1919 DAVID ASHWORTH NOMME MANAGER

Transcription

1919 DAVID ASHWORTH NOMME MANAGER
1919 DAVID ASHWORTH NOMME MANAGER
1921 FORMATION DE L’ETAT INDEPENDANT IRLANDAIS
1922 CHAMPION D’ANGLETERRE
1923 ASHWORTH QUITTE LE CLUB
MATT MCQUENN REPREND LE POSTE
CHAMPION D’ANGLETERRE
TROISIEME CHAPITRE
1919-1939
C’était Anfield
1926 GREVE GENERALE
1928 CONSTRUCTION DU TOIT DU KOP
GEORGE PATTERSON NOMME MANAGER
1932 GRANDE DEPRESSION
OUVERTURE DU PREMIER TUNNEL SOUS LA MERSEY
1933 GEORGE HODGSON BAT LE RECORD DE BUTS MARQUES
1936 GEORGE KEY NOMME MANAGER
CRISE DE L’ABDICATION
1939 DEBUT DE LA DEUXIEME GUERRE MONDIALE
«IL DOMINE COMPLETEMENT DANS SA SURFACE DE REPARATION. IL A L’ŒIL D’UN
AIGLE, LES MOUVEMENTS SOUPLES D’UNE PANTHERE QUAND IL BONDIT POUR ARRETER
UN TIR ET LA PRISE D’UN ETAU QUAND IL ATTRAPPE LA BALLE. »
THE TIMES
TROISIEME CHAPITRE 1919-1939 C’ETAIT ANFIELD
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La Première saison d’après guerre vit une extension à 22 clubs en première division. Le
salaire maximum des joueurs fut établi à £ 9 par semaine, alors que la nouvelle taxe
maximum gouvernementale sur les spectacles fut fixée à un shilling par match.
Mais l’augmentation des prix n’altéra pas l’enthousiasme du public. Les fans avaient faim de
football et le nombre de spectateurs explosa durant la saison 1919-20. A Liverpool,
l’affluence d’Anfield approchait 40’000 spectateurs avec des pointes à 48’000 pour le derby
du championnat en décembre et 50’000 lors du troisième tour de la Coupe contre
Birmingham. Une quantité de joueurs d’avant-guerre – comme Longworth, MacKinnlay,
Lacey et Sheldon – devenaient toujours meilleurs au contact de nouveaux visages. Un de
ceux-ci allait devenir un des favoris du public durant les années qui suivirent. Un Geordie
(NdT : habitant du Tyneside) aux jambes courbées nommé Harry Chambers. Cet homme, que
les fans surnommèrent « le Souriant », fit ses débuts en 1919 et devint immédiatement un
grand buteur. Trouvant le chemin des filets une fois tous les deux matches en moyenne.
Au nombre des autres nouveaux venus figuraient trois gars de la région. Le milieu défensif
Dick Forshaw, né à Widnes, le stoppeur Tom Lukas de St Helens et Tom Bromilow de
Liverpool même. En tant que soldat invalide sorti de l’armée, Bromilow fut considéré d’abord
comme un transfert indésirable à son arrivée à Anfield. Encore en uniforme, il demanda à
effectuer un essai. Mais il fit immédiatement impression, intégrant après quelques semaines
seulement le cadre de la première équipe lors de la saison qui commençait. Il conquit la
première de ses cinq sélections en équipe d’Angleterre juste deux ans plus tard.
Cette année vit l’émergence de deux autres hommes, tous deux destinés à faire impression de
façon déterminante au sein du FC Liverpool. Le premier était gardien de but. Elisha Scott
(voir page 36), brillait de telle manière en équipe réserve que cela lui permit de porter le
maillot de Kenny Campbell au sein de l’équipe sénior. Le second était un arbitre formé à
Watford du nom de David Ashworth.
Avant de nommer Ashworth au poste de responsable, l’équipe de Liverpool était toujours sans
manager. Depuis la mort de Watson tous les recrutements et sélections étaient dictés par le
comité avec séances d’entraînements laissées à l’appréciation d’une succession d’anciens
joueurs. Cette nomination donna au club un nouvel élan. Depuis ce moment-là ce fut
Ashworth, avec l’accord du Président W.R. Williams, qui prit toutes les décisions
importantes.
Il offrait un contraste saisissant par rapport aux anciens managers. Autant Watson était
généreux et charismatique, autant Ashworth était tranquille, soigné et précis. Il était si maigre
que certains récits le décrivaient comme une moustache culminant sur cinq pieds de longs. Sa
formation était également différente. Watson était au bénéfice de trois titres de Champion
d’Angleterre quand il commença de travailler à Anfield alors qu’Ashworth n’avait encore rien
gagné. Il avait obtenu le respect pour avoir fait de Oldham une équipe solide de première
division. Mais depuis qu’il avait quitté Boundary Park, apparemment en conflit de liquidités,
il n’obtint pas grand succès avec Stockport County. A Liverpool, Ashworth eut la chance de
pouvoir se mettre lui-même à l’épreuve dans un grand club. Il prit un départ solide, bien que
peu spectaculaire, et conduisit l’équipe à la quatrième place à la fin de sa première saison. Les
hauts faits en étaient les 15 buts marqués par Chambers, une victoire à domicile 3-1 contre
Everton et un match au stade de Hyde Road de Manchester City sous les yeux du roi.
