Dossier parcours découverte
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Dossier parcours découverte
Le Musée d’Angoulême Parcours Découverte des collections Dossier enseignants angouleme 1 Sommaire Présentation du dossier Préparer votre venue Les ressources à disposition p. 3 Plan des salles et emplacement des oeuvres p. 4 L’histoire du lieup. 5 L’archéologie charentaisep. 6 Les arts extra-européensp. 15 Les beaux-artsp. 24 2 n Un dossier pour faciliter la découverte du musée en autonomie Le principe du dossier Ce dossier a été créé pour vous aider dans votre découverte lorsque vous ne pouvez ou ne souhaitez pas venir en visite guidée. 25 fiches de découverte vous sont proposées : 1 sur l’histoire du lieu, et 8 par collections. Le musée possède en effet trois collections : archéologie de la Charente au RDC, arts extra-européens au 1er étage, beaux-arts au dernier étage. Une sélection a été réalisée afin que vous puissiez découvrir les oeuvres principales, mais aussi toute la variété et la richesse des pièces qui sont exposées. Le contenu des fiches Chaque fiche comporte une image de l’objet, son identification, des éléments vous permettant de mieux la comprendre, des pistes pédagogiques, les titres d’oeuvres pouvant lui être relié et une légère bibliographie que vous pouvez consulter au sein de notre centre de documentation. Que vous veniez pour découvrir le musée, un étage en particulier ou autour d’un projet, vous pouvez construire votre visite comme bon vous semble et choisir les fiches les plus pertinentes pour votre projet. n Préparer votre venue Réservez votre visite Inscriptions et réservations auprès du service des publics. Tout groupe venant au musée, même en visite libre, doit obligatoirement avoir effectué une réservation, de préférence par mail. En cas d’annulation, merci de nous l’indiquer au plus tôt. Émilie Falk [email protected] 05 45 95 79 89 Jours et horaires de visite Le musée est ouvert du mardi au dimanche, de 10h à 18h sans interruption. n Les ressources à votre disposition Le site internet du musée www.musee-angouleme.fr Le centre de documentation N’hésitez pas à franchir la porte du centre de documentation du musée. Notre documentaliste est à votre disposition pour vous renseigner et vous orienter sur les différentes ressources : revues et ouvrages généraux sur l’histoire de la Charente, l’histoire de l’art, les Beaux-arts, l’archéologie, les continents africains et océaniens, l’ethnographie... Des dossiers d’oeuvres autour de plusieurs objets, artistes, peuples ou courants présents dans le musée sont à votre disposition, et sont signalés dans les fiches du dossier. Graziella Relet 05 45 95 79 91 [email protected] Ouvert tous les après-midi du mardi au vendredi. Il est conseillé de prendre rendez-vous pour préparer votre projet. 3 Plan des salles & Emplacement des oeuvres 4 Préhistoire RDC ARCHÉOLOGIE 5 Antiquité 7 6 Moyen-âge 1.Ammonites et rudistes 2.Fémur de sauropode 3.Os de mamouth rongé par l’hyène 4.Femme de la Quina 5.Aiguille à chas 6.Casque d’Agris 7.Pions de jeu médiévaux 8.Chapiteau roman, griffons affrontés 8 i 1 Préhistoire Accueil Géologie 3 2 Entrée Documentation Exposition temporaire NIVEAU 1 EXTRA-EUROPÉENS Afrique 1 Maghreb 3 2 Océanie 6 8 5 7 4 NIVEAU 3 BEAUX-ARTS Foyer charentais 1 Peintures européennes 2 3 6 4 5 7 8 1.Sac Eljibera 2.Masque Ejumba 3.Masque cimier Tyi Wara 4.Poids à peser l’or 5.Figure de reliquaire mbulu-ngulu 6.Les objets de navigation océaniens 7.Bambous gravés kanaks 8.Tambour de grade 1.La consternation de la famille de Priam 2.Table servie 3.Scène d’auberge 4.Les chaumes 5.Caïn et Abel 6.Portrait de Jules Durandeau 7.La Charente à l’Houmeau 8.Sous-bois à St Gall 4 m L’histoire du lieu S itué derrière le chevet de la cathédrale, le Musée d’Angoulême présente trois types de collections : une collection archéologique témoignant de l’histoire de la région, une collection riche et diversifiée des arts d’Afrique et d’Océanie, ainsi qu’une collection Beaux-arts du 18ème au début du 20ème siècle comportant de nombreuses œuvres charentaises. Le bâtiment, un ancien évêché La naissance du musée Le musée d’aujourd’hui... Le mot évêché, qui désigne le lieu de résidence de l’évêque, souligne le lien étroit entre cet ensemble bâti et celui qui l’administre. C’est donc sans surprise que l’on mentionne un évêque, Girard II, lorsqu’on aborde l’histoire de ce bâtiment singulier. Maître d’ouvrage des travaux de reconstruction effectués au 12ème siècle, il est la personnalité qui donna à l’évêché sa configuration actuelle : un large complexe composé de deux ailes en équerre abritant une grande salle, une chapelle et une chambre de réception que l’on retrouve encore aujourd’hui, sous une forme différente, intégrée à la scénographie du musée. Au 19ème siècle, une autre figure illustre du patrimoine angoumoisin, l’architecte Paul Abadie Fils, œuvrera pour restaurer l’édifice endommagé par les années et en modifier la fonction suite aux bouleversements de la Révolution française qui engendrèrent la cession des locaux à la Préfecture. C’est en 1868 qu’ouvre au rez-dechaussée de l’Hôtel de ville un premier petit musée principalement composé de toiles primées au Salon, envoyées par les gouvernements successifs, et d’un don d’un artiste local, François Ringuet. Il faut attendre 1920 pour que la demeure épiscopale devienne le musée municipal. On y présente alors peinture, sculpture et archéologie. Grâce à ce nouvel espace et aux dons de collectionneurs, les oeuvres présentées se diversifient. Le plus important de ces contributeurs, le docteur Jules Lhomme, lègue un ensemble impressionnant de 3243 objets d’art et d’ethnographie. Ces nombreuses pièces sont à l’origine de l’actuelle collection extra-européenne (Maghreb, Afrique et Océanie) et étoffent également les collections archéologiques déjà existantes. L’évolution des collections du musée et de ses activités à destination d’un public de plus en plus large amène la municipalité à décider de la rénovation des bâtiments en 2000. Un projet de réaménagement ambitieux est donc porté par les architectes Stéphane Barbotin-Larrieu et Paul Gresham qui proposent une intégration discrète, transparente et originale d’éléments contemporains à l’architecture de ce lieu patrimonial. La création d’une grande verrière donnant sur la cathédrale permet non seulement de reconnecter les bâtiments du musée à leur environnement et leur histoire mais aussi de recontextualiser les collections d’archéologie médiévale, témoins des édifices religieux de la ville. Le musée ouvre de nouveau ses portes en 2008, offrant au regard du visiteur une nouvelle présentation claire et agréable où chaque collection dispose d’un espace dédié. Des accès repensés permettent à tous de se rendre au musée tandis que les nouveaux équipements comme la salle d’exposition temporaire, la salle de conférence ou le centre de documentation permettent d’offrir une plus grande variété d’actions pour le public. 5 RDC - ARCHÉOLOGIE L’archéologie est un des éléments identitaires les plus forts de la région. De l’homme de Néandertal à l’art roman en passant par le mégalithisme, elle permet d’individualiser la Charente dans ce qu’elle a d’unique et d’original. Les collections : originales et variées Bien qu’issue d’un fonds ancien (collection Lhomme et collection des évêques), la collection conservée au musée d’Angoulême rassemble essentiellement le produit des fouilles conduites ces quarante dernières années en Charente. Leur présence au musée d’Angoulême s’explique par la politique de collaboration avec les milieux scientifiques et les chercheurs initiée dès les années soixantedix. Ces collections nouvelles prennent toute leur valeur grâce aux informations scientifiques qui les accompagnent : documents de fouilles, thèses et publications. La thématique générale : l’histoire naturelle et humaine du bassin de la Charente Géographiquement, les thématiques choisies sont développées dans le cadre du bassin de la Charente. Elles embrassent la très vaste période qui part des origines géologiques de la région pour aboutir à la période romane. L’ampleur chronologique de cette présentation implique un jalonnement ponctuel, et forcément incomplet, d’un phénomène continu. Il s’agit donc d’un trajet chronologique présentant des tableaux des environnements ou des cultures disparus, matérialisés par une suite d’étapes : géologie, quaternaire, homme de Néandertal, Cro-Magnon, le temps des mégalithes, l’âge du bronze, la période celtique et enfin le Moyen-âge. L’exposition est également conçue pour mettre en relation les vestiges et les sites d’où ils proviennent. 6 RDC 1 Ammonites et rudistes Fossiles du tertiaire et secondaire charentais L a géologie en Charente regorge de trésors, parmi eux, les ammonites (proches parents disparus du calamar et du nautile) et les rudistes, bivalve conique. Ces deux espèces s’éteignent il y a 65Ma, avec les dinosaures et bien d’autres espèces. Les ammonites Les ammonites sont des céphalopodes (mollusques munis de tentacules sur la tête) dont la coquille enroulée faite de nacre n’est que très rarement conservée. Ce que l’on retrouve n’est que l’empreinte interne de la coquille. L’actualisme, principe selon lequel les phénomènes du passé ressemblent fortement à ceux du présent, permet de comparer l’ammonite au nautile actuel dont il est très proche dans la répartition des loges (compartiments de la coquille). De manière générale, comme tout céphalopode, l’ammonite projetait un jet d’eau pour se déplacer, tandis que les loges internes, plus ou moins remplies d’eau ou de gaz permettaient d’aller en profondeur ou de remonter. Les ammonites sont précieuses pour le géologue : elles sont nombreuses et évoluent rapidement, permettant ainsi d’établir une échelle chronologique très fiable. Les rudistes Les rudistes sont apparus il y a 156 Ma. Ils sont visibles dans les éléments bâtis avec la pierre dite d’Angoulême : les nombreux trous visibles sont autant de moules de valve inférieure de ce fossile. Celuici est en effet composé d’une valve inférieure conique profonde (qui contient la partie molle), recouverte d’une valve supérieure plate, tel un petit opercule. Cette forme favorise la présence de plusieurs individus côte à côte : ce sont des rudistes coloniaux. Les rudistes présents dans les salles : Biradiolites lumbricalis, Radiolitides et dérivés, Hippurites radiosus Des fossiles révélateurs de leurs milieux de vie Au Crétacé (de 145 Ma à 65 Ma), l’Europe était un archipel tropical, et la région Poitou-Charentes était inondée par des mers chaudes. Un haut fond marin, au nord de notre région, reliait les Massifs armoricain et central, terres émergées de « l’archipel Europe ». Son versant sud plongeait dans les eaux du Bassin aquitain, lagons tropicaux peu profonds, tandis que son versant nord était baigné des eaux plus fraîches et plus profondes du bassin parisien. Chacun des deux domaines renfermait une faune caractéristique : les ammonites au nord (elles nagent en mer, milieu ouvert) ; les rudistes au sud (ils se fixent sur les fonds marins peu profonds et fermés). Ces deux fossiles sont donc de bons indices pour reconstituer le paléoenvironnement marin. Bibliographie - La géologie à petits pas, François Michel, Robin Gindre – Actes sud Junior, 2010 - Géologie de la Charente, Jean François Tournepiche – éd GERMA 1998 Qu’est-ce qu’un fossile ? Un fossile correspond à un organisme mort qui a été remplacé par des minéraux. Pour se former, un fossile a besoin d’être enfouis dans des sédiments rapidement. Les fossiles peuvent être composés soit de l’enveloppe externe de l’organisme (assez rare), soit du moule externe de cette enveloppe (l’emprunte) et/ ou du moule interne (l’enveloppe, trop fragile ayant disparue). Pistes pédagogiques •Fossilisation •Biodiversité passée •Fossile stratigraphique •Paléo-environnement •Actualisme •Crise du crétacé tertiaire Autres œuvres en lien dans le musée •Fossiles de tous types : oursins, crinoïdes, éponges, coraux... •Dinosaures et animaux du début du Crétacé : crocodiles, tortues, poissons du site de Cherves ; sauropode du site d’Angeac. •Tronc d’araucaria fossilisé, témoin du paléoenvironnement terrestre. 