: le sang est stocké dans les poumons en dépression, le retour
veineux à l'OG diminue et la précharge du VG baisse ; la dépression qui entoure ce dernier augmente la Ptm
qu’il doit fournir pour maintenir la même pression par rapport à la Patm. Lorsque l’inspirium est profond, le
grand volume du VD et le bas volume du VG déplacent le septum interventriculaire de la droite vers la gauche
(flèche noire), ce qui réduit la compliance diastolique du VG. Le volume systolique du VG baisse en inspirium
(pouls paradoxal). Pit : pression intrathoracique. Patm : pression atmosphérique. Pabd : pression abdominale.
Ptm : pression transmurale. VCI : veine cave inférieure. VCS : veine cave supérieure. AP : artère pulmonaire.
VP : veines pulmonaires.
Au niveau du cœur droit, la ΔPit inspiratoire représente le 30-50% de la Pic normale. On observe :
 Baisse de la POD (pression d’aval du retour veineux) et augmentation de la PVCI par la
descente du diaphragme (pression d’amont du retour veineux cave inférieur) ; la précharge
droite augmente, ce qui se traduit par une augmentation du flux tricuspidien et un
agrandissement du VD jusqu’à 30%.
 Augmentation du flux artériel pulmonaire par deux mécanismes :
• Augmentation de la précharge du VD ;
• Baisse de la postcharge du VD (le sang est aspiré dans les poumons en dépression).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
111
 Ce phénomène a une limite : une différence extrême entre la Pit et la Patm (Pit << Patm)
entraîne un collapsus de la VCI à l’entrée du thorax et en bloque le retour veineux, parce que
la Ptm de la VCI tombe en dessous de sa pression critique de fermeture (Pcrit).
Au niveau du cœur gauche, la situation est très différente.
 Diminution du volume systolique du VG (normalement ≤ 10%) par deux phénomènes :
• Baisse de la précharge du VG parce que la pression d’amont des veines pulmonaires
(VP) diminue (stockage de sang dans le poumon par l’inspirium), ce qui tend à
restreindre le retour vers l'OG ; ce phénomène est limité par le fait que l’OG est
soumise à la même dépression intrathoracique (le gradient de pression VP – OG est
peu modifié).
• En diastole, l’augmentation de volume du VD et la diminution de précharge du VG
conduisent à un bombement passif du septum interventriculaire dans la cavité gauche,
qui diminue le remplissage du VG par baisse de sa compliance (effet Bernheim) ; c’est
le mécanisme principal dans la baisse du Vtd gauche.
 Augmentation de la tension de paroi du VG : comme sa postcharge est à l’extérieur de la cage
thoracique (Patm), le VG doit générer une Pic plus élevée pour maintenir la même PA
systolique puisque la Pit négative le "décomprime" en permanence et s’additionne à sa Ptm :
Ptm = Pic - ( - Pit ).
Si le VG développe une Pic de 120 mmHg, mais qu’il est "décomprimé" par la dépression ambiante
(Pit : - 20 mmHg), la pression mesurée en périphérie sera : 120 – 20 = 100 mmHg. Pour conserver une
pression systémique identique, il devra développer une pression transmurale de 20 mmHg plus élevée
(120 + 20 = 140 mmHg) ; c’est l’équivalent d’une augmentation de postcharge. La chute de la
pression mesurée dans un bras pendant l’inspirium spontané se traduit par une oscillation respiratoire
de la courbe de pression artérielle systolique dont l’amplitude normale est de l’ordre de 5-10 mmHg
[256]. C’est l’équivalent physiologique du pouls paradoxal, dont seule l’exagération dans la
péricardite ou la tamponnade est pathologique. L’inspirium spontané se traduit donc par une
augmentation de la précharge ventriculaire droite et de la postcharge ventriculaire gauche.
Expirium spontané
Cette situation correspond à l’inverse de la précédente. La Pit augmente par rapport à la Patm; la Ptm
diminue ; les cavités cardiaques sont comprimées de l’extérieur par le rétrécissement de la cage
thoracique, donc leur contraction facilitée (Figure 5.84) :
Ptm = Pic - (+ Pit) = Pic - Pit
Pic = Ptm + Pit
Au niveau du cœur droit, le volume systolique du VD et le flux dans l’AP diminuent :
 Baisse de la précharge par augmentation de la POD (pression d’aval) et baisse de la Pabd
(pression d’amont) lorsque le diaphragme remonte ; le retour veineux diminue ;
 Augmentation de la postcharge du VD : les poumons comprimés par la cage thoracique
augmentent la résistance à l’éjection ; ce phénomène est limité par le fait que le VD est
comprimé de la même manière et que le gradient de pression VD – AP est peu modifié.
Au niveau du coeur gauche, le volume systolique et le flux aortique augmentent :
 Augmentation de précharge de l’OG car les poumons comprimés chassent le sang par les
veines pulmonaires ; ce phénomène est limité par le maintien du gradient de pression VP –
OG ;
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
112
 Diminution de la Ptm du VG ; celui-ci est comprimé de l’extérieur par la cage thoracique ce
qui facilite son éjection vers l’extérieur où la Patm ne s’est pas modifiée. Sa postcharge
effective diminue, et la PA systolique mesurée en périphérie s’élève.
Si le VG développe une Pic de 120 mmHg, mais qu’il est "comprimé" par la pression ambiante (Pit : +
20 mmHg), la pression mesurée en périphérie sera : 120 + 20 = 140 mmHg.
Figure 5.84 : Expirium en
respiration spontanée. La
pression
intrathoracique
s'élève, le régime des
pressions est inversé, les
effets
hémodynamiques
également.
Les
cavités
cardiaques sont comprimées
par la pression transmurale
qui s'additionne à la pression
intracavitaire (par rapport à la
pression atmosphérique); la
compression du VG lui
fournit une aide à l'éjection;
le retour droit diminue de
volume alors que le retour
gauche augmente. Le sepumt
interventriculaire
tend
à
basculer dans la droite si
l’amplitude des variations de
Pit est importante.
Pit : pression intrathoracique.
Patm :
pression
atmosphérique.
Ptm : pression transmurale.
VCI : veine cave inférieure.
VCS : veine cave supérieure.
AP : artère pulmonaire.
VP : veines pulmonaires.
Patm
+
Pit ↑
VCS
AP
VCI
OD
VP
Ao
OG
Pabd ↓
Vol VD ↓
Vol VG ↑
© Chassot 2012
Cycle respiratoire
En respiration spontanée, le mécanisme principal des interactions cardio-respiratoires est la phase de
dépression intrathoracique. C’est elle qui augmente le volume du cœur droit au détriment du cœur
gauche et occasionne la baisse du volume systolique du VG. Les modifications instantanées décrites
ici sont d’origine purement mécanique ; elles sont induites par les variations phasiques du régime de
pression intrathoracique et intra-abdominal. Par contre, les altérations ventilatoires de longue durée,
comme la PEEP, dépendent à la fois des effets mécaniques et de facteurs de régulation neurohumorale [114].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
113
Interactions cardio-respiratoires: respiration spontanée
Inspirium:
- ↓ pression intrathoracique (expansion de la paroi thoracique)
- ↑ pression abdominale
- ↑ pression transmurale des cavités cardiaques
- ↑ précharge du VD
- ↓ postcharge du VD, ↑ flux artère pulmonaire
- ↓ précharge du VG
- ↑ postcharge du VG, ↓ flux aortique
Expirium:
- ↑ pression intrathoracique
- ↓ pression transmurale des cavités cardiaques
- ↓ précharge du VD
- ↑ postcharge du VD, ↓ flux artère pulmonaire
- ↑ précharge du VG
- ↓ postcharge du VG, ↑ flux aortique
Ces données présupposent que la Ptm de la VCI est > Pcrit (normovolémie). Les variations
physiologiques du flux aortique et de la pression artérielle sont ≤ 10%.
Ventilation en pression positive
En ventilation en pression positive (IPPV, Intermittent Positive Pressure Ventilation), les variations de
la Pit proviennent des modifications du volume pulmonaire et non de celles de la cage thoracique.
Pendant la phase inspiratoire, la Pit s’élève au-dessus de la Patm. En l’absence de PEEP (Positive
End-Expiratory Pressure), la phase expiratoire correspond à une apnée, la Pit étant en équilibre avec
la Patm. Il n’y a pas de phase de Pit négative (Figure 5.85). La pression ventilatoire (Pv) est transmise
aux structures intrathoraciques proportionnellement à la compliance pulmonaire (diminuée en cas de
BPCO, SDRA, œdème, etc). En inspirium, les cavités cardiaques sont comprimées par la Pit ; la Ptm
qu’elles doivent fournir pour générer la même pression intracavitaire (Pic) diminue
proportionnellement à la pression ventilatoire (Pv) :
Ptm = Pic - Pv
Pic = Ptm + Pv
Au niveau du cœur droit, l’inspirium en IPPV se caractérise par :
 Baisse du retour veineux à cause de l’augmentation de la POD (pression d’aval) ; la
compression de l’abdomen par le diaphragme est passive et diminuée ; si le malade est
curarisé, il n’y a plus de surpression abdominale à cause de la paralysie musculaire, ce qui
accentue le frein au retour veineux par la VCI (baisse de la pression d’amont). Comme son
trajet intrathoracique est très court, la VCI n’est pas influencée par la Pit mais seulement pas
la Pabd ; or la VCI représente les 2/3 du retour veineux chez l’adulte.
 Augmentation de la postcharge du VD ; la surpression intrapulmonaire augmente la résistance
à l’éjection du VD et contribue à la baisse de son volume systolique. La postcharge
ventriculaire droite augmente de la valeur de la pression moyenne de ventilation (Pvm).
Cependant, moins les poumons sont compliants, moins ils transmettent la Pv à l’ensemble de
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
114
la cavité thoracique ; l’élévation inspiratoire de la Pit est donc moindre que celle de la Pv, ce
qui diminue l’aide systolique apportée au VD par sa compression externe (diminution de Ptm).
L’IPPV peut être dangereuse en cas d’insuffisance ventriculaire droite et/ou de BPCO sévère.
+
Patm
+
Pit ↑
VCS
AP
VCI
OD
VP
Ao
OG
Pabd 0
P VD ↑
V VG ↑
© Chassot 2012
Figure 5.85 : Inspirium en ventilation en pression positive (IPPV). La situation est analogue à celle d'un
Valsalva, mais la source de la pression positive est pulmonaire, contrairement à l’expirium spontané où la Pit
monte à cause du mouvement de la cage thoracique. La transmission de cette pression de l’arbre trachéobronchique à travers le parenchyme pulmonaire est variable selon la compliance des poumons. Le retour veineux
et l'éjection du coeur droit sont freinés et le flux pulmonaire diminue, alors que les poumons, comprimés de
l'intérieur comme une éponge, remplissent le retour au coeur gauche. La précharge du VG augmente
(augmentation du volume systolique), et la postcharge du VD s’élève (augmentation de pression
intraventriculaire). La position du septum interventriculaire dépend du rapport de ces deux phénomènes. Pit :
pression intrathoracique. Patm : pression atmosphérique. Ptm : pression transmurale. VCI : veine cave inférieure.
VCS : veine cave supérieure. AP : artère pulmonaire. VP : veines pulmonaires.
La situation est l’inverse au niveau du cœur gauche, puisque sa précharge est intrathoracique et sa
postcharge extrathoracique :
 La précharge du VG augmente : les poumons sont comprimés comme une éponge, et la Pv
augmente le gradient de pression qui génère le retour veineux pulmonaire vers l'OG. Moins les
poumons transmettent la Pv à la cage thoracique, plus l’augmentation de précharge est
importante puisque l’élévation de Pv (pression d’amont des veines pulmonaires)
s’accompagne d’une moindre compression de l’OG (pression d’aval) par la Pit. Le flux mitral
augmente de 10-30% [112]. Cet effet dépend du degré de remplissage de la circulation
pulmonaire; il ne s'applique qu'à un volume circulant normal ou élevé; en cas d'hypovolémie,
la pression ventilatoire provoque au contraire un collapsus vasculaire intrapulmonaire et une
chute brutale de la précharge gauche; le poumon devient l'équivalent d'une zone I de West.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
115
 L’éjection du VG bénéficie d'une Pit qui s'additionne à la Pic par compression externe; sa
postcharge réelle diminue [333]. Si le VG développe une pression systolique de 120 mmHg et
qu’il règne momentanément dans la cage thoracique une surpression de 20 mmHg, la pression
mesurée au bras est de 120 + 20 = 140 mmHg ; pour fournir la même pression systolique en
périphérie, le VG peut économiser 20 mmHg, donc sa postcharge effective baisse [241].
L’IPPV, et a fortiori la PEEP, constituent une véritable prothèse pour le VG. Leur sevrage,
par contre, peut entraîner une défaillance gauche.
L’expirium de l’IPPV inverse ces conditions, mais la Pit n’est jamais subatmosphérique ; la situation
est celle d’une apnée. Comme cette phase est normalement plus longue que celle de l’inspirium, les
effets hémodynamiques globaux vont être tributaires de la Pit moyenne, qui est la moyenne de toutes
les pressions instantanées enregistrées au cours d'un cycle respiratoire. L’effet d’un cycle ventilatoire
retentit sur plusieurs cycles cardiaques, vu le rapport de fréquence qui existe entre les deux.
La position du septum interventriculaire dépend du rapport entre l’augmentation de pression dans le
VD (augmentation de postcharge) et l’augmentation de volume dans le VG (augmentation de
précharge). Lorsqu'on ventile avec des volumes courants importants (VC 8-12 ml/kg) et que la Pv est
significativement plus élevée que la Pit (faible transmission de la pression par les poumons en cas de
SDRA, de BPCO ou d’emphysème), la Pic du VD augmente au point de le dilater et de produire un
bombement du septum interventriculaire dans la cavité gauche (effet Bernheim) [1].
La PEEP
La pression positive télé-expiratoire (PEEP) accentue les effets de l’inspirium en IPPV, et les
maintient en permanence ; la Pit moy reste constamment élevée. Avec des niveaux croissants de
PEEP, le retour veineux est freiné et l’OD diminue de volume. Au-delà de 15 cm H2 O, la postcharge
du VD s’élève significativement, avec un risque de déplacement du septum interventriculaire vers la
gauche (Figure 5.86). Si elle est normale, la fonction contractile du VD n’est pas altérée pour des
valeurs de PEEP jusqu’à 20 cm H2 O, bien que la vélocité du flux artériel pulmonaire diminue
progressivement [252,309]. Toutefois, une PEEP de 10-12 cm H2 O peut suffire à décompenser un VD
insuffisant ou ischémique. Sa dilatation provoque un bascule vers la gauche du septum
interventriculaire qui interfère avec le remplissage du VG. Une manœuvre de recrutement à 40 cm
H2 O provoque momentanément une dilatation du VD et un collapsus du VG. Par contre, la
compression externe du VG étant une aide à son éjection, sa postcharge effective diminue. Le sevrage
de la ventilation mécanique correspond à la perte de cette aide pour la fonction systolique gauche, et
peut se solder par une défaillance du VG.
L’importance de ces effets est commandée par plusieurs facteurs: la volémie, la fonction ventriculaire
préexistante, la dimension des ventricules, la qualité de la transmission de la pression par les poumons,
le niveau de la PEEP. De plus, une augmentation du volume pulmonaire par la PEEP, particulièrement
au niveau des segments basaux, accroît la pression de surface sur le péricarde, comprime le coeur et
collabe la veine cave supérieure. Lorsque cette condition est associée à une hypovolémie (petits
volumes cardiaques), la contrainte mécanique imposée par les poumons prédomine par rapport à la
contrainte péricardique sur le remplissage diastolique du ventricule gauche [388]. Lorsque le volume
télédiastolique est élevé, au contraire, la butée représentée par le péricarde est l’élément principal dans
la limitation du remplissage gauche.
L’effet de la PEEP sur le retour veineux est plus complexe qu’une simple augmentation de la POD
[115]. En effet, l’élévation de celle-ci s’accompagne d’une augmentation de la pression systémique de
remplissage (PRSm) par un transfert de volume veineux depuis le compartiment fixe vers le volume
veineux disponible (Figure 5.75 page 99) ; le mécanisme est une veinoconstriction sympathoadrénergique. A cela s’ajoute un transfert de volume sanguin du lit pulmonaire vers le lit systémique et
une augmentation de la pression abdominale. Le résultat est un maintien du gradient de pression
global sur le retour veineux vers l’OD. Il est clair que l’hypovolémie bloque ces phénomènes.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
116
Jusqu’à 15-20 cm H2O, la PEEP ne provoque aucun relargage de substances cardiodépressives et
n’affecte pas la contractilité ventriculaire, mais elle déplace la courbe de Starling et la courbe du retour
veineux vers la droite, d’une valeur correspondant à celle de l’augmentation de la pression
intrathoracique moyenne (Figure 5.87) [114,184]. Le point auquel opère le VG est ainsi déplacé sur le
plateau de la courbe du retour veineux. De ce fait, le débit cardiaque diminue, et ne varie pas avec une
augmentation de la contractilité. Seul un remplissage liquidien supplémentaire permet de retrouver la
valeur initiale du débit cardiaque ; à l’inverse, ce dernier est effondré lorsque la PEEP s’ajoute à une
hypovolémie.
Figure 5.86 : Ventilation en
pression positive avec PEEP. La
Pit
reste
en
permanence
supérieure
à
la
Patm.
L'augmentation de postcharge du
VD lors de PEEP élevée (> 15 cm
H2O) se traduit par une
augmentation
du
volume
télédiastolique de ce dernier
(dilatation sur élévation de la
pression artérielle pulmonaire) ;
cette agrandissement du VD peut
faire
bomber
le
septum
interventriculaire dans le VG. Pit :
pression intrathoracique. Patm :
pression atmosphérique. Ptm :
pression transmurale. VCI : veine
cave inférieure. VCS : veine cave
supérieure.
AP :
artère
pulmonaire.
VP :
veines
pulmonaires.
+
+
VCS
Pit ↑
+
AP
VCI
Patm
OD
VP
OG
Ao
Pabd 0
P VD ↑
V VG ↑
© Chassot 2012
Ces données concernent la situation où la fonction cardiaque est normale. En cas d’insuffisance
ventriculaire, la courbe de Starling est aplatie, et la performance du ventricule ne s’améliore pas avec
l’augmentation des pressions de remplissage ; seule une intervention inotrope positive permet de
redresser la pente de cette courbe. Le ventricule insuffisant est toutefois très sensible à la postcharge :
il augmente son volume systolique dès que celle-ci baisse. Or la PEEP a précisément pour effet de
diminuer la postcharge effective du VG et augmenter celle du VD ; elle tend donc à améliorer le débit
des patients en insuffisance gauche, mais péjore celui des malades en insuffisance droite. Le sevrage
du ventilateur augmente la postcharge gauche mais baisse la postcharge droite ; il élève le retour
veineux au cœur, ce qui augmente le volume télédiastolique des deux ventricules et peut dilater celui
qui est insuffisant.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
117
Flux veineux
Courbes de
retour veineux
Courbes de
Starling
Flux veineux
Débit cardiaque
PEEP +
inotrope
Courbe
normale
ZEEP
4
1
PEEP
3
2
PEEP
PEEP +
volume
ZEEP
A
P crit
Pression OD
B
P crit
Pression OD
Figure 5.87 : Effet de la PEEP sur le retour veineux et le débit cardiaque (voir Figure 5.76 page 101). A : la
PEEP (15-20 cm H2O) déplace la courbe normale du retour veineux (en vert, ZEEP) vers la droite et vers le bas
(en bleu, PEEP), d’une valeur correspondant à celle de l’augmentation de la pression intrathoracique moyenne
(Pitm). B : la PEEP déplace également la courbe de Starling normale (pointillé vert) vers la droite (trait violet)
de la même valeur de Pitm. Le point auquel opère le VG (1) est ainsi déplacé sur le plateau de la courbe du
retour veineux (2). De ce fait, le débit cardiaque diminue, et ne varie pas avec une augmentation de la
contractilité (pointillé violet) (3). Seul un remplissage liquidien supplémentaire (pointillé bleu) permet de
retrouver la valeur initiale du débit cardiaque (4) ; à l’inverse, ce dernier est effondré lorsque la PEEP s’ajoute à
une hypovolémie. Dans ces données, qui concernent la situation où la fonction cardiaque est normale, la pression
intracardiaque est mesurée par rapport à la pression atmosphérique [114,184].
Facteurs associés
Le retentissement hémodynamique de l’IPPV est tributaire de la valeur du volume courant (6-15
ml/kg) et par celle de la PEEP (5-20 cm H2 O). Mais il dépend encore de différents facteurs [305] :
 La fonction ventriculaire préexistante ; l’IPPV aggrave une insuffisance ventriculaire droite
mais soulage une insuffisance gauche.
 La transmission de la pression par les poumons ; cette transmission est atténuée de l’ordre de
40-70% en cas de pathologie pulmonaire. Plus l’atténuation est importante, plus la postcharge
droite et la précharge gauche effectives augmentent. Ce phénomène n’intervient pas en
respiration spontanée, puisque les variations de Pit sont dues aux mouvements de la cage
thoracique et non aux variations de volume des poumons. En IPPV, c’est l’augmentation du
volume pulmonaire et non celle de la pression des voies aériennes qui commande l’élévation de
la Pit.
 L’hypovolémie aggrave les effets hémodynamiques de l’IPPV et de la PEEP ; la baisse du
volume systolique effectif peut être compensée par du remplissage. Une variation de la PA >
15% en IPPV est un bon marqueur d’hypovolémie (voir ci-dessous) [256].
 L’ouverture de la cage thoracique réduit considérablement l’intensité des interactions cardiorespiratoires.
 Le rapport entre la Pit et la Pabd règle le retour veineux par la VCI.
 Le travail ventilatoire consomme normalement < 5% de la VO2 totale de l’organisme ; en cas
de SDRA, cette valeur s’élève jusqu’à 25% ; la ventilation mécanique est souvent nécessaire
pour soulager ce travail ventilatoire excessif.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
118
Interactions cardio-respiratoires: ventilation en pression positive (IPPV)
Inspirium:
- ↑ pression intrathoracique (↑ volume pulmonaire)
- 0 pression abdominale
- ↓ pression transmurale des cavités cardiaques
- ↓ précharge du VD
- ↑ postcharge du VD, ↓ flux artère pulmonaire
- ↑ précharge du VG
- ↓ postcharge du VG, ↑ flux aortique
Expirium:
- ↓ - 0 pression intrathoracique (PEEP: pression intrathoracique > 0)
- ↑ pression transmurale des cavités cardiaques
- ↑ précharge du VD
- ↓ postcharge du VD, ↑ flux artère pulmonaire
- ↓ précharge du VG
- ↑ postcharge du VG, ↓ flux aortique
L'IPPV est une aide à l'éjection du VG; son sevrage peut déclencher une insuffisance gauche.
L'IPPV peut décompenser une défaillance ventriculaire droite. Ces données présupposent que la Ptm
de la VCI est > Pcrit (normovolémie). En normovolémie, les ΔPA systémique sont < 12%.
Effets hémodynamiques
Les variations du remplissage gauche induites par l’IPPV se traduisent par des variations du volume
systolique (VS) et de la pression artérielle systolique (PAs). L’examen de la courbe artérielle révèle
(Figure 5.88) :
 Une augmentation de la PAs (Δup) en début d’inspirium lorsque l’élévation de la pression
respiratoire chasse le sang dans l’OG et augmente la précharge du VG ;
 Une diminution de la PAs (Δdown) 2 à 5 cycles cardiaques plus tard lorsque les volumes
systoliques droits diminués par l’IPPV arrivent à gauche (temps de transit pulmonaire normal :
2-5 secondes). En normovolémie et normocardie, le Δdown est plus important que le Δup.
L’amplitude de ces variations dépend du volume courant (8-12 ml/kg), de la PEEP et de la compliance
thoracique ; elle est normalement < 12% ou < 10 mmHg. Les ΔPAs sont accentuées en hypovolémie à
cause d’une prépondérance du Δdown pour trois raisons [256].

Les veines caves et les oreillettes collabent facilement parce que leur Ptm est faible ; la Pit est
du même ordre de grandeur que la Pic.
 La majeure partie du poumon passe en zone II de West, ce qui accentue l’effet sur la
postcharge droite, donc sur les ΔVS du VD et sur le remplissage du VG.
 Le ventricule fonctionne sur la partie gauche de sa courbe de Frank-Starling où la pente est
raide ; les variations de remplissage liées aux ΔPit se traduisent par de fortes variations du VS.
Dans l’insuffisance ventriculaire gauche, l’amplitude des variations est réduite et le Δup domine parce
les pressions de remplissage sont élevées et que la courbe de Starling est aplatie. Les ΔPAs
ventilatoires sont extrêmement marquées lors d’insuffisance diastolique, parce que la courbe de
Starling est au contraire très redressée (Figure 5.89).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
119
Δup
Δdown
⇑ V VG
⇓ V VG
Pression
respiratoire
(IPPV)
VC: 8 - 12 ml/kg
© Chassot 2010
Figure 5.88 : Variations ventilatoires de la pression artérielle par rapport à la pression des voies aériennes lors
de ventilation en pression positive. Lorsque la pression intrathoracique (Pit) s’élève à l’inspirium, la pression
artérielle est augmentée (Δup) puisque le volume systolique du VG est plus grand (augmentation du retour à
l’OG) et que la Pit s’additionne à la pression que génère ce dermier. Mais 2 à 5 cycles cardiaques plus tard, la
pression artérielle baisse (Δdown) parce que la diminution du retour veineux au cœur droit, qui a baissé le
volume éjecté dans l’artère pulmonaire, arrive maintenant à l’OG et diminue la précharge du VG. Cet
enchaînement provoque une oscillation ventilatoire de la pression artérielle (normal < 12%). Le Δup est
prédominant lors d’insuffisance du VG, parce que le VG congestif bénéficie grandement de l’aide que représente
la compression par la Pit ; c’est l’équivalent d’une baisse de postcharge. Le Δdown est prédominant en
hypovolémie, parce que le volume systolique est très dépendant de la précharge lorsque le malade se trouve sur
la partie gauche très verticale de la courbe de Frank-Starling. V : volume télédiastolique. VC : volume courant.
Manoeuvre de Valsalva
Les variations de pression en jeu dans les interactions cardiopulmonaires sont normalement faibles,
mais peuvent devenir très importantes dans des situations pathologiques ou lors de mouvements
respiratoires violents; les variations de la pression endothoracique générées par une manoeuvre de
Valsalva (surpression) ou de Müller (dépression par inspirium forcé à glotte fermée) sont de l'ordre de
50-100 mm Hg [99]. La démonstration des effets hémodynamiques périphériques de ces phénomènes,
décrite par Weber dans les années 1840, est bien illustrée par l'enregistrement de la pression artérielle
au cours d'une manoeuvre de Valsalva chez un individu normal (Figure 5.90) [35,140].

Phase 1: la Pit élevée (expirium forcé à glotte fermée) s’additionne à la Pic ; la PA systémique
s'élève ; cette augmentation est suffisante pour qu’une toux rythmique puisse maintenir un
débit cardiaque minimal pendant un épisode d’asystolie [80].
 Phase 2 : la diminution du débit droit qui a lieu pendant la phase 1 arrive maintenant à l'OG ;
le remplissage gauche diminue ; la PA systémique baisse, la fréquence cardiaque augmente
par réflexe.
 Phase 3 : la Pit baisse brusquement (inspirium) ; au faible retour veineux gauche s'ajoute
l'effet de l’augmentation du ΔPtm sur le VG ; la PA systémique s'effondre.
 Phase 4 : l'augmentation du débit droit de la phase 3 arrive maintenant au coeur gauche, et
s'ajoute à la vasoconstriction périphérique suscitée par l'hypotension de la phase 3 ; la PA
systémique augmente, la fréquence baisse par réflexe.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
120
Figure 5.89 : Effet de l’IPPV sur la
courbe de pression artérielle dans
différentes situations. Les variations
ventilatoires de la pression artérielle
systolique sont d’autant plus
marquées que la pente de la courbe
de Starling est raide, c’est-à-dire que
les variations de remplissage (ΔP
télédiastolique) se traduisent par de
plus fortes variations du volume
systolique (ΔVS). A : courbe
normale ; les variations de la
pression artérielle systolique sont
marquées en hypovolémie et
atténuées en normovolémie. B :
courbe
lors
d’insuffisance
diastolique ; la pente de la courbe
est très redressée, et les variations de
la pression artérielle sont amplifiées.
C : courbe lors d’insuffisance
systolique ; la courbe est aplatie et
les variations de pression artérielle
inexistantes.
Volume
systolique
Normal
B
A
ΔVS
Insuffisance
diastolique
ΔVS
ΔP
ΔP
ΔVS
Insuffisance
systolique
C
ΔP
Pression téléiastolique
© Chassot 2012
4
1
2
3
Figure 5.90 : Effet sur la pression artérielle systémique d'une manoeuvre de Valsalva (Pit = 40 mm Hg) tenue
pendant 30 secondes chez un individu normal [Extrait de: Braunwald E. Heart disease. A textbook of
cardiovascular medicine. Philadelphia : W. B. Saunders Co, 1997, 445-70. Réf 35].
 Phase 1: la Pit est élevée ; la pression artérielle (PA) systémique s'élève;
 Phase 2: la diminution du débit droit pendant la phase 1 retentit sur le remplissage gauche: la PA
systémique baisse, la fréquence cardiaque augmente par réflexe;
 Phase 3: la Pit baisse brusquement (relâchement du Valsalva); au faible retour veineux gauche s'ajoute
l'effet du ΔP transmural sur le VG: la PA systémique s'effondre;
 Phase 4: l'augmentation du débit droit de la phase 3 arrive maintenant au coeur gauche, et s'ajoute à la
vasoconstriction périphérique suscitée par l'hypotension de cette phase; la PA systémique augmente, la
fréquence cardiaque baisse par réflexe.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
121
Le profil de la pression artériel est très différent lorsque la manœuvre de Valsalva est réalisée chez un
patient en insuffisance ventriculaire gauche (Figure 5.91). En cas d’insuffisance systolique sévère,
l'hémodynamique reste stable. Les phases 1 et 2 sont normales: l'élévation de la Pit (équivalant à une
augmentation de précharge et à une baisse de postcharge pour le VG) est transmise au VG et à la PA
systémique ; cet accroissement est soudainement perdu lorsque la Pit est relâchée (phase 3). Mais
comme le coeur travaille sur la partie horizontale de sa courbe de Starling, la diminution du retour
veineux de la phase 2 n'affecte pas son débit; le baroréflexe n'est pas activé; il n'y a pas d'effet rebond
en phase 4 [35]. C’est la raison pour laquelle les malades en insuffisance systolique gauche présentent
une étonnante stabilité hémodynamique à l’induction. Chez un patient souffrant de cardiomyopathie
restrictive sévère (insuffisance diastolique ), la pression artérielle est au contraire effondrée. Le faible
retour veineux au VD n'assure pas une précharge adéquate au VG, qui fonctionne sur une courbe de
Starling très redressée ; la moindre baisse de précharge se traduit par une ample chute de volume
systolique. D’autre part, la faible compliance du VG ne permet pas une compensation par la fréquence.
Les insuffisants diastoliques sont les patients les plus instables à l’induction de l’anesthésie.
Figure 5.91 : Manœuvre de Valsalva en cas
de dysfonction ventriculaire gauche. A :
insuffisance
systolique
sévère ;
l'hémodynamique est stable. Les phases 1 et
2 sont normales: l'élévation de la Pit
(équivalent à une augmentation de précharge
et à une baisse de postcharge pour le VG) est
transmise au VG et à la PA systémique ; cet
accroissement est soudainement perdu
lorsque la Pit est relâchée (phase 3). Mais
comme le coeur travaille sur la partie
horizontale de sa courbe de Starling, la
diminution du retour veineux de la phase 2
n'affecte pas son débit; le baroréflexe n'est
pas activé; il n'y a pas d'effet rebond en phase
4 [Extrait de: Braunwald E. Heart disease.
Philadelphia : WB. Saunders Co, 1997, 44570.
Réf
35].
B:
insuffisance
diastolique (patient
souffrant
de
cardiomyopathie restrictive sévère) ; la
pression artérielle est effondrée. 1: blocage
de
la
respiration
et
surpression
endothoracique. 2: le faible retour veineux au
VD n'assure pas une précharge adéquate au
VD. 3: baisse de la pression endothoracique
et reprise de la ventilation spontanée.
Normalement, le débit du VG devrait
augmenter pendant la phase 1 grâce à
l'amélioration du retour veineux à l'OG.
1
3
A
3
160
1
2
120
80
B
Respiration spontanée
Valsalva
Relâchement
Manoeuvre de Müller
La manoeuvre de Müller (inspirium forcé à glotte fermée) démontre la restriction brutale imposée au
débit systémique par une dépression endothoracique profonde. Ce phénomène survient dans des
situations cliniques telles que les obstructions aiguës des voies aériennes, l’apnée du sommeil, ou le
laryngospasme après extubation ; il est également l'une des composantes de l’oedème pulmonaire de
haute altitude. Il se caractérise par une augmentation du volume télédiastolique du VD et une
accumulation du débit sanguin dans le lit vasculaire pulmonaire. Cette stase pulmonaire entraîne une
chute de la précharge du VG. D’autre part, la postcharge de ce dernier augmente considérablement vu
l’élévation brusque de la pression transmurale [288]. Au cours d’une dépression endothoracique de 60
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
122
mm Hg (Pit = - 60 mmHg), la PAs diminue d’autant (PAs = 120 - 60 = 60 mm Hg) parce que le VG
est "décomprimé" par la dépression ambiante. Pour maintenir la PAs, le VG doit développer une Ptm
de 60 mmHg plus élevée. S’il ne peut soutenir cette augmentation de travail, l’accumulation
liquidienne intrapulmonaire couplée à la défaillance gauche entraîne rapidement un oedème aigu du
poumon [376]. Ceci peut survenir chez un individu parfaitement sain qui fait des efforts inspiratoires
lors de laryngospasme ou d’apnée obstructive du sommeil, car sa musculature est susceptible de
développer des régimes de pression intrathoracique extrême, jusqu’à - 100 mm Hg.
Signe de Kussmaul et pouls paradoxal
Le signe de Kussmaul est une augmentation paradoxale de la POD et de la pression jugulaire pendant
un inspirium spontané, liée à une rigidité excessive du VD qui ne peut accomoder l’élévation
inspiratoire du retour veineux. Ceci survient en cas de péricardite constrictive ou de dilatation
excessive du VD. Le mécanisme est une augmentation de la pression abdominale plus importante que
la diminution de la pression intrathoracique lors de la contraction diaphragmatique; ceci a lieu lorsque
les conditions de remplissage du VD sont hypervolémiques [387]. Dans la péricardite constrictive, les
cavités cardiaques sont isolées des variations de pression intrathoraciques, l'augmentation du retour
veineux ne s’écoule pas vers l’OD, puisque sa pression ne baisse pas, mais vers la veine cave
supérieure, qui suit les variations de pression intrathoraciques. Donc le remplissage de la VCS
augmente, et il apparaît une turgescence jugulaire inspiratoire.
Le pulsus paradoxus est un terme utilisé par Kussmaul en 1873 pour décrire l’absence de pouls radial
à l’inspirium chez les patients souffrant de péricardite tuberculeuse, alors que les battements
cardiaques auscultés sont réguliers et bien audibles. En réalité, ce phénomène n’a rien de paradoxal. Il
n’est que l’amplification des variations respiratoires du débit gauche : en spontanée, la dépression
intrathoracique inspiratoire diminue le remplissage du VG et provoque un empiètement du septum
interventriculaire dans la cavité gauche. La compression péricardique ne fait qu’accentuer
l’interdépendance ventriculaire [341,383,421]. La définition du pouls paradoxal est une chute de plus
de 15% (> 12 mm Hg) de la pression artérielle systolique en début d'inspirium non forcé, mais il existe
tout un continuum depuis les variations respiratoires normales du pouls (ΔP < 12 mmHg) jusqu’à la
situation où le volume systolique devient insuffisant pour ouvrir la valve aortique, lorsque la pression
intrathoracique est très inférieure à la pression atmosphérique (inspirium profond, manoeuvre de
Müller).
Ce phénomène, caractéristique de la péricardite et de la tamponnade, peut aussi se rencontrer dans le
BPCO, la crise d’asthme, l'hypovolémie et la surcharge aiguë du VD (insuffisance mitrale massive,
embolie pulmonaire, infarctus droit). Dans ces situations, l’hyperinflation pulmonaire (élévation de
postcharge) ou la dépression ventriculaire empêchent le VD d’accomoder l’augmentation du retour
veineux en inspirium [115]. Par contre, le pouls paradoxal est absent si le ventricule est protégé de la
compression et des variations de pression thoracique par une hypertrophie pariétale importante (HVG
ou HVD) ou par une pression diastolique élevée (insuffisance cardiaque congestive, insuffisance
aortique, CIA). Etant est lié à la dépression intrathoracique inspiratoire de la respiration spontanée, il
s'amenuise ou disparaît en ventilation mécanique ; il n’est donc pas pathognomonique de la
tamponnade en ventilation contrôlée.
Ventilation et résistance artérielle pulmonaire
Les résistances dans les artères pulmonaires (RAP) varient en fonction du volume courant (VC) du
respirateur. A bas VC, l’hypoventilation induit une hypoxie qui conduit à une vasoconstriction des
petites artérioles péri-alvéolaires lorsque la PaO2 locale est < 60 mmHg. Il en résulte une augmentation
des RAP et de la postcharge du VD. A haut VC, l’hyperventilation provoque une vasodilatation des
petites artérioles, mais l’hyperinflation distend et comprime les gros vaisseaux extra-alvéolaires à
cause de la distension des alvéoles, ce qui augmente la résistance dans ces vaisseaux. Toute
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
123
augmentation ventilatoire du volume aérique pulmonaire (PEEP, par exemple) a pour effet d’agrandir
la proportion du poumon en zone I et II de West, donc d’augmenter proportionnellement la postcharge
du VD. La courbe des RAP totales a une forme en « U » avec une zone d’équilibre optimal au volume
de la capacité résiduelle fonctionnelle (Figure 5.92) [120].
Figure 5.92 : Evolution des résistances
dans les vaisseaux pulmonaires (RAP)
en fonction du volume courant du
respirateur. CRF: capacité résiduelle
fonctionnelle. A bas volume courant,
l’hypoventilation
induit
une
vasoconstriction des petites artérioles
péri-alvéolaires, ce qui augmente les
RAP. A haut volume courant,
l’hyperventilation
provoque
une
vasodilatation des petites artérioles, mais
comprime les gros vaisseaux extraalvéolaires à cause de la distension des
alvéoles, ce qui augmente la résistance
dans ces vaisseaux. La courbe des RAP
totales a une forme en « U » [120].
RVP
Vaisseaux extra-alvéolaires
Vaisseaux alvéolaires
RAP totales
CRF
Vol pulm
Interactions cardio-respiratoires: effets hémodynamiques
En normovolémie et normocardie, la pression artérielle systolique oscille ≤ 12% avec le cycle
respiratoire en IPPV.
- En hypovolémie, les ΔPAsyst et ΔVS sont > 15%
- En insuffisance gauche, les ΔPAsyst et ΔVS sont minimes ou nuls
Manœuvre de Valsalva en situation normale:
- 1 (Pit ↑): ↑ PA systémique (↑ VS du VG)
- 2 (Pit ↑): ↓ PA systémique, tachycardie (transit transpulmonaire du bas débit du VD)
- 3 (inspirium, Pit ↓): ↓↓ PA systémique, tachycardie
- 4 (équilibration): ↑ PA systémique, bradycardie
Manœuvre de Valsalva en insuffisance systolique du VG: faible ↑ PA systémique dans les phases 1 et
2, normalisation en phases 3 et 4; ΔPAsyst peu importants, absence d'hypotension en physe 3.
Manœuvre de Valsalva en insuffisance diastolique du VG: ↓↓ PA systémique en phase 1, 2 et 3.
Evaluation dynamique de la volémie
Variations ventilatoires du remplissage
La ventilation mécanique en pression positive crée une variation cyclique du remplissage ventriculaire
gauche qui se traduit par une variation identique du volume sytolique. Pour autant que la compliance
et les résistances artérielles restent stables pendant le cycle respiratoire, le résultat est une variation
ventilatoire de la pression systolique (PAs) et de la pression pulsée (PP = PAs – PAd) (Figure 5.88
page 120).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
124
 Lorsque la pression intrathoracique (Pit) s’élève à l’inspirium, la pression artérielle est
augmentée (Δup) puisque le volume systolique du VG est plus grand (augmentation du retour
à l’OG) et que la Pit s’additionne à la pression qu’il génère.
 La pression artérielle baisse 2 à 5 cycles cardiaques plus tard (Δdown), parce que la diminution
du retour veineux au cœur droit, qui a baissé le volume éjecté dans l’artère pulmonaire, arrive
maintenant à l’OG et diminue la précharge du VG.
Le Δup est prédominant lors d’insuffisance ventriculaire gauche, parce que le VG congestif bénéficie
grandement de l’aide que représente la compression par la Pit ; c’est l’équivalent d’une baisse de
postcharge. Le Δdown est prédominant en hypovolémie, parce que le volume systolique est très
dépendant de la précharge lorsque le malade se trouve sur la partie gauche très verticale de sa courbe
de Frank-Starling. S’il est normo- ou hypervolémique, les variations disparaissent parce que la pente
est faible sur la partie droite de la courbe (Figure 5.44 page 56) [315]. Comme l’oscillation ventilatoire
de la pression artérielle est normalement < 12%, une exagération du Δdown est un bon indice
d’hypovolémie et de réponse positive au remplissage liquidien [57,256]. A défaut de courbe artérielle
invasive, on peut faire la même observation sur le tracé de la plethysmographie oxymétrique (SpO2)
[58]. Un volume courant élevé (≥ 8 mL/kg) est une condition essentielle pour que ces variations soient
quantifiables.
La mesure des variations ventilatoires de la pression artérielle permet de gérer l’administration
liquidienne de manière rationnelle en maintenant le patient au niveau de remplissage correspondant à
son volume systolique maximal (genou de la courbe de Starling) (goal-directed fluid administration) :
on administre des aliquots itératifs de perfusion (100-250 mL cristalloïdes ou colloïdes) jusqu’à ce que
le VS n’augmente plus (disparition du Δdown). Bien que l’administration liquidienne totale soit en
général un peu supérieure à ce qu’elle est avec la routine habituelle, cette technique offre l’avantage de
compenser le volume perdu de manière quantifiée et au bon moment ; l’effet de la synchronisation des
pertes et du remplacement est au moins aussi important que celui de la compensation globale en
volume [63]. Cette manière de faire présuppose que les RAS, la pression abdominale, le rythme
cardiaque et la fonction ventriculaire soient normales.
On peut également observer les variations ventilatoires du remplissage veineux et auriculaire en
mesurant trois données échocardiographiques.
 La pulsatilité de la veine cave inférieure : lorsqu’elle est peu remplie, la VCI se dilate lors de
l’inspirium de l’IPPV (transmission de l’augmentation de la POD) ; cette mesure est très
dépendante de la pression abdominale ;
 La collapsibilité de la veine cave supérieure : elle augmente en hypovolémie (compression lors
de l’inspirium de l’IPPV) ;
 L’oscillation cardiogénique de la membrane de la fosse ovale (septum interauriculaire) : elle
augmente d’amplitude lorsque les oreillettes sont vides et persiste aux deux temps respiratoire
en hypovolémie.
Monitorage hémodynamique intégré
On a coutume d’opposer entre elles les différentes techniques de monitorage hémodynamique :
cathéter pulmonaire de Swan-Ganz, échocardiographie transoesophagienne, ou analyse de la pression
artérielle (PiCCO). Cette attitude est sans fondement réel, car ces techniques ne mesurent pas les
mêmes données et sont pertinentes dans des conditions hémodynamiques différentes. Cette
différenciation s’éclaire en superposant dans le même graphique la courbe de Frank-Starling et la
courbe de compliance du ventricule gauche (Figure 5.93) [374].
 En hypovolémie, la courbe de Starling est dans sa phase de recrutement ; de petites variations
de remplissage se traduisent par d’amples variations du volume systolique. La courbe de
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
125
compliance, par contre, est dans sa phase horizontale : les variations du volume de
remplissage ne se traduisent que par de minimes variations des pressions (PVC, PAPO).
 En hypervolémie, la courbe de Starling est à son genou ; les variations de remplissage ne
modifient plus le volume systolique. La courbe de compliance est au contraire redressée, et
même de faibles variations du volume auriculaire se traduisent par des variations significatives
de la PVC ou de la PAPO.
Volume
Pression
Indices éjectionnels
dynamiques
(PA, PiCCO)
ETO
A
A
Pressions de remplissage
(PVC, PAPO)
Swan-Ganz
B
B
ΔVS’
Courbe de
Starling
ΔP’
ΔVS
ΔP
ΔP
Courbe de
compliance
ΔV
© Chassot 2012
Pression ou volume télédiastolique
Figure 5.93 : Superposition de la courbe de Frank-Starling et de la courbe de compliance du VG. Ces deux
courbes démontrent une silhouette identique mais en miroir ; toutes deux présentent un genou séparant une zone
où la courbe est asymptotiquement verticale et une zone où elle présente un pateau quasi-horizontal. Le genou
est situé au niveau de la ligne pointillée jaune verticale qui coupe la figure en deux parties. A : A gauche, en
hypovolémie (P télédiastolique basse), la courbe de Starling est dans sa phase de recrutement ; de petites
variations de remplissage (ΔP) se traduisent par de grandes variations du volume systolique (ΔVS). La courbe de
compliance est au contraire très plate ; les variations de remplissage (ΔV) n’occasionnent que de minimes
variation de PVC ou de PAPO (ΔP). Ce sont les indices éjectionnels dynamiques (variations ventilatoires de la
pression artérielle et du volume systolique) ou les mesures indépendantes de la compliance (surfaces des cavités
à l’ETO, oscillations du septum interauriculaire) qui sont les plus pertinentes pour éveluer le remplissage dans
cette zone. B : A droite, en hypervolémie, la situation est inversée. La relation précharge / volume systolique est
inexistante puisque la courbe de Starling est plate, alors que la relation pression / volume de remplissage est très
significative pendant la phase de redressement de la courbe de compliance. Ce sont donc les pressions de
remplissage fournies par la Swan-Ganz (PVC, PAPO) qui deviennent les plus utiles pour évaluer le remplissage
[374].
On voit donc que les mesures dynamiques liées aux variations ventilatoires du remplissage (ΔPAsyst,
PiCCO, échocardiographie) sont très efficaces pour diagnostiquer l’hypovolémie, mais ne sont
d’aucune utilité lorsque le malade est en hypervolémie (stase ventriculaire, œdème, congestion). A
l’inverse, les pressions de remplissage (PVC, PAPO) ne sont d’aucune utilité pour diagnostiquer
l’hypovolémie, mais sont essentielles pour gérer l’adminsitration liquidienne des malades en
hypervolémie (insuffisance ventriculaire, valvulopathie, insuffisance rénale, etc). Il va sans dire que
cette formulation simplifiée est très schématique et doit être complétée par les multiples facteurs qui
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
126
interviennent dans l’appréciation de la volémie : pression abdominale, pression critique de fermeture
des veines caves, curarisation, mode ventilatoire, cardiopathies valvulaires, insuffisance diastolique,
pertes liquidiennes en cours, apport hydro-électrolytique lors de CEC, œdème tissulaire, troisième
secteur, etc. Aucune de nos mesures n’a de relation univoque avec la volémie.
Indices dynamiques de la volémie (IPPV)
Pour autant que les résistances artérielles, la compliance et la fonction ventriculaire restent stables
pendant le cycle respiratoire, la variabilité du VS, de la PAsyst et de la PAdiff en IPPV est directement
proportionnelle au degré d'hypovolémie. La mesure des variations ventilatoires de la pression artérielle
permet de gérer l’administration liquidienne de manière à maintenir le patient au niveau de son
volume systolique maximal (genou de la courbe de Starling) en administrant des aliquots itératifs de
perfusion jusqu’à ce que le VS n’augmente plus (disparition du Δdown).
Autres indices dynamiques mesurables à l'échocardiographie:
- Variabilité du diamètre de la VCI
- Collapsibilité de la VCS
- Oscillations du septum interauriculaire
La superposition de la courbe de Starling et de la courbe de compliance démontre que le monitorage le
plus efficace pour gérer l'administration liquidienne dépend du degré de remplissage :
- En hypovolémie, variations ventilatoires du VS, de la PAsyst et de la PAdiff, oscillations du
septum interauriculaire
- En hypervolémie, PVC et PAPO
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
127
Dysfonction ventriculaire gauche
Insuffisance ventriculaire gauche systolique
Classifications
On peut définir la dysfonction ventriculaire proprement dite comme un défaut de contractilité
myocardique, alors que l’insuffisance cardiaque est l’ensemble des conditions hémodynamiques dans
lesquelles le débit cardiaque ne satisfait plus aux besoins de l’organisme ; c’est un syndrome clinique
caractérisé par une intolérance à l’effort et une dyspnée [290]. L’insuffisance peut concerner la systole
et/ou la diastole. En effet, on estime que le tiers des malades qui présentent une dyspnée d’origine
cardiaque a une fonction systolique conservée mais souffre d’une dysfonction diastolique isolée,
caractérisée par une élévation des pressions de remplissage et une stase d’amont [30,402,433].
Cliniquement, l’insuffisance systolique se manifeste par une fatigabilité et une intolérance à l’effort ;
c’est un défaut éjectionnel (forward failure). L’insuffisance diastolique, par contre, entraîne une stase
pulmonaire, d’où la dyspnée typique de l’excès de liquide interstitiel dans le parenchyme
interalvéolaire (backward failure). Le défaut de compliance diastolique, qui peut survenir isolément
dans l’insuffisance diastolique, est en général présent en cas d’insuffisance systolique majeure [368].
Certaines affections peuvent provoquer une défaillance cardiaque par haut débit systémique (high
output failure) : anémie, shunt gauche-droit, thyréotoxicose, maladie de Paget, grossesse.
La distinction entre dysfonction systolique et diastolique n’est pas aussi tranchée que ne le laisse
supposer leurs définitions. Deux théories s’affrontent à ce sujet [298].
 L’insuffisance ventriculaire est un continuum entre la pathologie à prédominance diastolique
et la pathologie à prédominance systolique, toutes deux caractérisées cliniquement par la stase
et la dyspnée ; dans la première, la stase est accompagnée d’une fraction d’éjection conservée,
alors que celle-ci est abaissée dans la seconde. La différence essentielle entre les deux
extrémités du spectre est la dilatation et le remodelage du ventricule. Environ 20% des cas
d’insuffisance diastolique évoluent vers une insuffisance systolique.
 Les deux entités correspondent à des maladies différentes, caractérisées par des lésions
structurales distinctes : remodelage concentrique avec hypertrophie des cardiomyocytes dans
l’insuffisance diastolique versus remodelage excentrique avec réduction de la densité des
myocytes dans l’insuffisance systolique. D’autre part, la thérapeutique améliore
significativement le pronostic de la dysfonction systolique, mais non celui de la dysfonction
diastolique.
A la lumière des travaux récents sur la mécanique ventriculaire, une troisième théorie s’est développée
[357]. L’insuffisance ventriculaire est divisée en trois catégories.
 Dysfonction sous-endocardique, avec atteinte préférentielle des fibres longitudinales, défaut
de relaxation et retard de rotation en systole ; structurellement, la couche sous-endocardique
est pauvre en récepteurs β ; comme elle est plus fragile, elle occasionne une dysfonction
longitudinale précoce caractérisée par un défaut de relaxation mais une fraction d’éjection
systolique conservée.
 Dysfonction sous-épicardique, avec perte de la rotation systolique, de la relaxation
protodiastolique et de l’effet de succion ; la couche sous-épicardique est partculièrement riche
en récepteurs β.
 Dysfonction transmurale, avec atteinte de toutes les couches ; comme la couche circulaire est
capitale pour l’éjection (80% du volume systolique est éjecté par le raccourcissement radiaire),
cette dysfonction se caractérise par un effondrement de la fraction d’éjection et une dilatation
du ventricule.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
128
En clinique, on préfère utiliser une classification en 4 stades, qui permet de définir la thérapeutique et
le pronostic (Figure 5.94) [149,171].
 Stade A : malade asymptomatique et sans signes d’insuffisance cardiaque, mais présentant des
facteurs de risque pour la maldie (HTA, diabète, coronaropathie, présence de toxiques comme
l’alcool) ;
 Stade B : malade porteur d’une cardiopathie paucisymptomatique (infarctus, valvulopathie)
dont la fraction d’éjection est normale ou à la limite inférieure de la norme (FE > 0.5) ;
 Stade C : présence d’une cardiopathie symptomatique entraînant la dyspnée, la fatigue et une
réduction de la tolérance à l’effort ; la FE est abaissée (0.35 - 0.45) ;
 Stade D : insuffisance cardiaque réfractaire, patient symptomatique au repos, FE est < 0.35.
Stade A
Stade B
Stade C
Stade D
A risque d’IC
Ø cardiopathie
Ø symptômes
Présence de
cardiopathie
Ø symptômes
Présence de
cardiopathie
symptomatique
Insuffisance
réfractaire
TTT avancés
HTA, CAD
Diabète
Obésité
Toxiques
Traiter
HTA
lipides
Exercice
Toxiques
Mortalité
liée à
intercurrences
Cardio
pathie
Infarctus
FE < 45%
Valvulopath
Sympt
effort
Traiter
idem 1
β-bloqueur
IEC
Mortalité
≤ 5% / an
Mortalité corrélée à la
fraction d’éjection
Cardiopath
Dyspnée
Fatigue
Effort ⇓
Traiter
IEC
β-bloqueur
diurétique
digitale
Mortalité
10-15% / an
Sympt
repos
Symptomat
au repos
malgré
traitement
Traiter
Inotrope
Pace 3-ch
Assistance
Transpl
Mortalité
50% / an
Mortalité corrélée à la
dilatation ventriculaire
Figure 5.94 : Evolution de l’insuffisance cardiaque en quatre stades, avec leurs caractéristiques symptomatiques,
leurs plans thérapeutiques et leurs pronostics [145,171].
La dyspnée et la fatigabilité sont des symptômes peu spécifiques [430]. L’orthopnée, la distension
jugulaire, les râles de stase et la cardiomégalie sont plus spécifiques (70-90%) mais manquent de
sensibilité (30%) [249]. On peut regrouper dans un même graphique la symptomatologie liée au bas
débit (hypotension, pression différentielle étroite, extrémités froides, tachycardie, IC < 2 L/min/m2) et
celle liée à la stase en amont (orthopnée, râles de stase, oedèmes, extrémités moites, PAPO ↑, PVC ↑,
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
129
B3, reflux hépato-jugulaire) ; on peut ainsi définir 4 régions selon la perfusion des extrémités (Figure
5.95) [286].
 Extrémités chaudes et sèches, situation normale ;
 Extrémités froides et sèches : hypoperfusion à pression de remplissage basse (5% des cas
d’insuffisance ventriculaire) ;
 Extrémités chaudes et moites : hautes pressions de remplissage mais débit systolique conservé
(67% des cas) ;
 Extrémités froides et moites : pressions de remplissage élevées et bas débit systémique (28%
des cas).
Figure 5.95 :
Représentation graphique
de la combinaison des
symptomatologies
croissantes de bas débit
cardiaque
(insuffisance
systolique, en rouge) et de
pression de remplissage
élevée
(insuffisance
diastolique, en bleu). On
détermine ainsi 4 régions
qui correspondent à la
manière dont se présentent
les extrémités du malade.
Les chiffres représentent le
pourcentage de patients
dans ces catégories sur un
collectif de 486 malades
[286].
Symptômes d’hypoperfusion: fatigue + intolérance effort
Hypotension, pression différentielle étroite, extrémités froides,
2
tachycardie, IC < 2 L/min/m
Débit cardiaque
Chaud et sec
Chaud et moite
67%
Froid et sec
5%
Froid et moite
28%
Pression de remplissage
Symptômes congestifs: stase + dyspnée
Orthopnée, râles de stase, oedèmes, extrémités moites
PAPO ↑, PVC ↑, B3, reflux hépato-jugulaire
Représentations graphiques
La relation de Starling du VG n'offre pas le même aspect chez l’individu normal et chez le patient en
insuffisance ventriculaire systolique (voir Figure 5.44 page 56). D'une courbe exponentielle
ascendante vers un plateau, elle passe à une courbe en cloche. Dans l'insuffisance congestive, le débit
cardiaque redescend en cas d'élévation de précharge au-delà d'une valeur optimale. La courbe de
Frank-Starling du malade en dysfonction systolique se différencie donc par quatre caractéristiques :

