tribunal de grande instance de paris

Transcription

tribunal de grande instance de paris
I
REPUBLIQIIE :FRANQ ISE
Au nom ;uple
dupe
Francais
EXTRAIT
des minutes' du Greffe
TRIBUNAL
DE GRANDE INSTANCE
DE
PARIS
EXPEDITION EXECUTOIRE
li
N° RG : 03/05891
Me MONEGIER DU SORBIER
vestiaire : J.30
TRIBUNAL
D E GRANDE
INSTANCE
DE PARIS
3 eme chambre
1 ere section
JUGEMENT
rendu le 26 Mai 2004
N°RG :
03/05891
N° MINUTE
DEMANDERESSES
S.A. L'OREAL
14 rue Royale
75008 PARIS
representee par LINKLATERS - Me Denis MONEGIER du SORBIER -avocat
au barreau de PARIS, vestiaire J .30
S .N.C. LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & COMPAGNIE
29 rue du Faubourg Saint Honore
75008 PARIS
representee par LINKLATERS - Me Denis MONEGIER du SORBIER - avocat
au barreau de PARIS, vestiaire J .30
S.N.C. PRESTIGE ET COLLECTIONS INTERNATIONAL exercant sous
le nom commercial GIORGO ARMANI PARFUMS
16 place Vendome
75001 PARIS
representee par LINKLATERS - Me Denis MONEGIER du SORBIER - avocat
au barreau de PARIS, vestiaire J .30
Expeditions
executoires
delivrees le
/11-1 1 6 1
.
-2~b b
S .N.C. PARFUMS CACHAREL
16 place Vendome
75001 PARIS
representee par LINKLATERS - Me Denis MONEGIER du SORBIER - avocat
au barreau de PARIS, vestiaire J .30
S.N.C. PARFUMS RALPH LAUREN
16 place Vendome
75001 PARIS
representee par LINKLATERS - Me Denis MONEGIER du SORBIER - avocat
au barreau de PARIS, vestiaire J .30
3eme Chambre 1ere Section
Jugement du 26 mai 2004
SAS PARFUMS GUY LAROCHE
16 place Vendome
75001 PARIS
representee par LINKLATERS - Me Denis MONEGIER du SORBIER, avocat
au barreau de PARIS, vestiaire J .30
DEFENDERESSES
SOCIETE BELLURE NV
Ter Stratenweg 29 A
2520 OELEGEM,
(BELGIQUE)
representee par- Me Pierre LENOIR - Me Catherine VERNERET - avocats au
barreau des Hauts de Seine - NAN 728 SOCIETE AU FRANC BENEFICE exercant sous les enseignes EURO
BENEFICE et AU FRANC BENEFICE
36-38 avenue de Clichy
75018 PARIS
representee par SKAARUP-GENOT ASSOCIES, avocats au barreau de
PARIS - Me Mickael SKAARUP - vestiaire R245
S .A.R.L . 4CS
51 boulevard Barbes
75018 PARIS
representee par la SKAARUP-GENOT ASSOCIES, avocats au barreau de
PARIS- Me Mickael SKAARUP - vestiaire R245
INTERVENANTES FORCEES
SOCIETE PSD
108 rue du Molinel
59800 - LILLE representee par Me Jean-Claude BOUHENIC avocat au barreau de PARIS vestiaire A 861
SOCIETE MANUFACTURE PARISIENNE DE COSMETIQUE - MPC 45 Avenue Victor Hugo
93300 - AUBERVILLIERS representee par Me Jean-Claude BOUHENIC avocat au barreau de PARIS vestiaire A 861
3 eme Chambre 1 ere Section
Jugement du 26 mai 2004
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Marie-Claude APELLE, Vice-President
Edouard LOOS, Vice-President
Marguerite-Marie MARION . Vice-President
assistes de Annie VENARD-COMBES, Premier Greffier,
DEBATS
A 1'audience du 26 Janvier 2004
tenue publiquement
JUGEMENT
Prononce en audience publique
Contradictoire
en premier ressort
FAITS
La Societe L'OREAL S.A., designee Ste L'OREAL ou
L'OREAL, estimant beneficier d'une renommee internationale se defnit
comme specialiste mondiale de la conception, de la fabrication et de la
commercialisation des produits cosmetiques et de parfums ;
Elle indique qu'etant elle-meme specialisee dans la creation et
la commercialisation de produits cosmetiques et de parfums, elle detient
egalement une participation dans diverses societes, chacune occupant un
segment different du marche des cosmetiques, allant de la grande
distribution au luxe, en privilegiant toujours une image de qualite et de
prestige et que, parmi ces societes, figure la Societe LANCOME
PARFUMS ET BEAUTE & CIE S.N.C ., designee Ste LANCOME
ou LANCOME ;
De meme, elle precise que son expertise est telle que certains
stylistes lui confient leur activite "parfums" et la charge de developper
cette activite sous leur nom ainsi des createurs GIORGIO ARMANI,
Jean CACHAREL, RALPH LAUREN et GUY LAROCHE, et que de ces
diverses collaborations sont pees diverses filiales de la Ste L'OREAL
correspondant chacune a l'un des createurs precites soit, respectivement,
la Societe PRESTIGE ET COLLECTIONS INTERNATIONAL
S.N.C, exercant sous le nom commercial GIORGIO ARMANI
PARFUMS, designe GIORGIO ARMANI, la Societe PARFUMS
CACHAREL S.N.C., designee Ste CACHAREL ou CACHAREL, la
Societe PARFUMS RALPH LAUREN S.N.C., designee Ste RALPH
LAUREN ou RALPH LAUREN et la Societe PARFUMS GUY
LAROCHE S .A.S., designee Ste GUY LAROCHE ou GUY
LAROCHE ;
L'OREAL indique que, comme elle, ces societes ont mis au
point des fragrances nouvelles, commercialisees dans des
conditionnements, flacons et emballages ayant une physionomie
Paop ';
3eme Chambre 1 ere Section
Jugement du 26 mai 2004
permettant de les distinguer des_, produits concurrents, a savoir
"TRESOR", "MIRACLE", "ANAIS ANAIS", "NOA", "ROMANCE
pour femme", "ROMANCE pour hommes", "ACQUA DI GIO pour
homme", "ACQUA DI GIO", "DI GIO", "EMPORIO ARMANI",
"DRAKKAR NOIR
La Ste LANCOME est ainsi titulaire
• de la marque francaise semi-figurative TRESOR LANCOME
n° 1581643, deposee le 22 mars 1990 et renouvelee suivant declaration
du 03 janvier 2000 pour designer ; "Parfums, eaux de toilette, liquide et
cremes cosmetiques " ;
• de la marque francaise semi-figurative TRESOR n ° 1 564 082,
deposee le 07 decembre 1989 et renouvelee suivant declaration du 16
juin 1999 pour designer : "Parfums, eaux de toilette, lotions parfumees,
savons, gels et produits moussants pour le bain et la douche",* de la marque francaise semi-figurative MIRACLE LANCOME
n° 3 0384 943, deposee le 05 juillet 2000 pour designer : "Produits de
parfums, produits cosmetiques et de maquillage ";
L'OREAL est titulaire
* de la marque francaise semi-figurative ANAIS ANAIS n° 1479 938,
deposee le 26 juillet 1988 et renouvelee le 29 juin 1998 pour designer
"Savons, parfumeries, huiles essentielles, cosmetiques ";
• du modele international de flacon n° 035 521, depose le 14 fevrier
1996 designant notamment la France et representant le flacon de parfum
ACQUA DI GIO ;
• du modele francais d'emballage n ° 97 3651, depose le 24 juin 1997
representant l'embaliage du parfum EMPORIO ARMANI;
L'OREAL considere en outre que les fragrances
* TRESOR et MIRACLE divulguees sous le nom de la Ste LANCOME,
* ANAIS ANAIS et NOA, divulguees sous le nom de la Ste PARFUMS
CA CHAREL,
• ROMANCE version homme et version femme, divulguees sous le
nom de la Ste PARFUMS RALPH LAUREN,
• ACQUA DI GIO, GIO,, EMPORIO ARMANI IL et EMPORIO
ARMANI ELLE, divulguees sous le nom de la Ste GIORGIOARMANI
PARFUMS,
* DRAKKAR NOIR, divulguee sous le nom de la Ste PARFUMS GUY
LAROCHE,
constituent des oeuvres de 1' esprit protegeables au titre du droit d' auteur ;
La Societe BELLURE N.V., societe de droit beige dont le
Siege social est situe Ter Stratevweg 29A, 2520 OELEGEM
(BELGIQUE) et designe Ste BELLURE ou BELLURE, indique
qu'elle distribue en Belgique depuis 1987 des produits cosmetiques et de
parfumerie sous la marque CREATION LAMIS et que les produits
qu'elle distribue sont destines a une clientele au pouvoir d'achat
relativement faible et sont vendus le plus souvent dans les magasins de
"discount" ;
***
Courant novembre 2002, L'OREAL et ses filiales ont constate
que la Ste BELLURE fabriquait et distribuait sous sa marque
CREATION LAMIS toute une gamme d'eaux de parfums reproduisant,
selon elles, les caracteristiques des leurs, commercialises notamment a
PARIS par les Societes AU FRANC BENEFICE S .A.R.L., exercant
sous les enseignes EURO BENEFICES et AU FRANC BENEFICE,
designee Ste AU FRANC BENEFICE ou AU FRANC BENEFICE,
et 4CS S .A.R.L., designee 4CS ou Ste 4CS, dont les fournisseurs sont
PnoP d
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la societe P.S.D. S.A.R.L., designee Ste P .S.D. on P.S.D., et la Societe
MANUFACTURE PARISIENNE DE COSMETIQUES S.A.R.L.,
designee Ste M .P.C. ou M.P.C., lesquelles seraient directement
approvisionnees par la Ste BELLURE;
Les parfums en cause sont les suivants : "LA VALEUR",
"PINK WONDER", "NICE FLOWER", "SWEET PEARLS",
"CHEEK TO CHEEK", "ARRIVEDERCI DUE",
