Dossier parcours découverte

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Dossier parcours découverte
Le Musée d’Angoulême
Parcours
Découverte des
collections
Dossier enseignants
angouleme
1
Sommaire
Présentation du dossier
Préparer votre venue
Les ressources à disposition
p. 3
Plan des salles et emplacement des oeuvres
p. 4
L’histoire du lieup. 5
L’archéologie charentaisep. 6
Les arts extra-européensp. 15
Les beaux-artsp. 24
2
n
Un dossier pour faciliter la découverte du musée en autonomie
Le principe du dossier
Ce dossier a été créé pour vous aider dans votre découverte lorsque vous ne pouvez ou ne souhaitez pas venir en
visite guidée.
25 fiches de découverte vous sont proposées : 1 sur l’histoire du lieu, et 8 par collections. Le musée possède en effet
trois collections : archéologie de la Charente au RDC, arts extra-européens au 1er étage, beaux-arts au dernier étage.
Une sélection a été réalisée afin que vous puissiez découvrir les oeuvres principales, mais aussi toute la variété et la
richesse des pièces qui sont exposées.
Le contenu des fiches
Chaque fiche comporte une image de l’objet, son identification, des éléments vous permettant de mieux la comprendre, des pistes pédagogiques, les titres d’oeuvres pouvant lui être relié et une légère bibliographie que vous
pouvez consulter au sein de notre centre de documentation.
Que vous veniez pour découvrir le musée, un étage en particulier ou autour d’un projet, vous pouvez
construire votre visite comme bon vous semble et choisir les fiches les plus pertinentes pour votre projet.
n
Préparer votre venue
Réservez votre visite
Inscriptions et réservations auprès du service des publics.
Tout groupe venant au musée, même en visite libre, doit obligatoirement avoir effectué une réservation, de préférence par mail. En cas d’annulation, merci de nous l’indiquer au plus tôt.
Émilie Falk
[email protected]
05 45 95 79 89
Jours et horaires de visite
Le musée est ouvert du mardi au dimanche, de 10h à 18h sans interruption.
n
Les ressources à votre disposition
Le site internet du musée
www.musee-angouleme.fr
Le centre de documentation
N’hésitez pas à franchir la porte du centre de documentation du musée. Notre documentaliste est à votre disposition pour vous renseigner et vous orienter sur les différentes ressources : revues et ouvrages généraux sur l’histoire
de la Charente, l’histoire de l’art, les Beaux-arts, l’archéologie, les continents africains et océaniens, l’ethnographie...
Des dossiers d’oeuvres autour de plusieurs objets, artistes, peuples ou courants présents dans le musée sont à
votre disposition, et sont signalés dans les fiches du dossier.
Graziella Relet
05 45 95 79 91
[email protected]
Ouvert tous les après-midi du mardi au vendredi. Il est conseillé de prendre rendez-vous pour préparer votre projet.
3
Plan des salles
& Emplacement des oeuvres
4
Préhistoire
RDC
ARCHÉOLOGIE
5
Antiquité
7
6 Moyen-âge
1.Ammonites et rudistes
2.Fémur de sauropode
3.Os de mamouth rongé par l’hyène
4.Femme de la Quina
5.Aiguille à chas
6.Casque d’Agris
7.Pions de jeu médiévaux
8.Chapiteau roman, griffons affrontés
8
i
1
Préhistoire
Accueil
Géologie
3
2
Entrée
Documentation
Exposition temporaire
NIVEAU 1
EXTRA-EUROPÉENS
Afrique
1
Maghreb
3
2
Océanie 6
8
5
7
4
NIVEAU 3
BEAUX-ARTS
Foyer
charentais
1
Peintures
européennes
2
3
6
4
5
7
8
1.Sac Eljibera
2.Masque Ejumba
3.Masque cimier Tyi Wara
4.Poids à peser l’or
5.Figure de reliquaire mbulu-ngulu
6.Les objets de navigation océaniens
7.Bambous gravés kanaks
8.Tambour de grade
1.La consternation de la famille de Priam
2.Table servie
3.Scène d’auberge
4.Les chaumes
5.Caïn et Abel
6.Portrait de Jules Durandeau
7.La Charente à l’Houmeau
8.Sous-bois à St Gall
4
m
L’histoire du lieu
S
itué derrière le chevet de la cathédrale, le Musée d’Angoulême présente trois
types de collections : une collection archéologique témoignant de l’histoire
de la région, une collection riche et diversifiée des arts d’Afrique et d’Océanie,
ainsi qu’une collection Beaux-arts
du 18ème au début du 20ème siècle
comportant de nombreuses
œuvres charentaises.
Le bâtiment, un ancien évêché
La naissance du musée
Le musée d’aujourd’hui...
Le mot évêché, qui désigne le lieu de
résidence de l’évêque, souligne le lien
étroit entre cet ensemble bâti et celui
qui l’administre. C’est donc sans surprise que l’on mentionne un évêque,
Girard II, lorsqu’on aborde l’histoire
de ce bâtiment singulier.
Maître d’ouvrage des travaux de reconstruction effectués au 12ème siècle,
il est la personnalité qui donna à
l’évêché sa configuration actuelle :
un large complexe composé de deux
ailes en équerre abritant une grande
salle, une chapelle et une chambre de
réception que l’on retrouve encore aujourd’hui, sous une forme différente,
intégrée à la scénographie du musée.
Au 19ème siècle, une autre figure illustre du patrimoine angoumoisin,
l’architecte Paul Abadie Fils, œuvrera
pour restaurer l’édifice endommagé
par les années et en modifier la
fonction suite aux bouleversements de la Révolution
française qui engendrèrent la cession des
locaux à la
Préfecture.
C’est en 1868 qu’ouvre au rez-dechaussée de l’Hôtel de ville un premier petit musée principalement
composé de toiles primées au
Salon, envoyées par les gouvernements successifs, et d’un don d’un
artiste local, François Ringuet. Il faut
attendre 1920 pour que la demeure
épiscopale devienne le musée municipal. On y présente alors peinture,
sculpture et archéologie.
Grâce à ce nouvel espace et aux
dons de collectionneurs, les oeuvres
présentées se diversifient. Le plus
important de ces contributeurs, le
docteur Jules Lhomme, lègue un
ensemble impressionnant de 3243
objets d’art et d’ethnographie. Ces
nombreuses pièces sont à l’origine
de l’actuelle collection extra-européenne (Maghreb, Afrique et Océanie) et étoffent également les collections archéologiques déjà existantes.
L’évolution des collections du musée
et de ses activités à destination d’un
public de plus en plus large amène
la municipalité à décider de la rénovation des bâtiments en 2000. Un
projet de réaménagement ambitieux
est donc porté par les architectes
Stéphane Barbotin-Larrieu et Paul
Gresham qui proposent une intégration discrète, transparente et originale d’éléments contemporains à
l’architecture de ce lieu patrimonial.
La création d’une grande verrière
donnant sur la cathédrale permet
non seulement de reconnecter les
bâtiments du musée à leur environnement et leur histoire mais aussi
de recontextualiser les collections
d’archéologie médiévale, témoins
des édifices religieux de la ville.
Le musée ouvre de nouveau ses
portes en 2008, offrant au regard du
visiteur une nouvelle présentation
claire et agréable où chaque collection dispose d’un espace dédié.
Des accès repensés permettent
à tous de se rendre au musée
tandis que les nouveaux équipements comme la salle d’exposition temporaire, la salle
de conférence ou le centre de
documentation
permettent
d’offrir une plus grande variété
d’actions pour le public.
5
RDC - ARCHÉOLOGIE
L’archéologie est un des éléments identitaires les plus forts de la
région. De l’homme de Néandertal à l’art roman en passant par
le mégalithisme, elle permet d’individualiser la Charente dans ce
qu’elle a d’unique et d’original.
Les collections : originales et variées
Bien qu’issue d’un fonds ancien (collection Lhomme et collection des évêques),
la collection conservée au musée d’Angoulême rassemble essentiellement le
produit des fouilles conduites ces quarante dernières années en Charente. Leur
présence au musée d’Angoulême s’explique par la politique de collaboration
avec les milieux scientifiques et les chercheurs initiée dès les années soixantedix. Ces collections nouvelles prennent toute leur valeur grâce aux informations
scientifiques qui les accompagnent : documents de fouilles, thèses et publications.
La thématique générale : l’histoire naturelle et humaine du bassin de la Charente
Géographiquement, les thématiques choisies sont développées dans le cadre
du bassin de la Charente. Elles embrassent la très vaste période qui part des
origines géologiques de la région pour aboutir à la période romane.
L’ampleur chronologique de cette présentation implique un jalonnement ponctuel, et forcément incomplet, d’un phénomène continu. Il s’agit donc d’un trajet chronologique présentant des tableaux des environnements ou des cultures
disparus, matérialisés par une suite d’étapes : géologie, quaternaire, homme
de Néandertal, Cro-Magnon, le temps des mégalithes, l’âge du bronze, la période celtique et enfin
le Moyen-âge.
L’exposition est également conçue pour mettre
en relation les vestiges et les sites d’où ils proviennent.
6
RDC 1
Ammonites et rudistes
Fossiles du tertiaire et secondaire charentais
L
a géologie en Charente regorge
de trésors, parmi eux, les ammonites (proches parents disparus du calamar et du nautile) et les rudistes, bivalve conique. Ces deux espèces s’éteignent
il y a 65Ma, avec les dinosaures et bien d’autres espèces.
Les ammonites
Les ammonites sont des céphalopodes (mollusques munis de tentacules sur la tête) dont la coquille
enroulée faite de nacre n’est que très
rarement conservée. Ce que l’on retrouve n’est que l’empreinte interne
de la coquille.
L’actualisme, principe selon lequel
les phénomènes du passé ressemblent fortement à ceux du présent, permet de comparer l’ammonite au nautile actuel dont il est très
proche dans la répartition des loges
(compartiments de la coquille).
De manière générale, comme tout
céphalopode, l’ammonite projetait
un jet d’eau pour se déplacer, tandis que les loges internes, plus ou
moins remplies d’eau ou de gaz permettaient d’aller en profondeur ou
de remonter.
Les ammonites sont précieuses pour
le géologue : elles sont nombreuses
et évoluent rapidement, permettant
ainsi d’établir une échelle chronologique très fiable.
Les rudistes
Les rudistes sont apparus il y a
156 Ma. Ils sont visibles dans les
éléments bâtis avec la pierre dite
d’Angoulême : les nombreux trous
visibles sont autant de moules de
valve inférieure de ce fossile. Celuici est en effet composé d’une valve
inférieure conique profonde (qui
contient la partie molle), recouverte
d’une valve supérieure plate, tel un
petit opercule. Cette forme favorise
la présence de plusieurs individus
côte à côte : ce sont des rudistes
coloniaux.
Les rudistes présents dans les salles :
Biradiolites lumbricalis, Radiolitides et
dérivés, Hippurites radiosus
Des fossiles révélateurs de
leurs milieux de vie
Au Crétacé (de 145 Ma à 65 Ma),
l’Europe était un archipel tropical,
et la région Poitou-Charentes était
inondée par des mers chaudes. Un
haut fond marin, au nord de notre
région, reliait les Massifs armoricain
et central, terres émergées de « l’archipel Europe ». Son versant sud
plongeait dans les eaux du Bassin
aquitain, lagons tropicaux peu profonds, tandis que son versant nord
était baigné des eaux plus fraîches et
plus profondes du bassin parisien.
Chacun des deux domaines renfermait une faune caractéristique : les
ammonites au nord (elles nagent en
mer, milieu ouvert) ; les rudistes au
sud (ils se fixent sur les fonds marins
peu profonds et fermés).
Ces deux fossiles sont donc de bons
indices pour reconstituer le paléoenvironnement marin.
Bibliographie
- La géologie à petits pas, François Michel, Robin Gindre – Actes sud Junior, 2010
- Géologie de la Charente, Jean François Tournepiche – éd GERMA 1998
Qu’est-ce qu’un fossile ?
Un fossile correspond à un organisme mort qui a été remplacé par
des minéraux. Pour se former, un
fossile a besoin d’être enfouis dans
des sédiments rapidement. Les fossiles peuvent être composés soit de
l’enveloppe externe de l’organisme
(assez rare), soit du moule externe
de cette enveloppe (l’emprunte) et/
ou du moule interne (l’enveloppe,
trop fragile ayant disparue).
Pistes pédagogiques
•Fossilisation
•Biodiversité passée
•Fossile stratigraphique
•Paléo-environnement
•Actualisme
•Crise du crétacé tertiaire
Autres œuvres en lien dans le
musée
•Fossiles de tous types : oursins, crinoïdes, éponges, coraux...
•Dinosaures et animaux du début
du Crétacé : crocodiles, tortues,
poissons du site de Cherves ; sauropode du site d’Angeac.
•Tronc d’araucaria fossilisé, témoin
du paléoenvironnement terrestre.
7
RDC 2
Fémur de Sauropode (moulage)
Angeac Charente, ~140/130 millions d’années avant JC
C
e moulage grandeur nature fait
partie des incroyables découvertes
réalisées à Angeac-Charente, où plusieurs espèces de dinosaures ont été
trouvées, dont ce sauropode, dinosaure
herbivore d’environ 40m de long.