Déplacement de la courbe vers le bas (basse performance systolique) et vers la droite (haut
volume de remplissage) ;
 Faible pente de la phase de recrutement ; l’augmentation de la précharge a peu d’effet sur la
force de contraction ;
 Genou de la courbe plus précoce ;
 Au-delà du genou de la courbe, baisse de la performance systolique avec l'augmentation de la
précharge ; ce phénomène est du à la dilatation ventriculaire qui entraîne une décompensation.
Comme la courbe est plus plate que la courbe normale, les variations de précharge modifient peu le
débit systolique. Cela se traduit par deux conséquences hémodynamiques :
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
130

Lors de ventilation en pression positive, seuls les Δup apparaissent sur la courbe de pression
artérielle systolique ; celle-ci oscille très peu avec le cycle respiratoire (Figure 5.88 page
120) ; la stabilité tensionnelle lors de l’induction d’une anesthésie est un bon signe
d’insuffisance gauche systolique.
 La réponse hémodynamique au Valsalva est différente de l’image normale ; la courbe prend
une allure "carrée" : les phases 1 et 2 sont marquées par une élévation homogène et constante
de la pression systémique, et la phase 3 par un retour aux valeurs de départ ; il n’y a pas de
phase de compensation avec bradycardie (phase 4) (Figure 5.91 page 122). L'augmentation de
la Pit est bien tolérée puisqu'elle représente une aide à l'éjection du VG et une baisse de sa
postcharge effective.
La boucle pression – volume de l’insuffisance cardiaque est caractérisée par plusieurs points (voir
Figure 5.50 page 65).




Pente Emax abaissée (FE < 0.35) ;
Courbe de compliance déplacée vers le haut et vers la gauche ;
Diminution du volume systolique ;
Augmentation du travail de pression (TCI) par rapport au travail d’éjection (TCE).
Bien qu'elle soit déplacée vers de hauts volumes de remplissage, la boucle P/V est restrictive et sa
surface est diminuée (baisse du travail d'éjection). Le seul moyen de l'augmenter est de redresser la
pente de l'Emax (effet inotrope positif). L'augmentation du remplissage n'aboutirait qu'à diminuer
encore la surface de la boucle, parce que la courbe de compliance, qui est anormalement redressée,
s'élève plus rapidement que l'Emax, dont la pente est faible.
Le ventricule est d'autant plus sensible à la postcharge que sa performance globale est abaissée (voir
Figure 5.45 page 57). Le myocarde défaillant ne peut pas compenser une augmentation de postcharge
par une augmentation de la contractilité ni par un mécanisme de Starling, déjà sollicité au maximum ;
la fraction d'éjection baisse lorsque la postcharge s’élève. A l'inverse, l'effet d'une chute de postcharge
sur l'accroissement du volume éjecté est d'autant plus marqué que la fonction systolique est plus
mauvaise, puisque la pente de l'Emax est plus faible.
La faible réserve du ventricule ne lui permet pas de maintenir son débit lorsque la contraction
auriculaire (FA, rythme nodal) ou la synchronisation de la contraction ventriculaire (bloc de branche)
sont perdues [249].
Mécanismes de compensation
Lors d'insuffisance cardiaque, l'organisme maintient la fonction ventriculaire par trois mécanismes
compensatoires:
 L'augmentation du volume télédiastolique, pour se positionner de manière optimale sur la
courbe de Franck-Starling;
 L'hypertrophie ventriculaire, pour compenser la surcharge de pression ou de volume;
 La stimulation sympathique, pour maintenir le débit cardiaque.
Ces mécanismes offrent dans un premier temps une adaptation adéquate et assurent un débit
satisfaisant au repos, bien qu'ils ne le permettent pas à l'effort. Cependant, les phénomènes
compensatoires ont eux-mêmes leurs défauts parce qu'ils provoquent certaines rétro-actions accélérant
la dégradation. Par exemple, la stimulation sympathique amène bien une augmentation du débit
(tachycardie, effet inotrope positif) et une meilleure pression de perfusion (augmentation des
résistances périphériques), mais ces réactions augmentent la mVO2, le travail du myocarde et sa
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
131
postcharge, donc précipitent sa défaillance. Lorsque la fonction cardiaque continue à se dégrader, les
mécanismes compensatoires deviennent insuffisants et la situation se décompense.
Quatre situations principales conduisent à la défaillance cardiaque: la surcharge de pression (sténose
aortique, hypertension), la surcharge de volume (insuffisance valvulaire, shunt, sepsis, thyrotoxicose),
les maladies myocardiques (ischémie, cardiomyopathie), et la restriction au remplissage (péricardite,
tamponnade, cardiomyopathie restrictive). Les deux premières conduisent à un remodelage
ventriculaire sous forme d’une hypertrophie, et la troisième à un remodelage cicatriciel. La dernière
est une insuffisance primairement diastolique.
Insuffisance systolique du VG
La courbe de Frank-Starling de l'insuffisance systolique du VG est caractérisée par:
- Déplacement de la courbe vers le bas (faible volume systolique) et vers la droite (haut
volume de remplissage)
- Faible pente de recrutement (le remplissage n'améliore pas la performance systolique)
- Redescente de la courbe au-delà de son genou
La boucle pression / volume est caractérisée par:
- Faible pente de l'Emax
- Redressement de la courbe de compliance
- Restriction de la surface (travail externe diminué)
- Diminution du volume systolique
Le volume systolique diminue lorsque la postcharge augmente.
Remodelage ventriculaire
Le cœur adulte pèse 250-280 gm (0.6% du poids corporel) ; sa limite de masse est d'environ 500 gm ;
au-delà, le réseau coronarien devient insuffisant. Le myocarde est capable d’une remarquable
plasticité. Il varie sa masse de 25-50% en quelques semaines. Celle d’un athlète entraîné dépasse de
60% celle d’un individu normal, alors que le repos forcé d’un paraplégique la diminue de 30% ; dans
l’espace, la masse du VG baisse de 1% par jour à cause de l’apesanteur [167]. Sauf situations
exceptionnelles, les myocytes (environ 109 chez le jeune adulte) ont la même durée de vie que
l’organisme [7]. A partir de la quarantaine, toutefois, une partie dégénère progressivement et se voit
remplacée par des fibrocytes et de la fibrose intersticielle. Alors que la proportion myocyte/fibrocyte
est de 60/40 chez le jeune adulte, elle est inversée à 75 ans. On perd ainsi environ 15 millions de
myocytes par an dès la quarantaine ; ce phénomène est compensé par l’hypertrophie des cellules
myocardiques restantes [289].
Face à une augmentation de précharge (surcharge de volume) ou de postcharge (surcharge de
pression), le VG s’adapte en s’hypertrophiant (HVG, hypertrophie ventriculaire gauche). Des senseurs
mécaniques situés probablement dans les disques Z des myofibrilles sont à l’origine d’une cascade de
signaux biochimiques conduisant à une synthèse protéique accrue (transcription génique et synthèse
de mRNA augmentées) [81]. Les cellules myocardiques s’hypertrophient et s’épaississent par
réplication en parallèle des sarcomères (HVG concentrique) dans le cas d’une surcharge chronique de
pression, alors qu’elles s’allongent par réplication en série des sarcomères (HVG dilatative) dans le
cas d’une surcharge de volume. La tension longitudinale sur la paroi est probablement le moteur
premier de l’HVG dilatative, alors que l’augmentation de pression contre la paroi induit une HVG
concentrique [409]. Les cellules cardiaques adultes ne peuvent pas s’hyperplasier (augmentation du
nombre de cellules), mais seulement s’hypertrophier (augmentation de la taille des cellules). Les
fibroblastes et les cellules vasculaires (endothélium, musculature lisse) ont par contre la faculté de
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
132
s’hyperplasier même à l’âge adulte. Cette absence d’hyperplasie des cardiomyocytes a été remise en
question récemment, avec la découverte de cellules myocardiques capables de se multiplier.
Néanmoins, les cellules souches cardiaques sont incapables de proliférer au point de remplacer la
masse nécrosée dans un infarctus [52a].
Le rapport entre l’épaisseur de paroi du VG et le rayon de la cavité ventriculaire (h/r), ou épaisseur de
paroi relative (EPR), est normalement situé entre 0.3 et 0.45, ce qui correspond à un rapport entre la
masse et le volume du VG (M/V) de 1.0 à 1.5 [133a]. Ces valeurs sont constantes chez tous les
mammifères, quelle que soit leur taille. On peut ainsi considérer 5 catégories de pathologies [133a].





Remodelage concentrique :
Hypertrophie concentrique :
Hypertrophie physiologique :
Remodelage excentrique :
Hypertrohie excentrique :
EPR élevé (> 0.45), masse et taille normales ;
EPR élevé, masse élevée, taille normale ;
EPR normal, masse élevée, dilatation ;
EPR bas (< 0.32), masse normale, dilatation ;
EPR bas (< 0.32), masse élevée, dilatation.
L’accroissement de la masse du VG est un facteur de risque opératoire. Par rapport à sa valeur
normale (50-115 g/m2), la masse du VG élève la mortalité à 30 jours après chirurgie cardiaque de 15%
par 20 g/m2 au dessus de la norme (mortalité relative) [414a]. La cicatrice d’un infarctus est également
une cause de remodelage ventriculaire : la zone envahie de fibrocytes ne se contracte plus, et le
myocarde voisine développe une hypertrophie compensatrice [52a].
L’angiotensine II est un des agonistes principaux parmi les nombreux déterminants moléculaires de
l’HVG. Elle stimule la croissance cellulaire par le biais de la protéine Gq et la protéine-kinase C ; elle
stimule la production de facteurs de croissance (endothéline, Transforming growth factor) qui vont
accroître la masse des fibroblastes et du collagène [308]. La calcineurine, essentielle à la croissance de
l’HVG, est liée au métabolisme calcique de la cellule [330]. Dans l’HVG, celui-ci est caractérisé par
une diminution des variations du taux de Ca2+ sarcoplasmique : baisse de la densité des récepteurs β,
baisse de l’activité de la SERCA, défauts des récepteurs R-Ry (voir Figures 5.1, 5.2 et 5.3 pages 4, 5
et 7). La stimulation de l’HVG est à double tranchant, parce que tous les déclencheurs de croissance
sont aussi des facteurs favorisant la fibrose et l’apoptose à partir d’un certain seuil [164]. De ce point
de vue, l’HVG concentrique est de mauvais pronostic. Il n’est donc pas surprenant qu’elle soit
considérée comme un facteur de risque cardiovasculaire indépendant pour l’insuffisance cardiaque et
l’ischémie myocardique [65].
Le VG insuffisant consomme davantage d’O2 par unité de masse et de travail fourni par rapport à un
coeur normal. Cela est lié à deux phénomènes [290] :
 Augmentation du travail interne de pression par rapport au travail externe d’éjection à cause
de la dilatation ventriculaire et/ou de l’élévation de la postcharge;
 Dépendance accentuée de la glycolyse au détriment de la voie des acides gras libres, bien que
l’utilisation des deux types de substrats soit globalement diminuée.
L’insuffisance cardiaque gauche est aussi un cas dramatique de remodelage ventriculaire. On peut la
définir comme une perte de la forme conique normale du ventricule pour devenir grossièrement
circulaire [47]. Ce remodelage en forme de sphère est une catastrophe mécanique pour le cœur :

Les faisceaux longitudinaux hélicoïdaux deviennent circulaires, ce qui augmente leur stress de
paroi et supprime le raccourcissement dans le long-axe du ventricule ;
 La rotation systolique et la succion diastolique du ventricule sont perdues ;
 La musculature circulaire est distendue et sa tension de paroi augmente (loi de Laplace : P • r /
2 h) ;
 La perte de la forme elliptique modifie la géométrie de l’appareil sous-valvulaire mitral et
provoque une insuffisance mitrale de degré ≥ II ;
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
133
La sphéricisation du VG altère donc gravement ses capacités de remplissage et de vidange. Ainsi le
degré de dilatation du VG (diamètre télédiastolique ≥ 4 cm/m2, volume télésystolique ≥ 60 mL/m2) est
directement corrélé à la mortalité [258].
Cœur d’athlète
La grossesse double le débit cardiaque (DC), et la compétition sportive réclame une augmentation de 5
à 6 fois du DC par rapport au débit normal. L’élévation du DC est réalisée grâce à la tachycardie, mais
l’entraînement chronique permet d’augmenter progressivement le volume systolique. Cette dernière
situation induit une hypertrophie ventriculaire de type excentrique, dans laquelle la taille et la masse
du VG sont augmentées mais le rapport EPR est encore normal [133a]. Ces modifications
correspondent à un exercice d’endurance de type isotonique (course, cyclisme). Dans l’exercice
isométrique (poids et altères), au contraire, l’élévation du DC est modeste mais les résistances
artérielles sont très augmentées ; l’hypertrophie ventriculaire est alors de type concentrique.
L’entraînement d’endurance conduit également à un remodelage excentrique du ventricule droit [15a].
La frontière entre le remodelage adaptatif normal et la cardiomyopathie hypertrophique est floue ;
d’ailleurs, de nombreux cyclistes professionnels souffrent ultérieurement d’une cardiomyopathie
dilatative grave. Les arythmies sont fréquentes chez les athlètes : extrasystoles, épisodes de
tachycardie ventriculaire, tachyarythmies sus-jonctionnelles, troubles de la conduction. Elles sont
bénignes tant qu’elles cèdent à l’effort. La mort subite du sportif est le plus souvent liée à une
cardiomyopathie hypertrophique, à un syndrome de Wolf-Parkinson-White ou du QT long, plus
rarement à une cardiomyopathie arythmogène du VD, à un syndrome de Brugada (voir Adaptation à
l’effort, page 79, et Chapitre 20 Arythmies), à une anomalie coronarienne ou à une valvulopathie
(bicuspidie aortique, prolapsus mitral) [15a].
Surcharge de pression
Une augmentation chronique de postcharge (sténose aortique, hypertension artérielle systémique ou
pulmonaire) élève la tension de paroi en systole. Elle induit une réplication en parallèle des
sacromères, une augmentation du collagène et une fibrose non-réversible, qui aboutissent à un
remodelage et à une hypertrophie concentriques [413]. Le rapport entre l’épaisseur de paroi du VG et
le rayon de la cavité ventriculaire (EPR) est > 0.5 [133a]. Selon l’équation de Laplace,
l'épaississement de la paroi (h) et le rétrécissement de la cavité ventriculaire (r) normalisent le stress
de paroi (σ) malgré l’augmentation de pression (P) (Figure 5.96A):
σ = (P • r)/2h
Bien qu’il reste normal, le pic du stress de paroi est décalé vers la télésystole. Le pic de pression
intraventriculaire est atteint dans la deuxième moitié de la systole [133a]. La fraction d'éjection est
élevée à cause du petit Vts et non par amélioration de la contractilité. Même si la performance
cardiaque globale est élevée, les fibres isolées ont désorganisées et noyées dans le tissu fibreux ; leur
métabolisme est orienté vers la glycolyse seule ; elles ont une fonction diminuée, et le travail produit
par unité de masse contractile est inférieur à la normale [167]. L’augmentation massive de la masse
cellulaire dans l'hypertrophie concentrique a un double coût.
 Une augmentation du risque ischémique, car le nombre de capillaires par rapport à la masse
myocardique est diminué, les distances de transport d'O2 sont augmentées vu l'épaisseur du
muscle, et la compression systolique des vaisseaux est plus intense [164]. La zone sousendocardique, en particulier, est en permanence sub-ischémique. La mVO2 / 100 gm est 50%
plus élevée que pour le muscle normal [392], alors que le nombre de mitochondries est
relativement plus faible par rapport à la masse cellulaire et que la surface capillaire décroît par
rapport au volume myocardique.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
134
 Une dysfonction diastolique avec défaut de relaxation et de distensibilité due à la rigidité de la
paroi épaissie et fibrosée, et aux altérations des mouvements calciques intracellulaires [126].
La dysfonction diastolique entraîne une augmentation des pressions de remplissage qui
maintiennent une pression télédiastolique (PtdVG) élevée dans le ventricule, compromettant
encore davantage la perfusion sous-endocardique. La tachycardie et la bradycardie limitent le
remplissage du ventricule.
Figure 5.96 :
Hypertrophie du VG et loi
de Laplace.
A : HVG concentrique
(surcharge de pression).
L’aug-mentation
de
pression (P) est compensée
par une diminution du
rayon (r) de la cavité et une
augmentation
de
l’épaisseur (h) de la paroi.
Le stress de paroi est
stable.
B : HVG excentrique ou
dilatative (surcharge de
volume).
Le
rayon
augmente
sans
augmentation de pression,
ce qui est compensé par
une
augmentation
de
l’épais-seur de paroi. C :
Phase de décompensation.
Pression et dimension du
VG augmentent au-delà de
la compensation.
A
Dilatation
C
P ↑ • r ↓
2 h ↑
P ↑ • r ↑↑
2 h ↑
B
© Chassot 2012
P • r ↑
2 h ↑
Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les bloqueurs du récepteur AT-II (sartans) ont la
propriété de freiner le remodelage ventriculaire [249]. A même degré de contrôle de la pression
artérielle, leur effet sur la régression de l’HVG est plus marqué que pour les β-bloqueurs, ce qui
démontre bien leur capacité à interférer avec la progression de l’hypertrophie et de la fibrose [201].
La symptomatologie débute à l'effort parce que la rigidité du myocarde l'empêche de se déplacer sur la
courbe de Franck-Starling en augmentant son remplissage, et parce que la tachycardie limite le
remplissage du ventricule. La décompensation survient lorsque le ventricule commence à se dilater: la
tension de paroi réaugmente, ce qui contribue à la dilatation, et le phénomène s'auto-amplifie jusqu'à la
phase terminale (Figure 5.96C).
Une brusque diminution du volume de la cavité ventriculaire en cas d'HVG concentrique peut donner
lieu à une obstruction dynamique de la chambre de chasse (effet CMO) en l’absence de
cardiomyopathie obstructive : le Vts devient tellement faible que la zone de coaptation mitrale est
déplacée antérieurement vers la chambre de chasse du VG (CCVG), si bien que le feuillet antérieur de
la valve mitrale peut basculer en avant vers la CCVG (voir Figure 5.27 page 34). Par effet Venturi,
l'accélération dans la chambre de chasse aspire le feuillet antérieur de la valve mitrale (SAM: systolic
anterior motion), ce qui crée une obstruction sous-valvulaire à l'éjection (voir Contraction du VG). Le
gradient de pression entre le VG et l'aorte est élevé (> 30 mm Hg). Le phénomène est amplifié par
l’hypovolémie, la vasodilatation artérielle et la stimulation inotrope. Le traitement est une diminution
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
135
de l’effet β (β-bloqueur), une augmentation des RAS (α-stimulant) et une augmentation de la volémie
(remplissage).
Surcharge de volume
L'augmentation chronique de volume (insuffisance valvulaire, shunt, thyréotoxicose) élève la tension
de paroi pendant la diastole ; elle induit une réplication en série des sarcomères (hypertrophie
dilatative). L'accroissement des dimensions de la cavité ventriculaire est momentanément compensée
par un épaississement discret de cette paroi. La valeur de l'équation de Laplace est stable, mais la FE
calculée est abaissée puisque le Vtd est agrandi (Figure 5.96B). La paroi ventriculaire est moins
épaisse, le développement du collagène est moindre, et le travail interne de pression n'est pas
augmenté comme dans l'HVG concentrique. L’efficience énergétique du VG est bonne, parce qu’il
déplace un grand volume à basse pression (augmentation du travail externe) ; le rapport entre l'apport
et la demande d'O2 est préservé. Une surcharge de volume est mieux tolérée qu'une surcharge de
pression (voir Relation Pression/Volume et Figure 5.49 page 63). La fonction diastolique est
conservée, la relaxation est facilitée et le ventricule garde sa souplesse. Le rapport entre l’épaisseur de
paroi du VG et le rayon de la cavité ventriculaire (EPR) est normal tant que la situation est compensée,
mais l’évolution conduit progressivement à une dilatation hors de proportion avec la masse du VG et
le rapport EPR baisse < 0.3 [133a].
Si la dilatation continue, la tension de paroi augmente sans compensation possible :
 La compliance devient faible parce que le ventricule opère à haut volume ;
 Le couplage interventriculaire est 1/1 lorsque les ventricules sont au contact du péricarde ;
ceci survient lorsque la PtdVD est ≥ 15 mmHg et la PtdVG ≥ 20 mmHg ; toute modification
de pression ou de volume d'un ventricule retentit sur l'autre;
 La bradycardie est mal supportée car une longue diastole provoque un excès de remplissage ;
elle est particulièrement dangereuse en cas de dilatation sur insuffisance aortique parce que la
fuite intraventriculaire a lieu au régime de pression diastolique aortique ;
 L’augmentation de postcharge n’est pas tolérée parce qu’elle augmente la dilatation ;
 La dilatation ventriculaire ne permet plus aux deux feuillets mitraux de coapter et la valve
fuit ; l'importance de cette régurgitation mitrale est un bon marqueur du degré de
décompensation ventriculaire (Figure 5.97) ;
 La dilatation du VG est définie par un diamètre télédiastolique > 4 cm/m2 (Vtd > 60 mL/ m2).
De l'hypertrophie à la décompensation
La phase de décompensation survient lorsque le rayon augmente au-delà de ce que l'hypertrophie peut
compenser. Comme l'augmentation de diamètre du ventricule accroit le stress de paroi, un cercle
vicieux s'installe. Le myocarde hypertrophié est très sujet à l'ischémie, potentialisée par une
augmentation de la mVO2 par unité de poids [377]. La réserve coronarienne étant très diminuée dans
les zones sous-endocardiques où la tension de paroi est maximale; cette partie du coeur subit des
épisodes infracliniques itératifs d'ischémie, pouvant conduire à un certain degré de fibrose [181]. Une
fois formé, le collagène ne disparaît plus, et devient un élément majeur dans la non-distensibilité
diastolique du ventricule et dans le frein à la diffusion transcapillaire de l'oxygène.
Le VG insuffisant consomme davantage d’O2 par unité de masse et de travail fourni par rapport à un
coeur normal. Cela est lié à deux phénomènes [290] :
 Augmentation du travail interne de pression par rapport au travail externe d’éjection à cause
de la dilatation ventriculaire et/ou de l’élévation de la postcharge;
 Dépendance accentuée de la glycolyse au détriment de la voie des acides gras libres, bien que
l’utilisation des deux types de substrats soit globalement diminuée.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
136
L’insuffisance cardiaque gauche est aussi un cas dramatique de remodelage ventriculaire. On peut la
définir comme une perte de la forme conique normale du ventricule pour devenir grossièrement
sphérique [47]. Ce remodelage est une catastrophe mécanique pour le cœur :

Les faisceaux longitudinaux hélicoïdaux deviennent circulaires, ce qui augmente leur stress de
paroi et supprime le raccourcissement dans le long-axe du ventricule ;
 La rotation systolique et la succion diastolique du ventricule sont perdues ;
 La musculature circulaire est distendue et sa tension de paroi augmente (loi de Laplace : P • r /
2 h) ;
 La perte de la forme elliptique modifie la géométrie de l’appareil sous-valvulaire mitral et
provoque une insuffisance mitrale de degré ≥ II.
La sphéricisation du VG altère donc gravement ses capacités de remplissage et de vidange. Ainsi le
degré de dilatation du VG (diamètre télédiastolique ≥ 4 cm/m2, volume télésystolique ≥ 60 mL/m2) est
directement corrélé à la mortalité [258].
A
B
Plan de
l’anneau
OG
OG
IM
IM
1
1
3
VG
3
VG
VD
2
© Chassot 2012
Figure 5.97 : Insuffisance mitrale (IM) de degré II lors de dilatation ventriculaire. A : schéma de l’IM dite
restrictive. Le volume télésystolique agrandi du VG dilate l’anneau mitral (1), écarte les piliers (2) et exerce une
traction excessive (3) sur les cordages (en jaune) de la valve mitrale ; cette traction retient les feuillets de la valve
en dessous du plan de l’anneau (traitillé blanc) et empêche la coaptation normale des feuillets : la valve fuit. B :
image échocardiographique transoesophagienne d’une IM restrictive. Le VG est dilaté, arondi, les feuillets sont
retenus en dessous du plan de l’anneau en systole.
Maladies myocardiques
Dans une cardiomyopathie, la tension de paroi systolique développée pour un volume de remplissage
donné est insuffisante. La cause est liée à une pathologie du muscle cardiaque lui-même. En Occident,
la cardiomyopathie est le plus souvent secondaire à une maladie coronarienne: 46 % des cas chez les
hommes et 27% chez les femmes. La deuxième cause est la dégénérescence liée à l'âge. Lorsqu’elle
s’accompagne d’une dilatation massive, la cardiomyopathie est idiopathique dans la majorité des cas.
Certaines cardiomyopathies sont secondaires à des maladies systémiques ou à une maladie
métabolique comme le diabète ou l'alcoolisme.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
137
Restriction
La restriction au remplissage est la cause d'une insuffisance diastolique sévère. On la rencontre dans la
cardiomyopathie restrictive, forme la plus grave de la dysfonction diastolique, généralement due à un
processus infiltratif qui rigidifie le ventricule (œdème, sarcoïdose, amyloïdose, infiltration tumorale) ;
la fonction systolique est normale mais l'insuffisance diastolique cause des oedèmes pulmonaires à
répétition. La restriction peut être secondaire à un épanchement péricardique ou à une péricardite
constrictive qui limitent mécaniquement l'expansion des ventricules en diastole.
Remodelage ventriculaire
Le cœur représente 0.6% de la masse corporelle. Chez l'adulte, le rapport myocytes/fibrocytes est de
60/40; ce rapport s'inverse à partir de 70 ans. La fonction est maintenue par hypertophie des myocytes
fonctionnels. Le cœur a une très grande plasticité: il perd ou augmente sa masse selon son activité.
Une surcharge de pression déclenche une hypertrophie concentrique (réplication en parallèle des
sarcomères), et une surcharge de volume une hypertophie excentrique (réplication en série des
sarcomères). L'hypertophie permet de stabiliser le stress de paroi en modifiant la taille et l'épaisseur de
paroi en fonction de la pression (σ = (P • r) / 2h), mais l'HVG concentrique augmente le risque
ischémique et induit une dysfonction diastolique.
Dans l'insuffisance et la dilatation ventriculaire, le VG, qui a une forme d'obus, prend une forme
circulaire qui augmente son stress de paroi, modifie la mécanique de la contraction et provoque une
insuffisance mitrale.
Stimulation neuro-humorale
Dans l'insuffisance systolique, la baisse de l'éjection se manifeste par la fatigabilité. Elle provoque une
tachycardie compensatrice, une vasoconstriction périphérique et une rétention de sodium, puis une
hypoperfusion des organes engendrant la cyanose, l'oligurie et la confusion mentale [249].
L'insuffisance diastolique, qui peut survenir sans perturbation de la fonction systolique, se traduit par
une pression diastolique ventriculaire élevée et une stase en amont. Elle se caractérise cliniquement
par une dyspnée [30,150,319]. L'insuffisance cardiaque congestive (ICC), cliniquement caractérisée
par les oedèmes et la dyspnée, est donc une symptomatologie commune à la dysfonction ventriculaire
systolique et diastolique.
Stimulation catécholaminergique
L'hypotension et la baisse de la pression pulsée (PAsyst – PAdiast) sont à l'origine d'une stimulation
des barorécepteurs et du système sympathique central. Les taux de noradrénaline circulante sont
élevés, et sont un marqueur pronostique de l'évolution de la maladie [189]. La stimulation du système
catécholaminergique (adrénaline surrénalienne et nor-adrénaline neuronale) et du système rénineangiotensine-aldostérone est utilisée au maximum afin d'augmenter la [Ca2+]i, et de maintenir la
précharge et la pression de perfusion, mais ses effets aggravent l'insuffisance ventriculaire gauche :
Surcharge en [Ca2+] i et rigidité myocardique ;
Effet α : augmentation de postcharge ;
Effet β: augmentation de la contractilité et de la mVO2, tachycardie sinusale avec diminution
du temps de remplissage diastolique, arythmies ;
 A long terme : excès de peroxydes, hypertrophie et dilatation du ventricule, fibrose
intersticielle, apoptose.



Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
138
L'excès de catécholamines plasmatiques conduit par rétro-action à une diminution de l'activité des
récepteurs β1 myocardiques (désensibilisation ou downregulation) ; le maintien de la fonction est
assuré par une augmentation du taux de récepteurs β2 et α1 myocardiques [29,38,39]. Les récepteurs
α2 myocardiques ne sont pas concernés par cette dysrégulation; ils contribuent à la mobilisation du
Ca2+ intracellulaire indépendamment de l'AMPc [43,399]. Enfin, les récepteurs au VIP (vasoactive
intestinal peptide) sont plus sensibles que la norme et maintiennent la contractilité malgré la baisse de
sensibilité des récepteurs β1, mais au prix d'un excès de vasoconstriction. Ces données ont des impacts
majeurs en clinique:





Les β-bloqueurs améliorent le pronostic de l'insuffisance cardiaque (frein à la
désensibilisation) ;
La réponse aux amines β1 est altérée ; la désensibilisation β1 survient après quelques jours
d’une perfusion de catécholamines β1 ; l'adrénaline, qui stimule les récepteurs β1, β2 et α1,
est en général la seule substance efficace pour le traitement aigu de la décompensation d'une
insuffisance cardiaque chronique.
La déplétion chronique du myocarde en nor-adrénaline diminue l'efficacité des amines
indirectes telles la dopamine ou l'éphédrine ;
Lorsqu'une décompensation cardiaque survient chez un malade β-bloqué, la réponse cardiaque
à la dopamine est obscurcie, laissant apparente la stimulation α, d'où prédominance de l'effet
vasoconstricteur périphérique ;
Les inhibiteurs des phosphodiestérases-3 (amrinone, milrinone) et le levosimendan
(sensibilisateur calcique) sont efficaces lors d’insuffisance ventriculaire ou de β-blocage parce
qu'ils agissent par une voie indépendante des récepteurs catécholaminergiques [231].
Stimulation neuro-humorale
L'hypoperfusion rénale et la stimulation sympathique conduisent à accroître le taux de rénine,
déclenchant une vasoconstriction puissante par l'angiotensine II. Celle-ci contribue à la sécrétion
d'aldostérone, qui provoque une rétention d'eau et de sodium avec oedèmes périphériques et qui est
aussi un puissant inducteur de l’HVG. Cet excès de volume extra- et intracellulaire crée une
hyponatrémie qui est mal interprétée par l'hypophyse, laquelle augmente la sécrétion d'ADH: cette
élévation du système arginine-vasopressine retient encore davantage d'eau et accroît le degré de
vasoconstriction. Le résultat global est une hypervolémie et une vasoconstriction massive (Figure
5.98). Mais ces substances ont également un effet inotrope positif par l'intermédiaire de la sécrétion
d'endothéline qu'elles induisent dans l'endocarde [90]; toutefois, ceci n'est pas que bénéfice, car
l'endothéline est un vasoconstricteur très puisant et un facteur important dans la genèse de l’HVG
[343]. Il existe aussi une diminution de la réponse vasodilatatrice au NO• [210].
On voit que des mécanismes compensatoires deviennent eux-mêmes des facteurs aggravants lorsqu’ils
dépassent un certain seuil. Il existe toute une série de points d’impact sur lesquels agissent différentes
classes de médicaments. Le point d’impact des principaux d’entre eux est mentionné dans la Figure
5.98. Les mêmes phénomènes rétroactifs existent lors d’insuffisance ventriculaire diastolique (Figure
5.99).
Facteurs natriurétiques et vasodilatateurs
Trois substances sécrétées par la stimulation sympathique modulent les effets hypertenseurs.

Les facteurs natriurétiques auriculaires, dont la sécrétion est stimulée par la distension des
cavités cardiaques, et non par la pression auriculaire [143] : le facteur natriurétique auriculaire
(ANF: atrial natriuretic factor) et le facteur natriurétique cérébral (BNP: brain natriuretic
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
139
peptide). Ils assurent une fuite sodique et diminuent le volume circulant. Ils ont 4 effets
majeurs :
• Augmentation de la perfusion rénale et diurèse ;
• Baisse des résistances artérielles ;
• Effet bloqueur de l’endothéline ;
• Inhibition de la sécrétion d’aldostérone.
 Les prostaglandines ; elles ont un effet vasodilatateur systémique et pulmonaire ; leur
sécrétion est bloquée par les AINS.
 L'augmentation du taux de 2,3-DPG déplace la courbe de dissociation de l'hémoglobine vers
la droite: l'affinité de l'O2 pour l'Hb est diminuée, donc sa distribution en périphérie est
facilitée.
Bas débit
systémique
PA ↓
"Forward failure"
Stimulation sympathique
Baroréflexes
↑ β
↑ β
↑ α
↑ RAS
β-bloqueurs
↓ perfusion
rénale
IVsyst VG
↑ mVO2 Anti-ET
HVG
fibrose
Endothéline
IEC
Ang II
Diurétiques
Nitrés
↑ précharge
Aldostérone
ADH
↑ rénine
angiotensine
Spironolactone
IEC
A-AT
↑ rétention
Na + H2O
Vasodilatateurs
↑ postcharge
© Chassot 2011
Figure 5.98 : Représentation schématique des modifications neuro-humorales dans l’insuffisance systolique du
VG (Forward failure). Les systèmes physiologiques sont de bons moyens de compensation en temps normal,
mais établissent des rétro-actions néfastes (encadrées en rouge) dans l’insuffisance gauche chronique. En jaune
figurent les points d’action des principales classes de médicaments utilisés dans l’insuffisance cardiaque gauche.
Anti-ET : anti-endothéline (bosantan). IEC : inhibiteur de l’enzyme de conversion (captopril, enalapril, etc). AAT : inhibiteur du récepteur de l’angiotensine II (losartan).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
140
Le BNP est libéré dans la circulation lors de défaillance ventriculaire. Un taux supérieur à 200 pg/ml
est habituellement considéré comme significatif pour le diagnostic d’insuffisance cardiaque [172].
Figure 5.99 :
Représentation
schématique des modifications
neuro-humorales
dans
l’insuffisance
diastolique
du
VG
(Backward failure) avec les
points
d’action
des
principales
classes
de
médicaments utilisés dans
l’insuffisance
cardiaque
gauche.
rhBNP :
recombinant
human Brain Natriuretic
Peptide (neritide).
IEC :
inhibiteur
de
l’enzyme de conversion
(captopril, enalapril, etc).
A-AT :
inhibiteur
du
récepteur de l’angiotensine
II (losartan).
HTAP :
hypertension
artérielle pulmonaire.
Stase en amont
↑ POG
"Backward
failure"
Stase
pulmonaire
HTAP
Insuffisance
VD
TTT de la
composante
systolique
IC diast VG
rhBN
P
↑ ANF
↑ BNP
Oedèmes
Stase
hépatique
Nitrés
Diurétique
s
IEC, A-AT
Spironolacton
e
↑ excrétion Na
© Chassot 2012
Stimulation neuro-humorale
L'insuffisance hémodynamique engendrée par la dysfonction ventriculaire stimule le système
sympathique, le système rénine-angiotensine et la sécrétion de catécholamines avec pour effet:
tachycardie, vasoconstriction (augmentation de postcharge), rétention de sodium et d'eau
(hypervolémie et hyponatrémie), désensibilisation des récepteurs β1, augmentation du taux de
récepteurs β2 et α1. (les amines à effet β1 pur perdent leur efficacité).
Transport d'oxygène
Le coeur fournit l'énergie motrice indispensable à la perfusion tissulaire. Le transport d'oxygène (DO2)
est réglé par la ventilation, le débit cardiaque, le contenu en Hb et la distribution périphérique.
DO2 = CaO2 • DC
où
CaO2: contenu artériel en oxygène
DC: débit cardiaque
CaO2 = ( 1.39 • Hb • sat O2 ) + ( 0.0031 • PaO2 )
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
141
Normalement, la consommation d'oxygène (VO2) est indépendante du transport pour deux raisons:
 Le DO2 est en net excès par rapport à la VO2 ;
 L'extraction d'oxygène augmente parallèlement à la demande, comme le démontre la baisse
progressive de la saturation veineuse centrale (SvO2).
Il arrive que cette situation soit dépassée: si le transport d'O2 chute en dessous d'un certain seuil (DO2
critique), l'extraction ne peut plus augmenter proportionnellement à la demande, et la consommation
d'O2 devient dépendante de son transport (Figure 5.100). Les cellules souffrent alors d'hypoxie et le
métabolisme anaérobique produit des valences acides en quantité proportionnelle à cette souffrance: le
taux de lactate augmente. La valeur de ce seuil se situe entre 9 et 10 mL/min/kg [55] ; il est abaissé à 8
ml/min/kg en anesthésie générale [362].
VO2
mL/kg/min
VO2
indépendant
du transport
VO2 dépendant
du transport
DO2 critique
ICC, SDRA, choc septique
DO2
mL/kg/min
Rapport DO2/VO2 normal
Figure 5.100 : Rapport entre la consommation et le transport d'O2 chez le sujet normal. La courbe bleue
représente le sujet normal. La courbe rouge illustre la modification induite par une sepsis: le couplage du
transport et de la consommation d’oxygène s’étend sur une plus grande plage de valeurs. Calculs:
VO2 = DC • (CaO2 - CvO2) et SvO2 = 1 - VO2 / DO2
Valeurs normales:
VO2:
6 - 7 ml / min / kg ou 200 - 250 ml / min
DO2:
> 10 ml / min / kg ou 800 - 1000 ml/min
CaO2: 20 vol%
CvO2: 15 vol%
SvO2: > 65 %
ERO2: extraction périphérique d'oxygène: 25 - 35 %
Physiologiquement, l'organisme répond à une demande accrue en oxygène en augmentant le débit
cardiaque (jusqu'à cinq fois), la ventilation (jusqu'à quinze fois) et l'extraction tissulaire de l'oxygène,
avec la contribution active de l'effet de pompe de la musculature, de la respiration et de la paroi
abdominale. Lorsque le débit cardiaque baisse ou que la consommation d'oxygène augmente
excessivement, seul l'accroissement de l'extraction périphérique de l'oxygène permet de subvenir aux
besoins cellulaires; ceci est secondaire à un équilibre dynamique entre les zones en vasoconstriction
sympathique d'origine centrale et celles en vasodilatation d'origine locale et métabolique (recrutement
capillaire) [350]. Ce mécanisme est très performant puisqu'il permet de conserver un métabolisme
aérobique jusqu'à une extraction maximale de 70%, ce qui se traduit par des valeurs de SvO2 très
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
142
basses. Au-delà de cette capacité d'extraction, le métabolisme devient partiellement anaérobe et le taux
de lactate dépasse 1.5 mmol/l [83].
Dans de nombreuses situations pathologiques, la VO2 est dépendante du transport d'O2 sur une vaste
échelle de valeurs, parce que l'extraction d'oxygène reste basse (coefficient d’extraction, ou ERO2, <
35%). C'est le cas notamment dans le SDRA, le choc septique et le choc hypovolémique; on a retrouvé
la même dépendance dans des cas d'insuffisance cardiaque congestive aiguë ou chronique [102,260].
Cette incapacité à creuser l'extraction d'O2 a plusieurs causes possibles: défaut de la vasorégulation
périphérique, lésion endothéliale, oedème interstitiel, dysfonction mitochondriale, dysfonction du
système NO•/endothéline. Elle rend la mesure de la SvO2 inappropriée pour évaluer le débit cardiaque
périphérique [414]. Par contre, une lactacidémie supérieure à 2 mmol/l semble être un bon marqueur
du passage dans la zone où la VO2 est dépendante du transport [407].
Lorsque le transport d'oxygène est limité ou lorsque la consommation d'O2 en dépend linéairement, il
devient capital de lutter contre tous les facteurs qui contribuent à l'augmentation de la VO2: stress,
douleur, décharge de catécholamines endogènes ou exogènes, fièvre (+ 10% / °C), frissons (+ 100400%), activité musculaire (curarisation), anémie. Malgré le gain sur le travail cardiaque lié à la baisse
de la viscosité, la chute de l’hémoglobine peut devenir le facteur limitatif au transport si le débit
cardiaque est bas et/ou le métabolisme élevé. La valeur limite est située aux environs de 80 gm/L chez
un individu sain et de 100 gm/L chez un patient insuffisant cardio-pulmonaire ou septique (voir
Chapitre 28 Critères de transfusion). La prise en charge périopératoire d'un insuffisant cardiaque doit
impérativement tenir compte de ces contraintes.
Transport d'O2 (DO2)
Le DO2 est le produit du contenu en O2 (CaO2) et du débit cardiaque: DO2 = CaO2 • DC, où:
CaCO2 = (13.9 • Hb • satO2) + (0.0031 • PaO2)
Normalement, la consommation d'O2 (VO2) est indépendante du DO2. Mais si le DO2 devient < DO2
critique, la VO2 devient dépendante du DO2 , avec risque de lactacidémie et d'acidose métabolique.
Compensations possibles: ↑ DC et ↑ ventilation, ↑ extraction de l'O2 au niveau tissulaire (max 70%).
Dans certaines situations (SDRA, sepsis, hypovolémie, insuffisance ventriculaire congestive),
l'extraction d'O2 reste basse et la VO2 est dépendante du DO2 sur une plus vaste échelle de valeurs.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
143
Fonction ventriculaire droite et circulation pulmonaire
Anatomie fonctionnelle et physiopathologie
Structure anatomique
Le VD présente des caractéristiques anatomiques plus complexes que celles du VG (Figure 5.13 et
Figure 5.101) [159].
AP
VT
CCVD
CCVD
VG
Admission
Septum
Admission
Apex
Apex
A
B
© Chassot 2012
Figure 5.101 : Anatomie du VD. A : Le VD est enroulé autour du VG ; le septum sépare les deux ventricules.
Le VD est constitué d’une chambre d’admission, d’un corps (avec l’apex) et d’un infundibulum avec la chambre
de chasse (CCVD). VT : valve tricuspide. AP : artère pulmonaire. B : Forme en croissant du VD enroulé autour
du VG (en pointillé). La forme des deux ventricules est très différente. Voir aussi Figure 5.13, page 22.

