Comparatif international des modes de recrutement

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Comparatif international des modes de recrutement
Comparatif international des
modes de recrutement : le
réseau tout puissant
LE MONDE | 20.01.2015 à 17h54 • Mis à jour le 02.02.2015 à 14h57
Nicolas Barrome Forgues pour Le Monde. Nicolas Barrome Forgues
Comment recrute-t-on à l’étranger ? Job boards, réseaux sociaux, cabinets
de recrutement ou simple bouche-à-oreille : quels sont les outils privilégiés
par les employeurs américains, chinois, allemands ? Si les jeunes diplômés
sont de plus en plus mobiles et prêts à franchir les frontières, la recherche
d’un travail à l’étranger nécessite parfois de connaître certaines subtilités
des relations candidat-employeur.
Aux Etats-Unis, une personne à la recherche d’un emploi n’hésitera pas à
demander à l’un de ses contacts LinkedIn ou Facebook de la recommander
pour un poste dans l’entreprise où il travaille. Le groupe Accenture a même
créé une application permettant aux candidats externes de trouver, dans
leur carnet d’adresses, les employés susceptibles de les aider à postuler. «
Les recommandations sont à l’origine de 20 % à 30 % des recrutements
aux Etats-Unis. Cela peut aller jusqu’à 50% pour des entreprises qui ont un
programme performant, avec des outils technologiques et des gratifications
adaptées », indique Gerry Crispin, fondateur du cabinet de conseil et
d’analyse CareerXRoads.
L’enquête annuelle menée par ce dernier auprès de 250 grandes
entreprises place les recommandations à la première place des sources de
recrutement outre-Atlantique, juste devant les candidatures déposées sur
les sites carrière des entreprises et les job boards comme Monster ou
Careerbuilder. « Un candidat recommandé a quatorze fois plus de chances
d’être recruté qu’un autre. On recommande moins facilement quelqu’un de
sa famille qu’en Europe et plus facilement des gens que l’on a connus à
l’université ou au cours de sa carrière, souligne Gerry Crispin. Les réseaux
sociaux sont un outil formidable pour cela. »
2 % des recrutements
En 2013, 78 % des recruteurs américains déclaraient avoir déjà effectué un
recrutement sur les réseaux sociaux, selon un sondage de la plate-forme
de recrutement Jobvite, contre seulement 32 % en France, d’après une
enquête de RégionsJob.
« Les réseaux sociaux donnent accès à de bons candidats mais il faut
beaucoup de temps pour les identifier et il est souvent difficile de les faire
postuler », souligne Stéphane Wajskop, PDG du cabinet de recrutement
2.0 Careers International. Les employeurs européens y consacrent en
moyenne moins de temps que leurs homologues américains. D’après une
étude du cabinet Stepstone portant sur sept pays (Autriche, Belgique,
Danemark, France, Allemagne, Suède et Royaume-Uni), en 2013,
seulement 2 % des recrutements se sont faits sur les réseaux sociaux.
Ces derniers arrivent loin derrière les job boards (21% des recrutements),
les services publics de l’emploi ou même les offres d’emploi publiées dans
la presse (10 %). Or le « recrutement social » correspond beaucoup plus
aux attentes des jeunes diplômés, selon M. Wajskop. « Les nouvelles
générations veulent aller au-delà du marketing traditionnel qui met en avant
la marque, de belles images, des valeurs politiquement correctes. Avant de
postuler pour un job, ils veulent pouvoir se faire une idée du travail et
échanger avec leurs futurs collègues et managers. C’est particulièrement
vrai pour ceux dont le profil est recherché comme les ingénieurs. »
Les outils varient entre les marchés sous
tension et les autres
Si elles sont moins actives sur les réseaux sociaux que leurs homologues
américaines, les entreprises européennes savent en revanche tirer parti de
leur propre réseau. « Près d’un quart (24 %) des recrutements se fait via
des sources internes : mobilité interne, candidatures reçues sur le site
carrière de l’entreprise, cooptation et activation des réseaux du recruteur »,
affirme Stepstone. Mais l’usage de ces outils varie selon les pays.
« Il y a une grosse différence entre les marchés sous tension et les autres
», souligne François de Boutray, PDG d’Aktor Interactive, une agence
lyonnaise de communication en ressources humaines. En Allemagne, la
pénurie d’ingénieurs dans un certain nombre de secteurs conduit les
entreprises à être plus proactives sur les réseaux sociaux où elles espèrent
dénicher la perle rare.
« Non seulement elles n’attendent pas que le poisson morde à une offre
d’emploi mais elles vont souvent chercher des candidats à l’étranger, en
Espagne, en Grèce ou même en France. Cependant, les entretiens restent
très importants et passent à la loupe le parcours professionnel d’un
candidat », dit M. de Boutray, qui ajoute que la Suisse aussi est à la
recherche de talents : « Il n’y a pratiquement pas de marché caché, la
plupart des emplois disponibles sont publiés via les job boards, explique-til. A l’inverse, l’Italie est beaucoup plus friande du recrutement relationnel.
Ce qui empêche les personnes n’ayant pas de réseau sur place d’avoir
accès à une grande partie des opportunités. »
Priorité aux job boards chez les émergents
Dans les pays émergents, l’accès aux emplois disponibles est également
assez facile, d’après les spécialistes du recrutement. Cela s’explique, d’une
part, par la difficulté pour les entreprises de trouver de nouveaux talents en
interne, d’autre part par l’adoption récente des outils de diffusion d’offres
d’emploi en ligne. « En Inde, les job boards surpassent largement les
autres sources de recrutement avec un volume d’embauche supérieur de
50% aux cabinets de recrutement ou au bouche-à-oreille », affirme le
groupe britannique de recrutement digital Evenbase.
En Chine, l’essor des réseaux sociaux professionnels, parmi lesquels le
français Viadeo (20 millions de membres en Chine), promet de
révolutionner le marché du recrutement. « Le réseautage est un aspect
fondamental de la culture professionnelle chinoise. Par conséquent, les
réseaux sociaux ont un gros potentiel », y compris en matière de
recrutement, souligne Evenbase dans une étude intitulée « Digital
Recruitment, The Hottest Markets in 2020 ».
Cette étude indique aussi qu’un quart des consultants en recrutement au
Brésil sont âgés de moins de 21 ans et donc plus sensibles à l’usage des
réseaux sociaux. « Le modèle des job boards, s’il est un peu moins en
forme en Europe et dans les pays anglo-saxons, reste très utilisé dans les
pays émergents », note toutefois François de Boutray. Sur tous les
continents, il n’y a, selon lui, que deux outils indispensables pour trouver un
emploi : le CV et la lettre de motivation.
(Semestriel Le Monde « Campus », novembre 2014).
http://www.lemonde.fr/emploi/article/2015/01/20/comparatif-international-des-modes-derecrutement-le-reseau-tout-puissant_4559971_1698637.html