7 RDC 2 Fémur de Sauropode (moulage) Angeac Charente, ~140/130 millions d’années avant JC C e moulage grandeur nature fait partie des incroyables découvertes réalisées à Angeac-Charente, où plusieurs espèces de dinosaures ont été trouvées, dont ce sauropode, dinosaure herbivore d’environ 40m de long. Le fémur de sauropode Cette grande plaque suspendue est un moulage grandeur nature d’un fémur d’un peu plus de 2m de haut de grand dinosaure sauropode. Le fémur est l’os de la cuisse et est reconnaissable grâce aux deux extrémités très bien conservées. La partie en L est la partie supérieure qui marque l’articulation avec la hanche. Sa couleur noire correspond à la véritable couleur du sol et donc du fossile (un fossile prend la couleur du sol dans lequel il se fossilise) : de l’argile noire. Les autres parties noires entourant le fémur sont des éléments de bois de type araucaria, tels que l’exemplaire fossile présenté à côté. Le grand sauropode d’Angeac La famille des sauropodes est cette famille de dinosaures à long cou dont les plus connus sont le brachiosaure et le diplodocus, deux dinosaures bien plus récents. Celui d’Angeac, dont la taille peut être estimée à 40m de long et 20m de haut au regard de la taille du fémur, est probablement le plus grand connu à ce jour et dont l’espèce n’est pas encore identifiée (il est deux fois plus grand que le diplodocus). Dinosaure herbivore, ses dents ne lui servent qu’à arracher des feuilles. Sa queue, si longue lui sert quant à elle de balancier pour garder son équilibre. À Angeac, de nombreuses vertèbres et dents ont été retrouvées, mais aussi des éléments beaucoup plus rares tels que des éléments de mâchoires et même une «griffe» de 34cm, trouvée lors de la campagne d’été de 2014 ! Un moulage, pour quoi faire ? Des moulages des belles pièces ou des pièces fragiles sont fréquemment réalisés : cela facilite leur présentation au public, y compris en dehors du musée, mais permet aussi d’avoir un instantané 3D de sa position exacte lors de sa découverte pour bien comprendre comment il s’est cassé, même après avoir été sorti de terre. En effet, et comme cela est visible sur le moulage, l’os est en plusieurs morceaux qu’il faut ensuite consolider et remonter. Loin d’être si facile lorsque l’os a été écrasé et ne peut plus bien rentrer en connexion entre les différents morceaux... Des solutions sont encore cherchées par les professionnels pour l’étudier sereinement et pouvoir présenter, à terme, l’original au public. une surface très étendue que les carriers exploitants (Carrière Audouin) ont mis au jour et nous aident désormais à étudier en laissant la fouille se dérouler chaque été... Quelques éléments de stégosaure ou de théropode ont été découverts, mais le sauropode et l’ornithomimosaure (ou dinosaure-autruche) sont incontestablement les plus présents. Le site recèle encore bien des secrets, notamment la cause de la mort massive de ces dinosaures à cet endroit précis. Pistes pédagogiques •Le monde du vivant •L’environnement du passé et sa biodiversité •La fossilisation Le site d’Angeac Œuvres du musée en lien Angeac-Charente est un site désormais mondialement reconnu pour ses découvertes paléontologiques*. Fouillé depuis 2009, il a mis à jour un gisement incroyable d’os de dinosaures, de crocodiles, tortues... sur •Dents de sauropode •Crâne de crocodile de Cherves (période relativement similaire) •Tête de fémur •Araucaria (espèce de bois) fossile Bibliographie - Mimo, sur la trace des dinos - Mazan, Detha, Allain et Tournepiche, ed.Eidola, 2012 ouvrage jeunesse sur le site d’Angeac ses fouilles et BD avec les dino 8 RDC 3 Os de mamouth rongé par l’hyène Grotte de La Chaise et biface moustérien en silex à droite C e « biface », en os de mammouth, décrit comme un outil façonné par l’homme de Néandertal dans les années cinquante, n’est qu’un fragment d’os rongé par les hyènes. Longtemps, certains ossements rongés par les hyènes ont été interprétés comme des outils préhistoriques. L’industrie osseuse de l’homme de Fontéchevade décrite à la fin des années cinquante, s’identifie complètement au contenu des tanières d’hyène. Les brunissoirs, les manches d’outils en bois de cervidé, les os appointés n’étaient que des vues de l’esprit à une époque où on ne connaissait pas les processus naturels et notamment l’action des hyènes. Des méthodes de recherche bien différentes aujourd’hui Au 19ème siècle, les archéologues cherchaient le spécimen rare alors qu’actuellement, on veut connaître le mode de vie, le comportement des êtres anciens et leur paléoenvironnement. Ceci a une conséquence sur les méthodes et la durée des fouilles. Il faut parfois 10 ans pour fouiller 4m3 actuellement alors qu’il ne fallait qu’une demi journée au 19ème siècle. La taphonomie Cette évolution a abouti à la naissance d’une nouvelle science : la taphonomie. Cette partie de la paléontologie étudie ce que deviennent les organismes après leur mort. Questions auxquelles la taphonomie peut permettre de trouver une réponse : •Mangé ou mangeur ? •Consommé par l’homme ou par un autre carnivore ? •Déposé sur place (autochtone) ou venant d’ailleurs (allochtone) par un moyen de transport à définir (vent, eau, glace, prédateur animal, humain..) ? •Restes en position originelle, tous contemporains, ou bien remaniés et mélangés avec des restes plus récents ? Indices étudiés : •traces de dents sur l’os •traces d’usure •cassure avec cicatrisation •os en connexion anatomique •terriers, galeries d’animaux fouisseurs actuels Les hyènes, des aides précieuses Parmi les grands carnivores, la hyène des cavernes est celui dont l’étude présente le plus grand intérêt pour la préhistoire car ils sont des collecteurs d’os. L’hyène des cavernes est étroitement apparentée à l’hyène africaine. Elle en diffère par sa taille plus importante, la morphologie de ses dents et un comportement un peu différent. Les hyènes sont représentées par de nombreux ossements (des dents surtout) et par des coprolithes (excréments fossilisés). Les os d’herbivores portent des traces des dents d’hyènes : les extrémités des os longs ont été rongées et les os les moins résistants ont disparu (côtes, vertèbres...). L’action des hyènes se Bibliographie - Dossier thématique en consultation au centre de documentation révèle également par la présence d’os régurgités. En collectant toutes les carcasses animales dans un large périmètre, les hyènes nous offrent un reflet assez fidèle de l’environnement animal de l’époque. Hyènes et hommes : quels relations ? La présence de restes humains rongés porte à s’interroger sur la nature des relations entre l’hyène et l’homme sur un territoire qu’ils partageaient. Des cavités ont pu accueillir alternativement des occupations animales et humaines (décelables par la présence de silex parmi les ossements). Il en résulte un mélange inextricable si le site n’est pas fouillé avec soin. Pistes pédagogiques •Étude de l’environnement des hommes préhistoriques (paléoenvironnement) •Méthode de recherche et de fouilles Œuvres du musée en lien •Coprolithes d’hyènes •Bois de cerf rongé, et bois de cerf taillé pour emmanchement de hache •Sol de la grotte de Rochelot, -100 000 (os visibles depuis le dessous). 9 RDC 4 La femme de la Quina moule du crâne en état de découverte (en salle) reconstitution du visage (hall du musée) Site de La Quina Epoque du Moustérien (~70 000 -30 000 av.JC) C ette femme a révolutionné nos connaissances sur l’homme de Néandertal. Loin d’être la brute que nous pensions, le travail qu’a effectué le Dr Henri-Martin autour de cette découverte nous permet d’en savoir un peu plus sur l’apparence de ces hommes. Le site de La Quina Les crânes néandertaliens Le site de La Quina, situé près de Villebois Lavalette, a été découvert dès 1872. Plusieurs fouilles se sont succédées jusqu’à l’achat du site par le Dr Henri Martin en 1905. Il y installe alors son laboratoire et y consacre plusieurs années. Parmi ses découvertes, celles de deux êtres humains : une femme dont le squelette était très bien conservé, et le crâne d’un enfant. Les néandertaliens possèdent une anatomie crânienne spécifique : épaisseur de la calotte crânienne, bourrelet de l’arcade sourcilière, bourrelet à l’arrière du crâne, trou après les molaires, absence de menton en sont les principaux traits. Lorsque l’on compare ces crânes adultes à ceux des enfants (comme c’est possible dans la vitrine centrale de la salle), on se rend compte que les traits sont bien moins marqués chez eux et s’apparentent plus aux nôtres. C’est en grandissant que l’homme de Néandertal développe ces caractéristiques anatomiques. Le crâne de la femme de La Quina Le 18 septembre 1911, le crâne de « la femme de La Quina » est découvert. Le caractère exceptionnel réside dans l’état de conservation du crâne, dont l’organisation anatomique est quasiment intacte. D’ordinaire, seuls des fragments sont trouvés. Dans la vitrine, le moulage du crâne (identique à 1911) est placé au sol pour visualiser quelque peu le contexte de découverte (l’original est conservé au Musée des Antiquités Nationales à St Germain en Laye). Si le Dr Henri Martin n’a su l’identifier, il s’agissait très probablement d’une sépulture. Cela implique la présence d’une organisation sociale, de rites de passage, voire de croyances, déjà à l’époque de Néandertal. La datation, bien que relative et sujette à changement, semble être antérieure à 50 000 av.JC. Par sa datation et ses caractéristiques anatomiques, cette femme fait des partie des néandertaliens. Le Dr Henri-Martin (1864-1936) Le Dr Léon Henri-Martin fut le premier préhistorien moderne à venir en Charente. Il avait une grande rigueur scientifique et a étudié le site de La Quina de manière très poussée pour l’époque. Sa formation de médecin l’a poussé à étudier les os précisément, en les comparant, en établissant des relevés... Ces recherches ont ainsi permis à la communauté scientifique de mieux comprendre l’anatomie des néandertaliens. Il consacra une grande partie de sa vie et sa richesse aux recherches du site de La Quina. L’image de l’homme de Néandertal Il a révolutionné l’image que nous nous faisions de l’homme de Néan- dertal. Grâce au crâne de cette femme et à ses connaissances anatomiques, le Dr Henri-Martin a reconstitué son visage. Nous sommes très loin de la vision que nous avions de cet humain par le passé. Cette représentation voûtée et simiesque est en fait due à une mauvaise interprétation d’un squelette (l’arthrite avait causé cette déformation). Quand au rapprochement avec le singe, il s’agit plus de la vision d’une époque que d’une vision scientifique. Le Dr Henri Martin montre que les différences entre nos visages sont bien moins marquées en réalité. De nos jours, les connaissances ont encore avancé et la similitude de nos visages se fait de plus en plus sentir. Nous partageons même 4% de notre génome avec lui Pistes pédagogiques •Les premières traces de vie humaine •Études scientifiques et relativité des données selon les époques Autres œuvres du musée en lien •Autres crânes dans salle de Néandertal •Vitrine sur le Dr Henri Martin dans le hall du musée •Les silex et les productions des hommes de Néandertal. Bibliographie - Dossier thématique consultable au centre de documentation 10 RDC 5 Aiguille à chas Grotte du Placard Paléolithique supérieur (~40 000 -10 000 av.JC) L ’innovation de l’outillage du paléolithique supérieur réside moins dans les nouvelles techniques que dans la taille d’objets petits ou allongés telles les lamelles. À cette époque se développent les industries sur os (aiguilles à chas, harpons, sagaies, boutons, parures, etc.), les gravures et les sculptures. Période et typologie Cro-Magnon et la couture L’aiguille à chas est inventée par les solutréens (Solutréen final de la vallée de la Vézère en Dordogne ~18/17 000 avt JC) et sera un objet typique du Magdalénien. Elle est présente dans toutes les périodes et dans toute l’aire d’extension de cette culture et disparaît, en France, au Mésolithique. Les matières utilisées sont l’os, le bois de cervidé, l’ivoire. La mensuration d’aiguilles entières permet de les classer en deux groupes selon leur longueur. Le groupe le plus important est celui d’aiguilles longues de 30 à 80 mm. Audessus de 80 mm, il s’agit de grandes aiguilles ; elles sont peu nombreuses. Le chas est le plus souvent circulaire et mesure 1 mm de diamètre (les extrêmes sont 0.5 et 2.4 mm). La présence des aiguilles à chas est la preuve que, dès le Paléolithique supérieur, les hommes cousent certainement des peaux. Les aiguilles en os ou bois de cervidés perdurent même durant les périodes où apparaissent les exemplaires en métal. Par exemple, à l’époque gallo-romaine les aiguilles en os côtoient celles en fer. Des sépultures attestent la pratique de couture des pièces de peau pour en faire des