lettre UCPF N66 V1 - Union des Clubs Professionnels de Football

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lettre UCPF N66 V1 - Union des Clubs Professionnels de Football
L A
L E T T R E
D E
L ’ U C P F
JURIDIQUE ET FISCALE
Indemnisation de la formation : la Cour de Cassation renvoie à la
CJCE (CCass 09/07/08)
N°66
11 Août 2008
SOMMAIRE
Pages 1
et 2
Indemnisation de la formation : la
Cour de Cassation renvoie à la
CJCE (CCass 09/07/08)
Pages 2
3 et 4
Obligation de résultat des clubs en
ce qui concerne la sécurité dans le
déroulement des rencontres (TA
Lille 29/5/08 et CA Paris 9/6/08)
Renvoi à la CJCE afin de dire, en vue de l’application de l’article
39 du Traité CE si le principe de libre circulation des travailleurs
posé par ledit article s’oppose à une disposition de droit national en
application de laquelle un joueur « espoir » qui signe à l’issue de sa
période de formation, un contrat de joueur professionnel avec un
club d’un autre Etat membre de l’Union européenne, s’expose à
une condamnation à des dommages-intérêts ; et, dans l’affirmative,
si la nécessité d’encourager le recrutement et la formation des
jeunes joueurs professionnels constitue un objectif légitime ou une
raison impérieuse d’intérêt général de nature à justifier une telle
restriction.
I Faits et Procédure
A l’issu de son contrat de joueur espoir avec l’OL, M. Bernard avait refusé
de signer avec l’OL le contrat de joueur professionnel qui lui était proposé
en application de la Charte et était parti signer un contrat avec Newcastle
UFC.
Le conseil de prud’hommes, estimant que le joueur avait rompu
unilatéralement ses engagements contractuels l’avait condamné à payer à
l’OL des dommages-intérêts.
Le 26 février 2007, la Cour d’appel de Lyon infirme cette décision aux
motifs que :
- L’article 23 de la Charte était illicite en ce qu’il impose au joueur, à
l’expiration de son contrat de joueur « espoir » de conclure un contrat de
joueur professionnel avec le club qui a pris en charge sa formation et lui
interdit de travailler avec tout autre club ;
- Cette interdiction absolue était contraire au principe de la libre
circulation des travailleurs à l’intérieur de la CE édictée par l’article 39 du
Traité mais avant tout contraire au principe fondamental de libre exercice
d’une activité professionnelle et à l’article L120-2 du code du travail ;
Rédaction
UCPF
88, avenue Kléber
75116 Paris
Tél : 01 55 73 32 32
Fax : 01 55 73 32 33
Site : www.ucpf.fr
Adresse : [email protected]
- N’étant pas tempéré, notamment, par une clause de dédit-formation, une
telle restriction apportée aux libertés individuelles de contracter et de
travailler est disproportionnée par rapport à la protection, aussi légitime soit
elle, des intérêts du club formateur, qui, même s’il a dispensé au joueur, sur
le point de devenir professionnel, une formation coûteuse, n’est pas fondé à
exiger qu’il travaille obligatoirement pour lui.
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L’OL décide de faire un pourvoi en cassation.
II Décision
La Cour de cassation rappelle tout d’abord que la Charte du football professionnel « a le caractère d’une convention
collective nationale ».
Elle rappelle également que la présente action en dommages-intérêts est fondée sur l’inobservation par M. Bernard de
l’obligation qu’il avait de signer son premier contrat professionnel dans son club formateur si celui-ci lui proposait un contrat
et non pas sur la violation de l’obligation de non-concurrence qui dispose que s’il refuse de signer un contrat avec le club
formateur, il est interdit au joueur « espoir », pendant trois années, de signer un contrat avec un autre club de la LNF.
Elle considère que la clause de la Charte qui n’interdit pas de contracter avec un club étranger, « peut être considérée comme
ayant pour effet d’empêcher ou dissuader un jeune joueur de se rendre dans un club d’un autre Etat membre dans la mesure
où la violation de cette obligation est susceptible d’entraîner le versement d’une indemnité ou de dommages-intérêts » mais
qu’elle « pourrait se trouver justifiée par l’objectif légitime de son club formateur de conserver le joueur qu’il vient de
former ».