Malheureusement, le monarque prouva qu’il était une nouvelle fois porteur de malchance
pour Liverpool. Il furent battus comme lors de la finale de la coupe de 1914.
L’année suivante, ils finirent à nouveau quatrième même s’ils inscrivirent plus de buts et en
concédèrent moins.
TROISIEME CHAPITRE 1919-1939 C’ETAIT ANFIELD
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Scott consolida sa position de premier choix au poste de gardien alors qu’en attaque,
Chambers, Forshaw et Dick Johnson inscrivirent 44 buts. Lors d’une semaine mémorable en
octrobre 1920, Liverpool fit coup double contre Everton devant une foule évaluée à 105'000
spectateurs sur l’ensemble des deux matches. Quand Forshaw inscrivit le but victorieux à
Anfield, les reporters décrivirent le Kop comme « massif avec éruptions volcaniques ».
Ils eurent beaucoup plus à fêter lors de la saison 1921-22. Alignant une équipe composée du
meilleur gardien du pays, de quatre internationaux en défense et de deux buteurs hors paires,
Liverpool ne perdit qu’un seul match de leurs 15 premières rencontres. Une série de cinq
courtes victoires en janvier et février fit d’eux les favoris pour le titre. Par la suite ils
bénéficièrent d’un tardif retour de forme grâce à des victoires à domicile contre Cardiff et
Burnley ainsi qu’une victoire 4-1 à West Bromwich lors de la dernière journée. Les Spurs, qui
avaient pris la tête des poursuivants, ne purent rattraper le terrain perdu et le trophée de
Champion revint à Anfield après 16 ans de disette.
Pour une cité qui souffrait de la crise économique d’après-guerre ce fut un grand stimulant
moral et les députés, membres du conseil et dignitaires municipaux s’empressèrent d’apporter
leurs félicitations. Ils étaient tous présents quand, six semaines plus tard, le club organisa une
somptueuse réception en l’honneur de l’équipe à l’Hôtel Adelphi. Toute l’équipe fut prise en
photo à l’extérieur, habillée de complets vestons élégants avant de boire, dîner, fêter et
finalement recevoir des montres en or en signe de reconnaissance pour tous les efforts
consentis. Même l’équipe championne en 1906 fut invitée et la soirée se termina par un toast
porté en leur honneur.
Devenir Plus Fort
L’équipe dirigée par Ashworth atteint le sommet de sa maturité durant la saison qui suivit.
Une fois encore la défense fit la jalousie de la Ligue entière, mais cette fois la ligne des
attaquants montra un autre visage. A domicile, la forme du début de saison fut fantastique :
six victoires, aucune défaite, 26 buts inscrits contre 7 concédés. Chambers « le Souriant »
provoqua la majeure partie des dommages, trouvant 22 fois les filets adverses durant la
saison. Il fut le plus terrifiant lors du derby gagné 5-1, inscrivant un « coup du chapeau »
devant une affluence record à Anfield de 54'368 spectateurs. Durant cette saison, Forshaw
surenchérit de 19 buts supplémentaires et Johnson de 14. Même Fred Hopkins, le petit ailier
sauvage, contribua à faire évoluer le score lors d’une de ses 42 apparitions. Un but inscrit lors
d’une victoire à domicile contre Bolton – c’était si rare pour lui qu’il mérita une tumultueuse
et dangereuse célébration. Billy O’Donnell, un fan à vie des « Rouges » se rappelle bien cet
instant :
Un quart d’heure avant la fin de la rencontre, ils ouvrirent l’entrée principale et des centaines
de gars comme moi tentèrent de rentrer dans le stade gratuitement. Tu pouvais ainsi voir un
quart d’heure de football et quand je suis arrivé, tout portait à croire qu’il y avait un corner.
Hopkins était l’ailier gauche de Liverpool. Il inscrivit un but et la tribune d’Anfield
s’enflamma soudain. La panique augmenta : « Au feu »… tout ce que nous apercevions était
de la fumée. C’était d’ailleurs ce que chacun dans le stade pouvait voir. Le terrain et les
joueurs étaient difficilement visibles et l’arbitre considéra sérieusement le fait d’annuler la
partie. Ce n’est que lorsque la police évacua la tribune que la partie put reprendre. Liverpool
l’emporta 3-0. Ce ne fut qu’un épisode d’une saison riche en événements. L’équipe finit
l’année 1922 par cinq victoires étriquées durant le mois de décembre et quand ils obtinrent
trois nouveaux succès en janvier, ils apparurent pour beaucoup comme étant inattaquables.
Tout semblait en marche pour un second titre successif mais il se produisit alors un fait qui
jeta ces plans aux oubliettes.