vêtements : des milliers de perles décorent certains corps ensevelis, de telle sorte que leurs supports vestimentaires purent être restitués en « négatif ». La fabrication La fabrication d’une aiguille à chas est une opération minutieuse : sur un os bien droit, 2 sillons sont tracés à l’aide d’un burin de silex. Une longue languette est détachée. Ensuite, il faut la racler, l’égaliser et l’amincir. Le chas est percé en attaquant l’os sur ces deux faces, grâce à un perçoir en silex. L’aiguille est enfin soigneusement polie sur un bloc de grés. Des tubes en os d’oiseaux découpés et décorés ont été utilisés en guise d’étui pour des aiguilles qui y furent parfois retrouvées. Un fil fait de tendons Le fil peut provenir de tendons attendris et écrasés avec une pierre. Les tendons fournissent des liens solides au même titre que la queue de cheval (pour les coutures plus fines), les boyaux ou encore les écorces... La découverte de pattes de rennes en connexion anatomique, abandonnées à distance de détritus de cuisine, a fait émettre l’hypothèse que les tarses avaient pu jouer le rôle de « bobines », les tendons qui y sont fixés servant de réserve pour les besoins en fibres de ligature ou de couture. pour la couture ne fait guère de doute, la manière de coudre, elle, est discutée. De nombreux préhistoriens imaginent que l’aiguille à chas était utilisée pour passer un lien à travers une paroi préalablement percée à l’aide d’un poinçon. Mais, le Dr Stordeur - Heddid pense que la solidité de l’aiguille, sa forme adaptée, sa pointe acérée lui permettent de traverser des cuirs souples. Le tannage des peaux nécessitait des grattoirs qui pouvaient servir aussi pour gratter l’os ou l’ocre. Le grattoir est une lame de silex dont on retouche le bout en demi-cercle par une suite d’enlèvements de petits éclats. A. Cheynier a découvert en Dordogne dans les années 1960 une empreinte de tissu très fin, conservée sur une brèche tendre adhérente à un « éclat de silex ». Les Solutréens, étaient-ils donc aussi tisserands ? Pistes pédagogiques •Les techniques des hommes de la préhistoire •Le développement du travail de l’os Autres œuvres du musée en lien •Sagaies et propulseurs en os Quelles techniques de coutures ? •Parures en coquillage, dents aniSi l’utilisation de l’aiguille à chas males ou humaines Bibliographie - Outils préhistoriques- Du galet taillé au bistouri d’obsidienne – Jean Luc Piel Desruisseaux- Dunod 5ème édition. - Les gestes techniques de la Préhistoire - Marcel Otte, Pierre Noiret - éd deboeck – 2010 11 RDC 6 Casque celtique d’Agris Fer, bronze, or et corail - Grotte des Perrats, Âge du Fer 4ème siècle avant JC Dépôt L e casque d’Agris, vedette du Musée d’Angoulême, est l’un des témoignages précieux de la présence des Celtes en Angoumois. Les Celtes Le mot « Celte » vient du grec keltoi, qui désignait les barbares européens. Cette appellation rassemble diverses tribus parlant des langues proches car issues de l’indo-européen. Il n’existait cependant pas vraiment de sentiment d’appartenance au groupe. L’art celte n’apparaît pleinement qu’au 5ème siècle av. JC, date encore discutée. Très divers, on a pourtant coutume de l’identifier par son côté décoratif caractérisé par des motifs répétés. La découverte La Grotte des Perrats à Agris a été découverte par les membres de l’Association de Recherches Spéléologiques de La Rochefoucauld. C’est en 1981 que la cavité, bouchée par des effondrements, fut dégagée. Les spéléologues atteignirent alors une grande salle et remarquèrent la présence de nombreux tessons de céramique. Peu après, les premiers fragments du casque furent découverts, conduisant au lancement d’opérations de fouilles entre 1982 et 1994. Un objet composite Seuls le timbre (coque principale), la base du cimier, la paragnathide (protège-joue) et quelques éléments ornementaux du casque sont connus. Leur fabrication a nécessité l’intervention de matériaux très divers : fer dans la coque du timbre et les supports, bronze coulé ou travaillé en feuille, or plaqué sur le bronze, argent (rivets), corail (décors) collé avant rivetage, bois et cuir. Une origine complexe L’ensemble du casque est recouvert d’éléments ornementaux formant sur le timbre cinq registres superposés séparés par des lignes de petits motifs appelés « peltes », rappelant par exemple le casque d’Amfreville. On retrouve une répétition des motifs de palmettes et de lotus, récurrents dans l’art celtique nord-alpin. D’autres motifs végétaux issus de l’art méditerranéen montrent qu’une diffusion des décors s’opérait déjà au gré des déplacements d’artisans. On peut de plus voir une double figuration dans le motif de palmette renversée (troisième registre) rappelant un visage humain coiffé de deux feuilles de gui symétriques. Le placage d’or sur bronze, de même que la structure du casque (coque de fer et couvre-nuque riveté), reprennent aussi des techniques utilisées dans les ateliers nord-alpins. Cependant, l’analyse d’échantillons d’or issus des différentes parties du casque permet de l’apparenter à des bijoux trouvés dans le Sud-Ouest. Il aurait donc été conçu dans cette région par des artisans formés dans le nord des Alpes. Bibliographie - Dossier thématique consultable au centre de documentation - Le casque celtique de la grotte d’Agris, José Gomez de Soto, Stéphane Verger - La grotte des Perrats à Agris, 1989-1994 : nouvelles observations, José Gomez de Soto. Un casque dans une grotte ? Au départ, on pensait que la Grotte des Perrats était un lieu de dépôt funéraire. Or, aucun lien avec des restes humains n’a été établi, et le casque se démarque de par sa splendeur des autres modèles découverts dans des tombes. L’idée d’une offrande aux divinités du monde souterrain a donc été privilégiée, les grottes étant en effet vues comme une voie d’accès aux enfers. La présence sur la paragnathide d’un petit serpent cornu, référence au dieu Cernunos, corrobore cette hypothèse. Le timbre, enfoncé par un choc, serait l’une des premières traces de la pratique de sacrifice symbolique des armes par destruction, représentée dans des sites plus récents. Pistes pédagogiques •Celtes, Gaulois, Romains : les conquêtes antiques. •Croyances et rites Autres œuvres en lien dans le musée •Statue de dieu gaulois assis de Verteuil, 2ème s. ap. JC. 12 RDC 7 Pions de jeux Bois de cerf, résidence fortifiée d’Andone 10ème-11ème siècle C es petits objets ronds ne sont rien moins d’autre que des pions de jeux, attestant d’une occupation de la résidence fortifiée médiévale d’Andone, où les comtes d’Angoulême élirent domicile autour de l’an mil. La naissance des jeux Les jeux apparaissent très tôt : des traces sont trouvées dès le 4ème millénaire av. JC, en Égypte et au ProcheOrient. Nous disposons en général de peu de sources : les pions et outils de jeux sont souvent en matériaux périssables tels que le bois. Restent les sources écrites et les documents iconographiques (parois ornées, vases décorés, miniatures) pour en savoir un peu plus. Les jeux au Moyen-âge Les jeux médiévaux laissent des traces à partir du 11ème siècle : pions en bois, pierre, ou os comme à Andone. Les jeux sont classés en différentes catégories : jeux sportifs, largement acceptés ; jeux intellectuels, tolérés ; et jeux de hasard, interdits en 1369 pour trouble de l’ordre de public (les personnes endettées ont recours au vol, voire au meurtre). Les jeux sont pratiqués par toutes les classes sociales, notamment les jeux de dés. Certains seront plus particulièrement pratiqués par les classes nobles, tels que les échecs ou le trictrac représenté ici par les pions en bois de cerf. Le tric-trac À l’époque d’Andone, il est plus communément nommé « jeu des tables » et se rapproche de notre backgammon. Il s’agit d’un jeu de hasard raisonné : il fait appel au hasard du dé, auquel le joueur doit s’adapter pour élaborer sa stratégie. Il est joué par l’aristocratie jusqu’au 12ème siècle, puis se popularise. Il existerait une vingtaine de versions des règles. Le but le plus couramment exposé est de faire parvenir l’ensemble de ses pions de l’autre côté du plateau avant l’adversaire. Le nom « trictrac » apparaît vers 1500. Les jeux d’Andone Les jeux ont presque tous été retrouvés dans le bâtiment résidentiel, traduisant une utilisation par l’aristocratie et non par les serviteurs. Les pions de tric-trac sont à décor géométrique, ou ornés d’animaux fantastiques. Le motif du pion au quadrupède fantastique fait écho à la sculpture romane régionale. Ces pions semblent avoir été, du moins en partie, produits directement sur le site. Le site d’Andone La résidence d’Andone, à quelques kilomètres au nord d’Angoulême, fut fondée vers 975 par les comtes d’Angoulême, et abandonnée vers 1020. Il s’agit vraisemblablement d’une résidence de chasse située en vue d’autres familles seigneuriales. La résidence est néanmoins fortifiée et protégée par un fossé sec. L’intérieur compte un bâtiment résidentiel d’où proviennent tous les objets luxueux, dont les pions. Composé d’une grande salle principale, deux chambres s’y adjoignent. Le second ensemble regroupait les éléments de service (forge, écurie). La cuisine était isolée pour prévenir les incendies. La cour était parsemée de petites constructions légères, dont il ne reste que peu de traces. L’occupation du site n’était qu’épisodique, la cour disposant de plusieurs résidences. Seuls quelques hommes d’armes et serviteurs y vivaient en permanence. N’ayant plus de position stratégique au début du 11ème siècle, les comtes d’Angoulême délaissèrent Andone au profit de Montignac. Pistes pédagogiques •Les jeux : comprendre les règles et s’y essayer ensemble •Société et mode de vie médiéval •Composition d’une résidence fortifiée •Thématique histoire des arts « Arts, créations, cultures » : les manifestations ludiques, jeux de société •Arts plastiques : sculpture (dans de l’os par retrait) Autres œuvres du musée en lien •Ferrages des chevaux. •Armes, surtout pour la chasse. •Instruments de cuisine : Andone se distingue par quelques éléments luxueux (mortier en marbre, verre). Bibliographie - Un dossier sur les jeux et jouets au Moyen-âge est accessible au centre de documentation. - Jeux et jouets à travers les âges, Catherine Breyer, éd. Safran (règles du jeu du Tric-Trac) - Andone, Archéologie d’un château des comtes d’Angoulême autour de l’an mil. Luc Bourgeois, 2011 13 RDC 8 Griffons affrontés, Chapiteau de colonne engagée Abbaye de Saint-Cybard, Angoulême milieu du 12ème siècle C e chapiteau de colonne à composition centrale est orné de deux monstres, des griffons, qui s’opposent et se mordent réciproquement la patte. Un temps attribué à l’abbaye de Beaulieu, il provient en réalité de l’ancienne abbatiale de Saint-Cybard, aujourd’hui disparue. Les chapiteaux Le répertoire roman En architecture, un chapiteau désigne l’élément qui repose sur la colonne et qui soutient la partie supérieure de l’édifice. D’un point de vue technique, sa forme évasée lui permet de concentrer le poids qu’elle reçoit et de le transmettre au support. D’un point de vue ornemental, il s’agit d’une zone privilégiée car elle est vaste et sert de couronnement à la colonne. Aux sources du riche répertoire de l’art roman se trouve la tradition antique dont certains motifs végétaux ou géométriques sont hérités. De nouvelles formes vont être introduites et assimilées par les artisans grâce aux objets rapportés d’Orient par les routes de commerce, notamment les animaux exotiques qui peuplent le bestiaire roman, comme le lion et par extension le griffon. Le répertoire roman s’inspire également de nombreux écrits : scènes du Nouveau et de l’Ancien Testament, de traités anciens de géométrie, de mathématiques, de musique ou d’astronomie, ainsi que d’un genre littéraire plus récent : les vies de saints (voir fragment de linteau à droite du chapiteau). Le décor Ce chapiteau représente deux griffons, créatures mythiques habituellement composées du corps d’un lion et des ailes et tête de l’aigle. Ici, il s’agit de griffons possédant les pattes d’un lion et le corps d’un serpent. Respectivement roi de la Terre et roi du Ciel, le lion et l’aigle symbolisent le courage et la vigilance. Leur association est une évocation métaphorique du Christ considéré comme à la fois humain et divin. La sculpture est ici travaillée en hautrelief : les griffons et le décor végétal se détachent presque entièrement du fond. Les différences de profondeur de la sculpture créent une variation des plans destinée à produire des effets plastiques en