"ARRIVEDERCI", "ARRIVEDERCI HOMME", "PURE CLASS"
et "PURE BLACK" ;
La Ste L' OREAL et les societes demanderesses faisaient dresser
18 proces-verbaux de constat d'achat de ces differents produits d'octobre
2002 ajanvier 2003 dans differents magasins de Lourdes (65), Clichy-laGarenne, Courbevoie (92), Paris (XVIIe et XVIIIe), Coignieres (78),
Aubervilliers (93) et Le Kremlin-Bicetre (94) ;
C' est dans ce contexte que L' OREAL et ses filiales ont introduit
la presente procedure ;
PROCEDURE-THESES DES PARTIES
Suite au depot d'une requete le 21 mars 2003, la Societe
L' OREAL S.A., les societes LANCOME PARFUMS ET BEAUTE
& CIE S.N.C., PRESTIGE ET COLLECTIONS INTERNATIONAL
S .N.C, (nom commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS), la
Societe PARFUMS CACHAREL S .N.C., la Societe PARFUMS
RALPH
LAUREN S.N.C., et la Societe PARFUMS GUY
LAROCHE S.A.S., etaient autorisees par ordonnance du President du
Tribunal de Grande Instance de Paris rendue le meme jour, a faire
assigner la societe BELLURE N .V. dont le Siege social est situe Ter
Stratevweg 29A, 2520 OELEGEM (BELGIQUE), la Societe AU
FRANC BENEFICE S .A.R.L., exerrant sous les enseignes EURO
BENEFICES et AU FRANC BENEFICE, et la Societe 4CS S .A.R.L., a
jour fixe en contrefacon de marques, en contrefacon de modeles, en
contrefacon artistique de fragrances de parfums ainsi qu'en concurrence
deloyale et parasitaire ;
Sur la base de cette autorisation, par exploits d'huissier des 26
et 28 mars 2003, les societes demanderesses ont fait assigner les
societes precitees devant le present Tribunal pour 1' audience du 30 avril
suivant ;
L'affaire etait enrolee au Greffe sous le n° 03 05891 ;
A l'audience fixee, l'affaire etait renvoyee devant le Juge de la
Mise en Etat ;
x'k'It
Par exploit d'huissier du 03 juin 2003, la Ste 4CS a fait
assigner la Societe MANUFACTURE PARISIENNE DE
COSMETIQUES S .A.R.L. devant le present Tribunal en intervention
forcee et en appel en garantie ;
L'affaire etait enrolee au Greffe sous le n° 03-08805 ;
Par exploit d'huissier du 03 juin aout 2003, la Societe AU
FRANC BENEFICE a fait assigner la Societe PSD S .A.R.L. devant
le present Tribunal en intervention forcee et en appel en garantie ;
L'affaire etait enrolee au Greffe sous le n° 03-08799 ;
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La Ste L'OREAL et ses filiales se desistant de leur instance a
1'encontre des societes AU FRANC BENEFICE et 4CS, c'est dernieres,
acceptant ce desistement, se desistaient elles-memes de leur instance a
l'encontre, respectivement, de la Ste PSD et de la Ste MANUFACTURE
PARISIENNE DE COSMETIQUES, ainsi que de leurs demandes au titre
de 1'article 700 du N .C .P .C . ;
Dans leurs dernieres ecritures, la Ste L'OREAL, les societes
LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE S.N.C., PRESTIGE
ET COLLECTIONS INTERNATIONAL S .N.C, exercant sous le
nom commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS, la Societe
PARFUMS CACHAREL S.N.C., la Societe PARFUMS RALPH
LAUREN S .N.C. et la Societe PARFUMS GUY LAROCHE S.A.S.,
par application des Livres I, III, V, VII du Code de la Propriete
Intellectuelle (C.P.I.), des articles 1382 et suivants du Code Civil et 10bis
de la Convention d'Union de Paris, demandent au Tribunal de
- les dire recevables et fondees en toutes leurs demandes ;
- leur donner acte de ce qu'elles se desistent de leur instance
a 1'encontre des deux societes 4CS et AU FRANC BENEFICE,
introduite par exploit du 26 mars 2003 ;
- leur donner acte de ce qu'elles acceptent le desistement des
societes 4CS et AU FRANC BENEFICE ;
- dire et juger que les diverses societes conserveront a leur
charge les frais qu'elles auront engages les unes contre les autres ;
- debouter la Ste BELLURE N .V. de 1'ensemble de ses
exceptions, demandes, fins et conclusions ;
- dire que la Ste BELLURE N.V., en fabriquant, important et
commercialisant l'ensemble des eaux de parfums Iitigieuses a commis
des actes de
* contre'facon des marques
- ANAIS ANAIS n° 1 479 93 8,
- TRESOR LANCOME n° 1 581 643,
- TRESOR n° 1 564 082,
- MIRACLE LANCOME n° 3 038 943,
* contrefagon de modeles
- n° 035 521,
- n° 97 3651,
* contrefagon artistique de fragrance des parfums
- TRESOR,
- MIRACLE,
- ANAIS ANAIS,
- NOA,
- ROMANCE,
- ACQUA DI GIO,
- GIO,
- ACQUA DI GIO,
- EMPORIO ARMANI,
- DRAKKAR NOIR;
* concurrence deloyale et parasitaire au prejudice des societes
L'OREAL, LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE, PRESTIGE
ET COLLECTIONS INTERNATIONAL, exercant sous le nom
commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS, PARFUMS CACHAREL,
PARFUMS RALPH LAUREN et PARFUMS GUY LAROCHE ;
En consequence,
- Interdire a la Ste BELLURE NV de fabriquer, distribuer,
importer, commercialiser, utiliser les produits incrimines, sous quelque
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forme, de quelque maniere et a quelque titre que ce soit, directement ou
indirectement, par toute personne morale ou physique interposee, et ce
sous astreinte de 200 000 euros par jour de retard a compter de la
signification du jugement a intervenir ;
- Interdire la commercialisation des produits portant atteinte aux
droits des Stes L'OREAL, LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE,
PRESTIGE ET COLLECTIONS INTERNATIONAL, exercant sous le
nom commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS, PARFUMS
CACHAREL, PARFUMS RALPH LAUREN et PARFUMS GUY
LAROCHE sur tout site Internet et ce, sous astreinte de 200 000 euros
par jour de retard, a compter de la signification du jugement a intervenir ;
- Ordonner la confiscation et la remise aux societes
demanderesses, en vue de leur destruction eventuelle aux frais de la Ste
BELLURE NV de tout document, produit, papier commercial, publicite,
etc. portant reproduction des produits incrimines ou une reference a ceux
ci et se trouvant entre les mains de la Ste BELLURE NV, ou de ses
representants ou de ses preposes, et ce, sous astreinte de 200 000 euros
par jour de retard a compter de la signification du jugement a intervenir ;
- Dire que le Tribunal se reservera la liquidation de 1'astreinte
ordonnee ;
Et pour les prejudices causes,
-pour la contrefacon de marques
* condamner la Ste BELLURE NV a verser a la Ste L'OREAL
la somme de 250 000 euros en reparation des actes de contrefacon de la
marque ANAIS ANAIS n° 1 479 938 ;
* condamner la Ste BELLURE NV a verser a la Ste LANCOME
PARFUMS ET BEAUTE & CIE la somme de 750 000 euros en
reparation des actes de contrefacon des marques MIRACLE n° 3 038
943, et TRESOR LANCOME n° 1 581 643 et TRESOR n° 1 564 082;
- pour la contrefacon de modeles
* condamner la Ste BELLURE NV a verser a la Ste L'OREAL
la somme de 500 000 euros en reparation des actes de contrefacon des
modeles n° 035 521 et n° 97 3651 ;
- pour la contrefacon artistique
* condamner la Ste BELLURE NV a verser aux Stes L'OREAL,
LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE, PRESTIGE ET
COLLECTIONS INTERNATIONAL, exercant sous le nom commercial
GIORGIO ARMANI PARFUMS, PARFUMS CACHAREL, PARFUMS
RALPH LAUREN et PARFUMS GUY LAROCHE une indemnite, a
titre de dommages et interets, a fixer a dire a d'expert pour les faits de
contrefacon artistique commis depuis temps non prescrit, et jusqu'a la
date du depot du rapport ;
* nommer tel expert qu'il plaira au tribunal de designer pour
determiner 1'entier prejudice subi par les societes demanderesses ;
* d'ores et deja condamner la Ste BELLURE NV a payer aux
Stes L'OREAL, LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE,
PRESTIGE ET COLLECTIONS INTERNATIONAL, exercant sous le
nom commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS, PARFUMS
CACHAREL, PARFUMS RALPH LAUREN et PARFUMS GUY
LAROCHE, a titre de dommages et interets provisionnels la somme de
250 000 euros par fragrance, a valoir sur le montant definitif des
dommages et interets, quitte a parfaire ;
- pour la concurrence delopale
condamner la Ste BELLURE NV a verser aux Stes L' OREAL,
LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE, PRESTIGE ET