TROISIEME CHAPITRE 1919-1939 C’ETAIT ANFIELD
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Le Départ d’Ashworth
Le 23 janvier 1923, David Ashworth quitta Anfield devenant le premier manager à s’être
résigné. Les raisons furent maintenues secrètes et sa décision de rejoindre subitement Oldham
Athletic surprit les fans de football de tous bords. Certains journaux spéculaient sur le fait
qu’il y ait eu une dispute avec le comité d’Anfield, d’autres pensaient qu’il avait conservé un
attachement émotionnel très marqué pour le club qu’il avait ramené dans la ligue de football
en 1905.
Ashworth lui-même garda le silence quant à cette affaire et sa décision continua de hanter les
historiens du club pendant 80 ans. La vérité en fait est simple, il quitta pour l’argent. A la fin
de l’année 1922, Oldham se trouvait en fin de classement de première division et lorgnait
assurément vers la relégation. Le jour de Noël, Liverpool se rendit à Boundary Park et
enfonça encore un peu plus le clou en obtenant un succès 2-0. A la suite de cela, les directeurs
invitèrent Ashworth dans leur cabinet et essayèrent de le persuader de revenir afin de
permettre au club de ses débuts de se sauver de la chute. Ils y parvinrent. Comme cela est
reporté dans l’histoire officielle du club du Lancashire « Il semblait que cette décision de
revenir alors que Liverpool était au sommet était bizarre venant de lui. Mais, comme lors de
son départ en 1914, l’argent semblait être l’unique motivation de la décision d’Ashworth. Les
dirigeants d’Oldham Athletic étaient convaincus de lui avoir offert un contrat assez lucratif
pour le faire partir.
Ashworth avait peut-être escompté recevoir un salaire confortable mais sa décision fut la
preuve d’un désastre personnel. Les bonnes performances de Oldham tardèrent à se
concrétiser et ils furent nettement relégués. Comme les affluences diminuèrent, il se retrouva
seul et virtuellement sans argent pour renforcer l’équipe. Il choisit de partir après un peu plus
d’une année. De courts et malheureux séjours suivirent à Manchester City, Stockport et
Walsall. Finalement, il laissa tomber le management et termina sa carrière comme recruteur
de jeunes talents pour Blackpool.
Son départ d’Anfield provoqua également des grincements de dents à Liverpool. A 17
journées de la fin, le comité n’avait pas le temps de trouver un remplaçant provenant de
l’extérieur. De ce fait, ils redistribuèrent les postes et nommèrent leur collègue directeur Matt
McQueen à la charge des affaires de l’équipe. En tant que membre de l’équipe originale des
Mac dans les années 1890, McQueen avait joué à tous les postes y compris gardien.
Maintenant l’homme qui avait prouvé sa versatilité sur le terrain devait tenir un autre rôle – et
il allait devenir son plus important jusqu’alors.
Il eut du succès mais ce fut plus court que ce que Liverpool avait escompté. Comme la saison
tirait à sa fin la forme de l’équipe retomba. Ils ne récoltèrent que sept points de leurs sept
dernières rencontres. Par chance, leurs performances du début leurs donnèrent les points
substantiels nécessaires et quand il battirent Stoke 1-0 à Anfield lors du dernier match de la
saison, le trophée était déjà assuré pour la deuxième année consécutive.
Après cette Epoque
McQueen inscrivit son nom dans l’histoire mais il ne regoûtera pas au succès. Les cinq années
qui suivirent en tant que manager furent insignifiantes, son équipe ne se classant jamais audessus de la quatrième place du classement final. Mais, bien qu’il ne ramena pas d’autre
trophée, il faut porter à son crédit qu’il fit venir à Anfield quelques joueurs exceptionnels. Un
des plus fameux, bien que non-conventionnel, fut le stoppeur « Parson » Jimmy Jackson, qui
combina la pratique du football avec des études religieuses. En tant que Presbytérien
pratiquant, Jackson était vigoureusement opposé à la fumée, l’alcool et la débauche. Il
détestait les grossièretés qu’il entendait régulièrement sur le terrain de la part d’Elisha Scott.
TROISIEME CHAPITRE 1919-1939 C’ETAIT ANFIELD
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Fan de la première heure, Joe Anderson se rappelle : « Scott jurait constamment comme un
militaire. Quand l’adversaire obtenait un corner et que tu te trouvais placé derrière le but, tu
pouvais l’entendre jurer et insulter vertement ses défenseurs. A chaque fois que la balle était
dégagée « Parson » était en grand conflit avec lui, menaçant du doigt et rouspettant à tue-tête.
Il s’en allait ensuite en secouant la tête. Alors, Scott lui répondait de plus belle. »
Jackson fit 224 apparitions, la plupart en tant que capitaine. Il jouait à tous les postes défensifs
et il gagna ses galons d’honneurs en étant sélectionné aussi bien dans la Ligue de Football que
dans le XI de la Ligue Ecossaise. Mais ses buts personnels se trouvaient ailleurs. Il utilisait
ses gains pour financer ses cours à l’université où il étudiait la philosophie et le Grecque. A la
fin de sa carrière, il se rendit à Cambridge pour terminer son éducation religieuse et
concrétiser l’ambition de toute sa vie à savoir entrer dans les ordres en tant que Presbytérien.