Le fémur de sauropode
Cette grande plaque suspendue est
un moulage grandeur nature d’un
fémur d’un peu plus de 2m de haut
de grand dinosaure sauropode.
Le fémur est l’os de la cuisse et est
reconnaissable grâce aux deux extrémités très bien conservées. La partie en L est la partie supérieure qui
marque l’articulation avec la hanche.
Sa couleur noire correspond à la
véritable couleur du sol et donc du
fossile (un fossile prend la couleur
du sol dans lequel il se fossilise) :
de l’argile noire. Les autres parties
noires entourant le fémur sont des
éléments de bois de type araucaria,
tels que l’exemplaire fossile présenté
à côté.
Le grand sauropode d’Angeac
La famille des sauropodes est cette
famille de dinosaures à long cou
dont les plus connus sont le brachiosaure et le diplodocus, deux
dinosaures bien plus récents. Celui
d’Angeac, dont la taille peut être estimée à 40m de long et 20m de haut
au regard de la taille du fémur, est
probablement le plus grand connu
à ce jour et dont l’espèce n’est pas
encore identifiée (il est deux fois plus
grand que le diplodocus).
Dinosaure herbivore, ses dents ne
lui servent qu’à arracher des feuilles.
Sa queue, si longue lui sert quant
à elle de balancier pour garder son
équilibre.
À Angeac, de nombreuses vertèbres
et dents ont été retrouvées, mais
aussi des éléments beaucoup plus
rares tels que des éléments de mâchoires et même une «griffe» de
34cm, trouvée lors de la campagne
d’été de 2014 !
Un moulage, pour quoi faire ?
Des moulages des belles pièces ou
des pièces fragiles sont fréquemment réalisés : cela facilite leur
présentation au public, y compris
en dehors du musée, mais permet
aussi d’avoir un instantané 3D de sa
position exacte lors de sa découverte
pour bien comprendre comment il
s’est cassé, même après avoir été
sorti de terre.
En effet, et comme cela est visible
sur le moulage, l’os est en plusieurs
morceaux qu’il faut ensuite consolider et remonter. Loin d’être si facile
lorsque l’os a été écrasé et ne peut
plus bien rentrer en connexion entre
les différents morceaux... Des solutions sont encore cherchées par
les professionnels pour l’étudier
sereinement et pouvoir présenter, à
terme, l’original au public.
une surface très étendue que les carriers exploitants (Carrière Audouin)
ont mis au jour et nous aident désormais à étudier en laissant la fouille
se dérouler chaque été... Quelques
éléments de stégosaure ou de théropode ont été découverts, mais le
sauropode et l’ornithomimosaure
(ou dinosaure-autruche) sont incontestablement les plus présents. Le
site recèle encore bien des secrets,
notamment la cause de la mort massive de ces dinosaures à cet endroit
précis.
Pistes pédagogiques
•Le monde du vivant
•L’environnement du passé et sa
biodiversité
•La fossilisation
Le site d’Angeac
Œuvres du musée en lien
Angeac-Charente est un site désormais mondialement reconnu pour
ses découvertes paléontologiques*.
Fouillé depuis 2009, il a mis à jour
un gisement incroyable d’os de dinosaures, de crocodiles, tortues... sur
•Dents de sauropode
•Crâne de crocodile de Cherves (période relativement similaire)
•Tête de fémur
•Araucaria (espèce de bois) fossile
Bibliographie
- Mimo, sur la trace des dinos - Mazan, Detha, Allain et Tournepiche, ed.Eidola, 2012 ouvrage jeunesse sur le site d’Angeac
ses fouilles et BD avec les dino
8
RDC 3
Os de mamouth rongé par l’hyène
Grotte de La Chaise
et biface moustérien en silex à droite
C
e « biface », en os de mammouth, décrit
comme un outil façonné par l’homme de
Néandertal dans les années cinquante, n’est qu’un
fragment d’os rongé par les hyènes. Longtemps,
certains ossements rongés par les hyènes ont été
interprétés comme des outils préhistoriques.
L’industrie osseuse de l’homme
de Fontéchevade décrite à la fin
des années cinquante, s’identifie
complètement au contenu des tanières d’hyène. Les brunissoirs, les
manches d’outils en bois de cervidé,
les os appointés n’étaient que des
vues de l’esprit à une époque où on
ne connaissait pas les processus
naturels et notamment l’action des
hyènes.
Des méthodes de recherche
bien différentes aujourd’hui
Au 19ème siècle, les archéologues
cherchaient le spécimen rare alors
qu’actuellement, on veut connaître
le mode de vie, le comportement des
êtres anciens et leur paléoenvironnement. Ceci a une conséquence sur
les méthodes et la durée des fouilles.
Il faut parfois 10 ans pour fouiller
4m3 actuellement alors qu’il ne fallait
qu’une demi journée au 19ème siècle.
La taphonomie
Cette évolution a abouti à la naissance d’une nouvelle science : la taphonomie. Cette partie de la paléontologie étudie ce que deviennent les
organismes après leur mort.
Questions auxquelles la taphonomie peut permettre de trouver une
réponse :
•Mangé ou mangeur ?
•Consommé par l’homme ou par un
autre carnivore ?
•Déposé sur place (autochtone) ou
venant d’ailleurs (allochtone) par
un moyen de transport à définir
(vent, eau, glace, prédateur animal,
humain..) ?
•Restes en position originelle, tous
contemporains, ou bien remaniés
et mélangés avec des restes plus
récents ?
Indices étudiés :
•traces de dents sur l’os
•traces d’usure
•cassure avec cicatrisation
•os en connexion anatomique
•terriers, galeries d’animaux fouisseurs actuels
Les hyènes, des aides précieuses
Parmi les grands carnivores, la hyène
des cavernes est celui dont l’étude
présente le plus grand intérêt pour
la préhistoire car ils sont des collecteurs d’os. L’hyène des cavernes est
étroitement apparentée à l’hyène
africaine. Elle en diffère par sa taille
plus importante, la morphologie de
ses dents et un comportement un
peu différent. Les hyènes sont représentées par de nombreux ossements
(des dents surtout) et par des coprolithes (excréments fossilisés). Les os
d’herbivores portent des traces des
dents d’hyènes : les extrémités des
os longs ont été rongées et les os les
moins résistants ont disparu (côtes,
vertèbres...). L’action des hyènes se
Bibliographie
- Dossier thématique en consultation au centre de documentation
révèle également par la présence
d’os régurgités.
En collectant toutes les carcasses
animales dans un large périmètre,
les hyènes nous offrent un reflet assez fidèle de l’environnement animal
de l’époque.
Hyènes et hommes : quels relations ?
La présence de restes humains
rongés porte à s’interroger sur la
nature des relations entre l’hyène et
l’homme sur un territoire qu’ils partageaient.
Des cavités ont pu accueillir alternativement des occupations animales
et humaines (décelables par la présence de silex parmi les ossements).
Il en résulte un mélange inextricable
si le site n’est pas fouillé avec soin.
Pistes pédagogiques
•Étude de l’environnement des
hommes préhistoriques (paléoenvironnement)
•Méthode de recherche et de fouilles
Œuvres du musée en lien
•Coprolithes d’hyènes
•Bois de cerf rongé, et bois de cerf
taillé pour emmanchement de hache
•Sol de la grotte de Rochelot,
-100 000 (os visibles depuis le dessous).
9
RDC 4
La femme de la Quina
moule du crâne en état de découverte (en salle)
reconstitution du visage (hall du musée)
Site de La Quina
Epoque du Moustérien (~70 000 -30 000 av.JC)
C
ette femme a révolutionné nos connaissances sur l’homme de Néandertal. Loin
d’être la brute que nous pensions, le travail
qu’a effectué le Dr Henri-Martin autour
de cette découverte nous permet d’en
savoir un peu plus sur l’apparence de ces
hommes.
Le site de La Quina
Les crânes néandertaliens
Le site de La Quina, situé près de Villebois Lavalette, a été découvert dès
1872. Plusieurs fouilles se sont succédées jusqu’à l’achat du site par le
Dr Henri Martin en 1905. Il y installe
alors son laboratoire et y consacre
plusieurs années. Parmi ses découvertes, celles de deux êtres humains :
une femme dont le squelette était très
bien conservé, et le crâne d’un enfant.
Les néandertaliens possèdent une
anatomie crânienne spécifique : épaisseur de la calotte crânienne, bourrelet
de l’arcade sourcilière, bourrelet à
l’arrière du crâne, trou après les molaires, absence de menton en sont les
principaux traits.
Lorsque l’on compare ces crânes
adultes à ceux des enfants (comme
c’est possible dans la vitrine centrale
de la salle), on se rend compte que les
traits sont bien moins marqués chez
eux et s’apparentent plus aux nôtres.
C’est en grandissant que l’homme de
Néandertal développe ces caractéristiques anatomiques.
Le crâne de la femme de La Quina
Le 18 septembre 1911, le crâne de « la
femme de La Quina » est découvert.
Le caractère exceptionnel réside dans
l’état de conservation du crâne, dont
l’organisation anatomique est quasiment intacte. D’ordinaire, seuls des
fragments sont trouvés.
Dans la vitrine, le moulage du crâne
(identique à 1911) est placé au sol pour
visualiser quelque peu le contexte de
découverte (l’original est conservé au
Musée des Antiquités Nationales à St
Germain en Laye).
Si le Dr Henri Martin n’a su l’identifier,
il s’agissait très probablement d’une
sépulture. Cela implique la présence
d’une organisation sociale, de rites
de passage, voire de croyances, déjà à
l’époque de Néandertal.
La datation, bien que relative et sujette
à changement, semble être antérieure
à 50 000 av.JC. Par sa datation et ses
caractéristiques anatomiques, cette
femme fait des partie des néandertaliens.
Le Dr Henri-Martin (1864-1936)
Le Dr Léon Henri-Martin fut le premier préhistorien moderne à venir en
Charente. Il avait une grande rigueur
scientifique et a étudié le site de La
Quina de manière très poussée pour
l’époque. Sa formation de médecin l’a
poussé à étudier les os précisément,
en les comparant, en établissant des
relevés... Ces recherches ont ainsi
permis à la communauté scientifique
de mieux comprendre l’anatomie des
néandertaliens.
Il consacra une grande partie de sa vie
et sa richesse aux recherches du site
de La Quina.
L’image de l’homme de Néandertal
Il a révolutionné l’image que nous
nous faisions de l’homme de Néan-
dertal. Grâce au crâne de cette
femme et à ses connaissances anatomiques, le Dr Henri-Martin a reconstitué son visage. Nous sommes
très loin de la vision que nous avions
de cet humain par le passé. Cette représentation voûtée et simiesque est
en fait due à une mauvaise interprétation d’un squelette (l’arthrite avait
causé cette déformation). Quand au
rapprochement avec le singe, il s’agit
plus de la vision d’une époque que
d’une vision scientifique. Le Dr Henri Martin montre que les différences
entre nos visages sont bien moins
marquées en réalité. De nos jours,
les connaissances ont encore avancé
et la similitude de nos visages se fait
de plus en plus sentir. Nous partageons même 4% de notre génome
avec lui
Pistes pédagogiques
•Les premières traces de vie humaine
•Études scientifiques et relativité
des données selon les époques
Autres œuvres du musée en
lien
•Autres crânes dans salle de Néandertal
•Vitrine sur le Dr Henri Martin dans
le hall du musée
•Les silex et les productions des
hommes de Néandertal.
Bibliographie
- Dossier thématique consultable au centre de documentation
10
RDC 5
Aiguille à chas
Grotte du Placard
Paléolithique supérieur (~40 000 -10 000 av.JC)
L
’innovation de l’outillage du paléolithique supérieur réside
moins dans les nouvelles techniques que dans la taille
d’objets petits ou allongés telles les lamelles. À cette époque
se développent les industries sur os (aiguilles à chas, harpons, sagaies, boutons, parures, etc.), les gravures et les
sculptures.
Période et typologie
Cro-Magnon et la couture
L’aiguille à chas est inventée par les
solutréens (Solutréen final de la vallée de
la Vézère en Dordogne ~18/17 000 avt JC)
et sera un objet typique du Magdalénien. Elle est présente dans toutes les
périodes et dans toute l’aire d’extension de cette culture et disparaît, en
France, au Mésolithique.
Les matières utilisées sont l’os, le
bois de cervidé, l’ivoire.
La mensuration d’aiguilles entières
permet de les classer en deux groupes
selon leur longueur.
Le groupe le plus important est celui
d’aiguilles longues de 30 à 80 mm. Audessus de 80 mm, il s’agit de grandes
aiguilles ; elles sont peu nombreuses.
Le chas est le plus souvent circulaire
et mesure 1 mm de diamètre (les extrêmes sont 0.5 et 2.4 mm).
La présence des aiguilles à chas est
la preuve que, dès le Paléolithique
supérieur, les hommes cousent certainement des peaux. Les aiguilles
en os ou bois de cervidés perdurent
même durant les périodes où apparaissent les exemplaires en métal. Par
exemple, à l’époque gallo-romaine les
aiguilles en os côtoient celles en fer.
Des sépultures attestent la pratique
de couture des pièces de peau pour
en faire des vêtements : des milliers
de perles décorent certains corps
ensevelis, de telle sorte que leurs
supports vestimentaires purent être
restitués en « négatif ».
La fabrication
La fabrication d’une aiguille à chas
est une opération minutieuse : sur
un os bien droit, 2 sillons sont tracés à l’aide d’un burin de silex.