COLLECTIONS INTERNATIONAL, exercant sous le nom commercial
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GIORGIO ARMANI PARFUMS, PARFUMS CACHAREL, PARFUMS
RALPH LAUREN et PARFUMS GUY LAROCHE, a titre de
dommages et interets, une indemnite a fixer a dire d' expert pour les faits
de concurrence deloyale commis depuis temps non prescrit, et jusqu'a la
date du depot du rapport;
• nommer tel expert qu'il plaira au tribunal de designer pour
determiner l'entier prejudice subi par les societes demanderesses ;
• d'ores et deja condamner la Ste BELLURE NV a payer aux
Stes L'OREAL, LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE,
PRESTIGE ET COLLECTIONS INTERNATIONAL, exercant sous le
nom commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS, PARFUMS
CACHAREL, PARFUMS RALPH LAUREN et PARFUMS GUY
LAROCHE, a titre de dommages et interets provisionnels la somme de
250 000 euros par fragrance, a valoir sur le montant definitif des
dommages et interets, quitte a parfaire;
- pour la concurrence parasitaire
• Condamner la Ste BELLURE NV a verser a
a la Ste LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE la somme
de 860 000 euros,
a la Ste GIORGIO ARMANI la somme de 420 000 euros,
a la Ste PARFUMS CACHAREL la somme de 462000 euros,
• la Ste PARFUMS RALPH LAUREN la somme de 45 000
euros,
a la Ste PARFUMS GUY LAROCHE la somme de 12 500
euros,
a titre de dommages et interets ;
- Ordonner la publication du jugement a intervenir dans dix
revues ou journaux au choix des societes demanderesses et aux frais de
la Ste BELLURE NV, ainsi qu'en premiere page des sites Internet
accessibles par les www.creationlamis .com et www.bellure.be pendant
trois mois, pour un montant global de 100 000 euros et ce, au besoin a
titre de dommages et interets ;
- Ordonner 1' execution provisoire du jugement a intervenir,
nonobstant appel et sans constitution de garantie, en raison des atteintes
portees aux droits et interets des societes demanderesses qui ne sauraient
se perpetuer sans leur causer un grave prejudice ;
- Condamner la Ste BELLURE NV a verser aux societes
demanderesses la somme de 100 000 euros au titre de Particle 700 du
Nouveau Code de Procedure Civile (N.C.P.C.) ;
- Condamner enfin la Ste BELLURE NV en tous les depens de
l'instance, en ce compris les frais de constat d'expertise, dont distraction
au profit de Maitre Denis MONEGIER DU SORBIER, en application de
Particle 699 du N.C .P .C . ;
Dans ses dernieres ecritures, la societe BELLURE N.V.,
visant les articles 122 et 124 du N .C .P .C ., demande au Tribunal de
- Constater que 1'assignation d jour fixe en date du 04 avril 2003
a ete delivree a la Ste BELLURE sans autorisation ;
- En consequence, faire droit a la fin de non recevoir soulevee
par la Ste BELLURE et declarer les demandes des Stes L'OREAL,
LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE, PRESTIGE ET
COLLECTIONS INTERNATIONAL, exercant sous le nom commercial
GIORGIO ARMANI PARFUMS, PARFUMS CACHAREL, PARFUMS
RALPH LAUREN et PARFUMS GUY LAROCHE irrecevables ;
- Condamner les Stes L'OREAL, LANCOME PARFUMS ET
BEAUTE & CIE, PRESTIGE ET COLLECTIONS INTERNATIONAL,
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exercant soul le nom commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS,
PARFUMS CACHAREL, PARFUMS RALPH LAUREN et PARFUMS
GUY LAROCHE a verser a la Ste BELLURE la somme de 30 000 euros
au titre de Particle 700 du N .C .P .C . ainsi qu'aux entiers depens qui
seront directement recouvres par Maitre Pierre LENOIR, avocat au
barreau des Hauts de Seine, conformement aux dispositions de Particle
699 du N.C.P.C. ;
A titre subsidiaire,
Stir la raise hors de cause de la Ste BELL URE
- Constater que les societes demanderesses ne rapportent pas la
preuve de ce que les produits litigieux ont ete acquis aupres de la Ste
BELLURE ;
- En consequence, declarer la Ste BELLURE hors de cause du
present litige et debouter les societes demanderesses de 1'ensemble de
leurs demandes, fins et pretentions en ce qu' elles visent la Ste
BELLURE ;
- Condamner les Stes L'OREAL, LANCOME PARFUMS ET
BEAUTE & CIE, PRESTIGE ET COLLECTIONS INTERNATIONAL,
exercant sous le nom commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS,
PARFUMS CACHAREL, PARFUMS RALPH LAUREN etPARFUMS
GUY LAROCHE a verser a la Ste BELLURE la somme de 30 000 euros
au titre de Particle 700 du N .C .P .C . ainsi qu'aux entiers depens qui
seront directement recouvres par Maitre Pierre LENOIR, avocat au
barreau des Hauts de Seine, conformement aux dispositions de Particle
699 du N.C.P.C. ;
A titre tres subsidiaire,
- Constater que la Ste BELLURE n'a pas commis d'actes de
contrefacon des marques et modeles franrais revendiques par les Stes
L'OREAL et LANCOME et en consequence, declarer la Ste BELLURE
hors de cause du litige en ce qu'il concerne la pretendue contrefacon des
marques et modeles francais revendiques par les societes L'OREAL et
LANCOME;
- Debouter les societes L'OREAL et LANCOME de l'ensemble
de leurs demandes, fins et pretentions formees a 1'encontre de la Ste
BELLURE fondees sur la pretendue contrefacon des marques et modeles
francais qu'elles revendiquent ;
En tout etat de cause,
- Dire et juger que la Ste BELLURE n'a pas contrefait les
marques n° 1 581 643 et n° 1 564 082 ;
- Dire et juger que la Ste BELLURE n'a pas contrefait les
marques n° 03 038 943 et n° 1 479 938 ;
-Dire et juger que la Ste BELLURE n' a pas contrefait le modele
international n° 035 521 appartenant a la Ste L'OREAL ;
- Declarer que le modele d'emballage n° 97 3651 revendique par
la Ste L'OREAL est nul ;
- Enjoindre au Greffe de transmettre le jugement a intervenir a
l'INPI aux fins d'inscription au Registre National des Dessins et
Modeles ;
- Dire et juger qu'il ne saurait y avoir de contrefacon d'un
modele nul ;
- Dire et juger que les fragrances des parfums revendiques par
les societes demanderesses ne sont pas protegeables par le droit d'auteur
et en consequence, debouter les societes demanderesses de leurs
demandes formees a ce titre ;
- En tout etat de cause, dire et juger que les societes
demanderesses ne rapportent pas la preuve de la contrefacon de droits
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d'auteur pretendue et en consequence, les debouter de 1'ensemble de
leurs demandes formees a ce titre ;
En consequence,
- Debouter les societes demanderesses de l'ensemble de leurs
demandes, fins et pretentions formees au titre des actes de contrefacon ;
- Dire et juger que la Ste BELLURE n'a pas commis d'actes de
concurrence deloyale et parasitaire a 1'encontre des societes
demanderesses et en consequence, les debouter de leurs demandes de
dommages et interets formees a ce titre ;
- Subsidiairement, dire et juger que les societes demanderesses
ne rapportent pas la preuve de 1'etendue des prejudices qu'elles
pretendent avoir subis et les debouter de leurs demandes exorbitantes de
dommages et interets ;
En tout etat de cause,
- Rejeter les demandes des Stes L'OREAL, LANCOME
PARFUMS ET BEAUTE & CIE, PRESTIGE ET COLLECTIONS
INTERNATIONAL, exercant sous le nom commercial GIORGIO
ARMANI PARFUMS, PARFUMS CACHAREL, PARFUMS RALPH
LAUREN et PARFUMS GUY LAROCHE visant a obtenir le
remboursement de leurs frais de proces fondees sur Particle 1382 du
Code Civil et Particle 700 du N .C .P .C. ;
- Condamner les Stes L'OREAL, LANCOME PARFUMS ET
BEAUTE & CIE, PRESTIGE ET COLLECTIONS INTERNATIONAL,
exercant sous le nom commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS,
PARFUMS CACHAREL, PARFUMS RALPH LAUREN et PARFUMS
GUY LAROCHE a verser a la Ste BELLURE la somme de 30 000 euros
au titre de Particle 700 du N .C .P .C . ainsi qu'aux entiers depens qui
seront directement recouvres par Maitre Pierre LENOIR, avocat au
barreau des Hauts de Seine, conformement aux dispositions de Particle
699 du N.C.P.C . ;
X**
La cloture de la procedure n° 03-05891 etait prononcee le 12
janvier 2004 ;
Les trois procedures etant regroupees, 1'affaire etait plaidee a
l'audience du 26 janvier 2004 et mise en delibere .