Jackson était peut-être un des favoris du public mais le vrai héros de cette époque fut sans
conteste le footballeur Sud-Africain de naissance nommé Gordon Hodgson. En 1925, alors
qu’il voyageait en Grande-Bretagne à l’occasion d’une tournée des Springboks dont il faisait
partie, le buteur Hodgson fit une extraordinaire impression. McQueen le persuada de rester en
Angleterre où il pouvait combiner une carrière professionnelle de football avec son autre
grande passion, le criquet. Il resta 11 années en tant qu’avant-centre de Liverpool et comme
rapide lanceur pour le Lancashire.
Dès ses débuts, Hodgson fut un buteur sensationnel. Une réplique du légendaire Dixie Dean
d’Everton. Il trouva le chemin des filets 232 fois en 359 apparitions – et remporta le
classement des buteurs lors de 7 saisons sur 9 disputées sous les couleurs de Liverpool. Bien
que son appétit de buts fut par la suite éclipsé par Roger Hunt et Ian Rush, ses 17 coups du
chapeau demeurent un record dans l’histoire du club. A 32 ans, il partit pour Aston Villa qu’il
quitta ensuite pour compléter le livre des records à Leeds où il inscrivit 67 buts en 120
titularisations et marqua à cinq reprises en un seul match. Mais, alors que McQueen recrutait
des individualités talentueuses, ses concurrents construisaient des équipes complètes. La
décade avançait. Le manager d’Huddesfield Herbert Chapman se fit connaître comme étant le
roi du football tactique, mettant l’accent sur le travail d’équipe et l’habileté balle au pied. Il
devint également le premier manager à assumer seul le contrôle de la sélection de l’équipe de
la part de ses directeurs, une position qui ne fut pas adoptée à Anfield avant la fin des années
50. Les succès de Chapman précipitèrent les clubs rivaux dans l’ombre. Durant son règne,
Huddersfield imita Liverpool en gagnant deux championnats d’affilé. Quand il s’en alla, ils
étaient sur le chemin du troisième.
Un Toit Sur Nos Têtes
Quand le club du Yorkshire finit par perdre, ce furent Everton, Sheffield Wednesday, le
nouveau club de Chapman, et Arsenal qui dominèrent la Première Division. Liverpool tardait
à trouver de la consistance et ils n’étaient guère mieux que des viennent ensuite. En 1928,
Matt McQueen se retira du management après un terrible accident de voiture lors duquel il
perdit une jambe. Il fut remplacé par le secrétaire du club, George Patterson, un ancien
footballeur amateur au sein du football club de la Marine qui avait travaillé en tant
qu’assistant de Tom Watson avant la guerre.
Son arrivée coïncida avec une nouvelle infrastructure majeure dans le développement
d’Anfield. Une de celles qui cimenta la réputation de stade le plus bruyant et explosif du pays.
Le projet était de reconstruire le Kop en l’agrandissant de 425 pieds sur 131, et destinant
celui-ci à accueillir 30'000 spectateurs debouts – avec, en finition, un vaste toit fait de poutres
métalliques qui amplifieraient leurs rugissements jusqu’à un niveau incroyablement élevé.
TROISIEME CHAPITRE 1919-1939 C’ETAIT ANFIELD
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Les jours de match, la nouvelle enceinte sombre et imposante commençait à se remplir bien
avant le coup d’envoi. Des queues se formaient déjà vers 11h30 du matin. Pour le derby de
1928, ils étaient déjà 45'000 spectateurs dans le stade deux heures avant le début du match.
Les réjouissances habituelles d’avant match comprenaient une rencontre entre écoliers et une
aubade routinière du Edge Hill Silver Prize Band. Interviewés par Radio City de Liverpool en
1993, les fans d’alors se rappelaient certaines visions et bruits :
Syd Rogers : « A l’époque de l’ancien Spion Kop il y avait juste une colline de remblais et de
cendres et ce n’était pas très confortable d’y être parce qu’il n’y avait pas d’escaliers ni de
paliers en terrasse. En fait ce ne fut terrassé qu’après la dernière guerre. »
Billy O’Donnell : « Il y avait des enfants qui vendaient des chewing gum et des chocolats
dans une charrette et la foule leur lançait des pièces de monnaie. Ils étaient relativement doués
pour lancer les paquets. Si quelqu’un d’autre les attrapait, il levait la main en criant « Il est
là ». »
Alf Smithies : « Le Kop avait un certain sens de l’humour. Tu avais des gars qui disaient
quelque chose, parfois c’était à l’encontre de ce qui se passait sur le terrain, et s’ils avaient
tort, ils subissaient une offrande des gens alentours. Parfois, ils recevaient de la moutarde
derrière les oreilles. C’était toujours chaud, en règle générale. »
Jack Payne : « Pour ajouter une petite pointe de sport, spécialement envers les spectateurs du
camp opposé (pas de ségrégation en ces temps reculés), on faisait « Les gars, que pensez-vous
d’un shilling dans le chapeau ? » En l’occurrence, les noms de dix attaquants étaient inscrits
sur des bouts de papiers journaux du matin et mis dans un couvre-chef. Tu secouais le tout. Le
prix était de un shilling pour un nom. Celui qui tirait le nom du joueur ayant marqué le
premier but recevait 50 pences…ce qui n’était pas si mal pour l’époque. »
Harold Atkinson : « Quand les supporters de clubs rivaux se rencontraient, c’était
relativement cordial. En fait, ils riaient et plaisantaient entre eux et des relations amicales se
tissaient. Parfois, ils s’arrangeaient pour aller voir le match retour et certains restaient le
week-end. C’était comme ça que cela se passait. »
Se rendre au match était devenu une façon de vivre pour beaucoup de gens dans la région de
la Mersey. Mais quand la grande dépression des années 30 commença à se faire sentir, un
grand nombre d’entre eux n’eurent plus d’argent pour cela. Lors de la saison 1932-33 – alors
que le nombre de personnes sans emploi atteignit 30% - le total combiné des entrées pour les
matches de Ligue à Anfield et Goodison Park tomba à 50'000. Seul le fanatique résista. Une
étude de 1938 établie par le Pilgrim Trust reporta comment les gens sans emploi tournaient
toujours autour d’Anfield les jours de match – simplement pour regarder leurs amis supporters
passer les tourniquets d’entrée.