Il est constitué d'une chambre d’admission basée sur l'anneau tricuspidien, d’un corps central
très trabéculé en forme de croissant et d'une chambre de chasse (CCVD) cylindrique
connectée à l’AP. Embryologiquement, le VD est issu de la partie antérieure du tube cardiaque
et la CCVD du champ cardiaque céphalique situé dans le mésoderme pharyngien (voir
Annexe D Figure D.13) ; cette dernière est dotée de davantage de récepteurs β que le reste du
ventricule.
 Il est enroulé autour du VG ; sa section transversale est en demi-lune ; cette anatomie
complique l’évaluation de sa fonction. Quel que soit le plan de coupe, la surface de la cavité
du VD est plus petite que celle du VG (rapport SVD/SVG < 0.7) et l’apex du cœur est constitué
par celui du VG (Figure 5.102).
 Il ne possède que deux couches musculaires : les fibres longitudinales sont sousendocardiques et les fibres circulaires disposées à l’extérieur. Une partie des fibres circulaires
de la chambre d’admission et de l’apex est en continuité avec des fibres de la paroi du VG ; ce
dernier participe donc à la contraction circulaire du VD ; a contrario, une défaillance gauche
altère la performance du VD.
 Les sarcomères sont identiques dans les deux ventricules, mais la masse musculaire du VD est
1/6ème de celle du VG ; l’épaisseur de la paroi libre du VD est de 4-5 mm environ.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
144
Le volume télédiastolique du VD est plus grand que celui du VG (50-100 mL/m2 versus 40-80
ml/m2) ; de ce fait, sa fraction d’éjection est plus basse (0.4 à 0.6) puisque les deux ventricules
maintiennent le même volume systolique.
 Le VD est connecté à une valve tricuspide et possède trois muscles papillaires dont un est
situé sur le septum. Sa surface interne est très fortement trabéculée et présente une travée
musculaire qui traverse la cavité entre le septum et la paroi libre (bande modératrice). Sa
chambre de chasse (CCVD), entièrement musculaire, est très richement dotée en récepteurs β.

OG
Figure
5.102 :
Aspect
échocardiographique
transoesophagien du
VD.
A : vue 4-cavités
(0°) ; l’apex est
constitué par le VG,
la surface du VD est
de 0.6 fois celle du
VG.
B : vue à 60° de la
chambre
d’adminssion (CA)
et de la chambre de
chasse (CCVD) ; le
VD est enroulé
autour du VG.
C:
vue
transgastrique (0°) ;
la section du VD est
en demi-lune.
VP :
valve
pulmonaire.
Siv :
septum
interventriculaire.
OG
OD
OD
VD
VD
VG
VG
60°
OG
OD
OD
Ao
OG
AP
VD
VP
CA
CCVD
0°
VD
VD
Siv
VG
VG

La contraction du VD est liée à quatre mécanismes (Figure 5.32 page 39) :
• Contraction longitudinale base-apex-CCVD séquentielle en un mouvement
péristaltique autour du VG ; c’est l’élément principal ;
• Raccourcissement vers l’intérieur de la paroi libre ; le raccourcissement en court-axe
est physiologiquement faible ;
• Rotation globale de 20-25°;
• Contribution importante du VG (environ 30-40%) par l’épaississement du septum
interventricuaire et par traction sur les fibres circulaires à la jonction VG-VD.
 La contraction longitudinale du VD débute à la chambre d’admission (région soustricuspidienne) et se propage jusqu’à la CCVD comme un péristaltisme (délai 50-80 msec) ; le
pic de pression est plus tardif que dans le VG. La phase de contraction isovolumétrique est
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
145





quasi-inexistante, parce que la pression du VD atteint rapidement la valeur de la PAP qui est
plus basse que celle de l’aorte.
Le raccourcissement systolique de la base vers l’apex est plus important que le
raccourcissement en petit axe, qui peut être très modeste même dans les conditions
physiologiques, et qui dépend davantage de la contraction des fibres septales du VG que de
celles de la paroi libre du VD.
Le VG fournit 40% de la pression systolique du VD par la contraction du septum
interventriculaire, qui assure une compression transverse de la cavité droite, et par la traction
des fibres communes aux deux ventricules, qui contribuent à la contraction circulaire au
niveau des sillons interventriculaires [344].
Une obstruction dynamique de la CCVD (effet CMO avec gradient jusqu’à 25 mmHg) peut
survenir en cas d’instabilité hémodynamique accompagnée d’hypovolémie et de stimulation
catécholaminergique parce que la CCVD est très richement dotée en récepteurs β (98b).
L’hypertrophie droite des cardiopathies congénitales s’accompagne d’une modification de la
structure pariétale : le VD développe trois couches de fibres au lieu de deux et présente une
structure qui ressemble à celle du VG.
Situé antérieurement par rapport au VG, le VD court davantage de risque en cas de
traumatisme thoracique par choc frontal.
Le pic de pression systolique est plus tardif que dans le VG, et plus de la moitié du volume systolique
est éjecté après ce pic de pression (voir Figure 5.103) [41a]. La phase de contraction isovolumétrique
est presque inexistante, parce que l’éjection commence dès que la pression intraventriculaire est
supérieure à la diastolique pulmonaire (10-15 mmHg); cette éjection précoce se poursuit pendant la
phase de relaxation isovolumétrique.
Différences structurelles entre les ventricules
VG
conique en obus
épaisse (12 mm)
3 couches : longitudinale sousépicardique, circulaire centrale,
longitudinale sous-endocardique
Contraction principale circulaire (80% de l’éjection)
Forme
Paroi
Structure
Pression développée
Vol télédiastolique
Fraction d'éjection
Contractilité (Emax)
Débit
Précharge
Postcharge
Perfusion coronarienne
Extraction d’O2
120-200 mmHg
40-80 mL/m2
0.6 – 0.7
5.5 mmHg/mL
dépend de la précharge
intrathoracique (poumons)
extrathoracique (RAS)
diastolique
75%
VD
croissant enroulé autour du VG
mince (4 mm), très trabéculée
2 couches : circulaire externe + longitudinale
profonde
longitudinale péristaltique (60% de
l’éjection), apport du VG : 40% de l’éjection
25-40 mmHg
50-100 mL/m2
0.5 – 0.6
1.3 mmHg/mL
sensible à la postcharge
extrathoracique (VCI)
intrathoracique (RAP)
systolique et diastolique
50%
La contraction du VD comprend 4 mouvements différents:
- Contraction longitudinale péristaltique de la base vers l'apex et la CCVD, mouvement de
propulsion principal
- Contraction radiaire de la paroi libre; contribution peu importante au volume systolique
- Torsion de 20-25°
- Apport important du VG: épaississement du septum et traction sur les fibres circulaires
communes aux deux ventricules (30-40% de l'éjection systolique).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
146
Régime de pression du VD
Le VD opère à des régimes de pression normalement très inférieurs à ceux du VG [207] :



PAP 20/10 - 30/15 mmHg (PAPmoy 10-19 mmHg) ;
RAP : 65-150 dynes•s•cm-5 (1-2 U Wood) ;
1 U Wood = (PAPm – PAPO) / DC, en mmHg•min•L-1; on obtient un résultat en dynes•s•cm-5
en multipliant par 80.
Cette postcharge très basse fait que le VD n’est pas indispensable au débit pulmonaire en respiration
spontanée, pendant laquelle la dépression inspiratoire est suffisante pour aspirer le volume systolique
dans les vaisseaux pulmonaires dont les résistances sont basses. La compliance vasculaire est
uniformément répartie à travers les poumons, qui sont les seuls organes à recevoir la totalité du débit
cardiaque, alors qu’elle est due à la seule élasticité de l’aorte et des grandes artères dans le circuit
systémique. Au cours d’un effort d’endurance, la postcharge du VD s’élève proportionnellement
davantage que celle du VG parce que les vaisseaux pulmonaires sont déjà vasodilatés au repos et ne
peuvent pas augmenter leur capacitance face à un haut débit systolique [212a]. Ce n’est pas le cas pour
le VG parce que les résistances artérielles systémiques baissent à l’effort isotonique, ce qui maintient
stable le niveau de sa postcharge.
Le VD agit comme régulateur d’entrée pour le VG puisqu’il maintient un débit pulmonaire constant
sur de vastes plages de précharges différentes. Sa compliance est élevée : il accommode de grandes
variations de volume sans modifier significativement sa pression de remplissage. Sa boucle pression /
volume a un aspect triangulaire (Figure 5.103) parce que l’éjection débute pendant la contraction
isovolumétrique et se poursuit pendant la relaxation isovolumétrique ; sa pente d'élastance maximale
(Emax) est plus faible que celle du VG (1.3 au lieu de 5 mmHg/mL) et son travail systolique le quart
de celui du VG [159,207]. Le VD est excessivement sensible à la postcharge, qui est normalement
basse ; il est une excellente pompe-volume mais une médiocre pompe-pression. Une augmentation de
postcharge se traduit par une baisse immédiate du volume systolique et par un accroissement rapide du
volume télédiastolique induisant une dilatation ventriculaire (Vtd > 85 mL/m2, SVD > 0.7 SVG) (Figure
5.104A). Comme la courbe de Starling du VD est très plate, l’augmentation de précharge est un
moyen peu efficace pour améliorer le débit (Figure 5.104B). La pression systolique maximale que
peut supporter momentanément un VD non hypertrophié est de 60 mmHg pour une courte durée (1-2
heures); à plus long terme, elle est de 40 mmHg. Lorsqu'il s'hypertrophie sur une surcharge chronique
de volume ou de pression, le VD présente des caractéristiques qui se rapprochent de celles du VG; il
peut alors maintenir son volume éjectionnel sur une plus vaste plage de postcharge, mais perd sa
capacité à tamponner les variations rapides de volume car son débit devient précharge-dépendant
dépendant (mécanisme de Frank-Starling). Il recourt à ce même mécanisme pour varier son débit
lorsqu’il est chroniquement dilaté sur une surcharge de volume [433].
Le tonus artériel pulmonaire, qui est maintenu en vasodilatation active permanente, est le fruit de
plusieurs activités [27,327].
Le NO• est un vasodilatateur pulmonaire actif, puissant et rapide, synthétisé dans
l’endothélium vasculaire en fonction de la pression et de la pulsatilité artérielles ; sa durée de
vie est brève (10-60 sec). Il agit en augmentant l’activité du cGMP. Il inhibe l’agrégation
plaquettaire [77].
 Les prostaglandines (PG) sont activement synthétisées dans les tissus vasculaires pulmonaires.
La PGI1 et la PGE2 sont vasodilatatrices, alors que la PGF2α et la PGA2 sont
vasoconstrictrices. Elles inhibent toutes l’agrégation plaquettaire [401].
 L’acidose, l’hypercapnie et l’hypoxie provoquent une vasoconstriction puissante à cause de
l’augmentation locale de la concentration en ion H+. Le mécanisme est une augmentation de la
[Ca2+] intracellulaire dans la musculature lisse des vaisseaux (voir Figure 5.113 page 159).
 L’endothéline (ET1), la sérotonine et l’angiotensine II sont des vasoconstricteurs pulmonaires.
Ils stimulent également la croissance des fibroblastes, ainsi que l’hypertrophie et l’hyperplasie

Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
147
de la musculature lisse. Les facteurs qui règlent leur sécrétion sont le flux sanguin, la
pulsatilité, le stress de la paroi vasculaire et l’hypoxie [54,327,351].
Pression
Emax
3
2
1
Compliance
4
V0
Volume
© Chassot 2010
Figure 5.103 : Diagramme Pression – Volume du ventricule droit. Comparée à celle du VG (voir Figure 5.48,
page 59), la boucle Pression – Volume n’a pas une forme de quadrilatère mais plus ou moins de triangle. La
pente Emax est plus faible et la courbe de compliance plus plate. 1 : point télédiastolique. 1 → 2 : contraction
isovolumétrique. 2 : début de l’éjection. 2 → 3 : phase de l’éjection systolique. 3 : point télésystolique. 3 → 4 :
relaxation isovolumétrique. 4 : début du remplissage. 4 → 1 : remplissage diastolique [250].

Les récepteurs α1 sont actifs mais très peu nombreux dans l’arbre vasculaire pulmonaire ; leur
existence même reste controversée. Des stimulants α comme la nor-adrénaline, les
anorexigènes et la cocaïne provoquent une faible vasoconstriction ; la phentolamine induit une
vasodilatation. Ces substances n’agissent qu’à concentration élevée et/ou chronique [211].
 L’innervation sympathique vasculaire pulmonaire est peu développée. Les récepteurs β1
provoquent une vasodilatation, mais leur activité n’est pas essentielle à son maintien. De ce
fait, le bloc de la péridurale thoracique haute (C7-D4) tend plutôt à inhiber la vasodilatation
pulmonaire active chez l’individu sain. En cas d’hypertension pulmonaire chronique, par
contre, la population de récepteurs α1 est augmentée et le bloc sympathique peut contribuer à
baisser les RAP [27,379].
La pression pulmonaire ne s’élève normalement pas avec l’exercice, car l’effet de l’augmentation du
débit cardiaque est contre-balancé par une vasodilatation, essentiellement contrôlée par la production
locale de NO•. Les vasodilatateurs pulmonaires sont plutôt des anti-vasoconstricteurs pulmonaires.
L'hyperventilation (pCO2: 25 - 30 mm Hg, pH = 7.5) et le NO• inhalé reproduisent les mécanismes
physiologiques de la vasodilatation pulmonaire [120].
Quatre phénomènes principaux augmentent l'impédance à l'éjection du VD.

Vasoconstriction pulmonaire: hypercapnie, hypoxie (pO2 < 60 mm Hg), acidose respiratoire
ou métabolique, hypothermie, protamine, digitale.
 Augmentation de la résistance mécanique à l'éjection: embolies pulmonaires, Pit élevée (PEEP
> 15 cm H2 O), hyperinflation pulmonaire, maladies parenchymateuses (BPCO, SDRA),
atélectasies.
 Stase gauche: insuffisance congestive gauche, sténose ou maladie mitrale, obstruction
veineuse pulmonaire.
 Flux pulmonaire augmenté: shunt gauche-droit, fistule artério-veineuse.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
148
Figure
5.104 :
Effets
des
variations
de
précharge et de
postcharge sur les
ventricules droit
(en
bleu)
et
gauche (en rouge)
[250]. On voit
l'extrême
sensibilité du VD
à l'élévation de sa
postcharge, mais
sa stabilité lors
des variations de
précharge.
Volume systolique (%)
Travail systolique
(gm/ml)
100
50
90
40
VG
VD
80
30
70
20
60
10
10
20
30
100 110
120
130
Postcharge (mmHg)
10
20
30
40
Précharge (mmHg)
Lorsque sa postcharge augmente de manière brusque, le VD se dilate parce que sa paroi est trop faible
pour résister à l’augmentation de pression. Le remplissage du VD est extrêmement sensible au régime
de pression intrathoracique puisque les pressions diastoliques droites normales sont voisines des
pressions respiratoires. La ventilation mécanique peut générer une Pit qui se rapproche de la pression
systolique droite normale (20-30 cm H2 O). Comme la précharge du VD est extrathoracique et sa
postcharge intrathoracique, une élévation de sa pression d'environnement conduit à une baisse de son
remplissage et à une élévation de sa postcharge, d'où une chute de son volume d'éjection.
Fonction du VD (I)
Régime de pression du VD: 20/0 – 30/5 mmHg, RAP: 65 – 150 dynes•s•cm-5 (1-2 U Wood).
Boucle P/V triangulaire, l'éjection commençant pendant la contraction isovolumétrique.
Travail VD = 0.25 travail VG.
Courbe de Starling très aplatie ; le débit du VD est peu sensible aux variations de sa précharge mais
très sensible à celles de sa postcharge (dilatation si augmentation aiguë).
Le VD est très sensible aux variations ventilatoires de la Pit (IPPV, PEEP).
L'arbre vasculaire pulmonaire est maintenu en vasodilatation de manière active (NO•, prostaglandines,
faible innervation α, prédominance de récepteurs β). L'acidose, l'hypoxie, l'hypercapnie et
l'hypothermie provoquent une vasoconstriction pulmonaire.
Le VD dilate en cas d'HTAP aiguë (pression maximale développée par un VD nornal: 50 mmHg,
volume limite: 120 mL/m2). Si la postcharge est chroniquement élevée, le VD s'hypertrophie. Plus
l'HVD est importante, plus le VD se comporte comme un VG et devient résistant à la postcharge mais
sensible à la précharge.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
149
Le VD est également très sensible à la pression qui règne dans le péricarde parce que sa structure est
très souple. Lorsque la volémie est normale, le péricarde n’exerce aucune pression sur les cavités
droites, mais lorsque celles-ci sont dilatées, il agit comme une butée : le 40% de la PtdVD est due à
l’action du péricarde lorsque cette dernière est ≥ 12 mmHg [13]; pour le VD, c'est l'équivalent d'une
tamponnade. L’ablation expérimentale du péricarde augmente beaucoup la compliance du VD et lui
permet de tolérer de fortes augmentations de volume sans augmentation de pression. En clinique,
l’ouverture du péricarde décomprime le VD, et libère également le VG de la restriction diastolique par
le bascule du septum interventriculaire vers la gauche. Cette technique fait partie du traitement de
l’insuffisance droite aiguë.
Interdépendance ventriculaire
Les deux ventricules sont étroitement interdépendants. Une augmentation de pression ou de volume de
l’un d’entre eux retentit immédiatement sur l’autre pour plusieurs raisons [41a,125a,267,344].
 Le VD assure la précharge du VG ; sa défaillance entraîne un défaut de remplissage gauche,
donc un petit volume systolique et un bas débit systémique (temps de transit pulmonaire: 2-5
cycles cardiaques), qui à son tour compromettent la perfusion coronarienne du VD.
 Les ventricules partagent une paroi commune, le septum interventriculaire (SIV), dont la
position est définie par le gradient de pression entre le VD et le VG ; la contraction du SIV
dépend essentiellement du VG et le fait normalement bomber dans le VD en systole.
 Le péricarde qui enveloppe les quatre chambres cardiaques représente une butée à
l’augmentation de volume des ventricules ; plus leur volume diastolique est grand, plus le
couplage entre eux est serré (il est de 1:1 lorsque la PtdVD est > 15 mmHg et la PtdVG > 20
mmHg) ; en hypovolémie, ce couplage diminue [265].
 La composante due à la contraction du VG représente 30-40% de la pression générée dans le
VD. Plus la surcharge droite augmente, plus l’assistance du VG est importante.
 Le bascule du septum interventriculaire dans le VG en diastole en cas de dilatation du VD
(défaillance et/ou surcharge de volume) et en systole en cas de surcharge de pression du VD
perturbe le remplissage et l’éjection du VG, dont le débit baisse.
 En cas de surcharge de pression, la durée de la contraction systolique du VD s’allonge et se
continue lorsque le VG est déjà en diastole, ce qui occasionne un bascule du septum dans ce
dernier et une désynchronisation de sa contraction ; l’éjection gauche perd en efficacité
comme lors d’un bloc de branche gauche complet.
 La réduction de volume du VD s’il est dilaté (nitroglycérine, diurétique) améliore la
performance du VG ; l’augmentation de la postcharge du VG s’il est comprimé repositionne le
septum et améliore la performance du VD.
 La mise en route d’une assistance univentriculaire gauche peut non seulement démasquer une
insuffisance droite sous-jacente mais encore supprimer le soutien du septum à l’éjection droite
par décompression du VG.
 La perfusion coronarienne droite dépend du rapport de pression entre le VD et l’aorte en
systole et en diastole.
En cas de surcharge de volume droite (communication interauriculaire, insuffisance tricuspidienne), le
volume télédiastolique du VD est augmenté et le SIV bombe dans le VG en diastole ; le volume et la
compliance diastoliques du VG sont réduits (effet Bernheim), et son volume systolique baisse de 2030% (Figure 5.105) [117,239]. En systole, la contraction du SIV, qui reprend sa position normale
convexe dans le VD, constitue une participation majeure du VG à l’éjection du VD (Figure 5.106A).
Le mouvement du SIV basculant alternativement dans le VD (systole) et le VG (diastole) est bien
visible à l’échocardiographie; on parle de mouvement paradoxal du septum. Cette interdépendance
ventriculaire est potentialisée par la contrainte mécanique du péricarde; elle est accentuée en cas de
constriction ou de tamponnade; elle est diminuée par une péricardiectomie ou par des vasodilatateurs
qui décompriment la surcharge du VD [13]. En cas de défaillance droite, le VG est donc doublement
pénalisé par diminution à la fois de son retour veineux (bas débit pulmonaire) et de son volume
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
150
diastolique (compression trans-septale). L’ouverture du péricarde, ou sa non-fermeture après une
intervention cardiaque, décomprime le VD et surtout améliore le remplissage du VG.
Figure 5.105 : Bascule
du
septum
interventriculaire dans le VG
lors
de
surcharge
pulmonaire et/ou de
défaillance ventri-culaire
droite (effet Bernheim).
Le remplissage diastolique
du
VG
est
handicapé, et le volume
systolique baisse. Le
septum interauriculaire
bombe dans l’OG.
OD
OG
OG
OD
VG
VG
VD
VD
Apex
© Chassot 2012
En cas de surcharge systolique par augmentation des pressions droites (hypertension pulmonaire,
BPCO sévère, embolie massive), la durée d’éjection du VD est allongée à cause de la hausse de
postcharge ; la systole droite se prolonge donc pendant le début de la relaxation du VG, et occasionne
un bascule du SIV dans le VG ; lorsque comence la systole du VG, le septum est repoussé dans le VD.
Même s’il ne reprend pas une position normale à cause de l’hyperpression droite, le septum donne
l’apparence d’être dyskinétique à l’échocardiographie. Cette pseudo-dyskinésie n’est pas liée à une
activation électrique anormale ou à un bloc de branche, mais uniquement à l’allongement de la systole
du VD. En cas d’hypertrophie importante du VD secondaire à une surcharge de pression chronique, le
SIV est bombé dans le VG en diastole et en systole ; le VD prend une forme ovale au lieu de croissant,
ce qui réduit d’autant le volume du VG (Figure 5.106B) [24]. Lorsque la performance systolique du
VG est diminuée par l’empiètement du VD, l’assistance fournie par le VG au VD est également
diminuée. Il s’installe alors un cercle vicieux, la défaillance d’un ventricule aggravant celle de l’autre.
Une amélioration de la fonction gauche (contre-pulsion intra-aortique, assistance ventriculaire)
représente alors une aide à l’éjection droite. Le bascule du septum interventriculaire est un bon
marqueur du degré de défaillance droite, et son retour en position médiane signe l’efficacité de la
thrérapeutique.
Figure 5.106 : Vues en court-axe
des
ventricules
(échocardiographie transoesophagienne) lors
de surcharge du VD.
A : Surcharge de volume. Le
septum interventriculaire bombe
dans le VG en diastole (effet
Bernheim), mais non en systole
car la pression et la force de
contraction du VG restent
supérieures à celles du VD dilaté.
B : Surcharge de pression. Le
septum interventriculaire bombe
dans le VG aux deux temps car la
pression du VD hypertrophié est
capable de repousser le VG.
PAL : pilier antéro-latéral. PPM :
pilier postéro-médian [Adapté de
Réf 24].
A
Diastole
Systole
B
Diastole
Systole
© Chassot 2012
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
151
Perfusion coronarienne
Dans le système droite-dominante (interventriculaire postérieure en provenance de la CD, 80% de la
population), la coronaire droite vascularise la majeure partie du VD, sauf la région antérieure et
antéro-septale qui est perfusée par l’IVA. La perfusion coronarienne du VD a lieu en diastole et en
systole (Figure 5.107A). Si la pression intraventriculaire systolique droite s'élève au-dessus de la
pression moyenne aortique, la perfusion systolique est amputée, et le VD est ischémié malgré la
persistance du flux coronarien diastolique. Il faut alors augmenter la pression systémique par un
vasoconstricteur; à noter que la noradrénaline est métabolisée par l'endothélium pulmonaire et que ses
concentrations sont plus élevées en cas d'hypertension pulmonaire [211].
Un infarctus de la paroi libre du VD entraîne une distension de cette paroi en systole, ce qui réduit le
volume systolique du VD mais diminue aussi la contribution du VG à l’éjection droite, parce que la
paroi n’est plus stabilisée en systole. Bien qu’elle concerne le VG, une ischémie septale anéantit l’aide
à l’éjection pour le VD. Ainsi, un phénomène qui réduit la fonction systolique d’un ventricule diminue
également la performance de l’autre. D’autre part, l’hypovolémie réduit le degré de couplage des
ventricules, donc diminue l’aide apportée par le VG au VD.
1
Flux
3
2
Flux coronaire VD
Flux coronaire VG
Systole
Diastole
© Chassot
S
D
S
D
2008
Figure 5.107A : Flux coronarien droit et gauche. 1): schéma du flux coronarien systolo-diastolique dans le
ventricule droit (trait bleu) et dans le ventricule gauche (trait rouge). 2): enregistrement Doppler du flux dans
l'artère interventriculaire antérieure (IVA) à l'échocardiographie transeosophagienne. 3): enregistrement Doppler
du flux dans la coronaire droite à l'échocardiographie transeosophagienne. Le flux est situé en dessous de la
ligne de base parce qu’il s’éloigne du capteur situé dans l’œsophage.
Fonction du VD (II)
L'interdépendance ventriculaire augmente en cas de dilatation droite et/ou gauche et en cas de
restriction péricardique. Lors de surcharge de volume, le VD bombe dans le VG en diastole et restreint
le remplissage du VG (effet Bernheim). Lors de surcharge de pression, le VD bombe dans le VG en
diastole et en systole (allongement de la durée d'éjection droite, pression VD momentanément >
pression VG et dyskinésie septale).
La perfusion coronarienne du VD est systolo-diastolique. Si la PsystVD est > PAmoy aortique, la
perfusion coronarienne systolique cesse (ischémie VD), d'où l'importance des vasoconstricteurs
systémiques dans la prise en charge de l'hypertension pulmonaire et l'insuffisance droite.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
152
Dysfonction du VD
Excellente pompe-volume, le VD est une médiocre pompe-pression. Une augmentation de sa
postcharge se traduit immédiatement par une dilatation ventriculaire (Vtd > 120 ml/m2). Lorsqu'il
s'hypertrophie sur une surcharge chronique de volume ou de pression, le VD présente des
caractéristiques qui se rapprochent de celles du VG; il peut alors maintenir son volume éjectionnel sur
une plus vaste plage de postcharge, mais perd sa capacité à tamponner les variations rapides de
volume car son débit devient précharge-dépendant. En clinique, trois phénomènes principaux
augmentent l'impédance à l'éjection du VD et sont responsables de l'insuffisance droite.
 L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP précapillaire) :
• HTAP primaire idiopathique ;
• HTAP secondaire : cardiopathies congénitales, âge, obésité, SAS, cocaïne, HIV,
anorexigènes ;
• HTAP sur vasoconstriction pulmonaire : hypoxie (pO2 alvéolaire < 60 mm Hg),
hypercapnie, acidose métabolique, hypothermie, protamine, digitale.
 Les pathologies du cœur gauche engendrant une stase pulmonaire (HTP postcapillaire) :
dysfonction du VG, maladie mitrale ;
 Les pathologies pulmonaires (BPCO, SDRA, asthme, embolie pulmonaire, PEEP excessive,
etc) ; la ventilation mécanique avec PEEP peut générer une Pit (≥ 20 cm H2 O) qui voisine la
pression systolique droite normale (20-25 mmHg).
L’augmentation de postcharge du VD dans l’HTAP est proportionnellement beaucoup plus importante
que celle du VG dans l’hypertension artérielle systémique [125a]. Outre l’augmentation de postcharge,
l’insuffisance droite peut être due à deux autres phénomènes.

Augmentation de précharge : surcharge de volume par communication interauriculaire (CIA),
insuffisance tricuspidienne, fistule artério-veineuse, mise en route d’une assistance
ventriculaire gauche qui augmente soudain le débit systémique et le retour veineux vers l’OD.
 Maladie primaire du VD : dysplasie arythmogène du VD, cardiomyopathie, infarctus,
ischémie aiguë, cardiopathie congénitale, dépression contractile du choc septique (la
défaillance du VD est présente dans un tiers des cas de sepsis).
Le coefficient d’extraction d’O2 du VD est de 50% ; il dispose donc de davantage de réserve que le
VG face à une ischémie. La perfusion coronarienne du VD a lieu en diastole et en systole, puisque la
pression systolique droite est très inférieure à la pression aortique (Figure 5.107B). Si la pression
intraventriculaire systolique droite s’élève alors que la pression aortique baisse, la perfusion systolique
diminue et le VD est ischémié malgré la persistance du flux coronarien diastolique. Il faut alors
augmenter la pression systémique par un vasoconstricteur (noradrénaline, vasopressine). Comme le
réseau artériel pulmonaire est pauvre en récepteurs alpha, l’effet d’une perfusion de noradrénaline est
essentiellement systémique. Les récepteurs à la vasopressine sont absents du lit pulmonaire. Le VD
ischémié présente souvent également une surcharge systolique parce que des résistances pulmonaires
normales sont encore trop élevées pour un ventricule défaillant. Lors d'insuffisance droite, la pression
de l'OD augmente et se répercute sur celle du sinus coronaire; à quoi s'ajoute l'effet de la régurgitation
tricuspidienne en systole (effet érectile) [147]. Cette surpression veineuse diminue d'autant la pression
de perfusion coronaire. De plus, la PVC élevée freine le drainage lymphatique qui se déverse au
confluent jugulo-sous-clavier gauche (angle veineux de Pirogoff) et contribue à la formation d'un
oedème myocardique, qui altère la diffusion tissulaire de l'O2.
La dilatation du VD fait bomber le septum interventriculaire vers la gauche en diastole, ce qui réduit le
remplissage du VG et abaisse son volume systolique (Figure 5.105). Elle élargit l’anneau tricuspidien,
et provoque une insuffisance tricuspidienne (IT) (Figure 5.108). Cette IT contribue à la baisse du
débit cardiaque antérograde, augmente la stase veineuse (oedème, ascite, hépatomégalie), et contribue
à la rétention de sel et d'eau. Ces différents phénomènes aggravent la dysfonction gauche, ce qui à son
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
153
tour élève la postcharge droite à cause de la stase pulmonaire et institue un cercle vicieux (Figure
5.109). A cause de la stase dans l’OD, le septum interauriculaire bombe dans l’OG. Le risque
d’arythmies ventriculaires est directement lié au degré de dilatation du VD.
P Ao
P VD
P
A
100
PP CD
50
Normal
0
HTAP
© Chassot 2015
Figure 5.107B : Pression de perfusion coronarienne du VD. Vu la différence de pression entre l’aorte (P Ao) et
le VD (P VD), la perfusion coronaire droite (PP CD) est systolo-diastolique. En cas d’hypertension pulmonaire
(HTAP), la composante systolique de la perfusion droite est compromise. Le VD peut souffrir d’ischémie même
si la perfusion diastolique est maintenue. Dans le schéma, la pression aortique est inchangée ; dans la réalité, une
perfusion de vasopresseur systémique est nécessaire pour maintenir l’adéquation de la composante systolique en
cas d’HTAP. Pression P en mmHg.
A
B
OD
OG
OD
VD
VG
VD
Figure 5.108 : Insuffisance tricuspidienne (IT). Le jet systolique rétrograde dans l’OD a une vélocité de 2-3 m/s.
A : IT en cas de RAA. B : IT en cas d’insuffisance aiguë du VD (embolie pulmonaire).
En chirurgie cardiaque, la défaillance droite réfractaire (incidence 0.1-1%) est associée à une mortalité
supérieure à 50% [160]. Elle est liée à plusieurs facteurs.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
154
Hypertension
pulmonaire
↑ pré/postcharge
↑ Stress de paroi VD
↑ Vol td VD
↓ PP coronaire
Ischémie VD
IT ↑↑
Acidose
Kinines
IVD
Dilatation
Stase
↓ perfusion
tissulaire
↓ Vol syst VG
Insuffisance
VG
Retour
→ VG ↓
Septum
→ VG
↓ Vol TD VG
Œdème
interstitiel
↓ Drainage lymphatique
Endotoxines TD
↓ excrétion Na
Ascite
Stase VCI
© Chassot 2014
Figure 5.109 : Mécanismes impliqués dans l'insuffisance ventriculaire droite congestive (IVD), engendrant une
série de cercles vicieux conduisant à l’auto-agravation de la situation. Vol: volume. TD: télédiastolique. IT :
insuffisance tricuspidienne. PP: pression de perfusion. TD : tube digestif. VCI : veine cave inférieure.



Ischémie (baisse de la pression de perfusion coronarienne, embolie coronarienne droite) ;
Défaillance gauche et hypertension pulmonaire postcapillaire ;
Assistance ventriculaire: la décharge du VG par une assistance ventriculaire gauche peut
décompenser le VD à cause de l’augmentation soudaine du débit systémique et de la
décompression brusque du VG : ne bombant plus dans le VD, le septum interventriculaire
supprime son aide à l’éjection droite (interdépendance ventriculaire systolique) ;
 Postcharge excessive : aggravation d’une hypertension pulmonaire (BPCO), administration de
protamine (incidence 1.6%), hyperventilation en pression positive avec PEEP élevée ;
 Défaut de cardioprotection, CEC longue ;
 Dans le postopératoire : tamponnade, SDRA, choc septique.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
155
En cas d'hypertension pulmonaire, la fonction du VD a une meilleure valeur pronostique de morbimortalité que la valeur de la pression artérielle pulmonaire. La PAP étant la résultante de l’éjection du
ventricule droit contre les résistances pulmonaires, une baisse de la PAP peut fort bien représenter une
défaillance du VD et non une amélioration de la circulation pulmonaire (voir Figure 5.111). Une
information majeure sur la fonction du VD peut être obtenue par l’enregistrement de la pression
intraventriculaire droite (PVD) (port ventriculaire d’un cathéter pulmonaire Paceport™). La
superposition des courbes de PVD et de PAP montre que la pression diastolique du VD, normalement
horizontale et inférieure à la PAPd, devient oblique ascendante lors de défaillance du VD, au point que
sa valeur télédiastolique devient identique à celle de la PAPd (voir Chapitre 12, Figure 12.12B) [98b].
Lorsque le VD est distendu et rigide (insuffisance diastolique restrictive), sa pression télédiastolique
peut même être supérieure à celle de la PAPd et donner lieu à un flux antérograde en télédiastole (voir
Chapitre 25, Figure 25.77E). L’accélération de la pente ascendante de la pression systolique
intraventriculaire (dP/dt) diminue lors de décompensation droite. D’autre part, une élévation de la
pression systolique du VD de > 6 mmHg par rapport à la PAPs indique la présence d’une obstruction
dynamique de la chambre de chasse du VD ; le gradient de pression peut dépasser 25 mmHg dans 4%
des cas d’instabilité hémodynamique après CEC [98b]. Les trois principaux critères d’amélioration
fonctionnelle lorsqu’on traite une défaillance droite sont le repositionnement du septum
interventriculaire, la baisse de la PVC et l’augmentation du volume systolique.
Dysfonction du VD
L'insuffisance droite est due 1) à une cardiopathie du VD (ischémie, cardiomyopathie), 2) à une
surcharge de volume (CIA, IT) ou 3) le plus souvent, à une surcharge de pression:
- HTAP précapillaire (idiopathique, âge, obésité, vasoconstriction pulmonaire)
- HTAP postcapillaire (stase gauche, décompensation du VG, maladie mitrale)
- Pathologies pulmonaires (BPCO, SDRA, embolie, PEEP excessive)
L'insuffisance droite est un facteur de mortalité majeur. Le pronostic clinique est davantage déterminé
par la fonction du VD que par la valeur de la pression pulmonaire.
Hypertension pulmonaire (HTP)
Définition et étiologies
L'hypertension pulmonaire (HTP) est définie par une pression moyenne (PAPm) > 25 mmHg au repos
et des RAP > 240 dynes•s•cm-5 ou > 3 U Wood (valeur normale : 60-150 dynes•s•cm-5, < 2 U Wood)
[133b,248a,364a]. L’élévation de la PAPm > 30 mmHg à l’effort n’est plus retenue dans la définition
de l’HTAP, car cette valeur peut être atteinte chez l’individu normal. Avec l’âge, la PAP s’élève de 1
mmHg par tranche de 10 ans [193]. Elle augmente aussi parallèlement au BMI. De l’équation de la
résistance artérielle RAP = (PAPmoy - PAPO) • 80 / DC, on peut extraire :
PAPm ≈ ( PAPO + RAP ) • DC
La pression pulmonaire est donc déterminée par quatre catégories de facteurs [193] :
 PAPO ; hypertension postcapillaire : cardiopathies gauches, maladie veino-occlusive.
 RAP (résistance statique artériolaire représentant 75% de la postcharge du VD) ; hypertension
artérielle précapillaire : HTAP primaire, embolie pulmonaire, BPCO, hypoxie.
 Impédance (résistance due à la pulsatilité de l’arbre pulmonaire, non-mesurée en clinique,
représentant 25% de la postcharge du VD) .
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
156
 DC ; surcharge de volume : shunt gauche – droit, insuffisance tricupidienne sévère.
Conceptuellement, l’abbréviation HTAP est réservée à l’hypertension artérielle pulmonaire liée à une
augmentation des résistances artériolaires, alors que le terme HTP recouvre l’ensemble des lésions qui
entraînent une élévation de la PAP (lésions pulmonaires tissulaires, hypertension veineuse pulmonaire,
etc). Dans l’usage courant, on ne fait souvent pas la différence. L’étiologie de l’HTP relève de 5
groupes de causes, selon la classification de l’OMS [325,364.364a].
 1 - Hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) proprement dite :
o HTAP primaire (idiopathique familiale) ; la prévalence de l’HTAP primaire est de 15
cas (France) à 25 cas (Suisse) par million d’habitants [398].
o HTAP des cardiopathies congénitales (10% des cas adultes).
o HTAP secondaire à des médicaments (anorexigènes comme l’aminorex, la
fenfluramine ou le benfluorex, cocaïne, amphétamines, imatinib, interféron), à des
maéadies (HIV, hypertension portale, schistostomiase, sclérodermie), à l’obésité ou à
l’âge ; vu sa fréquence (200 millions d’humains), la schistostomiase est probablement
la principale cause d’HTAP dans le monde.
 1’ – Maladie pulmonaire veino-occlusive.
 1’’ – HTAP persistante du nouveau-né (2 :1'000 bébés).
 2 - Hypertension pulmonaire (HTP) postcapillaire (P télédiast VG > 18 mmHg, PAPO > 15
mmHg, mais RAP < 3 U Wood et gradient transpulmonaire < 12 mmHg) : défaillance
systolique ou insuffisance diastolique restrictive du VG, valvulopathie mitrale ; c’est la cause
la plus fréquente d’HTP chez l’adulte (65% des cas) [112a,398a].
 3 - HTAP associée à l’hypoxie alvéolaire : BPCO, emphysème, SDRA, apnée du sommeil
(SAS), hypoxie d’altitude, PEEP excessive ; l’élévation de la PAP est en général modérée
(PAPm 25-35 mmHg).
 4 - HTAP liée à la maladie thrombo-embolique pulmonaire chronique ; 4% des embolies
pulmonaires aiguës se soldent par une non-résorption des thrombi.
 5 - HTAP d’origine multifactorielle non éclaircie (sarcoïdose, histiocytose X, maladie de
Gaucher, anémie hémolytique, maladies myéloprolifératives, insuffisance rénale dialysée).
Dans les groupes 1, 3, 4 et 5, l’HTAP est précapillaire ; la POG et la PAPO sont normales (PAPO < 15
mmHg), et le gradient transpulmonaire (GTP = PAPm – POG, ou PAPm - PAPO) est supérieur à 12
mmHg ; les RAP sont élevées (> 240 dynes•s•cm-5 ou > 3 U Wood). Dans le groupe 2, l’HTP est
primairement postcapillaire : POG élevée et PAPO > 16 mmHg, RAP et gradient transpulmonaire
normaux (GTP ≤ 12 mmHg) ; le gradient entre la PAPdiast et la PAPO est < 5 mmHg. Cette élévation
passive de la PAP est réversible si la lésion gauche est corrigée (remplacement mitral, par exemple)
[154a]. Cependant, cette HTP, qui induit aussi une dysfonction endothéliale avec altération de la
production de NO et d’endothéline, est souvent accompagnée d’une vasoconstriction artériolaire
réactionnelle (HTAP) qui augmente la PAP sans proportion avec l’élévation de la pression veineuse
pulmonaire (gradient transpulmonaire > 12 mmHg dans 45% des cas). La finalité de cette
vasoconstriction liée au remodelage artériolaire est probablement de diminuer l’engorgement
pulmonaire en freinant le débit : l’administration de NO dans cette situation augmente la POG et la
congestion capillaire [398a] ; elle peut même conduire à l’OAP [154a]. Bien que la correction
chirurgicale des lésions gauches puisse normaliser la pression veineuse pulmonaire, cette
vasoconstriction artérielle persiste dans le postopératoire, même si elle tend à diminuer avec le temps.
Les nouveaux concepts issus de la biochimie et de la génétique tendent à regrouper les mécanismes
étiologiques de l’HTAP sous cinq rubriques différentes [9].

Une dysfonction endothéliale crée un déséquilibre favorisant la vasoconstriction, la thrombose
et la mitogenèse.
 Un polymorphisme génétique modifie l’expression des gènes commandant certains canaux
ioniques comme les canaux potassiques dépendant du voltage (KV) ; le non-fonctionnement
des canaux KV entraîne une dépolarisation de la membrane qui augmente la concentration
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
157
cytoplasmique de K+ et de Ca2+, d’où activation de la contraction de la musculature lisse. Les
canaux KV sont également inhibés par l’hypoxie ; leur perte conduit à la vasoconstriction
pulmonaire hypoxique (voir Figure 5.112 page 158).
 Une prolifération cellulaire excessive, une baisse de l’apoptose et un métabolisme dévié vers
la glycolyse (excès de pyruvate-déhydrogénase-kinase qui bloque le cycle de Krebs) dans les
cellules musculaires lisses, les fibroblastes et l’endothélium suggèrent des mécanismes
analogues à ceux de la cellule cancéreuse.
 Une vasoconstriction réfractaire peut s’installer par suractivation de la phospholipase C ; elle
ne réagit plus aux vasodilatateurs (anticalciques, nitroglycérine). Ainsi, seuls 20% des patients
souffrant d’HTAP répondent aux vasodilatateurs.
 L’état fonctionnel du VD est l’élément déterminant dans le pronostic de l’HTAP.
L’augmentation de postcharge induit une hypertrophie ventriculaire droite (HVD),
caractérisée par une surexpression de la phosphodiestérase-5, qui métabolise le GMPc, et un
excès de pyruvate-déhydrogénase-kinase, qui bloque le cycle de Krebs. Bien qu’hypertrophié,
le VD est donc métaboliquement dysfonctionnel.
L’HTAP chronique présente une progression dans les lésions anatomo-pathologiques, typiques d’une
panvasculopathie (Figure 5.110) [296].






