Open Source Hardware : le matériel libre va changer la donne

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Open Source Hardware : le matériel libre va changer la donne
Cartes électroniques  Application
Open Source Hardware :
le matériel libre va changer
la donne
Après l’arrivée des systèmes d’exploitation enfouis, puis la déferlante du logiciel libre,
dont Linux est l’étendard, l’arrivée imminente de la vague de l’open source « matériel »
pourrait modifier en profondeur le marché de l’électronique et des systèmes embarqués.
Le distributeur de composants électroniques Mouser s’y prépare en stockant
et en proposant une large gamme de systèmes OHSW (Open Source Hardware)…
et en participant activement aux communautés.
G
râce à la standardisation
des systèmes d’exploitation qui permet aux applications de s’exécuter sur
toute plate-forme supportant ces OS,
l’informatique embarquée d’aujourd’hui est sans nul doute plus
facile à aborder pour les développeurs qu’il y a quelques années.
Par ailleurs, le succès écrasant du
logiciel libre ou open source (OSS,
Open Source Software) est indubitable dans le monde de l’embarqué.
Pour un logiciel, être libre ou en
open source signifie que le code
source peut être téléchargé, utilisé et
modifié sans aucune rémunération
pour ses auteurs. En retour, il est
attendu de l’utilisateur qu’il cite l’origine du code source et éventuelle-
AUTEUR
Lynnette Reese,
directrice
marketing
technique,
Mouser
Electronics.
ment apporte à son tour sa contribution, en fournissant du code à la
communauté. C’est ainsi que le système d’exploitation libre Linux, très
répandu dans les systèmes embarqués, a permis à Google de créer des
serveurs bon marché. Dans le même
temps, Java, Perl et Ruby sont devenus la lingua franca pour la création
des applications Web 2.0. Quant au
logiciel serveur Web gratuit Apache,
il réside aujourd’hui au cœur de la
moitié des sites Web dans le monde.
De par son mode d’utilisation, de
diffusion, et d’enrichissement via la
communauté, le logiciel libre a facilité la création de nombreux nœuds
sur Internet, permettant à tous d’être
mieux desservis.
Une troisième pierre commence
aujourd’hui à s’ajouter à cet édifice
ouvert et dynamique : le matériel
libre ou OSHW (Open Source Hardware). Lui aussi a le potentiel de
modifier les règles du jeu sur le marché électronique. Lorsqu’il s’agit de
matériel, le terme open source
désigne un composant ou un dispositif qui peut être examiné, dupliqué
ou modifié par n’importe quel détenteur de licence. Sous une licence
open source, vous pouvez ainsi partager et adapter un travail gratuitement, et si vous choisissez de le
vendre ou de le distribuer, vous pouvez le faire sous la même licence.
La principale différence entre matériel et logiciel open source est que le
logiciel libre est complètement gratuit, à la condition de considérer que
COMPARAISON DES DOMAINES DE L'OSS ET DE L'OSHW
OSS
Nombreux sous-projets liés
les uns aux autres (drivers, API, etc.)
Commercialisation contrôlée
(Android)
OSHW
Les produits sont
libres de redevances
Les contributeurs investissent
de l’argent en composants et en outils
Les contributeurs donnent
de leur temps et de leur travail
Le dépannage demande des outils
coûteux (oscilloscopes, multimètres)
Produits sous licence open source
Grands projets fédérateurs
(Linux, Eclipse, Bugzilla, etc.)
Produits logiciels (système
d’exploitation, environnement
de développement intégré, etc.)
Biens intangibles
Communauté
Partage libre d’IP
Projets menés par des leaders
Utilisent des outils logiciels
Tous bénéficient du travail
d’un grand nombre (*)
Nombreux petits projets indépendants
ayant des objectifs différents
Commercialisation fragmentée
Nécessite du logiciel
pour fonctionner
Biens tangibles
(*) Y compris les non contributeurs.
L’EMBARQUÉ / N°4 / 2013
27
Application  Cartes électroniques
CARACTÉRISTIQUES PRINCIPALES DE QUELQUES PLATES-FORMES OPEN SOURCE
MATÉRIEL
MCU
NOTES
SAM3X d'Atmel à cœur 32 bits ARM Cortex-M3
jusqu’à 84 MHz
Nouveaux sketches USB hôte et audio. Idéal pour des transferts
haut débit. 2 bancs de flash, 54 E/S N, 12 entrées A,
2 sorties A (CNA), USB, jusqu'à 12 PWM.
ATmega32U4 d’Atmel, cœur 8 bits à 16 MHz
Dérivé de l'Arduino Leonardo, avec alimentation USB. Sorties
sonores et lumineuses, capteurs (joystick, curseur, capteur de
température, accéléromètre, microphone et capteur de lumière).