Les Deux George
Le cabinet des trophées resta désert durant les huit ans de règne de Patterson. Liverpool ne fit
pas mieux que la cinquième place au classement et ne dépassa jamais le cap du sixième tour
de la Coupe d’Angleterre. La pénurie de buts était souvent le problème majeur et leurs
résultats auraient pu être pires sans la formidable puissance de tir de Hodgson.
Mais Patterson, comme McQueen avant lui, prouva qu’il était un acteur redoutable sur le
marché des transferts. Il recruta un amalgame d’inconnus – comme le buteur Jack Balmer,
natif de Liverpool et le futur manager Phil Taylor – et d’internationaux reconnus, comme le
stoppeur de 6 pieds 3 pouces Tom « Le Long » Bradshaw, qui signa en provenance de Bury
en 1930 le transfert record de l’époque, soit £ 8'000. Il était aussi attiré par les Sud-Africains
et employait des recruteurs de talents dans ce pays pour le tenir informé des éventuels jeunes
qui perçaient et qui seraient éventuellement intéressés à faire carrière en Angleterre.
TROISIEME CHAPITRE 1919-1939 C’ETAIT ANFIELD
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Durant le début des années 1930, sept Sprinboks firent le long voyage vers le nord. Parmi
ceux-ci, Berry Nieuwenhuys, un ailier qui deviendra l’un des préférés d’Anfield durant les 15
années à venir. Le grand et élancé « Nivvy » terrorisait la défense adverse par ses courses
puissantes, ses dribbles astucieux et ses tirs en boulets de canon. Quand il quitta le club en
1947, il avait comptabilisé 250 sélections en équipe première, marqué 79 buts et gagné une
médaille de Champion d’Angleterre.
Un autre engagement de Patterson fut l’attaquant des Glasgow Rangers Sam English, qui
arriva en 1933 après avoir battu le record Ecossais de buts en une saison avec 44 réussites.
English inscrivit huit buts lors de ses 11 premiers matches et marqua à deux reprises quand
Liverpool élimina Tranmere en 1934, lors d’un tour de coupe d’Angleterre joué devant une
affluence de 61'036 spectateurs à Anfield. La même année, on vit l’arrivée du défenseur
international de Sheffield Wednesday Erme Blenkinsop, accompagné de son collègue de
l’équipe d’Angleterre Tom Cooper, de Derby. Lors de l’été 1935, Patterson emmena son
équipe aux Iles Canaries pour un séjour d’avant saison. Les voyages Internationaux étaient
alors encore considérés comme très exotiques et quand leur bateau accosta à Las Palmas, la
dépression qui frappait les bords de la Mersey semblait être d’un autre monde. Arpentant les
places, les squares de la ville et les terrasses des cafés, les joueurs se sentaient traités comme
des célébrités par les habitants très curieux des Iles. Même Miss Espagne assista à un match
pour voir comment les visages pâles d’Angleterre s’habituaient à la chaleur.
Quelques semaines plus tard, ils furent de retour à la maison et retombèrent brusquement sur
terre. Leur forme varia énormément durant la campagne et à chaque fois qu’ils semblaient
s’être relancés, ils retombaient de plus belle. Le plus extrême exemple d’inconstance se
produisit en l’intervalle de quatre jours lorsqu’ils pulvérisèrent Everton 6-0 à domicile avant
de se rendre à Maine Road pour se faire laminer sur le même score.
Abandonné par les miracles, Patterson tomba malade. En 1936, Le patron de Liverpool décida
qu’il était temps de laisser sa place à un autre homme. Il demeura secrétaire du club laissant
dès cet instant la tâche de maintenir l’équipe en haut à George Kay (voir page 38).