Hyperplasie intimale, épaississement des cellules endothéliales ;
Hypertrophie de la média et muscularisation réversible des portions terminales de l’arbre
pulmonaire ;
Prolifération des fibroblastes adventitiels ;
Infiltration de cellules inflammatoires ;
Occlusion progressive, thrombose des petits vaisseaux ; aux phases avancées, l’arbre pulmonaire est constellé de thrombus muraux, d’où l’importance d’anticoaguler ces malades [27] ;
Lésions plexiformes d’angioprolifération dans l’HTAP idiopathique oblitérant les artérioles;
cette lésion ne se rencontre pas dans l’HTP postcapillaire ni dans l’hypoxie pulmonaire.
Figure 5.110. Coupes
histologiques
de
l’évolution
anatomopathologique
de
l’hypertension
pulmonaire
chronique
[296].
Hyperplasie de la média
Lésion plexiforme
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
Fibrose intimale concentrique
Fibrose excentrique
158
La distribution des lésions est très hétérogène. La pathologie épargne les veines, la circulation
bronchique, le réseau systémique et les bronches. Au stade terminal, l’HTAP sévère est fixée (PAPm
> 55 mmHg, RAP > 800 dynes•s•cm-5) et n’est plus modulable ; c’est le syndrome d’Eisenmenger
[287]. Malgré cete fixité, les résistances artérielles peuvent encore augmenter sur l’effet des facteurs
métaboliques qui provoquent une HTAP : acidose, hypercapnie, hypothermie, stress, etc. La
prévention de ces phénomènes est capitale lorsque l’on prend en charge un patient souffrant d’HTAP
fixée.
Hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) (I)
Définition de l'HTAP: PAP moy > 25 mmHg au repos et RAP > 240 dynes•s•cm-5 (valeur normale :
60-150 dynes•s•cm-5).
Classification de l'OMS:
- HTAP essentielle: HTAP primaire, HTAP des cardiopathies congénitales, HTAP secondaire
(médicaments, obésité, âge);
- HTAP postcapillaire (insuffisance ventriculaire gauche, valvulopathie mitrale);
- HTAP due à l'hypoxie alvéolaire (BPCO, SAS, haute altitude);
- maladie thrombo-embolique pulmonaire,
- HTAP d’origine multifactorielle non éclaircie.
Syndrome d'Eisenmenger: HTAP fixée aréactive, PAPm > 55 mmHg, RAP > 800 dynes•s•cm-5
Physiopathologie
En systole, l’arbre vasculaire pulmonaire doit absorber la totalité du volume systolique car la valve
mitrale est fermée, raison pour laquelle les RAP sont dix fois plus basses que les RAS. Lorsque le
débit cardiaque augmente à l’effort, les résistances vasculaires pulmonaires baissent afin de contenir
cet excès de volume, mais la diminution des RAP ne peut pas être importante vu que le lit pulmonaire
est déjà en vasodilatation active au repos. La PAP s’élève donc à l’effort. Une augmentation excessive
de la PAP à l’exercice est un signe précoce de l’HTAP. Par contre, son augmentation au repos est un
signe tardif puisqu’il faut que 50% de la circulation soit obstruée pour qu’elle reste élevée en
permanence [219c].
La postcharge du VD consiste en trois composantes : la résistance artériolaire fixe, l’impédance
pulsatile et la compliance vasculaire. En clinique, on ne calcule que la première (RAP = (PAPm –
PAPO)/DC), qui mesure la résistance moyenne comme si le flux était continu ; elle représente 60-70%
de la résistance à l’éjection [219a,407b]. La deuxième quantifie la postcharge dynamique du VD
puisqu’elle traduit l’opposition au flux dans un système pulsatile (Z = Pinst/flux) ; elle peut se calculer
à partir du flux Doppler pulsé dans l’AP et de la mesure simultanée de la PAP. Elle représente le tiers
de la postcharge du VD. Comme elle inclut la résistance et la rigidité des vaisseaux pulmonaires, elle
offre une meilleure corrélation avec la survie que les RAP seules [249a].
La compliance est le rapport entre le volume systolique et la pression pulsée (C = VS/PP, où PP =
PAPs – PAPd). Contrairement à la circulation systémique où elle est localisée dans l’aorte et les
grandes artères élastiques, la compliance pulmonaire est le fait de tout l’arbre vasculaire réparti à
travers les poumons. L’arbre pulmonaire est donc un système à basse résistance et à haute compliance.
Lorsque cette dernière diminue, la différentielle systolo-diastolique, ou pression pulsée, augmente.
Comme la compliance et la résistance varient en sens inverse, leur produit (R • C, en 1/seconde) reste
constant ; il représente la constante de temps qui caractérise la baisse de la PAP en diastole [219a] ; il
reste stable au cours du traitement de l’HTAP, alors que l’évolution naturelle de la maladie entraîne
une baisse de compliance plus importante que l’augmentation des RAP. La compliance est donc un
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
159
marqueur plus fin du degré d’HTAP : un rapport VS/PP < 0.81 mL/mmHg prédit une probabilité de
survie à 4 ans de < 40%, alors qu’un rapport > 2.0 prédit une survie de 100% [235a]. D’ailleurs, la
rigidité de l’arbre vasculaire (baisse de la compliance) est le principal déterminant lié à la diminution
des indices de fonction du VD [376a]. La relation qui unit la résistance et la compliance n’est toutefois
pas linéaire, mais curvilinéaire et logarithmique [219b]. Ainsi de petites variations de résistance se
traduisent par de larges variations de la compliance lorsque les RAP sont basses et que la courbe est
redressée, alors que les mêmes variations de résistance modifient peu la compliance lorsque les RAP
sont élevées parce que la courbe est assez plate. Les vasodilatateurs pulmonaires sont donc plus
efficaces au début de la maladie qu’en phase terminale. La silhouette de la courbe de pression
systolique en AP illustre le degré de rigidité des vaisseaux pulmonaires (voir Chapitre 12, Figure
12.28A) : on voit une augmentation de la pression pulsée et de la pression de réflexion (pression
réfléchie : voir Couplage ventriculo-artériel) caractéristique de l’HTAP ; la deuxième s’ajoute à la
pression d’éjection du VD et augmente donc sa postcharge réelle [61a].
Les vaisseaux pulmonaires sont moins innervés que le circuit systémique et ont une répartition
différente des récepteurs sympathiques ; les récepteurs α y sont rares et les récepteurs β prédominent.
La stimulation sympathique a un effet préférentiellement β vasodilatateur lorsque les RAP sont basses,
mais un effet α vasoconstricteur lorsque les RAP sont déjà élevées [379]. Les vasoconstricteurs
comme la nor-adrénaline ou la phényléphrine ont moins d’effet sur la circulation pulmonaire que sur
la circulation systémique [327]. Les récepteurs à la vasopressine semblent absents du lit pulmonaire.
Les vaisseaux pulmonaires sont maintenus dans une vasodilatation active permanente, qui est la
résultante d’un équilibre dynamique entre plusieurs éléments.
 NO• : vasodilatateur sécrété localement par l’endothélium en fonction de la pulsatilité locale ;
la NO-synthase transforme l’arginine en citrulline qui est le donneur de NO•.
 Prostacycline I2E1 : vasodilatation. La prostacycline est produite à partir de l’acide
arachidonique par la cyclo-oxygénase endothéliale ; elle stimule l’adénylate-synthase qui
transforme l’ATP en cAMP.
 Endothéline E1 : vasoconstriction.
 Thromboxane A2, sérotonine et angiotensine II : vasoconstriction.
 Hypoxie alvéolaire : vasoconstriction locale si PaO2 < 60 mmHg.
 Hypercapnie et acidose (élévation de la [H+] locale) : vasoconstriction.
Dans l’hypertension artérielle pulmonaire, la production de NO• est freinée, et l’activité des
phosphodiestérases-5, qui catabolisent le GMPc, est augmentée. Ceci conduit à une vasoconstriction
parce que le GMPc est le messager intracelulaire du NO• ; normalement, il abaisse la [Ca2+]i dans les
cellules musculaires lisses et provoque une vasodilatation. Les vasodilatateurs pulmonaires dimiuent
également l’adhésivité plaquettaire, alors que les vasoconstricteurs l’augmentent ; de plus, les
vasoconstricteurs favorisent la prolifération cellulaire endothéliale, myoblastique et fibroblastique. La
noradrénaline étant métabolisée par l’endothélium pulmonaire, ses concentrations sont plus élevées en
cas d’hypertension pulmonaire [211].
Le fonctionnement du VD est au centre de la physiopathologie clinique de l’HTAP. Face à
l’augmentation chronique de sa postcharge, le VD dilate et s’hypertrophie (HVD) ; sa masse augmente
jusqu’à 6 fois. La plasticité du VD est élevée, puisque l’hypertrophie débute quelques heures déjà
après l’augmentation de postcharge [41a]. Plus il est hypertrophié, plus le VD se comporte comme le
VG. La proportion de raccourcissement circulaire augmente par rapport au raccourcissement
longidutinal. Sa courbe de Starling se redresse et il devient tolérant à l’augmentation de postcharge,
mais son débit devient dépendant de la précharge ; il ne peut plus amortir les variations du retour
veineux en maintenant le débit pulmonaire constant. L’hypovolémie conduit à une baisse du débit
pulmonaire et à une hypoxémie. En diastole, la pression du VD hypertrophié et surchargé est
supérieure à celle du VG ; le septum interventriculaire bombe dans le VG et réduit le remplissage
diastolique gauche (Figures 5.105 page 142) [193].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
160
Contrairement à l’image que l’on rencontre dans les artères systémiques (voir Figure 5.59 page 72),
les courbes de pression et de flux sont pratiquement identiques dans l’artère pulmonaire, parce qu’il
existe peu d’onde de pression se réfléchissant en périphérie dans l’arbre vasculaire pulmonaire qui est
vasodilaté en permanence. Lorsque les RAP augmentent, cette configuration se modifie : dans
l’HTAP, la courbe de pression et celle de flux se dissocient et prennent la même allure qu’en voie
systémique. Cela est dû à l’installation d’une onde de pression réfléchie par l’élévation des résistances
artériolaires pulmonaires.
Pour atteindre de hautes valeurs de PAP, il faut la conjonction de deux éléments : des résistances
artériolaires élevées et une force propulsive suffisante. Celle-ci est fournie par le VD hypertrophié.
Ainsi, l’HTAP est fonction de la capacité du VD à générer chroniquement des pressions pulmonaires
élevées. Une PAP de 90/50 mmHg signifie que le VD est capable de soutenir ce régime de pression.
La défaillance droite se traduit au contraire par l’impossibilité de travailler contre une telle
postcharge : la PAP tend à redescendre, alors que la situation hémodynamique empire (Figure 5.111)
[160]. La gravité et le pronostic de la maladie tiennent donc davantage à la fonction ventriculaire
droite qu’à la valeur de la PAP en elle-même. La découverte d’une HTAP dans le préopératoire doit
commander immédiatement une échocardiographie pour évaluer la fonction droite, car c’est elle qui va
déterminer le risque opératoire, aussi bien en chirurgie cardiaque qu’en chirurgie non-cardique.
Figure 5.111 : Schématisation de la
relation entre les résistances
artérielles pulmonaires (RAS), le
débit du VD (D VD) et la pression
artérielle
pulmonaire
(PAP).
L’HTAP est fonction de la capacité
du VD à générer chroniquement des
pressions pulmonaires élevées. Dès
que le VD défaille, la PAP tend à
redescendre, alors que la situation
hémodynamique empire et que les
RAS continuent à augmenter. Dans
le laps de temps A (en jaune), la
PAP mesurée est plus basse que
précédemment, non par amélioration
de la situation mais pas baisse de
fonction du VD. La gravité clinique
et le pronostic de la maladie tiennent
donc davantage à la fonction
ventriculaire droite qu’à la valeur de
la PAP en elle-même [75,159].
Résistances
Débit
Pression
RAP
PAP
D VD
A
Temps
Hypertension artérielle pulmonaire (II)
Facteurs étiopathogéniques dans la paroi de l'arbre vasculaire pulmonaire:
- Dysfonction endothéliale favorisant la vasoconstriction: ↓ production de NO•, ↓ GMPc,
excès de phospholipase C qui conduisent à une ↑ [Ca2+]i
- Modifications congénitales du fonctionnement des canaux Kv qui règlent la [Ca2+] dans les
cellules musculaires lisses
- Prolifération cellulaire excessive et métabolisme dirigé vers la glycolyse
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
161
Lésions histologiques:
- Hyperplasie endothéliale et hypertrophie de la média
- Fibrose intimale concentrique
- Microthromboses
- Lésions plexiformes (HTAP précapillaire)
Conséquences pour la prise en charge clinique
Les patients souffrant d’hypertension pulmonaire se caractérisent par une perte complète de
compliance hémodynamique dans la circulation droite. Ils présentent une physiopathologie particulière
[27,64,120].
 Le débit pulmonaire est abaissé et relativement fixe ; il ne peut pas augmenter
proportionnellement à la demande en O2, d’où cyanose à l’effort. Toute élévation du débit
cardiaque se traduit par une élévation importante de la PAP.
 Face à l’augmentation chronique de sa postcharge, le VD se dilate et s’hypertrophie (HVD).
Plus il est hypertrophié, plus le VD se comporte comme le VG ; il tolère l’augmentation de
postcharge mais son débit devient dépendant de la précharge ; il ne peut plus amortir les
variations du retour veineux en maintenant le débit pulmonaire constant ; l’hypovolémie
conduit à une baisse du débit pulmonaire et à une hypoxémie.
 En diastole, le bombement du septum interventriculaire dans le VG réduit le remplissage
gauche et le volume systolique systémique; l’élévation de la postcharge gauche
(vasoconstriction artérielle systémique) tend à replacer le septum dans sa position
physiologique.
 Une hypotension systémique peut compromettre la perfusion coronarienne droite en réduisant
la composante systolique du flux coronaire vers le VD ; un vasoconstricteur systémique est
requis pour parer au risque ischémique.
 En cas de foramen ovale perméable, un shunt droite → gauche cyanogène peut s’installer à la
faveur d’une augmentation excessive de la POD.
 Malgré l’épaississement des parois artérielles pulmonaires, les petits vaisseaux artériolaires
périphériques conservent une réactivité vasculaire ; les RAP peuvent encore augmenter par
hypoxémie, hypercarbie, acidose, hypothermie ou stress sympathique [52].
Lors de la prise en charge de ces malades en salle d'opération ou aux soins intensifs, il est capital
d'éviter toutes les situations qui peuvent augmenter les RAP:
 Hypoventilation (hypercarbie, hypoxémie, atélectasies);
 Surpression intrathoracique (variable selon la fonction du VD, respecter une hyperventilation
normobarique);
 Acidose;
 Hypothermie;
 Stimulation sympathique (stress, douleur) ;
 Anémie aiguë (seuil de transfusion Hb ≥ 100 gm/L) ; la baisse du transport d’O2 ne peut être
compensée que par une augmentation du débit pulmonaire, qui élève considérablement la
PAP.
Nosologie de l’HTAP
La symptomatologie de l’HTAP est peu spécifique : dyspnée, hypoxémie, cyanose d’effort, syncope,
pseudo-angor, signes d’insuffisance ventriculaire droite. Elle peut s’accompagner d’hémoptysies. La
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
162
polycythémie compense la baisse de la PaO2. L’ECG montre des signes d’HVD : déviation droite,
grandes ondes R en V1 et V2, BBD. La radiographie du thorax décèle une dilatation des artères
pulmonaires, du VD et de l’OD (coeur globulaire). L’échocardiographie montre une dilatation et une
hypertrophie du VD, un aplatissement et un mouvement paradoxal du septum interventriculaire, et une
insuffisance tricuspidienne. Les critères de sévérité de l’HTAP sont [64] :




PAPm > 35 mmHg ;
SaO2 < 90% ;
Hb > 150 gm/L ;
Dysfonction du VD.
Le degré de réversibilité de l’HTAP est évalué en préopératoire par un test au NO• (inhalation de 1030 ppm au masque), à l’adénosine (6-12 mg iv) ou à l’époprosténol (> 2 ng/kg/min). On considère que
l’HTAP est encore réversible si la PAPm baisse de > 25% (> 10 mmHg) et les RAP de > 30% (< 400
dynes s cm-5) sans modification du débit cardiaque [27].
La mortalité annuelle moyenne de l’HTAP est de 9% [19]. Bien que l’HTAP soit un facteur de risque
majeur en chirurgie cardiaque et non-cardiaque (mortalité 5-25%, morbidité 40%), c’est surtout la
fonction du VD qui est déterminante pour le pronostic : la mortalité est proportionnelle au degré de
dysfonction du VD, et non directement liée à la valeur de la pression pulmonaire [320].
L’HTAP de haute altitude
Au sommet du Mont-Blanc (4'810 m) la PaO2 est de 75 mmHg ; l’Everest (8‘848 m), elle est de 36-40
mmHg et la PaCO2 de 11-15 mmHg [237]. A ces valeurs, le poumon subit une vasoconstriction
hypoxique massive (RAP augmentée de 100 à 300%). Normalement, la vasoconstriction pulmonaire
hypoxique, qui est réglée par la pO2 alvéolaire, détourne le sang artériel des zones hypoventilées
(atélectasies) vers les zones normoventilées ; elle diminue la désaturation artérielle liée à l’effet shunt
(Figure 5.112). Cette vasoconstriction pulmonaire hypoxique est un phénomène rapide qui s’installe
entre 20 secondes à 2 minutes [269,412]. En altitude, comme dans l’apnée du sommeil (SAS) et chez
l’obèse morbide, elle se généralise à l’ensemble des poumons, mais reste inhomogène [17]. Très
variable selon les individus, elle se déclenche dès 2'500 m. Elle est d’autant plus intense que
l’ascension est rapide et les efforts importants.
Le phénomène se passe dans les celllules de la musculature lisse (Figure 5.113). Par leur chaîne
d’oxydo-réduction, les mitochondries agissent comme des senseurs pour la pO2 alvéolaire. En effet,
elles produisent normalement des Reactive Oxygen Species (ROS), qui sont des superoxydes sécrétés
en petite quantité. Ces ROS activent des canaux membranaires voltage-dépendants extrayant le
potassium de la cellule et la maintenant hyperpolarisée (canaux KV) ; cette hyperpolarisation
physiologique inhibe les canaux calciques voltage-dépendants (canaux Ca2+ L), donc moins de Ca2+
entre dans la cellule ; la [Ca2+]i reste basse, donc la contraction musculaire est freinée.
Physiologiquement, les vaisseaux pulmonaires sont maintenus en vasodilatation active par
hyperpolarisation membranaire. Mais si la pO2 enregistrée par les mitochondries est trop basse à cause
de l’hypoxie, la production de ROS est faible et les canaux KV ne sont plus activés : la membrane est
moins hyperpolarisée, l’activité des canaux Ca2+ L augmente et la [Ca2+]i s’élève ; la troponine C est
stimulée et la musculature se contracte [246,269].
Le deuxième phénomène en jeu est la production de NO• par l’endothélium vasculaire des poumons.
Le NO• est un puissant vasodilatateur, dont la production est réglée par le flux pulmonaire : elle
augmente lorsque celui-ci est élevé pour permettre un haut débit sans variations de pression. Dans les
zones hypoxiques, sa production est abaissée puisqu’il fait partie de l’ensemble des ROS, dérivés
superoxides produits au cours de l’oxydo-réduction de l’O2.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
163
A
Figure 5.112 :
Vasoconstriction
pulmonaire hypoxique.
Flux artériel
pulmonaire
Flux artériel
pulmonaire
Rapport
V/Q
normal
Alvéoles
ventilées
A:
ventilation
et
perfusion
pulmonaires
normales ; le rapport
V/Q est normal.
B : lorsque des alvéoles
ne sont plus ventilées, les
artérioles
qui
les
vascularisent
se
vasoconstrictent
pour
freiner le débit sanguin et
limiter l’effet shunt qui
résulte de cet afflux de
sang désaturé dans la
veine pulmonaire.
Flux veineux
pulmonaire
B
Flux artériel
pulmonaire
Flux artériel
pulmonaire
Effet
shunt
Alvéole
non-ventilée
Vasoconstriction
pulmonaire
hypoxique
Flux veineux
pulmonaire
© Chassot 2012
Chez les alpinistes séjournant en haute altitude, l’HTAP d’altitude évolue en deux phases [152,345].

Phase I : la PAPsyst s’élève jusqu’à 50-80 mmHg ; la PAP moyenne est de 20 mmHg (5'000
m) à 35 mmHg (7'000 m) au repos, et respectivement de 40 et 55 mmHg à l’effort. La
vasoconstriction pulmonaire hypoxique est intense, la production de NO• est abaissée et celle
d’endothéline E1 est augmentée. Comme la vasoconstriction est inhomogène, les alvéoles des
zones vasoconstrictées reçoivent peu de sang, mais celles des zones non-vasoconstrictées sont
noyées sous un flux excessif et une haute pression ; leur Pcap dépasse 20 mmHg et l’oedème
alvéolaire s’installe. L’OAP d’altitude, qui survient en général dans les 3 premiers jours, est
lié à deux phénomènes :
• PAP excessive dans les zones non vasoconstrictées ;
+
• Défaut de transport du Na et de l’eau dans l’épithélium alvéolaire rendant inefficace
le système qui réabsorbe activement l’oedème alvéolaire.
La faible production de NO• et le défaut de clearance du liquide alvéolaire sont des éléments
constitutionnels génétiques. L’augmentation de l’hématocrite avec l’acclimatation permet un
transport d’O2 adéquat et de bonnes performances physiques sont encore possibles.
 Phase II : après 4-6 semaines d’acclimatation pendant lesquelles l’HTAP s’est homogénéisée
et a protégé l’alpiniste de l’OAP, le VD entre dans une phase d’insuffisance ventriculaire dû à
l’excès de postcharge de longue durée. Cette phase est souvent accompagnée de bronchopneumonie.
L’œdème pulmonaire d’altitude (High altitude pulmonary edema, ou HAPE) survient en général
pendant les premiers jours d’acclimatation. La stimulation sympathique est importante et la PAP est
élevée (PAPsyst 50-80 mmHg), mais les lésions pulmonaires sont inhomogènes : certaines zones sont
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
164
en vasoconstriction hypoxique intense, alors que d’autres ne sont pas vasoconstrictées. De ce fait, ces
dernières sont perfusées sous haute pression, mais ne sont pas protégées par la vasoconstriction [17].
La pression capillaire y est > 25 mmHg et le liquide interstitiel fuit dans les alvéoles : c’est l’œdème
pulmonaire. A ce mécanisme s’ajoutent des efforts d’hyperinflation pulmonaire et d’hyperventilation
compensatoire qui créent une dépression intrathoracique profonde en inspirium ; l’afflux de sang dans
les poumons est massif, comme dans une manœuvre de Mueller. Il existe une grande variabilité
interindividuelle dans l’incidence de l’OAP d’altitude ; seul un petit nombre d’individus y est
susceptible. Ce sont ceux qui présentent les plus hautes pressions pulmonaires en réaction à l’hypoxie.
Il s’agit probablement de personnes génétiquement prédisposées à une moindre production de NO• et à
un défaut d'évacuation liquidienne alvéolaire [17,345]. Il existe aussi des variations intraindividuelles : certains alpinistes ont souffert une fois d’OAP alors qu’ils avaient déjà accompli
plusieurs ascensions à 8'000 mètres sans problèmes.
2+
Récepteur
α
Figure
5.113 :
Mécanismes cellulaires mis
en
jeu
dans
la
vasoconstriction
pulmonaire hypoxique liée
à
la
haute
altitude.
L’hypoxie freine la chaîne
d’oxydo-réduction
mitochondriale (Redox), ce
qui diminue la production
de superoxydes (ROS :
Reactive Oxygen Species) ;
ceux-ci n’activent plus
suffisamment les canaux
potassiques
Kv
qui
maintiennent la membrane
hyperpolarisée. De ce fait,
le Ca2+ entre en plus grande
quantité par les canaux
calciques L et accroît
l’activité de la musculature
lisse vasoconstrictrice.
Canal Ca
ΔV dépendant
Gq
G
q
Canal
KV
ΔVMembr
[Ca ]
2+
Phospholipase C
↓ ROS (H2O 2)
IP-3
↑
[Ca
[Ca
2+
]
]
++
RS
2+
[Ca ]
++
Redox
M
it
-3
[Ca ] 10
Troponine C
Contraction de la
musculature lisse
↓ PO2
alvéole
Actine - myosine
© Chassot 2012
Les autochtones qui vivent en altitude dans les Andes ou l'Himalaya (3’500-4'500 m) ont différents
mécanismes adaptatifs [151,234,324].
 Diminution de la vasoconstriction pulmonaire hypoxique et augmentation de la production
pulmonaire de NO• ; les Tibétains vivant à 4'000 m n’ont pratiquement pas d’HTAP.
 Remodelage de l’activité des canaux KV et Ca2+ L.
 Normalisation de la [Ca2+]i dans les cellules musculaires lisses à une pO2 intracellulaire basse.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
165
 Muscularisation réversible des artérioles pulmonaires (hypertrophie) et épaississement de
l’endothélium (hyperplasie); les RAP augmentent discrètement, mais le risque d’OAP
diminue; ce phénomène est plus marqué chez les mammifères (yacks, chèvres) que chez les
humains.
 Hypertrophie ventriculaire droite.
Outre le traitement de l’OAP, la thérapeutique consiste à augmenter la PaO2 (oxygène) et la pression
(caisson hyperbare, redescente de 500 à 1000 m). Les anti-phosphodiestérases-5 (sildenafil, tadalafil)
et les anti-endothéline-1 (bosentan) diminuent l’HTAP d’altitude de 25-30% ; les agents bétaadrénergiques améliorent la réabsorption du liquide alvéolaire [328,345]. La dexaméthasone agit
comme anti-inflammatoire et anti-œdémateux. Les anticalciques (nifédipine) peuvent être utiles chez
les répondeurs, mais ils ne sont que 15% de la population.
L’HTAP des congénitaux
Sa cause la plus fréquente est un shunt gauche - droit non restrictif. Elle survient dans 50% des cas de
communications interventriculaires (CIV) et de canal atrio-ventriculaire, où il y a surcharge de volume
et de pression, mais dans seulement 10% des communications interauriculaires (CIA), où il y a
surcharge de volume uniquement [64]. Elle apparaît dans l'enfance déjà lors de CIV, mais seulement à
l'âge adulte en cas de CIA [287]. Le stress pariétal vasculaire provoqué par le flux pulmonaire excessif
cause une extension de la musculature lisse dans des vaisseaux périphériques qui ne sont normalement
pas musculaires; à ce stade, la pression reste normale. L'hypertension progressive est associée à une
hypertrophie de la média des artères plus proximales, une restriction de la lumière et une artérite
nécrosante avec des lésions plexiformes [318]. Finalement, le nombre des vaisseaux distaux diminue
et la fibrose est massive ; l'HTAP est fixée et irréversible. C'est le syndrome d'Eisenmenger,
caractérisé par une PAPmoy > 50 mmHg et des résistances vasculaires pulmonaires > 800 dynes•cm•s5
. Le flux à travers le shunt gauche - droit est alors bidirectionnel ou renversé; c'est la principale
origine de l'apparition d'une cyanose chez les congénitaux adultes [82]. Une baisse de pression
systémique par hypovolémie ou par vasodilatation artérielle aggrave la composante droite - gauche du
shunt, donc la cyanose. La correction chirurgicale n'est plus possible lorsque la rapport RAP / RAS est
supérieur à 0.7. En présence d'HTAP, la survie des patients souffrant de cardiopathie congénitale est
meilleure que celle des patients souffrant d'HTAP primaire de l’adulte: elle est de 80% à 10 ans pour
les patients souffrant d’Eisenmenger, mais de 30% à 5 ans pour ceux souffrant de maladie thromboembolique [160,170]. La raison en est probablement le maintien des caractéristiques fétales du
myocarde droit, qui lui permettent d’assumer une postcharge élevée sur le long terme (voir Chapitre
15 Hypertension pulmonaire).
Ventilation et hypertension pulmonaire
Pour l’anesthésiste et l’intensiviste, ventiler les patients souffrant d’HTP est souvent un défi clinique.
La ventilation mécanique de ces malades est un compromis entre une hyperventilation active pour
baisser les RAP et le maintien d'une pression intrathoracique moyenne (Pit) basse pour éviter une
augmentation de postcharge droite. Si le volume courant est faible, on risque des atélectasies, une
hypercarbie, et une augmentation des RAP dans les petits vaisseaux péri-alvéolaires; s'il est élevé,
l'hyperinflation augmente la Pit et comprime les gros vaisseaux extra-alvéolaires par la distension des
alvéoles pulmonaires [120,173]. Le volume courant idéal correspond à celui de la capacité résiduelle
fonctionnelle (CRF) (Figure 5.92 page 121). Il faut jouer sur le volume courant, la fréquence et le
mode ventilatoire pour obtenir la PaCO2 et la Pit moy les plus basses possible. De ce point de vue, la
durée de l'inspirium augmente davantage la Pit moy que la valeur du pic inspiratoire de pression.
Toutefois, deux phénomènes importants viennent faciliter la tâche du clinicien.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
166

La compression des gros vaisseaux extra-alvéolaires, dans la partie droite du graphique de la
Figure 5.92, ne s’applique pas réellement au patient souffrant d’HTAP, parce que la paroi
épaissie et rigide de ses vaisseaux pulmonaires empêche toute compression par une ventilation
à haut volume courant. Il n’y a donc pas lieu de craindre une augmentation significative de la
PAP lors d’une hyperventilation mécanique.
 L'accroissement de postcharge pour le VD que représente l'IPPV est très faible par rapport à sa
postcharge habituelle: ajouter une Pit moy de 10 mmHg à une PAPmoy de 50 mmHg modifie
moins les conditions hémodynamiques que lorsque la PAPmoy est normale (20 mmHg). Le
risque de décompensation du VD est donc très faible lorsque les pressions ventilatoires restent
dans les limites habituelles [64].
De plus, l'IPPV offre la possibilité d'hyperventiler le patient et, ce faisant, de diminuer ses RAP par
alcalose respiratoire. Seule une dysfonction droite isolée sans élévation chronique de la pression
pulmomonaire présente un risque de décompensation majeure lors d’IPPV, mais non la situation d’une
HTP chronique accompagnée d’une hypertrophie ventriculaire droite [120]. La réaction
hémodynamique du patient à l'IPPV peut être testée en préopératoire en lui faisant réaliser une
manoeuvre de Valsalva une fois le cathéter artériel en place et en observant l'évolution de la pression
artérielle. Le plus souvent, les variations respiratoires sont atténuées et la pression moyenne (PAM) est
stabilisée à une valeur très légèrement inférieure (< 15%) à sa valeur en spontanée. Ceci laisse
présager une bonne tolérance à l’IPPV.
Hypertension artérielle pulmonaire (III)
Le pronostic de l'HTAP sévère (mortalité annuelle 15%) tient davantage à la fonction ventriculaire
droite qu'à la valeur de la pression pulmonaire.
Critères de risque périopératoire en cas d'HTAP:
- PAPmoy > 35 mmHg
- SaO2 < 90%
- Hb > 150 gm/L
- Dysfonction ventriculaire droite
Facteurs aggravants: hypoxie, hypercarbie, atélectasie, acidose, hypothermie, stress, douleur.
Impact clinique de l'HTAP:
- Débit pulmonaire fixe, hypoxémie à l'effort
- Maintien de la réactivité des petits vaisseaux (vasoconstriction pulmonaire hypoxique)
- HVD: débit droit dépendant de la précharge, intolérance à l'hypovolémie
- Risque ischémique du VD élevé en cas d'hypotension systémique
- Insuffisance diastolique du VG (effet Bernheim)
- Shunt D → G si foramen ovale perméable
Les RAP augmentent en cas d'hypoventilation (vasoconstriction pulmonaire hypoxique) et en cas de
ventilation à haut volume courant (VC) (distension et occlusion des vaisseaux par la distension
alvéolaire). Mais en cas d'HTAP avec HVD, trois éléments favorisent l'IPPV:
- La paroi épaisse et rigide des vaisseaux pulmonaires empêche leur compression à haut VC
- L'IPPV représente un faible accroissement de postcharge pour le VD en cas d'HVD
- L'hyperventilation permet une certaine vasodilatation artériolaire pulmonaire
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
167
Le monoxyde d'azote (NO•)
Le NO• est un transmetteur physiologique sécrété par les cellules endothéliales normales, qui induit
une myorelaxation vasculaire par activation du GMPc. Il fonctionne également comme transmetteur
cholinergique dans le système nerveux central et périphérique. Il inhibe modestement l'aggrégation
plaquettaire et, en dose excessive, devient un agent cytotoxique.
Biochimie
Le NO• est un radical libre issu de la transformation de la L-arginine en citrulline sous l'action de la
NO-synthétase (NOS). Cet enzyme est une flavoprotéine qui existe sous deux isoformes: l'une est
présente constitutivement dans l'endothélium des vaisseaux et dans le système nerveux central; elle est
dépendante du calcium; l'autre est induite dans les macrophages par les cytokines et les endotoxines et
participe aux systèmes de défense immunitaire de l'organisme, par exemple dans la sepsis [263]. Les
deux formes sont inhibées par les analogues de la L-arginine, tels la NG monométhyl L-arginine
(LNMMA). Les atomes d'oxygène du NO• et de la citrulline proviennent de l'O2; en son absence, la
NO-synthétase est inhibée. L'hypoxie désactive donc la vasodilatation dépendant du NO• et
potentialise les spasmes vasculaires [183].
De l'endothélium où il est sécrété, le NO• diffuse très librement vers le muscle lisse vasculaire où il
active un enzyme hémoprotéique, la guanylate-cyclase, ce qui entraîne la formation de guanosine
monophosphate cyclique (GMPc) à partir de GTP; par liaison à une protéine-kinase, cette dernière est
à l'origine de la myorelaxation: le Ca2+ libre baisse dans le myocyte vasculaire par extrusion de la
cellule ou recaptage par le réticulum sarcoplasmique [326]. Mais le NO• peut activer d'autres enzymes
protéiques que le GMPc et interférer ainsi avec de nombreux processus mitochondriaux et cellulaires;
ces phénomènes participent probablement à sa toxicité potentielle (peroxydation des lipides de la
membrane, altération du surfactant, apoptose). Le NO• est aussi présent dans l’endothélium des cavités
cardiaques, où sa production induit un effet inotrope négatif ; les cytokines comme le TNFα et l’IL-6,
par exemple, ont un effet inotrope négatif marqué par le biais d'une synthèse accrue de NO•
endocardique (104). Les anti-phsophodiestérases-5 comme le sildenafil (Viagra®) inhibent la
dégradation du GMPc et agissent comme le NO• ; ce sont de bons vasodilatateurs pulmonaires [176].
La demi-vie du NO• dans l'organisme, où il est à l'état gazeux, est très brève: 5-10 secondes [263]. De
plus, il réagit très activement avec nombre de substances, notamment l'oxygène et les métalloprotéines
à noyau hème. Ainsi, son affinité pour l'hémoglobine est 1’500 fois plus élevée que celle du CO; elle
conduit à une fixation rapide par cette dernière avec formation de nitrosyl-hémoglobine, qui est
oxydée en méthémoglobine; celle-ci n'est pas augmentée lors d'inspiration de NO• à moins de 80 ppm
(taux normal: jusqu'à 0.5%), et n'a pas dépassé 1.3% lors d'administration à long terme [337]. Le NO•
est donc inactivé de façon immédiate dès qu'il est solubilisé dans le sang, même à des concentrations
inhalées de 1’000 ppm: il est sans effet systémique lorsqu'il est administré par voie aérienne.
L'instabilité du NO• est à l'origine de sa toxicité: en présence d'O2 il s'oxyde rapidement en NO2 de
manière proportionnelle à la quantité de NO• en présence, à la FiO2 et au temps de contact entre les
deux. Le NO2 est un polluant produit par les combustions à haute température (moteur à essence,
cigarette, etc); il provoque des lésions pulmonaires graves (œdème pulmonaire), proportionnelles à sa
concentration et à sa durée d'exposition: activation des cytokines pro-inflammatoires, hyperplasie
alvéolaire, hypertrophie de l'épithlium bronchique [255]. Il est important de mesurer la concentration
de NO2 dans les gaz ventilés lors de l'administration clinique de NO•: elle doit rester inférieure à 1
ppm si la durée est prolongée, ou à 5 ppm pour des expositions brèves [127]. L'homme peut respirer
une moyenne de 25 ppm de NO• sans risque. Pour des périodes brèves, cette valeur peut monter à 80
ppm [326]. A titre d’exemple, un trafic automobile lourd produit 1.5 ppm, et la fumée de cigarette
jusqu’à 1'000 ppm. Par contre, le NO2 provoque des lésions pulmonaires dès une concentration de 2
ppm.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
168
Physiopathologie
La production locale de NO• maintient activement une vasodilatation dans les vaisseaux résistifs. Les
principaux stimuli physiologiques à sa formation sont le flux pulsatile et la pression d'étirement
exercée sur la paroi vasculaire [340]. Il faut que les cellules endothéliales soient normales et intactes:
sa synthèse est perturbée dans les lésions endothéliales extensives (athérosclérose, ischémie) ou lors
de manipulations agressives de l'endothélium (greffons vasculaires, endartériectomies). A une
augmentation du flux sanguin et du stress de paroi, l’endothélium normal répond pas une
vasodilatation liée au NO•, mais l’endothélium malade répond par une vasoconstriction due à une
sécrétion excessive d’endothéline. De manière analogue, des substances comme l'acétylcholine, la
bradykinine ou l'histamine, ont un effet dilatateur sur les vaisseaux normaux, mais vasoconstricteurs
en cas de lésions endothéliales. Des substances normalement vasodilatatrices ont une activité
vasoconstrictrice puissante dans les pneumopathie sévères, les transplantation pulmonaires, les
hypertensions pulmonaires chroniques ou après des CEC prolongées [100]. Au niveau des vaisseaux
coronariens, le tonus vasculaire de base est réglé par une sécrétion constante de NO• par l'endothélium.
L'hypoxie en augmente la production et provoque une dilatation puissante. Dans l'artériosclérose,
l'hypertension et le diabète, la production et/ou la réactivité coronarienne locale au NO• sont
perturbées.
Le NO• est produit en permanence dans la circulation pulmonaire, où il maintient une vasodilatation
active, particulièrement dans les vaisseaux résistifs périalvéolaires de petit diamètre. L'hypoxie inhibe
son activité et induit localement une vasoconstriction. A raison de 5 à 80 ppm dans les gaz inspirés, il
est possible de renverser une vasoconstriction pulmonaire non-fixée sans vasodilatation systémique.
Les résistances vasculaires pulmonaires baissent de 10 à 35% selon les séries; l'effet, directement
dépendant de la dose, s'installe en 1 à 3 minutes, mais disparaît rapidement à l'arrêt du NO• [148]. Par
contre, il n'est pas possible d'abaisser les RAP en-dessous de leur valeur de base chez un individu
normal. Les résultats expérimentaux chez l'animal démontrent l'extrême efficacité du NO• sur des
modèles de vasoconstriction pulmonaire hypoxique induite activement dans des poumons normaux
[127]. Cependant, la réactivité est loin d'être identique dans les situations cliniques où les vaisseaux
pulmonaires sont anormaux et où l'hypertension possède une composante fixée. L’avantage du NO•
sur les autres vasodilatateurs artériels est sa capacité à ne vasodilater que les zones ventilées, et à ne
pas interférer avec la vasoconstriction des zones non-ventilées ; ainsi la saturation artérielle ne baisse
pas [148]. Les vasodilatateurs pharmacologiques à effet pulmonaire sont des substances qui
provoquent une hypotension systémique importante, car aucun d'entre eux n'est un vasodilatateur
spécifique de l'arbre pulmonaire. Ils ont de plus la potentialité d'augmenter l'effet shunt par blocage de
la vasoconstriction pulmonaire hypoxique et d'aggraver les échanges gazeux (↓ PaO2), ce que ne font
ni l'hyperventilation ni le NO•. L’arrêt du NO• peut induire une poussée hypertensive pulmonaire par
effet rebond [177].
Le NO• a également une activité inhibitrice sur l’adhésivité plaquettaire, une activité bactéricide au
niveau des macrophages et des neutrophiles polynucléaires, et une activité myorelaxante au niveau des
bronches. L'inhalation de NO• diminue les résistances des voies aériennes et augmente la compliance
dynamique pulmonaire [198]; cette bronchodilatation, démontrée seulement chez l'animal et non chez
l'homme, débute dans la première minute de l'inhalation; elle est décelable pour des concentrations de
5 ppm déjà.
Les vasodilatateurs nitrés comme la nitroglycérine (NTG) subissent, au contact de l'endothélium, une
réduction enzymatique qui libère du NO• et provoque la myorelaxation. Les capacités réductrices des
vaisseaux étant variables, la réponse à la NTG sont hétérogènes. Les grandes veines, les vaisseaux de
capacitance et les vaisseaux coronariens de diamètre supérieur à 0.1 mm libèrent enzymatiquement le
NO•, alors que la microcirculation ne répond qu'au NO• direct ou aux substances qui le libèrent
spontanément, mais ne possède pas les enzymes pour l'extraire des dérivés nitrés, d'où son peu de
réponse à ces derniers [162].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
169
Le monoxyde d’azote (NO•)
Le NO• est un transmetteur physiologique sécrété par les cellules endothéliales normales, qui induit
une myorelaxation vasculaire. Il fonctionne également comme transmetteur cholinergique dans le
système nerveux central et périphérique. Sa demi-vie est de 5-10 secondes ; il est rapidement fixé par
l’hémoglobine (methémoglobine). En présence d'O2 il s'oxyde rapidement en NO2 toxique. Il inhibe
modestement l'aggrégation plaquettaire et, en dose excessive, devient un agent cytotoxique. Dosage :
10-20 ppm dans les gaz inspirés.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
170
Perfusion coronarienne et ischémie myocardique
Anatomie des coronaires
Les deux troncs coronariens émergent de l'aorte dans les sinus de Valsalva droit et gauche. La
coronaire gauche (tronc commun) se divise rapidement en artère circonflexe (CX) et interventriculaire
antérieure (IVA) (Figure 5.114, Figure 5.115 et Figure 5.116).
 La CX vascularise la paroi latérale du VG et l’OG, et le nœud du sinus dans 45% des cas.
 L'IVA vascularise la paroi antérieure et l’apex du VG, ainsi que la partie antérieure du septum
interventriculaire et une portion antérieure de la paroi libre du VD.
 L'artère coronaire droite (CD) vascularise l'OD, la majeure partie du VD, la paroi postérieure
du VG, le noeud atrio-ventriculaire d'Aschoff-Tavara (90% des cas), et le noeud du sinus
(55% des cas).
Tronc commun
Artère circonflexe
Branche
intermédiaire
Figure
5.114 :
Anatomie des artères
coronaires vue par la
face antérieure du
coeur.
Branches
diagonales
Branches
marginales
gauches
Artère
interventriculaire antérieure
Artère coronaire
droite
Artère marginale
droite
Artère interventriculaire
postérieure
© Chassot 2012
Le pilier antérieur bénéficie d'une vascularisation double par l'IVA et la CX, alors que le pilier
postérieur ne dépend que de la CD ; il est donc plus à risque en cas d’ischémie. Le système dominant
est celui qui alimente l'artère interventriculaire postérieure (IVP); chez l'homme, il s'agit le de la CD
dans 85% des cas. Les artères représentées sur les schémas sont les artères épicardiques de
conductance. Les branches intramyocardiques (diamètre: 20 – 250 mm) sont les vaisseaux de
résistance; ce sont des vaisseaux terminaux.
Le drainage veineux du VG s'effectue par le sinus coronaire, dont 95% du débit provient du VG; la
majeure partie du VD se draine dans l'OD par les veines cardiaques antérieures et dans la cavité
ventriculaire droite par les veines de Thébésius. Lorsqu’on procède à une cardioplégie rétrograde en
canulant le sinus coronaire, on peut donc aisément protéger le VG, mais non le VD dont la paroi
antérieure, la paroi inférieure et l’apex ne sont pas perfusables par cette voie.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
171
Figure 5.115 : Schéma de
l'arbre coronaire.
TC: tronc commun.
CD: artère coronaire droite.
IVA: artère interventriculaire
antérieure.
CX: artère circonflexe).
Marg D: marginale droite.
RVP:
rétroventriculaire
postérieure.
IVP:
interventriculaire
postérieure.
Marg G: marginales gauches.
TC
CX
CD
IVA
Intermédiaire
Marginale D
Diagonales
IVP
Marginales G
RVP
Figure 5.116 : Territoires
coronariens en vue court
axe transgastrique (TG), en
vues 2 cavités et 4 cavités
rétrocardiaques, et en vue
schématique. Cette dernière
est une projection circulaire de la vascularisation
des différents segments.
CD :
artère
coronaire
droite.
CX :
artère
circonflexe. IVA : artère
interventriculaire
antérieure. Les segments
13, 15 et 17 peuvent être
vascularisés par la CD
(interventriculaire
postérieure)
ou
l’IVA
(interventriculaire
antérieure). Le segment 14
peut être vascularisé par
l’IVA ou la CX, et le
segment 16 par la CX ou la
CD.
5
11
CD
4
10
16
6 12 13 17 15 9
CX
3
14
7
IVA
1
Vue court axe TG
8
2
Vue schématique
CD
CX
0°
90°
Ant
IVA
Post
Lat
Apex
© Chassot 2012
Vue 2 cavités
Vue 4 cavités
Le rapport entre le nombre des capillaires et celui des myocytes est de 1 :1 dans le cœur normal, mais
plus du tiers des capillaires n’est pas fonctionnel au repos et n’est recruté que lors d’épisodes d’effort
ou d’ischémie. Lors d’hypertrophie ventriculaire, la valeur effective de ce rapport diminue, car la
masse myocardique devient plus importante que le réseau capillaire correspondant, et le risque
ischémique augmente.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
172
Flux coronarien
Anatomie et physiologie
Au repos, le débit coronaire est de 220 à 250 mL/min (4-5% du DC). Le flux est maintenu constant
pour des PAM de 60 à 160 mmHg (régulation en 10-30 secondes). Il cesse dans les couches sousendocardiques lorsque la PAM est < 50 mmHg [168]. Avec un poids de 250-280 gm (0.6% du poids
du corps), le coeur reçoit en moyenne 75 mL/100gm/min de sang. L'arbre vasculaire coronarien
comporte trois types de vaisseaux [72].
 Vaisseaux proximaux épicardiques, dits de capacitance, sous régulation endothéliale et neurohumorale; ils sont le plus touchés par l'athérosclérose; ils participent pour moins de 10% à la
résistance vasculaire coronarienne; leur volume augmente de 25% pendant la systole.
 Vaisseaux pré-artériolaires de résistance (diamètre 100-500 µm); ils sont le principal élément
de contrôle neurogène et humoral du flux coronaire et représentent 25-35% de la résistance
vasculaire totale.
 Vaisseaux distaux artériolaires intramyocardiques (précapillaires de diamètre 20–100 µm), où
intervient plus de 50% de la perte de charge et qui sont sous régulation métabolique.
Les deux premières catégories sont innervées par le système nerveux sympathique et
parasympathique. Le flux est si bien apparié à la demande en O2 dans les vaisseaux résistifs distaux
que l'extraction d'O2 peut rester constante à 70% sur une vaste plage de pression de perfusion et de
demande métabolique différentes. Comme les vaisseaux sont maintenus vasoconstrictés au repos, leur
vasodilatation soudaine permet une augmentation rapide du flux sanguin. Lors d'un exercice
important, le flux peut tripler.
Pendant la systole, la puissante musculature du VG écrase le lit coronaire et y interrompt le flux; ce
phénomène, qui représente 10-25% des résistances vasculaires totales des coronaires, est d'autant plus
significatif que le réseau est plus dilaté [253]. La compression par la pression intraventriculaire est
surtout marquée sur le plexus sous-endocardique et sur les vaisseaux pénétrants transmuraux
verticaux, alors que le flux dans les vaisseaux parallèles aux fibres musculaires est momentanément
accéléré par le "massage" musculaire (Figure 5.117). Les vaisseaux sous-épicardiques ne sont pas
comprimés pendant la systole. Ainsi, le flux dans les troncs coronaires est biphasique au cours du
cycle cardiaque: il présente un pic systolique et un pic diastolique. En systole, le flux représente moins
de 20% du flux coronaire total dans les territoires gauches, alors qu'il compte pour 30 à 50% du flux
total dans le VD (voir Figure 5.107 page 149). La compression musculaire, beaucoup plus faible dans
la paroi du VD, est la principale cause de cet aspect du flux coronaire. Dans les zones akinétiques,
c'est exclusivement la pression intraventriculaire qui est responsable de la compression systolique
[103]. La vélocité maximale du flux coronarien survient en protodiastole; elle est diminuée lors de
dysfonction diastolique avec défaut de relaxation, comme c'est le cas lors d'ischémie ou d'hypertrophie
ventriculaire.
Alors que le flux est toujours antérograde pendant la diastole, on observe fréquemment une inversion
du flux dans les vaisseaux intramyocardiques et épicardiques pendant la systole; le sang est de ce fait
transloqué depuis le sous-endocarde vers les vaisseaux épicardiques qui agissent comme réservoir.
Normalement, le rapport du flux sous-endocardique au flux épicardique est de 1.25:1 pendant la
diastole. Lorsque le flux coronarien total est réduit de moitié par vasoconstriction, ce rapport tombe à
0.4 [105]. Le même phénomène survient lorsque le stress de paroi augmente (hypertension artérielle)
ou en cas d'hypertrophie ventriculaire concentrique (sténose aortique). Ainsi la région sousendocardique est la plus fragile, raison pour laquelle les mouvements électrocardiographiques de sousdécalage du segment ST sont si caractéristiques de l'ischémie. La région sous-endocardique est la zone
la plus sensible à l’ischémie pour plusieurs raisons.
 Sa perfusion est exclusivement diastolique ;
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
173
 Sa course de contraction radiaire et son degré de raccourcissement sont plus importants que
ceux des couches plus externes, ce qui augment sa mVO2 ;
 En cas d’augmentation de postcharge, elle est la région la plus comprimée en systole ;
 En cas d’augmentation de la précharge (Ptd élevée), elle est la région la plus comprimée en
diastole, ce qui réduit son DO2 ;
 En cas d’hypertrophie myocardique, la distance entre les vaisseaux épicardiques et le sousendocarde s’allonge et le DO2 distal diminue, alors que la mVO2 des myocytes hypertrophiés
augmente.
Artère
épicardique
Sousépicarde
Artère sousépicardique
Couche
musculaire
Artère
intramurales
Sousendocarde
Artère +
plexus sousendocardique
Diastole
Artère
épicardique
Couche
spiralée
Artère sousépicardique
Couche
musculaire
circulaire
Artère
intramurales
Couche
spiralée
Artère +
plexus sousendocardique
Systole
Figure 5.117 : Flux coronaire myocardique en diastole et en systole à travers les trois couches de la paroi
ventriculaire. En systole, les flux épicardique et sous-épicardique sont maintenus, voire augmentés par reflux du
sang comprimé en profondeur, alors que celui des artères intramurales, allongées et écrasées par la contraction
de la musculature circulaire, diminue presque complètement. Dans le sous-endocarde, région adossée à la masse
sanguine intracavitaire, la plus comprimée et la plus épaissie en systole, le flux est minime, voire nul en systole.
La pression de perfusion coronaire (PPC) est définie comme la différence entre la pression diastolique
aortique moyenne et la pression du sinus coronaire ou de la cavité ventriculaire gauche en télédiastole.
La mesure de la pression aortique n'étant pas accessible en clinique, on recourt à la mesure de la
pression artérielle moyenne (PAM) qui est la valeur la plus voisine de celle de la racine aortique
[293,339] ; la pression télédiastolique du VG est remplacée par celle de l'OG évaluée par la PAPO :
PPC = PAM – PAPO
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
174
La PPC physiologique est > 50 mmHg ; en dessous de cette valeur, l’ischémie survient. Comme sa
pression systolique est beaucoup plus basse que celle de l’aorte, le VD jouit d’une perfusion
coronarienne systolo-diastolique ; 40-50% de son flux coronarien total est systolique.
Trois phénomènes règlent le débit coronarien [101] :