STM32 F4, à cœur ARM Cortex-M4
jusqu’à 168 MHz
Compatible Arduino. Bas coût. Connecteur de carte MicroSD,
USB hôte/périphérique, LED configurable, Wi-Fi, ZigBee, CAN,
9 entrées A, 2 sorties A, 6 PWM, RTC, Ethernet.
Kinetis L de Freescale, à cœur 32 bits ARM
Cortex-M0+ jusqu'à 48 MHz
Interface débogueur libre OpenSDA, USB, LED tricolore,
accéléromètre, curseur tactile capacitif.
PIC32 de Microchip, cœur MIPS M4K à 80 MHz
Logiciel compatible Arduino. Qualifié industrie et automobile.
USB hôte/périphérique/OTG, 2 ports CAN.
BeagleBoard.org BeagleBone Black
Sitara AM3359 de TI à cœur ARM Cortex-A8
jusqu'à 1 GHz
HDMI, 2 Go flash, Ethernet, USB 2.0 hôte et périphérique,
connecteur d'extension 92 broches, Jtag en option.
SolderCore - Carte CPU SC
Stellaris LM3S9 de TI à cœur ARM Cortex-M3
à 80 MHz
Facteur de forme Arduino, USB OTG et connecteur de carte
MicroSD. Configurables par l’utilisateur : 5 LED et 20 GPIO.
PandaBoard.org - PandaBoard ES
OMAP 4460 de TI à MPCore dual core ARM
Cortex-A9 à 2 x 1 GHz, multiprocessing
symétrique (SMP)
Plate-forme de développement de logiciels mobiles. USB, LCD
et connecteurs d'extension caméra. Ethernet, HDMI, DVI, audio,
Bluetooth, 802.11 b/g/n
Arduino - Due
Arduino - Esplora
GHI Electronics Cartes-mères FEZ Cerbuino Bee
Freescale - Freedom
Microchip - ChipKit Uno32
La montée en puissance des solutions matérielles en open source offre d'ores et déjà aux utilisateurs, qui souhaitent propotyper des applications,
une large palette d'architectures et de processeurs, disponible chez les distributeurs comme Mouser.
l’utilisation d’Internet pour transférer
le code source est une opération gratuite. Le matériel libre, lui, implique
un coût pour les composants utilisés.
C’est la propriété intellectuelle relative au matériel qui est réellement
gratuite. Les contributeurs doivent
fabriquer ou acheter une plate-forme
avant de pouvoir contribuer (voir
figure page précédente). Mais, même
ainsi, on constate que de multiples
modifications et extensions sont renvoyées par les contributeurs. Pour les
entreprises commerciales, cette
approche permet de réaliser du prototypage rapide pour aboutir à un
dispositif qui peut être amélioré par
itérations successives, puisque toute
la conception est publique. Les
contributeurs apprécient alors de
créer et de partager en communauté,
car ils renforcent leurs réseaux professionnels, gagnent du respect, et
profitent de l’expérience des autres et
des retours et commentaires sur leurs
contributions. Des milliers de projets
OSHW sont ainsi publiés en ligne
aujourd’hui.
Une communauté de plus
en plus active
Comme pour le logiciel libre, le partage est encouragé par la communauté OSHW. Un exemple de maté-
28 / L’EMBARQUÉ / N°4 / 2013
riel libre désormais célèbre est la
plate-forme Arduino, pour laquelle
la réutilisation commerciale de
conceptions basées sur son architecture se fait sans redevances. Contrairement aux conceptions de référence
gratuites, le matériel libre regroupe
en général une communauté de
développeurs qui apportent une part
de leur temps et de leur expertise
sans attendre d’argent en retour.
C’est l’un des avantages majeurs de
l’open source qui tient au fait que de
nombreuses personnes d’expériences différentes y participent,
générant des concepts plus robustes
et une propriété intellectuelle collective gratuite. L’intégrité, l’intelligence
technologique, l’élégance et l’ingéniosité de la solution sont toutes gratifiantes. Cette manière de concevoir,
plus facile, plus rapide et moins
chère, pourrait à terme modifier fondamentalement le paradigme de
conception et de fabrication du
matériel.