fonction de la lumière. L’abbaye de Saint-Cybard Située en dehors des remparts, l’abbaye de Saint-Cybard est la première d’Angoulême. Bâtie sur la tombe de l’ermite Saint-Cybard, en dessous de la grotte qu’il aurait occupée pendant sa vie de prière au 6ème siècle, il s’agit d’abord d’un modeste édifice de culte. Il est successivement agrandi, reconstruit après sa destruction par les normands en 893 et remanié. L’abbaye est vendue après la Révolution Française et une papeterie s’y installe au 19ème siècle. Aujourd’hui, quelques vestiges sont visibles sur le site occupé par le Centre International de la Bande Dessinée. Ce chapiteau est donc le seul témoin de l’état de l’édifice roman au 12ème siècle. Pistes pédagogiques •Histoire cycle 3 et 5e : Le Moyen Âge - le rôle de l’Église •Histoire des Arts cycle 3 : l’architecture religieuse ; les techniques de sculpture •Histoire des Arts au collège : L’œuvre d’art et le sacré, les sources de l’inspiration artistique. Autres œuvres du musée en lien •Lion provenant de la tour Nord, cathédrale Saint Pierre, 12ème siècle : motif oriental assimilé •Chapiteau de colonne engagée, feuillages et oiseaux, ancienne abbaye de Beaulieu, 12ème siècle : décor végétal •Deux apôtres, fragment de linteau en haut-relief, cathédrale Saint Pierre, 12ème siècle : motif de la vie des saints Bibliographie - Le Moyen âge à petits pas, Carpentier, De Monti, 2010 : livre jeunesse consultable en salle de documentation Ressources en ligne sur l’Art roman (dernière consultation : été 2014) - http://www.lacharente.com/Decouvrir/Art-de-vivre/Art-Roman Art roman en Charente et vocabulaire architectural - http://www.ageroman.org/parcours.htm : contexte historique et approfondissements 14 NIV 1 - ARTS EXTRA-EUROPÉENS Le Musée d’Angoulême possède une des meilleures collections françaises d’art africain et océanien par le nombre et la qualité des pièces conservées. L’essentiel de cette collection est légué en 1934 par le Dr Jules Lhomme (18571934), médecin et notable de La Rochefoucauld, qui rassemble très tôt, dans le dernier quart du 19ème siècle, d’importants objets d’art et d’ethnographie provenant de toutes les parties du monde : Afrique (Maghreb, Afrique Noire, Madagascar) ; Océanie (Mélanésie, Polynésie) ; Asie (Inde, Indonésie, Indochine, Chine et Japon) ; Amérique (Pérou, Mexique, Brésil, Canada, Alaska). Le Dr Lhomme constitue cette collection unique de plus de 3000 pièces sans jamais voyager : cette passion lui est transmise par son oncle Jean Fermond (1816-1911), dont il récupère une partie des collections à sa mort, qu’il intègre plus tard dans son legs et qui est aujourd’hui conservée au musée d’Angoulême. Il la complète ensuite en chinant à Bordeaux, grande cité portuaire ou en s’entourant de quelques personnes en contact avec le continent africain. Le Dr Lhomme est un des tout premiers collectionneurs d’art nègre, bien avant que la mode ne soit lancée au début du siècle par les peintres fauves et cubistes. Sans voyager, il est un vrai connaisseur, et sa collection est le fruit d’une curiosité toujours en éveil et d’un goût très sûr. Vous traverserez ainsi tour à tour des salles consacrées au Maghreb (première salle orange), à l’Afrique (rouges), ou à l’Océanie (bleues) pour enfin aboutir dans l’ancienne chapelle de l’évêché où les collections américaines et asiatiques sont évoquées au sein de la vitrine consacrée au Dr Lhomme. 15 NIV 1 - 1 Sac Eljibera Touaregs du Hoggar ou d’Agadès, fin 19ème siècle Cuir, soie, teinture Legs du Dr Lhomme, 1934 L e sac de cuir est caractéristique de l’art Touareg et de leur mode de vie : transportable, finement décoré, il prend de nombreuses formes. Ce type de sac, dit Eljibera, est un grand sac d’apparat. Le sac Eljibera Le travail du cuir Le sac Eljibera est réservé aux hommes et sert plus particulièrement à porter les vêtements de cérémonie. C’est une des pièces maîtresses du méhari (nom du dromadaire domestiqué) et il est à ce titre, porté sur son flanc, la place d’honneur. L’honneur d’un Touareg, son rang social et son statut sont reflétés par tout un ensemble. En premier lieu par son dromadaire, qui fait la fierté de chaque guerrier. Mais aussi par tout le harnachement qu’il porte, qui doit tout autant être confortable que symbolique : selles, sacs... Les vêtements portés par le Touareg sont également le reflet du prestige de ce dernier. En dehors des moments de transhumance, et lorsque le campement est établi, le sac Eljibera est suspendu aux piquets de la tente, à la place de l’homme. Le cuir est le matériau principal de l’artisanat des nomades du Sahara, les Touaregs. Peuple d’éleveur de moutons et de chèvres, le cuir est une ressource inépuisable : les sacrifices pour les cérémonies sociales ou religieuses permettent de pourvoir les besoins en viande, mais aussi en cuir. Ce travail est réservé aux femmes qui sont relativement indépendantes chez les Touaregs. Elles débarrassent les peaux de leurs poils, les raclent, les lavent et les plongent plusieurs jours dans un produit tannant. Sont ainsi confectionnés des sandales, des selles, des sacoches, les fourreaux des épées, des coussins, des bottes, des petits tapis… Les différents sacs Les sacs revêtent une importance particulière car ils sont le seul moyen pour les nomades de transporter leurs affaires. Il en existe ainsi diférentes sortes : certains réservés pour les hommes, d’autres pour les femmes, pour la nourriture, comme porte-feuille, pour le service à thé, pour les vêtements de cérémonie (le sac Eljibera)... Chacun possède une taille, une forme, un type bien particulier qui lui est propre. Le décor Le décor de ce sac est caractéristique de l’art touareg qui accorde une grande importance aux motifs géométriques (ronds, carrés, triangles...), symétriques et couvrant les surfaces. Ils ont bien souvent une symbolique protectrice mais qui ne nous est pas toujours parvenue. Les couleurs sont également très reconnaissables, et notamment le vert, qui est une couleur aux vertus protectrices (prophylactiques). Celui-ci est importé du Nigeria, de Kano, par les commerçants et se retrouve sur nombre d’objets touaregs. L’application de motifs peut être en cuir, en soie, en peinture, par estampage, par excision... Bibliographie - Dossier d’œuvre consultable au centre de documentation. Ces teintures et décors sont effectués par les femmes d’artisans spécialisés qui se passent leur savoirfaire de génération en génération. Les Touaregs Les Touaregs sont des pasteurs nomades indépendants qui ont assuré de tous temps le commerce saharien : sel, ivoire, produits manufacturés, or, indigo... Convertis à l’islam, ils ont conservé certaines de leurs croyances d’origine, et ont également intégré des pratiques animistes. Peuple d’environ 1 million de personnes, il se répartit dans les actuels Algérie, Libye, Niger, Mali, Nigeria. Malgré cette dispersion, ils font preuve d’une grande unité culturelle. Leur économie est aujourd’hui basée sur l’élevage, l’agriculture et le commerce, mais ils sont confrontés à la désertification, la sécheresse, et la mondialisation qui ébranlent leur système social. Pistes pédagogiques •Objet de prestige et représentation du statut social par un objet •Géométrie et symétrie •Les arts du quotidien •Découverte du monde Autres oeuvres du musée en lien •Vitrine des nomades dans laquelle est le sac (selle, autres sacs plus petits, armes, service à thé) 16 NIV 1 - 2 Masque Ejumba Peuple Diola, Sénégal 19ème siècle, ou début 20ème siècle roseau, corne, résine, coquillage, graines, cauris, boutons L e masque Ejumba permet d’évoquer l’importance de ces objets comme ciment social dans de nombreuses populations africaines. Celui-ci est utilisé lors des rites d’initiation, moments particuliers qui marquent le passage de l’enfance à l’âge adulte. Un masque de rite d’initiation voyeur de richesses. Il est ainsi en Le terme de masque, haut de la hiérarchie des animaux et contrairement à notre (le bukut) Le Bukut est le rite d’initiation des jeunes hommes et le véritable ciment de l’unité sociale des Diola, peuple vivant au Sénégal. L’initiation marque le passage de l’enfance à l’âge adulte et se déroule sur plusieurs jours, voire mois, durant lesquels les jeunes se voient dispensés un enseignement secret, des règles de comportement, sont circoncis... L’ensemble est ponctué de rites et cérémonies publiques durant lesquelles les masques sont sortis. La totalité du rite consiste à « tuer » symboliquement le futur initié pour le faire renaître en une personne nouvelle, en adulte. Les rites se déroulent pour plusieurs jeunes à la fois, qui seront liés à vie. Le boeuf Le masque ejumba est celui que les initiés ont le droit de porter, lors de la cérémonie de clôture de l’initiation (le kahinçen), réservée aux hommes. C’est un moyen de montrer leur changement de statut. Ils sont ensuite démasqués par les anciens du village et sont réintégrés en son sein. Les cornes de bœuf sont l’élément le plus marquant de ce masque, et ne sont pas choisies par hasard. Le bœuf et les vaches sont un bétail de grande importance : il est pour- est utilisé lors de sacrifices rituels, comme celui réalisé à la fin du bukut. Les cornes évoquent la puissance et la fertilité. Elles renvoient également au côté impulsif, sauvage et animal des non-initiés, vitalité qui a été canalisée par l’initiation. Le mélange des matières Le masque ejumba du musée montre la variété des matériaux utilisés pour la fabrication de ces masques : structure en vannerie recouverte de résine, coquillages (cauris), graines... mais aussi des boutons. Les masques reflètent la variété des mélanges effectués et l’intégration par les populations de cultures et pratiques extérieures. Ainsi, le masque a intégré des boutons occidentaux, qui, loin de marquer une perte d’identité du peuple et de ses pratiques, est intégré pour renforcer le pouvoir du masque. Représentation d’une pratique animiste, certains masques peuvent intégrer des versets coraniques, marquant le syncrétisme entre ces pratiques et l’Islam. L’importance des masques Le masque est un objet utilisé par tous les peuples africains, même si les zones côtières en ont une utilisation plus intense. Bibliographie - Dossier d’oeuvre consultable en salle de documentation. conception occidentale, ne désigne pas que la partie qui est posée sur le visage, mais également le costume et le porteur. Le costume recouvre le plus souvent intégralement le porteur qui ne doit pas être identifié : il devient l’enveloppe du personnage, la divinité ou l’ancêtre que son masque représente. Les masques rythment la vie des peuples et sont sortis à l’occasion de nombreuses cérémonies : sociales (naissances, décès, culte des ancêtres, règlement de conflits...), économiques (favoriser de bonnes récoltes) et ludiques (réjouissances, fêtes..). Pistes pédagogiques •Découvrir l’autre •Les cérémonies sociales en Afrique •La représentation du visage Autres œuvres du musée en lien •Masque Mende (initiation des jeunes femmes) •Masque antilope Ty-Wara (masques pour les récoltes) •Masque We (intégration de cartouches de fusils, clous de tapissiers... éléments occidentaux) 17 NIV 1 - 3 Masque cimier tyi wara Culture Bambara, Mali, 19ème ou 20ème siècle Bois Legs Dr Lhomme 1934 L es masques Ty Wara, ou Ciwara, sont très représentatifs du peuple des Bambara. Ils traduisent le lien étroit qui est établi entre les rites agricoles et la fécondité humaine, tout en rappelant les mythes d’origine. Les Bambara, dits aussi Bamana En effet, le masque fait le lien entre femmes BambaLes Bambara sont un peuple habitant la partie centrale du Mali, en pleine savane. Apparu au 17ème siècle, le royaume Bambara est colonisé au 19ème siècle. Pour autant, leur existence perdure encore aujourd’hui et ils représentent la plus grande ethnie du pays. Ils vivent essentiellement de l’agriculture – un peu d’élevage, ce qui explique l’importance qu’ils accordent à la culture des champs. Ils sont d’ailleurs largement connus pour leurs cimiers zoomorphes, en lien étroit avec le travail de la terre. La société secrète Ty Wara Cette société secrète est composée des jeunes hommes du village (jusqu’à 40 ans). Les agriculteurs étaient particulièrement mis en avant chez les Bambara. Ty Wara signifie d’ailleurs « champions de la culture », ou « fauves griffus de la culture », ce qui reflète leur statut particulier. Ce sont eux qui sont en charge des masques et des cérémonies qui leurs sont propres. La symbolique agricole de l’antilope L’antilope est représentée