L’autorégulation métabolique ;
Le contrôle neuro-humoral autonome (sympathique, parasympathique, catécholamines) ;
L'endothélium vasculaire : action vasodilatatrice (NO•) ou vasoconstrictrice (endothéline).
L'autorégulation métabolique
Bien que la pression de perfusion puisse subir de grandes variations (PAM de 40 à 130 mmHg),
l'autorégulation maintient un flux constant par un changement de résistance dans les artérioles, qui est
proportionnel aux modifications de pression (Figure 5.118). La régulation a lieu instantanément, et
revient à l'équilibre en 10-30 secondes [101]. Elle est plus importante dans les vaisseaux épicardiques
que dans la zone sous-endocardique, ce qui contribue à la fragilité de cette dernière. Le flux est ainsi
maintenu constant pour des pressions aortiques allant de 60 à 160 mmHg [42]. Le flux cesse dans les
couches profondes lorsque la pression est inférieure à 50 mmHg (Pfz ou pression à flux zéro) [168].
Les courbes d'autorégulation du VG et du VD sont analogues. L'autorégulation est sous contrôle
métabolique par plusieurs mécanismes (Tableau 5.2).
Flux coronarien
(ml/min)
D
500
A'
400
R
A
300
200
Pfz
50
100
150
Pression moyenne (mmHg)
Figure 5.118 : Variation du flux coronaire en fonction de la pression de perfusion. A: courbe d'autorégulation; le
flux est stable entre 60 et 160 mmHg de pression aortique. D: courbe à vasodilatation maximale; le flux est
pression-dépendant. R: réserve coronarienne; c'est la différence entre le flux autorégulé et le flux à
vasodilatation maximale pour une pression aortique donnée; chez un individu sain, la réserve coronarienne
représente un flux triple par rapport au flux de repos. A': courbe d'autorégulation déplacée vers le haut lors
d'anémie, d'hypertrophie ventriculaire ou d'effet inotrope positif; dans ce cas, la réserve coronarienne (en
traitillé) est diminuée. Pfz: pression à flux zéro [168].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
175
 L'adénosine joue un rôle vasodilatateur majeur; elle est libérée par les cellules lorsque la PO2
diminue en dessous des besoins métaboliques (hypoxie, ischémie, exercice) [243]; elle
provient de la consommation des phosphates à haute énergie (ATP). Elle est inactivée par une
désaminase; cette dernière est inhibée par le dipyridamole, qui provoque ainsi une
vasodilatation massive par accumulation d'adénosine locale.
 Le NO• est sécrété par l'endothélium sain lorsque les forces de cisaillement augmentent
(augmentation de pression et/ou flux). Si l'endothélium est endommagé, par exemple par
l'athéromatose, la production de NO• est diminuée alors que la sécrétion d'endothéline
vasoconstrictrice est augmentée.
 L'activation des canaux potassiques sous dépendance de l'ATP (canaux KATP) dans les cellules
musculaires vasculaires hyperpolarise ces dernières et provoque une vasodilatation en faisant
frein à l’entrée de Ca2+ dans le sarcoplasme; ces canaux sont normalement inhibés par l'ATP,
et activés par l'adénosine [113].
 La PO2 et la PCO2 locales ont une influence au sein de certaines limites [42]; l'hypoxie et
l'hypercarbie provoquent une dilatation; l'hyperoxie et l'hypocapnie entraînent une
vasoconstriction [16]; l'hypocapnie sévère conduit à une diminution du flux coronaire plus
importante que la diminution du débit cardiaque, ce qui occasionne un déséquilibre dans la
balance DO2/VO2 myocardique.
 L'augmentation de la concentration locale de lactate et de [H+] induit une vasodilatation.
 L'ischémie aiguë, avec son cortège d'effets métaboliques, est un puissant stimulant
vasodilatateur; elle provoque la libération d'adénosine et de NO•, et ouvre les canaux
potassiques (KATP).
 Lors d’une augmentation de la demande en O2 ou lors d’une ischémie, le contrôle métabolique
domine les autres régulations.
Tableau 5.2
Contrôle des résistances vasculaires coronariennes
Mécanisme
Vasoconstriction
Vasodilatation
Métabolisme local
↑pO2, ↓pCO2, ↓[H+]
↓pO2, ↑PCO2, ↑[H+],
lactate, adénosine
Autorégulation
↑pO2, ↓pCO2, ↓[H+]
↓pO2, ↑PCO2, ↑[H+],
lactate, adénosine
Facteurs endothéliaux
vasopressine
angiotensine II
endothéline (ET 1, 2, 3)
thromboxane
EDRF, NO
prostacycline
Compression extravasc.
↑ contractilité
↑ postcharge VG
↓ contractilité
↓ postcharge VG
Facteurs neuro-humoraux
↑ α-adrénergique
↑ tonus vagal
↑ β-adrénergique
La réserve coronarienne se définit comme la différence de flux qui existe entre l'état autorégulé et la
vasodilatation maximale (Figure 5.119). A vasodilatation maximale, le flux devient pression
dépendant et la courbe devient une droite. La pente de cette droite est diminuée par la coronaropathie,
par la tachycardie et par une augmentation de la contractilité ou de la pression télédiastolique du
ventricule gauche; dans ces conditions, la réserve coronarienne est abaissée. Lors d'anémie,
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
176
d'hypertrophie ventriculaire ou d'effet inotrope positif, la courbe d'autorégulation est déplacée vers le
haut; dans ce cas, la réserve coronarienne est également diminuée. Une augmentation du flux
coronaire au-delà du seuil d'autorégulation entraîne un effet inotrope positif [290].
La fraction de flux de réserve (FFR, fractional flow reserve) telle qu’on la calcule lors d’une
coronarographie, est le rapport entre le flux dans une artère sténotique et le flux dans la même artère
en l’absence de sténose. Sa valeur normale est 1 ; plus la sténose est serrée, plus le rapport diminue.
Un rapport de 0.75 signifie que le vaisseau sténosé ne fournit que le 75% du flux en périphérie. C’est
un index spécifique de la sévérité fonctionnelle des sténoses épicardiques. En cathétérisme, il est
beaucoup plus facile de mesurer la pression que le flux, raison pour laquelle on utilise le rapport entre
la pression aortique et la pression moyenne distale à la lésion (mesurée par le cathéter
intracoronarien) : Pdist / Pao [195]. Pour minimiser l’effet de la résistance artériolaire périphérique, on
produit une hyperémie maximale par administration de vasodilatateur (adénosine, papavérine) et l’on
enregistre la mesure au nadir de la Pdist. Un index < 0.8 est actuellement considéré comme un critère
d’ischémie active et une indication à la revascularisation.
Flux coronarien
(ml/min)
DP
DA
500
RP
400
RA
300
A
200
50
100
150
Pression moyenne (mmHg)
Figure 5.119 : Variation du flux coronaire en fonction de la pression de perfusion lors de vasodilatation
maximale. A: courbe d'autorégulation; le flux est stable entre 60 et 160 mmHg de pression aortique. DA: courbe
à vasodilatation physiologique maximale; le flux est pression-dépendant. RA: réserve coronarienne de
l'autorégulation. DP: courbe à vasodilatation pharmacologique maximale. RP: réserve coronarienne
supplémentaire due à la vasodilatation pharmacologique [101].
La régulation autonome
Le contrôle neuro-humoral (ganglion stellaire et chaîne sympathique D1-D4, nerf vague) concerne les
vaisseaux de grand et moyen diamètres [71].
 Les récepteurs α1 prédominent dans les vaisseaux épicardiques de capacitance, dont la
vasoconstriction tend à contrecarrer le reflux du à la compression systolique des vaisseaux
intramuraux et sous-endocardiques.
 Les récepteurs α2 sont présents surtout dans les vaisseaux de ≤ 1.0 mm et commandent une
vasodilatation par l’intermédiaire du NO•.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
177
 Les récepteurs β1 et β2 sont prépondérants dans les vaisseaux résistifs, où leur stimulation
provoque une vasodilatation.
 Certaines facteurs hormonaux sont vasoconstricteurs (endothéline, angiotensine II,
vasopressine, thromboxane), d’autres vasodilatateurs (prostaglandines I2).
Ainsi la vasoconstriction sympathique tamponne l'aspect biphasique du flux; elle préserve le flux sousendocardique et la vasodilatation distale β prévient une baisse importante de la PO2 tissulaire [259].
En cas de β-blocage, une stimulation sympathique se traduira seulement par son effet α, d'où un risque
de spasme coronarien; c'est la raison pour laquelle les β-bloqueurs sont contre-indiqués dans l'angor de
Prinzmetal. Par contre, ces mêmes β-bloqueurs ont la capacité d'augmenter la réserve coronarienne:
même si le flux au repos est abaissé, le flux à stimulation maximale est augmenté, ce qui est très
profitable en cas d'ischémie [26]. Le contrôle neuro-humoral est contre-balancé par l'autorégulation
métabolique : une stimulation sympathique conduit à une augmentation de la mVO2 , donc à une
vasodilatation locale intramyocardique; cet effet tamponne la vasoconstriction épicardique. La
bradycardie d'une stimulation vagale baisse la mVO2, donc conduit à une vasoconstriction locale
malgré la vasodilatation des artères épicardiques.
La réponse des vaisseaux coronariens artérioscléreux à une stimulation sympathique diffère souvent de
celle des vaisseaux sains, parce que l'endothélium est lésé par l'athéromatose et par les dépôts
lipidiques. La dysfonction endothéliale empêche l'autorégulation de contrebalancer l'effet α; la
réponse peut ainsi consister en une vasoconstriction (alors que des vaisseaux normaux se dilateraient),
par exemple lors d'exercice [277,431]. Enfin, les résistances vasculaires coronaires peuvent être
considérablement modifiées par la viscosité sanguine. Celle-ci est liée essentiellement au taux de
protéines et à l'hématocrite. L'hémoglobine permet le transport d'oxygène, mais la viscosité augmente
avec le nombre de globules rouges. Un taux d'Hb de 100 g/L (Ht = 32%) semble le compromis idéal
entre le transport d'O2 maximal et la viscosité la plus faible [282].
L’endothélium vasculaire
L'endothélium des coronaires, comme celui des autres vaisseaux, n'est pas qu'un simple revêtement
antithrombogène. Il réagit à des agents pharmacologiques (catécholamines, acétylcholine) et à des
stimuli mécaniques (pulsatilité du flux, forces de cisaillement); il sécrète une série de substances
vasoactives qui modifient la taille des vaisseaux et leur flux.
 Le monoxyde d'azote (NO•) est le principal agent vasodilatateur distal ; sa sécrétion est
stimulée par forces de cisaillement (flux, pulsatilité, pression), mais aussi par l'acétylcholine et
la sérotonine [59]; il stimule le GMPc, et provoque une vasodilatation et une baisse de
l'adhésivité plaquettaire; il freine la vasoconstriction lorsque le débit baisse [367].
 L'endothéline est un vasconstricteur puissant, dont la sécrétion est stimulée par la thrombine,
l'angiotensine II, l'adrénaline et la vasopressine [209,422]. Lors de pontages aorto-coronariens,
elle est augmentée après la CEC suite à l'ischémie et à la reperfusion [299]. Elle n’est
probablement pas impliquée dans la régulation du flux en situation normale.
Une dysfonction endothéliale apparaît tôt dans l'évolution de la maladie athéromateuse; elle modifie la
balance physiologique entre les effets du NO• et ceux de l’endothéline au profit d'une vasocontriction,
que la stimulation soit sympathique, parasympathique ou due à l’acidose locale [429]. Ainsi, des
stimuli qui entraînent normalement une vasodilatation (hypoxie, exercice et augmentation de la
demande en O2, par exemple) peuvent conduire à une vascoconstriciton coronarienne dans des
vaisseaux artériosclérotiques [353]. La dysfonction endothéliale pourrait être une origine de l'angor à
coronaires saines [268]. Associée au stress sympathique et à l'hypercoagulabilité, elle est un des trois
principaux éléments dans la genèse des évènements ischémiques périopératoires.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
178
Outre ces agents physiologiques, un certain nombre de substances pharmacologiques agissent sur la
régulation du flux coronarien [70] :





Les dérivés nitrés libèrent du NO• ; ils sont vasodilatateurs des vaisseaux de conductance et
des collatérales; ils décompriment les vaisseaux sous-endocardiques par baisse de la tension
de paroi en diastole (baisse de précharge) ;
Les antagonistes calciques dilatent les vaisseaux épicardiques et intramyocardiques ;
Le dipyridamole dilate les vaisseaux intramyocardiques ;
L'adénosine, la papavérine et l'acétylcholine augmentent le flux coronarien par vasodilatation ;
L'ergonovine (ergot de seigle) est un vasoconstricteur utilisé comme test pour l'angor de
Prinzmetal.
Hormis l'adénosine administrée directement dans les coronaires, toutes ces substances voient leur effet
vasodilatateur modifié par l'autorégulation locale (variations de la mVO2) ou par leur activité sur la
pression de perfusion systémique. Pour s'assurer qu'une substance soit un coronarodilatateur efficace,
il faut maintenir constantes la pression de perfusion systémique et la consommation d'oxygène du
myocarde [405].
Flux coronarien
Débit coronaire de base: 220 à 250 mL/min. Le flux est constant pour des PAM de 60 à 160 mmHg; il
cesse dans le sous-endocarde si PAM < 50 mmHg. La zone sous-endocardique est la plus à risque
d'ischémie. Calcul de la pression de perfusion coronarienne: PPC = PAM – PAPO.
Il existe 3 types de vaisseaux coronariens:
- Epicardiques (< 10% de la résistance totale), régulation endothéliale et neuro-humorale
- Pré-artériolaires (30% de la résistance), contrôle neuro-humoral
- Artériolaire (> 50% de la résistance), autorégulation locale
Le flux coronaire est sous triple régulation:
- Autorégulation métabolique prioritaire (vasodilatation par adénosine, NO•, acidose, hypoxie)
- Régulation neuro-humorale: récepteurs α vasoconstricteurs dans les vaisseaux épicardiques,
récepteurs β vasodilatateurs dans les artérioles de résistance
- Facteurs endothéliaux: NO• dilatateur, endothéline constrictrice; endothélium athéromateux:
prédominance de réponse vasoconstrictrice
La résistance dans les vaisseaux coronariens est sous le contrôle de: métabolisme local (prioritaire),
autorégulation, facteurs neuro-humoraux, facteurs endothéliaux, compression extravasculaire, facteurs
rhéologiques (viscosité, Ht idéal 35%).
Apport et demande d'O2
Le coeur consomme 8-10 mL O2/100gm/min au repos, soit le 11% de la consommation totale de
l'organisme. Le myocarde est dépendant du métabolisme aérobique, car ses réserves (O2 lié à la
myoglobine et O2 dissous) ne dépassent pas une trentaine de battements à 37°C [254] ; au-delà, le
métabolisme anaérobique s'installe. Le temps d'ischémie tolérable permettant d'assurer une
récupération fonctionnelle totale est de 3-5 minutes à 37°C; il augmente à 15 minutes à 28°C et à 45
minutes à 18°C [213]. L'extraction d'O2 au repos étant de 70%, toute augmentation de la demande (↑
mVO2) engage une augmentation du flux sanguin coronaire (↑ Qc d'où ↑ DO2); mVO2 et Qc sont donc
étroitement couplés et suivent une relation linéaire. En conséquence, la PO2 et la saturation du sinus
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
179
coronaire restent relativement constantes: respectivement 15-20 mmHg et 30% [317]. L'équilibre entre
l'apport et la demande en oxygène dépend de nombreux éléments (Figure 5.120). L'apport en oxygène
(DO2) est tributaire de plusieurs facteurs [316]:
 Le flux sanguin coronaire (Qc), qui dépend lui même de:
• La pression diastolique aortique, représentée par la PA moyenne (PAM) ;
• La pression télédiastolique du ventricule gauche (PtdVG représentée par la PAPO) ;
• La durée de la diastole (fréquence) ;
• Les résistances vasculaires coronariennes ;
• Le degré de collatéralisation ;
• La présence éventuelle de sténoses.
 Le transport d'oxygène défini par le contenu en oxygène du sang (CaO2):
CaO2 = ( [Hb] • Sat (%) • 1.34 ) + (0.003 • PaO2)
Autorégulation
Figure
5.120 ;
Représentation
schématique
des
facteurs
affectant
l'équilibre
entre
l'apport
et
la
demande
myocardique
en
oxygène. PAM aort:
pression
artérielle
moyenne de l'aorte
ascendante.
PTD:
pression
télédiastolique
du
VG.
Contrôle métabolique
et endothélial
Compression
extravasculaire
Contrôle
neurovégétatif
Résistances
vasculaires
Facteurs
humoraux
PAM aort
Durée de la
diastole
Flux sanguin
coronaire
PTD VG
Fréquence
Capacité de
transport d'O2
Contractilité
Tension de
paroi
DEMANDE
APPORT
O2
© Chassot 2012
La demande en oxygène (mVO2) est commandée par différentes données:

La fréquence cardiaque ; elle a trois effets qui font que la consommation d'énergie augmente
disproportionnellement avec sa valeur (Figure 5.121):
• Augmentation du travail cardiaque avec le nombre de battements / minute ;
• Raccourcissement géométrique de la diastole avec la tachycardie, donc diminution de
la durée de perfusion coronarienne (baisse de DO2) ;
2+
• Augmentation de la contractilité avec la tachycardie (accumulation de [Ca ] libre).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
180






La contractilité myocardique, qui augmente la mVO2.
La tension de paroi, réglée par la précharge et la postcharge ; selon la loi de Laplace, le stress
de paroi (σ) augmente linéairement avec la pression générée (P) et avec la dimension (r) du
ventricule, et diminue avec son épaisseur (h): σ = (P • r) / 2 h.
La tension de paroi systolique correspond à la postcharge (travail interne de pression);
doubler la pression double aussi la demande en O2.
La dimension télédiastolique du ventricule est liée à la précharge et à l’éventuelle
dilatation (travail externe à fournir ou volume systolique déplacé) ; doubler le volume
ventriculaire n’augmente le rayon que de 25% ; l’augmentation de précharge n’occasionne
qu’une modeste augmentation de la demande en O2.
Le travail externe à fournir.
Le métabolisme: métabolisme de base, l'énergie de contraction, la contractilité, la température.
% diastole
Figure 5.121 : Entre
50 et 90 battements /
minute, un faible
accroissement
de
fréquence a un effet
considérable sur le
raccourcissement de
la diastole, donc sur
la durée de la
perfusion diastolique
du ventricule.
80
70
60
50
40
30
30
50
70
90
110
130
150
Fréquence
La proportion de chacun de ces déterminants dans la consommation d'oxygène globale du myocarde
montre que le travail fourni pour l'éjection du volume systolique ne représente que 20-40% de la
mVO2 totale au repos, alors que le travail de pression en représente 40-50%; le métabolisme cellulaire
(flux ioniques, mouvements de Ca++) compte pour 20% de la mVO2 (Figure 5.49 page 63) [144]. Les
variations de charge sont plus dispendieuses que les variations de volume. Les besoins énergétiques ne
sont pas simplement corrélés au travail éjectionnel fourni tel qu'on l'estime cliniquement par
l'équation: PAM • Vol syst. Ils dépendent également de la tension de paroi, dont le seul maintien
consomme de l'O2. Selon la loi de Laplace, cette tension augmente avec la taille du ventricule; un
ventricule dilaté consomme donc davantage d'énergie pour fournir des prestations identiques, même
sans considérer le coût de l'éjection. La prise en charge du patient insuffisant coronaire consiste à rééquilibrer la balance DO2/VO2 en diminuant la demande et augmentant l'apport en oxygène. En
clinique, on a mis au point plusieurs index dans le but de quantifier le risque ischémique face à
certaines situations hémodynamiques. On peut citer par exemple.
 Le double produit de la fréquence cardiaque et de la pression systolique: f • PAsyst ; la
valeur normale est < 12’000; c'est un faible critère dans la mesure où il accorde la même
importance aux deux termes de l'équation, alors que l'augmentation de fréquence est beaucoup
plus onéreuse que celle de la pression.
 Le triple produit de la fréquence cardiaque, de la pression systolique et de la durée de la
systole; cet index est un peu meilleur.
 L'indice de Buckberg: rapport entre l'index pression-temps diastolique (IPDT) et l'index
pression–temps systolique (ITTS): IPDT / ITTS = 0.7 (Figure 5.122) [49].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
181
 Le rapport entre la pression artérielle moyenne (PAM) et la fréquence cardiaque (rapport de
Buffington): le coronarien est dans une situation dangereuse lorsque sa fréquence devient
supérieure à sa PAM; le rapport PAM / f doit donc rester > 1 [50].
Pression
Figure 5.122 : Indice de
Buckberg. C'est le rapport
entre la surface couverte par
la courbe de pression
ventriculaire
pendant
la
systole, et la surface comprise
entre la courbe de pression
aortique et la courbe de
pression ventriculaire pendant
la diastole.
Le rapport se calcule entre
l'index
pression-temps
diastolique (IPDT) et l'index
pression–temps systolique
(ITTS): IPDT / ITTS = 0.7
[49].
ITTS
IPDT
Temps
Jusqu'à un certain point, le couplage entre le débit coronarien et la consommation myocardique en
oxygène (Qc/mVO2) n'est pas modifié par une substance qui diminue le flux coronarien et
simultanément la consommation d'oxygène du myocarde, parce que l'autorégulation n'est pas altérée.
Un découplage survient lorsqu'un élément modifie isolément l'un des deux paramètres. Une
augmentation isolée du flux donne lieu à une perfusion luxuriante. Le risque est évidemment maximal
lors de diminution du flux sans modification de la mVO2.
Apport (DO2) et consommation d'O2 (mVO2) du myocarde
mVO2 au repos: 8-10 ml O2/100gm/min (11% de la VO2 totale pour 0.6% de la masse corporelle). Vu
l'extraction maximale d'O2 (70%), une ↑ de la mVO2 commande une ↑ du flux coronarien. Réserve en
métabolisme aérobique: 10-15 battements.
Le DO2 dépend de:
- Flux coronarien (PAM, PAPO, durée de la diastole, résistances, collatérales, sténoses)
- Contenu du sang en O2 (Hb, débit cardiaque, ventilation)
La mVO2 dépend de:
- Fréquence cardiaque
- Contractilité
- Tension de paroi systolique (travail interne de pression, 40-50% du travail total)
- Volume éjecté (travail externe, 30-40% du travail total)
- Dimension télédiastolique
- Métabolisme de base (échange ionique, activité électrique)
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
182
Règle pour la prise en charge du patient coronarien: ↑ DO2 et ↓ mVO2. De manière simplifiée, le
rapport PAM /f doit rester > 1 (rapport de Buffington). La tachycardie est doublement néfaste: elle
raccourcit la diastole (↓ DO2 ) et augmente les besoins (↑ mVO2).
Sténose coronarienne
La sténose coronarienne est le fait d'une plaque d'athérome à laquelle se surimpose parfois un spasme
musculaire. L'athéromatose elle-même est une réponse inflammatoire chronique à un dysfonctionnement endothélial, caractérisé par un taux excessif de protéine C-réactive, et à des stimuli
biochimiques comme le cholestérol LDL (Low-density lipoprotins), la fumée ou le diabète. La
dysfonction endothéliale est liée à une prédisposition génétique et au stress de paroi (hypertension
artérielle). Elle aboutit à l'infiltration, d’abord discrète puis massive, de la paroi vasculaire par des
cellules musculaires lisses et par des macrophages remplis de cholestérol à basse densité (foam cells).
Il se forme une capsule fibreuse plus ou moins résistante à la rupture, qui isole la lésion du flux
sanguin. La dysfonction de l’endothélium s’accompagne d’une perte de sa fonction anticoagulante et
vasodilatatrice, et d’une augmentation des déclencheurs de l'adhésivité locale des plaquettes (voir
Chapitre 08 Voie cellulaire) [43].
Sténose stable et plaque instable
Schématiquement, la sténose coronarienne est liée à l’existence de deux types de plaques (Figure
5.123) [131,132,214,229].

Plaque athéromateuse stable caractérisée par une partie centrale lipidique de faible dimension,
recouverte d'une couche fibro-musculaire épaisse, parfois calcifiée. Elle cause le plus souvent
des sténoses serrées (> 75%), bien visibles à l’angiographie, qui croissent de manière
progressive et qui limitent le flux sanguin dans tout un territoire.
 Plaque instable, de croissance discontinue et irrégulière, composée d'une partie centrale
massive de nature lipidique à haute teneur en cholestérol (LDL), où se mêlent des
macrophages et des facteurs tissulaires; cet amas est faiblement encapsulé par une couche
fibreuse fine (50-65 µm) qui présente des signes d’érosion et de cicatrisation. A
l’angiographie, cette plaque ne se manifeste que par une sténose modeste (≤ 50%) et nonlimitative du flux, car elle tend à bomber vers l’extérieur et non vers l’intérieur de l’artère
[228a]. Son risque est tributaire de son activité inflammatoire et de sa susceptibilité à la
rupture, mais non du degré de sténose qu’elle occasionne [61,133,169].
La fragile capsule fibreuse d’une plaque instable est tissée de collagène synthétisé par les cellules
musculaires lisses. Les macrophages, stimulés par les cellules T activées lors d’une réaction
inflammatoire, sécrètent des protéinases qui dégradent ce collagène. La rupture subséquente de la
capsule met à nu le matériel lipidique et les macrophages, qui entrent alors en contact avec le sang. La
violente réaction inflammatoire qui accompagne un infarctus ou une opération chirurgicale déstabilise
les plaques sur tout l’arbre coronarien, ce qui explique la fréquence des syndromes coronariens aigus
survenant à la suite de ces évènements et le rôle protecteur d’une revascularisation précoce [105a].
Lorsque la capsule est fissurée, le facteur tissulaire (FT) présent sur les macrophages et les cellules
musculaires lisses entre en contact avec le facteur VII circulant et déclenche la formation de thrombine
(voir Chapitre 8 Figure 8.3). D’autre part, le facteur von Willebrand, lui aussi mis à nu par la rupture,
immobilise et active les plaquettes en circulation (voir Chapitre 8 Figure 8.5) [228a]. L'adhésivité de
ces dernières est stimulée et conduit à une thrombose locale; celle-ci peut être spontanément lysée,
emboliser en périphérie, se recanaliser, ou occlure totalement le vaisseau. Le résultat est un syndrome
coronarien aigu ou un infarctus. Les plaquettes stimulées induisent la libération de substances
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
183
puissamment vasoconstrictrices (thromboxane A2, sérotonine, endothéline). Ces deux types de plaques
conduisent schématiquement à trois modalités de pathologies ischémiques (Figure 5.123) [229,244].
Athérome
intrapariétal
Plaque
stable
Plaque
instable
Sténose
> 70%
Sténose
< 60%
Ischémie :
DO2 insuffisant
si mVO 2 ↑
Rupture +
thrombus
Ischémie sur
obstruction
© Chassot 2012
Figure 5.123 : Evolutions possibles d'une plaque athéromateuse. La lésion stable est riche en zones calcifiées, en
fibre musculaire lisse et en collagène; elle est recouverte d'une capsule fibreuse résistante. La lésion instable a
perdu ses fibres conjonctives et musculaires lisses; elle est remplie de matériel lipidique et de macrophages, sa
fine capsule fibreuse est très inflammatoire. Sa rupture est potentialisée par les forces de cisaillement et le
syndrome inflammatoire. La rupture de la plaque met le matériel lipidique et les éléments cellulaires en contact
avec les facteurs de coagulation et les thrombocytes circulants. Un thrombus se forme. L'évolution peut se faire
vers l'occlusion totale du vaisseau et l'infarctus, ou vers une fibrinolyse et une cicatrisation. Le thrombus peut
secondairement se recanaliser. L'étendue de l'infarctus dépend du territoire perfusé par le vaisseau occlus, de son
degré de collatéralisation, de la demande en O2 du myocarde au moment de l'accident évolutif, et des facteurs
induisant la fibrinolyse et la recanalisation; l'état d'hypercoagulabilité périopératoire aggrave la situation.

La plaque stable est responsable d'épisodes d'angor itératifs, caractéristiques d’un déséquilibre
entre l’apport et la demande en O2 : tachycardie, hypertension, douleur, stress, exercice
(demand ischaemia). Elle se caractérise par des sténoses serrées (> 75%) à l’angiographie et
par des épreuves d’effort en général positives. Lorsqu'elle croît jusqu'à l'occlusion, cette
sténose donne lieu à un infarctus de type non-Q, accompagné de sous-décalage du segment
ST, correspondant à une lésion sous-endocardique. Il survient fréquemment chez des malades
âgés, diabétiques, insuffisants cardiaques, ou souffrant d'angor avec modifications du segment
ST et ancien infarctus à l'ECG [153]. Son étendue est inversement proportionnelle au degré de
collatéralisation. La meilleure prévention contre cet accident est le β-blocage. Un bas débit
(hypotension sévère), une viscosité élevée (déshydratation) et/ou une vasoconstriction locale
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
184
(endothéline) peuvent parfois causer une thrombose aiguë sur une plaque stable lorsque la
sténose est très serrée [133].
 La rupture de plaque instable est sans relation particulière avec une demande accrue en O2,
mais elle est responsable de la grande majorité des syndromes coronariens aigus [435]. Elle ne
produit que des sténoses modestes à l’angiographie (< 60%), et laisse les tests d’effort le plus
souvent silencieux [310]. Sa thrombose cause une occlusion du vaisseau (supply ischaemia) et
un infarctus transmural, accompagné de surélévation du segment ST et d'onde Q dans 75% des
cas [6]. Elle est responsable de la majorité des syndromes coronariens aigus et des morts
subites. L’infarctus survient dans des régions dépendant de vaisseaux peu sténosés à la
coronarographie [139] : 80% des lésions coronariennes en relation avec ce type d'infarctus ne
sont pas considérées comme significatives lors d'un examen préopératoire [75,86,108]. La
prévention est surtout liée aux antiplaquettaires et aux statines [66,67]. Ces dernières ont un
effet stabilisateur sur l’équilibre des plaques athéromateuses qui s’étend au-delà de leur
capacité à abaisser les lipides circulants [162a].
 La résorption du thrombus accumulé sur la plaque instable et la recanalisation spontanée de la
lumière vasculaire se manifestent par un épisode d’angor instable sans surélévation du
segment ST [30a,229]. Des épisodes répétitifs peuvent déformer progressivement la paroi
vasculaire jusqu’au moment où un thrombus devient occlusif et cause un infarctus.
Alors qu’elle est la cause de plus des deux tiers des syndromes coronariens aigus en clinique, la
rupture de plaque instable n’est à l’origine que de la moitié des infarctus postopératoires, où
l’ischémie par déséquilibre DO2/VO2 est plus fréquente [214]. Le sort lié à un thrombus dépend de la
durée et du degré d’occlusion de la coronaire. Dans un vaisseau terminal, une interruption du flux de
plus de 20 minutes entraîne la nécrose des tissus. Une reperméabilisation spontanée se manifeste par
un épisode d’angor momentané ; un thrombus non-occlusif peut rester asymptomatique ou engendrer
de l’angor instable sans surélévation du segment ST [229]. La balance entre thrombolyse et facteurs
procoagulants, la réaction inflammatoire systémique, les conditions de flux, la géométrie de la lésion,
l’éventuelle collatéralisation, et le degré de vasodilatation / vasoconstriction locale décident du destin
du myocarde distal à la lésion.
Le patient vulnérable
La vulnérabilité d’un patient à un accident cardiovasculaire aigu (ischémie, infarctus ou mort subite)
est basée sur quatre phénomènes : l’importance de la sténose coronarienne (sténose critique), le degré
d’instabilité des plaques athéromateuses, la susceptibilité du myocarde et les facteurs déséquilibrants
humoraux [278,279].

Une sténose stable critique est caractérisée par son haut degré d’obstruction au flux (> 90%),
sa localisation sur un gros tronc (tronc commun, IVA ou CX proximales), sa faible
collatéralisation et l’importance du territoire qu’elle vascularise.
 Une plaque instable est un phénomène dynamique dont l'évolution n'est pas prédictible [61].
De nombreux facteurs interviennent pour accroître le risque :
• Facteurs structurels : grande taille de la masse centrale lipidique, fragilité de la
capsule susceptible de se rupturer, nombre élevé de macrophages et pauvreté en
cellules musculaires lisses ;
• Facteurs mécaniques : le mince recouvrement endothélial est facilement endommagé
et rompu par les forces de cisaillement liées à une poussée hypertensive, à la
tachycardie, au spasme coronarien ou à un flux turbulent ;
• Facteurs humoraux : le syndrome inflammatoire, le diabète, la nicotine et
l'hypercholestérolémie déséquilibrent la masse lipidique ;
• Facteurs génétiques : certains malades développent des plaques fragiles alors que
d'autres résistent à l'apport de cholestérol ; certaines populations sont particulièrement
sensibles aux effets de la diète.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
185

Le myocarde module les effets de l’ischémie selon une série d’éléments :
• Susceptibilité aux arythmies malignes ;
• Etendue et l’emplacement du territoire concerné ;
• Degré de collatéralisation ;
• Degré de la stimulation sympathique
• Effet de préconditionnement par les épisodes déjà subis.
 La susceptibilité à la rupture et à la thrombose est liée à plusieurs éléments systémiques
véhiculés par le sang [28,169] :
• Anomalies coagulatoires ; les syndromes coronariens aigus sont associés à une
élévation du fibrinogène et des inhibiteurs du plasminogène ; la période opératoire est
caractérisée par une augmentation de l’adhésivité plaquettaire et une baisse de la
fibrinolyse ;
• Facteurs inflammatoires : de nombreux facteurs sériques prédisent le risque de
complications cardiovasculaires : interleukine-6, protéine C-réactive (CRP) ; le
syndrome inflammatoire systémique accompagnant la chirurgie est un élément de fort
déséquilibre pour les plaques instables [329] ;
•
Facteurs humoraux : taux élevé de catécholamines et de thromboxane A2
(vasoconstricteur libéré par les plaquettes activées), hyperviscosité ;
• Activation globale : on a démontré que les syndromes coronariens aigus sont
fréquemment associés à une activation générale de toutes les plaques coronariennes, et
à la rupture de nombreuses d’entre elles ; le plus souvent, une seule est l’objet d’une
thrombose massive qui provoque un infarctus [46,248].
Sténose coronarienne (I)
Il existe schématiquement 2 types de plaque athéromateuse dans l'arbre coronarien.
La plaque stable: partie lipidique enfouie dans du tissu cicatriciel, endothélium épaissi, calcifications.
- Sténose serrée (> 75%) ne permettant pas un DO2 suffisant si ↑ mVO2, angor d'effort
(demand ischaemia)
- Visible à l'angiographie, test d'effort le plus souvent positif
- Conduit à un infarctus non-Q avec sous-décalage ST
- Responsable de 50-60% des infarctus postopératoires (pic d'incidence: 3ème jour postop)
- Prophylaxie: ↑ DO2 , ↓ mVO2, β-bloqueurs
La plaque instable: accumulation lipidique avec macrophages et réaction inflammatoire, recouverte
d'une capsule mince et friable.
- Sténose peu serrée (< 60%), ne compromettant pas le DO2; angor rare
- Sténose non-significative à l'angiographie, test d'effort le plus souvent négatif
- Instabilité, rupture et thrombose du vaisseau (supply ischaemia)
- Conduit à un infarctus avec onde Q et sus-décalage ST (STEMI)
- Responsable de 40-50% des infarctus postopératoires (< 36 heures postop)
- Prophylaxie: antiplaquettaires, statines
La vulnérabilité à l'ischémie est déterminée par:
- Degré d'obstruction au flux d'une sténose stable serrée
- Degré d'instabilité d'une plaque inflammatoire instable
- Etendue et localisation du myocarde ischémié
- Facteurs humoraux (agrégabilité plaquettaire, syndrome inflammatoire, stress)
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
186
Dans la période postopératoire, la collusion du stress, des variations hémodynamiques, de la forte
demande en O2, de la thrombogénécité augmentée et du syndrome inflammatoire chirurgical sont un
cocktail particulièrement explosif pour des plaques instables. C’est la raison pour laquelle la
protection myocardique (β-bloqueur, antiplaquettaires, statines) doit être maximale chez les patients à
risque.
Effet hémodynamique d’une sténose
Une sténose devient hémodynamiquement significative au-delà de 70% de rétrécissement. En aval
d'une sténose, le lit vasculaire est dilaté pour maintenir le flux maximal. Une sténose est dite critique
lorsqu'elle induit la dilatation maximale possible dans le réseau distal; toute réduction supplémentaire
du diamètre entraîne une baisse du flux. Lorsque la réserve coronarienne est atteinte (sténose de >
85%), l'autorégulation est perdue et le flux devient dépendant de la pression (voir Figures 5.118 et
5.119 pages 169 et 171). Lorsque l'endothélium est lésé par l'athéromatose, l'hyper-cholestérolémie, le
diabète ou l'hypertension, la réserve coronarienne est perdue parce que l'autorégulation ne fonctionne
plus normalement et la réponse à une stimulation sympathique devient exagérée [277].
Au niveau d'une sténose, un fluide transforme une partie de son énergie potentielle en énergie
cinétique; il y a accélération mais perte de charge: la pression post-sténotique est plus basse que la
pression pré-sténotique. La chute de pression est directement proportionnelle à la longueur de la
sténose, mais varie inversément à la puissance 4 par rapport au diamètre de la lumière (loi de
Poiseuille). La relation entre le flux à travers une sténose et le gradient de pression engendré n'est pas
linéaire, mais croît exponentiellement (Figure 5.124) [202]. La résistance et la baisse de flux ne
deviennent significatifs qu'à partir de 70% de rétrécissement; en dessous de 50%, les variations sont
négligeables. Lorsqu'une sténose augmente de 80 à 90%, la résistance augmente trois fois. Les
sténoses modérées n'ont donc pas d'effet significatif sur le flux. Le gradient de pression varie avec le
carré de la vitesse du flux (loi de Bernoulli); l'effet d'une sténose augmente donc exponentiellement
avec le débit sanguin; il est plus marqué à l'effort qu'au repos. Mais le flux ne dépend pas que du
diamètre de la sténose. Il est encore tributaire de sa longueur, de sa géométrie, de son degré
d'excentricité, et de facteurs rhéologiques du sang comme l'hématocrite ou le taux de protéines
plasmatiques [168].
La fraction de réserve de flux est le rapport entre le flux dans une artère sténotique et le flux dans la
même artère en l’absence de sténose. Sa valeur normale est 1 ; plus la sténose est serrée, plus le
rapport diminue. Un rapport de 0.75 signifie que le vaisseau sténosé ne fournit que le 75% du flux en
périphérie. C’est un index spécifique des sténoses épicardiques. En coronarographie, il est beaucoup
plus facile de mesurer la pression que le flux, raison pour laquelle on utilise le rapport entre la pression
aortique et la pression moyenne distale à la lésion (mesurée par le cathéter intracoronarien) : Pdist /
Pao [195]. Pour minimiser l’effet de la résistance artériolaire périphérique, on produit une hyperémie
maximale par administration de vasodilatateur (adénosine, papavérine) et l’on enregistre la mesure au
nadir de la Pdist. Un index < 0.8 est bien corrélé à la positivité des tests d’effort ; cette valeur est
considérée comme un critère d’ischémie et une indication à la revascularisation.
Une sténose peut être dynamique: le vasospasme épicardique (angor de Prinzmetal) est l'exemple
typique de l'ischémie induite par une vasoconstriction active; il se traduit par une ischémie transmurale
avec élévation du segment ST. D'autre part, une sténose athéromateuse est rarement circulaire, et
comporte une partie musculaire résiduelle qui peut se spasmer suffisamment pour rendre la sténose
critique et occasionner une ischémie en aval. Ce spasme est dû à la libération locale de substances
vasoconstrictrices par les plaquettes adhérant à la sténose (sérotonine, thrombexane A2), et par le
déséquilibre de l'endothélium lésé qui présente une prédominance d'effets vasoconstricteurs
(endothéline, angiotensine II) [431]. La fumée du tabac favorise ce déséquilibre, donc le spasme
coronarien [380].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
187
Résistance
Gradient de pression
sur la sténose (ΔP)
90%
90%
80%
70%
50%
30%
80%
Sténose
70%
50%
30%
Flux (Q)
Figure 5.124 : Relation entre le flux et le gradient de pression à travers une sténose. Les courbes illustrent la
relation pour différents degrés de rétrécissement dans un vaisseau de 3 mm de diamètre. En cartouche, la courbe
démontre la variation de la résistance créée par la sténose en fonction du degré de rétrécissement de celle-ci. Les
courbes sont exponentielles; les variations sont négligeables en-dessous de 50%, faibles jusqu'à 70%, et ne
deviennent significatives qu'à 75% et au-delà. En effet, la résistance au fluide dans un tube est fonction de la
quatrième puissance de son rayon (loi de Poiseuille) [202].
Sténose coronarienne (II)
Une sténose est considérée comme significative à > 70% de rétrécissement de la lumière. Distalement
à la sténose, le réseau est vasodilaté et le flux pression-dépendant.
Le flux distal baisse exponentiellement avec le degré de sténose. Le gradient de pression augmente
avec le carré de la vélocité du flux; il est proportionnel à la puissance 4 du diamètre de la sténose.
L'effet d'une sténose dépend aussi de sa localisation, de sa longueur, de sa géométrie, du degré de
collatéralisation, du flux distal et de la micro-angiopathie.
Facteurs aggravants
L’effet clinique d’une sténose coronarienne dépend de plusieurs phénomènes :
 Localisation : ischémie du nœud atrio-ventriculaire (bloc complet), système gauche-dominant
ou droite-dominant ;
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
188
 Etendue de myocarde ischémié : les sténoses ostiales, les sténoses du tronc commun ou leurs
équivalents (IVA proximale, CX proximale) réduisent le flux d’une grande masse
myocardique dans des territoires dont la contribution à l’éjection systolique est majeure ;
 Degré de collatéralisation permettant de court-circuiter la lésion sténosante ;
 Lésions micro-angiopathiques diabétiques (épaississement de la membrane basale des
capillaires qui limite la diffusion de l’O2) ;
 Augmentation de la demande en O2 .
Collatérales et phénomène de "vol"
Les collatérales existent naturellement, mais sont de faible diamètre (< 40 mm) et sont normalement
fermées. Elles ne s'ouvrent que lorsque la pression baisse distalement à une sténose; elles ne prennent
de l'importance (diamètre jusqu'à > 500 mm) que lorsque leur croissance est stimulée par l'ischémie;
elles se développent alors de manière prédominante dans le sous-endocarde [74]. L'ischémie doit être
chronique pour que les collatérales soient performantes. Contrairement au chien, l'homme et le cochon
n'ont pas de collatéralisation significative en temps normal, ce qui rend une occlusion coronarienne
aiguë particulièrement dangereuse, car chaque branche artérielle qui plonge dans le myocarde forme
un réseau capillaire terminal [73]. Celles-ci se développent en trois phases, dès qu'une sténose dépasse
70% [300]:
 < 24 heures: agrandissement passif des canaux existants;
 1 jour à 3 semaines: prolifération cellulaire; le diamètre des vaisseaux augmente de 10 fois;
 3 semaines à 6 mois: maturation et épaississement; le diamètre peut atteindre 1 mm.
Le réseau collatéral peut se dilater en 5-10 minutes sous l'effet du NO• et de la prostacycline; il ne se
vasoconstricte que sous l'effet de la vasopressine, de l'endothéline ou de la sérotonine. Lorsqu'il est
pleinement développé, le réseau collatéral assure un débit un peu inférieur à la moitié de la réserve
coronarienne, mais ne permet pas un exercice maximal [304]. Certaines substances pharmacologiques
interfèrent également: les dérivés nitrés, les agents β-agonistes et les halogénés vasodilatateurs y
augmentent le flux. Les α-agonistes et les bloqueurs calciques sont sans effet car il n'y pas de
récepteurs α dans les collatérales [70]. Les β-bloqueurs peuvent antagoniser la vasodilatation des
collatérales, qui sont pourvues de récepteurs β1 et β2 [212]. Les substances antiproliférantes
contenues dans les stents actifs (sirolimus, paclitaxel, etc) inhibent la formation des collatérales [251].
Vu la prédominance de réponse dilatatrice et l’absence de vasoconstriction α, le flux est
essentiellement pression-dépendant dans les collatérales. Le traitement hypertenseur dans l’ischémie
aiguë a précisément pour but d’augmenter ce flux.
Une vasodilatation exogène présente le risque d'induire une situation de vol : il s'agit d'une
redistribution du flux vers des zones saines où la résistance baisse, à partir de zones ischémiées où le
flux ne peut pas augmenter parce que le territoire est déjà maximalement vasodilaté. Ce phénomène
survient dans certaines conditions anatomiques particulières (Figure 5.125):
 La pression de perfusion dans un territoire myocardique en aval d'une obstruction
coronarienne tronculaire totale dépend de la pression d'un réseau collatéral dont
l'autorégulation est préservée ; si ce réseau est issu d'un vaisseau lui-même sténosé à 50-70%,
le degré de vasodilatation supplémentaire nécessaire à induire le vol est faible ; cette situation
est présente dans 13% des cas angiographies [50] ;
 La pression systémique est basse (PAM abaissée de plus de 25%) ;
 La dépression myocardique (↓ mVO2) induite par l’agent est moins importante que la
vasodilatation coronarienne.
Le faible effet inotrope négatif et la tachycardie induite par l'isoflurane contribuent certainement à ce
découplage de l'apport et de la demande en O2, qui ne se manifeste qu'avec des agents dont la
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
189
cardiodépression est faible par rapport à la vasodilatation; ce phénomène peut se traduire par une
ischémie peropératoire [323]. Les patients qui souffrent d'une architecture coronaire propre au vol
semblent présenter davantage d'épisodes ischémiques préopératoires, mais ne sont pas affectés par le
phénomène dans la période périopératoire [225]. Toutefois, l'expérience a montré que l’usage de
l’isoflurane < 2 MAC n’augmentait pas l’incidence d’épisodes ischémiques peropératoires tant que la
pression de perfusion est maintenue.
Figure 5.125 :
Représentation
schématique du phénomène de vol.
A: situation normale. Le
territoire 1 est alimenté par
la collatérale horizontale
venant de 2; 1 est
vasodilaté en permanence,
puisque
derrière
une
obstruction à 100%.
B: administration d’un
vasodilatateur
artériel
comme l’isoflurane. Le
territoire 2, situé en aval
d’une sténose modérée,
réagit normalement aux
vasodilatateurs;
si
les
résistances baissent en 2 (R
↓), le flux baisse en 1, qui
est maximalement vasodilaté, car le sang coule
préférentiellement en 2 où
les résistances diminuent.
C’est le phénomène de vol.
A
B
100%
100%
50%
50%
R↓
1
2
1
2
© Chassot 2012
Collatérales et vol
Les collatérales ne s'ouvrent que sous l'effet de l'ischémie. Pleinement développées, elles
correspondent à la moitié de la réserve coronarienne normale. Le flux y est pression-dépendant car
elles sont dépourvues de récepteurs α.
Le vol coronarien est une redistribution du flux vers des zones saines où la résistance baisse, à partir
de zones ischémiées où le flux ne peut pas augmenter parce que le territoire est déjà maximalement
vasodilaté. Il survient lorsque:
- Un territoire en aval d'une occlusion est vascularisé par un territoire souffrant d'une sténose
modérée
- La PAM est abaissée de > 25%
- La baisse de mVO2 est moins importante que la vasodilatation
Le phénomène a été décrit avec l'isoflurane à > 2 MAC en cas d'hypotension systémique.
Ischémie myocardique et infarctus
Alors que l'hypoxie est un apport insuffisant d'oxygène sans diminution de la perfusion tissulaire,
l'ischémie se caractérise par une baisse de la perfusion entraînant un manque d'oxygène et de substrats
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
190
métaboliques, et une élimination incomplète des métabolites. Moins d'une minute après une occlusion
coronarienne, la tension de paroi systolique baisse; elle atteint le nadir à la cinquième minute. Dans les
2-3 premières minutes qui suivent une occlusion coronarienne, survient une série de modifications qui
se déroulent dans l’ordre chronologique suivant (Figure 5.126) (voir Chapitre 9, Tableau 9.1) [194].
 Baisse de la compliance ventriculaire (dysfonction diastolique par défaut de relaxation active
protodiastolique) ;
 Altération de la cinétique segmentaire (hypokinésie ou akinésie du territoire concerné) ; il faut
une diminution du flux de ≥ 60% pour induire une hypokinésie et de ≥ 80% pour provoquer
une akinésie ; une hypokinésie apparaît à l’échocardiographie dans le territoire concerné
lorsque > 20% de l’épaisseur de paroi est infarcie ; il faut un infarcissement de > 40% de
l’épaisseur pour provoquer une akinésie ;
 Dysfonction systolique et baisse de la tension de paroi en systole ;
 Modification du segment ST à l’ECG ;
 Baisse de la FE mesurée (si la zone ischémiée est > 15% de la masse ventriculaire) ;
 Apparition de l’angor clinique ;
 Une absence de flux sanguin durant > 20 minutes entraîne la nécrose.
La dysfonction segmentaire apparaît 1-2 minutes avant les signes électriques. La baisse de la tension
de paroi systolique atteint son nadir à la cinquième minute; la zone ischémiée présente un mouvement
paradoxal sous forme de raccourcissement et d’épaississement post-systoliques qui ne contribuent pas
à l’éjection de sang puisqu’ils ont lieu après la fermeture de la valve aortique. Les effets
hémodynamiques dépendent de la masse ventriculaire lésée : 25% entraînent une insuffisance
cardiaque et 40% un choc cardiogène [34].
Figure
5.126 :
Chronologie
des
évènements après une
interruption du flux
coronarien. La dysfonction
diastolique
survient
avant
la
dysfonction systolique.
Les anomalies de la
cinétique segmentaire
(ACS)
surviennent
après 20 à 60 secondes
et précèdent le décalage du segment ST de
30 sec à 2 min. L'angor
se manifeste moins
d'une minute après
l'occlu-sion
coronarienne. PTD: pression
télé-diastolique du VG.
FE: fraction d'éjection
[194].
Apport d'O 2
DO2/VO 2
normal
Infarctus
ISCHEMIE
Angor
FE ↓
ACS
Décalage
ST
PTD VG ↑
compliance ↓
Demande d'O2
L'insuffisance en apport d'oxygène (supply ischemia) provoque une insuffisance systolique et une
dépression myocardique sévère: les réserves en ATP ne dépassant pas 30 secondes, le métabolisme
devient anaérobique (glycolyse) et produit une accumulation de ions H+ et de phosphates inorganiques
(acidose intracellulaire); une fuite de potassium entraîne des modifications électriques membranaires
sous forme d’altérations du segment ST [155]. Le myocarde survit à une ischémie sévère par une
combinaison d'inhibition de la contraction (hibernation) et de glycolyse anaérobique [203]. Lors de la
récupération d'un épisode ischémique, la fonction systolique ne se rétablit pas immédiatement, mais
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
191
avec un certain délai allant jusqu'à 60 minutes. Ce phénomène, analogue à la sidération myocardique,
est probablement lié à un découplage de la glycolyse et de l'oxydation du glucose [34].
Une demande excessive en oxygène par rapport aux possibilités du flux coronaire (demand ischemia),
telle qu'on la rencontre dans la tachycardie et l'exercice, va en premier lieu effondrer la compliance et
créer une insuffisance à prédominance diastolique; le taux de Ca2+ cytoplasmique reste élevé et
empêche la relaxation diastolique normale en réalisant des ponts actine-myosine non réversibles
(tachycardie, insuffisance en ATP). De plus, l'arbre vasculaire non-occlus est vasodilaté: comme il
représente 10-15% de la masse du VG, il crée un effet érectile qui rigidifie la paroi ventriculaire.
Des épisodes récurrents d'ischémie peuvent altérer structurellement le myocarde: hypertrophie, fibrose
interstitielle, sclérose. La production endothéliale locale de NO• est très affaiblie en cas de sténose
coronarienne, alors que la sécrétion d'endothéline et d'angiotensine II est élevée; ces deux substances
ont des effets vasoconstricteurs mais aussi potentialisateurs de la fibrose interstitielle. L’angiotensine
II est un des agonistes principaux parmi les nombreux déterminants moléculaires de l’HVG, mais les
déclencheurs de croissance qui favorisent l’hypertrophie des cellules musculaires sont aussi des
facteurs qui activent les fibroblastes et, à partir d’un certain seuil, engendrent l’apoptose [164].
L'angor est causé par la libération d'adénosine [79]. L'angor stable est caractéristique d'une diminution
chronique du flux sanguin local par une sténose coronarienne, entraînant une souffrance ischémique
distale lorsque la demande en O2 augmente. Dans l'angor instable, une érosion ou une fissure dans une
plaque instable mettent le flux sanguin en contact avec les lipides et les macrophages de la plaque.
Ceci conduit à une vasoconstriction locale et à l'adhésion des thrombocytes, entraînant la formation
d'un thrombus qui peut devenir occlusif ou être spontanément lysé en 10 à 20 minutes [133].
Syndrome coronarien aigu
D’un point de vue physiopathologique, les mécanismes en jeu dans les syndromes coronariens aigus
(SCA) peuvent être répartis en trois catégories [79a].
 Athéromatose ± obstructive avec réaction inflammatoire systémique ; cette dernière est
accompagnée d’une flambée immunitaire et se caractérise par de multiples ruptures de
plaques, une activation des neutrophiles, des macrophages et des cellules T, une CRP élevée et
une libération locale de cytokines. Un thrombus obstrue la lumière.
 Athéromatose obstructive sans réaction inflammatoire ; des stresseurs physiques (stress
mécanique de la paroi artérielle) ou émotionnels déclenchent une réaction sympathique
majeure avec hypertension, vasoconstriction locale, activation plaquettaire et augmentation de
la mVO2. Les modifications physico-chimiques des plaques (température, pH, fumée, toxines)
peuvent conduire à une cristallisation massive de leur cholestérol et à leur éclatement.
 Athéromatose non-obstructive ; une vascoconstriction intense est présente dans les vaisseaux
épicardiques et dans la microcirculation, comme dans le syndrome de Takotsubo. La fonction
endothéliale est altérée et induit un vasospasme alors qu’elle devrait produire du NO en
réponse à la stimulation sympathique.
La rupture de plaque instable et l'adhésion des plaquettes sur la zone cruentée provoquent la formation
d'un thrombus plus ou moins occlusif qui est classiquement considéré comme le substrat
physiopathologique commun des syndromes coronariens aigus puisque qu’on le retrouve dans > 75%
des SCA, principalement sur des troncs proximaux ou des bifurcations [6,79a]. Mais de nombreuses
investigations ont montré la présence de thrombus sur des plaques fissurées sans pour autant que les
patients ne présentent de symptômes ischémiques. Il s’ensuit que l’origine du SCA est certainement
multifactorielle, résultant de la combinaison malheureuse d’un état inflammatoire, d’une
hypercoagulabilité, d’un pic dans l’effet de toxines (lipides, fumée, polluants) ou dans la réponse au
stress (catécholamines, hypertension), synchronisés avec le moment d’une rupture ou d’une fissure
dans une plaque instable située à un endroit critique du réseau coronarien [6]. La position du segment
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
192
ST à l'ECG occupe une place centrale dans la définition clinique du syndrome coronarien aigu (Figure
5.127). Il introduit une dichotomie fondamentale entre le sus-décalage et le sous-décalage ST [31].
 Sus-décalage du segment ST (ST-elevation myocardial infarction, STEMI),
 Sous-décalage ST (non-STEMI).
Figure 5.127 : La position
du segment ST à l'ECG
occupe une place centrale
dans la définition du
syndrome coronarien aigu.
L'élévation des troponines
et le décalage ST certifient
le diagnostic d'infarctus. La
majorité des patients avec
un
sus-décalage
ST
développe un infarctus
avec onde Q. Les patients
qui présentent un sousdécalage ST souffrent en
majorité d'angor instable;
certains développent un
infarctus (élévation des
troponines), en général de
type non-Q. La mortalité
(5.1%) est la même pour
des deux types d'infarctus
(d'après réf 6).
Syndrome coronarien aigu:
angor, choc cardiogène
ECG
Sus-décalage ST
25% des cas
Sous-décalage ST
75% des cas
Troponine ⇑
Infarctus avec
onde Q (75%)
Occlusion
coronaire totale
TTT: reperfusion
Infarctus sans
onde Q (35%)
TTT:
reperfusion
Angor instable
65% des cas
TTT médical
Un quart des patients souffrant de syndrome coronarien aigu présente une surélévation du segment ST;
la majorité d'entre eux développe un infarctus avec onde Q. Les trois autres quarts présentent un sousdécalage ST et souffrent en majorité d'angor instable; certains développent un infarctus (élévation des
troponines), en général de type non-Q (7). C'est l'élévation du taux d'enzymes cellulaires, actuellement
les troponines, qui certifie le diagnostic d'infarctus en cas de décalage du segment ST. Les patients qui
présentent une surélévation persistante du segment ST sont candidats à une technique de reperfusion
en urgence (thrombolyse ou angioplastie percutanée), alors que ceux qui ont une sous-dénivélation ST
doivent bénéficier d'un traitement médical anti-ischémique, suivi plus ou moins rapidement d'une
revascularisation selon les indications [6,33]. Des antiplaquettaires doivent faire partie du traitement
des deux catégories de malades.
Ischémie myocardique
L'ischémie est une souffrance tissulaire due à un déséquilibre entre l’apport (DO2) et la demande
(VO2) en oxygène:
- La baisse de DO2 peut être due à: vasospasme, sténose serrée, obstruction par thrombose,
hypotension, anémie, hypoxie (syndrome coronarien aigu)
- L'excès de VO2 est lié à: tachycardie, augmentation de tension de paroi et de contractilité,
stress, douleur (angor stable chronique)
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
193
L'ischémie entraîne en < 5 minutes les évènements suivants, par ordre chronologique:
- Dysfonction diastolique
- Altération de la cinétique segmentaire
- Dysfonction systolique
- Altérations ST (ECG)
- Angor (dû à la libération d'adénosine)
Une interruption totale du flux de > 20 minutes provoque la nécrose. Les effets hémodynamiques
dépendent de la masse ventriculaire lésée : 25% entraînent une insuffisance cardiaque et 40% un choc
cardiogène.
Le syndrome coronarien aigus est défini par la position du segment ST: sus-décalage (infarctus
STEMI) ou sous-décalage (infarctus non-STEMI). L’infarctus est défini par l’élévation des troponines.
L'infarctus
En l'absence de collatérales, une interruption de flux sanguin pendant 20 minutes entraîne la nécrose.
Le phénomène est accéléré si la mVO2 est élevée ou la pression artérielle basse. En revanche, le délai
est étendu à 2 - 6 heures si le réseau collatéral est bien développé. La nécrose débute habituellement
dans la zone sous-endocardique et sétend progressivement vers l'épicarde pour devenir transmurale en
4 à 6 heures. Dans la pratique clinique, cette évolution dans le temps est la base de la course contre la
montre pour reperméabiliser le vaisseau concerné dans les plus brefs délais après le début des
symptômes. On peut distinguer deux types d'infarctus selon la présence ou non d'une onde Q à l'ECG
(Tableau 5.3) et selon l'étiologie relevant d’une plaque stable ou d’une plaque instable (voir Sténose
coronarienne). Le passage d'une ischémie réversible à une situation irréversible comme l'infarctus se
fait par une série de phénomènes [290]:
 Chute de l'ATP en dessous d'un certain seuil et ouverture des canaux KATP avec fuite de
potassium à l'extérieur de la cellule;
 Inhibition de la pompe à sodium et entrée massive de sodium avec apparition d'oedème
cellulaire; le terme infarctus vient de la racine "farcir", parce que les cellules apparaissent
gonflées à l'histologie;
 Lésion des membranes;
 Accumulation de radicaux libres;
 Surcharge intracellulaire en Ca2+.
Lors d'un infarctus, la dysfonction systolique des segments ischémiés est caractérisée par une
hypokinésie, une akinésie ou une dyskinésie. Elle est partiellement compensée par une hypercinésie
des segments non touchés. D'autre part, la masse myocardique initialement hypo- ou akinétique au
moment de l'ischémie aiguë est plus importante que la masse qui va ultérieurement être infarcie, car
toute la zone bordante (pénombre) est hypofonctionnelle, alors qu'elle va potentiellement récupérer par
la suite. La fraction d'éjection mesurée à un moment proche de l'évènement aigu peut être ainsi très
inférieure à ce qu'elle sera après récupération. Il faut que plus de 15% de la masse du VG ait une
contraction anormale pour que la fraction d'éjection globale soit modifiée. Le degré d'augmentation du
volume télésystolique et la présence d'une dysfonction diastolique sont des bons prédicteurs de la
mortalité post-infarctus [417]. La gravité d’un infarctus dépend de plusieurs éléments.
 La localisation ; un infarctus antérieur ou latéral a de fortes conséquences hémodynamiques
parce que la contraction des parois antérieure et latérale contribue davantage au volume
systolique que celle de la paroi postérieure et du septum.
 Le type de lésion ; un infarctus transmural modifie la contractilité d’un ou de plusieurs
segments, alors qu’un infarctus sous-endocardique peut ne pas altérer significativement la
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
194