Une longue languette est détachée.
Ensuite, il faut la racler, l’égaliser et
l’amincir. Le chas est percé en attaquant l’os sur ces deux faces, grâce
à un perçoir en silex. L’aiguille est
enfin soigneusement polie sur un
bloc de grés.
Des tubes en os d’oiseaux découpés
et décorés ont été utilisés en guise
d’étui pour des aiguilles qui y furent
parfois retrouvées.
Un fil fait de tendons
Le fil peut provenir de tendons attendris et écrasés avec une pierre. Les
tendons fournissent des liens solides au même titre que la queue de
cheval (pour les coutures plus fines),
les boyaux ou encore les écorces...
La découverte de pattes de rennes
en connexion anatomique, abandonnées à distance de détritus de
cuisine, a fait émettre l’hypothèse
que les tarses avaient pu jouer le
rôle de « bobines », les tendons qui
y sont fixés servant de réserve pour
les besoins en fibres de ligature ou
de couture.
pour la couture ne fait guère de
doute, la manière de coudre, elle,
est discutée. De nombreux préhistoriens imaginent que l’aiguille à chas
était utilisée pour passer un lien à
travers une paroi préalablement percée à l’aide d’un poinçon. Mais, le Dr
Stordeur - Heddid pense que la solidité de l’aiguille, sa forme adaptée,
sa pointe acérée lui permettent de
traverser des cuirs souples.
Le tannage des peaux nécessitait des
grattoirs qui pouvaient servir aussi
pour gratter l’os ou l’ocre. Le grattoir est une lame de silex dont on
retouche le bout en demi-cercle par
une suite d’enlèvements de petits
éclats.
A. Cheynier a découvert en Dordogne
dans les années 1960 une empreinte
de tissu très fin, conservée sur une
brèche tendre adhérente à un « éclat
de silex ».
Les Solutréens, étaient-ils donc aussi tisserands ?
Pistes pédagogiques
•Les techniques des hommes de la
préhistoire
•Le développement du travail de l’os
Autres œuvres du musée en
lien
•Sagaies et propulseurs en os
Quelles techniques de coutures ? •Parures en coquillage, dents aniSi l’utilisation de l’aiguille à chas
males ou humaines
Bibliographie
- Outils préhistoriques- Du galet taillé au bistouri d’obsidienne – Jean Luc Piel Desruisseaux- Dunod 5ème édition.
- Les gestes techniques de la Préhistoire - Marcel Otte, Pierre Noiret - éd deboeck – 2010
11
RDC 6
Casque celtique d’Agris
Fer, bronze, or et corail - Grotte des Perrats, Âge du Fer
4ème siècle avant JC
Dépôt
L
e casque d’Agris, vedette du Musée d’Angoulême,
est l’un des témoignages précieux de la présence
des Celtes en Angoumois.
Les Celtes
Le mot « Celte » vient du grec keltoi,
qui désignait les barbares européens.
Cette appellation rassemble diverses
tribus parlant des langues proches car
issues de l’indo-européen. Il n’existait
cependant pas vraiment de sentiment
d’appartenance au groupe.
L’art celte n’apparaît pleinement qu’au
5ème siècle av. JC, date encore discutée.
Très divers, on a pourtant coutume
de l’identifier par son côté décoratif
caractérisé par des motifs répétés.
La découverte
La Grotte des Perrats à Agris a été
découverte par les membres de
l’Association de Recherches Spéléologiques de La Rochefoucauld. C’est
en 1981 que la cavité, bouchée par
des effondrements, fut dégagée. Les
spéléologues atteignirent alors une
grande salle et remarquèrent la présence de nombreux tessons de céramique.
Peu après, les premiers fragments
du casque furent découverts, conduisant au lancement d’opérations de
fouilles entre 1982 et 1994.
Un objet composite
Seuls le timbre (coque principale), la
base du cimier, la paragnathide (protège-joue) et quelques éléments ornementaux du casque sont connus.
Leur fabrication a nécessité l’intervention de matériaux très divers :
fer dans la coque du timbre et les
supports, bronze coulé ou travaillé
en feuille, or plaqué sur le bronze,
argent (rivets), corail (décors) collé
avant rivetage, bois et cuir.
Une origine complexe
L’ensemble du casque est recouvert
d’éléments ornementaux formant
sur le timbre cinq registres superposés séparés par des lignes de petits
motifs appelés « peltes », rappelant
par exemple le casque d’Amfreville.
On retrouve une répétition des motifs de palmettes et de lotus, récurrents dans l’art celtique nord-alpin.
D’autres motifs végétaux issus de
l’art méditerranéen montrent qu’une
diffusion des décors s’opérait déjà
au gré des déplacements d’artisans.
On peut de plus voir une double figuration dans le motif de palmette
renversée (troisième registre) rappelant un visage humain coiffé de deux
feuilles de gui symétriques.
Le placage d’or sur bronze, de même
que la structure du casque (coque
de fer et couvre-nuque riveté), reprennent aussi des techniques utilisées dans les ateliers nord-alpins.
Cependant, l’analyse d’échantillons
d’or issus des différentes parties du
casque permet de l’apparenter à des
bijoux trouvés dans le Sud-Ouest.
Il aurait donc été conçu dans cette
région par des artisans formés dans
le nord des Alpes.
Bibliographie
- Dossier thématique consultable au centre de documentation
- Le casque celtique de la grotte d’Agris, José Gomez de Soto, Stéphane Verger
- La grotte des Perrats à Agris, 1989-1994 : nouvelles observations, José Gomez de Soto.
Un casque dans une grotte ?
Au départ, on pensait que la Grotte
des Perrats était un lieu de dépôt
funéraire. Or, aucun lien avec des
restes humains n’a été établi, et le
casque se démarque de par sa splendeur des autres modèles découverts
dans des tombes.
L’idée d’une offrande aux divinités
du monde souterrain a donc été
privilégiée, les grottes étant en effet
vues comme une voie d’accès aux
enfers. La présence sur la paragnathide d’un petit serpent cornu, référence au dieu Cernunos, corrobore
cette hypothèse.
Le timbre, enfoncé par un choc, serait l’une des premières traces de la
pratique de sacrifice symbolique des
armes par destruction, représentée
dans des sites plus récents.
Pistes pédagogiques
•Celtes, Gaulois, Romains : les
conquêtes antiques.
•Croyances et rites
Autres œuvres en lien dans le
musée
•Statue de dieu gaulois assis de Verteuil, 2ème s. ap. JC.
12
RDC 7
Pions de jeux
Bois de cerf, résidence fortifiée d’Andone
10ème-11ème siècle
C
es petits objets ronds ne sont rien moins d’autre que
des pions de jeux, attestant d’une occupation de la
résidence fortifiée médiévale d’Andone, où les comtes d’Angoulême élirent domicile autour de l’an mil.
La naissance des jeux
Les jeux apparaissent très tôt : des
traces sont trouvées dès le 4ème millénaire av. JC, en Égypte et au ProcheOrient.
Nous disposons en général de peu de
sources : les pions et outils de jeux sont
souvent en matériaux périssables tels
que le bois. Restent les sources écrites
et les documents iconographiques
(parois ornées, vases décorés, miniatures) pour en savoir un peu plus.
Les jeux au Moyen-âge
Les jeux médiévaux laissent des traces
à partir du 11ème siècle : pions en bois,
pierre, ou os comme à Andone.
Les jeux sont classés en différentes
catégories : jeux sportifs, largement
acceptés ; jeux intellectuels, tolérés ;
et jeux de hasard, interdits en 1369
pour trouble de l’ordre de public (les
personnes endettées ont recours au
vol, voire au meurtre).
Les jeux sont pratiqués par toutes les
classes sociales, notamment les jeux
de dés. Certains seront plus particulièrement pratiqués par les classes
nobles, tels que les échecs ou le trictrac représenté ici par les pions en
bois de cerf.
Le tric-trac
À l’époque d’Andone, il est plus
communément nommé « jeu des
tables » et se rapproche de notre
backgammon. Il s’agit d’un jeu de
hasard raisonné : il fait appel au
hasard du dé, auquel le joueur doit
s’adapter pour élaborer sa stratégie.
Il est joué par l’aristocratie jusqu’au
12ème siècle, puis se popularise.
Il existerait une vingtaine de versions
des règles. Le but le plus couramment exposé est de faire parvenir
l’ensemble de ses pions de l’autre
côté du plateau avant l’adversaire. Le
nom « trictrac » apparaît vers 1500.
Les jeux d’Andone
Les jeux ont presque tous été retrouvés dans le bâtiment résidentiel, traduisant une utilisation par l’aristocratie et non par les serviteurs.
Les pions de tric-trac sont à décor
géométrique, ou ornés d’animaux fantastiques. Le motif du pion au quadrupède fantastique fait écho à la sculpture romane régionale. Ces pions
semblent avoir été, du moins en partie, produits directement sur le site.
Le site d’Andone
La résidence d’Andone, à quelques
kilomètres au nord d’Angoulême,
fut fondée vers 975 par les comtes
d’Angoulême, et abandonnée vers
1020. Il s’agit vraisemblablement
d’une résidence de chasse située en
vue d’autres familles seigneuriales.
La résidence est néanmoins fortifiée
et protégée par un fossé sec.
L’intérieur compte un bâtiment résidentiel d’où proviennent tous les
objets luxueux, dont les pions. Composé d’une grande salle principale,
deux chambres s’y adjoignent. Le
second ensemble regroupait les éléments de service (forge, écurie). La
cuisine était isolée pour prévenir les
incendies. La cour était parsemée de
petites constructions légères, dont il
ne reste que peu de traces.
L’occupation du site n’était qu’épisodique, la cour disposant de plusieurs
résidences. Seuls quelques hommes
d’armes et serviteurs y vivaient en
permanence.
N’ayant plus de position stratégique
au début du 11ème siècle, les comtes
d’Angoulême délaissèrent Andone
au profit de Montignac.
Pistes pédagogiques
•Les jeux : comprendre les règles et
s’y essayer ensemble
•Société et mode de vie médiéval
•Composition d’une résidence fortifiée
•Thématique histoire des arts « Arts,
créations, cultures » : les manifestations ludiques, jeux de société
•Arts plastiques : sculpture (dans de
l’os par retrait)
Autres œuvres du musée en
lien
•Ferrages des chevaux.
•Armes, surtout pour la chasse.
•Instruments de cuisine : Andone
se distingue par quelques éléments
luxueux (mortier en marbre, verre).
Bibliographie
- Un dossier sur les jeux et jouets au Moyen-âge est accessible au centre de documentation.
- Jeux et jouets à travers les âges, Catherine Breyer, éd. Safran (règles du jeu du Tric-Trac)
- Andone, Archéologie d’un château des comtes d’Angoulême autour de l’an mil. Luc Bourgeois, 2011
13
RDC 8
Griffons affrontés,
Chapiteau de colonne engagée
Abbaye de Saint-Cybard, Angoulême
milieu du 12ème siècle
C
e chapiteau de colonne à composition centrale
est orné de deux monstres, des griffons, qui
s’opposent et se mordent réciproquement la patte.
Un temps attribué à l’abbaye de Beaulieu, il provient
en réalité de l’ancienne abbatiale de Saint-Cybard,
aujourd’hui disparue.
Les chapiteaux
Le répertoire roman
En architecture, un chapiteau désigne l’élément qui repose sur la colonne et qui soutient la partie supérieure de l’édifice. D’un point de vue
technique, sa forme évasée lui permet de concentrer le poids qu’elle reçoit et de le transmettre au support.
D’un point de vue ornemental, il
s’agit d’une zone privilégiée car elle
est vaste et sert de couronnement à
la colonne.
Aux sources du riche répertoire de
l’art roman se trouve la tradition
antique dont certains motifs végétaux ou géométriques sont hérités.
De nouvelles formes vont être introduites et assimilées par les artisans
grâce aux objets rapportés d’Orient
par les routes de commerce, notamment les animaux exotiques qui peuplent le bestiaire roman, comme le
lion et par extension le griffon.
Le répertoire roman s’inspire également de nombreux écrits : scènes du
Nouveau et de l’Ancien Testament,
de traités anciens de géométrie, de
mathématiques, de musique ou
d’astronomie, ainsi que d’un genre
littéraire plus récent : les vies de
saints (voir fragment de linteau à
droite du chapiteau).
Le décor
Ce chapiteau représente deux griffons, créatures mythiques habituellement composées du corps d’un
lion et des ailes et tête de l’aigle. Ici,
il s’agit de griffons possédant les
pattes d’un lion et le corps d’un serpent. Respectivement roi de la Terre
et roi du Ciel, le lion et l’aigle symbolisent le courage et la vigilance.
Leur association est une évocation
métaphorique du Christ considéré
comme à la fois humain et divin.
La sculpture est ici travaillée en hautrelief : les griffons et le décor végétal
se détachent presque entièrement
du fond. Les différences de profondeur de la sculpture créent une variation des plans destinée à produire
des effets plastiques en fonction de
la lumière.
L’abbaye de Saint-Cybard
Située en dehors des remparts, l’abbaye de Saint-Cybard est la première
d’Angoulême. Bâtie sur la tombe de
l’ermite Saint-Cybard, en dessous de
la grotte qu’il aurait occupée pendant
sa vie de prière au 6ème siècle, il s’agit
d’abord d’un modeste édifice de
culte. Il est successivement agrandi,
reconstruit après sa destruction par
les normands en 893 et remanié.