MOTIFS
10 En ce qui concerne la procedure
- s'agissant de la cloture de la procedure
Attendu qu'il y a lieu, au regard de la situation au jour
de 1'audience, de prononcer la cloture, d'une part, de la procedure n°
03-08805 opposant la Ste 4CS a la Societe MANUFACTURE
PARISIENNE DE COSMETIQUES S .AR.L. appelee en intervention
forcee et en garantie, d'autre part, de la procedure n° 03-08799 opposant
la Societe AU FRANC BENEFICE a la Societe PSD S .A.R.L., appelee
en intervention forcee et en garantie ;
- s'agissant de la jonction des diverses procedures
Attendu qu'il apparait d'une bonne administration de la Justice
de prononcer la jonction de la procedure n° 03-08805 opposant la Ste
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3 eme Chambre 1 ere Section
Jugement du 26 mai 2004
4C S d la Societe MANUFACTURE PARIS IENNE DE COSMETIQUES
S .A.R.L. appelee en intervention forcee et en garantie, ainsi que de la
procedure n° 03-08799 opposant la Societe AU FRANC BENEFICE a
la Societe PSD S .A.R.L ., egalement appelee en intervention forcee et en
garantie avec la presente procedure, instance principale opposant la Ste
L'OREAL et ses filiales a la Ste BELLURE, enregistree au Greffe soul
le n° 03-05891,HO En ce qui concerne la recevabilite de la demande
Attendu que la Ste BELLURE fait valoir, en versant une
decision du Tribunal de Grande Instance de Lyon en date du 30
novembre 1994, que 1'assignation d jour fixe en date du 4 avril 2003 lui
a ete delivree sans autorisation, qu'il s'agit d'une fin de non-recevoir en
consequence de laquelle la demande de la Ste L'OREAL et de ses filiales
doit etre declaree irrecevable ;
Attendu que la Ste L 'OREAL et ses filiales font valoir que peu
importe que 1'assignation n'ait ete remise a la Ste BELLURE que le 4
avril 2003 des lors qu'elle lui a bien ete delivree au sens des dispositions
legales et de la jurisprudence, c'est-a-dire signifiee le 26 mars 2003, soit
avant le 31 mars 2003, la decision citee contredisant la these de la Ste
BELLURE de facon cinglante ;
Attendu, a titre preliminaire, qu'il y a lieu de remarquer le
laconisme avec lequel la Ste BELLURE expose sa fin de non recevoir
laquelle figure uniquement dans le dispositif de ses dernieres conclusions
sans faire I'objet d'un developpement quelconque dans le corps de
celles-ci ;
Attendu qu'aux termes de larticle 122 du Nouveau Code de
Procedure Civile (N .C.P.C.) : "Constitue une fin de non-recevoir tout
moyen qui tend a faire declarer 1'adversaire irrecevable en sa demande,
sans examen au fond, pour defaut de droit d'agir, tel le defaut de qualite,
le defaut d'interet, la prescription, le delai prefix, la chose jugee ." ;
Attendu que la decision du Tribunal de Lyon citee par les parties
vise l'hypothese ou l'assignation n'a pas ete delivree dans les delais
impartis par 1'ordonnance autorisant la procedure a jour fixe;
Attendu par ailleurs qu'aux termes de Particle 688-9 du
N.C .P .C . auquel renvoient les dispositions de Particle 9 du Reglement
(CE) n° 1348/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif a la signification
et a la notification dans les Etats membres des actes judiciaires et
extrajudiciaires en matiere civile et commerciale, la date de la
signification est celle de la date d'expedition (ou delivrance) de l'acte et
non celle de sa remise effective, comme la Cour de Cassation a d'ailleurs
eu l'occasion de le rappeler ;
Attendu qu'en I'espece, it resulte de 1'exploit introductif
d'instance que celui-ci a ete delivre par I'huissier de Justice
instrumentaire le 26 mars 2003 donc avant la date limite du 31 mars
2003 fixe dans I'ordonnance autorisant ladite procedure a jour fixe;
Attendu en consequence, que la Ste BELLURE doit etre
deboutee de sa fin de non-recevoir ;
III° En ce qui concerne la mise hors de cause de la Ste
BELLURE N.V.
Attendu que la Ste BELL URE N . V. fait valoir
-que les societes demanderesses ne rapportent pas la preuve de
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Jugement du 26 mai 2004
ce que les produits litigieux ont ete effectivement achetes aupres de la
Ste BELLURE, qu'en effet
• les demanderesses versent aux debats 18 proces-verbaux de constat
d'achat des produits litigieux effectues dans differents magasins
notamment les boutiques parisiennes AU FRANC BENEFICE et 4CS,
sans verser aucune facture ou autre element de preuve de nature a etablir
que ces produits auraient ete acquis aupres de la societe beige
BELLURE, la Ste AU FRANC BENEFICE indiquant au contraire,
n'avoir jamais acquis ceux-ci aupres d'elle ;
• que, s'agissant des extraits des sites Internet
http://www.creationlamis .com et http ://www.bellure .be, it convient de
preciser que le premier site appartient a une societe neerlandaise qui n'a
aucun lien avec la Ste BELLURE, laquelle a demande la fermeture de ce
site, et que le second comporte une simple presentation de la societe et
de ses produits sans permettre d'achat en ligne, enfin qu'un nouveau site
Internet denomme http ://www .sentezirsfrance com
m n' a aucun lien avec la
Ste BELLURE et appartient a une societe espagnole denommee
SENTEUR DE FRANCE sise a Barcelone en Espagne, ne permettant pas
l' achat en ligne ;
• qu'il resulte des conditions generales de vente imprimees au dos des
factures BELLURE que : "Les marchandises sont toujours acceptees au
depart des magasins du vendeur-fournisseur . Elles sont expediees aux
risques et perils de l'acheteur et les frais de transport sont, sauf
derogation ecrite, a charge de I' acheteur .", ce qui correspond a une vente
"EX WORKS" selon les definitions Incotermes 2000 dont 11 resulte que
s'il etait demontre que la Ste BELLURE a vendu les produits litigieux
aux societes AU FRANC BENEFICE et 4CS, elle n'est pas 1'importateur
de ces produits en France ;
- que les arguments opposes en reponse a ce qui precede, ne
demontrent pas plus que les parfums litigieux auraient ete effectivement
achetes aupres de la Ste BELLURE ni que celle-ci serait a l'origine de
('introduction et de la vente en France des parfums en cause et qu'a ce
propos
• le fait que les parfums litigieux portent la marque CREATION LAMIS
est sans incidence, la Ste BELLURE ne pouvant, en raison du principe
de la liberte du commerce et de la libre circulation des marchandises dans
la Communaute Europeenne, s'opposer a ce que ses produits soient
plusieurs foil revendus avant d'etre commercialises aupres du
consommateur final ;
• l'utilisation de la langue francaise sur les produits litigieux, alors que
la Ste BELLURE est une societe beige operant sur un marche bilingue,
ne constitue pas la preuve de ce que les produits litigieux seraient
destines au marche francais ;
Attendu que la Ste L 'OREAL et ses filiales font valoir
- qu'il est incontestable que tous les produits litigieux portent la
denomination CREATION LAMIS qui, d'une part, a ete deposee a titre
de marque par la Ste BELLURE N .V. et, d'autre part, constitue son nom
commercial ;
- que cette denomination CREATION LAMIS ne peut donc identifier
que la seule Ste BELLURE N . V.;
- qu'il est etabli par de nombreuses factures emanant de la Ste
BELLURE elle-meme, saisies lors d'une saisie-contrefacon realisee pour
les besoins d'une autre procedure, qu'elle fournit les produits litigieux,
notamment a la Ste P.S .D. de Lille (59) comme cela resulte du procesverbal de constat du 15 novembre 2002, qu'elle ne peut donc pas nier
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qu'elle est a l'origine de l'importation des produits en cause sur le
territoire francais en toute connaissance de cause ;
- que les conditions generales de vente de la Ste BELLURE sont
inopposables aux societes demanderesses des lors qu'elles concernent
des rapports contractuels avec ses clients ;
- que les factures et le catalogue saisis dans lesquels les produits
commercialises par la Ste BELLURE portent tous la mention "dist . By",
ce qui signifie "distribue par", CREATION LAMES accompagnee
d'indications en diverses langues dont le francais, de sorte que la Ste
BELLURE ne peut pier qu'elle sait que ses produits sont destines, entre
autre, au marche francais ;
- que la rigueur juridique, dont elle cherche a faire preuve, aurait ete pour
la Ste BELLURE, d'etablir qu'elle ignore que ses produits sont a
destination du marche francais et non pas de savoir si c'est elle qui a
vendu directement les produits litigieux AU FRANC BENEFICE ou