fonction systolique du VG. Il faut une lésion impliquant plus de 20% de l'épaisseur de la paroi
myocardique pour voir apparaître une altération de la cinétique segmentaire.
La dimension de la lésion ; plus il est étendu, plus un infarctus pénalise le débit cardiaque. Il
faut que plus de 15% de la masse du VG ait une contraction anormale pour que la fraction
d'éjection globale soit modifiée.
Le risque d’arythmies ; la présence de tachy-arythmies auriculaires ou ventriculaires (TV,
fibrillation) augmente la mortalité à court terme et aggrave le pronostic à long terme.
Le degré de collatéralisation ; les sténoses serrées entraînent une ischémie chronique (angor
d’effort) qui génère un recrutement de vaisseaux collatéraux, alors que la thrombose aiguë
d’une plaque instable (sténose < 60%) est une occlusion brutale de vaisseau non collatéralisé.
Le risque de complications ; la rupture pariétale et la CIV sont caractéristiques de lésions
touchant une artère terminale non collatéralisée.
L’insuffisance mitrale ; la survenue d’un IM majeure (degré III-IV) quadruple le risque
d’insuffisance congestive et double la mortalité.
Tableau 5.3
Différences entre infarctus avec et sans onde Q
Caractéristique
onde Q
non-Q
Prévalence
Infarctus préexistant
Artère occluse
Collatéralisation
Elevation du segment ST
Sous-décalage ST
Pics enzymatiques
Cinétique segmentaire
Ischémie résiduelle
Mécanisme
Lésion
ECG
60-70% des infarctus
rare
75-80% des cas
peu fréquente
80% des cas
rare
élevés
dysfonction segmentaire ++
peu fréquente
rupture de plaque instable
transmurale
sus-décalage ST
30-40% des infarctus
fréquent
10-20% des cas
fréquente
20% des cas
> 80% des cas
plus bas
pas de dysfonct segment
fréquente
sténose serrée
sous-endocarde
sous-décalage ST
Lors de la stabilisation et de la cicatrisation, le ventricule change de forme, de taille et d'épaisseur:
c'est le remodelage. L'amincissement de la zone infarcie entraîne une dyskinésie importante, qui réduit
d'autant le volume éjecté. La dilatation du VG désavantage le ventricule par rapport à la loi de Laplace
et augmente le risque d'arythmies. Les modifications géométriques des piliers peuvent donner
naissance à une insuffisance mitrale.
Dans la pratique cardiologique, les deux tiers des infarctus sont liés à des ruptures de plaque instable
et à des occlusions coronariennes aiguës (supply ischaemia). Dans la période postopératoire, au
contraire, le 50-60% des infarctus a pour étiologie une demande en O2 excessive par rapport au
transport limité par des sténoses serrées (déséquilibre DO2/mVO2, demand ischaemia) [214]. En
clinique, la définition universelle de l’infarctus repose sur les deux points suivants [390c].
 Elévation des marqueurs biochimiques (préférentiellement troponine), dont au moins une
valeur est au-delà du 99ème percentile de la limite de référence supérieure.
 Association à au moins un des éléments suivants :
• Symptomatologie d’angor : douleur rétrosternale constrictive durant 20-30 minutes ;
douleur épigastrique de même type ; irradiation dans la mâchoire, l’épaule et le bras
gauche.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
195
•
•
•
•
Modifications ECG : sus-décalage > 1 mm (0.1 mV) ou sous-décalage > 1-2 mm du
segment ST ; apparition d’un bloc de branche gauche.
Développement d’ondes Q.
Nouvelles anomalies de la contraction segmentaire.
Présence de thrombus intracoronarien ou de thrombose de stent (PCI ou autopsie).
Infarctus myocardique
L’infarctus est une nécrose tissulaire qui survient après 20 minutes d’occlusion coronarienne totale. En
présence de collatérales, ce délai est repoussé à 4-6 heures. Le phénomène est accéléré si la mVO2 est
élevée ou la PA systémique basse.
Les altérations de la cinétique segmentaire sont fonction de l’épaisseur de paroi touchée : ≥ 20%
provoque une hypokinésie et ≥ 40% une akinésie. La FE baisse si ≥ 15% de la masse du VG est
infarcie. En phase aiguë, la zone bordante (pénombre) élargit la taille de l’hypo/akinésie mais est
potentiellement récupérable.
On distingue 2 types d'infarctus selon la présence ou non d'une onde Q à l'ECG et selon l'étiologie
relevant d’une plaque stable (déséquilibre DO2/mVO2) ou d’une plaque instable (thrombose).
- En clinique cardiologique: 2/3 des infarctus sont dus à une rupture de plaque instable
(sus-décalage ST > 1 mm, infarctus STEMI, présence d’onde Q)
- En postopératoire: 50-60% sont dus à un déséquilibre DO2/mVO2 (sous-décalage ST > 2
mm, infarctus non-STEMI)
Hibernation et lésions de reperfusion
Quatre phénomènes particuliers sont liés à l'ischémie et à la reperfusion myocardiques: l'hibernation,
la sidération, la non-reperfusion et le préconditionnement.
Hibernation
Entre l'ischémie aiguë sans traduction hémodynamique et la nécrose tissulaire de l'infarctus, il existe
tout un éventail dans l'intensité et la durée de la dysfonction ventriculaire. Le myocarde hibernant est
du tissu viable mais ischémié de manière continue et chronique, qui présente une dysfonction
contractile grave et prolongée, sans signes de nécrose, pouvant s'étendre à tout le ventricule [8,319].
Cette situation, liée à une hypoperfusion, est un mode d'auto-préservation rapidement réversible en cas
de reperfusion (Figure 5.128A) [36]. Le bas débit coronaire suffit à maintenir la viabilité métabolique,
mais non la contractilité; le taux d'ATP est normal mais la densité des récepteurs β est diminuée [360].
La fonction peut être stimulée par des agents ionotropes, mais cette stimulation est potentiellement
délétère, car l'hibernation est une forme d'autoprotection myocardique [109]. Une revascularisation
myocardique peut restaurer la fonction en l’espace de quelques heures à quelques jours [157]. Malgré
la mauvaise fonction préopératoire, le pronostic est excellent si la viabilité du myocarde a pu être
démontrée par les tests préopératoires (échocardiographie de stress à la dobutamine, IRM avec
contraste, etc) [122].
L'examen échographique d'un coeur souffrant d'un infarctus frais laisse voir une zone dysfonctionnelle
plus étendue que ne le sera la lésion cicatricielle ultérieure. C'est la zone bordante ou pénombre : la
périphérie de la région ischémiée souffre d'une hypocontractilité associée à l'hypoperfusion. Ce
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
196
phénomène est réversible lors du rétablissement de la perfusion, alors que la partie centrale nécrosée
ne peut plus récupérer.
Valeur normale (%)
Figure
5.128 :
Hibernation
et
sidération.
A: hibernation; la
fonction
segmentaire suit la
même évolution
que la perfusion
régionale.
B : sidération ; la
fonction,
effondrée durant
la
période
ischémique,
ne
remonte
que
lentement après le
rétablissement de
la perfusion.
100
A
Temps
Reperfusion
Ischémie progressive
Fonction segmentaire
Valeur normale (%)
Flux régional
100
B
Ischémie
Reperfusion
Temps
© Chassot 2010
Lésions de reperfusion
La reperfusion d’un tissu myocardique ischémié génère des lésions supplémentaires qui s’ajoutent à
celles induites par l’interruption circulatoire, et met en route une cascade de phénomènes pouvant
aboutir à des lésions cellulaires irréversibles [18a,124,425a].
 Alors que la cellule ischémique s’était placée sur un mode de survie en anaérobiose, la
reperfusion amène soudain un excès d’oxygène aux mitochondries. Il s’ensuit une libération
importante de ROS (Reactive oxygen species, radicaux libres) dans le cytoplasme cellulaire et
une réduction massive de la production de NO. Les ROS attaquent les phospholipides
membranaires et le DNA ; ils activent les enzymes cytolytiques (caspases).
 L’expulsion des ions H+ accumulés pendant l’ischémie provoque une entrée de Na par les
pompes Na+/H+, ce qui induit une œdème cellulaire.
 L’augmentation brusque du Ca2+ intracellulaire engendre une hypercontracture des myocytes
qui peut aller jusqu’au stone heart. Elle est liée à trois phénomènes.
• L’excès d’ions Na+ active l’échangeur Na+/Ca2+, ce qui cause une augmentation de la
concentration en Ca2+.
• L’activation des canaux Ca2+- L laisse entrer du calcium dans la cellule.
• La déficience en SERCA cause un dysfonctionnement du réticulum sarcoplasmique
avec libération excessive de Ca2+ (voir Figure 5.3 page 7).
 L’ouverture des canaux mitochondriaux MPTP (mitochondrial permeability transition pore)
laisse fuir dans le cytoplasme des agents oxydants et découple la phosphorylation oxydative
source d’ATP (voir Figure 5.7 page 13).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
197
 L’activation des neutrophiles déclenche une cascade inflammatoire locale et une libération
accrue de ROS.
 La vasodilatation massive de la zone ischémiée, qui abolit l’autorégulation, est responsable
d’une flux sanguin excessif malgré une pression de perfusion normale, et d’un risque
d’œdème et/ou de surpression à l’intérieur de l’organe au moment de la reperfusion.
Bien que certaines substances utilisées dans des préparations animales (nicorandil, cyclosporine A,
magnésium, méthylprednisolone, atorvastatine, anticalciques, etc) puissent atténuer les lésions de
reperfusion, aucune étude clinique n’a mis en évidence un effet cardioprotecteur significatif [425a].
Sidération (Stunning)
Ce phénomène consiste en une persistance de la dysfonction myocardique après revascularisation,
alors que l'angor, le segment ST et la perfusion ont récupéré. Malgré le rétablissement de la perfusion
coronarienne, la récupération n’est pas immédiate comme dans l'hibernation, et la fonction
myocardique reste altérée pendant une période allant de quelques heures à plusieurs jours (Figure
5.128B) [31] ; la récupération peut parfois prendre plusieurs semaines. Cette lésion fonctionnelle
survient à des degrés divers après angioplastie ou après pontage aorto-coronarien. Le myocarde lésé
est caractérisé par des lésions ultrastructurales et électrophysiologiques sans nécrose, et par une perte
de l'autorégulation coronarienne qui y rend le flux pression-dépendant. Il est "intoxiqué" par des
radicaux libres (peroxydes) et par une augmentation du Ca2+ sarcoplasmique [122,429]. Bien que les
réserves en ATP soient conservées, le couplage excitation-contraction est défaillant. La dysfonction
est systolique et diastolique. Le myocarde sidéré est bien stimulable par des agents
catécholaminergiques.
Non-reperfusion (No-reflow)
Malgré la restauration d’un flux épicardique normal, le flux intramyocardique reste souvent
compromis ou absent : c’est le phénomène du No-reflow, qui augmente la taille de l’infarctus, la
mortalité et les complications (arythmies, insuffisance ventriculaire). On estime que la reperfusion
n’est totalement rétablie que dans 35% des cas d’angioplastie ou de revascularisation chirurgicale
[283]. Les causes de la non-reperfusion sont multiples et probablement liées à une dysfonction
endothéliale [18a], mais les possibilités thérapeutiques sont très limitées [313].
 Embolisation distale d’athéromes, de thrombus et d’amas plaquettaires ; de nouveaux
cathéters permettent d’aspirer les débris.
 Lésions ischémiques ; possibilités thérapeutiques : diminuer le délai de revascularisation, βbloqueurs, IEC, bloqueurs de l’angiotensine II.
 Lésions de reperfusion ; possibilités thérapeutiques : anti-plaquettaire anti-GP IIb/IIIa
(abciximab), anti-endothéline E1 (bosentan), anti-thrombexane A2 (aspirine), postconditionnement (nicorandil, adénosine, cyclosporine).
 Conditions métaboliques : hyperglycémie, hypercholestérolémie ; traitement : insuline,
statines.
Les arythmies
Les déséquilibres électro-chimiques liés à la reperfusion peuvent entraîner le dysfonctionnement
électrique de certaines cellules et occasionner des arythmies ventriculaires malignes réfractaires aux
thérapeutiques habituelles. Toutefois, ces arythmies sont en général réversibles si l’on parvient à
maintenir la perfusion myocardique pendant quelques heures. Leur prise en charge demande beaucoup
de persévérance : certains patients sont sortis de l’hôpital en rythme sinusal après avoir été défibrillés
une cinquantaine de fois pendant les premières heures post-CEC.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
198
Ischémie et reperfusion
Hibernation: forme d'autoprotection dans laquelle le myocarde ischémié devient hypocontractile pour
adapter sa mVO2 au faible DO2. L'étendue est variable, mais il n'y a pas de nécrose. La fonction de ce
myocarde est stimulable par des catécholamines; elle est récupérable en cas de revascularisation (en
quelques heures à quelques jours).
Lésions de reperfusion: l’apport massif d’O2 libère des superoxydes et des radicaux libres toxiques
pour la cellule et s’accompagne d’une hypercalcémie sarcoplasmique. Bien que la pression soit
normale, le flux sanguin est excessif par rapport à la vasodilatation maximale des zones ischémiées.
Des arythmies ventriculaires malignes sont fréquentes, mais potentiellement réversibles.
Sidération: persistance de la dysfonction myocardique après revascularisation alors que la perfusion
est récupérée; la durée est de quelques heures à plusieurs jours; la fonction est stimulable par des
catécholamines.
Non-reperfusion: absence de flux distal intra-myocardique alors que le flux épicardique est rétabli.
Préconditionnement
Le phénomène de préconditionnement a laissé entrevoir de nouvelles perspectives pour protéger le
myocarde contre l'ischémie, mais ces promesses n’ont pas toujours été tenues. Le préconditionnement
consiste en une amélioration de la tolérance à l'ischémie par de brefs épisodes d'occlusion du flux
(entre 1 et 5 minutes) suivis de périodes de reperfusion (de 1 à 30 minutes) ; la durée de la protection
pour une ischémie ultérieure est de 1 à 2 heures [221,276]. Expérimentalement, cette technique permet
de réduire la taille de l'infarctus de 50-80%. Il existe plusieurs formes de préconditionnement.
 Préconditionnement ischémique par occlusion itérative de la coronaire (par exemple par le
ballon d’angioplastie).
 Préconditionnement pharmacologique : il s’est avéré que certaines substances comme les gaz
halogénés, le nicorandil ou la cyclosporine A ont des effets protecteurs similaires lorsqu’elles
sont administrées avant l’épisode ischémique.
 Postconditionnement : les occlusions itératives ou les halogénés sont également efficaces
lorsqu’ils sont administrés après l’épisode ischémique, pendant la période de reperfusion.
 Préconditionnement à distance : l’occlusion artérielle itérative d’un membre par une
manchette à pression induit une protection contre l’ischémie ultérieure d’autres organes.
Aspects physiopathologiques
De multiples études expérimentales menées chez de nombreuses espèces de mammifères ont démontré
une meilleure récupération fonctionnelle après une période d’ischémie ou une diminution de la taille
de l’infarctus après ligature coronaire, lorsque l’ischémie est précédée de clampages itératifs de courte
durée ou lorsque les animaux testés sont endormis sous halogénés [60,294a,429]. L’halothane,
l’isoflurane, le desflurane et le sevoflurane ont tous un effet maximal s'ils sont administrés avant la
période d'ischémie et pendant la reperfusion immédiate du myocarde [92]. Cet effet protecteur a été
décrit avec quatre catégories d’agents anesthésiques : les halogénés, les opiacés, le xénon et l’hélium
[95,124,386].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
199
Le préconditionnement par les halogénés est lié à plusieurs mécanismes cellulaires partiellement
élucidés, mais qui convergent vers deux phénomènes principaux (Figure 5.129) [92,124,196,
314,426,427] :

L’ouverture des canaux potassiques dépendants de l’ATP (KATP) situés sur les membranes des
mitochondries et de la cellule ; cette ouverture déclenche un courant potassique
repolarisant vers l’intérieur de la cellule ; celui-ci conduit à une diminution de la charge en
calcium ionisé (Ca2+) du cytoplasme cellulaire et du cytosol des mitochondries (d’où
préservation du fonctionnement mitochondrial).
 La fermeture des canaux de perméabilité mitochondriaux (MPTP : mitochondrial permeability
transition pore) ; ceux-ci relâchent des radicaux libres toxiques (ROS : reactive oxygen
species) au sein de la cellule lors de l’ischémie et de la reperfusion ; les ROS provoquent une
peroxydation des lipides et des lipoprotéines. L’ouverture des canaux MPTP modifie
également le fonctionnement mitochondrial (effacement des cristae, déplétion en ATP).
Agents volatils
halogénés
Canaux KATP
Récepteur
Protéine Gi
Gi
K
+
s
Protéine-kinase C
Agents volatils
halogénés
ROS
KATP
Transcription
de gènes
Canal
MPTP
Synthèse
protéique
Mitochondrie
Ca
Noyau cellulaire
++
Phase précoce
Phase tardive
© Chassot 2012
Figure 5.129 : Mécanismes possibles du préconditionnement ischémique par les agents volatils halogénés. Une
substance déclenche une cascade de transductions intracellulaires qui aboutit à un effecteur qui assure une
protection contre les effets de l'ischémie. Les canaux potassiques (KATP) sont fréquemment évoqués pour ce rôle.
Les halogénés agiraient par modulation de la protéine G, par stimulation de la protéine-kinase C, par action
directe sur les canaux K ATP, et/ou par production de ROS (substrats réactifs à l'oxygène: anions superoxyde tels
H2O2, H-, O2-, peroxynitrite) par les mitochondries, qui activent les canaux KATP (d'après réf 80 et 309). Produits
en petites quantités, les ROS sont cardioprotecteurs, mais sont toxiques en forte concentration. C'est la phase
précoce du préconditionnement dont la durée est limitée à 1-2 heures. Une phase tardive liée à la transcription
dans les gènes du noyau cellulaire de la synthèse de protéines cardioprotectrices a lieu à 24 heures [94].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
200
La protection contre les effets de l'ischémie est attribuée à l'effet de sommation de la baisse du Ca2+
mitochondrial, de la régulation des ROS, de la préservation de la fonction mitochondriale, de la
conservation des réserves énergétiques et de l'interférence avec les mécanisme apoptotiques. Ces
phénomènes correspondent à la phase précoce de la cardioprotection, dont la durée est limitée à 1-2
heures. Il existe une deuxième phase, tardive, qui survient à 24 heures et dure jusqu'à 3 jours; elle offre
moins de protection, et dépend d'un effet sur la transcription des gènes au niveau du noyau cellulaire,
qui induit la synthèse de protéines à capacité cytoprotectrice ayant la propriété de moduler l'activation
de l'apoptose [94].
Le post-conditionnement, qui permet également d'améliorer la tolérance myocardique à l’ischémie, est
basé sur les mêmes mécanismes d’ouverture des canaux KATP et de fermeture des pores MPTP,
auxquels s’ajoutent un blocage de la contracture post-ischémique (baisse du Ca2+ intracytoplasmique)
et l’activation de kinases anti-apoptose [91,124]. Pour être efficace, l’agent doit être présent dans les
secondes qui suivent la reperfusion. D’autres substances ont le même effet : facilitateurs des canaux
KATP (nicorandil, adénosine), bloqueur des canaux MPTP (cyclosporine A).
Certains facteurs et certaines substances interfèrent avec les mécanismes du préconditionnement.