L’abbaye est vendue après la Révolution Française et une papeterie s’y
installe au 19ème siècle. Aujourd’hui,
quelques vestiges sont visibles sur le
site occupé par le Centre International de la Bande Dessinée. Ce chapiteau est donc le seul témoin de l’état
de l’édifice roman au 12ème siècle.
Pistes pédagogiques
•Histoire cycle 3 et 5e : Le Moyen
Âge - le rôle de l’Église
•Histoire des Arts cycle 3 : l’architecture religieuse ; les techniques de
sculpture
•Histoire des Arts au collège :
L’œuvre d’art et le sacré, les sources
de l’inspiration artistique.
Autres œuvres du musée en
lien
•Lion provenant de la tour Nord, cathédrale Saint Pierre, 12ème siècle :
motif oriental assimilé
•Chapiteau de colonne engagée,
feuillages et oiseaux, ancienne
abbaye de Beaulieu, 12ème siècle :
décor végétal
•Deux apôtres, fragment de linteau
en haut-relief, cathédrale Saint
Pierre, 12ème siècle : motif de la vie
des saints
Bibliographie
- Le Moyen âge à petits pas, Carpentier, De Monti, 2010 : livre jeunesse consultable en salle de documentation
Ressources en ligne sur l’Art roman (dernière consultation : été 2014)
- http://www.lacharente.com/Decouvrir/Art-de-vivre/Art-Roman Art roman en Charente et vocabulaire architectural
- http://www.ageroman.org/parcours.htm : contexte historique et approfondissements
14
NIV 1 - ARTS EXTRA-EUROPÉENS
Le Musée d’Angoulême possède une des meilleures collections
françaises d’art africain et océanien par le nombre et la qualité des
pièces conservées.
L’essentiel de cette collection est légué en 1934 par le Dr Jules Lhomme (18571934), médecin et notable de La Rochefoucauld, qui rassemble très tôt, dans le
dernier quart du 19ème siècle, d’importants objets d’art et d’ethnographie provenant de toutes les parties du monde : Afrique (Maghreb, Afrique Noire, Madagascar) ; Océanie (Mélanésie, Polynésie) ; Asie (Inde, Indonésie, Indochine,
Chine et Japon) ; Amérique (Pérou, Mexique, Brésil, Canada, Alaska).
Le Dr Lhomme constitue cette collection unique de plus de 3000 pièces sans
jamais voyager : cette passion lui est transmise par son oncle Jean Fermond
(1816-1911), dont il récupère une partie des collections à sa mort, qu’il intègre
plus tard dans son legs et qui est aujourd’hui conservée au musée d’Angoulême.
Il la complète ensuite en chinant à Bordeaux, grande cité portuaire ou en s’entourant de quelques personnes en contact avec le continent africain.
Le Dr Lhomme est un des tout premiers collectionneurs d’art nègre, bien avant
que la mode ne soit lancée au début du siècle par les peintres fauves et cubistes.
Sans voyager, il est un vrai connaisseur, et sa collection est le fruit d’une curiosité toujours en éveil et d’un goût très sûr.
Vous traverserez ainsi tour à tour des salles
consacrées au Maghreb (première salle
orange), à l’Afrique (rouges), ou à l’Océanie
(bleues) pour enfin aboutir dans l’ancienne chapelle de l’évêché où les collections américaines
et asiatiques sont évoquées au sein de la vitrine
consacrée au Dr Lhomme.
15
NIV 1 - 1
Sac Eljibera
Touaregs du Hoggar ou d’Agadès, fin 19ème siècle
Cuir, soie, teinture
Legs du Dr Lhomme, 1934
L
e sac de cuir est caractéristique de l’art Touareg et
de leur mode de vie : transportable, finement décoré, il prend de nombreuses formes. Ce type de sac, dit
Eljibera, est un grand sac d’apparat.
Le sac Eljibera
Le travail du cuir
Le sac Eljibera est réservé aux
hommes et sert plus particulièrement à porter les vêtements de
cérémonie. C’est une des pièces
maîtresses du méhari (nom du dromadaire domestiqué) et il est à ce
titre, porté sur son flanc, la place
d’honneur.
L’honneur d’un Touareg, son rang
social et son statut sont reflétés par
tout un ensemble. En premier lieu
par son dromadaire, qui fait la fierté
de chaque guerrier. Mais aussi par
tout le harnachement qu’il porte, qui
doit tout autant être confortable que
symbolique : selles, sacs... Les vêtements portés par le Touareg sont
également le reflet du prestige de ce
dernier.
En dehors des moments de transhumance, et lorsque le campement est
établi, le sac Eljibera est suspendu
aux piquets de la tente, à la place de
l’homme.
Le cuir est le matériau principal de
l’artisanat des nomades du Sahara,
les Touaregs. Peuple d’éleveur de
moutons et de chèvres, le cuir est une
ressource inépuisable : les sacrifices
pour les cérémonies sociales ou religieuses permettent de pourvoir les
besoins en viande, mais aussi en cuir.
Ce travail est réservé aux femmes
qui sont relativement indépendantes
chez les Touaregs. Elles débarrassent
les peaux de leurs poils, les raclent,
les lavent et les plongent plusieurs
jours dans un produit tannant.
Sont ainsi confectionnés des sandales, des selles, des sacoches, les
fourreaux des épées, des coussins,
des bottes, des petits tapis…
Les différents sacs
Les sacs revêtent une importance
particulière car ils sont le seul
moyen pour les nomades de transporter leurs affaires. Il en existe ainsi
diférentes sortes : certains réservés
pour les hommes, d’autres pour les
femmes, pour la nourriture, comme
porte-feuille, pour le service à thé,
pour les vêtements de cérémonie (le
sac Eljibera)... Chacun possède une
taille, une forme, un type bien particulier qui lui est propre.
Le décor
Le décor de ce sac est caractéristique de l’art touareg qui accorde
une grande importance aux motifs géométriques (ronds, carrés,
triangles...), symétriques et couvrant
les surfaces. Ils ont bien souvent une
symbolique protectrice mais qui ne
nous est pas toujours parvenue.
Les couleurs sont également très reconnaissables, et notamment le vert,
qui est une couleur aux vertus protectrices (prophylactiques). Celui-ci
est importé du Nigeria, de Kano, par
les commerçants et se retrouve sur
nombre d’objets touaregs.
L’application de motifs peut être en
cuir, en soie, en peinture, par estampage, par excision...
Bibliographie
- Dossier d’œuvre consultable au centre de documentation.
Ces teintures et décors sont effectués par les femmes d’artisans spécialisés qui se passent leur savoirfaire de génération en génération.
Les Touaregs
Les Touaregs sont des pasteurs nomades indépendants qui ont assuré
de tous temps le commerce saharien : sel, ivoire, produits manufacturés, or, indigo...
Convertis à l’islam, ils ont conservé
certaines de leurs croyances d’origine, et ont également intégré des
pratiques animistes.
Peuple d’environ 1 million de personnes, il se répartit dans les actuels
Algérie, Libye, Niger, Mali, Nigeria.
Malgré cette dispersion, ils font
preuve d’une grande unité culturelle.
Leur économie est aujourd’hui basée sur l’élevage, l’agriculture et le
commerce, mais ils sont confrontés
à la désertification, la sécheresse, et
la mondialisation qui ébranlent leur
système social.
Pistes pédagogiques
•Objet de prestige et représentation
du statut social par un objet
•Géométrie et symétrie
•Les arts du quotidien
•Découverte du monde
Autres oeuvres du musée en
lien
•Vitrine des nomades dans laquelle
est le sac (selle, autres sacs plus
petits, armes, service à thé)
16
NIV 1 - 2
Masque Ejumba
Peuple Diola, Sénégal
19ème siècle, ou début 20ème siècle
roseau, corne, résine, coquillage, graines, cauris, boutons
L
e masque Ejumba permet d’évoquer l’importance de ces objets comme ciment social dans
de nombreuses populations africaines. Celui-ci
est utilisé lors des rites d’initiation, moments
particuliers qui marquent le passage de l’enfance
à l’âge adulte.
Un masque de rite d’initiation voyeur de richesses. Il est ainsi en Le terme de masque,
haut de la hiérarchie des animaux et contrairement à notre
(le bukut)
Le Bukut est le rite d’initiation des
jeunes hommes et le véritable ciment de l’unité sociale des Diola,
peuple vivant au Sénégal.
L’initiation marque le passage de
l’enfance à l’âge adulte et se déroule
sur plusieurs jours, voire mois, durant lesquels les jeunes se voient
dispensés un enseignement secret,
des règles de comportement, sont
circoncis... L’ensemble est ponctué
de rites et cérémonies publiques
durant lesquelles les masques sont
sortis.
La totalité du rite consiste à « tuer »
symboliquement le futur initié pour
le faire renaître en une personne
nouvelle, en adulte. Les rites se déroulent pour plusieurs jeunes à la
fois, qui seront liés à vie.
Le boeuf
Le masque ejumba est celui que les
initiés ont le droit de porter, lors de
la cérémonie de clôture de l’initiation
(le kahinçen), réservée aux hommes.
C’est un moyen de montrer leur
changement de statut. Ils sont ensuite démasqués par les anciens du
village et sont réintégrés en son sein.
Les cornes de bœuf sont l’élément
le plus marquant de ce masque, et
ne sont pas choisies par hasard. Le
bœuf et les vaches sont un bétail
de grande importance : il est pour-
est utilisé lors de sacrifices rituels,
comme celui réalisé à la fin du bukut.
Les cornes évoquent la puissance et
la fertilité. Elles renvoient également
au côté impulsif, sauvage et animal
des non-initiés, vitalité qui a été canalisée par l’initiation.
Le mélange des matières
Le masque ejumba du musée montre
la variété des matériaux utilisés pour
la fabrication de ces masques : structure en vannerie recouverte de résine, coquillages (cauris), graines...
mais aussi des boutons.
Les masques reflètent la variété des
mélanges effectués et l’intégration
par les populations de cultures
et pratiques extérieures. Ainsi, le
masque a intégré des boutons occidentaux, qui, loin de marquer une
perte d’identité du peuple et de ses
pratiques, est intégré pour renforcer
le pouvoir du masque.
Représentation d’une pratique animiste, certains masques peuvent
intégrer des versets coraniques,
marquant le syncrétisme entre ces
pratiques et l’Islam.
L’importance des masques
Le masque est un objet utilisé par
tous les peuples africains, même si
les zones côtières en ont une utilisation plus intense.
Bibliographie
- Dossier d’oeuvre consultable en salle de documentation.
conception
occidentale,
ne désigne pas que la
partie qui est posée sur le
visage, mais également le
costume et le porteur. Le
costume recouvre le plus
souvent intégralement le
porteur qui ne doit pas être
identifié : il devient l’enveloppe du personnage, la divinité ou l’ancêtre que son
masque représente.
Les masques rythment la vie des
peuples et sont sortis à l’occasion de
nombreuses cérémonies : sociales
(naissances, décès, culte des ancêtres,
règlement de conflits...), économiques
(favoriser de bonnes récoltes) et ludiques (réjouissances, fêtes..).
Pistes pédagogiques
•Découvrir l’autre
•Les cérémonies sociales en Afrique
•La représentation du visage
Autres œuvres du musée en
lien
•Masque Mende (initiation des
jeunes femmes)
•Masque antilope Ty-Wara (masques
pour les récoltes)
•Masque We (intégration de cartouches de fusils, clous de tapissiers... éléments occidentaux)
17
NIV 1 - 3
Masque cimier tyi wara
Culture Bambara, Mali, 19ème ou 20ème siècle
Bois
Legs Dr Lhomme 1934
L
es masques Ty Wara, ou Ciwara, sont très représentatifs du peuple des
Bambara. Ils traduisent le lien étroit qui est établi entre les rites agricoles
et la fécondité humaine, tout en rappelant les mythes d’origine.
Les Bambara, dits aussi Bamana En effet, le masque fait le lien entre femmes BambaLes Bambara sont un peuple habitant
la partie centrale du Mali, en pleine
savane. Apparu au 17ème siècle, le
royaume Bambara est colonisé au
19ème siècle. Pour autant, leur existence perdure encore aujourd’hui et
ils représentent la plus grande ethnie
du pays.
Ils vivent essentiellement de l’agriculture – un peu d’élevage, ce qui explique l’importance qu’ils accordent
à la culture des champs. Ils sont
d’ailleurs largement connus pour
leurs cimiers zoomorphes, en lien
étroit avec le travail de la terre.
La société secrète Ty Wara
Cette société secrète est composée des jeunes hommes du village
(jusqu’à 40 ans). Les agriculteurs
étaient particulièrement mis en
avant chez les Bambara. Ty Wara
signifie d’ailleurs « champions de
la culture », ou « fauves griffus de
la culture », ce qui reflète leur statut
particulier.
Ce sont eux qui sont en charge des
masques et des cérémonies qui leurs
sont propres.
La symbolique agricole de l’antilope
L’antilope est représentée par un
corps très abstrait, quasi absent,
alors que le visage très allongé et les
cornes surdimensionnées sont mis
en avant.
les animaux fouisseurs avec ce long
museau, et l’antilope et ses cornes.