4CS, distributeurs a Paris, la decision par ailleurs citee de la Cour
d'Appel de Paris (3 decembre 1997) etant sans interet, les marchandises
ayant une origine licite ce qui n'est pas le cas en l'occurrence, ce que la
Ste BELLURE occulte ;
7f ~"1f
Attendu, a titre preliminaire, que c'est avec raison que les
societes demanderesses font remarquer que la Ste BELLURE doit
s'attacher a demontrer qu'elle ignore que ses produits sont a destination
du marche francais et non pas qu'elle n'a pas vendu directement les dits
produits aux societes appelees en intervention forcee et en garantie pour
justifier sa demande de mise hors de cause ;
Attendu, au fond, qu'il est etabli par les pieces versees au
dossier que la denomination CREATION LAMIS a bien ete deposee a
titre de marque par la Ste BELLURE et constitue par ailleurs son nom
commercial ; que, des lors, cette denomination ne peut pas ne pas
l'identifier, etant observe que ladite denomination a ete relevee sur tous
les produits litigieux objets de constat d'achat par huissier de Justice ;
Attendu par ailleurs, que si les conditions de ventes telles que
rappelees par la societe BELLURE figurent bien sur ses contrats, elles
demeurent cependant inopposables aux tiers aux contrats que sont les
societes demanderesses ;
Attendu en outre, que si certains sites Internet semblent
effectivement etre strangers a la Ste BELLURE, cette derniere reconnait
etre titulaire du site http://www .bellure .be ; que le site
htt ::/www.creationlamis.com, s'il etait avers qu'il appartient a une
societe neerlandaise, reprend neanmoins opportunement sa marque
qu'elle semble servir utilement ; qu'en tout etat de cause, meme si des
achats en ligne ne semblent pas possibles sur ces sites, ces derniers
offrent tres largement les produits de la Ste BELLURE, denonces comme
contrefaisants par la Ste L'OREAL et ses filiales, d'une part, d'autre
part, sont consultables en France et en langue francaise, permettant ainsi
a une clientele potentielle de se familiariser avec lesdits produits
distribues en France ;
Attendu, surtout, qu'il resulte des P .V. de saisie-contrefacon
diligentees dans le cadre d'une autre procedure opposant les parties,
notamment les 12,18 et 21 juin 2003 ainsi que des factures recueillies a
cette occasion, que la Ste BELLURE fournit directement la Ste P .S.D .
sise a Lille (59), laquelle, en sa qualite de grossiste, distribue les produits
en cause en France, notamment aux societes AU FRANC BENEFICE et
4CS, etant observe qu'aucune ambiguit6 West possible a la lecture des
factures a en-tete de la Ste BELLURE qui y a appose en outre son
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tampon, lesdites factures etant explicitement etablies au nom de la Ste
S .P .D ., 22, rue de Bapaume a Lille; qu'ainsi, a 1'occasion de ses
operations de saisie-contrefacon du 3 1 juillet 2003, l'huissier
instrumentaire signalait que les emballages portaient, selon, la ou les
mentions : "CR LAMIS ( . . .) - 2980 BELGIUM", "Dist . By Creation
LAMIS (. . .) 2980 BELGIUM;
Attendu en consequence, que la Ste BELLURE doit &re
deboutee de sa demande de mise hors de cause ;
IV° En ce qui concerne les divers desistements
Attendu que la Ste L'OREAL et ses filiales se desistent de leur
instance a I'encontre des societes AU FRANC BENEFICE et 4CS ;
Attendu que ces dernieres, acceptant cc desistement, se desistent
elles-memes de leur instance a l'encontre, respectivement, de la Ste PSD
et de la Ste MANUFACTURE PARISIENNE DE COSMETIQUES,
ainsi que de leurs demandes au titre de Particle 700 du N .C .P.C. ;
Attendu qu'a leur tour, les societes PSD et MPC acceptent ces
desistements ;
Attendu que, conformement aux dispositions des articles 394 et
suivants du N .C.P .C ., it y a lieu de constater ces desistements et de les
declarer parfaits, chacune des parties conservant la charge de ses propres
depens;
V° En ce qui concerne les actes de contrefacon et de
concurrence deloyale et parasitaire
Attendu qu'au regard de la diversite des griefs allegues, ii y a
lieu d'examiner successivement les faits de contrefacon de marques, puis
de modeles, enfin des fragrances avant d'aborder la discussion relative
aux faits de concurrence deloyale et parasitaire ;
1° s'agissant des contrefacons de marques
a) de la marque francaise semi-figurative TRESOR
LANCOME n° 1 581 643 par le flacon "LA VALEUR"
Attendu que la Ste L 'OREAL et les societes demanderesses,
- rappelant
* que la fonction premiere d'une marque est de distinguer les produits
qu'elle designe afin d'en identifier et d'en garantir l'origine par rapport
a ceux de ses concurrents, permettant a son titulaire " de s'attacher la
clientele par la qualite de ses produits ou de ses services et d'offrir la
garantie que toes les produits qui en sont revetus ont ete fabriques sous
le controle d'une entreprise unique a laquelle peut etre attribuee la
responsabilite de leur qua/W", que, comme le consacre Particle 713-1
du C.P .I., le titulaire de la marque doit etre seul a pouvoir 1'utiliser, a en
disposer ou a determiner 1'emploi qui peut en etre fait et qu'ainsi, toute
utilisation, a quelque titre que cc soit et sous quelque forme que cc soit,
d'une marque regulierement deposee, sans I'autorisation de son titulaire,
constitue une contrefacon engageant la responsabilite civile de son
auteur, en application de Particle L 716-1 du C .P.I . ;
* que selon les dispositions de Particle L 713-3 du C .P .I., "le risque de
confusion dans /'esprit du public" s'apprecie par rapport a 1'acheteur
d'attention moyenne n'ayant pas simultanement soul les yeux les signes
en presence, en fonction des ressemblances et non des differences et en
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prenant les signes dans leur ensemble, ]'imitation n'etant jamais qu'une
contrefacon qui cherche a se deguiser, selon la formule de M.
MATHELY ;
• qu'il resulte en outre de la directive du Conseil du 21 decembre 1988
et de la jurisprudence tant de la Cour de Justice des Communautes
Europeennes que des juridictions francaises, que le risque de confusion
doit etre apprecie au regard de la connaissance de la marque sur le
marche, de ]'association qui peut en etre faite avec le signe utilise, du
degre de similitude entre la marque et le signe et entre les produits et
services designes ;
• qu'au surplus, la notoriete d'une marque doit etre prise en
consideration pour apprecier le risque de confusion qui est d'autant plus
eleve que le caractere distinctif de la marque anterieure, soit
intrinsequement, soit en raison de sa connaissance sur le marche, s'avere
important ;
- repondant aux conclusions adverses
• q u'il n'est pas reproche a la Ste BELLURE d'avoir contrefait par
reproduction mais par imitation et qu'ainsi les petites differences que
celle-ci egrene avec parcimonie ont ete apportees par elle pour ne pas
commettre le delit de contrefaron par reproduction et se reserver, ainsi,
la possibilite de jouer sur la notion de risque de confusion, la demarche
signant par elle-meme la volonte de contrefaire ;
- s'agissant du flacon incrimine, qu'il s'agit d'une imitation de
la marque flacon "TRESOR", la comparaison des signes en presence
permettant de se convaincre de ]'existence d'un risque de confusion
• forme triangulaire avec relief,
• flacon transparent,
• bouchon hexagonal et transparent taille en facette;
A ttendu que la Ste BELL URE fait valoir
- qu'il est de principe et de jurisprudence constante que la
contrefacon d'une marque ou ]'existence d'un risque de confusion au
sens de ]'article L 713-3 du C .P .I. s'apprecie en fonction des
ressemblances d'ensemble au detriment des differences de detail,- qu'en 1'espece, les elements distinctifs de la marque en cause
ne sont pas reproduits par le flacon "LA VALEUR", en effet
• celui-ci presente des faces strictement lisses agrementees sur les faces
arrieres et non sur les cotes d'une sorte d'empiecement en forme
triangulaire comportant quelques stries dont la presence ne saurait suffire
a pretendre que ce motif reprend le motif global caracteristique de la
marque en cause ;
• le flacon "VALEUR" est surmonte d'une bague doree et non noire et
d'un bouchon hexagonal comportant des facettes mais ne reproduisant
aucunement les formes du bouchon caracteristique de la marque
litigieuse ;
Attendu qu'aux termes de ]'article L 713-1 du C .P.I.