par un corps très abstrait, quasi absent, alors que le visage très allongé et les cornes surdimensionnées sont mis en avant. les animaux fouisseurs avec ce long museau, et l’antilope et ses cornes. En effet, selon le mythe fondateur des Bambara, l’antilope est l’animal qui a enseigné aux hommes l’art de cultiver la terre. Les versions varient selon qu’elle utilisait ses sabots, ou, plus communément répandu, ses cornes pour créer des trous dans la terre dans lesquels planter les graines. Quelle utilisation pour ces masques ? Les masques, de manière générale, font le lien avec le monde des esprits (des ancêtres, des animaux mythiques, des divinités...). Ils sortent à des occasions bien spécifiques selon la nature de chaque masque. Dans le cas du cimier Ty Wara, il est sorti lors de cérémonies agricoles. Il est porté sur la tête du danseur, grâce au petit support en vannerie sur lequel il est fixé, ainsi que les fibres végétales qui recouvrent le visage du danseur. Celui-ci est d’ailleurs entièrement recouvert de fibres végétales, ne devant pas être identifié par les membres du village, mais incarnant pleinement l’esprit représenté. Les danseurs dansent toujours par deux, représentation du couple et donc de la fertilité. L’antilope femelle est identifiable au petit faon qu’elle porte sur le dos à la manière des ra. L’assimilation entre l’animal et la fertilité humaine n’en est que plus lisible. La cérémonie a lieu deux fois par an pour favoriser les bonnes récoltes. Ces objets visent ainsi à protéger l’ensemble du village des disettes. Tous étaient d’ailleurs conviés à la cérémonie, celles-ci n’étant pas uniquement réservées aux seuls initiés. Pistes pédagogiques •Les animaux •La symbolique •Les rituels •L’autre, l’ailleurs Autres oeuvres du musée en lien Autres masques Ty Wara montrant les techniques d’accroche du cimier Autres animaux symboliques : •Masque Senoufo (lézard stylisé) •Poids akan (utilisant les animaux pour faire passer des messages moraux) Autres types de masques : •Diola (pour l’initiation des jeunes garçons) •Mendé (pour celle des jeunes filles) Bibliographie - Dossier d’oeuvre consultable au centre de documentation. - Ciwara, chimères africaines, Jean-Paul Colleyn, Lorenz Homberger, musée du quai Branly, 2006 18 NIV 1 - 4 Poids à peser l’or Peuple Akan, Ghana Alliage de cuivre S i ces nombreux objets figuratifs ou géométriques avaient une première fonction utilitaire, ils possédaient également une dimension symbolique bien particulière et étaient objets de parole. Les poids à peser l’or Ces objets forment un ensemble de poids qui servait à peser l’or exploité au Ghana, mais également de monnaie jusqu’à la fin du 19ème siècle. Le tout se compose d’une boite dans laquelle étaient rangés une balance, une cuillère pour la poudre d’or et les poids, géométriques et figuratifs. Ils forment ce qui est appelé le « Dya », traduit par « héritage », révélant toute l’importance de ces objets. Le système des poids est complexe : il y a des poids mâles et des poids femelles. Les poids géométriques semblent avoir été utilisés comme système numéraire, sans que nous ne soyons parvenus à en comprendre la logique. Les motifs figuratifs étaient utilisés pour les transactions spéciales : dettes, impôts, amendes, payer les cérémonies. Chacun s’accompagne d’un sens bien précis, d’un proverbe. Par exemple, l’antilope aux cornes rabattues signifie « Si j’avais su ce qui se passait derrière moi » ; le nœud plat « Celui qui saura me dénouer connaîtra le secret du Dya » ; les crocodiles croisés possèdent plus un sens proche de « L’union fait la force »… L’échange se terminait en réalité souvent par des palabres, accompagnés par les poids. L’importance de la parole Les proverbes et la parole ont une symbolique toute particulière chez les populations Akan : dire, c’est faire. Loin de n’être qu’une petite morale, ce sont des maximes qui ont la force d’être forcément suivies et réalisées. Elles vont ainsi servir à se répondre de manière indirecte et apaisée dans les discussions difficiles. Les poids peuvent également être utilisés par les chefs et personnages importants comme un moyen de transmettre des récits, des légendes, un code moral et une culture. Le terme « héritage » qui leur est attribué prend tout son sens. L’or chez les Akans Si ces objets se sont développés dans la région du Ghana, c’est parce que cette zone a longtemps été exploitée pour son or et son argent. Elle a d’ailleurs été nommée la « Côte d’or » jusqu’en 1957. Pour les Akans, l’or sous forme de pépite est vivant et prend la forme d’un arc en ciel. Sous forme de poudre, il est utilisé pour les cultes rendus aux dieux des cours d’eau, aux ancêtres, lors des rites de purification de l’âme des vivants, ou encore comme monnaie. Le groupe Akan Les Akans rassemblent un ensemble d’ethnies de ce qui est devenu le Ghana, et est composé, entre autres des Baoulés et des Ashantis. Ils représentent environ 6 à 7 millions Bibliographie - Dossier d’œuvre consultable au centre de documentation. de personnes. Ils exploitent très tôt les métaux, et maîtrisent la fonte dès le 11ème siècle. Aux 17ème et 18ème siècles, les Akans forment un groupe important avec des états puissants qui commercent l’or et des esclaves avec les européens. Mais si ces états existent, le mode de vie des Akans, au système matrilinéaire, est relativement égalitaire, et le chef désigné a plus un rôle de chef de famille. Les poids figuratifs visibles dans la vitrine Chèvre, antilope aux cornes rabattues, crocodiles croisés, chaise, poissons, caméléon, jaguar… Pistes pédagogiques •Découvrir l’autre •L’exploitation des métaux en Afrique •La symbolique d’objets comme passeurs de messages •La représentation des animaux Autres œuvres en lien Représentation d’animaux : •Porte de grenier Dogon (lézard) •Masque heaume Senoufo (panthère) •Statue de singe Baoulé Les monnaies et moyens d’échange : •Coquillages d’Océanie 19 NIV 1 - 5 Figure de reliquaire mbulu-ngulu Culture Kota, Gabon Âme en bois recouverte de fuilles de cuivre et laiton, décorées en repoussé, clouées ou agrafées H.60cm C e visage énigmatique était le gardien des reliques des ancêtres. Permettant d’évoquer un culte essentiel dans la plupart des sociétés africaines -le culte des ancêtres-, ce reliquaire permet aussi d’ouvrir une réflexion sur la vision européenne sur ces œuvres anciennement dites « primitives ». Le reliquaire Cette œuvre est la partie sommitale d’un reliquaire. Les os des ancêtres étaient conservés dans des paniers surmontés de ces figures. Ces reliquaires étaient ensuite conservés dans des cases, lieux sacrés en bordure du village et dont l’accès était réservé aux initiés. La figuration La sculpture représente l’ancêtre du clan, gardien des crânes. Géométrique, presqu’abstraite, il ne s’agit pas d’un véritable portrait, mais d’une évocation symbolique de l’ancêtre. La fonction du losange inférieur n’est pas bien connue : certains pensent qu’il évoque les épaules, les bras et les jambes. Il constituait également le système d’attache au panier, et pouvait servir de poignée pour la présentation des figures lors des rituels. Le contenu du panier Le panier contenait les crânes des ancêtres (siège de l’âme). Il peut accueillir d’autres os, ou des « médicaments » (têtes d’oiseaux, vertèbres de poissons, insectes, coquillages, perles...). Le reliquaire, renfermant le souffle vital du défunt, était consulté notamment à l’occasion du culte Bwiti, rite de passage pour les hommes à la puberté faisant appel aux ancêtres. La technique et le cuivre Les Kota est l’un des deux seuls peuples à recouvrir intégralement les reliquaires de cuivre ou de laiton. Ils réalisent la pièce d’un seul tenant, en découpant une large plaque de métal qu’ils apposent sur l’âme de bois. Le cuivre est ensuite brossé au sable pour le rendre plus brillant, et ainsi effrayer les intrus : le soleil se reflétant dessus éblouit et effraie le non initié. L’importance du métal et des forgerons Le forgeron tient une place élevée dans les sociétés d’Afrique équatoriale. Il est le maître du feu, et son savoir-faire ne peut être acquis que par une grande connaissance des rites et des sociétés secrètes. Il est aussi médecin, juge et magicien. Cela explique la grande valeur sociale et symbolique des objets en métal : emblèmes de chef, parures, armes, ou reliquaires. Le culte des ancêtres Le culte des ancêtres est le centre de vie religieuse et sociale du groupe familial. À la mort d’un chef, les initiés prélevaient diverses reliques qui étaient décorées de métal et enduites de poudres à effets magiques. Durant ces cultes, d’autres éléments peuvent être « placés » dans le panier, pour les mettre sous la protection de l’ancêtre : une plantation, une partie de rivière, la fidélité d’une femme... Le prêtre de la famille va alors sacrifier un animal sur le panier à ossements, et prononcer sa demande aux ancêtres. Pour nourrir les ancêtres, il arrive que les prémices des récoltes soient déposées dans les paniers. Bibliographie - Dossier d’oeuvre consultable au centre de documentation. Le peuple Kota Les Kota vivent dans la partie orientale du Gabon où ils occupent depuis le 18ème siècle un vaste plateau forestier. Les différents villages regroupent plusieurs clans qui se subdivisent eux-mêmes en groupes familiaux. À l’intérieur de ces villages, les sociétés-secrètes constituent une sorte d’aristocratie. Les reliquaires Kota et l’Europe Les missionnaires européens ont combattu ces pratiques et ont détruit plusieurs œuvres de ce type. D’autres ont été collectées pour leur inétrêt esthétique et la richesse du matériau dès 1870. Pour autant, il ne s’agit pas de la partie la plus importante de l’objet (le panier) et pose la question du regard porté par les Européens. L’intérêt pour ces pièces grandit au début du 20ème siècle, notamment par les artistes d’avant-garde. Pistes pédagogiques •Style et géométrie •Culte des ancêtres et rituels •Regard sur l’autre Autres œuvres du musée en lien •Crâne du Vanuatu (salle Océanie) : l’utilisation du crâne pour le culte rendu aux ancêtres •Bambous gravés d’Océanie : rencontre des peuples avec les européens. 20 NIV 1 - 6 Les objets de navigation océaniens Pagaies et maquettes de pirogues 19ème ou 20ème siècle, Legs du Dr Lhomme, 1934 L a première salle Océanie présente des traits communs à toute l’aire culturelle océanienne, dont l’importance de l’élément marin. Les maquettes et pagaies évoquent ainsi tant les techniques de navigation que la symbolique accordée à la mer, élément central de ce continent. Les maquettes de pirogue Les maquettes de pirogues du musée illustrent deux types différents : - celles « à double coque » avec un pont central qui servent à naviguer sur de longues distances ou pour la guerre. Ces dernières peuvent avoir une ou deux voiles triangulaires selon leur taille. - celles « à balancier », pour la pêche et les petits déplacements. Le balancier sert à maintenir l’équilibre de l’embarcation. Un pont est parfois présent sur la coque, s’inspirant des ponts des pirogues à double coque. La construction des pirogues marquait un moment fort et communautaire : des rites spécifiques accompagnaient la fabrication pour charger la pirogue de mana (force magique), et toute la population était associée à la fabrication. Les femmes étaient par exemple en charge du tressage des voiles. Certaines pirogues sont d’ailleurs sacrées. C’est en effet à l’aide d’immenses pirogues que les migrations se sont effectuées et que les ancêtres ont peuplés les îles. Elles ont donc un statut particulier et sont ornées de motifs rappelant ces ancêtres, destinés à assurer la protection de l’embarcation et de ses passagers. Les connaissances maritimes des peuples d’Océanie étaient particulièrement grandes pour pouvoir se déplacer dans ces eaux. Le soleil, la lune, les étoiles, les vents, les courants, ou encore les oiseaux étaient autant de repères pour garder son cap. Les modèles réduits de ce type se sont développés avec les occidentaux : ils étaient échangés ou vendus aux marins de passage, et sont de nos jours un avantage non négligeable pour la connaissance de ces embarcations. Les pagaies Les pagaies « utilitaires » mesurent environ 1,50m et sont utilisées seules sans prendre appui sur le rebord, contrairement aux rames. Les tailles et motifs des pagaies fonctionnelles dépendent respectivement de l’âge du porteur et de la région d’où il provient. Mais d’autres pagaies, comme celles du musée, ont une vocation cérémonielle. On les