Pour supporter cette communauté,
Mouser Electronics a décidé de stocker et livrer les produits OSHW les
plus récents. La carte Esplora d’Arduino, par exemple, est une carte à
microcontrôleur conçue pour les
personnes qui veulent commencer à
travailler sans délai, sans devoir
acquérir de connaissances en électronique. Esplora diffère des précédentes cartes Arduino en ce qu’elle
fournit un ensemble de capteurs
intégrés dédiés à l’interaction, prêts
à servir. Elle dispose de sorties
sonores et lumineuses et de plusieurs
capteurs, dont un joystick, un curseur, un capteur de température, un
accéléromètre, un microphone et un
capteur de lumière. Ce type de matériel libre permet par exemple de
fabriquer rapidement des produits
industriels qui résolvent des problèmes précis ou de réaliser des
plates-formes éducatives ou encore
de développer pour son plaisir un
système électronique. Reprenant le
travail d’autres contributeurs, les
créateurs prennent ainsi un raccourci
pour traduire leurs idées en produits
bien réels qui fonctionnent. Au-delà,
Mouser propose aussi de nombreuses cartes et kits open source,
incluant des produits compatibles
Arduino. Un exemple est l’UNO32
de Microchip Technology, une plateforme de développement 32 bits
dont l’environnement supporte les
microcontrôleurs PIC32 aussi bien
que la famille Arduino d’origine.
Egalement compatible Arduino, la
carte Freedom de Freescale utilise un
microcontrôleur du fabricant basé
Cartes électroniques  Application
sur un cœur 32 bits d’ARM, et est
également compatible avec un grand
nombre d’outils ARM (voir tableau).
Mouser propose aussi la carte BeagleBone Black développée par le
bais de la communauté BeagleBoard.org, soutenue par Texas Instruments et fabriquée par Circuit Co. La
version BeagleBone Black renverse
les barrières en offrant une plateforme de développement simple
basée sur le puissant processeur
Sitara à cœur Cortex-A8 d’ARM, un
processeur 32 bits qui exécute
Android Jelly Bean, Debian et
Ubuntu. Les adeptes de Linux
peuvent ici facilement ajouter des
fonctions périphériques avec des
cartes enfichables appelées « capes »
(caméra, écran tactile, commande de
moteur, alimentation à batterie et
plus), ce qui assure un développement rapide du produit.
Parmi les autres plates-formes OSHW
importantes, on peut également citer
le Pinguino Micro d’Olimex, équipé
du PIC32, la plate-forme mobile
OMAP liée à la communauté Panda­
Board.org, et les cartes CPU de SolderCore équipées de microcontrôleurs à cœur ARM de Freescale et
Texas Instruments. Freescale propose
aussi de son côté d’autres cartes open
source non Arduino semblables à
l’UNO. La collaboration open source
peut jaillir sous différentes formes et,
en y regardant de près, toutes ces
formes prospèrent car elles accomplissent des objectifs d’ingénierie
communs. La carte de développement LaunchPad de TI s’appuie par
exemple sur la communauté d’Energia, une bifurcation de l’IDE Arduino
dédiée au microcontrôleur MSP430
de Texas Instruments.
Mais un nouveau code ou un nouveau matériel ne servent à rien s’ils
ne fonctionnent pas correctement
avec les modules établis sur le marché. Dans cette optique, il faut souligner que l’OSHW est plus difficile à
partager que l’OSS car il faut disposer
de biens matériels, et donc d’argent,
pour participer. Avec l’OSHW, ça
marche ou ça ne marche pas sur la
plate-forme de base. C’est pour
contourner ce problème et faciliter
son développement, qu’à l’instar de
Linux, Arduino suit ce modèle logiciel en favorisant des modules matériels validés par la communauté,
appelés « shields », qui constituent
une voie rapide pour ajouter des
options comme Ethernet. On le voit
ici, comme le logiciel libre, le matériel libre commence a être gouverné
par des standards technologiques.
Enfin, notion souvent oubliée, on
peut considérer que le matériel libre
est une technologie « verte ». En effet,
par le passé, les appareils ou cartes
électroniques étaient conservés pendant des années et réparés, car la
plupart des manuels d’utilisateurs
comportaient des schémas. Mais de
nos jours, consommation oblige, il
est souvent plus économique d’acheter un nouveau produit que de réparer un ancien qui de ce fait est jeté,
sans qu’il y ait forcément action de
recyclage derrière. Toutefois, l’avè-
nement du matériel libre permet
d’accéder à la schématique et d’obtenir de l’aide en ligne, et, avec les
restrictions qui commencent à affecter les ressources naturelles pour
fabriquer des cartes électroniques
(les métaux rares en particulier), la
réparation pourrait redevenir l’option
la plus économique. Car une telle
démarche n’occasionnera pas de
déchets et n’exigera aucune nouvelle
ressource.
Alors aujourd’hui, quelles que soient
ses raisons – démarrer en trombe une
conception ou évaluer une nouvelle
technologie –, partir à la découverte
de l’OSHW, c’est se diriger vers le
monde du DIY (Do It Yourself). n
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