"L'enregistrement de la marque confere a son titulaire un droit de
propriete sur cette marque pour les produits et services qu'il a designes ;";
que ]'article L 713-3 suivant precise que : "Sont interdits, sauf
autorisation du proprietaire, s'il peut en resulter un risque de confusion
dans ]'esprit du public : a) (. . .); b) L'imitation d'une marque et ]'usage
d'une marque imitee, pour des produits ou services identiques ou
similaires a ceux designes dans 1'enregistrement." ; qu'enfin, ]'article L
716-1 du meme Code precise que : "L'atteinte portee au droit du
proprietaire de la marque constitue une contrefacon engageant la
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responsabilite civile de son auteur . Constitue une atteinte aux droits de
la marque la violation des interdictions prevues aux articles L 713-2,
L 713 -3 et L 713 -4 ." ;
Attendu qu'en 1'espece, les societes demanderesses se fondent
bien sur 1'imitation et non sur la reproduction de leurs marques
respectives et qu'il y a donc lieu de rechercher s'il existe ou non un
risque de confusion dans 1'esprit du public, que ce risque doit
effectivement s'apprecier par rapport a un acheteur d'attention moyenne,
n'ayant pas simultanement sous les yeux les signes en presence, en
fonction des ressemblances et non des differences, les signes etant pris
dans leur ensemble, au regard de la connaissance de la marque sur le
marche, de l'association qui peut en etre faite avec le signe utilise et du
degre de similitude entre la marque et le signe ;
Attendu qu'en 1'espece, la contrefacon alleguee ne peut etre
retenue ;
Attendu en effet que les flacons en cause presentent une forme
triangulaire mais notablement differente l'une de l'autre : TRESOR etant
triangulaire quelque soit Tangle de vue au point de presenter la forme
d'un losange vu du bouchon du flacon, LA VALEUR ayant une forme
de parallelepipede evase sur le haut comportant une sorte d'empiecement
effectivement triangulaire sur les seules faces avant et arriere ; que par
ailleurs, les stries sont horizontales sur toutes les faces du flacon de
TRESOR mais uniquement sur 1'empiecement frontal et arriere de LA
VALEUR;
Attendu que s'il est exact que les deux flacons sont en verre
transparent, cette caracteristique n'est pas revendiquee dans le depot de
la marque TRESOR,
Attendu enfin que les bouchons respectifs ne presentent pas les
memes caracteristiques, carre pose a plat sur une bague noire galbee
sensiblement de la meme epaisseur que celui-ci pour TRESOR, en forme
d'un triangle stylise vertical pose sur une bague relativement fine, non
galbee et couleur or pour LA VALEUR etant precise que les bouchons
sont tailles de maniere totalement differente (sur la tranche dans
TRESOR, en faces avant/arriere par stries suivant la forme triangulaire
pour LA VALEUR) ;
Attendu qu'il apparai't donc que le seul element de ressemblance
est la forme triangulaire du flacon, ce qui n'est pas suffisant pour
caracteriser la contrefacon ;
b) de la marque frangaise semi-figurative TRESOR n° 1 564
082 concernant l'etui (Ste LANCOME) par 1'etui "LA VALEUR"
Attendu que la Ste L'OREAL et les societes demanderesses,
s'appuyant sur les mimes remarques preliminaires precedemment
developpees it P occasion de la discussion sur la marque semi-figurative
TRESOR LANCOME n ° 1581 643, font valoir
- que la comparaison des signes en presence permet de se
convaincre de l'existence d'.un risque de confusion
• forme rectangulaire de l'etui,
• couleur fond marbre rose, mauve et jaune d'un cote, nacre et mauve de
l' autre,
• motifs carres noirs encadres par un filet or et rose d'un cote, rectangle
noir, encadre par un filet or et representation d'un coffre rempli de
bijoux, de 1'autre;
typographie du nom en lettres or soulignees daps les deux cas ;
- que la Ste BELLURE commet donc des actes de contrefacon
par imitation au sens de 1'article L 713-3 b) du C.P.I . ;
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A ttendu que la Ste BELL UREfait valoir
- que les principes precedemment rappeles doivent s'appliquer
pour I' appreciation de la pretendue contrefaron et
• qu'il est particulierement contestable que la demanderesse revendique
un monopole d'exploitation sur un emballage de parfum en forme
rectangulaire, forme particulierement banale en ce domaine ;
• que, s'agissant d'un risque de confusion, 1'emballage "LA VALEUR"
ne presente pas de fond marbre et, surtout, comporte en son centre la
representation d'un coffret a bijoux dore ouvert contenant de nombreux
bijoux en or et en pierres, representation ne figurant bien evidemment
pas sur l'emballage du parfum "TRESOR" ;
7C*X
Attendu que les considerations generales faites a ]'occasion de
la discussion relative a la marque semi-figurative TRESOR concernant
le flacon du parfum en cause doivent egalement etre reprises ici ;
Attendu que la contrefaron doit cependant etre retenue au regard
des elements qui suivent ;
Attendu en effet que la couleur de fond de 1'etui, quoique
presentant des traces mauves chez TRESOR, donne une impression
d'ensemble comparable dans les deux etuis, LA VALEUR combinant
egalement ]'aspect marbre des roses/jaune/mauve en divers tons a peine
plus legerement prononce que TRESOR ;
Attendu par ailleurs, que si la typographie du nom est
effectivement differente, l'agencement du nom du parfum est semblable,
ecrit en rose pour TRESOR, en ton or pour LA VALEUR, dans un carre
noir encadre par un filet or dans un cas comme dans 1'autre ; que cet
aspect particulier du carre noir sur un meme fond de couleurs fait surgir
immediatement une impression de similitude caracterisant une imitation
source de confusion evidente pour un client d'attention moyenne n'ayant
pas les deux produits simultanement sous les yeux ;
c) de la marque francaise semi-figurative MIRACLE
LANCOME n° 3 038 943 concernant le flacon (Ste LANCOME) par
le flacon "PINK WONDER"
Attendu que la Ste L 'OREAL et les societes demanderesses
s'appuyant sur les memes remarques preliminaires precedemment
developpees a P occasion de la discussion sur la marque semi figurative
TRESOR LANCOME n° 1581 643, font valoir
- que le flacon incrimine constitue une imitation de la marque
en cause, ayant en commun avec celle-ci
• une forme rectangulaire,
• le flacon dont l'epaisseur du verre donne l'illusion qu'un second flacon
est insere a I'interieur du premier,
• un bouchon conique avec une bague ;
Attendu que la Ste BELL UREfait valoir
- les memes observations concernant la revendication d'un
monopole d'exploitation de la forme rectangulaire, qu'il s'agisse d'un
emballage ou d'un flacon ;
- 1'epaisseur du verre du flacon qui donnerait l'illusion qu'un
second flacon est insere a l'interieur du premier peut effectivement se
deduire du depot de la marque revendiquee mais ne se retrouve
absolument pas dans la forme du flacon "PINK WONDER" ou ce
dedoublement n'apparait qu'a la base du flacon, ce qui est
particulierement banal et s'explique par des raisons techniques ;
- la parfaite banalite de la forme du bouchon du flacon
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"MIRACLE" qui ne peut donc etre protege a titre de marque ;
***
Attendu que les considerations generales faites a 1'occasion de la
discussion relative a la marque semi-figurative TRESOR concernant le
flacon du parfum en cause doivent egalement etre reprises ici ;
Attendu qu'en 1'espece, la contrefacon alleguee ne peut etre
retenue ;
Attendu que si l'epaisseur du verre du flacon MIRACLE donne
effectivement 1'illusion qu'un second flacon est insere a 1'interieur du
premier, cette caracteristique ne se retrouve pas dans le flacon PINK
WONDER qui ne presente ce dedoublement qu'a sa base, reprenant en
cela une presentation courante des flacons en general, presentation liee
aux necessites techniques du materiau, etant observe que, de ce fait, le
flacon PINK WONDER ne presente pas la meme elegance de ligne que
le flacon MIRACLE ;
Attendu que les bouchons en cause, dont seule la forme
legerement conique et non le materiau est revendiquee au depot du
flacon MIRACLE, ne presentent pas la meme silhouette de bague .