L’hyperglycémie abolit l’effet protecteur du préconditionnement, probablement par une
inhibition des canaux KATP [191] ;
L’effet protecteur des halogénés disparaît avec l’âge, bien que le myocarde sénescent soit
particulièrement sensible à l’ischémie [28a,370] ;
Le myocarde en insuffisance ventriculaire ou profondément remodelé par l’hypertrophie ne
semble plus réceptif aux effets bénéfiques des halogénés [386] ;
Le thiopental et la kétamine bloquent le préconditionnement [271,426] ;
Les inhibiteurs COX-2, les sulfonylurées, les β-bloqueurs et l’aprotinine interfèrent avec le
fonctionnement des canaux KATP et bloquent le précondionnement [2,123,124,273,307].
Aspects cliniques
Certains malades décrivent de l'angor au début de l'effort (angor d'échauffement), alors que les efforts
subséquents sont asymptomatiques ; il s'agit d'une forme de préconditionnement ischémique spontané.
En recherche clinique, ce phénomène s’est révélé être une réalité qui peut modifier le choix des agents
d’anesthésie. En effet, l’isoflurane, le desflurane et le sevoflurane présentent un effet protecteur contre
l’ischémie myocardique, pour autant que la concentration inspirée soit de 1 – 1.5 MAC, que la
substance soit administrée au moins trente minutes avant l’événement ischémique et pendant au moins
10 minutes [161,190,426]. L’effet maximal est obtenu avec une administration continue, y compris
pendant la CEC [87]. En chirurgie de revascularisation coronarienne, de nombreuses études cliniques
ont démontré un certain effet protecteur : la morbidité cardiaque est diminuée dans les groupes de
patients prétraités à l'isoflurane ou au sevoflurane par rapport aux groupes contrôle [76,185]. Le taux
de troponine postopératoire des malades opérés pour des PAC et endormis au sevoflurane ou au
desflurane est inférieur à celui des malades endormis avec des agents intraveineux [88,400]; les
concentrations postopératoires de TNFa ou de BNP sont inférieures [107,185]. La fonction contractile
immédiate est mieux préservée et le séjour en soins intensifs postopératoires est raccourci [93]. Cette
cardioprotection est également observée dans la chirurgie à coeur battant [76,154]. En pratique, l'effet
maximal est obtenu en utilisant l’isoflurane, le desflurane ou le sevoflurane (1-1.5 MAC) en continu
avant, pendant et après la CEC pour bénéficier de l’effet additif du pré- et du post-conditionnement
[94,218]. Cependant, le seul résultat clair à ce jour est une meilleure récupération de la fonction
myocardique et un abaissement des marqueurs de lésions cellulaires (troponine T ou I, CK-MB) ou de
réaction inflammatoire (TNFa) [89,185,400]. Les effets sur la mortalité sont marginaux ou douteux
[24a,294a].
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
201
La plupart des méta-analyses souligne que ces bénéfices cellulaires n’ont pas ou peu de traduction sur
la morbidité et sur la mortalité des patients [25,384,425c] ; une seule tend à démontrer que le
sevoflurane et le desflurane, qui paraissent les agents les plus efficaces, réduisent les risques
d’infarctus (OR 0.51) et de décès (OR 0.31) postopératoires par rapport aux agents intraveineux [218].
La tendance du préconditionnement à baisser la morbi-mortalité en chirurgie de revascularisation
coronarienne n’est donc pas bien établie [294a,307a], même si une étude longitudinale multicentrique
dont la portée est assez faible montre une diminution de mortalité à 1 mois [25], et si deux études
randomisées sur de petits collectifs montrent une réduction de l’infarctus [135a] et de la mortalité
[94a] à 1 an.
Le précontionnement à distance (Remote ischemic preconditioning) consiste à induire des ischémies
dans une masse musculaire squelettique en vue d’augmenter la résistance d’un autre organe par voie
neurogène ou humorale. Quelques études cliniques démontrent un bénéfice à cette technique simple,
inoffensive et peu coûteuse. Le gonflement d’une manchette à pression au bras gauche avant la CEC
(3-4 épisodes itératifs de 5 minutes à 200 mmHg) diminue le taux de troponine I postopératoire de
17% ainsi que les complications cardiaques (HR 0.35) et la mortalité (HR 0.27) [390a]. Cet effet
bénéfique est présent lorsque l’anesthésie est conduite sous halogéné (isoflurane) mais il semble
absent sous annesthésie intraveineuse au propofol [208a]. Malheureusement, deux grands essais
cliniques randomisés et contrôlés (ERICCA, 1612 patients, et RIPHeart, 1385 patients) n’ont
démontré aucun bénéfice du préconditionnement à distance avant chirurgie cardiaque en CEC sur
aucun paramètre examiné (troponine, FA, insuffisance rénale, séjour hospitalier, mortalité)
[162c,254a]. Alors que le préconditionnement n’est praticable que lorsque l’ischémie est programmée
au cours d’une intervention, le postconditionnement présente l’intérêt d’agir au cours de la
revascularisation qui suit un infarctus, par nature imprévisible : il est facile de procéder à des
gonflements répétés du ballon d’angioplastie une fois la coronaire reperméabilisée. Certaines études
ont montré une réduction de la taille des lésions en cas de STEMI [390b,421a], mais les résultats sont
pour l’instant plutôt inconsistants, voire négatifs [160a].
Si l’effet bénéfique des halogénés est bien démontré en chirurgie cardiaque, il n’en est pas de même en
chirurgie générale. Seuls des cas de chirurgie vasculaire semblent tirer avantage des volatils par
rapport aux agents intraveineux, sous forme d’une diminution des troponines postopératoires [91]. Le
sevoflurane ayant également un effet protecteur sur la fonction rénale, on a cherché s’il existe un
préconditionnement pour d’autres organes [185]. On a effectivement pu démontrer un effet analogue
sur le foie, le cerveau et le poumon, mais les recherches sont moins avancées que sur le cœur.
Les opiacés stimulants les récepteurs δ ont probablement un effet de préconditionnement [363]. La
morphine, par exemple, potentialise l'effet de l'isoflurane [232]. Aux doses utilisées en clinique, aucun
des agents intraveineux (propofol, etomidate, midazolam) n’a un effet comparable [88,89]. Les
barbiturés et la kétamine ont un effet antagoniste [271,426]. Le propofol possède certaines propriétés
cardioprotectrices apparemment différentes de celles des halogénés, ce qui complique singulièrement
les comparaisons entre anesthésie sous agents volatils et anesthésie intraveineuse [179a].
Parmi les substances de la pharmacopée cardiologique, le nicorandil (Dancor) s'est avéré avoir un
effet protecteur lors d'angioplastie [186,342] ; cette substance augmente la perméabilité des canaux
potassiques KATP. Par contre, d'autres substances ont un effet freinateur sur le préconditionnement ; en
clinique, elles auront tendance à aggraver les lésions ischémiques. Il s'agit de l’aprotinine, des
inhibiteurs COX-2 sélectifs, et des anti-diabétiques oraux (sulfonylurées, glitazones) qui inhibent les
canaux potassiques [2,123]. Ces deux dernières catégories de substances, déjà responsables d’une
augmentation de mortalité en chirurgie cardiovasculaire, doivent donc être stoppées plusieurs jours
avant l'opération chez les ischémiques ; dans le cas du diabète, les sulfonylurées sont remplacées
momentanément par de l'insuline.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
202
Conclusion
Les données liées au préconditionnement sont assez touffues et semblent manquer de cohérence, car
les résultats dépendent d’une multitude de facteurs qui rendent les études mal comparables :
population de malades, localisation et collatéralisation des lésions myocardiques, mode
d’administration de l’halogéné, technique d’anesthésie, contrôle hémodynamique, qualité de la
cardioplégie, technique chirurgicale, autres agents à effet protecteur, etc [294a]. La majorité des études
montre une nette diminution de la souffrance ischémique myocardique. Toutefois, l’impact clinique de
ce bénéfice n’est pas encore formellement prouvé. On est dans une situation identique à celle du pari
de Pascal (Blaise Pascal, 1623-1662) : si la protection myocardique offerte par les halogénés est
significative, on en bénéficie en les utilisant comme agents pour assurer l’anesthésie, et si elle ne l’est
pas, on ne perd rien à utiliser ces substances plutôt que des agents intraveineux. Même si les évidences
cliniques et expérimentales parlent essentiellement pour une amélioration de la reprise fonctionnelle
immédiate et pour une diminution des lésions ischémiques cellulaires sans preuve manifeste d’un
impact à long terme sur la morbi-nortalité, il est justifié de préférer un halogéné comme agent
d'anesthésie pour la chirurgie de revascularisation coronarienne car on a tout à y gagner [167a]. Bien
que les données prouvant un impact en chirurgie non-cardiaque soient insignifiantes, il n’est pas
interdit d’extrapoler les résultats obtenus en chirurgie cardiaque à la chirurgie générale vu les
bénéfices potentiels. En l'état actuel de nos connaissances, on peut donc soutenir que le maintien de
l’anesthésie par des halogénés chez le coronarien présente probablement des avantages supérieurs à
ses risques, particulièrement en chirurgie de revascularisation et dans certaines catégories de patients
[24a].
Préconditionnement
Le préconditionnement est une amélioration de la tolérance à l'ischémie par de brefs épisodes
d'occlusion du flux suivis de périodes de reperfusion. Un effet protecteur identique est possible avec 4
agents anesthésiques (halogénés, opiacés, xénon, hélium) et certaines substances (nicorandil,
cyclosporine); seuls les halogénés ont une activité clinique prouvée. Certaines substances inhibent le
préconditionnement: anti-COX2, sulfonylurée, thiopental, kétamine, aprotinine, béta-bloqueurs.
Postconditionnement: protection anti-ischémique lorsque l'agent n'est administré qu'à la reperfusion.
Préconditionnement à distance: épisodes itératifs d’ischémie musculaire (manchette à pression sur un
membre) qui diminuent les effets d’une ischémie ultérieure d’autres organes.
En chirurgie de revascularisation coronarienne, les halogénés améliorent la récupération de la fonction
myocardique, minimisent les lésions tissulaires et diminuent peut-être le risque d'infarctus; l'effet est
maximal si l'halogéné est utilisé tout au long de l'opération, y compris en CEC. La morbidité et la
mortalité pourraient être diminuées.
Conclusion clinique: chez le coronarien, le maintien de l’anesthésie par des halogénés présente
probablement des avantages de protection myocardique par rapport aux agents intraveineux.
Infarctus postopératoire
Chirurgie cardiaque
L’état clinique préopératoire est le premier facteur de risque de complications postopératoires en
chirurgie de revascularisation coronarienne (PAC : pontage aorto-coronarien). Les différents indices
de risque en usage (voir Chapitre 3 Facteurs de risque préopératoires) démontrent une aggravation du
pronostic avec plusieurs éléments : dysfonction ventriculaire, ischémie aiguë ou infarctus
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
203
préopératoires, degré d’atteinte coronarienne, opération en urgence ou réopération, insuffisance rénale,
diabète, maladie polyvasculaire, âge, sexe féminin [281].
Le taux d’infarctus postopératoire après PAC varie de 0.1% à > 10% selon les études, avec une
moyenne de 2.4% [280] à 3.42% [Society of Thoracic Surgery Database, 2001]. Contrairement à la
chirurgie non-cardiaque, la présence d’épisodes d’ischémie peropératoire, notamment avant la CEC,
est un facteur de risque d’infarctus postopératoire ; ces épisodes sont souvent associés à une
tachycardie [180]. La persistance d’anomalies de la contraction segmentaire (ACS) du VG après la
CEC est un facteur de mauvais pronostic, directement lié l’incidence d’infarctus postopératoire [226].
Dans une étude sur les revascularisations à cœur battant, 71% des complications cardiaques
postopératoires se retrouvent chez les patients qui n'ont pas récupéré de leur ACS en peropératoire,
mais aucune complication n'est enregistrée chez ceux qui ont une contractilité segmentaire normale en
fin d'intervention [261].
Le mode de définition de l’infarctus postopératoire est un problème majeur : l’incidence d’infarctus
peut varier de 2.8% sur la base de l’ECG à 31% avec le scan au technétium [70]. La présence d’une
onde Q ou d’une élévation des CK-MB de plus de cinq fois traduisent des lésions transmurales
importantes, mais de petites zones sous-endocardiques peuvent échapper à la détection. Les troponines
sont un indice plus fiable. Bien qu’elles ne permettent pas de faire la différence entre une ischémie et
les dégâts de l’intervention chirurgicale elle-même, les troponines sont un indicateur assez spécifique
d’infarctus en chirurgie cardiaque [3] ; leur évolution dans le temps (pic à 12-24 heures) impose un
certain délai diagnostique [62]. Un taux postopératoire de troponine T supérieur à 1.5 mcg/l est un
prédicteur efficace de la mortalité à 6 mois en chirurgie cardiaque [116]. Malheureusement, leur
évolution dans le temps (pic à 12-24 heures) impose un certain délai diagnostique. La myoglobine est
un marqueur plus précoce (1-3 heures après la lésion, pic à 6-12 heures), mais son élévation immédiate
est peu spécifique après chirurgie cardiaque ; la persistence d’un taux élevé à 24 heures est un meilleur
indice [200]. La retransfusion de sang médiastinal complique le diagnostic biologique de l’infarctus,
car l’autotransfusion augmente le taux des marqueurs habituels [410].
Chirurgie non-cardiaque
L’incidence de complications cardiaques dans la période périopératoire est de 1.4% dans la population
générale, toutes interventions confondues ; elle s'élève à 3.9% dans les populations à risque
[12,15,222,238]. Le taux d'ischémie et d'infarctus peropératoire est plus faible qu’en-dehors de la salle
d’opération (voir Chapitre 03 Figure 3.10). En effet, le malade analgésié, endormi et minutieusement
monitorisé est dans une situation privilégiée. Dans le postopératoire, au contraire, l’incidence
d’infarctus est quatre fois plus élevée à cause du réveil, de la douleur et du stress postopératoire. Alors
que les épisodes ischémiques peropératoires n’ont que peu de lien avec l’incidence de l’infarctus
postopératoire, les évènements ischémiques postopératoires, eux, sont directement reliés à la survenue
d’infarctus [215,238]. L'ischémie survient le plus souvent dans la période postopératoire immédiate
(24-48 premières heures), qui est un moment de fort déséquilibre hémodynamique. Elle est silencieuse
dans 90% des cas et ne se manifeste que par un sous-décalage prolongé du segment ST, pour autant
que le malade soit sous surveillance ECG constante. Elle est très souvent précédée ou accompagnée
d’une période de tachycardie, qui débute dès les premières heures postopératoires [216].
La période postopératoire est particulièrement à risque d'infarctus pendant plusieurs jours à cause de la
vulnérabilité du patient à trois phénomènes [278] :
 Syndrome inflammatoire systémique (acute phase reaction) :
• Elévation de tous les marqueurs inflammatoires, activation leucocytaire ;
• Activation généralisée de l’inflammation dans les plaques instables ;
• Hypercoagulabilité : augmentation du nombre et de l’adhésivité des plaquettes,
élévation du taux de fibrinogène, de facteur VIII et de von Willebrand, chute de la
fibrinolyse.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
204
 Augmentation de la demande en O2 (mVO2 ) :
• Stimulation sympathique : hypertension artérielle, tachycardie et augmentation de la
contractilité ;
• Douleur, stress, hypothermie (les frissons augmentent la VO2 de 400%) ;
• Dans les coronaires : vasoconstriction épicardique, sécrétion locale d’endothéline,
augmentation des forces de cisaillement sur les plaques instable;
 Baisse de l’apport d’O2 (DO2) ;
• Hypotension et hypovolémie ;
• Anémie aiguë ;
• Diminution des échanges gazeux (atélectasie, hypoventilation) ;
• Augmentation de la viscosité (déshydratation).
L’infarctus postopératoire est silencieux dans la majorité des cas [15,215] : l'angor n'est présent que
chez 14% des patients, et des symptômes cliniques n'apparaissent que dans 53% des cas [12,238]. Sa
mortalité de 10-20% est plus élevée que celle de l'infarctus qui survient en dehors d'un contexte
chirurgical (5-7%). Après un acte de chirurgie générale, on rencontre les deux types d’infarctus
mentionnés précédemment ; ils surviennent préférentiellement pendant les premières 24 à 96 heures.
 Infarctus sur sténose serrée et déséquilibre DO2/VO2 : ≥ 60% des accidents coronariens sont
précédés de longs épisodes de tachycardie et de sous-décalage du segment ST (non-STEMI)
[215,216] ; la durée de ce sous-décalage est directement associée à la valeur du pic de
troponine enregistré ultérieurement [321]. L’ascension des troponines est tardive, et l’accident
survient en général au 3ème ou 4ème jour [217,224]. Le β-blocage est une prévention efficace.
 Infarctus sur rupture de plaque instable : 45% des infarctus apparaissent en-dehors des
sténoses les plus serrées à la coronarographie [86]. Ce type d’infarctus survient plus tôt, en
général dans les 36 premières heures, mais il peut apparaître n’importe quand dans les dix
jours qui suivent l’intervention [224]. Il n’est pas précédé de modifications du segment ST et
se caractérise par une surélévation ST (STEMI) ; l’élévation des troponines est brusque et
précoce. La seule prévention efficacePest les antiplaquettaires (aspirine, clopidogrel,
prasugrel, ticagrelor) et les statines [58]. Le traitement est une revascularisation d’urgence.
Une étude de l'évolution postopératoire des taux de troponine I (cTnI) après chirurgie de l'aorte
abdominale montre que le 14% des patients présente une élévation de la cTnI [224]. Chez 9%, cette
élévation est inférieure au seuil fixé à 1.5 ng/L; il s'agit de lésion myocardique sans infarcissement
(mortalité 7%). Chez 5%, le seuil de 1.5 ng/L est franchi, traduisant la présence d'un infarctus. Dans ce
dernier cas, les malades se répartissent en deux catégories selon la période à laquelle apparaît le pic de
cTnI (Figure 5.130):
 Pic à 37 heures chez 2% ; mortalité 24% ;
 Pic à 74 heures chez 3% ; mortalité 21%.
Le premier pic, très soudain, traduit probablement des infarctus liés à des ruptures de plaques
instables. Le second pic survient après une période d'élévation constante de la troponine I traduisant
une ischémie persistante, de même niveau que celle des lésions cellulaires sans infarctus. Dans ce cas,
l’infarctus est probablement secondaire à une ischémie sur déséquilibre DO2/VO2. Le contrôle de la
fréquence cardiaque est un élément capital dans la prévention de cet accident, d'où l'efficacité du βblocage prophylactique.
La dichotomie en deux types séparés d’infarctus est une simplification méthodologique pratique, mais
probablement trop grossière. L’infarctus postopératoire est la manifestation ultime d’une longue
cascade d’évènements multiples et interdépendants, qui interagissent entre eux de manière dynamique
et imprédictible (voir Figure 5.131). Le nombre et la variété des mécanismes en jeu expliquent
l’aspect aléatoire du phénomène et le peu d’impact de la revascularisation préopératoire sur le devenir
des patients en chirurgie non-cardiaque. Ces données justifient la tendance actuelle de préférer une
cardioprotection
pharmacologique
maximale
(β-bloqueurs,
antiplaquettaires,
statines,
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
205
préconditionnement, anesthésie combinée) et le strict contrôle hémodynamique peropératoire
(fréquence ≤ 65 batt/min, PAM > 80 mmHg) à une série d’investigations préopératoires.
Taux d’infarctus
ou d'ischémie
Rupture de plaque
Ischémie de stress
Ischémie due au stress
Taux de troponine
50%
75%
100%
Mortalité d'infarctus lié aux
ruptures de plaques
Mortalité d'infarctus lié au stress
0
1
2
3
4 Jours postop
Figure 5.130 : Représentation schématique de l'incidence d'ischémie, du taux de troponine, et de la mortalité de
l'infarctus postopératoire précoce. On distingue deux types d'infarctus: infarctus non-Q lié à l'ischémie survenue
sur une sténose coronarienne serrée (trait plein), et infarctus avec onde Q du à une rupture de plaque sur une
sténose non significative (traitillé). Le premier culmine entre vers le 3ème jour après l'intervention, alors que le
deuxième est plus précoce [224]. En cartouche, l'incidence des deux types d'infarctus selon le degré de sténose
coronarienne à l'angiographie: l'infarctus lié à une rupture de plaque est le plus fréquent dans les sténoses non
significatives, alors que l'infarctus lié à l'ischémie est d'autant plus courant que la sténose est plus serrée [214].
Infarctus postopératoire
En chirurgie cardiaque, le taux d’infarctus postopératoire après PAC varie en moyenne de 2 à 4%. Les
épisodes d'ischémie peropératoires et la persistence d'altérations de la cinétique segmentaire après
revascularisation sont des marqueurs d'une augmentation du risque d'infarctus postopératoire. Le
diagnostic est posé sur les modifications de l’ECG et l’élévation des troponines (pic à 12 heures).
En chirurgie non-cardiaque, le taux d'infarctus postopératoire chez les coronariens stables varie de 16% selon le type de chirurgie (mortalité moyenne: 10-20%); en cas de syndrome coronarien instable, il
varie de 20-65% (mortalité moyenne: 35%). Les épisodes ischémiques postopératoires, non
peropératoires, sont liés à l'incidence d'infarctus. L'infarctus postopératoire est en général silencieux.
Ses pics d'incidence sont 24-36 heures (infarctus sur plaque instable) et 72 heures (infarctus sur
déséquilibre DO2/mVO2, plus fréquent et en général précédé de longs épisodes de tachycardie).
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
206
La meilleure protection contre l'infarctus périopératoire est une cardioprotection pharmacologique
maximale (β-bloqueurs, antiplaquettaires, statines, préconditionnement, anesthésie combinée) et un
strict contrôle hémodynamique peropératoire (fréquence ≤ 65 batt/min, PAM > 80 mmHg).
Chirurgie
Stress
Douleur
Hypothermie
Figure
5.131 :
Représentation
schématique des
mécanismes liés à
l’infarctus
postopératoire au
niveau
de
la
circulation
coronarienne. La
dichotomie entre
plaque instable et
sténose serrée est
noyée au milieu
d’une
série
d’éléments
interdépendants et
d’importance
variable selon les
situations,
d’où
l’imprédictibilité
fondamentale de
l'infarctus
postopératoire.
Syndrome
inflammatoire
Hypertension
Cisaillement
Stimulation
sympathique
↑ VO2
Aggrégabilité
plaquettaire ↑
Coagulabilité ↑
Hypotension
Anémie
Echanges
gazeux ↓
↓ DO2
Déséquilibre
DO2/VO 2
Hypotension
Viscosité ↑
Plaque
instable
Déséquilibre
Rupture de la
capsule
Dysfonction
endothéliale
Vasoconstriction
Flux sanguin
coronaire ↓
Sténose
serrée
Ischémie
myocardique
Thrombose
Susceptibilité
myocardique
Durée de l’ischémie
Collatéralisation
INFARCTUS
© Chassot 2012
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
207
Conclusions
Ces éléments de physiopathologie cardio-vasculaire ont pour but de démontrer que la connaissance
des processus en cause dans les problèmes hémodynamiques et cardiologiques que rencontrent
l'anesthésiste et l'intensiviste est essentielle à une prise en charge adéquate du patient. Seule la
compréhension d'un mécanisme permet de le réparer ! Apprendre des recettes et se contenter de
routines ne permet ni de saisir le fonctionnement de l'organisme ni d'élaborer des stratégies en cas de
problèmes inattendus, alors que la maîtrise de la physiologie cardio-vasculaire et de ses deviances
permet de trier les priorités, de choisir la technique la plus adaptée au cas, et d'assurer une sécurité
optimale dans les situations complexes.
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
208
Bibliographie
Lectures conseillées
BORLAUG BA. The pathophysiology of heart failure with preserved ejection fraction. Nat Rev Cardiol 2014; 11:507-15
BUCKBERG GD, HOFFMAN JIE, MAHAJAN A, et al. Cardiac mechanisms revisited: the relationship of cardiac
architecture to ventricular function. Circulation 2008; 118:2571-87
CREA F, LIUZZO G. Pathogenesis of acute coronary syndrome. J Am Coll Cardiol 2013; 61:1-11
FEIHL F, BROCCARD AF. Interactions between respiration and systemic hemodynamics. Part I: basic concepts. Intensive
Care Med 2009; 35:45-54
FRIEDBERG MK, REDINGTON AN. Right versus left ventricular failure: differences, similarities, and interactions.
Circulation 2014; 129:1033-44
HADDAD F, DOYLE R, MURPHY DJ. HUNT SA. Right ventricular function in cardiovascular disease, Part II.
Pathophysiology, clinical importance and management of right ventricular failure. Circulation 2008; 117:1717-31
KERN MJ, SAMADY H. Current concepts of integrated coronary physiology in the catheterization laboratory. J Am Coll
Cardiol 2010; 55:173-85
LIBBY P. Mechanisms of acute coronary syndromes and their implications for therapy. N Engl J Med 2013; 368:2004-13
PAGEL PS. Myocardial protection by volatile anesthetics in patients undergoing cardiac surgery: A critical review of the
laboratory and clinical evidence. J Cardiothorac Vasc Anesth 2013; 27:972-82
SENGUPTA PP, KRISHNAMOORTHY VK, KORINEK J, et al. Left ventricular form and function revisited: Applied
translational science to cardiovascular ultrasound imaging. J Am Soc Echocardiogr 2007; 20:539-51
THUNBERG CA, GAITAN BD, GREWAL A, et al. Pulmonary hypertension in patients undergoing cardiac surgery:
Pathophysiology, perioperative management and outcome. J Cardiothorac Vasc Anesth 2013; 27:551-72
ZAUGG M, SCHAUB MC. Cellular mechanisms in sympatho-modulation of the heart. Br J Anaesth 2004; 93:34-52
ZILE MR, BRUTSAERT DL. New concept in diastolic dysfunction and diastolic heart failure: Part I. Diagnosis, prognosis,
and measurement of diastolic function. Circulation 2002; 105:1387-93
Références
1
2
3
4
5
6
7
8
9
9a
10
10a
11
12
13
AEBISCHER N, MALHOTTA R, CONNORS L, et al. Ventricular interdependence during Valsalva maneuver as
seen by two-dimensional echocardiography: New insights about an old method. J Am Soc Echocardiogr 1995;
8:536-42
ALCINDOR D, KROLIKOWSKI JG, PAGEL PS, et al. Cycloxygenase-2 mediates ischemic, anesthetic and
pharmacologic preconditioning in vivo. Anesthesiology 2004; 100:547-54
ALPERT JS, THYGESEN K, ANTMAN JP. Myocardial infarction redefined – a consensus document of the Joint
European Society of Cardiology / American College of Cardiology Committee for the redifinition of myocardial
infarction. J Am Coll Cardiol 2000; 36:959-69
ANDERSON KM, FABER JE. Differential sensitivity of arteriolar α1- and α2-adrenoreceptor constriction to
metabolic inhibition during rate skeletal muscle contraction. Circ Res 1991; 69:174-84
ANDREWS KL, TRIGGLE CR, ELLIS A. NO and the vasculature: where does it come from and what does it do ?
Heart Fail Rev 2002; 7:423-45
ANTMAN EM, BRAUNWALD E. ST-elevation myocardial infarction: Pathology, pathophysiology, and clinical
features. In: ZIPES DP, et al, eds. Braunwald's heart disease. A textbook of cardiovascular medicine, 7th edition.
Philadelphia, Elsevier-Saunders, 2005, 1141-65
ANVERSA P, et al. Myocyte growth and cardiac repair. J Mol Cell Cardiol 2002; 14:91-105
ARAI AE, GRAUER SE, ANSELONE CG, et al. Metabolic adaptation to a gradual reduction in myocardial blood
flow. Circulation 1995; 92:244.52
ARCHER SL, WEIR K, WILKINS MR. Basic science of pulmonary arterial hypertension for clinicians: New
concepts and experimental therapies. Circulation 2010; 121:2045-66
ARQUES S, ROUX E, LUCCIONI R. Current clinical applications of spectral tissue Doppler echocardiography
(E/E’ ratio) as a noninvasive surrogate of left ventricular diastolic pressures in the diagnosis of heart failure with
preserved left ventricular systolic function. Cardiovasc Ultrasound 2007; 5:16
ASANOI H, SASAYAMA S, KAMEYAMA T. Ventriculoarterial coupling in normal and failing heart in humans.
Circ Res 1989; 65:483-93
ASHES CM, YU M, MEINERI M, et al. Diastolic dysfunction, cardiopulmonary bypass, and atrial fibrillation after
coronary artery bypass graft surgery. Brit J Anaesth 2014; 113:815-21
ASHIKAGA H, VAN DER SPOEL TIG, COPPOLA BA, OMENS JH. Transmural myocardial mechanics during
isovolumic contraction. J Am Coll Cardiol Imag 2009; 2:202-11
ASHTON CM, PETERSEN NJ, WRAY NP, et al. The incidence of perioperative myocardial infarction in men
undergoing noncardiac surgery. Ann Intern Med 1993; 118:504-10
ATHERTON JJ, MOORE TD, LELE SS, et al. Diastolic ventricular interaction in chronic heart failure. Lancet
1997; 349:1720-4
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
209
14
15
15a
15b
16
17
18
18a
19
20
20b
21
22
23
24
24a
25
26
26a
27
28
28a
29
30
30a
30b
31
32
33
34
35
36
37
38
BADIWALA MV, RAO V. Left ventricular device as destination therapy: are we there yet ? Curr Opin Cardiol
2009; 24:184-9
BADNER NH, KNILL RL, BROWN JE, et al. Myocardial infarction after noncardiac surgery. Anesthesiology
1998; 88:572-8
BAGGISH AL, WOOD MJ. Athlete’s heart and cardiovascular care of the athlete. Scientific and clinical update.
Circulation 2011; 123:2723-35
BARDIA A, MONTEALEGRE-GALLEGOS M, MAHMOOD F, et al. Left atrial size: An underappreciated
perioperative cardiac risk factor. J Cardiothorac Vasc Anesth 2014; 28:1624-32
BARON JF, VICAUT E, HOU X, DUVELLEROY M. Independent role of arterial O2 tension in local control of
coronary blood flow. Am J Physiol 1990; 258:H1388-94
BÄRTSCH P, MAIRBÄURL, MAGGIORINI M, et al. Physiological aspects of high-altitude pulmonary edema. J
Appl Physiol 2005; 98:1101-10
BELZ G, BERNUTH GV, HOFSTETTER R, et al. Temporal sequence of right and left atrial contraction during
spontaneous sinus rhythm and paced left atrium rhythm. Br Heart J 1973; 35: 284-7
BENHABBOUCHE S, CROLA DA SILVA C, ABRIAL M, FERRERRA R. The basis of ischemia-reperfusion
and myocardial protection. Ann Fr Anesth Réanim 2011; 30:S2-S16
BENZA RL, MILLER DP, GOMBERG-MAITLAND M, et al. Predicting survival in pulmonary arterial
hypertension. Insights from the Registry to evaluate early and long-term pulmonary arterial hypertension disease
management (REVEAL). Circulation 2010; 122:164-72
BERNARD F, DENAULT A, BABIN D, et al. Diastolic dysfunction is predictive of difficult weaning from
cardiopulmonary bypass. Anesth Analg 2001; 92:291-8
BERRY C, DOUGHTY RN, GRANGER C, et al. The survival of patients with heart failure with preserved or
reduced left ventricular ejection fraction: an individual patient data meta-analysis. Eur Heart J 2012; 33:1750-7
BERS DM. Excitation-contraction coupling and cardiac contractile force. Boston: Kluwer Academic Publishers,
2001
BERS DM. Cardiac excitation-contraction coupling. Nature 2002; 415:198-205
BERTINI M, SENGUPTA PP, NUCIFORA G, et al. Role of left ventricular twist mechanics in the assessment of
cardiac dyssynchrony in heart failure. J Am Coll Cardiol Img 2009; 2:1425-35
BETTEX DA, CHASSOT PG. Echocardiographie transoesophagienne en anesthesia-réanimation. Paris: Masson,
Williams & Wilkins, 1997, 245
BETTEX DA, WARNER P, BOSSHART M, et al. Role of sevoflurane in organ protection during cardiac surgery
in children: a randomized controlled trial. Interact Cardiovasc Thorac Surg 2015; 20:157-65
BIGNAMI E, BIONDI-ZOCCAI G, LANDONI G, et al. Volatile anesthetics reduce mortality in cardiac surgery. J
Cardiothorac Vasc Anesth 2009; 23:594-9
BILLINGER M, SEILER C, FLEISCH M, et al. Do beta-adrenergic blocking agents increase coronary flow reserve
? J Am Coll Cardiol 2001; 38:1866-71
BISHOPRIC NH. Evolution of the heart from bacteria to man. Ann N Y Acad Sci 2005; 1047:13-9
BLAISE G, LANGLEBEN D, HUBERT B. Pulmonary arterial hypertension. Anesthesiology 2003; 99:1415-32
BLAKE GJ, RIDKER PM. Inflammatory biomarkers and cardiovascular risk prediction. J Intern Med 2002;
252:283-94
BOENGLER K, SCHULZ R, HEUSCH G. Loss of cardioprotection with ageing. Cardiovasc Res 2009; 83:247-61
BOHM M. Catecholamines refractoriness and their mechanisms in cardiocirculatory shock and chronic heart
failure. J Thorac Cardiovasc Surg 1998; 46(suppl 2):270-5
BONOW RO, UDELSON JE. Left ventricular diastolic dysfunction as a cause of congestive heart failure.
Mechanisms and management. Ann Intern Med 1992; 117:502-10
BORISSOFF JI, SPRONK HMH, TEN CATE H. The hemostatic system as a modulator of atherosclerosis. N Engl
J Med 2011; 364:1746-60
BORLAUG BA. The pathophysiology of heart failure with preserved ejection fraction. Nat Rev Cardiol 2014;
11:507-15
BRAUNWALD E. Is myocardial stunning important from a clinical standpoint? In: Kloner RA, Przylenk K. ed.
Stunned Myocardium. Marcel Dekker, Inc, 1993, p 441-452
BRAUNWALD E, ANTMAN E, BEASLEY JW, et al. ACC/AHA Guidelines for the management of patients with
unstable angina and non-ST-segment elevation myocardial infarction. Circulation 2000; 102:1193-209
BRAUNWALD E, ANTMAN EM, BEASLEY JW, et al. ACC/AHA Guideline update for the management of
patients with unstable angina and non-ST-segment elevation myocaardial infarction – 2002: Summary article.
Circulation 2002; 106:1893-900
BRAUNWALD E, BURTON ES. Coronary blood flow and myocardial ischemia. In: BRAUNWALD E, ed. Heart
disease. A textbook of cardiovascular medicine. 4th edition Philadelphia, WB Saunders, 1992, 1161-99
BRAUNWALD E, COLUCCI WS. Clinical aspects of heart failure. In: BRAUNWALD E. Heart disease. A
textbook of cardiovascular medicine. Philadelphia : W. B. Saunders Co, 1997, 445-70
BRAUNWALD E, RUTHERFORD JD. Reversible ischemic left ventricular dysfunction: Evidence for the
"hibernating myocardium". J Am Coll Cardiol 1986; 8:1467
BRISTOW MR. β-adrenergic receptors and phosphodiesterases: Present and future perspectives. Semin
Cardiothorac Vasc Anesth 2003; 7:19-21
BRISTOW MR. Antiadrenergic therapy of chronic heart failure. Surprises and new opportunities. Circulation 2003;
107:1100-2
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
210
39
40
41
41a
42
43
44
45
46
47
48
48a
49
50
51
52
52a
53
54
55
56
57
58
59
60
61
61a
62
63
64
65
66
67
68
BRISTOW MR, GINSBURG R, MINOBE W, et al. Decreased catecholamine sensitivity and beta-adrenergic
receptor density in failing human hearts. N Engl J Med 1982; 307:205-11
BRITTSAN AG, KRANIAS EG. Phospholamban and cardiac contractile function. J Mol Cell Cardiol 2000;
32:2131-7
BRODDE OE, DAUL A, MICHEL-REHNER L, et al. Agonist-induced desensitization of beta-adrenoreceptor
function in humans. Circulation 1990; 81:914-21
BRONICKI RA, BADEN HP. Pathophysiology of right ventricular failure in pulmonary hypertension. Pediatr Crit
Care Med 2010; 11(Suppl):S15-S22
BROTEN TP, FEIGL EO. Role of myocardial oxygen and carbon dioxide in coronary autoregulation. Am J Physiol
1992; 262:H1231-7
BRUCKNER R, MUGGE A, SCHOLZ H. Existence and functional role of alpha1-adrenoreceptors in the
mammalian heart. J Mol Cell Cardiol 1985; 17:639-45
BRUTSAERT DL, SYS SU. Relaxation and diastole of the heart. Physiol Rev 1989; 69:1228-1315
BRUTSAERT DL, SYS SU, GILLEBERT TC. Diastolic dysfunction in post-cardiac surgical management. J
Cardiothor Vasc Anesth 1993; 7(suppl 1):18-20
BUCHALTER MB, WEISS JL, ROGERS WG, et al. Noninvasive quantification of left ventricular rotational
deformation in normal humans using magnetic resonance imaging myocardial tagging. Circulation 1990; 81:123644
BUCKBERG GD. Congestive heart failure: Treat the disease, not the symptom – Return to normalcy. J Thorac
Cardiovasc Surg 2003; 125:S41-S49
BUCKBERG GD, CASTELLA M, GHARIB M, SALEH S. Structure/function interface with sequential shortening
of basal and apical components of myocardial band. Eur J Cardiothor Surg 2006; 29S:S75-S97
BUCKBERG GD, HOFFMAN JIE, MAHAJAN A, et al. Cardiac mechanisms revisited: the relationship of cardiac
architecture to ventricular function. Circulation 2008; 118:2571-87
BUCKBERG GD, FIXLER DE, ARCHIE JP, et al. Experimental subendocardial ischemia in dogs with normal
coronary arteries. Cric Res 1972; 30:67
BUFFINGTON CW, DAVIS KB, GILLEPSIE S, et al. The prevalence of steal-prone anatomy in patients with
coronary artery disease. Anesthesiology 1988; 69:721
BUFFON A, BIASUCCI LM, LIUZZO G, et al. Widespread coronary inflammation in unstable angina. N Engl J
Med 2002; 347:5-12
BUNDTS W, VAN PELT N, GILLYNS H, et al. Residual pulmonary vasoreactivity to inhaled nitric oxide in
patients with severe obstructive pulmonary hypertension and Eisenmenger syndrome. Heart 2001; 86:553-9
BURCHFIELD JS, XIE M, HILL JA. Pathological ventricular remodeling: Mechanisms. Part 1 of 2. Circulation
2013; 128:388-400
BURKHOFF D, SAGAWA K. Ventricular efficiency predicted by an analytical model. Am J Physiol 1986; 250:
R1021- R1027
CACOUB P, DORENT R, NATAF P, et al. Endothelin-1 in the lungs of patients with pulmonary hypertension.
Cardiovasc Res 1997; 33:196-203
CAIN SM. Supply dependency of oxygen uptake in ARDS: myth or reality? Am J Med Sci 1984; 288:119-24
CAMPBELL KB, CHANDRA M. Functions of stretch activation in heart muscle. J Gen Physiol 2006; 127:89-94
CANNESSON M. Arterial pressure variation and goal-directed fluid therapy. J Cardiothorac Vasc Anesth 2010;
24:487-97
CANNESSON M, ATTOFF Y, ROSAMEL P, et al. Respiratory variations in pulse oxymetry plethysmographic
waveform amplitude to predict fluid responsiveness in the operating room. Anesthesiology 2007; 106:1105-11
CANTY JM, SCHWARTZ JS. Nitric oxide mediates flow-dependent epicardial coronary vasodilatation to changes
in pulse frequency but not mean flow in conscious dogs. Circulation 1994; 89:375-84
CASON BA, GAMPERL AK, SLOCUM RE, HICKEY RF. Anesthetic-induced preconditioning: previous
administration of isoflurane decreases myocardial infarct size in rabbits. Anesthesiology 1997; 87: 1182-90
CASSCELLS W, NAGHAVI M, WILLERSON JT. Vulnerable atherosclerotic plaque. A multifocal disease.
Circulation 2003; 107:2072-5
CHAMPION HC, MICHELAKIS ED, HASSOUN PM. Comprehensive invasive and noninvasive approach to the
right ventricle-pulmonary circulation unit. Circulation 2009; 120:992-1007
CHAN MY, PRONOVOST PJ. Clinical utility of biomarkers in myocardial injury. Curr Opin Anesthesiol 2004;
17:49-55
CHAPPELL D, JACOB M, HOFMANN-KIEFER K, et al. A rational approach to perioperative fluid management.
Anesthesiology 2008; 109:723-40
CHASSOT PG, BETTEX DA. Anesthesia and adult congenital heart disease. J Cardiothorac Vasc Anesth 2006;
20: 414-37
CHASSOT PG, DELABAYS A, SPAHN DR. Preoperative evaluation of patients with or at risk of coronary artery
disease undergoing non cardiac surgery. Brit J Anaesth 2002; 89:747-59
CHASSOT PG, DELABAYS A, SPAHN DR. Perioperative use of antiplatelet drugs. Best Pract Res Clin
Anesthesiol 2007; 21:241-56
CHASSOT PG, DELABAYS A, SPAHN DR. Perioperative antiplatelet therapy: The case for continuing therapy in
patients at risk of myocardial infarction. Brit J Anaesth 2007; 99:316-28
CHEMLA D, HEBERT JL, COIRAULT C, et al. Total arterial compliance estimated by stroke volume – to – aortic
pulse pressure ratio in humans. Am J Physiol 1998; 274:H500-5
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
211
69
70
71
72
73
74
75
76
76a
77
78
79
79a
80
81
81a
82
83
84
85
86
87
88
89
90
91
92
93
94
94a
95
96
97
98
CHEN Q, VAZQUEZ EJ, MOGHADDAS S, et al. Production of reactive oxygen species by mitochondria. J Biol
Chem 2003; 278:36027-31
CHENG D, VEGAS A. Anesthesia for the surgical management of ischemic heart disease. In: THYS DM, et al
editors. Textbook of Cardiothoracic Anesthesiology. New York, McGraw-Hull Co, 2001, pp 530-88
CHILIAN WM. Functional distribution of α1 and α2 adrenergic receptors in the coronary microcirculation.
Circulation 1991; 84:2108-22
CHILIAN WM. Coronary microcirculation in health and disease. Summary of an NHLBI workshop. Circulation
1997; 95:522-8
COHEN MV. Coronary collaterals: clinical and experimental observations. Mount Kisco, New York: Futura 1985
COHEN MV. Myocardial ischemia is not a prerequisite for the stimulation of coronary collateral development. Am
Heart J 1993; 126:847-55
COHEN MC, ARETZ TH. Histological analysis of coronary artery lesions in fatal postoperative myocardial
infarction. Cardiovasc Pathol 1999; 8:133-9
CONZEN PF, FISCHER S, DETTER C, PETER K. Sevoflurane provides greater protection of the myocardium
than propofol in patients undergoing off-pump coronary artery bypass surgery. Anesthesiology 2003; 99:826-33
COOK S, TOGNI M, SCHAUB MC, WENEWESER P, HESS OM. High heart rate: a cardiovascular risk factor ?
Eur Heart J 2006; 27:2387-93
COOPER CJ, LANDZBERG MJ, ANDERSON TJ, et al. Role of the nitric oxide in the local regulation of
pulmonary vascular resistance in humans. Circulation 1996; 93:266-71
CRACKOWER MA, et al. Angiotensin-converting enzyme 2 is an essential regulator of heart function. Nature
2002; 417:822-8
CREA F, et al. Role of adenosine in pathogenesis of anginal pain. Circulation 1990; 81:164-72
CREA F, LIUZZO G. Pathogenesis of acute coronary syndrome. J Am Coll Cardiol 2013; 61:1-11
CRILEY JM, BLAUFUSS AH, KISSEL KL. Cough-induced cardiac compression. JAMA 1976; 236:1246-8
CROZATIER B. Stretch-induced modifications of myocardial performance: from ventricular function to cellular
and molecular mechanisms. Cardiovasc Res 1996;32:25-37
CRYSTAL GJ, SALEM MR. The Bainbridge and the “reverse” Bainbridge reflexes: History, physiology and
clinical relevance. Anesth Analg 2012; 114:520-32
DALIENTO L, SOMERVILLE J, PRESBITERO P, et al. Eisenmenger syndrome. Factors relating to deterioration
and death. Eur Heart J 1998; 19:1845-55
DANTZKER DR, FORESMAN B, GUTTIEREZ G. Oxygen supply and utilization relationships. Am Rev Resp
Dis 1991; 143:675-9
DAS DK, MAULIK N. Mitochondrial function in cardiomyocytes: target for cardioprotection. Curr Opinion
Anesthesiol 2005; 18:77-82
DAVIES CT, THOMPSON MW. Aerobic performance of female marathon and male supermarathon athletes. Eur
J Appl Physiol Occupation Physiol 1979, 41, 233-245
DAWOOD MM, GUPTA DK, SOUTHERN J, et al. Pathology of fatal perioperative myocardial infarction:
implications regarding physiopathology and prevention. Int J Cardiol 1996; 57:35-44
DE HERT SG. Cardioprotection with volatile anesthetics: clinical relevance. Curr Opin Anesthesiol 2004; 17:57-62
DE HERT SG, BROECKE PW, MERTENS E, et al. Sevoflurane but not propofol preserves myocardial function in
coronary artery patients. Anesthesiology 2002; 97: 42-9
DE HERT SG, CROMHEECKE S, TEN BROECKE PW, et al. Effects of propofol, desflurane and sevoflurane on
recovery of myocardial function after coronory surgery in elderly high-risk patients. Anesthesiology 2003; 99:31423
DE HERT SG, GILLEBERT TC, ANDRIES LG, BRUTSAERT DL. Role of the endocardial endothelium in the
regulation of myocardial function. Anesthesiology 1993; 79:1354-66
DE HERT SG, LONGROIS D, YANG H, et al. Does the use of a volatile anesthetic regimen attenuate the
incidence of cardiac events after vascular surgery ? Acta Anaesthesiol Belg 2008; 59:19-25
DE HERT SG, TURANI F, MATHUR S, STOWE DF. Cardioprotection with volatile anesthetics: mechanisms and
clinical implications. Anesth Analg 2005; 100:1584-95
DE HERT S, VAN DER LINDEN PJ, CROMHEECKE S, et al. Choice of primary anesthetic regimen can
influence intensive care unit length of stay after coronary surgery with cardiopulmonary bypass. Anesthesiology
2004; 101:9-20
DE HERT S, VAN DER LINDEN PJ, CROMHEECKE S, et al. Cardioprotective properties of sevoflurane in
patients undergoing coronary surgery with cardiopulmonary bypass are related to the modalities of its
administration. Anesthesiology 2004; 101:299-310
DE HERT S, VLASSELAERS D, BARBE R, et al. A comparison of volatile and non volatile agents for
cardioprotection during on-pump coronary surgery. Anaesthesia 2009; 64:953-60
DE KLAVER MJ, MANNING L, PALMER LA, RICH GF. Isoflurane pretreatment inhibits cytokine-induced cell
death in cultured rat smooth muscle cells and human endothelial cells. Anesthesiology 2002; 97: 24-32
DEL MONTE F, et al. Improvement in survival and cardiac metabolism after gene transfer of sarcoplasmic
reticulum Ca++-ATPase in a rat model of heart failure. Circulation 2001; 104:1424-9
DEL MONTE F, KAUFMANN AJ, POOLE-WILSON PA, et al. Coexistence of functioning β1- and β2adrenoreceptors in single myocytes from human ventricle. Circulation 1993; 88:854-63
DEMBITSKY W. 3rd World Congress on Biomimetics, Artificial Muscles & Nano-Bio. CHUV-EPFL, Lausanne,
2006
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
212
98a
98b
99
100
101
102
103
104
105
105a
106
107
108
109
110
111
112
112a
113
114
115
116
117
118
119
120
121
122
123
124
125
125a
126
127
DENAULT AY, COUTURE P, BUITHIEU J, et al. Left and right ventricular diastolic dysfunction as predictors of
difficult separation from cardio-pulmonary bypass. Can J Anesth 2006; 53:1020-9
DENAULT AY, HADDAD F, JACOBSOHN E, et al. Perioperative right ventricular dysfunction. Curr Opin
Anaesthesiol 2013; 26:71-81
DHAINAUT JF, BRUNET F, MIRA JP, FIEROBE L. Variations phasiques de la pression pleurale et fonction
ventriculaire. In: SRLF - Les interactions cardio-pulmonaires. Paris : Arnette, 1994, 71-83
DINH-XUAN AT, HIGENBOTTAM TW, CLELLAND CA, et al. Impairment of endothelium-dependent
pulmonary artery relaxation in chronic obstructive lung disease. N Engl J Med 1991; 324:1539-47
DOLE WP. Autoregulation of the coronary circulation. Progr Cardiovasc Dis 1987; 29:293-323
DORINSKY PM, COSTELLO JL, GADEK JE. Relation ships of oxygen uptake and oxygen delivery in respiratory
failure not due to ARDS. Chest 1988; 93:1013-19
DOUCETTE JW, GOTO M, FLYNN AE, et al. Effects of cardiac contraction and cavity pressure on myocardial
blood flow. Am J Physiol 1993; 265:H1342-52
DREXLER H. Nitric oxide synthase in the failing heart: a double-edged sword ? Circulation 1999; 99:2971-5
DUNCKER DJ, TRAVERSE JH, ISHIBASHI Y, BACHE RJ. Effect of NO on transmural distribution of blood
flow in hypertrophied left ventricle during exercise. Am J Physiol 1999; 276:H1305-12
DUTTA P, COURTIES G, WEI Y, et al. Myocardial infarction accelerates atherosclerosis. Nature 2012; 487:325-9
EBERT TJ. Autonomic balance and cardiac function. Curr Opin Anesthesiol 1992; 5:3-10
EL AZAAB SR, ROSSEEL PM, DE LANGE JJ, et al. Effect of sevoflurane on the ex vivo secretion of TNF-alpha
during and after coronary artery bypass surgery. Eur J Anaesthesiol 2003; 20:380-4
ELLIS SG, HERTZER NR, YOUNG JR, et al. Angiographic correlates of cardiac death and myocardial infarction
complicating major non-thoracic vascular surgery. Am J Cardiol 1996; 77:1126-28
ELSASSER A, SCHLEPPER M, KLOVEKORN VP, et al. Hibernating myocardium: An incomplete adaptation to
ischemia. Circulation 1997; 96:2920-31
EPSTEIN SE, et al. Effects of beta-adrenergic blockade on the cardiac response to maximal and submaximal
exercise in man. J Clin Invest 1965; 44:1745-53
ESLER M, LAMBERT G, BRUNNER-LA ROCCA HP, et al. Sympathetic nerve activity and neurotransmitter
release in humans: translation from pathophysiology into clinical practice. Acta Physiol Scand 2003; 177:275-84
FAEHRENRICH JA, HILTON AK, HAYWARD KA, et al. Respiratory variations in transmitral flow velocity:
Effects of IPPV and changing tidal volume. Anesth Analg 1997; 84:SCA30(abstract)
FANG JC, DE MARCO T, GIVERTZ MM, et al. World Health Organization Pulmonary Hypertension Group 2:
Pulmonary hypertension due to left heart disease in the adult – a summary statement from the Pulmonary
Hypertension Council of the International Society for Heart and Lung Transplantation. J Heart Lung Transplant
2012; 31:913-33
FAROUQUE HMO. Effect of ATP-sensitive potassium channel inhibition on resting coronary vascular responses
in humans. Circ Res 2002; 90:231-6
FEIHL F, BROCCARD AF. Interactions between respiration and systemic hemodynamics. Part I: basic concepts.
Intensive Care Med 2009; 35:45-54
FEIHL F, BROCCARD AF. Interactions between respiration and systemic hemodynamics. Part II: practical
implications in critical care. Intensive Care Med 2009; 35:198-205
FELLAHI JL, GUEX X, RICHOMME X, et al. Short-and long-term prognostic value of ppostoperative cardiac
troponin I concentration in patients undergoing coronary artery bypass grafting. Anesthesiology 2003; 99:270-4
FENELEY MP, OLSEN CO, GLOWER DD, et al. Effect of acutely increased right ventricular afterload on work
output of the left ventricle in conscious dog. Circ Res 1989; 65:135-145
FINKEL E. The mitochondrion: is it central to apoptosis ? Science 2001; 292:624-6
FINKEL MS, ODDIS CV, JACOB TD, et al. Negative inotropic effects of cytokines on the heart mediated by
nitric oxide. Science 1992; 257:387-9
FISCHER LG, VAN AH, BURKLE H. Management of pulmonary hypertension: physiological and
pharmacological considerations for anesthesiologists. Anesth Analg 2003; 96:1603-16
FLU WJ, VAN KUJIK JP, HOEKS SE, et al. Prognostic implications of asymptomatic left ventricular dysfunction
in patients undergoing vascular surgery. Anesthesiology 2010; 112:1316-24
FOËX P, BICCARD B. Stunning, hibernation, preconditioning, postconditioning, and the effects of anesthetic
drugs. In: HOWELL S, et al, eds. Heart disease and the surgical patient. New York: Informa Healthcare 2007, 6386
FORLANI S, TOMAI F, De PAULIS R, et al. Preoperative shift from glibenclamide to insulin is cardioprotective
in diabetic patients undergoing coronary artery bypass surgery. J Cardiovasc Surg 2004; 45:117-2
FRÄSSDORF J, DE HERT S, SCHLACK W. Anaesthesia and myocardial ischaemia/reperfusion injury. Br J
Anaesth 2009; 103:89-98
FRAZIN LJ, McPHERSON DD, MEHLMAN DJ, CHANDRAN KB. Functional chiral asymmetry in the
descending thoracic aorta. Circulation 1990; 82:1985-94
FRIEDBERG MK, REDINGTON AN. Right versus left ventricular failure: differences, similarities, and
interactions. Circulation 2014; 129:1033-44
FRIEDERICH SO, LORELL BH, ROUSSEAU MF, et al. Intracardiac angiotensin-converting enzyme inhibition
improves diastolic function in patients with left ventricular hypertrophy due to aortic stenosis. Circulation 1994;
90:2761-71
FROSTELL C, BLOMQVIST H, HEDENSTIERNA G, et al. Inhaled nitric oxide selectively reverses human
hypoxic pulmonary vasoconstriction wuthout causing systemic vasodilatation. Anesthesiology 1993 78:427-435
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
213
128
129
130
131
132
133
133a
133b
134
135
135a
136
137
138
139
140
141
142
143
144
145
146
147
148
149
150
151
152
153
154
154a
155
156
FUCHS E MÜLLER MF, OSWALD H, et al. Cardiac rotation and relaxation in patients with chronic heart failure.
Eur J Heart Fail 2004; 6:715-22
FUCHS F, WANG YP. Sarcomere length versus interfilament spacing as determinant of cardiac myofilament Ca2+
sensitivity and Ca2+ binding. J Mol Cell Cardiol 1996; 28:1375-83
FUKUDA N, SAAKI D, ISHIVATA S, et al. Length dependence of tension generation in rat skinned cardiac
muscle. Circ Res 2001; 104:1639-45
FUSTER V, BADIMON L, BADIMON J, CHESEBRO JH. The pathogenesis of coronary artery disease and the
acute coronary syndromes. N Engl J Med 1992; 326:242-50
FUSTER V, BADIMON L, BADIMON J, CHESEBRO JH. The pathogenesis of coronary artery disease and the
acute coronary syndromes. N Engl J Med 1992; 326:310-18
FUSTER V, FAYAD ZA, BADIMON JJ. Acute coronary syndromes: biology. Lancet 1999; 353(suppl III):5-9
GAASCH WH, ZILE MR. Left ventricular structural remodeling in health and disease. J Am Coll Cardiol 2011;
58:1733-40
GALIE N, HOEPER MM, HUMBERT M, et al. Guidelines for the diagnosis and treatment of pulmonary
hypertension: the Task Force for Diagnosis and Treatment of Pulmonary Hypertension of the European Society of
Cardiology (ESC) and the European Respiratory Society (ERS), endorsed by the International Society of Heart and
Lung Transplantation (ISHLT). Eur Heart J 2009; 30:2493-537
GALLEY HF, WEBSTER NR. Physiology of the endothelium. Br J Anaesth 2004; 93:105-13
GANDEVIA SC, et al. Cardiovascular responses to static exercise in man: central and reflex contributions. J
Physiol 1990; 430:105-17
GARCIA C, JULIER K, BESTMANN L, et al. Preconditioning with sevoflurane decreases PECAM-1 expression
and improves one-year cardiovascular outcomes in coronary artery bypass graft surgery. Br J Anaesth 2005;
94:159-65
GEKIERE JP, VALAT P, GOSSE P, KABBANI Y, JANVIER G. Fonction diastolique ventriculaire gauche:
physiologie, physiopathologie, évaluation, moyens thérapeutiques, incidence en anesthésie. Ann Fr Anesth Réanim
1998; 17:319-39
GEYER H, CARACCIOLO G, ABE H, et al. Assessment of myocardial mechanics using speckle tracking
echocardiography: Fundamentals and clinical applications. J Am Soc Echocardiogr 2010; 23:351-69
GILBERT JC, GLANTZ SA. Determinants of left ventricular filling and of diastolic pressure-volume relation. Circ
Res 1989; 64:827-32
GIROUD D, LI JM, URBAN P, et al. Relation of the site of acute myocardial infarction to the most severe
coronary arterial stenosis at prior angiography. Am J Cardiol 1992; 69:729-32
GIVERTS MM, COLUCCI WS, BRAUNWALD E. Clinical aspects of heart failure. In:. ZIPES DP,
BRAUNWALD's Heart Disease, 7th edition. Philadephia : Elsevier - WB Saunders Co, 2005, 539-68
GLOWER DD, SPRATT JA, SNOW ND, et al. Linearity of the Frank-Starling relationship in the intact heart: the
concept of preload recruitable work. Circulation 1985; 71:994-1009
GORCSAN J, DENAULT A, MANDARINO WA, et al. Left ventricular pressure-volume relations with
transesophageal echocardiography automated border detection: comparison with conductance-catheter technique.
Am Heart J 1996; 131:544-52
GOTTLIEB S, KUKIN ML, AHERN D. Prognostic importance of atrial natriuretic peptide in patients with chronic
heart failure. J Am Clin Cardiol 1989; 10:437-44
GOULD KL. Coronary artery stenosis. New York, Elsevier 1991, p 8
GRAHAM RM, PEREZ DM, HWA J, et al. α-adrenergic receptor subtypes. Molecular structure, function and
signaling. Circ Res 1996; 78:737-49