reconnaît p a r leurs motifs particulièrement soignés et une usure peu marquée. Ces pagaies sont des symboles de pouvoir, destinées aux chefs ou pour les danses. L’une d’elle évoque la pêche à la bonite par les motifs de queue de poisson qui sont représentés. Il s’agit d’une pêche sacrée qui assure la Bibliographie - Dossiers d’oeuvres consultables au centre de documentation. fécondité de la population et le renouvellement de l’énergie du village. Avec l’arrivée des européens, elles deviennent une monnaie d’échange et donnent lieu progressivement à un véritable marché. Des objets qui traduisent le rôle fondamental de la mer Le fait que ces objets, à l’origine utilitaires, aient une telle valeur et des symboliques fortes, montrent bien l’importance que revêt la mer dans les cultures océaniennes. Élément nourricier, vital (par la pêche et les échanges commerciaux), elle renvoie également aux croyances de ces populations et au culte des ancêtres particulièrement présent. Pistes pédagogiques •Les éléments naturels comme ressource •La production d’objets liés à l’arrivée des occidentaux Autres œuvres du musée en lien •Coquillages (monnaie d’échange) •Élément de décoration de pirogue en forme d’oiseau •Poterie en forme de pirogue à double coque 21 NIV 1 - 7 Bambous gravés kanaks Culture Kanak, Nouvelle-Calédonie 19ème ou 20ème siècle Legs Dr Lhomme 1934 L es bambous gravés, véritables BD du peuple Kanak, nous permettent d’entrapercevoir certains éléments de la vie de ce peuple, et évoque ici la rencontre des Kanaks et des Européens. Véritables récits historiques et passeurs de mémoire, une partie de leur signification nous est pourtant perdue. À quoi servent les bambous gravés ? La rencontre avec les Européens d’objets coupants tels que éclats Les bambous gravés sont des supports de récits, des illustrations. Chaque bambou raconte une histoire complète où chaque élément, géométrique ou figuratif, a un sens. Seul son propriétaire connait l’histoire globale du bambou. D’autres fonctions semblent avoir été attribuées à ces bambous, notamment celle d’étui à herbes magiques. Plusieurs pièces contenaient des restes végétaux destinés à protéger les voyageurs durant leur périple. La production de ces bambous se situe majoritairement pendant le 19ème siècle, et disparait vers 1917. Les discours des bambous À l’origine, les bambous étaient uniquement gravés de motifs géométriques. Ces derniers auraient été un moyen de comptage pour rappeler des faits anciens. Quelques scènes figuratives apparaissent avant l’arrivée des blancs, mais elles s’intensifient à leur contact. Les bambous gravés sont l’une des rares productions kanak figuratives. Ils s’attachent à décrire la vie traditionnelle kanake à travers les événements marquants tels que les grands deuils, la construction des cases, les pêches cultuelles, les cérémonies... Mais certains décrivent également la rencontre avec les blancs et les éléments qui ont pu les étonner : nouvelles espèces d’animaux, costumes, meubles... Les bambous gravés du musée représentent cette rencontre. Les grandes cases des hommes (représentées par un toit en triangle surmonté d’une haute sculpture), les pirogues à voile et à balancier, les navires européens, les guerriers kanak portant leur massue à bec d’oiseau, les occidentaux en costume, cavaliers et soldats armés de fusil. Des scènes d’échanges pacifiques traduisent la curiosité de l’autre : dons d’ignames (dont on voit les champs sous forme de petits triangles), de tortues, ... Le mode de représentation Si les bambous semblent au premier abord un ensemble d’éléments sans dessus-dessous (personnages à l’envers, à l’endroit, de travers), ils répondent en réalité à un ordre bien établi. La référence est le village. Tout ce qui se situe dans le village se structure autour de l’allée centrale, l’axe principal, selon le procédé de « rabattement » qui consiste à aplatir l’espace vu de haut. Ce qui est en dehors ne va plus répondre à aucun ordre, relevant du monde étranger. La technique Le bambou est un matériau couramment utilisé par les Kanak : peignes, couteaux, poignées de sagaie, pointes de flèches, étuis, instruments de musique... La gravure est effectuée au moyen Bibliographie - Dossier d’oeuvre consultable au centre de documentation. - Le bambou gravé kanak, Roger Boulay, ed. Parenthèses, 1993 de quartz, pinces de crustacés, coquillages, ... progressivement remplacés par des objets métalliques. Le bambou est enfin enduit d’une pâte huileuse et sombre, qui, essuyée, s’incruste dans les lignes et noircit. Ce travail demande une grande dextérité : les motifs sont fins et aucun repentir n’est permis. Le peuple Kanak Les Kanak se sont établis en NouvelleCalédonie, grande terre de 400km de long, il y a au moins 3500 ans. Ils importent alors des plantes telles que l’igname, et vont développer des techniques de culture particulièrement importantes. Ils s’organisent en village, regroupé autour de la « maison des hommes », lieu sacré occupé par le chef et utilisée lors de grandes cérémonies. Les Kanak possèdent des « totems » : chaque clan se réfère à un aïeul fondateur, qui peut prendre la forme d’un animal, d’éléments naturels. Cet élément sera alors le totem du clan. Pistes pédagogiques •Les modes de narration •Traduction stylisée •Rencontre des civilisations Autres œuvres du musée en lien •Maquettes de pirogues •Massues à bec d’oiseau 22 NIV 1 - 8 Tambour de grade Ile d’Ambrym, Vanuatu Bois sculpté et peint – h : 2,50m Dépôt du musée du quai Branly O uvrage central dans la culture du Vanuatu, le tambour de grade est d’avantage un objet témoin, symbolique et rituel qu’un instrument de musique. Il incarne le culte des ancêtres, figures allégoriques complexes garantes de la tradition depuis le premier homme jusqu’au plus récent défunt. Le tambour Ce tambour est orné d’un visage humain stylisé rehaussé de peinture rouge et garni d’une barbe représentée par des motifs géométriques. Il s’agit probablement d’un hinen nimbwilei ou « mère des tambours », le plus important des quatre types de tambours existant. Il en possède les caractéristiques : une taille imposante et une position verticale. Ces ouvrages massifs sont taillés dans un même arbre choisi en fonction de sa dureté puis abattu en suivant un rituel. Un feu est allumé dans une tranchée creusée à la base de l’arbre puis il est taillé là où il est tombé à l’aide d’un os humain aiguisé. Le fût du tambour est travaillé afin d’obtenir une caisse de résonance à parois de différentes épaisseurs. Ce sont ces variations qui sont à l’origine de la hauteur des sons émis quand le tambour est frappé. Il est finalement sculpté et ornementé. C’est dans le son émis par le tambour que réside sa dimension sacrée, celui-ci étant la métaphore de la voix de l’ancêtre. La musique et la danse : une pratique sociale La danse et la musique ont une importance particulière dans la société du Vanuatu. Étroitement liées à divers rites, elles marquent des temps forts de la vie publique et disposent d’un espace dédié, le nasara. Le nasara est une place où se déroule les cérémonies officielles : funérailles et rites de passage de grade (nimangki) pendant lesquelles les danseurs tournoient autour du grand tambour placé au centre. Les cérémonies de grade La société d’une majorité d’îles du Nord et du centre du Vanuatu est structurée par la hiérarchie des grades, système dans lequel un homme peut obtenir une charge en l’achetant. Il existe de nombreux grades et à chacun d’eux correspond obligations, privilèges et titre qui modifie le nom du gradé, mais le prix n’est pas le même. La monnaie d’échange employée est le cochon à dents recourbées, monnaie d’autant plus précieuse que l’élevage de ces cochons nécessite beaucoup de patience et de soins. Le prix d’un grade étant élevé, l’individu souhaitant obtenir une charge doit gagner la confiance de ceux qui élèveront une partie des cochons pour lui. Il doit tisser un réseau de personnes, recourir à des accords, des alliances et établir des relations basées sur le respect et la confiance. L’acquisition d’un grade n’est donc pas simplement l’achat d’un statut mais la reconnaissance politique d’une réussite sociale déjà concrétisée. À propos du Vanuatu La République de Vanuatu, située au nord-est de l’Australie dans l’océan Pacifique, est composée de 80 îles. L’archipel fut longtemps connu sous le nom de Nouvelles-Hébrides qui lui avait été donné par l’explorateur du 18ème siècle, James Cook. Indépendante depuis 1980, elle a pris le nom de Vanuatu qui signifie « notre pays ». Avec une population de 220 000 habitants et 110 langues parlées, l’archipel n’est pas un ensemble culturel unifié. Pistes pédagogiques •Le chant, la musique et la danse : les fondamentaux de la vie publique •Représenter l’humain et le divin •Le rapport aux ancêtres : patrimoine matériel et immatériel Autres œuvres en lien dans le musée •Vitrine du Vanuatu (dents de cochons, statue de grade et masque Luan) Bibliographie - Dossier thématique consultable au centre de documentation. 23 NIV 3 - BEAUX-ARTS La section Beaux-arts présente deux belles sections : la première consacrée aux artistes européens du 16ème au 19ème siècle, et la seconde mettant en valeur les artistes charentais. Les deux premières salles plongent le visiteur dans la « grande peinture », la peinture d’histoire et de mythologie, mais aussi dans l’univers des collectionneurs qui accumulaient les toiles jusqu’à en couvrir sol et plafond; Ainsi se rencotoient des toiles de tous formats et tous sujets : portraits, paysages, natures mortes, scènes de bataille, scènes buccoliques... Les salles que vous rencontrerez par la suite sont dédiées aux peintres charentais du 19ème siècle et du début du 20ème. De sensisbilités très variées, vous découvrirez peintres céramistes et sculpteurs qui ont, pour certains, eu une renommée au-delà des frontières charentaises. Ils sont d’ailleurs «confrontés» aux artistes nationaux et internationaux dans les salles du musée par des oeuvres d’artistes comme Boudin, Rosa Bonheur ou Maurice Denis, que vous pourrez identifier par des murs couleur framboise : liens de maître à élève, traitement de mêmes sujets, inspiration... un lien les unit. 24 NIV 3 - 1 La consternation de la famille de Priam Etienne Barthélémy Garnier (1759-1849), 1800 huile sur toile, 413 x 576 cm L a consternation de la Famille de Priam est une œuvre caractéristique du néo-classicisme (fin du 18ème - début du 19ème siècle) : reprise de canons antiques, œuvre très structurée, scène mythologique... L’artiste Étienne Barthélémy Garnier a reçu le Grand Prix de Rome, prix prestigieux en peinture, en 1788. Il présente cette œuvre au Salon (grand rendezvous artistique) en 1800, œuvre sur laquelle il bâtira sa carrière. Ultime reconnaissance, il intègre l’Académie des Beaux-arts en 1816. L’épisode de la Guerre de Troie Le peintre évoque tout à la fois l’origine de la Guerre de Troie, par la présence de Pâris qui se cache les yeux à gauche du tableau ; la mort d’Hector fils du roi de Troie, traîné par le char d’Hercule en arrière-plan ; la suite de l’histoire, le roi décidant d’aller réclamer le corps de son fils et sa fille, Cassandre, tentant de l’en dissuader sachant qu’il court à sa perte. C’est donc non pas un seul épisode, mais trois qui sont évoqués dans ce tableau. Le style néo-classique (mi 18ème - 1830) Le style néo-classique fait suite aux fastes du style baroque et rococo, jugés frivoles. La moitié du 18ème siècle correspond à la redécouverte de l’antiquité avec les fouilles de Pompéi. Une plus grande sobriété est recher- chée et les canons des statuaires antiques sont reproduits. La composition est savamment orchestrée en jouant avec des lignes de force, des groupes composés en triangle, des diagonales... Le tableau de Garnier l’illustre tout à fait par le groupe de Priam qui compose un triangle, les diagonales qui se croisent avec les femmes de la famille (mère et femme d’Hector), et les bras des soldats qui guident le regard vers l’arrière plan. Le représentant le plus célèbre en peinture est Jacques-Louis David, mais ce mouvement est transversal et concerne tout autant la sculpture et l’architecture. Il aura une influence européenne. Le contexte Cette époque est également celle où la « hiérarchie des genres » s’est largement établie. Codifiée en 1668, elle perdure jusqu’à la fin 19ème siècle. Un genre correspond à un thème établi. Cinq sont distingués et hiérarchisés selon le niveau de difficulté, les représentations humaines étant considérées comme plus complexes à réaliser. Par ordre d’importance : - la peinture d’histoire, la plus prestigieuse et représentant des scènes historiques, bibliques ou mytholo- giques comme c’est le cas de cette œuvre. Il s’agit souvent de commandes royales, d’État ou d’église. - le portrait - les scènes de genre (représentations de la vie quotidienne) - le paysage - la nature morte. Pistes pédagogiques •Histoire de l’art en 4ème : les arts témoins du 18ème et 19ème s.