d) de la marque francaise semi-figurative ANAIS ANAIS n'
1 479 938 concernant 1'etui (Ste L'OREAL) par 1'etui du parfum
"NICE FLOWERS"
Attendu que la Ste L'OREAL et les societes demanderesses
s'appuyant sur les memes remarques preliminaires precedemment
developpees a V occasion de la discussion sur la marque semi-figurative
TRESOR LANCOME n '1581643, font valoir
que 1'imitation de la marque resulte de la comparaison des
signes en presence lesquels permettent de se convaincre du risque de
confusion
* flacon blanc d'une part, blanc et bleu tres pale d'autre part,
* fleurs et feuilles pastel, degrade, d'un cote, de rose saumon et vert
doux, de dautre de rose saumon et vert ;
Attendu que la Ste BELL URE fait valoir
- que 1'emballage de "NICE FLOWERS" ne presente pas de fond
blanc et que les motifs floraux qui y sont representes sont tres differents
du motif floral revendique et depose ;
- qu'en effet l'emballage du parfum "ANAIS ANAIS" est
caracterise par un motif floral representant une seule fleur rose avec des
etamines vertes et aucun feuillage a 1'inverse du motif floral de
l'emballage "NICE FLOWERS" caracterise par un bouquet compose de
plusieurs fleurs de differentes couleurs ;
***
Attendu que les considerations generales faites a l' occasion de la
discussion relative a la marque semi-figurative TRESOR concernant le
flacon du parfum en cause doivent egalement etre reprises ici ;
Attendu qu'il ressort de l'examen du Proces-Verbal de depot que
la marque ANAIS ANAIS est deposee en noir et blanc et qu'aucune
couleur n'est revendiquee ;
Attendu que la comparaison des produits en cause ne pouvant se
faire que par rapport au depot qui n'a d'ailleurs recu aucune modification
lors du renouvellement, it est donc impossible de retenir, en l'etat, une
contrefacon quelconque ;
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n
3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
2° s'agissant des contrefacons de modeles
a) du modele francais d'emballage n ° 97 3651 par l'emballage
"PURE CLASS
Attendu que la Ste BELLURE fait valoir
- qu'aux termes de Particle L 511-4 du C .P.I. : "Un dessin ou
modele a un caractere propre lorsque l'impression visuelle d'ensemble
qu'il suscite chez 1'observateur averti differe de celle produite par tout
dessin ou modele divulgue avant la date du depot de la demande
d'enregistrement ou avant la date de priorite revendiquee .";
- que la boite d'emballage deposee a titre de modele par la Ste
L'OREAL est d'une parfaite banalite et est connue pour etre largement
utilisee, notamment dans le secteur alimentaire mais egalement dans le
domaine de la parfumerie et des cosmetiques (savons Roger & Gallet
"Doux nature" lance en France en 1995) ;
- que daps ces conditions, le Tribunal declarera nul pour defaut
de caractere propre et nouveau le dit modele ;
- qu'il ne peut y avoir contrefacon d'un modele declare nul ;
- en reponse aux conclusions adverses
• que si meme sous 1'empire de la loi ancienne, la nouveaut6 West pas
suffisante pour garantir la validite d'un dessin ou d'un modele, encore
faut-il justifier d'un effort creatif comme cela resulte de la jurisprudence
de la Cour de Cassation cassant regulierement des arrets de Cour
d'Appel qui ont omis de rechercher si le modele en cause exprimait la
personnalite de son auteur et resultait d'un effort de creation ;
Attendu que la Ste L 'OREAL et les societes demanderesses font
valoir
- rappelant
• que tout modele depose beneficie de la protection du Livre V du Code
de la Propriete Intellectuelle des lors qu'il est nouveau et que tel est le
cas des modeles appartenant a la Ste L'OREAL qui est donc recevable
et fondee a agir en contrefacon a l'encontre de quiconque y porte
atteinte, quels que soient le mode et la maniere de cette perpetration et
la bonne ou mauvaise foi de son auteur ;
• qu'ainsi qu'en dispose Particle L 513-4 du C .P.I., la contrefacon d'un
modele est constituee par toute atteinte portee aux droits de son
proprietaire, Particle L 513-3 du meme Code precisant que cette
protection s'etend a tout dessin ou modele "qui ne produit pas sur
l'observateur averti une impression visuelle d'ensemble differente" ;
• que ces textes, issus de l'ordonnance du 25 juillet 2001, sont dans le
prolongement de ces dispositions et de la jurisprudence anterieures
desquelles it ressortait que 1'acte de contrefacon consiste dans la reprise,
totale ou partielle du dessin ou modele ;
• que l'imitation du modele est condamnee au meme titre que sa
reproduction, des lors qu'il se degage de la comparaison des modeles en
cause une meme impression d'ensemble, etant observe que les
dissemblances sont inoperantes ;
- en reponse aux conclusions adverses
* que la nouveaute d'un modele s'apprecie en prenant celui-ci dans son
ensemble comme la nouveaute en matiere de brevet, s'agissant dans un
cas comme dans l'autre, de droits de creation ;
• que la contrefacon d'un modele peut n'etre que partielle ;
* que la Ste L'OREAL poursuit la Ste BELLURE pour contrefacon de
modele du fait de la reprise des caracteristiques essentielles dudit
modele, tandis que la Ste GIORGIO ARMANI PARFUMS poursuit du
fait de la confusion recherchee par la reprise des elements decoratifs du
Page 19
Th
3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
flacon, lesquels ne font pas partie du modele depose, ce qui constitue des
faits de concurrence deloyale, que la difference de fondement s'explique
par la difference des faits incrimines ;
- qu'en I'espece, les emballages litigieux reproduisent les
elements caracteristiques de son modele, a savoir un sachet aux
extremites soudees, repliees et apparentes, de facon a former une sorte
de languette ;
- qu'il resulte de ces ressemblances une meme impression
d'ensemble pour un acheteur d'attention moyenne, et ce faisant, des
actes de contrefacon de modele ;
- que la Ste BELLURE ne rapporte pas la preuve d'une
anteriorite de toute piece de nature a detruire la nouveaute du modele n°
97 3651 appartenant a la Ste L'OREAL et que c'est en vain qu'il est fait
etat d'un pretendu defaut de caractere propre des lors que cette notion
etait inconnue de larticle L 511-3 pris dans sa redaction applicable aux
faits de la cause en raison de la date de depot du modele invoque;
***
Attendu qu'aux termes de Particle L 511-1 du C .P.I. : "Tout
createur d'un dessin ou modele et ses ayants cause ont le droit exclusif
d'exploiter, vendre ou faire vendre ce dessin ou modele dans les
conditions prevues par le present livre, sans prejudice des droits qu'ils
tiendraient d'autres dispositions legales et notamment des livres ler et
III .", larticle L 511-3 § 1 suivant precisant : "Les dispositions du present
livre sont applicables a tout dessin nouveau, a toutes formes plastiques
nouvelles, a tout objet industriel qui se differencie de ses similaires, soit
par une configuration distincte et reconnaissable lui conferant un
caractere de nouveaute, soit par un ou plusieurs effets exterieurs lui
donnant une physionomie propre et nouvelle ."; que Particle L 513-4 du
meme Code indique que : "Sont interdits, a defaut du consentement du
proprietaire du dessin ou modele, la fabrication, l'offre, la mise sur le
marche, 1'exportation, l'utilisation, ou la detention a ces fins, d'un
produit incorporant un dessin ou modele .", Particle L 513-5 rappelant
que : "La protection conferee par 1'enregistrement d'un dessin ou modele
s'etend a tout dessin ou modele qui ne produit pas sur l'observateur
averti une impression visuelle d'ensemble differente ." ;
Attendu ainsi, que si la nouveaute est une condition essentielle de
la protection recherchee (comme le confirment les articles 4 et 6 de la
Directive Europeenne du 13 octobre 1998 ainsi que l'ordonnance du 25
juillet 2001, citees par les demanderesses), l'appreciation de la
contrefacon alleguee se fait en tenant compte de l' impression d' ensemble
et non des differences qui sont inoperantes et se trouve constituee des
lors que les caracteristiques principales du modele litigieux sont reprises ;
* sur la nullite du modele n° 97 3651 relatif a 1'emballage du
parfum EMPORIO ARMANI
a sur le caractere propre demontrant V effort de creation du
modele litigieux
Attendu que le propre d'un parfum est d'etre offert a la vue de
celui qui veut l'acquerir et l'utiliser ; que des lors, le fait de cacher
totalement ledit parfum dans son emballage pour creer une impression
de mystere donne a ce dernier une physionomie nouvelle et, de ce fait,
demontre 1'effort de creation donc le caractere propre de l'emballage en
cause pour presenter des parfums en general et le parfum EMPORIO
ARMANI en particulier, qu'il s'agisse de la version "homme" ou de la
version "femme" ;
V
ih
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3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
0sur la nouveaute
Attendu qu'en l'espece, si la Ste BELLURE invoque ]'existence
d'emballages similaires dans le domaine alimentaire ainsi que dans le
domaine de la parfumerie et des cosmetiques, les pieces fournies ne
permettent pas d'etablir l'anteriorite alleguee ;
Attendu en effet, outre le fait que la Ste BELLURE ne verse
aucune piece etablissant ]'existence anterieure de 1'emballage litigieux
en matiere alimentaire, les exemples donneg dans le domaine tant de
]'hygiene que de la parfumerie sont inexploitables ;
Attendu ainsi, que les photocopies des modeles de
debarbouillettes pour bebe par la societe ROCKLINE INDUSTRIES, de
"Nivea Baby" de la societe BEIERSDORF, des lingettes nettoyantes
CARREFOUR et du "savon doux nature" de ROGER & GALLET ne
permettent pas de determiner s'il s'agit ou non du meme type
d'emballage; qu'en outre, ces documents n'ont pas date certaine en ce
qui concerne les deux derniers produits cites en comparaison et ne
peuvent donc etre opposes aux societes demanderesses .