GRANZIER HL, LABEIT S. The giant protein titin: a major player in myocardial mechanics, signaling and
disease. Circ Res 2004; 94:284-95
GREGG DE. Effect of coronary perfusion pressure or coronary flow on oxygen usage of the myocardium. Circ Res
1963; 13:497-500
GRIFFITH MJD, EVANS TW. Inhaled nitric oxide therapy in adults. N Engl J Med 2005; 353:2683-95
GROBAN L, BUTTERWORTH J. Perioperative management of chronic heart failure. Anesth Analg 2006;
103:557-75
GROSSMAN W. Diastolic dysfunction in congestive heart failure. N Engl J Med 1991; 325:1557-64
GROVES BMT, DROMA T, SUTTON JR, et al. Minimal hypoxic pulmonary hypertension in normal tibetans at
3’658 m. J Appl Physiol 1993; 74: 312-8
GROVES BMT, REEVES JT, SUTTON JR, et al. Operation Everest II: elevated high altitude pulmonaryresistence
unresponsive to oxygen. J Appl Physiol 1987; 63: 521-30
GUADANGNOLI E, HAUPTMAN PJ, AYANIAN JK. et al. Variation in the use of cardiac procedures after acute
myocardial infarction. N Engl J Med 1995; 333:573-8
GUARRACINO F, LANDONI G, TRITAPEPE L, et al. Myocardial damage prevented by volatile anaesthetics: A
multicenter randomized controlled study. J Cardiothorac Vasc Anesth 2006; 20:477-83
GUAZZI M, BORLAUG BA. Pulmonary hypertension due to left heart disease. Circulation 2012; 126:975-90
GUTH BD, et al. Time course and mechanisms of contractile dysfunction during acute myocardial ischemia.
Circulation 1993; 87(suppl IV):35-42
GUYTON AC, JONES CE, COLEMAN TG. Circulatory physiology: cardiac output and its regulation.
Philadelphia:Saunders, 1973
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
214
157
158
159
160
160a
161
162
162a
162c
162b
163
164
165
166
167
167a
168
169
170
171
172
173
174
174a
175
176
177
178
179
179a
180
181
182
HAAS F, JENNEN L, HEINZMANN U, et al. Ischemically compromised myocardium displays different timecourses of functional recovery: correlation with morphological alterations ? Eur J Cardiothorac Surg 2001; 20:2908
HABER I, METAXAS DN, GEVA T, AXEL L. Three-dimensional systolic kinematics of the right ventricle. Am J
Physiol Heart Circ Physiol 2005; 289:H1826-33
HADDAD F, COUTURE P, TOUSIGNANT C, DENAULT AY. The right ventricle in cardiac surgery, a
perioperative perspective: I. Anatomy, physiology and assessment. Anesth Analg 2009; 108:407-21
HADDAD F, DOYLE R, MURPHY DJ. HUNT SA. Right ventricular function in cardiovascular disease, Part II.
Pathophysiology, clinical importance and management of right ventricular failure. Circulation 2008; 117:1717-31
HAHN JY, SONG YB, KIM EK, et al. Ischemic postconditioning during primary percutaneous coronary
ontervention. The effects of postconditioning on myocardial reperfusion in patients with ST-segment elevation
myocardial infarction (POST) randomized trial. Circulation 2013; 128:1889-96
HAROUN-BIZRI S, KHOURY SS, CHEHAB IR, KASSAS CM, BARAKA A. Does isoflurane optimize
myocardial protection during cardiopulmonary bypass? J Cardiothorac Vasc Anesth 2001; 15: 418-21
HARRISON DG, BATES JN. The nitrovasodilators: new ideas about old drugs. Circulation 1993; 87:1461-7
HATTORI K, OZAKI Y, ISMAIL TF, et al. Impact of statin therapy on plaque characteristics as assessed by serial
OCT, grayscale and integrated backscatter-IVUS. JACC Cardiovasc Imaging 2012; 5:169-77
HAUSENLOY DJ, CANDILIO L, EVANS R, et al. Remote ischemic preconditioning and outcomes of cardiac
surgery. N Engl J Med 2015; 373:1408-17
HEAD BP, GRAHAM JB, SHABETAI R, LAI NC. Regulation of cardiac function in the horn shark by changes in
pericardial fluid volume mediated through the pericardioperitoneal canal. Fish Physiol Biochem 2001; 24:141-8
HEIN L, KOBILKA BK. Adrenergic receptors from molecular structure to in vivo function. Trends Cardiovasc
Med 1997; 7:137
HEIN S, et al. Progression from compensated hypertrophy to failure in the pressure-overloaded human heart.
Circulation 2003; 107:984-91
HELLE-VALLE T, CROSBY J, EDVARDSEN T, et al. New noninvasive method for assessment of left
ventricular rotation. Speckle tracking echocardiography. Circulation 2005; 112:3149-56
HENSON RE, SONG SK, PASTOREK JS, et al. Left ventricular torsion is equal in mice and humans. Am J
Physiol Heart Cric Physiol 2000; 278:H1117-H1123
HILL JA, OLSON EN. Cardiac plasticity. N Engl J Med 2008; 358:1370-80
HILLIS LD, SMITH PK, ANDERSON JL, et al. 2011 ACCF/AHA Guideline for coronary artery bypass graft
surgery: Executive summary. Anesth Analg 2012; 114:11-45
HOFFMAN JI, SPAAN JA. Pressure flow relations in coronary circulation. Physiol Rev 1990; 70:331-90
HOFFMEISTER HM, HELLER W, SEIPEL L. Activation markers of coagulation and fibrinolysis: alterations and
predictive value in acute coronary syndrome. Thromb Haemost 1999; 82:76-9
HOPKINS WE, OCHOA LL, RICHARDSON GW, TRULOCK EP. Comparison of the hemodynamics and
survival of adults with severe primary pulmonary hypertension or Eisenmenger syndrome. J Heart Lung Transplant
1996; 15:100-5
HUNT SA, ABRAHAM WT, CHIN MH, et al. 2009 focused update incorporated into the ACC/AHA 2005
Guidelines for the Diagnosis and Management of Heart Failure in Adults. Circulation 2009; 119:e391-e479
HUTFLESS R, KASANEGRA R, MADANI M, et al. Utility of B-type natriuretic peptide in predicting
postoperative complications and outcomes in patients undergoing heart surgery. J Am Coll Cardiol 2004; 43:18739
HUGHES JMB, GLAZIER JB, MALONEY JE, et al. Effect of lung volume on the distribution of pulmonary blood
flow in man. Resp Physiol 1968; 4:58-67
HWANG KC, GRAY CD, SWEET WE, et al. α1-adrenergic receptor coupling with Gh in the failing human heart.
Circulation 1996; 94:718-26
HYMEL BJ, TOWNSLEY MM. Echocardiographic assessment of systolic anterior motion of the mitral valve.
Anesth Analg 2014; 118:1197-201
IACCARINO G, et al. Reciprocal in vivo regulation of myocardial G-protein coupled receptor kinase expression by
β-adrenergic receptor stimulation and blockade. Circulation 1998; 98:1783-9
ICHINOSE F, ERANA-GARCIA J, HROMI J, et al. Nebulized sildenafil is a selective pulmonary vasodilator in
lambs with acute pulmonary hypertension. Crit Care Med 2001; 29: 1000-5
ICHINOSE F, ROBERTS JD, ZAPOL WR. Inhaled nitric oxide. A slective pulmonary vasodilator. Circulation
2004; 109: 3106-11
IRVING TC, KONHILAS J, PERRY D, et al. Myofilament lattice spacing as a function of sarcomere length in
isolated rat myocardium. Am J Physiol Heart Circ Physiol 2000; 279:H2568-73
IWASE M, BISHOP SP, UECHI M, et al. Adverse effects of chronic endogenous sympathetic drive induced by
cardiac Gsa overexpression. Circ Res 1996; 78:517-24
JAKOBSEN CJ, BERG H, HINDSHOLM KB, et al. The influence of propofol versus sevoflurane anesthesia on
outcome in 10’535 cardiac surgical procedures. J Cardiothorac Vasc Anesth 2007; 21:664-71
JAIN U, LAFLAMME CJA, AGGARWAL A, et al. Electrocardiographic and hemodynamic changes and their
association with myocardial infarction during coronary artery bypass surgery. Anesthesiology 1997; 86:576-91
JALIL JE, JANICKI JS, PICK R, et al. Fibrosis-induced reduction of endomyocardium in the rat after isoproterenol
treatment. Circ Res 1989; 65:258-64
JASON AC, CARTER C. Clinical relevance of the Bezold-Jarisch reflex. Anesthesiology 2003; 98:1250-60
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
215
182a
183
184
185
186
187
188
189
190
191
192
193
194
195
196
196a
197
197a
198
199
200
201
202
203
204
205
206
207
208
208a
209
210
210a
JENSEN B, NYENGAARD JR, PEDERSEN M, WANG T. Anatomy of the python heart. Anat Sci Int 2010;
84(4):194-203
JOHNS RA. Endothelium, anesthetics, and vascular control. Anesthesiology 1993; 79:1381-91
JOHNSTON WE, VINTEN-JOHANSEN J, SANTAMORE WP, et al. Mechanism of reduced cardiac output
during positive end-expiratory pressure in the dog. Am Rev Respir Dis 1989; 140:1257-64
JULIER K, DA SILVA R, GARCIA C, et al. Preconditioning by sevoflurane decreases biochemical markers for
myocardial and renal dysfunction in coronary artery bypass graft surgery. Anesthesiology 2003; 98:1315-27
KANEKO T, SAITO Y, HIKAWA Y, et al. Dose-dependent prophylactic effect of nicorandil, an ATP-sensitive
potassium channel opener, on intra-operative myocardial ischaemia in patients undergoing major abdominal
surgery. Br J Anaesth 2001; 86:332-7
KASS DA, MARINO P, MAUGHAN WL, et al. Determinants of end-systolic pressure-volume relations during
acute regional ischemia in situ. Circulation 1989; 80:1783-94
KATZ A.M. Influence of altered inotropy and lusitropy on ventricular pressure-volume loops. J Am Coll Cardiol
1988; 11:438-45
KAYE DM, LEFKOVITZ J, JENNINGS GL, et al. Adverse consequences of high sympathetic nervous activity in
the failing human heart. J Am Coll Cardiol 1995; 26:1257-63
KEHL F, KROLIKOWSKI JG, MRAOVIC B, et al. Is isoflurane-induced preconditioning dose related?
Anesthesiology 2002; 96: 675-80
KEHL F, KROLIKOWSKI JG, MRAOVIC B, et al. Hyperglycemia prevents isoflurane-induced preconditioning
against myocardial infarction. Anesthesiology 2002; 96:183-8
KEMP M, DONOVAN J, HIGHAM H, HOOPER J. Biochemical markers of myocardial injury. Br J Anaesth
2004; 93:63-73
KERBAUL F, RONDELET B, COLLART F, et al. Hypertension artérielle pulmonaire en anesthésie-réanimation.
Ann Fr Anesth Réa 2005; 24:528-40
KERN MJ. Coronary blood flow and myocardial ischemia. In: ZIPES DP, et al. Braunwald’s Heart disease. A
textbook of cardiovascular medicine. 7th edition Philadelphia: Elsevier Saunders, 2005, 1103-28
KERN MJ, SAMADY H. Current concepts of integrated coronary physiology in the catheterization laboratory. J
Am Coll Cardiol 2010; 55:173-85
KERSTEN JR, SCHMELING TJ, PAGEL PS, et al. Isoflurane mimics ischemic preconditioning via activation of
KATP channels. Anesthesiology 1997; 87:361-8
KEVIN LG, NOVALIJA E, STOWE DF. Reactive oxygen species as mediators of cardiac injury and protection:
The relevance to anesthesia practice. Anesth Analg 2005; 101:1275-87
KILNER PJ, YANG GZ, MOHIADDIN RH, et al. Helical and retrograde secondary flow patterns in the aortic arch
studied by three-directional magnetic resonance velocity mapping. Circulation 1993; 88:2235-47
KILNER PJ, YANG GZ, FIRMIN DN. Morphodynamics of flow through sinuous curvatures of the heart.
Biorheology 2002; 39(3-4): 409-17
KIM K, DUPUY PM, STANEK K, et el. A comparison of inhaled nitric oxide and halothane as a bronchodilator in
metacholine constricted guinea pigs. Anesthesiology 1992; 77:1225
KIMURA Y, et al. Phospholamban inhibitory function is activated by depolymerization. J Biol Chem 1997;
272:15061-4
KINOSHITA K, TSURUHARA Y, TOKUNAGA K. Delayed time to peak serum myoglobin level as an indicator
of cardiac dysfunction following open heart surgery. Chest 1991; 99:1398-403
KJELDSEN SE, et al. For the LIFE study group. Effects of losartan on cardiovascular morbidity and mortality in
patients with isolated systolic hypertension and left ventricular hypertrophy. JAMA 2002; 288:1492-8
KLOCKE FJ. Measurements of coronary blood flow and degree of stenosis: Current clinical implications and
continuing uncertainties. Newsl Council Clin Cardiol AHA 1982(3)
KLONER RA, et al. Consequences of brief ischemia: stunning, preconditioning, and their clinical implications.
Part 1. Circulation 2001; 104:2981-9
KNOLL R, HOSHIJIMA M, HOFFMAN HM, et al. The cardiac mechanical stretch sensor machinery involves a Z
disc complex that is defective in a subset of human dilated cardiomyopathy. Cell 2002; 111: 943-8
KOBILKA B. Molecular and cellular biology of adrenergic receptors. Trends Cardiovasc Med 1991; 1:189-94
KOLEV N, HUEMER G, ZIMPFER M. Transesophageal echocardiography. A new monitoring technique. Wien:
Springer Verlag 1995, 52
KONSTAM MA, UDELSON JE. Right heart failure. In: HOSENPUD JD, ed. Congestive heart failure.
Pathophysiology, diagnosis and comprehensive approach to management. New York : Springer Verlag, 1994, 25880
KOSS KL, KRANIAS EG. Phospholamban: a prominent regulator of myocardial contractility. Circ Res 1996;
79:1059-63
KOTTENBERG E, THIELMANN M, BERGMANN L, et al. Protection by remote ischemic preconditioning
during coronary artery bypass graft surgery with isoflurane but not propofol – a clinical trial. Acta Anaesthesiol
Scand 2012; 56:30-8
KOUREMBANAS S, MARSDEN PA, MCQUILLAN LP, FALLER DV. Hypoxia induces endothelin gene
expression and secretion in cultured human endothelium. J Clin Invest 1991; 88:1054-7
KUBO S.H., RECTOR T.S., BANK A.J. – Endothelium-dependent vasodilatation is attenuated in patients with
heart failure. Circulation 1991; 84:1589-92
KUMAR R, CHARONKO J, HUNDLEY WG, et al. Assessment of left ventricular diastolic function using 4dimensional phase-contrast cardiac magnetic resonance. J Comput Assist Tomogr 2011; 35:108-12
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
216
211
212
212a
212b
213
214
215
216
217
218
219
219a
219b
219c
220
221
222
223
224
225
226
227
228
228a
229
230
231
232
233
234
235
235a
236
237
KWAK YL, LEE CS, PARK YH, et al. The effect of phenylephrine and norepinephrine in patients with chronic
pulmonary hypertension. Anaesthesia 2002; 57:9-14
KYRIAKIDES ZS, KOLETTIS T, ANTONIADIS A, et al. Beta-adrenergic blockade decreases coronary collateral
blood flow in patients with coronary artery disease. Cardiovasc Drug Ther 1998; 12:551-9
LA GERCHE A, BURNS AT, MOONEY DJ, et al. Exercise-induced right ventricular dysfunction and structural
remodelling in endurance athletes. Eur Heart J 2012; 33:998-1006
LA GERCHE A, HEIDBUCHEL H. Can intensive exercise harm the heart ? You can get too much of a good thing.
Circulation 2014; 130:992-1002
LAKE CL. Extracorporeal circulation and circulatory assist devices in the pediatric patient. In: LAKE CL.
Pediatric cardiac anesthesia. Norwalk, Appleton & Lange 1993, 164-5
LANDESBERG G. The pathophysiology of perioperative myocardial infarction: Facts and perspectives. J
Cardiothorac Vasc Anesth 2003; 17:90-100
LANDESBERG G, LURIA MH, COTEV S. et al. Importance of long-duration postoperative ST-segment
depression in cardiac morbidity after vascular surgery. Lancet 1993; 341:715-9
LANDESBERG G, MOSSERI M, ZAHGER D, et al. Myocardial infarction following vascular surgery: The role
of prolonged, stress induced, ST-depression type ischemia. J Am Coll Cardiol 2001; 37:1839-45
LANDESBERG G, SHATZ V, AKOPNIK I, et al. Association of cardiac troponin, CK-MB, and postoperative
myocardial ischemia with long-term survival after major vascular surgery. J Am Coll Cardiol 2003; 42:1547-54
LANDONI G, BIONDI-ZOCCAI GGL, ZANGRILLO A, et al. Desflurane and sevoflurane in cardiac surgery: A
meta-analysis of randomized clinical rials. J Cardiothorac Vasc Anesth 2007; 21:502-11
LANG RM, BOROW KM, NEUMAN A. Systemic vascular resistance: An unreliable index of left ventricular
afterload. Circulation 1986; 74:1114-8
LANKHAAR JW, WESTERHOF N, FAES TJC, et al. Quantification of right ventricular afterload in patients with
and without pulmonary hypertension. Am J Physiol Heart Circ Physiol 2006; 291:H1731-H1737
LANKHAAR JW, WESTERHOF N, FAES TJC, et al. Pulmonary vascular resistance and compliance stay
inversely related during treatment of pulmonary hypertension. Eur Heart J 2008; 29:1688-95
LAU EMT, MANES A, CELERMAJER DS, GALIE N. Early detection of pulmonary vascular disease in
pulmonary arterial hypertension: time to move forward. Eur Heart J 2011; 32:2489-98
LAVERS C. Why elephants have big ears ? London:Phoenix, 2003
LAWSON CS, DOWNEY JM. Preconditioning: State of the art myocardial protection. Cardiovasc Res 1993;
27:542-50
LEE TH, MARCANTONIO ER, MANGIONE CM, et al. Derivation and prospective validation of a simple index
for prediction of cardiac risk of major noncardiac surgery. Circulation 1999; 100:1043-9
LEFEBVRE XP, HE S, LEVINE RA, YOGANATHAN AP. Systolic anterior motion of the mitral valve in
hypertrophic cardiomyopathy: an in vitro pulsatile flow study. J Heart Valve Dis 1995; 4:422
LE MANACH Y, PERREL A, CORIAT P, et al. Early and delayed myocardial infarction after abdominal aortic
surgery. Anesthesiology 2005; 102: 885-91
LEUNG JM, HOLLENBERG M, O'KELLY BF, et al. Effects of steal-prone anatomy on intraoperative myocardial
ischemia. The SPI Research Group. J Am Coll Cardiol 1992; 20:1205-12
LEUNG JM, O'KELLY B, BROWNER WS, et al. Prognostic importance of postbypass regional wall motion
abnormalities in patients undergoing CABG surgery. Anesthesiology 1989; 71:16-23
LEVICK JR. An introduction to cardiovascular physiology. Oxford: Butterworth-Heinemann, 1995, 116-7
LEVICK JR. An introduction to cardiovascular physiology. 2nd edition. Oxford, Butterworth-Heinemann, 1995,
255-75
LIBBY P. Mechanisms of acute coronary syndromes and their implications for therapy. N Engl J Med 2013;
368:2004-13
LIBBY P, THEROUX P. Pathophysiology of coronary artery disease. Circulation 2005; 111:3481-8
LORENZ CH, PASTOREK JS, BUNDY JM. Delineation of normal human left ventricular twist throughout systole
by tagged cine magnetic resonance imaging. J Cardiovasc Magn Reson 2000; 2:97-108
LOWES BD, TSEVTKOVA T, EICHHORN EJ, et al. Milrinone versus dobutamine in heart failure subjects treated
chronically with carvedilol. Int J Cardiol 2001; 81:141-9
LUDWIG LM, PATEL HH, GROSS GJ, et al. Morphine enhances pharmacological preconditioning by isoflurane.
Anesthesiology 2003; 98:705-11
MAGDER S. Point/Couterpoint: The classical Guyton view that mean systemic pressure, right atrial pressure, and
venous resistance govern venous return is/is not correct, J Appl Physiol 2006; 101:1523-7
MAGGIORINI M. Cardiopulmonary interactions at high altitude. Pulmonary hypertension as a common
denominator. In: ROACH RC, ed. Hypoxia:through the lifecycle. New York: Kluwer Academic / Plenum
Publisher, 2003
MAGNER JJ, ROYSTON D. Heart Failure. Br J Anaesth 2004; 93:74-85
MAHAPATRA S, NISHIMURA RA, SORAJJA P, et al. Relationship of pulmonary arterial capacitance and
mortality in idiopathic pulmonary arterial hypertension. J Am Coll Cardiol 2006; 47:799-803
MAIER SE, FISCHER SE, McKINNON GC, et al. Evaluation of left ventricular segmental wall motion in
hypertrophic cardiomyopathy with myocardial tagging. Circulation 1992; 86:1919-28
MALCONIAN MK, ROCK PB, REEVES JT, et al. Operation Everest II: gaz tensions in expired air and arterial
blood at extreme altitude. Aviat Space Environ Med 1993; 64:37-42
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
217
238
239
240
241
242
243
244
245
246
247
248
248a
249
249a
250
251
252
253
254
254a
255
256
257
258
259
260
261
262
263
264
265
265a
266
267
MANGANO DT, BROWNER WS, HOLLENBERG M, et al. Association of perioperative myocardial ischemia
with cardiac morbidity and mortality in men undergoing noncardiac surgery. The study of Perioperative Ischemia
Research Group. N Engl J Med 1990; 323:1781-8
MARCUS JT, VONK NA, ROELEVEDL RJ, et al. Impaired left ventricular filling due to right ventricular
pressure overload in primary pulmonary hypertension. Chest 2001; 119:1761-5
MARIAN AJ. On genetics of dilated cardiomyopathy and transgenic models. All is not crystal clear in myopathic
hearts. Circ Res 2001; 89:3-5
MARINI CE, LODATO RF, GUTTIEREZ G. Cardiopulmonary interactions in the cardiac patient in the Intensive
Care Unit. Critical Care Clin 1989; 5:533-49
MARKS AR, REIKEN S, MARX SO. Progression of heart failure. Is protein kinase a hyperphosphorylation of the
ryanodine receptor a contributing factor ? Circulation 2002; 105:272-5
MARTIN SE, LENHARD SD, SCHMARKEY LS, et al. Adenosine regulates coronary blood flow during
increased work ands decreased supply. Am J Physiol 1993; 264:H1438-46
MASERI A, FUSTER V. Is there a vulnerable plaque ? Circulation 2003; 107:2068-71
MASUMOTO A, HIROOKA Y, HIRONAGA K, et al. Effect of pravastatin on endothelial function in patients
with coronary artery disease (cholesterol-independent effect of pravastatin). Am J Cardiol 2001; 88:1291-4
MAUBAN JRH, REMILLARD CV, YUAN JXJ. Hypoxic pulmonary vasoconstriction: role of ion channels. J
Appl Physiol 2005; 98:415-20
MAUGHAN WL, SUNAGAWA K, BURKOFF D, et al. Effect of heart rate on the canine end-systolic pressurevolume relationship. Circulation 1985; 72 (3):654-9
MAURIELLO A, SANGIORGI C, FRATONI S, et al. Diffuse and active inflammation occurs in both vulnerable
and stable plaques of the entire coronary tree: a hisopathological study of patients dying of acute myocardial
infarction. J Am Coll Cardiol 2005; 45:1585-93
McLAUGHLIN W, ARCHER SL, BADESCH DB et al. ACC/AHA 2009 expert consensus document on
pulmonary hypertension : A report of the American College of Cardiology Foundation Task Force on expert
consensus documents and the American Heart Association. Circulation 2009; 119:2250-94
McMURRAY JJV. Systolic heart failure. N Engl J Med 2010; 362:228-38
McMURRAY JJ, ADAMOPOULOS S, ANKER SD, et al. ESC Guidelines for the diagnosis and treatment of acute
and chronic heart Failure. Eur Heart J 2012; 14:803-69
McNEE W. Pathophysiology of cor pulmonale in chronic obstructive pulmonary disease. Part one. Am J Respir
Crit Care Med 1994; 150:833-52
MEIER P, ZBINDEN R, TOGNI M, et al. Coronary collateral function long after drug-eluting stent implantation. J
Am Coll Cardiol 2007; 49: 15-20
MEIJBURG HWJ, VISSER CA, WESENHAGEN H, et al Transesophageal pulsed Doppler echocardiographic
evaluation of transmitral and transpulmonary venous flow during ventilation with positive end-expiratory pressure.
J Cardiothor Vasc Anesth 1994; 8:386-91
MERIN RG. Anesthesia and the coronary circulation. Adv Anesth 1989; 6:195-218
MERX MW. Myoglobin facilitates oxygen diffusion. FASEB J 2001; 15:1077-9
MEYBOHM P, BEIN B, BROSTEANU O, et al. A multicenter trial of remote ischemic preconditioning for heart
surgery. N Engl J Med 2015; 373:1397-407
MEYER KC, LOVE RB, ZIMMERMANN JJ. The therapeutic potential of nitric oxide in lung transplantation.
Chest 1998; 113:1360-71
MICHARD F. Changes in arterial pressure during mechanical ventilation. Anesthesiology 2005; 103:419-28
MICHEL T, KRAMER BK, KELLY RA. Endothelial cell-derived vasoactive and inotropic paracrine factors. In:
GWATHMEY JK, Ed. Heart Failure: Basic sciences and clinical aspects, 1993
MIGRINO RQ, YOUNG JB, ELLIS SG, et al. End-systolic volume index at 90 and 180 minutes into reperfusion
therapy for acute myocardial infarction is a strong predictor of early and late mortality. The GUSTO-I
Investigators. Circulation 1997; 96:116-21
MIYASHIRO JK, FEIGL EO. Feed forward control of coronary blood flow via coronary β-receptor stimulation.
Circ Res 1993; 73:252-63
MOHSENIFAR Z, AMIN D, JASPER AC, et al. Dependance of oxygen consumption on oxygen delivery in
patients with chronic congestive heart failure. Chest 1987; 92:447-50
MOISES VA, MESQUITA CB, CAMPOS O, et al. Importance of intraoperative
transesophageal
echocardiography during coronary artery surgery without cardiopulmonary bypass. J Am Soc Echocardiogr 1998;
11:1139-44
MONCADA S, et al. Does nitric oxide modulate mitochondrial energy generation and apoptosis ? Nat Rev 2002;
3:214-20
MONCADA S, PALMER R, HIGGS E. Nitric oxide: physiology, pathophysiology and pharmacology.
Pharmacological Review 1991; 43:109-42
MONROE RG, GAMBLE WJ, LAFARGE CG. The Anrep effect reconsidered. J Clin Invest 1972; 51:2573-8
MOORE TD, et al. Ventricular interaction and external constraint account for decreased stroke work during volume
loading in CHF. Am J Physiol 2001; 281:H2385-H2391
MOORMAN AFM, CHRISTOFFELS VM. Cardiac chamber formation: development, genes, and evolution.
Physiol Rev 2003; 83:1223-67
MORANO I. Tuning smooth muscle contraction by molecular motors. J Mol Med 2003; 81:481-7
MORRIS-THURGOOD JA, FRENNEAUX MP. Diastolic ventricular interaction and ventricular diastolic filling.
Heart Fail Rev 2000; 5:307-23
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
218
268
269
270
371
272
273
274
275
276
276a
277
278
279
280
281
282
283
284
285
286
287
288
289
290
291
292
293
294
294a
295
296
297
297a
298
MOTZ W, VOGT M, RABENAU O, et al. Evidence of endothellial dyfunction in coronary resistance vessels in
patients with angina pectoris and nornal coronary angiogram. Am J Cardiol 1991; 68:996-1003
MOUDGIL R, MICHELAKIS ED, ARCHER SL. Hypoxic pulmonary vasoconstriction. J Appl Physiol 2005; 98:
390-403
MUELLER XM, CHASSOT PG, ZHOU J, et al. Hemodynamics optimization during off-pump coronary artery
bypass: the “no compression” technique. Eur J Cardiothorac Surg 2002; 22:249-54
MULLENHEIM J, FRADORF J, PRECKEL B, VOLKER T, SCHLACK W. Ketamine, but not S(+)-ketamine,
blocks ischemic preconditioning in rabbitt hearts in vivo. Anesthesiology 2001; 94:630-6
MÜNCH G, et al. SERCA 2a activity correlates with force-frequency relationship in human myocardium. Am J
Physiol 2000; 278:H1924-H1932
MUNCH-ELLINGSEN JA, GROVER GJ, GROSS GJ. Blockade of KATP channel by glibenclamide aggravates
ischemic injury and counteracts ischemic preconditionning. Basic Res Cardiol 1996; 91:382-53
MUNT B, JUE J, GIN K, et al. Diastolic filling in human severe sepsis: an echocardiographic study. Crit Care Med
1998; 26:1829-33
MURGO JP, WESTERHOF N. Arterial reflections and pressure waveforms in humans. In: YIN FCP, ed.
Ventricular/vascular coupling. Clinical, physiological and engineering aspects. New York: Springer Verlag, 1987,
140-58
MURRY CE, JENNINGS RB, REIMER KA. Preconditionning with ischemia: A delay of lethal cell injury in
ischemic myocardium. Circulation 1986; 74:1124-36
MUSTAFA HI, FESSEL JP, BARWISE J, et al. Dysautonomia. Anesthesiology 2012; 116:205-15
NABEL EG, SELWYN AP, GANZ P. Paradoxical narrowing of atherosclerotic coronary arteries induced by
increases in heart rate. Circulation 1990; 81:850-9
NAGHAVI M, LIBBY P, FALK E, et al. From vulnerable plaque to vulnerable patient. A call for new definitions
and risk assessment strategies. Part I. Circulation 2003; 108:1664-72
NAGHAVI M, LIBBY P, FALK E, et al. From vulnerable plaque to vulnerable patient. A call for new definitions
and risk assessment strategies. Part II. Circulation 2003; 108:1772-8
NALYSNYK L, FAHRBACH K, REYNOLDS MW, ZHAO SZ, ROSS S. Adverse events in coronary artery
bypass graft (CABG) trials: a systematic review and analysis. Heart 2003; 89:767-72
NASHEF SAM, ROQUES F, MICHEL P, et al. European system for cardiac operative risk evaluation
(EuroSCORE). Eur J Cardiothorac Surg 1999; 16:9-13
NATHAN HJM. Coronary physiology. In: KAPLAN JA ed. Cardiac anesthesia. Philadelphia, WB Saunders 1993,
235-60
NICCOLI G, BURZOTTA F, GALIUTO L. Myocardial no-reflow in humans. J Am Coll Cardiol 2009; 54:281-92
NISHIMURA RA, HOUSMANS PR, HATLE LK, TAJIK AJ. Assessment of diastolic function of the heart:
Background and current application of Doppler echocardiography. Part I: physiologic and pathophysiologic
features. Mayo Clin Proc 1989; 64:71-81
NISHIMURA RA, HOUSMANS PR, HATLE LK, TAJIK AJ. Assessment of diastolic function of the heart:
Background and current application of Doppler echocardiography. Part II: clinical studies. Mayo Clin Proc 1989;
64:181-204
NOHRIA A, LEWIS E, STEVENSON LW. Medical management of advanced heart failure. JAMA 2002; 287:62840
OECHSLIN E. Eisenmenger's syndrome. In: Gatzoulis MA, Webb GD, Daubeney PEF, Eds. Diagnosis and
management of adult congenital heart disease. Edinburgh, Churchill Livingstone 2003, pp 363-77
OH JK, HATLE LK, SEWARD JB, et al. Diagnostic role of Doppler echocardiography in constrictive pericarditis.
J Am Coll Cardiol 1994; 23:154-62
OLIVETTI G, MELISSARI M, CAPASSO JM, et al. Cardiomyopathy of the aging human heart. Myocyte loss and
reactive cellular hypertrophy. Circ Res 1991; 68:1560-8
OPIE LH. Heart Physiology. From cell to circulation. Philadelphia: Lippincott-Williams & Wilkins, 2004, 648 pp
O’ROURKE MF, SAFAR ME. Relationship between aortic stiffening and microvascular disease in brain and
kidney. Cause and logic of therapy. Hypertension 2005; 46:200-4
O’ROURKE MF, YAGINUMA T. Wave reflections and the arterial pulse. Arch Int Med 1984; 144:366-71
O'ROURKE MF, YAGINUMA T, AVOLIO AP. Physiological and pathophysiological implications of
ventricular/vascular coupling. Ann Biomed Eng 1984; 12:119-34
PACKER M, COATS AJS, FOWLER MB, et al. Effect of carvedilol on survival in severe chronic heart failure. N
Engl J Med 2001; 344:1651-8
PAGEL PS. Myocardial protection by volatile anesthetics in patients undergoing cardiac surgery: A critical review
of the laboratory and clinical evidence. J Cardiothorac Vasc Anesth 2013; 27:972-82
PAGEL PS, GROSSMANN W, HAERING M, WARLTIER DC. Left ventricular diastolic function in the normal
and diseaesed heart. Anesthesiology 1993; 79:836-54 (Part I) et 79:1104-20 (Part II)
PALEVSKY HI, SCHLOO BL, PIETRA CC, et al. Primary pulmonary hypertension: Vascular structure,
morphometry, and responsiveness to vasodilator agents. Circulation 1989; 80:1207-21
PATTERSON DJ. Nitric oxide and the autonomic regulation of cardiac excitability. Exp Physiol 2001; 86:1-9
PAULUS WJ, TSCHÖPE C. A novel paradigm for heart failure with preserved ejection fraction. J Am Coll Cardiol
2013; 62:263-71
PAULUS WJ, TSCHÖPE C, SANDERSON JE, et al. How to diagnose diastolic heart failure: A consensus
statement on the diagnosis of heart failure with normal left ventricular ejection fraction by the Heart Failure and
Echocardiographic Associations of the European Society of Cardiology. Eur Heart J 2007; 28:2539-50
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
219
299
299a
300
301
302
303
304
305
306
307
307a
308
309
310
311
312
313
314
315
316
317
318
319
320
321
322
323
324
325
326
327
328
329
330
331
PEARSON PJ, LIN PJ, SCHAFF HV. Production of endothelium-derived contracting factor is enhanced after
coronary reperfusion. Ann Thorac Surg 1991; 51:788-93
PEDRIZZETTI G, LA CANNA G, ALFIERI O, TONTI G. The vortex – an early predictor of cardiovascular
outcome ? Nat Rev Cardiol 2014; 11:545-53
PEPPER MS. Manipulating angiogenesis: from basic science to the bedside. Arterioscl Thromb Vasc Biol 1997;
17:605-19
PETERS J, KINDRED MK, ROBOTHAM JL. Transient analysis of cardiopulmonary interactions. I. Diastolic
events. J Appl Phsiol 1988; 64:1506-617
PETERS J, KINDRED MK, ROBOTHAM JL. Transient analysis of cardiopulmonary interactions. II. Systolic
events. J Appl Phsiol 1988; 64:1518-26
PETTERSEN E, HELLE-VALLE T, EDVARDSEN T, et al. Contraction pattern of the systemic right ventricle. J
Am Coll cardiol 2007; 49:2450-6
PIJLS NH, BECH GJ, EL GAMAL MI, et al. Quantification of recruitable coronary collateral blood flow in
conscious humans and its potential to predict future ischemic events. J Am Coll Cardiol 1995; 25;1522-8
PINSKY MR. Cardiovascular issues in respiratory care. Chest 2005; 128:592S-7S
PINSKY DJ, PATTON S, MESAROS S, et al. Mechanical transduction of nitric oxide synthesis in the beating
heart. Circ Res 1997; 81:372-6
PIRIOU V, CHIARI P, KNEZYNSKI S, et al. Prevention of isoflurane-induced preconditioning by 5hydroxydecanoate Gadolinium. Anesthesiology 2000; 93:756-64
PIRIOU V, MANTZ J, GOLDFARB G, et al. Sevoflurane preconditioning at 1 MAC only provides limited
protection in patients undergoing coronary artery bypass surgery: a randomised bi-centre trial. Br J Anaesth 2007;
99:624-31
PITT B, ZANNAD F, REMME WJ, et al. The effect of spironolactone on morbidity and mortality in patients with
severe heart failure. N Engl J Med 1999; 341:709-17
POLAERT JIT, VISSER CA, EVERAERT JA, et al. Doppler evaluation of right ventricular outflow impedance
during positive-pressure ventilation. J Cardiothor Vasc Anesth 1994; 8:392-97
POLDERMANS D, BOERSMA E BAX JJ, et al. Correlation of location of acute myocardial infarct after noncardiac vascular surgery with preoperative dobutamine echocardiographic findings. Am J Cardiol 2001; 88:1413-4
PORT JD, BRISTOW MR. Altered beta-adrenergic receptor gene regulation and signalling in chronic heart failure.
J Mol Cell Cardiol 2001; 33:887-905
POST SR, HAMMOND HK, INSEL PA. β-adrenergic receptors and receptor signalling in heart failure. Annu Rev
Pharmacol Toxicol 1999; 39:343-60
PRASAD A, STONE GW, HOLMES DR, GERSH B. Reperfusion injury, microvascular dysfunction, and
cardioprotection. Circulation 2009; 120:2105-12
PRATT PF, WANG C, WEIHRAUCH D, et al. Cardioprotection by volatile anesthetics: new applications for old
drugs ? Curr Opin Anesthesiol 2006; 19:397-403
PREISMAN S, KOGAN S, BERKENSTADT H, PEREL A. Predicting fluid responsiveness in patients undergoing
cardiac surgery: functional haemodynamic parameters including the Respiratory Systolic Variation Test and static
preload indicators. Br J Anaesth 2005; 95:746-55
PRIEBE HJ. Triggers of perioperative myocardial ischemia and infarction. Brit J Anaesthesiol 2004; 93:9-20
PRIEBE HJ. – Mechanisms of perioperative myocardial injury. In: HOWELL S, et al, eds. Heart disease and the
surgical patient. New York: Informa Healthcare 2007, 39-61
RABINOVITCH M, HAWORTH SG, CASTANEDA AR, et al. Lung biopsy in congenital heart disease: a
morphometric approach to pulmonary vascular disease. Circulation 1978; 58:1007-22
RAHIMTOOLA SH. The hibernating myocardium. Am Heart J 1989; 117:211-21
RAMAKRISHNA G, SPRUNG J, RAVI BS, et al. Impact of pulmonary hypertension on the outcomes of
noncardiac surgery: predictors of perioperative morbidity and mortality. J Am Coll Cardiol 2005; 45:1691-9
RAPP HJ, RABETHGE S, LUIZ T, et al. Perioperative ST-segment depression and troponin T release.
Identification of patients with highest risk for myocardial damage. Acta Anaesthesiol Scand 1999; 43:124-9
REDWOOD CS, et al. Properties of mutant contractile proteins that cause hypertrophic cardiomyopathy.
Cardiovasc Res 1999; 44:20-36
REIZ S, BALFORS E, SORENSEN MB, et al. Isoflurane: A powerful coronary vasodilator in patients with
coronary artery disease. Anesthesiology 1983; 59:91-7
REMILLARD CV, YUAN JX. High altitude pulmonary hypertension: role of K” and Ca2+ channels. High Alt Biol
Med 2005; 6:133-46
RICH S, ed. Primary pulmonary hypertension: Executive summary from the World Symposium – Primary
pulmonary hypertension 1998. http//www.who.int/ncd/cvd/pph.html
RICH GF, JOHNS RA. Nitric oxide and the pulmonary circulation. Advances in Anaesthesia 1994; 11:1-25
RICH S, McLAUGHLIN VV. Pulmonary hypertension. In: ZIPES DP, et al, eds. Braunwald’s heart disease. A
textbook of cardiovascular medicine. Philadelphia: Elsevier Saunders, 2005, 1807-42
RICHALET JP, GRATADOUR P, ROBACH P, et al. Sildenafil inhibits altitude-induced hypoxemia and
pulmonary hypertension. Am J Resp Crit Care Med 2004; 171:275-81
RIDKER PM, RIFAI N, ROSE L, et al. Comparison of C-reactive protein and low-density lipoprotein cholesterol
levels in the prediciton of first cardiovascular events. N Engl J Med 2002; 347:1557-65
RITTER O, et al. Calcineurin in human heart hypertrophy. Circulation 2002; 105:265-9
ROBERTSON D, HOLLISTER AS, FORMAN MB, et al. Reflexes unique to myocardial ischaemia and infarction.
J Am Coll Cardiol 1985; 5:99-104
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
220
332
333
334
335
336
337
338
339
340
341
342
343
344
345
346
347
348
349
350
351
352
353
354
355
356
357
358
359
359a
360
361
362
363
363a
364
ROBOTHAM JL. Cardio-pulmonary interactions: new insights, new directions. In SRLF - Les interactions cardiopulmonaires. Paris : Arnette, 1994, 159-67
ROBOTHAM JL, SCHARF SM. Effects of positive and negative pressure ventilation on cardiac performance.
Clinics in Chest Medicine 1983; 4:161-87
ROBOTHAM JL, TAKATA M, BERMAN M, et al. Ejection fraction revisited. Anesthesiology 1991; 74:172-83
ROSS R. Atherosclerosis – an inflammatory disease. N Engl J Med 1999: 340:115-26
ROSS S, FOEX P. Protective effects of anaesthetics in reversible and irreversible ischaemia-reperfusion injury. Br
J Anaesth 1999; 82(4):622-32
ROSSAINT R, FALKE KJ, LOPEZ F, et al. Inhaled nitric oxide in adult respiratory distress syndrome. N Engl J
Med 1993; 228:399-405
ROTH DM, GAO MH, LAI C, et al. Cardiac-detected adenyl cyclase expression improves heart function in murine
cardiomyopathy. Circulation 1999; 99: 3099-104
ROWELL LB, BRENGELMANN GL, BLACKMON JR, et al. Disparities between aortic and peripheral pulse
pressures induced by upright exercise and vasomotor changes in man. Circulation 1968; 37:954-64
RUBANYI G, ROMERO J, VANHOUTTE P. Flow-induced release of endothelium-derived relaxing factor. Am J
Physiol 1986; 250:H1145-H1149
SAGAWA K, MAUGHAN L, SUGA H, et al. Cardiac contraction and the pressure-volume relationship. New
York, Oxford University Press, 1988
SAITO S, MIZUMURA T, TAKAYAMA T, et al. Antiischemic effects of nicorandil during coronary angioplasty
in humans. Cardiovasc Drug Ther 1995; 9(suppl 2):257-63
SAKAI S, MIYAUCHI T, KOBAYASHI M, et al. Inhibition of myocardial endothelin pathway improves longterm survival in heart failure. Nature 1996; 384:353-5
SANTAMORE WP, GRAY L. Significant left ventricular contributions to right ventricular function. Mechanisms
and clinical implications. Chest 1995; 107:1134-45
SARTORI C, ALLEMANN Y, SCHERRER U. Pathogenesis of pulmonary edema: Learning from high-altitude
pulmonary edema. Resp Physiol Neurobiol 2007; 159:338-49
SCHIFFRIN EL. Endothelin: potential role in hypertension and vascular hypetrophy. Hypertension 1995; 25:113543
SCHARHAG J, et al. Athlete’s heart. Right and left ventricular mass and function in male endurance athletes and
untrained individuals deterrmined by magnetic resonance imaging. J Am Coll Cardiol 2002; 40:1856-63
SCHMIDT C, HINDER F, VAN AKEN H. Global left ventricular systolic function. In: POELAERT J, Skarvan K.
Transoesophageal echocardiography in anaesthesia and intensive care medicine. London: BMJ Books, 2004, 62
SCHMIDT-NIELSEN K. Animal physiology. Adaptation and environment. 5th edition. Cambridge, Cambridge
University Press, 2002, 91-125
SCHUMACKER PT, SAMSEL RW. Oxygen delivery and uptake by peripheral tissues: physiology and
pathophysiology. Critical Care Clinics 1989; 5:255-69
SCHUSTER DP, CROUCH EC, PARKS WC, et al. Angiotensin converting enzyme expression in primary
pulmonary hypertension, Am J Respir Crit Care Med 1996; 154:1087
SEARS CE, et al. Cardiac neuronal nitric oxide synthase isoform regulates myocardial contraction and calcium
handling. Circ Res 2003; 92:e57-e59
SELWYN AP, KINLAY S, CREAGER M, et al. Cell dysfunction in atherosclerosis and the ischemic
manifestations of coronary artery disease. Am J Cardiol 1997; 79:17-23
SENGUPTA PP. Exploring left ventricular isovolumic shortening and stretch mechanics : « The heart has its
reasons… » J Am Coll Cardiol Img 2009; 2:212-5
SENGUPTA PP, KORINEK J, BELOHLAVEK M, et al. Left ventricular structure and function. Basic science for
cardiac imaging. J Am Coll Cardiol 2006; 48:1988-2001
SENGUPTA PP, KRISHNAMOORTHY VK, KORINEK J, et al. Left ventricular form and function revisited:
Applied translational science to cardiovascular ultrasound imaging. J Am Soc Echocardiogr 2007; 20:539-51
SENGUPTA PP, NARULA J. Reclassifying heart failure : Predominantly subendocardial, subepicardial and
transmural. Heart Failure Clin 2008 ; 4 :379-82
SENGUPTA PP, TAJIK AJ, CHANDRASEKARAN K, KHANDHEIRIA BK. Twist mechanics of the left
ventricle. Principles and application. J Am Coll Cardiol Img 2008; 1:366-76
SESSO HD, et al. Physical activity and coronary artery disease in man. Circulation 2000; 102:975-80
SHADWICK RE. Mechanical design in arteries. J Experiment Biol 1999; 202:3305-13
SHAN R, BICK RJ, POINTDEXTER DJ, et al. Altered adrenergic receptor density in myocardial hibernation in
humans: A possible mechanism of depressed myocardial function. Circulation 2000; 102:2599-606
SHAPIRO BP, CHEN HH, BURNETT JC, et al. Use of brain natriuretic peptide to aid in the diagnosis of heart
failure. Mayo Clin Proc 2003; 78:481-6
SHIBUTANI T, KOMATSU T, KUBAL K, et al. Critical level of oxygen delivery in anesthetized man. Crit Care
Med 1983; 11:640-3
SIGG DC, COLES JA, GALLAGHER WJ, et al. Opioid preconditioning: Myocardial function and energy
metabolism. Ann Thorac Surg 2001; 72:1576-82
SIMÕES-COSTA MS, VASCONCELOS M, SAMPAIO AC, et al. The evolutionary origin of cardiac chambers.
Develop Biol 2005; 277:1-15
SIMONEAU G, ROBBINS IM, BEGHETTI M, et al. Updated clinical classification of pulmonary hypertension. J
Am Coll Cardiol 2009; 54:S43-S54
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
221
364a
365
365a
366
367
368
369
370
371
372
373
374
375
376
376a
377
378
379
380
381
382
383
383a
384
385
386
387
388
389
390
390a
390b
390c
391
SIMONEAU G, GATZOULIS MA, ADAIA I,, et al. Updated clinical classification of pulmonary hypertension. J
Am Coll Cardiol 2013; 62:S34-D41
SKARVAN K. Ventricular performance. In: PRIEBE HJ, ed. Cardiovascular physiology. London, BMJ books,
1995, 25-61
SLÁMA K. A new look at the comparative physiology of insect and human hearts. J Insect Physiol 2012; 58:107281
SLAUGHTER MS, ROGERS JG, MILANO CA, et al. Advanced heart failure treated with continuous-flow left
ventricular assist device. N Engl J Med 2009; 361:2241-51
SMITH TP, CANTY JM. Modulation of coronary autoregulatory responses by nitric oxide. Evidence for flow
dependent resistance adjustments in conscious dogs. Circulation 1993; 73:232-40
SMITH VE, KATZ AM. Inotropic end lusitropic abnormalities in the genesis of heart failure. Eur Heart J 1983;
4(Suppl A):A7-17
SMITH VE, SCHULMAN P, KARIMEDDINI MK, et al. Rapid ventricular filling in left ventricular hypertrophy:
II: Pathologic hypertrophy. J Am Coll Cardiol 1985; 5:869-74
SNIECINSKI R, LIU H. Reduced efficacy of volatile anesthetic presconditioning with advanced age in isolated rat
myocardium. Anesthesiology 2004; 100:589-97
SOLARO RJ. Modulation of cardiac myofilament activity by protein phosphorylation. In: PAGE E, et al, eds.
Handbook of physiology. Section 2: the cardiovascular system. New York Oxford University Press, 2002, 264-300
SOLARO RJ, RARICK HM. Troponin and tropomyosin: Proteins that switch on and tune in the activity of cardiac
myofilaments. Circ Res 1998; 83: 471-6
SOWERS JR. Hypertension, angiotensin II and oxidative stress. N Engl J Med 2002; 346:1999-2001
SPAHN DR, CHASSOT PG. Con. Fluid restriction for cardiac patients during major noncardiac surgery should be
replaced by goal-directed intravascular fluid administration. Anesth Analg 2006; 102:344-6
SPOTNITZ HM. Macro design, structure and mechanics of the left ventricle. J Thorac Cardiuovasc Surg 2000;
119:1053-77
STALCUP SA, MELLINS RB. Mechanical forces producing pulmonary edema in acute asthma. N Engl J Med
1977; 297:592-6
STEVENS GR, GARCIA-ALVAREZ A, SAHNI S, et al. RV dysfunction in pulmonary hypertension is
independently related to pulmonary artery stiffness. JACC Cardiovasc Inaging 2012; 5: 378-87
STRAUER BE. Left ventricular dynamics, energetics and coronary hemodynamics in hypertrophied heart disease.
Eur Heart J 1983; 4(suppl A):137-42
STUBER M SCHEIDEGGER MB, FISCHER SE, et al. Alterations in the local myocardial motion pattern in
patients suffering from pressure overload due to aortic stenosis. Circulation 1999; 100:361-8
SUBRAMANIAM K, YARED JP. Management of pulmonary hypertension in the operating room. Semin
Cardiothor Vasc Anesth 2007; 11:119-36
SUGIISHI M. Cigarette smoking is a major risk factor for coronary spasm. Circulation 1993; 87:76-9
SUKO JL, et al. An elastic ling between lenfth and active force production in myocardium. Circulation 2001;
104:1585-7
SUNAGAWA K, SAGAWA K, MAUCHAN WL. Ventricular interaction with the vascular system in terms of
pressure-volume relationships. In: YIN FCP, ed. Ventricular/vascular coupling. Clinical, physiological and
engineering aspects. New York: Springer Verlag, 1987, 210-39
SWAMI A, SPODICK DH. Pulsus paradoxus in cardiac tamponade: A pathophysiological continuum. Clin Cardiol
2003; 26:215-7
SWAMINATHAN M, NICOARA A, PHILLIPS-BUTE BG, et al. Utility of a simple algorithm to grade diastolic
dysfunction and predict outcome after coronary artery bypass graft surgery. Ann Thorac Surg 2011; 91:1844-51
SYMONS JA, MYLES PS. Myocardial protection with volatile anaesthetic agents during coronary artery bypass
surgery: a meta-analysis. Br J Anaesth 2006; 97:127-36
TANAKA H, et al. Aging, habitual exercise and dynamic arterial compliance. Circulation 2000; 102:1270-5
TANAKA K, LUDWIG NM, KERSTEN JR, PAGEL PS, WARLTIER DC. Mechanisms of cardioprotection by
volatile anesthetics. Anesthesiology 2004; 100:707-21
TAKATA M, BELOUCIF S, SHIMADA M, ROBOTHAM JL. Superior and inferior vena caval flows during
respiration: pathogenesis of Kussmaul's sign. Am J Physiol 1992; 262:H763-H770
TAKATA M, ROBOTHAM JL. Ventricular external constraint by the lung and pericardium during positive endexpiratory pressure. Am Rev Respir Dis 1991; 143:872-5
TAKATA M, ROBOTHAM JL. Effects of inspiratory diaphragmatic descent on inferor vena caval venous return.
J. Appl. Physiol. 1992; 72:597-607
TAKATA M, WISE RA, ROBOTHAM JL. Effects of abdominal pressure on venous return: abdominal vascular
zone conditions. J Appl Physiol 1990; 69:1961-72
THIELMANN M, KOTTENBERG E, KLEINBONGARD P, et al. Cardioprotective and prognostic effects of
remote ischaemic preconditioning in patients undergoing coronary artery bypass surgery: a single-centre
randomised, double-blind, controlled trial. Lancet 2013; 382:597-604
THUNY F, LAIREZ O, ROUBILLE F, et al. Post-conditioning reduces infarct size and edema in patients with STsegment elevation myocardial infarction. J Am Coll Cardiol 2012; 59:2175-81
THYGESEN K, ALPERT JS, WHITE HD. Universal definition of myocardial infarction. J Am Coll Cardiol 2007;
50:2173-95
TOLLER WG, STRANZ C. Levosimendan, a new inotropic and vasodilator agent. Anesthesiology 2006; 104:55669
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
222
392
393
394
395
396
397
398
398a
399
400
401
402
403
404
405
406
407
407a
407b
408
409
410
411
412
413
414
414a
415
416
417
418
419
420
421
421a
TOMANEK RJ, SEARLS JC, LACHENBRUCH PA. Quantitative changes in the capillary bed during
developping, peak and stabilized cardiac hypertrophy in the spontaneously hypertensive rat. Cric Res 1982; 51:295304
TORRENT-GUASP F. Sobre morfologia y funcionalismo cardiacos. Rev Esp Cardiol 1967; 20:1-10
TORRENT-GUASP F, BALLESTER M, BUCKBERG GD, et al. Spatial orientation of the ventricular muscle
band: Physiologic contribution and surgical implications. J Thorac Cardiovasc Surg 2001; 122:389-92
TORRENT-GUASP F, KOCICA MJ, CORNO A, et al. Systolic ventricular filling. Eur J Cardiothor Surg 2004;
25:376-86
TORRENT-GUASP F, KOCICA MJ, CORNO A, et al. Towards new understanding of the heart structure and
function. Eur J Cardiothor Surg 2005; 27:191-201
TOZZI G. 3 rd World Congress on Biomimetics, Artificial Muscles & Nano-Bio. CHUV-EPFL, Lausanne, 2006
TÜLLER C, NICOD LP. Hypertension pulmonaire chronique. Forum Méd Suisse 2008; 8:812-7
VACHIÉRY JL, ADIR Y, BARBERÀ JA, et al. Pulmonary hypertension due to left heart disease. J Am Coll
Cardiol 2013; 62:D100-8
VAGO T, BEVILACQUA M, NORBIATOR G. Identification of an adrenergic receptors on sarcolemma from
normal subjects and patients with idiopathic dilated cardiomyopathy. Circ Res 1989; 64:474-81
VAN DER LINDEN PJ. Cardioprotective effects of volatile anesthetics in cardiac surgery. Anesthesiology 2003;
99:516-7
VANE JR, ANGGARD EE, BOTTING RM. Regulatory functions in the vascular endothelium. N Engl J Med
1990; 323:27-34
VASAN RS, LARSON MG, BENJAMIN EJ, et al. Congestive heart failure in subjects with normal versus reduced
left ventricular ejection fraction: prevalence and mortality in a population-based cohort. J Am Coll Cardiol 1999;
33:1948-55
VASAN RS, LARSON MG, LEIP EP, et al. Impact of high-normal blood pressure on the risk of cardiovascular
disease. N Engl J Med 2001; 345:1291-7
VEGAS A, MEINERI M. Three-dimensional transesophageal echocardiography is a major advance for
intraoperative clinical management of patients undergoing cardiac surgery: A core review. Anesth Analg 2010;
110:1548-73
VERGROESEN I, KAL JE, VAN WEZEL HB. Coronary vasodilating drug effects or normal coronary blood flow
regulation ? J Cardiothorac Vasc Anesth 1998; 12:450-6
VIEILARD-BARON A, MICHARD F, CHEMLA D. Définitions et rappels physiologiques concernant les
determinant du statut volémique. Réanimation 2004; 13:264-7
VINCENT JL, ROMAN A, DEBACKER D, et al. Oxygen uptake/supply dependency. Effects of short-term
dobutamine infusion. Am Rev Respir Dis 1990; 142:2-6
VON HOMEYER P, SCHWINN DA. Pharmacogenomics of β-adrenergic receptor. Physiology and response to βblockade. Anesth Analg 2011; 113:1305-18
VONK-NOORDEGRAAF A, HADDAD F, CHIN KM, et al. Right heart adaptation to pulmonary arterial
hypertension. J Am Coll Cardiol 2013; 62:D22-33
VROOM MB. Epidemiology and pharmacotherapy of acute heart failure. Semin Cardiothorac Vasc Anesth 2003;
7:3-12
WACHTELL K, et al. Change in diastolic left ventricular filling after one year of antihypertensive treatment.
Circulation 2002; 105:1071-6
WAHL GW, FEINS RH, AQLFIERES G, et al. Reinfusion of shed blood after coronary operation causes elevation
of cardiac enzyme levels. Ann Thorac Surg 1992; 53:625-31
WATANABE J, LEVINE MJ, BELLOTTO F, et al. Effects of coronary venous pressure on left ventricular
distensibility. Circ Res 1990; 67:923
WAYPA GB, SCHUMACKER PT. Hypoxic pulonary vasoconstriction: redox events in oxygen sensing. J Appl
Physiol 2005; 98:404-14
WEBER KT, JALIL JE, JANICKI JS, et al. Myocardial collagen remodeling in pressure overload hypertrophy. Am
J Hypertension 1989; 2:931-40
WEG JG. Oxygen transport in adult respiratory distress syndrome and other acute circulatory problems: relation
ship of oxygen delivery and oxygen consumption. Critic Care Med 1991; 19:650-7
WEINER MM, REICH DL, LIN HM, et al. Influence of increased left ventricular myocardial mass on early and
late mortality after cardiac surgery. Br J Anaesth 2013; 110:41-6
WEST JB, DOLLERY CT. Distribution of blood flow and the pressure-flow relations of the whole lung. J Appl
Physiol 1965; 19:713
WHITE MF, et al. The insulin signalling system. J Biol Chem 1994; 269:1-4
WHITE HD, NORRIS RM, BROWN MA, et al. Left ventricular end-systolic volume as the major determinant of
survival after recovery from myocardial infarction. Circulation 1987; 76:44-9
WIER WG, EGAN TM, LOPEZ-LOPEZ JR, et al. Local control of excitation-contraction coupling in rat heart
cells. J Physiol 1994; 474:463-71
WIGGERS CJ. Modern aspects of circulation in health and disease. Philadelphia: Lea & Febiger, 1915
WRIGHT G. Mechanical simulation of cardiac function by means of pulsatile blood pumps. J Cardiothorac Vasc
Anesth 1997; 11:299-309
WU LA, NISHIMURA RA. Pulsus paradoxus. N Engl J Med 2003; 349:666
XUE F, YANG X, ZHANG B, et al. Postconditioning the human heart in percutaneous coronary intervention. Clin
Cardiol 2010; 33:439-44
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
223
422
423
424
425
425a
425b
425c
426
427
428
429
430
431
432
433
434
435
436
YANAGISAWA M, KURIHARA H, KIMURA S, et al. A novel potent vasoconstrictor peptide produced by
vascular endothelial cells. Nature 1988; 332:411-5
YASTREBOV K. Intraoperative management: carotid endarterectomies. Anesthesiol Clin N Am 2004; 22:265-87
YEAGER MP, FILLINGER MP, HETTLEMAN BD, et al. Perioperative beta-blockade and late cardiact outcomes:
A complementary hypothesis. J Cardiothorac Vasc Anesth 2005; 19:237-41
YELLIN EL, HORI M, YORAN C, et al. Left ventricular relaxation in the filling and non-filling intact canine
heart. Am J Physiol 1986; 250:H620-H629
YELLON DM, HAUSENLOY DJ. Myocardial reperfusion injury. N Engl J Med 2007; 357:1121-35
YOUNG AA, COWAN BR. Evaluation of left ventricular torsion by cardiovascular magnetic resonance. J
Cardiovasc Magn Reson 2012; 14:49
YU CH, BEATTIE WC. The effects of volatile anaesthetics on cardiac ischemic complications and mortality in
CABG: A meta-analysis. Can J Anaesth 2006; 53:906-18
ZAUGG M, LUCHINETTI E, SPAHN DR, et al. Differential effects of anesthetics on mitochondrial KATP channel
activity and cardiomyocyte protection. Anesthesiology 2002; 97:15-23
ZAUGG M, LUCHINETTI E, UECKER M, PASCH T, SCHAUB MC. Anaesthetics and cardiac preconditioning:
signaling and cytoprotective mechanisms. Part I. Brit J Anaesth 2003 ; 91:551-65
ZAUGG M, SCHAUB MC. Cellular mechanisms in sympatho-modulation of the heart. Br J Anaesth 2004; 93:3452
ZAUGG M, SCHAUB MC, FOËX P. Myocardial injury and its prevention in the perioperative setting. Br J
Anaesth 2004; 93:21-33
ZEMA MJ, MASTERS AP, MARGOULEFF D. Dyspnea: the heart or the lungs ? Differentiation at bedside by use
of the simple Valsalva maneuver. Chest 1984; 85:59-64
ZHANG C. Divergent roles of angiotensin II AT1 and AT2 receptors in modulating coronary microvascular
function. Circ Res 2003; 92:322-9
ZHAO HW, WU AS, LIU Y, et al. Assessment of right ventricular function by pressure-volume loops in off-pump
coronary artery bypass surgery. Chin Med J 2008; 121:932-8
ZILE MR, BRUTSAERT DL. New concept in diastolic dysfunction and diastolic heart failure: Part I. Diagnosis,
prognosis, and measurement of diastolic function. Circulation 2002; 105:1387-93
ZILE MR, SMITH VE. Relaxation and diastolic properties of the heart. In: FROZZARD H.A, ed. The heart and
cardiovascular system, Scientific Foundations, 2nd edition. New York, Raven Press, 1991, pp 1353-1367
ZIPES DP, WELLENS HJ. Sudden cardiac death. Circulation 1998; 98:2334-51
ZUCKER IH, CORNISCH KG. The Bezold-Jarisch reflex in the conscious dog. Circ Res 1981; 49:940-8
Auteur
Pierre-Guy CHASSOT
Ancien Privat-Docent, Faculté de Biologie et de Médecine,
Université de Lausanne (UNIL), CH - 1005 Lausanne
Ancien responsable de l’Anesthésie Cardiovasculaire, Service
d’Anesthésiologie, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois
(CHUV), CH - 1011 Lausanne
Précis d'anesthésie cardiaque 2015 - 05 Physiopathologie
224