En effet, selon le mythe fondateur
des Bambara, l’antilope est l’animal
qui a enseigné aux hommes l’art de
cultiver la terre. Les versions varient
selon qu’elle utilisait ses sabots, ou,
plus communément répandu, ses
cornes pour créer des trous dans
la terre dans lesquels planter les
graines.
Quelle utilisation pour ces
masques ?
Les masques, de manière générale,
font le lien avec le monde des esprits
(des ancêtres, des animaux mythiques, des divinités...). Ils sortent à
des occasions bien spécifiques selon
la nature de chaque masque.
Dans le cas du cimier Ty Wara, il est
sorti lors de cérémonies agricoles. Il
est porté sur la tête du danseur, grâce
au petit support en vannerie sur
lequel il est fixé, ainsi que les fibres
végétales qui recouvrent le visage du
danseur. Celui-ci est d’ailleurs entièrement recouvert de fibres végétales,
ne devant pas être identifié par les
membres du village, mais incarnant
pleinement l’esprit représenté.
Les danseurs dansent toujours par
deux, représentation du couple et
donc de la fertilité. L’antilope femelle
est identifiable au petit faon qu’elle
porte sur le dos à la manière des
ra. L’assimilation
entre l’animal et la
fertilité humaine
n’en est que plus
lisible.
La cérémonie a lieu deux fois par an
pour favoriser les bonnes récoltes.
Ces objets visent ainsi à protéger
l’ensemble du village des disettes.
Tous étaient d’ailleurs conviés à la
cérémonie, celles-ci n’étant pas uniquement réservées aux seuls initiés.
Pistes pédagogiques
•Les animaux
•La symbolique
•Les rituels
•L’autre, l’ailleurs
Autres oeuvres du musée en
lien
Autres masques Ty Wara montrant
les techniques d’accroche du cimier
Autres animaux symboliques :
•Masque Senoufo (lézard stylisé)
•Poids akan (utilisant les animaux
pour faire passer des messages
moraux)
Autres types de masques :
•Diola (pour l’initiation des jeunes
garçons)
•Mendé (pour celle des jeunes filles)
Bibliographie
- Dossier d’oeuvre consultable au centre de documentation.
- Ciwara, chimères africaines, Jean-Paul Colleyn, Lorenz Homberger, musée du quai Branly, 2006
18
NIV 1 - 4
Poids à peser l’or
Peuple Akan, Ghana
Alliage de cuivre
S
i ces nombreux objets figuratifs ou
géométriques avaient une première
fonction utilitaire, ils possédaient également une dimension symbolique bien
particulière et étaient objets de parole.
Les poids à peser l’or
Ces objets forment un ensemble de
poids qui servait à peser l’or exploité
au Ghana, mais également de monnaie jusqu’à la fin du 19ème siècle.
Le tout se compose d’une boite dans
laquelle étaient rangés une balance,
une cuillère pour la poudre d’or et
les poids, géométriques et figuratifs. Ils forment ce qui est appelé le «
Dya », traduit par « héritage », révélant toute l’importance de ces objets.
Le système des poids est complexe :
il y a des poids mâles et des poids
femelles. Les poids géométriques
semblent avoir été utilisés comme
système numéraire, sans que nous
ne soyons parvenus à en comprendre la logique.
Les motifs figuratifs étaient utilisés
pour les transactions spéciales :
dettes, impôts, amendes, payer les
cérémonies. Chacun s’accompagne
d’un sens bien précis, d’un proverbe.
Par exemple, l’antilope aux cornes rabattues signifie « Si j’avais su ce qui se
passait derrière moi » ; le nœud plat «
Celui qui saura me dénouer connaîtra
le secret du Dya » ; les crocodiles croisés possèdent plus un sens proche
de « L’union fait la force »…
L’échange se terminait en réalité souvent par des palabres, accompagnés
par les poids.
L’importance de la parole
Les proverbes et la parole ont une
symbolique toute particulière chez
les populations Akan : dire, c’est
faire. Loin de n’être qu’une petite
morale, ce sont des maximes qui
ont la force d’être forcément suivies
et réalisées. Elles vont ainsi servir à
se répondre de manière indirecte et
apaisée dans les discussions difficiles.
Les poids peuvent également être
utilisés par les chefs et personnages
importants comme un moyen de
transmettre des récits, des légendes,
un code moral et une culture.
Le terme « héritage » qui leur est
attribué prend tout son sens.
L’or chez les Akans
Si ces objets se sont développés
dans la région du Ghana, c’est parce
que cette zone a longtemps été exploitée pour son or et son argent.
Elle a d’ailleurs été nommée la «
Côte d’or » jusqu’en 1957.
Pour les Akans, l’or sous forme de pépite est vivant et prend la forme d’un
arc en ciel. Sous forme de poudre, il
est utilisé pour les cultes rendus aux
dieux des cours d’eau, aux ancêtres,
lors des rites de purification de l’âme
des vivants, ou encore comme monnaie.
Le groupe Akan
Les Akans rassemblent un ensemble
d’ethnies de ce qui est devenu le
Ghana, et est composé, entre autres
des Baoulés et des Ashantis. Ils
représentent environ 6 à 7 millions
Bibliographie
- Dossier d’œuvre consultable au centre de documentation.
de personnes. Ils exploitent très tôt
les métaux, et maîtrisent la fonte
dès le 11ème siècle. Aux 17ème et 18ème
siècles, les Akans forment un groupe
important avec des états puissants
qui commercent l’or et des esclaves
avec les européens. Mais si ces états
existent, le mode de vie des Akans,
au système matrilinéaire, est relativement égalitaire, et le chef désigné
a plus un rôle de chef de famille.
Les poids figuratifs visibles
dans la vitrine
Chèvre, antilope aux cornes rabattues, crocodiles croisés, chaise,
poissons, caméléon, jaguar…
Pistes pédagogiques
•Découvrir l’autre
•L’exploitation des métaux en
Afrique
•La symbolique d’objets comme
passeurs de messages
•La représentation des animaux
Autres œuvres en lien
Représentation d’animaux :
•Porte de grenier Dogon (lézard)
•Masque heaume Senoufo (panthère)
•Statue de singe Baoulé
Les monnaies et moyens d’échange :
•Coquillages d’Océanie
19
NIV 1 - 5
Figure de reliquaire mbulu-ngulu
Culture Kota, Gabon
Âme en bois recouverte de fuilles de cuivre et laiton,
décorées en repoussé, clouées ou agrafées
H.60cm
C
e visage énigmatique était le gardien des reliques des
ancêtres. Permettant d’évoquer un culte essentiel
dans la plupart des sociétés africaines -le culte des ancêtres-, ce reliquaire permet aussi d’ouvrir une réflexion
sur la vision européenne sur ces œuvres anciennement
dites « primitives ».
Le reliquaire
Cette œuvre est la partie sommitale
d’un reliquaire. Les os des ancêtres
étaient conservés dans des paniers
surmontés de ces figures. Ces reliquaires étaient ensuite conservés
dans des cases, lieux sacrés en bordure du village et dont l’accès était
réservé aux initiés.
La figuration
La sculpture représente l’ancêtre du
clan, gardien des crânes. Géométrique, presqu’abstraite, il ne s’agit
pas d’un véritable portrait, mais d’une
évocation symbolique de l’ancêtre.
La fonction du losange inférieur n’est
pas bien connue : certains pensent
qu’il évoque les épaules, les bras et
les jambes. Il constituait également le
système d’attache au panier, et pouvait servir de poignée pour la présentation des figures lors des rituels.
Le contenu du panier
Le panier contenait les crânes des
ancêtres (siège de l’âme).
Il peut accueillir d’autres os, ou des
« médicaments » (têtes d’oiseaux,
vertèbres de poissons, insectes, coquillages, perles...).
Le reliquaire, renfermant le souffle
vital du défunt, était consulté notamment à l’occasion du culte Bwiti, rite
de passage pour les hommes à la puberté faisant appel aux ancêtres.
La technique et le cuivre
Les Kota est l’un des deux seuls
peuples à recouvrir intégralement les
reliquaires de cuivre ou de laiton. Ils
réalisent la pièce d’un seul tenant, en
découpant une large plaque de métal
qu’ils apposent sur l’âme de bois.
Le cuivre est ensuite brossé au sable
pour le rendre plus brillant, et ainsi
effrayer les intrus : le soleil se reflétant
dessus éblouit et effraie le non initié.
L’importance du métal et des
forgerons
Le forgeron tient une place élevée
dans les sociétés d’Afrique équatoriale. Il est le maître du feu, et son savoir-faire ne peut être acquis que par
une grande connaissance des rites et
des sociétés secrètes. Il est aussi médecin, juge et magicien. Cela explique
la grande valeur sociale et symbolique
des objets en métal : emblèmes de
chef, parures, armes, ou reliquaires.
Le culte des ancêtres
Le culte des ancêtres est le centre de
vie religieuse et sociale du groupe
familial. À la mort d’un chef, les initiés prélevaient diverses reliques qui
étaient décorées de métal et enduites
de poudres à effets magiques.
Durant ces cultes, d’autres éléments
peuvent être « placés » dans le panier,
pour les mettre sous la protection de
l’ancêtre : une plantation, une partie
de rivière, la fidélité d’une femme...
Le prêtre de la famille va alors sacrifier un animal sur le panier à ossements, et prononcer sa demande aux
ancêtres.
Pour nourrir les ancêtres, il arrive que
les prémices des récoltes soient déposées dans les paniers.
Bibliographie
- Dossier d’oeuvre consultable au centre de documentation.
Le peuple Kota
Les Kota vivent dans la partie orientale du Gabon où ils occupent depuis
le 18ème siècle un vaste plateau forestier. Les différents villages regroupent
plusieurs clans qui se subdivisent
eux-mêmes en groupes familiaux. À
l’intérieur de ces villages, les sociétés-secrètes constituent une sorte
d’aristocratie.
Les reliquaires Kota et l’Europe
Les missionnaires européens ont
combattu ces pratiques et ont détruit
plusieurs œuvres de ce type. D’autres
ont été collectées pour leur inétrêt
esthétique et la richesse du matériau
dès 1870. Pour autant, il ne s’agit
pas de la partie la plus importante de
l’objet (le panier) et pose la question
du regard porté par les Européens.
L’intérêt pour ces pièces grandit au
début du 20ème siècle, notamment par
les artistes d’avant-garde.
Pistes pédagogiques
•Style et géométrie
•Culte des ancêtres et rituels
•Regard sur l’autre
Autres œuvres du musée en lien
•Crâne du Vanuatu (salle Océanie) :
l’utilisation du crâne pour le culte
rendu aux ancêtres
•Bambous gravés d’Océanie : rencontre des peuples avec les européens.
20
NIV 1 - 6
Les objets de navigation océaniens
Pagaies et maquettes de pirogues
19ème ou 20ème siècle,
Legs du Dr Lhomme, 1934
L
a première salle Océanie présente des
traits communs à toute l’aire culturelle
océanienne, dont l’importance de l’élément marin. Les maquettes et pagaies
évoquent ainsi tant les techniques de
navigation que la symbolique accordée à la
mer, élément central de ce continent.
Les maquettes de pirogue
Les maquettes de pirogues du musée illustrent deux types différents :
- celles « à double coque » avec un
pont central qui servent à naviguer
sur de longues distances ou pour la
guerre. Ces dernières peuvent avoir
une ou deux voiles triangulaires selon leur taille.
- celles « à balancier », pour la pêche
et les petits déplacements. Le balancier sert à maintenir l’équilibre de
l’embarcation. Un pont est parfois
présent sur la coque, s’inspirant des
ponts des pirogues à double coque.
La construction des pirogues marquait un moment fort et communautaire : des rites spécifiques accompagnaient la fabrication pour charger la
pirogue de mana (force magique), et
toute la population était associée à la
fabrication. Les femmes étaient par
exemple en charge du tressage des
voiles.
Certaines pirogues sont d’ailleurs
sacrées. C’est en effet à l’aide d’immenses pirogues que les migrations
se sont effectuées et que les ancêtres
ont peuplés les îles. Elles ont donc
un statut particulier et sont ornées
de motifs rappelant ces ancêtres,
destinés à assurer la protection de
l’embarcation et de ses passagers.
Les connaissances maritimes des
peuples d’Océanie étaient particulièrement grandes pour pouvoir se
déplacer dans ces eaux. Le soleil, la
lune, les étoiles, les vents, les courants, ou encore les oiseaux étaient
autant de repères pour garder son
cap.
Les modèles réduits de ce type se
sont développés avec les occidentaux : ils étaient échangés ou vendus
aux marins de passage, et sont de
nos jours un avantage non négligeable pour la connaissance de ces
embarcations.
Les pagaies
Les pagaies « utilitaires » mesurent
environ 1,50m et sont utilisées
seules sans prendre appui sur le
rebord, contrairement aux rames.
Les tailles et motifs des pagaies
fonctionnelles dépendent respectivement de l’âge du porteur et de la
région d’où il provient.
Mais d’autres pagaies, comme celles
du musée, ont une vocation cérémonielle. On les reconnaît p a r
leurs motifs particulièrement soignés et une usure
peu marquée. Ces pagaies
sont des symboles de pouvoir, destinées aux chefs ou
pour les danses.