(nombreuses œuvres autour dans cette thématique) •Étudier la composition d’une œuvre (différents plans bien marqués, composition géométrique...) •Mythologie et grands personnages •Le néoclassicisme dans les autres arts (sculpture, architecture) Autres œuvres du musée en lien (scènes mythologiques) •Psyché, Joseph Auguste Peiffer, 1870 •La Douleur d’Orphée, édition de série en bronze, de Raoul Verlet, 19ème siècle •Vénus et Adonis, Paul Bril, ~1600 •Mercure, bronze d’édition d’après Jean de Bologne, fin 19ème siècle Bibliographie - Dossier d’œuvre dédié consultable en salle de documentation - L’Iliade (chant XXII). - Article consultable en ligne sur le site des musées de Poitou-Charentes : http://www.alienor.org/ARTICLES/priam (dernière consultation, été 2014) 25 NIV 3 - 2 Table servie Joris Van Son (1623 – 1667), 1645 huile sur toile, 81 x 112 cm C ette œuvre de Joris Von San illustre un type d’œuvre caractéristique du 17ème siècle en Europe, mais est plus particulièrement la spécialité des Flandres : les « vanités », ces natures mortes porteuses d’une symbolique moralisatrice. L’artiste Joris Van Son a essentiellement vécu à Anvers, et appartient à « l’Ecole flamande », connue pour un grand souci du détail et un certain naturalisme. Spécialiste des natures mortes, il s’est souvent adonné au style des « vanités ». Natures mortes et vanités Les natures mortes, représentant des aliments sur une table dressée, sont apparues très tôt. Le site de Pompéi possède déjà des mosaïques présentant des restes de repas, des coupes de fruits... D’autres termes ont prééxisté à celui de nature morte, représentant bien l’esprit de ce genre : « peinture de fruits », « tableau de banquet » ou encore « nature silencieuse » « Vanité », ou « nature morte moralisée », s’applique aux natures mortes emplies de symboles, qui se développent particulièrement au 17ème siècle dans un contexte bien particulier. Le contexte Le 17ème siècle est le siècle des Lumières. La pensée humaniste et les découvertes scientifiques donnent un sentiment de plus grande liberté à l’être humain, mais lui font aussi prendre conscience de sa place infime au sein de l’univers. Les vanités vont alors refléter ces inquiétudes et cette humilité . Le développement des vanités s’inscrit également dans le contexte des guerres de religion. Les protestants l’utilisent comme revendication d’une peinture plus accessible et moins connotée (par opposition aux grandes commandes catholiques) et y font passer des messages d’humilité, alors que les catholiques vont se l’approprier pour y intégrer des symboles religieux. •Objets luxueux et coquillages : l’avarice humaine, le besoin de possession, aboutissant à des querelles. Les symboles religieux •Coupe de vin, raisin, pain, coupe (tel un calice) : l’eucharistie et la résurrection, préceptes religieux. Les symboles dans le tableau Autres œuvres du musée en lien Le caractère transitoire de la vie •Draperies noires, ambiance nocturne : le deuil, la fin du jour, la fin de la vie. •Aliments périssables (huîtres, cerises) : notre temps limité sur Terre. •Citron pelé : l’écorce se déroule telle la vie sur Terre, durant laquelle un individu est censé se débarrasser du superflu pour arriver à l’essence des choses La vanité des biens terrestres •Coupes remplies de différentes boissons : les plaisirs terrestres que nous consommons en trop grande quantité. Pistes pédagogiques •Observation des différents aliments (cycles 1 et 2) •Guerres de religion •Humanisme •Symboles •Vanités Le marché aux poissons, ou allégorie de l’eau, attribué à Jacopo Bassano, 1578 Enfant jouant aux bulles, d’après Frans Van Mieris •Natures mortes Nature morte au lièvre, Melchior Hondecoeter, ~1660 Assiette de harengs, Léonard Jarraud, ~1871 •Contexte flamand /Réforme Portrait d’un gentilhomme des PayxBas et de sa femme, Bathélémy Van der Helst, ~1655 (tenues austères, différenciation sociale par de simples détails) Bibliographie - La Nature morte ou la place des choses, Jollet, Etienne, éd. Hazan, 2007 26 NIV 3 - 3 Scène d’auberge Anonyme, 18ème Huile sur toile, 35 x 49 cm S aynètes et sujets de la vie quotidienne prennent une place importante dès le 17ème siècle, et notamment dans les pays du Nord. Le sujet Ce tableau représente une foule à l’auberge du village : personnages assis sur des tonneaux et buvant, d’autres assis par terre, jeunes, vieux (avec cannes)... Les pots entourent tout ce monde et montrent la vraisemblable beuverie qui se déroule et que certains s’empressent de rallier. Les chapeaux et leurs formes étranges, les mentons prognathes, montrent une touche caricaturale tel que cela a été pratiqué par Bruegel et ses suiveurs. Ces scènes d’auberge et de beuveries se développent beaucoup dans la peinture du nord. Faut-il y voir une simple scène de la vie quotidienne où sont représentés ceux que l’Europe humaniste ne montre pas -les bruyants, les gens pleins de défauts..., ou bien y a t-il un message plus profond ? Une morale ? C’est effectivement bien souvent le cas, montré de manière plus ou moins explicite. Une « scène de genre » Ces scènes de la vie quotidienne font partie de ce que l’on appelle les « scènes de genre » : saynètes autour d’un feu, petite foule grouillante, scènes de beuverie... le monde paysan est à l’honneur. Cette appellation résulte d’une hiérarchisation des thèmes présents dans les peintures. Au sommet sont les scènes d’histoire, les plus reconnues, puis viennent le portrait, les scènes de genre, et enfin celles où aucun être humain n’est représenté : natures mortes et paysages. Cette hiérarchie est instaurée à la fin du 17ème et va avoir une influence considérable sur le milieu de la peinture jusqu’au 19ème siècle. La peinture du Nord Ce type de scènes se développe dans un contexte socio-politique très particulier dans les Flandres et les pays du Nord. Les guerres de religion et les régimes catholiques très stricts (notamment des Habsbourgs) entraînent de grands mouvements de populations : de nombreux bourgeois et commerçants se tournent vers la Hollande, protestante. Cette nouvelle clientèle raffole de ces saynètes, tandis que les grandes commandes de peinture biblique sont interdites par les protestants. Cela entraîne un développement considérable des scènes de genre dans lesquelles s’illustrent les artistes du Nord. Les nombreux voyages des artistes dans toute l’Europe entraînent sa propagation en Italie, en France, et ces scènes acquièrent progressivement une belle reconnaissance. Bibliographie - Dossier d’oeuvre consultable au centre de documentation. Pistes pédagogiques •Guerres de religion, influence du contexte politique sur la production artistique •Hiérarchie des genres •La représentation du quotidien •Étude des plans dans une peinure Autres œuvres du musée en lien Peintures du Nord •Scène de patinage, anonyme, 18ème siècle. •Portrait d’un gentilhomme des PaysBas et sa de sa femme, B. Van der Helst, 1655 •Vanité, Joris Von San, 1645 Scènes de genre •Scène de patinage, anonyme, 18ème siècle. •Marché aux poissons au bord de la mer (allégorie de l’eau), attribué à Léandro Bassano, 1578 •Le berceau, Armand Vergeaud (charentais), 1908 •Vieillard à la pendule, Léonard Jarraud (charentais), 1874 27 NIV 3 - 4 Les Chaumes Léonard Jarraud (1848-1926) huile sur toile, 28 x 38 cm L éonard Jarraud est peut-être l’artiste charentais le plus complexe et le plus subtil. À travers ses paysages, il cherche à exprimer l’inexprimable, l’universel. L’artiste Léonard Jarraud (1848-1926) est un artiste très solitaire, mélancolique. Il tente les concours de peinture parisiens avec des sujets d’histoire (historiques, bibliques), mais échoue plusieurs années consécutives. Même s’il a une bonne clientèle pour ses portraits et scènes de genre (scènes de la vie quotidienne), ses échecs le rongent. En 1879, il retourne à La Couronne, dont il est originaire, et s’y établit définitivement. Il y réalise une production de nombreuses scènes paysannes, paysages, et portraits, dont un échantillon est présenté dans les salles. Il restera cependant un peintre solitaire, qui, malgré les encouragements et demandes de ses amis ne sera que peu présent physiquement lors d’expositions locales. Mais, même reculé du milieu parisien, il gardera toujours un œil dessus et s’inspira des courants réalistes (scènes de paysans), impressionnistes (marines à Royan, paysages), symbolistes, voire même du japonisme pour certaines œuvres (notamment le portrait de Mme Laroche). Le style très subtil de Jarraud Ce paysage de Jarraud montre toute la subtilité du travail de Jarraud. Il aime les lieux peu fréquentés, presque fantomatiques. Le choix des chaumes n’est pas anodin : la « verte Charente » ne l’intéresse pas, il représente l’identité profonde du lieu. Sa palette se dégrade en tons subtils de jaunes et ocres. On ne saurait dire si la scène se situe au lever du jour ou à la fin d’après-midi. Il affectionne particulièrement ces moments d’entre-deux indéfinissables (entre deux saisons, entre deux moments de la journée...). Le développement du paysage en extérieur Léonard Jarraud a passé de nombreux dimanches à Fontainebleau. C’est dans cette forêt, à quelques kilomètres de Paris que les peintres de plein-air se retrouvaient (notamment à Barbizon, petit hameau jouxtant la forêt) pour poser leurs chevalets. Ce n’est qu’avec les impressionnistes (2ème moitié du 19ème siècle) et la révolution du tube de peinture que la peinture « sur le motif » apparaît réellement : l’œuvre est intégralement réalisée en extérieur. Un nouveau regard se développe sur les couleurs, les formes, pour aboutir à des paysages plus sensibles. Léonard Jarraud, affectionnant la solitude, aimait particulièrement se rendre dans les chaumes charentaises où il pouvait passer des journées entières à contempler ces étendues stériles ornées d’à peine quelques touffes d’herbes. Bibliographie - Un dossier sur Léonard Jarraud est à votre disposition au centre de documentation. - Léonard Jarraud, catalogue d’exposition au Musée d’Angoulême, 1988 Pistes pédagogiques •Le paysage : définition, composition •Ouverture sur l’impressionnisme •Évolution du paysage vers l’abstrait (peinture de Maurice Denis, Sousbois à St Gall) •L’influence de la technique sur la production d’œuvres d’art (la peinture en tube) •Une production qui reflète une identité locale forte •Un artiste au tempérament « maudit » dont la solitude et la mélancolie se reflète dans les œuvres Autres œuvres du musée en lien •Paysages de Barbizon •Autres œuvres de L. Jarraud : scènes de genre et portraits •Portrait sculpté de Léonard Jarraud, par Raymond Guimberteau, 1889 •Marine, Eugène Boudin, 19ème siècle (impressionniste) 28 NIV 3 - 5 Caïn et Abel Raoul Verlet (1857 - 1923), 1900 Étude en plâtre, h.65 cm R aoul Verlet est un sculpteur charentais de renommée nationale dont les œuvres comme le monument Carnot ou les statues de l’église d’Obézine font encore le paysage urbain de la ville d’Angoulême. Cette œuvre est particulièrement intéressante car il s’agit d’une étude, témoin d’une étape de travail. L’artiste Une sculpture représentative l’œuvre dont le traitement mouvementé peut créer une confusion Raoul Verlet est le fils d’un entre- des canons de l’Académie preneur en monuments funéraires et concierge du cimetière communal des Bardines. Il fait ses études à l’école des Beaux-Arts de Paris et reçoit de nombreux prix au cours de sa carrière. C’est avec la Douleur d’Orphée qu’il obtient le prix du Salon (grand rassemblement artistique où peintres et sculpteurs pouvaient acquérir de la renommée) et la Légion d’Honneur, lui permettant d’atteindre une reconnaissance totale de la part des privés comme de la commande officielle publique. Sa production est variée : sculpture ornementale, portrait, tombeaux, grands monuments ; et traite de nombreux sujets. Le sujet Cette œuvre représente un épisode de la Genèse considéré comme le premier meurtre de l’humanité, celui d’Abel par Caïn, tous deux fils d’Adam et Ève. Les deux frères font une offrande à Dieu. Caïn étant laboureur, il