Son engagement coïncida avec le transfert de Matt Busby pour £ 8000, arrivé tout droit de
Manchester City. Bien des années après, l’homme qui conquerra l’Europe en tant que
manager, se rappelle la scène de son arrivée à Anfield: « Liverpool était vraiment à la peine
et alors en danger de relégation en Deuxième Division. C’était le temps où des hommes qui
avaient été de grand joueurs émergeaient dans cette voie pour clore une illustre carrière…
George Kay travaillait comme un fou pour remettre l’équipe sur les rails. »
Avec Kay au poste de manager et Busby comme milieu-défensif, Liverpool se battait pour
éviter la chute, terminant 19ème à la fin de la saison 1935-36. Ils terminèrent juste une place de
mieux l’année suivante et subirent l’humiliation lors du troisième tour de la Coupe
d’Angleterre, perdant 3-0 contre les battants de Norwich, alors en Deuxième Division. Mais
Kay avait commencé la reconstruction. En défense, il apporta en réserve le stoppeur Jim
Harley, un ancien sprinter Ecossais. En attaque, il introduisit Willie Fagan, une jeune recrue
de Preston âgée de 20 ans où il avait joué aux côtés de Jimmy Milnes – père de Gordon – et
Bill Shankly. Les résultats commençaient à s’en ressentir et, en une année, Liverpool avait
progressé à la 11ème place du classement. Toutefois, le temps où l’on jouait au football était
presque révolu.
La Guerre Approche
Le 30 septembre 1938, La Grande-Bretagne accepta la demande de l’Allemagne d’annexer la
Tchécoslovaquie en échange de la promesse d’Hitler de ne pas aller au-delà.
TROISIEME CHAPITRE 1919-1939 C’ETAIT ANFIELD
34
Le Premier Ministre Neville Chamberlain rentra à la Maison un papier en main promettant
des temps de paix. Juste 24 heures plus tard, 60'000 supporters de football de la Mersey
marquèrent le retour de Munich en chantant l’Hymne National avant le derby du
Championnat à Goodison. Mais, les relents d’armistice ne furent que temporaires alors que le
football continuait d’être pratiqué dans l’attente d’événements plus significatifs. Le 15 mars
1939, alors que Liverpool faisait match nul à Huddersfield, les chars Allemands roulaient à
travers Prague. Deux semaines plus tard, Liverpool battait Brentford à Anfield alors que les
nazis menaçaient la Pologne.
La saison se termina avec une nouvelle onzième place pour Liverpool et le trophée de
Champion pour Everton. L’espoir de reprendre le titre à leur grand rival s’estompa
rapidement. La nouvelle saison venait à peine de commencer que, le 3 septembre 1939, la
Grande-Bretagne déclara la guerre à l’Allemagne. Liverpool avait joué 3 matches quand le
football fut ajourné. Il leur fallut attendre sept autres années avant de pouvoir disputer le
prochain match de championnat.
TOP 10
BUTEURS EN LIGUE
1. Gordon Hodgson
2. Dick Forshaw
3. Berry Nieuwenhuys
4. Adolf (“Alf”) Hanson
5. Dick Edmed
6. Jimmy Smith
7. Fred Howe
8. Dick Johnson
9. Jackie Balmer
10.Vic Wright
135
117
69
50
44
38
36
36
34
33
1919-1939
COUPS DU CHAPEAU
NOMBRE DE MATCHES EN LIGUE
1. Gordon Hodgson
17
2. Dick Forshaw
6
3. Harry Chambers
5
4. Fred Howe
3
5. Dick Johnson
2
6. William Devlin
2
7. Harold Barton
2
8. Henry Race
1
9. Jimmy Walsh
1
10. Danny Shone
1
(Toutes compétitions confondues)
1. Elisha Scott
2. Gordon Hodgson
3. Tom Bromilow
4. Tom Lukas
5. Jimmy McDougall
6. Fred Hopkin
7. Don MacKinlay
8. Arthur Riley
9. Harry Chambers
10. Tom Bradshaw
TROISIEME CHAPITRE 1919-1939 C’ETAIT ANFIELD
35
402
359
341
341
339
335
325
322
310
270
JOUEUR
ELISHA SCOTT
Cet enfant de Belfast n’était âgé que de 17 ans quand il arriva à Anfield. Quand il
retraversa la mer d’Irlande, il avait 40 ans, une grande expérience internationale – et
était la figure la plus emblématique que le club n’ait jamais produit.
Ce fut son frère aîné Billy qui révéla à Liverpool le secret au sujet de son extraordinaire
talent. Scott sénior – qui avait lui-même défendu les buts d’Everton lors de la victoire en
Coupe d’Angleterre de 1906 – avait dit à John McKenna et Tom Watson qu’ils devraient voir
en action l’adolescent précoce au sein de son club local de Belfast Celtic. A peine l’eurent-ils
vu qu’ils surent qu’il pourrait devenir le dernier maillon de la chaîne de gardiens de buts de
classe mondiale du FC Liverpool. Ils le firent venir en tant que remplaçant à long terme de
l’international Ecossais Kenny Campbell mais constatèrent lors des mois qui suivirent qu’il
méritait le maillot de titulaire de la première équipe. Quand Campbell fut blessé le Premier
Jour de l’An 1913, Scott fit ses débuts et fut si impressionnant que l’adversaire, Newcastle
United, lui offrit £ 1'000 pour sa signature immédiatement après le coup de sifflet final. Face à
la possibilité d’un long rappel au sein de l’équipe réserve, Scott fut tenté d’accepter mais
Watson le persuada de faire son temps avec la promesse d’être le premier choix dans les deux
ans à venir en tant que gardien titulaire de Liverpool.