L’une d’elle évoque la pêche
à la bonite par les motifs de
queue de poisson qui sont
représentés. Il s’agit d’une
pêche sacrée qui assure la
Bibliographie
- Dossiers d’oeuvres consultables au centre de documentation.
fécondité de la population et le renouvellement de l’énergie du village.
Avec l’arrivée des européens, elles
deviennent une monnaie d’échange
et donnent lieu progressivement à
un véritable marché.
Des objets qui traduisent le
rôle fondamental de la mer
Le fait que ces objets, à l’origine utilitaires, aient une telle valeur et des
symboliques fortes, montrent bien
l’importance que revêt la mer dans
les cultures océaniennes. Élément
nourricier, vital (par la pêche et les
échanges commerciaux), elle renvoie également aux croyances de ces
populations et au culte des ancêtres
particulièrement présent.
Pistes pédagogiques
•Les éléments naturels comme ressource
•La production d’objets liés à l’arrivée des occidentaux
Autres œuvres du musée en
lien
•Coquillages (monnaie d’échange)
•Élément de décoration de pirogue
en forme d’oiseau
•Poterie en forme de pirogue à
double coque
21
NIV 1 - 7
Bambous gravés kanaks
Culture Kanak, Nouvelle-Calédonie
19ème ou 20ème siècle
Legs Dr Lhomme 1934
L
es bambous gravés, véritables BD du peuple Kanak, nous
permettent d’entrapercevoir certains éléments de la vie de
ce peuple, et évoque ici la rencontre des Kanaks et des Européens. Véritables récits historiques et passeurs de mémoire,
une partie de leur signification nous est pourtant perdue.
À quoi servent les bambous gravés ? La rencontre avec les Européens d’objets coupants tels que éclats
Les bambous gravés sont des supports de récits, des illustrations.
Chaque bambou raconte une histoire
complète où chaque élément, géométrique ou figuratif, a un sens. Seul son
propriétaire connait l’histoire globale
du bambou.
D’autres fonctions semblent avoir été
attribuées à ces bambous, notamment
celle d’étui à herbes magiques. Plusieurs pièces contenaient des restes
végétaux destinés à protéger les voyageurs durant leur périple.
La production de ces bambous se situe majoritairement pendant le 19ème
siècle, et disparait vers 1917.
Les discours des bambous
À l’origine, les bambous étaient uniquement gravés de motifs géométriques. Ces derniers auraient été un
moyen de comptage pour rappeler
des faits anciens. Quelques scènes
figuratives apparaissent avant l’arrivée
des blancs, mais elles s’intensifient à
leur contact. Les bambous gravés sont
l’une des rares productions kanak figuratives.
Ils s’attachent à décrire la vie traditionnelle kanake à travers les événements
marquants tels que les grands deuils,
la construction des cases, les pêches
cultuelles, les cérémonies...
Mais certains décrivent également la
rencontre avec les blancs et les éléments qui ont pu les étonner : nouvelles espèces d’animaux, costumes,
meubles...
Les bambous gravés du musée représentent cette rencontre. Les grandes
cases des hommes (représentées par
un toit en triangle surmonté d’une
haute sculpture), les pirogues à voile
et à balancier, les navires européens,
les guerriers kanak portant leur massue à bec d’oiseau, les occidentaux
en costume, cavaliers et soldats armés de fusil. Des scènes d’échanges
pacifiques traduisent la curiosité de
l’autre : dons d’ignames (dont on
voit les champs sous forme de petits
triangles), de tortues, ...
Le mode de représentation
Si les bambous semblent au premier abord un ensemble d’éléments
sans dessus-dessous (personnages à
l’envers, à l’endroit, de travers), ils répondent en réalité à un ordre bien établi. La référence est le village. Tout ce
qui se situe dans le village se structure
autour de l’allée centrale, l’axe principal, selon le procédé de « rabattement » qui consiste à aplatir l’espace
vu de haut. Ce qui est en dehors ne va
plus répondre à aucun ordre, relevant
du monde étranger.
La technique
Le bambou est un matériau couramment utilisé par les Kanak : peignes,
couteaux, poignées de sagaie, pointes
de flèches, étuis, instruments de musique...
La gravure est effectuée au moyen
Bibliographie
- Dossier d’oeuvre consultable au centre de documentation.
- Le bambou gravé kanak, Roger Boulay, ed. Parenthèses, 1993
de quartz, pinces de crustacés, coquillages, ... progressivement remplacés par des objets métalliques.
Le bambou est enfin enduit d’une pâte
huileuse et sombre, qui, essuyée, s’incruste dans les lignes et noircit.
Ce travail demande une grande dextérité : les motifs sont fins et aucun
repentir n’est permis.
Le peuple Kanak
Les Kanak se sont établis en NouvelleCalédonie, grande terre de 400km
de long, il y a au moins 3500 ans. Ils
importent alors des plantes telles que
l’igname, et vont développer des techniques de culture particulièrement
importantes. Ils s’organisent en village, regroupé autour de la « maison
des hommes », lieu sacré occupé par
le chef et utilisée lors de grandes cérémonies.
Les Kanak possèdent des « totems » :
chaque clan se réfère à un aïeul fondateur, qui peut prendre la forme d’un
animal, d’éléments naturels. Cet élément sera alors le totem du clan.
Pistes pédagogiques
•Les modes de narration
•Traduction stylisée
•Rencontre des civilisations
Autres œuvres du musée en lien
•Maquettes de pirogues
•Massues à bec d’oiseau
22
NIV 1 - 8
Tambour de grade
Ile d’Ambrym, Vanuatu
Bois sculpté et peint – h : 2,50m
Dépôt du musée du quai Branly
O
uvrage central dans la culture du Vanuatu, le tambour de grade est
d’avantage un objet témoin, symbolique et rituel qu’un instrument
de musique. Il incarne le culte des ancêtres, figures allégoriques complexes garantes de la tradition depuis le premier homme jusqu’au plus
récent défunt.
Le tambour
Ce tambour est orné d’un visage
humain stylisé rehaussé de peinture
rouge et garni d’une barbe représentée par des motifs géométriques. Il
s’agit probablement d’un hinen nimbwilei ou « mère des tambours », le
plus important des quatre types de
tambours existant. Il en possède les
caractéristiques : une taille imposante et une position verticale.
Ces ouvrages massifs sont taillés
dans un même arbre choisi en fonction de sa dureté puis abattu en
suivant un rituel. Un feu est allumé
dans une tranchée creusée à la base
de l’arbre puis il est taillé là où il est
tombé à l’aide d’un os humain aiguisé. Le fût du tambour est travaillé afin
d’obtenir une caisse de résonance à
parois de différentes épaisseurs. Ce
sont ces variations qui sont à l’origine de la hauteur des sons émis
quand le tambour est frappé. Il est
finalement sculpté et ornementé.
C’est dans le son émis par le tambour que réside sa dimension sacrée, celui-ci étant la métaphore de
la voix de l’ancêtre.
La musique et la danse : une
pratique sociale
La danse et la musique ont une importance particulière dans la société
du Vanuatu. Étroitement liées à divers rites, elles marquent des temps
forts de la vie publique et disposent
d’un espace dédié, le nasara. Le nasara est une place où se déroule les
cérémonies officielles : funérailles et
rites de passage de grade (nimangki) pendant lesquelles les danseurs
tournoient autour du grand tambour
placé au centre.
Les cérémonies de grade
La société d’une majorité d’îles
du Nord et du centre du Vanuatu
est structurée par la hiérarchie des
grades, système dans lequel un
homme peut obtenir une charge
en l’achetant. Il existe de nombreux
grades et à chacun d’eux correspond
obligations, privilèges et titre qui
modifie le nom du gradé, mais le
prix n’est pas le même. La monnaie
d’échange employée est le cochon à
dents recourbées, monnaie d’autant
plus précieuse que l’élevage de ces
cochons nécessite beaucoup de patience et de soins.
Le prix d’un grade étant élevé, l’individu souhaitant obtenir une charge
doit gagner la confiance de ceux qui
élèveront une partie des cochons
pour lui. Il doit tisser un réseau de
personnes, recourir à des accords,
des alliances et établir des relations
basées sur le respect et la confiance.
L’acquisition d’un grade n’est donc
pas simplement l’achat d’un statut
mais la reconnaissance politique
d’une réussite sociale déjà concrétisée.
À propos
du Vanuatu
La République de Vanuatu, située au
nord-est de l’Australie dans l’océan
Pacifique, est composée de 80 îles.
L’archipel fut longtemps connu sous
le nom de Nouvelles-Hébrides qui
lui avait été donné par l’explorateur
du 18ème siècle, James Cook. Indépendante depuis 1980, elle a pris
le nom de Vanuatu qui signifie «
notre pays ». Avec une population
de 220 000 habitants et 110 langues
parlées, l’archipel n’est pas un ensemble culturel unifié.
Pistes pédagogiques
•Le chant, la musique et la danse :
les fondamentaux de la vie publique
•Représenter l’humain et le divin
•Le rapport aux ancêtres : patrimoine matériel et immatériel
Autres œuvres en lien dans le
musée
•Vitrine du Vanuatu (dents de cochons, statue de grade et masque
Luan)
Bibliographie
- Dossier thématique consultable au centre de documentation.
23
NIV 3 - BEAUX-ARTS
La section Beaux-arts présente deux belles sections : la première
consacrée aux artistes européens du 16ème au 19ème siècle, et la seconde mettant en valeur les artistes charentais.
Les deux premières salles plongent le visiteur dans la « grande peinture »,
la peinture d’histoire et de mythologie, mais aussi dans l’univers des collectionneurs qui accumulaient les toiles jusqu’à en couvrir sol et plafond; Ainsi
se rencotoient des toiles de tous formats et tous sujets : portraits, paysages,
natures mortes, scènes de bataille, scènes buccoliques...
Les salles que vous rencontrerez par la suite sont dédiées aux peintres charentais du 19ème siècle et du début du 20ème. De sensisbilités très variées, vous
découvrirez peintres céramistes et sculpteurs qui ont, pour certains, eu une
renommée au-delà des frontières charentaises. Ils sont d’ailleurs «confrontés» aux artistes nationaux et internationaux dans les salles du musée par des
oeuvres d’artistes comme Boudin, Rosa Bonheur ou Maurice Denis, que vous
pourrez identifier par des murs couleur framboise : liens de maître à élève,
traitement de mêmes sujets, inspiration... un lien les unit.
24
NIV 3 - 1
La consternation de la famille de Priam
Etienne Barthélémy Garnier (1759-1849), 1800
huile sur toile, 413 x 576 cm
L
a consternation de la Famille de
Priam est une œuvre caractéristique du néo-classicisme (fin du 18ème
- début du 19ème siècle) : reprise de
canons antiques, œuvre très structurée, scène mythologique...
L’artiste
Étienne Barthélémy Garnier a reçu le
Grand Prix de Rome, prix prestigieux
en peinture, en 1788. Il présente
cette œuvre au Salon (grand rendezvous artistique) en 1800, œuvre sur
laquelle il bâtira sa carrière. Ultime
reconnaissance, il intègre l’Académie des Beaux-arts en 1816.
L’épisode de la Guerre de Troie
Le peintre évoque tout à la fois l’origine de la Guerre de Troie, par la présence de Pâris qui se cache les yeux à
gauche du tableau ; la mort d’Hector
fils du roi de Troie, traîné par le char
d’Hercule en arrière-plan ; la suite
de l’histoire, le roi décidant d’aller
réclamer le corps de son fils et sa
fille, Cassandre, tentant de l’en dissuader sachant qu’il court à sa perte.
C’est donc non pas un seul épisode,
mais trois qui sont évoqués dans ce
tableau.
Le style néo-classique (mi 18ème
- 1830)
Le style néo-classique fait suite aux
fastes du style baroque et rococo, jugés frivoles. La moitié du 18ème siècle
correspond à la redécouverte de l’antiquité avec les fouilles de Pompéi.
Une plus grande sobriété est recher-
chée et les canons des statuaires
antiques sont reproduits. La composition est savamment orchestrée en
jouant avec des lignes de force, des
groupes composés en triangle, des
diagonales... Le tableau de Garnier
l’illustre tout à fait par le groupe de
Priam qui compose un triangle, les
diagonales qui se croisent avec les
femmes de la famille (mère et femme
d’Hector), et les bras des soldats qui
guident le regard vers l’arrière plan.
Le représentant le plus célèbre en
peinture est Jacques-Louis David,
mais ce mouvement est transversal
et concerne tout autant la sculpture
et l’architecture. Il aura une influence
européenne.
Le contexte
Cette époque est également celle où
la « hiérarchie des genres » s’est largement établie. Codifiée en 1668, elle
perdure jusqu’à la fin 19ème siècle. Un
genre correspond à un thème établi.
Cinq sont distingués et hiérarchisés
selon le niveau de difficulté, les représentations humaines étant considérées comme plus complexes à réaliser. Par ordre d’importance :
- la peinture d’histoire, la plus prestigieuse et représentant des scènes
historiques, bibliques ou mytholo-
giques comme c’est le cas de cette
œuvre. Il s’agit souvent de commandes royales, d’État ou d’église.
- le portrait
- les scènes de genre (représentations
de la vie quotidienne)
- le paysage
- la nature morte.
Pistes pédagogiques
•Histoire de l’art en 4ème : les
arts témoins du 18ème et 19ème
s.(nombreuses œuvres autour
dans cette thématique)
•Étudier la composition d’une
œuvre (différents plans bien marqués, composition géométrique...)