offre les fruits de son champ tandis qu’Abel, berger, offre des bêtes de son troupeau symbolisées ici par un agneau. Mais Dieu préfère l’offrande d’Abel. Fou de tristesse, de rage et de jalousie, Caïn tue son frère. Cette œuvre de Verlet est typique de ce que l’on appelle l’art académique, terme employé pour désigner les œuvres respectant les règles enseignées par l’Académie des Beaux-arts, : le respect de l’anatomie, la nécessité d’imiter la nature et les antiques ainsi que la supériorité des sujets historiques, mythologiques ou religieux par rapport aux sujets quotidiens. Ici, le sujet est abordé par la différence de traitement des corps. Le corps de Caïn est viril, fort, dur. Ses muscles, contractés dans l’effort, traduisent encore l’excès de colère qui l’a poussé au meurtre. Il est celui qui effectue l’action. Le corps d’Abel ne se définit que par contraste avec celui de son frère. Juvénile, souple et mou, il exprime la passivité. Étape de travail et technique Cette œuvre est une étude et une maquette, c’est-à-dire une œuvre non finie, une étape de travail qui permet à l’artiste de donner forme à ses intentions avant de les reprendre pour les affiner. Il s’agit également du moulage en plâtre d’une esquisse précédente modelée directement à partir de terre crue. Il est intéressant de prendre en compte cet état dans l’analyse de Bibliographie - Dossier d’œuvre dédié consultable au centre de documentation. avec la sculpture romantique où les expressions et mouvement peuvent être exacerbés. Les boulettes de terres ajoutées par l’artiste, les empruntes de doigts et les traces d’outils étaient donc bien destinées à disparaître, au profit de l’étude précise des corps... Pistes pédagogiques •Techniques et étapes de façonnage d’une sculpture •La représentation du corps : émotions, expressions et messages •L’œuvre d’art et la tradition : ruptures, continuités, coexistence (programme histoire des arts au collège. Pour aborder l’art du 19ème siècle : romantisme, art académique, réalisme...) Autres œuvres en lien dans le musée •La douleur d’Orphée, Raoul Verlet, dernier quart du 19ème siècle •Tombeau de Madame Lazare Weiller, Raoul Verlet, 1900 (œuvre de jeunesse romantique) •Samson et Dalila, François de Troy, 2ème quart du 18ème siècle (scène religieuse peinte où l’expressivité des corps permet d’analyser l’œuvre) 29 NIV 3 - 6 Portrait de Jules Durandeau Armand Vergeaud (1876-1948), 1911 huile sur toile, 55 x 45,5 cm. A u 19ème siècle, un véritable tandem s’instaure en Charente entre les artistes et les industriels locaux. Si les œuvres qui en résultent restent assez traditionnelles, comme ce portrait de Jules Durandeau par Armand Vergeaud, il s’agit cependant d’une source de revenus non négligeable pour les artistes. L’artiste Lors de son passage à l’École des Beaux-arts de Paris, Jean Antoine Armand Vergeaud, (Angoulême 1876 - Tunis 1948), étudie notamment avec Gustave Moreau et François Flameng. Il s’installe à Tunis en 1922 où il ouvre un atelier, devenu ensuite Centre d’Enseignement d’Art de Tunis, puis École des Beaux-arts. Il en occupe la direction de 1930 à sa mort. Le modèle Pierre-Adolphe Durandeau, dit Jules (1854 - 1913), comptable de profession, était l’un des administrateurs de la société Papeterie Léonide Lacroix. Il dirigea l’usine d’Angoulême de 1894 à sa mort. Les locaux de la manufacture devinrent ensuite les papeteries Joseph-Bardou « Le Nil » (1918-1972) avant de laisser place au Musée du Papier dès 1988. Sans héritier, Durandeau a fait de la ville d’Angoulême sa légataire universelle. Sa collection d’œuvres d’art fut ainsi transmise au musée de la ville en 1913. Ce portrait fait donc partie du legs Durandeau. Le contexte Au 19ème, on assiste à la montée en puissance d’une société bourgeoise (révolution industrielle, spéculation...). Ce phénomène s’accompagne d’un souci de représentation de la réussite sociale, de création d’une « histoire de famille ». C’est aussi une période où la photographie prend de plus en plus de place. En 1839, Arago présente le daguerréotype à l’Académie de France et va entraîner un véritable bouleversement des habitudes artistiques. Le portrait Les visages individualisés et identifiables apparaissent assez tardivement, notamment avec le travail de Giotto (14ème siècle). Ce n’est qu’au 15ème siècle que le portrait devient un genre à part entière : il s’agissait pour les modèles de rester dans les mémoires. Le choix de la posture, du décor et des attributs était ainsi méticuleux, afin de transmettre le message adéquat aux spectateurs futurs. Se développent alors les portraits de cour, particulièrement au 17ème. Peu à peu, le portrait se démocratise et on commence à représenter des enfants ou des personnages issus de la bourgeoisie ou du peuple. Les peintres adoptent également une approche plus psychologique, cherchant à représenter le modèle de manière expressive. Au 19ème siècle, le portrait décline et laisse place à la photographie, proche de la réalité et plus rapide tant à réaliser qu’à reproduire. Pistes pédagogiques •Différents types de postures privilégiées : trois quarts, profil, en pieds, en buste, assis... •Le portrait : un genre varié (portrait peint, littéraire, photographique, individuel, de groupe, autoportrait...) •La symbolique du portrait (portrait de cour, portrait politique, portrait de famille...) •Fin 19ème-début 20ème : la rivalité entre peinture et photographie. Autres œuvres en lien dans le musée •Portraits de la famille Laroche, Léonard Jarraud, 1888 •Mademoiselle Valentine, 1886 et les portraits de la famille De Grammont par Raoul Verlet •Portrait de Charles de Sainte-Maure, Ferdinand Père, ~1660 •Autoportrait au chien, Alexandre Desportes, 1871 Bibliographie - Armand Vergeaud, 1876-1949, Béatrice Rolin, 58p, 1997. 30 NIV 3 - 7 La Charente à l’Houmeau Gaston Boucart (1878-1962), 1927 huile sur toile, 220 x 324 cm L a Charente à l’Houmeau est une œuvre tout en délicatesse qui évoque parfaitement la vie autour de la Charente à la fin du 19ème siècle. L’artiste Né à Angoulême, Gaston Boucart fut un artiste très précoce : premières expositions à 15 ans en Province, à 19 ans à Paris et est admis au Salon, grand rendez-vous artistique parisien dès l’âge de 21 ans. Ses plus belles productions sont ses paysages charentais, mais également saintongeais et breton où il aimait se rendre. La vue : un angle clairement identifié L’artiste peint Angoulême depuis le Port l’Houmeau qui, comme toute la ville, profite d’un essor extraordinaire au cours du 19ème siècle grâce au développement industriel (papeteries, imprimerie, poudrerie, fonderie...). La Charente est de plus un moyen de communication privilégié à cette époque : sel, canons, vins, charbons, pierres... Tout se concentre sur ses rives. Boucart nous offre donc d’observer la manutention des tonneaux sur les gabarres, ces bateaux à fond plat qui permettaient de remonter la Charente jusqu’à Angoulême ; les lavandières lavant le linge, et évoque même le chargement des tonneaux par la structure de levage en métal sur la rive. Le bac reliant la rive à l’ile Marquet se laisse deviner... En ville, la cathédrale est reconnaissable en haut à droite à son grand clocher, le château et actuel Hôtel de Ville en plein centre. Pourtant un élément est étranger à Angoulême en 1927, date de réalisation de la toile : le châtelet, visible à la gauche du château n’existait plus, puisqu’il a été détruit en 1885. Cela laisse donc penser que Gaston Boucart s’est largement inspiré d’une carte postale des années 1880 pour réaliser cette œuvre. Une de ces cartes des années 1880 a d’ailleurs été retrouvée, présentant exactement cet angle de vue. Le style Boucart se caractérise par des teintes très pastels, légèrement acidulées dans ses paysages. Il apporte toujours une touche très minutieuse et s’inspire probablement des impressionnistes dans son rendu de l’eau de la Charente. Cependant, il sait également manier des couleurs plus vives dans des œuvres qu’il peint en Bretagne ou à Venise, mais qui ne sont pas exposées au musée. Pistes pédagogiques •Les couleurs pastels •La touche de l’artiste •Histoire d’Angoulême •La révolution industrielle •Une ouverture est possible vers le Musée du Papier : industrie papetière, quartier de l’Houmeau Autres œuvres du musée en lien Vues d’Angoulême •Consécration de l’église Saint Martial, Louis-Edouard May, 1853 •La laitière, Louis-Edouard May, 1880 Les couleurs •Les œuvres d’Henry Daras (teintes pastels inspirées des fresques) •Sous-bois à Saint-Gall, Maurice Denis, 1940 (couleurs bien plus vives et presqu’ abstraites) La touche •La foire à Montbron, José Gaboriaud, 1937 (en opposition à la touche délicate de G.Boucart, Gaboriaud travaille l’empâtement et laisse voir la trace de la brosse) Bibliographie - Un dossier sur Gaston Boucart est à votre disposition au centre de documentation. 31 NIV 3 - 8 Sous-bois à Saint-Gall Maurice Denis (1870-1943), 1940 huile sur toile, 24x31 cm M aurice Denis est le théoricien des nabis, ce mouvement de la fin du 19ème et début du 20ème siècle qui est à la recherche de nouvelles solutions esthétiques. L’artiste Maurice Denis intègre l’Acédémie Julian et l’Ecole des beaux-arts de Paris en 1888. Il y rencontre notamment Pierre Bonnard, Paul Sérusier. Ils fondent ensemble et avec d’autres le groupe des nabis la même année. Il en deviendra le théoricien. Mêlant les arts décoratifs et la peinture plus traditionnelle, il réalisera entre autres des papiers peints, des anneaux décoratifs, des décors de plafond, de vase, des vitraux, … Sur la deuxième de sa vie, les sujets religieux prennent le pas, et il fonde en 1919 Les Ateliers d’Art Sacré avec Georges Desvallières dans le but de renouveler l’art chrétien. Proches du symbolisme, les peintres nabis cherchent de nouveaux cadrages se détachant des représentations traditionnelles. Dès 1890, ils cherchent à supprimer les frontières entre la peinture et les arts décoratifs et nombre d’entre eux s’y essayent, tout comme Maurice Denis. Ils s’inspirent de nombreux éléments : philosophies orientales, arts du Japon, des cernes utilisés par Gauguin pour délimiter les surfaces... Ce mouvement, considéré comme l’un des premiers mouvements modernes en réaction à l’art académique, prend fin en 1900. Le principe de « confrontation » Les panneaux de couleur rose/framboise présentent des œuvres de niveau national ayant un lien avec celles des artistes charentais exposés : même thématique, même période, ou dans le cas présent montrant le lien qui peut exister entre les artistes. Maurice Denis était en effet le maître de José Gaboriaud, exposé à côté. Pistes pédagogiques •Le chemin vers l’abstraction Une œuvre aux frontières de •La couleur Le mouvement est créé en 1888. Le l’abstraction •Le paysage Le mouvement Nabi terme hébreu signifie « prophète », qui traduit l’aspect très intellectuel et spirituel de ce mouvement. Il né suite aux liens avec Paul Gauguin qui pousse ces jeunes artistes à s’affranchir de l’imitation simple de la nature, et à libérer des couleurs pures, à envisager une logique propre à chaque peinture, détachée du réel. Maurice Denis écrit en 1890 sa célèbre phrase : « se rappeler qu’un tableau, avant d’être un cheval de bataille, une femme nue ou quelconque anecdote, est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées ». Cette œuvre, bien que tardive dans la production de Maurice Denis, illustre les grands principes des nabis : le cadrage du sous-bois rend l’œuvre presqu’abstraite, les troncs laissant place à des lignes enchevêtrées dont on ne voit pas la cime. Les couleurs s’affranchissent du réel avec des troncs roses, un sol rose-orangé, des ombres bleues. Les couleurs vives et le cerne très marqué des troncs d’arbre sont également des réminiscences directes des principes mis en place à la fin du 19ème siècle. •Les avant-gardes Autres œuvres du musée en lien •La tonnelle par temps gris, Henri Martin, 1930 (style des mouvements moderne : ici, le néo-pointillisme) •La foire à Montbron 1937, Paysage aux meules, 1934 ou Le déjeuner sur l’herbe, José Gaboriaud (son élève) •La Charente à l’Houmeau, Gaston Boucart, 1927 (teintes pastels opposées à celle de Denis) Bibliographie - Un dossier sur les nabis, et un autre sur Maurice Denis sont à votre disposition au centre de documentation. - Les Nabis, Isabelle Cahn,Olivier Morel, 2006, éd. Courtes et Longues 32 Le Musée d’Angoulême Square Girard II, rue Corneille 16000 Angoulême Conception et réalisation - Service des Publics du Musée d’Angoulême