Le manager tint parole. Scott concurrença sérieusement Campbell pour la place de titulaire à
la fin de la saison 1914-15 et, seule l’interruption due à la Première Guerre Mondiale arrêta sa
progression. Quand les combats furent terminés, sa suprématie ne fut plus contestée. Il était
toujours présent quand ils firent le doublé les années suivantes. Aligné durant 81 matches lors
de ces deux saisons, il ne concéda que 61 buts.
Avec ses 5 pieds et 9 1/2 pouces, Scott n’était pas plus grand que la moyenne mais son
habileté et son agilité firent de lui un élément indispensable. Un journal contemporain écrivit
de lui « qu’il domine complètement dans sa surface de réparation ». Un autre écrivit « qu’il a
l’œil d’un aigle, les mouvements souples d’une panthère quand il bondit pour arrêter un tir et
la prise d’un étau quand il attrape la balle. » Il avait aussi un des grands caractères du football.
Il s’entraînait sans relâche passant des heures à lancer la balle contre un mur et à la rattraper
après le rebond. Son régime d’exercices physiques continuait bien après la séance officielle
d’entraînement. Il évitait de prendre le tram et il était fréquent de l’apercevoir en train de
marcher les trois milles qui séparaient Anfield du terminal des ferries de la Mersey, en route
pour son domicile de Wirral. Les jours de matches, il enfilait ses long-johns de marque et ses
genouillères rembourrées avant d’être salué par le Kop aux chants de « Lisha, Lisha ». A
peine le match avait-il commencé qu’il maintenait la foule en haleine au moyen de son
langage très ordurier. Comme un journal le mentionna poliment « ses expressions typiques de
Belfast pouvaient être entendues de tous ses défenseurs parmi lesquelles des instructions et,
parfois, des malédictions. Au-delà du fait qu’il fut un choix automatique durant les années
1920 jusqu’aux début des années 30, Scott dû commencer petit à petit à se battre pour une
place. Une offre de £ 250 d’Everton fut rejetée après que les fans eurent bombardé les
journaux locaux de lettres de protestations. Toutefois, quand son ancien club de Belfast
Athletic lui offrit le poste d’entraîneur-joueur, même ses plus fervents admirateurs durent
accepter son élan émotionnel. Son dernier match pour les Rouges eut lieu en février 1934 à
Chelsea. Trois mois plus tard, il prit congé des fans de Liverpool lors de la dernière journée de
la saison par un discours plein de tristesse prononcé du haut de la loge des directeurs. Bien
qu’Anfield ait vu à cette occasion sa dernière performance, il continua de jouer au plus haut
niveau, enregistrant sa 31ème sélection internationale deux ans plus tard, à l’âge de 42 ans. En
tant que manager, il demeura à la tête du club de Belfast jusqu’à son retrait en 1949.
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MATCH
1922 LE TITRE DE CHAMPION
Le titre de 1922 fut obtenu avec une équipe qui ne coûta virtuellement rien.
Immédiatement après la Première Guerre Mondiale, la police de Liverpool recruta des
gens de la région et les enrôlait dans l’équipe réserve. Lors du meeting annuel du club, le
président W.R. Williams se moqua ouvertement de ceux qui s’en allaient lors de
transferts juteux : « Nous croyons aux succès d’un club par l’harmonie et non par
l’argent. »
Il était difficile de contester cet argument. Liverpool remporta le championnat avec six points
d’avance, ne concédant que sept défaites de leurs 42 rencontres et n’encaissant que 36 buts.
Avec Elisha Scott entre les poteaux, Eph Longworth commandant la défense et Harry
Chambers inscrivant des buts, ils étaient destinés à encore plus d’honneurs l’année qui suivit.
Le photographe immortalisa l’équipe avant un dîner de commémoration somptueux à l’Hôtel
Adelphi de Liverpool où ils eurent du théâtre, de la musique, de la cuisine française et, pour
couronner le tout, des montres en or, reçues du comité reconnaissant. Il figurait sur la photo
les personnalités du club les plus connues des années 20 accompagnées de tous les directeurs
et officiels et trois managers formés au club. Leurs noms étaient :
H. Beadles, F. Wood, J. Lillie, G. Owen, J. Kane; H. Riley (Responsable du Stade), R.
Forshaw, H. Chambers, D. Shone, T. Lucas, W. Lacey, F. Checkland, H. Wadsworth, R.
Johnson, H. Lewis, F. Mitchell, F. Hopkin; G. Gillespy, E. Parry, J. Bamber, P. McKinney,
W. Cunningham, E. Scott, T. Bromilow, C. Harrington, J. McNabb, W. Matthews, W.
Wadsworth, W. Constantin (Assistant du Responsable du Stade), C. Wilson (Responsable des
Joueurs), W. Connell (Entraîneur) ; G. Patterson (Secrétaire), D. Ashworth (Manager), M.