Après avoir rappelé la décision de la CJCE dans l’affaire Bossman et notamment que « l’article 48 du Traité CEE s’oppose à
l’application de règles édictées par des associations sportives, selon lesquelles un joueur professionnel de football
ressortissant d’un Etat membre, à l’expiration du contrat qui le lie au club, ne peut être employé par un club d’un autre Etat
membre que si ce dernier a versé au club d’origine une indemnité de transfert, de formation ou de promotion », la Cour de
Cassation décide que la solution du litige « pose une difficulté sérieuse d’interprétation de l’article 39 du Traité CE » et
« qu’il y a lieu de surseoir à statuer jusqu’à ce que la Cour de Justice se soit prononcée sur ces points. »
Ainsi, la Cour de Cassation sursoie à statuer jusqu’à la décision de la CJCE et renvoie à la CJCE aux fins de dire en
application de l’article 39 du Traité CE :
« 1°/ si le principe de libre circulation des travailleurs posé par ledit article s’oppose à une disposition de droit national en
application de laquelle un joueur « espoir » qui signe à l’issue de sa période de formation, un contrat de joueur professionnel
avec un club d’un autre Etat membre de l’Union européenne, s’expose à une condamnation à des dommages-intérêts ;
2°/ dans l’affirmative, si la nécessité d’encourager le recrutement et la formation des jeunes joueurs professionnels
constitue un objectif légitime ou une raison impérieuse d’intérêt général de nature à justifier une telle restriction. »
Vous pouvez retrouver l’intégralité de cette décision et la télécharger sur notre site : www.ucpf.fr dans le recueil de
jurisprudence de notre « espace Présidents ».
Obligation de résultat des clubs en ce qui concerne la sécurité dans le déroulement des rencontres (TA Lille
29/5/08 et CA Paris 9/6/08)
Les règlements généraux de la FFF qui sanctionnent la méconnaissance par les clubs d’une obligation qui leur
incombe et qui a été édictée par la fédération sportive dont ils sont adhérents, dans le cadre des pouvoirs
d’organisation qui sont les siens et conformément aux objectifs qui lui sont assignés, ne méconnaissent pas le
principe constitutionnel de responsabilité personnelle en matière pénale, qui est applicable aux sanctions
administratives et disciplinaires.
Il incombe aux clubs de football qu’ils soient organisateurs d’une rencontre ou visiteurs, une obligation de
résultats en ce qui concerne la sécurité dans le déroulement des rencontres.
Il appartient aux organes disciplinaires de la FFF, après avoir pris en considération les mesures de toute nature
effectivement prises par le club pour prévenir les désordres, d’apprécier la gravité des fautes et de déterminer les
sanctions adaptées à ces manquements.
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I Faits et procédures
A) Affaire LOSC
Le 19/2/08 lors du match Metz/Lille, une supportrice messine a été blessée à la tête par un projectile.
Le tribunal indique que le projectile serait une pile, qu’un supporter lillois soupçonné d’avoir lancé la pile a été arrêté et
qu’une instruction pénale est en cours.
[Remarque : la réalité est autre :
- il ne s’agissait pas d’une pile mais d’une boule de neige (rien au détecteur de métaux à l’entrée, la pile n’a jamais été
retrouvée et le lanceur n’a reconnu que le jet d’une boule de neige),
- la preuve que ce soit un supporter du LOSC n’a a jamais été apporté (et le LOSC n’avait pas organisé de déplacement),
- il n’y a eu aucune suite judiciaire (affaire classée sans suite par le parquet),
- le délégué LFP n’avait rien constaté de visu mais a simplement relaté un incident dans son rapport sur les dires d’un agent
de sécurité du FC Metz.]
Le 9/2/06, le LOSC saisit le TA de Lille en annulation de la décision du 3/8/05 de la commission supérieure d’appel de la FFF
qui avait confirmé la sanction prise par la commission de discipline lui infligeant une amende de 5 000 €.
Le 12/07/07 le TA de Lille avait décidé de soumettre deux questions au Conseil d’Etat avant de statuer.
B) Affaire PSG
Lors de la finale de la Coupe de France 2004 au Stade de France opposant la Berrichonne de Châteauroux au PSG, des
incidents avaient provoqué des dégradations et des fumigènes avaient été lancés.
Attribuant ces désordres à des individus considérés comme des supporters du PSG, la commission centrale de discipline de la
FFF avait sanctionné le PSG d’un match à huit clos avec sursis et d’une amende de 30 000 €. Le PSG faisant appel de cette
décision, la commission supérieure de discipline de la FFF avait ramené l’amende à 20 000 €.
Le 16/03/07, le TA de Paris considère « que dès lors, en énonçant que les clubs visiteurs ou jouant sur terrain neutre sont
responsables lorsque les désordres sont le fait de leurs supporters, l’article 129-1 du règlement général de la fédération
française de football, même inspiré, comme le soutien cette dernière, par l’objectif d’assurer un déroulement satisfaisant des
rencontres, méconnaît le principe de personnalité des peines et est donc inconstitutionnel » et décide que la décision de la
commission supérieure de discipline de la FFF « est dépourvue de base légale et doit donc être annulée ».
La FFF avait fait appel de cette décision.