•Mythologie et grands personnages
•Le néoclassicisme dans les autres
arts (sculpture, architecture)
Autres œuvres du musée en
lien (scènes mythologiques)
•Psyché, Joseph Auguste Peiffer,
1870
•La Douleur d’Orphée, édition de
série en bronze, de Raoul Verlet,
19ème siècle
•Vénus et Adonis, Paul Bril, ~1600
•Mercure,
bronze
d’édition
d’après Jean de Bologne, fin
19ème siècle
Bibliographie
- Dossier d’œuvre dédié consultable en salle de documentation
- L’Iliade (chant XXII).
- Article consultable en ligne sur le site des musées de Poitou-Charentes : http://www.alienor.org/ARTICLES/priam (dernière
consultation, été 2014)
25
NIV 3 - 2
Table servie
Joris Van Son (1623 – 1667), 1645
huile sur toile, 81 x 112 cm
C
ette œuvre de Joris Von San
illustre un type d’œuvre caractéristique du 17ème siècle en Europe,
mais est plus particulièrement la spécialité des Flandres : les « vanités »,
ces natures mortes porteuses d’une
symbolique moralisatrice.
L’artiste
Joris Van Son a essentiellement vécu
à Anvers, et appartient à « l’Ecole
flamande », connue pour un grand
souci du détail et un certain naturalisme.
Spécialiste des natures mortes, il
s’est souvent adonné au style des
« vanités ».
Natures mortes et vanités
Les natures mortes, représentant
des aliments sur une table dressée,
sont apparues très tôt. Le site de
Pompéi possède déjà des mosaïques
présentant des restes de repas, des
coupes de fruits...
D’autres termes ont prééxisté à celui
de nature morte, représentant bien
l’esprit de ce genre : « peinture de
fruits », « tableau de banquet » ou
encore « nature silencieuse »
« Vanité », ou « nature morte moralisée », s’applique aux natures mortes
emplies de symboles, qui se développent particulièrement au 17ème
siècle dans un contexte bien particulier.
Le contexte
Le 17ème siècle est le siècle des Lumières. La pensée humaniste et les
découvertes scientifiques donnent
un sentiment de plus grande liberté
à l’être humain, mais lui font aussi
prendre conscience de sa place infime au sein de l’univers. Les vanités
vont alors refléter ces inquiétudes et
cette humilité .
Le développement des vanités s’inscrit également dans le contexte des
guerres de religion. Les protestants
l’utilisent comme revendication
d’une peinture plus accessible et
moins connotée (par opposition aux
grandes commandes catholiques) et
y font passer des messages d’humilité, alors que les catholiques vont se
l’approprier pour y intégrer des symboles religieux.
•Objets luxueux et coquillages :
l’avarice humaine, le besoin de
possession, aboutissant à des querelles.
Les symboles religieux
•Coupe de vin, raisin, pain, coupe
(tel un calice) : l’eucharistie et la
résurrection, préceptes religieux.
Les symboles dans le tableau
Autres œuvres du musée en lien
Le caractère transitoire de la vie
•Draperies noires, ambiance nocturne : le deuil, la fin du jour, la fin
de la vie.
•Aliments périssables (huîtres, cerises) : notre temps limité sur Terre.
•Citron pelé : l’écorce se déroule
telle la vie sur Terre, durant laquelle
un individu est censé se débarrasser du superflu pour arriver à l’essence des choses
La vanité des biens terrestres
•Coupes remplies de différentes
boissons : les plaisirs terrestres que
nous consommons en trop grande
quantité.
Pistes pédagogiques
•Observation des différents aliments (cycles 1 et 2)
•Guerres de religion
•Humanisme
•Symboles
•Vanités
Le marché aux poissons, ou allégorie de
l’eau, attribué à Jacopo Bassano, 1578
Enfant jouant aux bulles, d’après
Frans Van Mieris
•Natures mortes
Nature morte au lièvre, Melchior
Hondecoeter, ~1660
Assiette de harengs, Léonard Jarraud,
~1871
•Contexte flamand /Réforme
Portrait d’un gentilhomme des PayxBas et de sa femme, Bathélémy Van
der Helst, ~1655 (tenues austères,
différenciation sociale par de simples
détails)
Bibliographie
- La Nature morte ou la place des choses, Jollet, Etienne, éd. Hazan, 2007
26
NIV 3 - 3
Scène d’auberge
Anonyme, 18ème
Huile sur toile, 35 x 49 cm
S
aynètes et sujets de la vie quotidienne prennent une place importante dès le 17ème siècle, et notamment dans les pays du Nord.
Le sujet
Ce tableau représente une foule à
l’auberge du village : personnages
assis sur des tonneaux et buvant,
d’autres assis par terre, jeunes, vieux
(avec cannes)... Les pots entourent
tout ce monde et montrent la vraisemblable beuverie qui se déroule et
que certains s’empressent de rallier.
Les chapeaux et leurs formes
étranges, les mentons prognathes,
montrent une touche caricaturale tel
que cela a été pratiqué par Bruegel et
ses suiveurs.
Ces scènes d’auberge et de beuveries se développent beaucoup dans
la peinture du nord. Faut-il y voir
une simple scène de la vie quotidienne où sont représentés ceux
que l’Europe humaniste ne montre
pas -les bruyants, les gens pleins de
défauts..., ou bien y a t-il un message
plus profond ? Une morale ? C’est
effectivement bien souvent le cas,
montré de manière plus ou moins
explicite.
Une « scène de genre »
Ces scènes de la vie quotidienne
font partie de ce que l’on appelle les
« scènes de genre » : saynètes autour d’un feu, petite foule grouillante,
scènes de beuverie... le monde paysan est à l’honneur.
Cette appellation résulte d’une hiérarchisation des thèmes présents
dans les peintures. Au sommet sont
les scènes d’histoire, les plus reconnues, puis viennent le portrait, les
scènes de genre, et enfin celles où
aucun être humain n’est représenté :
natures mortes et paysages.
Cette hiérarchie est instaurée à la
fin du 17ème et va avoir une influence
considérable sur le milieu de la peinture jusqu’au 19ème siècle.
La peinture du Nord
Ce type de scènes se développe dans
un contexte socio-politique très particulier dans les Flandres et les pays
du Nord. Les guerres de religion et
les régimes catholiques très stricts
(notamment des Habsbourgs) entraînent de grands mouvements de
populations : de nombreux bourgeois et commerçants se tournent
vers la Hollande, protestante.
Cette nouvelle clientèle raffole de
ces saynètes, tandis que les grandes
commandes de peinture biblique
sont interdites par les protestants.
Cela entraîne un développement
considérable des scènes de genre
dans lesquelles s’illustrent les artistes du Nord.
Les nombreux voyages des artistes
dans toute l’Europe entraînent sa
propagation en Italie, en France, et
ces scènes acquièrent progressivement une belle reconnaissance.
Bibliographie
- Dossier d’oeuvre consultable au centre de documentation.
Pistes pédagogiques
•Guerres de religion, influence du
contexte politique sur la production
artistique
•Hiérarchie des genres
•La représentation du quotidien
•Étude des plans dans une peinure
Autres œuvres du musée en
lien
Peintures du Nord
•Scène de patinage, anonyme, 18ème
siècle.
•Portrait d’un gentilhomme des PaysBas et sa de sa femme, B. Van der
Helst, 1655
•Vanité, Joris Von San, 1645
Scènes de genre
•Scène de patinage, anonyme, 18ème
siècle.
•Marché aux poissons au bord de la
mer (allégorie de l’eau), attribué à
Léandro Bassano, 1578
•Le berceau, Armand Vergeaud (charentais), 1908
•Vieillard à la pendule, Léonard Jarraud (charentais), 1874
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NIV 3 - 4
Les Chaumes
Léonard Jarraud (1848-1926)
huile sur toile, 28 x 38 cm
L
éonard Jarraud est peut-être l’artiste
charentais le plus complexe et le plus
subtil. À travers ses paysages, il cherche à
exprimer l’inexprimable, l’universel.
L’artiste
Léonard Jarraud (1848-1926) est
un artiste très solitaire, mélancolique. Il tente les concours de peinture parisiens avec des sujets d’histoire (historiques, bibliques), mais
échoue plusieurs années consécutives. Même s’il a une bonne clientèle pour ses portraits et scènes de
genre (scènes de la vie quotidienne),
ses échecs le rongent. En 1879, il retourne à La Couronne, dont il est originaire, et s’y établit définitivement.
Il y réalise une production de nombreuses scènes paysannes, paysages,
et portraits, dont un échantillon est
présenté dans les salles.
Il restera cependant un peintre solitaire, qui, malgré les encouragements
et demandes de ses amis ne sera que
peu présent physiquement lors d’expositions locales. Mais, même reculé du milieu parisien, il gardera toujours un œil dessus et s’inspira des
courants réalistes (scènes de paysans), impressionnistes (marines à
Royan, paysages), symbolistes, voire
même du japonisme pour certaines
œuvres (notamment le portrait de
Mme Laroche).
Le style très subtil de Jarraud
Ce paysage de Jarraud montre toute
la subtilité du travail de Jarraud.
Il aime les lieux peu fréquentés,
presque fantomatiques. Le choix des
chaumes n’est pas anodin : la « verte
Charente » ne l’intéresse pas, il représente l’identité profonde du lieu.
Sa palette se dégrade en tons subtils
de jaunes et ocres. On ne saurait dire
si la scène se situe au lever du jour
ou à la fin d’après-midi. Il affectionne
particulièrement ces moments
d’entre-deux indéfinissables (entre
deux saisons, entre deux moments
de la journée...).
Le développement du paysage
en extérieur
Léonard Jarraud a passé de nombreux dimanches à Fontainebleau.
C’est dans cette forêt, à quelques kilomètres de Paris que les peintres de
plein-air se retrouvaient (notamment
à Barbizon, petit hameau jouxtant la
forêt) pour poser leurs chevalets. Ce
n’est qu’avec les impressionnistes
(2ème moitié du 19ème siècle) et la
révolution du tube de peinture que
la peinture « sur le motif » apparaît
réellement : l’œuvre est intégralement réalisée en extérieur. Un nouveau regard se développe sur les
couleurs, les formes, pour aboutir à
des paysages plus sensibles.
Léonard Jarraud, affectionnant la
solitude, aimait particulièrement
se rendre dans les chaumes charentaises où il pouvait passer des
journées entières à contempler ces
étendues stériles ornées d’à peine
quelques touffes d’herbes.
Bibliographie
- Un dossier sur Léonard Jarraud est à votre disposition au centre de documentation.
- Léonard Jarraud, catalogue d’exposition au Musée d’Angoulême, 1988
Pistes pédagogiques
•Le paysage : définition, composition
•Ouverture sur l’impressionnisme
•Évolution du paysage vers l’abstrait
(peinture de Maurice Denis, Sousbois à St Gall)
•L’influence de la technique sur la
production d’œuvres d’art (la peinture en tube)
•Une production qui reflète une
identité locale forte
•Un artiste au tempérament « maudit » dont la solitude et la mélancolie se reflète dans les œuvres
Autres œuvres du musée en
lien
•Paysages de Barbizon
•Autres œuvres de L. Jarraud :
scènes de genre et portraits
•Portrait sculpté de Léonard Jarraud,
par Raymond Guimberteau, 1889
•Marine, Eugène Boudin, 19ème siècle
(impressionniste)
28
NIV 3 - 5
Caïn et Abel
Raoul Verlet (1857 - 1923), 1900
Étude en plâtre, h.65 cm
R
aoul Verlet est un sculpteur charentais de renommée
nationale dont les œuvres comme le monument Carnot
ou les statues de l’église d’Obézine font encore le paysage
urbain de la ville d’Angoulême. Cette œuvre est particulièrement intéressante car il s’agit d’une étude, témoin d’une
étape de travail.
L’artiste
Une sculpture représentative l’œuvre dont le traitement mouvementé peut créer une confusion
Raoul Verlet est le fils d’un entre- des canons de l’Académie
preneur en monuments funéraires
et concierge du cimetière communal des Bardines. Il fait ses études
à l’école des Beaux-Arts de Paris et
reçoit de nombreux prix au cours
de sa carrière. C’est avec la Douleur d’Orphée qu’il obtient le prix
du Salon (grand rassemblement
artistique où peintres et sculpteurs
pouvaient acquérir de la renommée)
et la Légion d’Honneur, lui permettant d’atteindre une reconnaissance
totale de la part des privés comme
de la commande officielle publique.
Sa production est variée : sculpture
ornementale, portrait, tombeaux,
grands monuments ; et traite de
nombreux sujets.
Le sujet
Cette œuvre représente un épisode
de la Genèse considéré comme le
premier meurtre de l’humanité, celui
d’Abel par Caïn, tous deux fils d’Adam
et Ève. Les deux frères font une offrande à Dieu. Caïn étant laboureur,
il offre les fruits de son champ tandis
qu’Abel, berger, offre des bêtes de
son troupeau symbolisées ici par un
agneau. Mais Dieu préfère l’offrande
d’Abel. Fou de tristesse, de rage et de
jalousie, Caïn tue son frère.