McQueen (Directeur), J. Hill (Directeur), R. Martindale (Directeur), W.R. Williams
(Président), J. Ashbury (Vice Président), E. Bainbridge (Directeur), T. Compton (Directeur),
W. Cartwright (Directeur), W. Webb (Directeur) ; E. Longworth, D. MacKinlay.
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MANAGER
GEORGE KAY
Qui sait ce que George Kay aurait accompli comme carrière à Anfield si sa santé et
Hitler n’étaient pas entrés en ligne de compte. Liverpool scrutait de toute évidence vers
la relégation quand il prit les rennes en 1936, mais en l’intervalle de trois années, il les
rendit capables de se battre pour le titre une fois de plus.
Bob Paisley, lors de ses dernières années, aurait sélectionné Kay dans la liste des grands
managers. Et Sir Matt Busby l’aurait décrit comme un modèle de dévouement et de
détermination : « J’ai grandi en admirant George Kay pour la façon dont il a transformé
Liverpool. Sans la guerre, je pense que le club aurait conquis les principaux titres dans les
années 40. Key était un défenseur central dont les temps d’activités ont été interrompus par la
Première Guerre Mondiale. Il se battit dans les tranchées du Front de l’Ouest avant de
reprendre sa carrière avec Belfast Celtic et devenir le premier Anglais à diriger le club de la
Ligue Irlandaise. En 1923, Il était le capitaine de West Ham lors de la fameuse finale de
Coupe dite du « Cheval Blanc ». Plus de 200'000 personnes suivirent la rencontre à Wembley
contre un de ses anciens clubs, Bolton. Il arriva dans la Mersey après cinq années passées en
tant que manager de Southampton. Deux de ses premiers transferts se révélèrent être parmi les
plus importants de l’histoire du club, à savoir Paisley et Billy Liddell.
Quand la Deuxième Guerre Mondiale éclata, sa nouvelle équipe prometteuse fut disséminée
aux quatre coins du monde. Lors de ces sept années, il rassembla une équipe de fortune pour
le championnat chaotique de la Ligue Régionale de Football constituée en temps de guerre.
A la fin des hostilités, Kay reprit les affaires en mains. En collaboration avec le Président Bill
McConnell, il organisa un tour d’avant saison en Amérique, donnant le temps aux joueurs de
se requinquer et la chance de rebâtir leur physique au moyen de steaks à profusion. Son
équipe revint en pleine confiance et prête au combat. Neuf mois plus tard, ils brandissaient le
trophée de Champion.
Kay était un Mancunien, robuste et carré d’esprit. Il ne portait pas de complet veston,
préférant nettement son complet trois pièces de marque renommée. Sur la photo d’équipe, il
paraissait comme sorti en droite ligne d’un film de gangsters. Mais, malgré les apparences, il
était un grand et subtil stratège. Il croyait en un planning scrupuleux, emmenant l’équipe
entière à Southport pour deux nuits avant chaque match à domicile. Ainsi, il pouvait surveiller
le régime et la préparation physique des joueurs. Il s’assurait que chacun ait son quota de
repos – et pas de sexe.
Pour les joueurs, ses ordres étaient paroles d’évangile. Quand un journaliste Américain lui
demanda s’il prévoyait des sorties nocturnes en ville lors d’un séjour à New York, il
répondit : « Les garçons sont des professionnels. S’ils ne surveillent pas ce qu’ils font, ils ne
garderont pas leur travail. Ils le savent. Jusqu’à maintenant personne n’a été licencié. »
En tant que personne naturellement farouche, Kay avait de la peine à communiquer, même
avec ses joueurs favoris. Bill Shankly, qui fut convié à évoluer dans une équipe du temps de
guerre à Anfield, se rappelle son style de sélection de l’équipe : « Tous les joueurs se
trouvaient dans le couloir, Billy Liddell et moi-même inclus. George ne parlait pas. Il se
contentait de passer et tapait sur l’épaule des joueurs. S’il te choisissait, alors tu jouais. »
Sur le tard, Liddell développa une franche amitié avec Kay. Il se sentit concerné quand son
manager se mit à fumer sans relâche, perdant du poids et visiblement stressé par les
obligations relatives à son poste.
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Lors des heures qui précédèrent la finale de la Coupe d’Angleterre de 1950, il s’évanouit et dû
recevoir des soins médicaux. Il revint à lui juste à temps pour sortir de Wembley mais souffrit
d’une rechute juste après. En janvier 1951, il fut contraint de quitter son job sur ordre des
médecins, et, en 1954, il succomba à la suite d’un long séjour à l’Hôpital.
Liddell fut convaicu que la surcharge de travail avait contribué à la maladie de Kay et son
autobiographie décrit le dévouement obsessionnel de son ami : « Il n’avait pas d’autre pensée
que le bien de Liverpool durant la journée mais également durant la plupart de ses nuits. Il me
parlait souvent du temps où il était au lit, incapable de dormir, étudiant les innombrables
problèmes qui obsèdent chaque manager mais qui peuvent être l’ennemi de tous ceux dont la
conscience et la sensibilité sont excessives. S’il existe un homme qui donna sa vie à son club,
en l’occurrence Liverpool, George est celui-là.
Il était le Shankly de l’époque, il détestait dormir et ne vivait que pour une seule chose – le
football. Cyril Done
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