II Décisions
A) Affaire LOSC
Sur la matérialité des faits
Alors que le LOSC soutient que les faits à l’origine de la sanction ne sont pas établis car le projectile n’a jamais été retrouvé
et que la scène ne comporte aucun témoin, le tribunal considère que les observations contenues dans le rapport du délégué
principal du match indiquant « qu’un supporter de Lille situé dans la tribune Est avait lancé une pile sur une supportrice de
Metz qui a été blessée au cuir chevelu » « fait foi au regard des dispositions de l’article 128 des règlements généraux » de la
FFF et que « ces observations suffisent à caractériser la matérialité des faits ».
Sur la responsabilité du club
Alors que le LOSC soutient qu’il n’a commis aucune faute personnelle fût-ce par négligence ou imprudence et qu’il ne saurait
être tenue objectivement responsable de faits commis par autrui, le tribunal écarte ce moyen aux motifs que :
- L’article 129 des règlements généraux de la FFF « impose aux clubs de football, qu’ils soient organisateurs d’une rencontre
ou visiteurs, une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité dans le déroulement des rencontres » ;
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- Le club visiteur est au regard de cet article « responsable des désordres imputables à ses supporters à l’occasion d’une
rencontre » ;
- La méconnaissance des dispositions de cet article « peut faire l’objet de sanctions disciplinaires de la part de la fédération,
notamment des sanctions pécuniaires comme en l’espèce » ;
- « les règlements en cause qui sanctionnent la méconnaissance par les clubs d’une obligation qui leur incombe et qui a été
édictée par la fédération sportive dont ils sont adhérents, dans le cadre des pouvoirs d’organisation qui sont les siens et
conformément aux objectifs qui lui sont assignés, ne méconnaissent pas le principe constitutionnel de responsabilité
personnelle en matière pénale, qui est applicable aux sanctions administratives et disciplinaires » ;
- Le fait « que le club de Lille n’ait pas organisé le déplacement de ses supporters est sans influence ».
B) Affaire PSG
Considérant que les règlements en cause :
- sanctionnent « la méconnaissance par les clubs d’une obligation qui leur incombe et qui a été édictée par la fédération
sportive à laquelle ils adhérents, dans le cadre des pouvoirs d’organisation qui sont les siens et conformément aux objectifs
qui lui sont assignés »,
- « ne méconnaissent pas, eu égard au pouvoir d’appréciation ci-dessous [à savoir apprécier « après avoir pris en
considération les mesures de toute nature effectivement prises par le club pour prévenir les désordres », « la gravité des fautes
commises et déterminer les sanctions adaptées à ces manquements »], le principe constitutionnel de responsabilité
personnelle en matière pénale, qui est applicable aux sanctions administratives et disciplinaires » ;
La Cour d’Appel décide tout d’abord d’annuler le jugement du TA de Paris au motif que ce dernier aurait commis une erreur
de droit et qu’en conséquence, il lui appartient par l’effet dévolutif de l’appel de connaître de l’ensemble des moyens soulevés
devant le TA de Paris.
Par la suite la Cour d’Appel décide de rejeter la demande du PSG présentée devant le TA de Paris notamment aux motifs
que :
- Le PSG n’apporte « aucun élément de nature à établir que d’autres personnes que les supporters de ce club, aient pu être à
l’origine des troubles ayant motivé la sanction, alors même que les tribunes en cause avaient été réservées à ces mêmes
supporters du PSG » et qu’en conséquence, au regard des règlements de la FFF, les personnes en cause ne pouvaient être
qualifiées que de supporters du PSG ou assimilées comme tels ;
- Il résulte de l’article 129 des règlements généraux de la FFF « qu’incombe aux clubs de football, qu’ils soient organisateurs
d’une rencontre ou visiteurs, une obligation de résultat en ce qui concerne la sécurité dans le déroulement des rencontres ;
que dès lors que ce résultat n’était pas atteint, il en résultait une faute mettant en cause la responsabilité de la SASP PSG » ;
- « il appartient aux organes disciplinaires de la FFF, après avoir pris en considération les mesures de toute nature
effectivement prises par le club pour prévenir les désordres, d’apprécier la gravité des fautes et de déterminer les sanctions
adaptées à ces manquements » et qu’au regard des pièces du dossiers, « il n’apparait pas eu égard à la répétition des
comportements irresponsables des supporters parisiens et à la gravité des faits en cause, que la sanction prononcée par la
décision litigieuse du 3 septembre 2004 soit disproportionnée par rapport aux faits qui l’ont motivée. »
Vous pouvez retrouver l’intégralité de ces décisions et les télécharger sur notre site : www.ucpf.fr dans le recueil de
jurisprudence de notre « espace Présidents ».
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