Cette œuvre de Verlet est typique de
ce que l’on appelle l’art académique,
terme employé pour désigner les
œuvres respectant les règles enseignées par l’Académie des Beaux-arts,
: le respect de l’anatomie, la nécessité d’imiter la nature et les antiques
ainsi que la supériorité des sujets
historiques, mythologiques ou religieux par rapport aux sujets quotidiens.
Ici, le sujet est abordé par la différence de traitement des corps. Le
corps de Caïn est viril, fort, dur. Ses
muscles, contractés dans l’effort,
traduisent encore l’excès de colère
qui l’a poussé au meurtre. Il est celui
qui effectue l’action. Le corps d’Abel
ne se définit que par contraste avec
celui de son frère. Juvénile, souple et
mou, il exprime la passivité.
Étape de travail et technique
Cette œuvre est une étude et une
maquette, c’est-à-dire une œuvre
non finie, une étape de travail qui
permet à l’artiste de donner forme à
ses intentions avant de les reprendre
pour les affiner. Il s’agit également
du moulage en plâtre d’une esquisse
précédente modelée directement à
partir de terre crue.
Il est intéressant de prendre en
compte cet état dans l’analyse de
Bibliographie
- Dossier d’œuvre dédié consultable au centre de documentation.
avec la sculpture romantique où les
expressions et mouvement peuvent
être exacerbés. Les boulettes de
terres ajoutées par l’artiste, les empruntes de doigts et les traces d’outils étaient donc bien destinées à disparaître, au profit de l’étude précise
des corps...
Pistes pédagogiques
•Techniques et étapes de façonnage
d’une sculpture
•La représentation du corps : émotions, expressions et messages
•L’œuvre d’art et la tradition : ruptures, continuités, coexistence
(programme histoire des arts au
collège. Pour aborder l’art du 19ème
siècle : romantisme, art académique, réalisme...)
Autres œuvres en lien dans le
musée
•La douleur d’Orphée, Raoul Verlet,
dernier quart du 19ème siècle
•Tombeau de Madame Lazare Weiller,
Raoul Verlet, 1900 (œuvre de jeunesse romantique)
•Samson et Dalila, François de Troy,
2ème quart du 18ème siècle (scène religieuse peinte où l’expressivité des
corps permet d’analyser l’œuvre)
29
NIV 3 - 6
Portrait de Jules Durandeau
Armand Vergeaud (1876-1948), 1911
huile sur toile, 55 x 45,5 cm.
A
u 19ème siècle, un véritable tandem
s’instaure en Charente entre les
artistes et les industriels locaux. Si les
œuvres qui en résultent restent assez
traditionnelles, comme ce portrait de Jules
Durandeau par Armand Vergeaud, il s’agit
cependant d’une source de revenus non
négligeable pour les artistes.
L’artiste
Lors de son passage à l’École des
Beaux-arts de Paris, Jean Antoine Armand Vergeaud, (Angoulême 1876
- Tunis 1948), étudie notamment
avec Gustave Moreau et François
Flameng.
Il s’installe à Tunis en 1922 où il ouvre
un atelier, devenu ensuite Centre
d’Enseignement d’Art de Tunis, puis
École des Beaux-arts. Il en occupe la
direction de 1930 à sa mort.
Le modèle
Pierre-Adolphe Durandeau, dit Jules
(1854 - 1913), comptable de profession, était l’un des administrateurs de
la société Papeterie Léonide Lacroix.
Il dirigea l’usine d’Angoulême de
1894 à sa mort.
Les locaux de la manufacture devinrent ensuite les papeteries Joseph-Bardou « Le Nil » (1918-1972)
avant de laisser place au Musée du
Papier dès 1988.
Sans héritier, Durandeau a fait de la
ville d’Angoulême sa légataire universelle. Sa collection d’œuvres d’art
fut ainsi transmise au musée de la
ville en 1913. Ce portrait fait donc
partie du legs Durandeau.
Le contexte
Au 19ème, on assiste à la montée en
puissance d’une société bourgeoise
(révolution industrielle, spéculation...). Ce phénomène s’accompagne d’un souci de représentation
de la réussite sociale, de création
d’une « histoire de famille ».
C’est aussi une période où la photographie prend de plus en plus
de place. En 1839, Arago présente
le daguerréotype à l’Académie de
France et va entraîner un véritable
bouleversement des habitudes artistiques.
Le portrait
Les visages individualisés et identifiables apparaissent assez tardivement, notamment avec le travail de
Giotto (14ème siècle). Ce n’est qu’au
15ème siècle que le portrait devient
un genre à part entière : il s’agissait
pour les modèles de rester dans les
mémoires. Le choix de la posture, du
décor et des attributs était ainsi méticuleux, afin de transmettre le message adéquat aux spectateurs futurs.
Se développent alors les portraits de
cour, particulièrement au 17ème.
Peu à peu, le portrait se démocratise
et on commence à représenter des
enfants ou des personnages issus de
la bourgeoisie ou du peuple.
Les peintres adoptent également
une approche plus psychologique,
cherchant à représenter le modèle
de manière expressive.
Au 19ème siècle, le portrait décline
et laisse place à la photographie,
proche de la réalité et plus rapide
tant à réaliser qu’à reproduire.
Pistes pédagogiques
•Différents types de postures privilégiées : trois quarts, profil, en pieds,
en buste, assis...
•Le portrait : un genre varié (portrait
peint, littéraire, photographique,
individuel, de groupe, autoportrait...)
•La symbolique du portrait (portrait
de cour, portrait politique, portrait
de famille...)
•Fin 19ème-début 20ème : la rivalité
entre peinture et photographie.
Autres œuvres en lien dans le
musée
•Portraits de la famille Laroche, Léonard Jarraud, 1888
•Mademoiselle Valentine, 1886 et les
portraits de la famille De Grammont par Raoul Verlet
•Portrait de Charles de Sainte-Maure,
Ferdinand Père, ~1660
•Autoportrait au chien, Alexandre
Desportes, 1871
Bibliographie
- Armand Vergeaud, 1876-1949, Béatrice Rolin, 58p, 1997.
30
NIV 3 - 7
La Charente à l’Houmeau
Gaston Boucart (1878-1962), 1927
huile sur toile, 220 x 324 cm
L
a Charente à l’Houmeau est une
œuvre tout en délicatesse qui
évoque parfaitement la vie autour de
la Charente à la fin du 19ème siècle.
L’artiste
Né à Angoulême, Gaston Boucart fut
un artiste très précoce : premières
expositions à 15 ans en Province, à
19 ans à Paris et est admis au Salon,
grand rendez-vous artistique parisien dès l’âge de 21 ans. Ses plus
belles productions sont ses paysages
charentais, mais également saintongeais et breton où il aimait se rendre.
La vue : un angle clairement
identifié
L’artiste peint Angoulême depuis le
Port l’Houmeau qui, comme toute la
ville, profite d’un essor extraordinaire
au cours du 19ème siècle grâce au développement industriel (papeteries,
imprimerie, poudrerie, fonderie...).
La Charente est de plus un moyen
de communication privilégié à cette
époque : sel, canons, vins, charbons,
pierres... Tout se concentre sur ses
rives.
Boucart nous offre donc d’observer la manutention des tonneaux
sur les gabarres, ces bateaux à fond
plat qui permettaient de remonter
la Charente jusqu’à Angoulême ; les
lavandières lavant le linge, et évoque
même le chargement des tonneaux
par la structure de levage en métal
sur la rive. Le bac reliant la rive à l’ile
Marquet se laisse deviner...
En ville, la cathédrale est reconnaissable en haut à droite à son grand
clocher, le château et actuel Hôtel de
Ville en plein centre.
Pourtant un élément est étranger à
Angoulême en 1927, date de réalisation de la toile : le châtelet, visible à
la gauche du château n’existait plus,
puisqu’il a été détruit en 1885. Cela
laisse donc penser que Gaston Boucart s’est largement inspiré d’une
carte postale des années 1880 pour
réaliser cette œuvre. Une de ces
cartes des années 1880 a d’ailleurs
été retrouvée, présentant exactement cet angle de vue.
Le style
Boucart se caractérise par des teintes
très pastels, légèrement acidulées
dans ses paysages.
Il apporte toujours une touche très
minutieuse et s’inspire probablement des impressionnistes dans son
rendu de l’eau de la Charente.
Cependant, il sait également manier
des couleurs plus vives dans des
œuvres qu’il peint en Bretagne ou à
Venise, mais qui ne sont pas exposées au musée.
Pistes pédagogiques
•Les couleurs pastels
•La touche de l’artiste
•Histoire d’Angoulême
•La révolution industrielle
•Une ouverture est possible vers le
Musée du Papier : industrie papetière, quartier de l’Houmeau
Autres œuvres du musée en
lien
Vues d’Angoulême
•Consécration de l’église Saint Martial, Louis-Edouard May, 1853
•La laitière, Louis-Edouard May,
1880
Les couleurs
•Les œuvres d’Henry Daras (teintes
pastels inspirées des fresques)
•Sous-bois à Saint-Gall, Maurice Denis, 1940 (couleurs bien plus vives
et presqu’ abstraites)
La touche
•La foire à Montbron, José Gaboriaud, 1937 (en opposition à la
touche délicate de G.Boucart, Gaboriaud travaille l’empâtement et
laisse voir la trace de la brosse)
Bibliographie
- Un dossier sur Gaston Boucart est à votre disposition au centre de documentation.
31
NIV 3 - 8
Sous-bois à Saint-Gall
Maurice Denis (1870-1943), 1940
huile sur toile, 24x31 cm
M
aurice Denis est le théoricien des nabis, ce mouvement de la fin du 19ème et
début du 20ème siècle qui est à la recherche
de nouvelles solutions esthétiques.
L’artiste
Maurice Denis intègre l’Acédémie Julian et l’Ecole des beaux-arts de Paris
en 1888. Il y rencontre notamment
Pierre Bonnard, Paul Sérusier. Ils
fondent ensemble et avec d’autres le
groupe des nabis la même année. Il
en deviendra le théoricien.
Mêlant les arts décoratifs et la peinture plus traditionnelle, il réalisera
entre autres des papiers peints, des
anneaux décoratifs, des décors de
plafond, de vase, des vitraux, … Sur
la deuxième de sa vie, les sujets religieux prennent le pas, et il fonde en
1919 Les Ateliers d’Art Sacré avec
Georges Desvallières dans le but de
renouveler l’art chrétien.
Proches du symbolisme, les peintres
nabis cherchent de nouveaux cadrages se détachant des représentations traditionnelles.
Dès 1890, ils cherchent à supprimer
les frontières entre la peinture et les
arts décoratifs et nombre d’entre eux
s’y essayent, tout comme Maurice
Denis.
Ils s’inspirent de nombreux éléments : philosophies orientales,
arts du Japon, des cernes utilisés
par Gauguin pour délimiter les surfaces...
Ce mouvement, considéré comme
l’un des premiers mouvements
modernes en réaction à l’art académique, prend fin en 1900.
Le principe de « confrontation »
Les panneaux de couleur rose/framboise présentent des œuvres de
niveau national ayant un lien avec
celles des artistes charentais exposés
: même thématique, même période,
ou dans le cas présent montrant le
lien qui peut exister entre les artistes.
Maurice Denis était en effet le maître
de José Gaboriaud, exposé à côté.
Pistes pédagogiques
•Le chemin vers l’abstraction
Une œuvre aux frontières de •La couleur
Le mouvement est créé en 1888. Le l’abstraction
•Le paysage
Le mouvement Nabi
terme hébreu signifie « prophète »,
qui traduit l’aspect très intellectuel et
spirituel de ce mouvement.
Il né suite aux liens avec Paul Gauguin qui pousse ces jeunes artistes
à s’affranchir de l’imitation simple
de la nature, et à libérer des couleurs pures, à envisager une logique
propre à chaque peinture, détachée
du réel.
Maurice Denis écrit en 1890 sa
célèbre phrase : « se rappeler qu’un
tableau, avant d’être un cheval de bataille, une femme nue ou quelconque
anecdote, est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un
certain ordre assemblées ».
Cette œuvre, bien que tardive dans la
production de Maurice Denis, illustre
les grands principes des nabis : le
cadrage du sous-bois rend l’œuvre
presqu’abstraite, les troncs laissant
place à des lignes enchevêtrées dont
on ne voit pas la cime. Les couleurs
s’affranchissent du réel avec des
troncs roses, un sol rose-orangé, des
ombres bleues. Les couleurs vives
et le cerne très marqué des troncs
d’arbre sont également des réminiscences directes des principes mis en
place à la fin du 19ème siècle.
•Les avant-gardes
Autres œuvres du musée en
lien
•La tonnelle par temps gris, Henri
Martin, 1930 (style des mouvements moderne : ici, le néo-pointillisme)
•La foire à Montbron 1937, Paysage
aux meules, 1934 ou Le déjeuner sur
l’herbe, José Gaboriaud (son élève)
•La Charente à l’Houmeau, Gaston
Boucart, 1927 (teintes pastels opposées à celle de Denis)
Bibliographie
- Un dossier sur les nabis, et un autre sur Maurice Denis sont à votre disposition au centre de documentation.
- Les Nabis, Isabelle Cahn,Olivier Morel, 2006, éd. Courtes et Longues
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Le Musée d’Angoulême
Square Girard II, rue Corneille
16000 Angoulême
Conception et réalisation - Service des Publics du Musée d’Angoulême

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