Négociation sociale : évitez les phrases qui tuent

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Négociation sociale : évitez les phrases qui tuent
 Négociation sociale : évitez les phrases qui tuent Une négociation sociale qui commençait bien tourne parfois au fiasco à la suite de maladresses dont la délégation patronale ne mesure pas l’impact. Ces maladresses, je vous propose de les illustrer à travers 10 phrases qui les suggèrent ou les expriment en clair. Précisons que je n’en ai inventé aucune ! 1. « Bon, qu’est‐ce qu’on va leur raconter aujourd’hui ? » Phrase souvent entendue dans l’heure qui précède le début de la négociation. Elle indique le manque de préparation, voire l’improvisation, et dès lors le manque de respect. Tout cela se sentira lors de l’ouverture des négociations. Et vos interlocuteurs syndicaux, s’ils ont du métier, auront devant eux un véritable boulevard pour prendre la main sur la réunion. 2. « Dans quel ordre voulez‐vous mener les débats ? » Le maître des débats et le pilote de la réunion, c’est vous ! Evitez d’afficher dès le départ ce qui passera pour un signe d’indécision ou de faiblesse. 3. « Vous m’avez coupé et en plus, votre déclaration est hors sujet » Si votre délégué syndical vous coupe dès le départ pour faire une déclaration préalable (solennelle, debout et sans grand rapport avec l’objet de la réunion), c’est pour vous faire perdre votre sang‐froid : cette technique est enseignée dans les formations syndicales. Ne tombez pas dans le piège : laissez‐le terminer, demandez si d’autres syndicats veulent s’exprimer puis reprenez calmement : « Venons‐en maintenant à l’ordre du jour… » 4. « Monsieur X, je reconnais bien là le style agressif qui vous caractérise » Si vous ne supportez pas l’un de vos délégués syndicaux, évitez de l’afficher en séance et pire encore, de réagir à ses provocations : c’est l’ensemble de la délégation syndicale que vous allez vous mettre à dos. Cherchez plutôt à faire le point, seul avec lui, sur ce qui vous paraît inacceptable dans son comportement. 5. « Je vais voir avec ma direction quelle position nous prendrons » Pourquoi la délégation syndicale négocierait‐elle avec vous si vous n’êtes pas le bon interlocuteur ? Et si vous lui faites comprendre que vous n’avez aucun mandat clair de votre direction générale ? Si vous avez bien préparé la réunion, aucun sujet important ne doit vous prendre au dépourvu : vous aurez vérifié au préalable les marges de manœuvre que le mandat de votre direction générale vous laisse. 6. « Je vous préviens tout de suite : il n’y aura aucune négociation en bilatérale » Vous voulez agir vite ou ne pas gaspiller votre temps. Mais c’est oublier que les bons accords se construisent souvent en bilatérale avec les leaders syndicaux : chacun de vos partenaires sociaux peut s’exprimer librement, sans craindre les réactions des autres syndicats. 7. « Je vais répondre point par point aux affirmations de M. X » Il est normal qu’un « leader négatif » émerge face à vous et vous impose de ferrailler sur chaque détail du nouvel accord. Mais à trop vous focaliser sur lui, vous risquez d’y passer trop de temps et d’oublier le « leader positif », moins sûr de lui, dont les propositions contribueraient pourtant à améliorer le texte. 8. « C’est à prendre ou à laisser » Ne fermez jamais la porte, surtout si la signature de l’accord est toute proche : votre interlocuteur principal a peut‐être besoin de formuler une revendication anecdotique pour vous, mais à forte portée symbolique ou personnelle pour lui. Exemple : il a 55 ans et vous avez prévu dans l’accord un dispositif de départ anticipé à partir de 57 ans. Pour votre responsable syndical, cette formule laisse un goût déplaisant de mise en demeure ou de prise de pouvoir sur lui. 9. « Je regrette, mais ce point n’est pas à l’ordre du jour » Certes, mais la délégation syndicale percevra surtout votre raidissement et s’interrogera sur ce qui le motive. Au pire le sujet que vous avez refusé d’aborder pourra devenir une revendication récurrente. Jouez plutôt la diplomatie en proposant de revenir sur ce point lors d’une prochaine réunion. Et étudiez à froid si la demande ne peut pas être intégrée dans l’équilibre global d’un futur accord. 10. « J’ai dit endémique, pas épidermique. Vous ne connaissez pas le sens du mot ? » Rien de pire, évidemment, que d’humilier son interlocuteur en lui renvoyant en pleine figure les limites de son vocabulaire. Choisissez vos mots avec soin. Ou comme le disait Aristote : « Pensez en homme cultivé, parlez en homme simple.» 

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