Attendu en consequence que, faute de demontrer 1'anteriorite
alleguee, la Ste BELLURE doit etre deboutee de sa demande de nullite
du modele n° 97 3651 relatif a 1'emballage du parfum EMPORIO
ARMANI ;
* sur la contrefacon du modele n° 97 3651 relatif a
1'emballage du parfum EMPORIO ARMANI
Attendu qu'en reproduisant un sachet aux extremites soudees,
repliees et apparentes de faron a former une sorte de languette pour
I'emballage de son parfum PURE CLASS, la Ste BELLURE a
effectivement reproduit, a l'identique, les elements caracteristiques du
modele de la Ste L'OREAL utilise pour le parfum EMPORIO ARMANI
(homme et femme) ;
Attendu ainsi, que du fait meme de ces reprises caracteristiques,
1'emballage incrimine cree une meme impression d'ensemble pour un
acheteur meme averti des lors que I'adjonction de la silhouette stylisee
d'un aigle n'efface pas ]'impression d'ensemble de similitude du fait,
precisement, de la reprise des caracteristiques precitees ;
Attendu en consequence, que les societes demanderesses sont
bien fondees en leur action en contrefacon du modele n° 97 3651 relatif
au parfum EMPORIO ARMANI (homme et femme) ;
b) du modele international de flacon n° 035 521 (flacon de
parfum ACQUA DI GIO POUR HOMME) par le flacon du parfum
ARRIVEDERCI HOMME
Attendu que la Ste L 'OREAL et les societes demanderesses
s'appuyant sur les memes remarques preliminaires precedemment
developpees et V occasion de la discussion sur le modele francais
d'emballage n° 97 3651 (emballage du parfum EMPORIO ARMANI),
font valoir
- que le flacon incrimine est une reproduction quasi-servile de son
modele n° 035 521 et de son flacon du parfum ACQUA DI GIO POUR
HOMME, en en reproduisant les elements caracteristiques
• une forme rectangulaire, faces laterales arrondies,
• un verre depoli, blanc casse,
• un bouchon en acier,
• des inscriptions de couleurs grises ;
- qu'il resulte de ces ressemblances une meme impression
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3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
d'ensemble pour un acheteur d'attention moyenne ;
Attendu que la Ste BELL URE fait valoir
- que les elements pretendument caracteristiques du modele
revendique ne sont en realite pas 1'objet du depot tel qu'il a ete effectue
a 1'OMPI puisque ce depot ne revendique pas l'aspect depoli du verre et
du blanc casse, ni le fait que le bouchon soit en acier, ni enfin les
inscriptions de couleur grise, le modele depose consistant dans un flacon
de forme rectangulaire aux angles arrondis, surmonte d'une bague et d'un
bouchon de meme largeur, separe par une bague etroite;
- que la Ste L'OREAL n'est donc recevable a revendiquer que la
protection des formes du modele telles qu'elles ressortent du depot luimeme, lesquelles ne sont pas reproduites par le flacon argue de
contrefacon et utilise par la Ste BELLURE pour commercialiser une eau
de parfum intitulee "ARRIVEDERCI", ce dernier etant surmonte d'un
bouchon de forme arrondie relativement banale qui ne reproduit pas les
deux bagues de dimensions differentes caracterisees du modele
revendique ;
X71fX
Attendu qu'au regard du depot effectue, les elements
caracteristiques invoques par la Ste L'OREAL a l'appui de son action en
contrefaron ne figurent pas dans ce document ou ne sont pas reproduits
par la Ste BELLURE ;
Attendu en effet que le depot en question ne revendique ni
l' aspect depoli et la couleur blanc casse du verre du flacon, ni les
inscriptions de couleur grise sur ledit flacon ; que le bouchon, revendique
de couleur metallique dans le depot est, en fait, couleur acier mais qu'en
tout etat de cause, le bouchon du flacon ARRIVEDERCI HOMME, de
couleur chrome, surmonte une bague de meme couleur portant une
inscription ("Creation Lamis"), ce qui West pas le cas du bouchon du
flacon ACQUA DI GIO (homme) surmontant une bague dont it est
effectivement separe par une bague plus etroite ;
Attendu enfin, que la forme rectangulaire dont les faces laterales
sont arrondies dans les deux modeles en cause (mais de facon plus aigue
pour le flacon ARRIVEDERCI), est une forme banale non protegeable
en elle-meme, etant observe cependant que le flacon de la societe
defenderesse differe en ce que ses faces avant et arriere sont bordees par
une sorte d'empiecement en relief comportant en outre des petites
encoches ;
Attendu en consequence, que le grief de contrefacon doit
effectivement etre rejete ;
3° s'agissant des contrefacons artistiques relatives au droit
d'auteur sur les fragrances de parfums
A ttendu que la Ste L'OREAL et les societes demanderesses
- rappelant
* qu'un parfum est susceptible de beneficier de la protection du droit
d'auteur puisqu'il s'agit d'une oeuvre de 1'esprit au sens de l'article L
112-1 du C .P .I ., et que la question de la protection des parfxms par le
droit d'auteur ne fait pas l'objet d'une reelle controverse des lors qu'on
analyse la doctrine et la jurisprudence de maniere objective et honnete,
ce que la Ste BELLURE se refuse a faire, preferant se referer a des
jugements en dissimulant qu'ils ont ete infirmes en appel ;
* qu' ainsi, que ce soit de fagon directe ou par raisonnement a contrario,
les tribunaux ont reconnu qu'une fragrance est une oeuvre de l' esprit qui,
en tant que telle, releve de la legislation sur le droit d'auteur ;
Page 22
1f)
3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
• que si le Tribunal de Grande Instance de Paris a adopte une position
contraire dans un jugement, sa decision a ete infirmee par arret du 28
juin 2000 ;
• que, surtout, le Tribunal de Grande instance de Paris a juge le 28 mai
2002 dans une decision, certes non definitive, mais a la motivation
exemplaire que : " une fragrance qui est le resultat d'une recherche
intellectuelle d 'un compositeur faisant appel a son imagination et a ses
connaissances accumulees pour aboutir a la creation d'un bouquet
original de materiaux odorants choisi dans un but esthetique constitue
une oeuvre de 1'esprit perceptible et individualisee beneficiant de la
protection par le droit d'auteur" et que la societe defenderesse est de
parfaite mauvaise foi en dissimulant cette decision pour faire etat d'un
autre jugement en occultant qu'il avait ete infirme par la Cour,
puisqu'elle etait partie a la procedure ayant donne lieu au jugement du
28 juin 2000, ne developpant aucun argument serieux quanta 1'exclusion
des fragrances de la categorie des oeuvres de 1'esprit ;
• que le fait que le parfum soit perceptible par un sens, l'odorat, qui
n'implique aucune perception visuelle, ne saurait 1'exclure de la
categorie des oeuvres de l'esprit, le parfum etant le fruit d'un travail de
creation particulier et minutieux de selection et d'elaboration d'odeurs
pour arriver a une combinaison specifique, a l'instar d'une oeuvre
musicale, pouvant etre identifie par son analyse chromatographique ou
par ses composants, comme un morceau de musique 1' est par sa partition ;
• qu'il West pas revendique un droit sur une "famille" ou un genre de
parfum mais sur des parfums precis qui sont identifies tant par l'oeuvre
elle-meme, a savoir le parfum, que par son analyse chromatographique,
tous deux verses aux debats, le fait qu'un parfum appartienne a telle ou
telle famille ne pouvant le priver de la protection par le droit d'auteur des
lors qu'il est original a moins, par comparaison avec les oeuvres
musicales, de priver celles-ci de protection sous pretexte qu'elles
appartiennent a la categorie des symphonies, des valses, des concertos,
etc. . . ;
• que l'argument de la Ste BELLURE consistant a faire un amalgame
entre le droit d'auteur et le droit des marques est fallacieux, s'agissant de
droits distincts apprecies de maniere distincte, le droit d'auteur naissant
independamment de toute formalite et la Cour de Justice des
Communautes Europeennes n'ayant pas exclu la protection des
fragrances par le droit des marques dans son arret du 12 decembre 2002,
mail statuant sur la notion de representation graphique necessaire au
depot;
• que du fait que les parfums invoques sont exploites sous leur nom, les
societes demanderesses beneficient des droits patrimoniaux d'auteurs de
creations ;
• qu'a 1'instar de tous les autres droits de propriete intellectuelle, la
contrefacon artistique, definie par l'article L 122-4 du C.P.I., s'apprecie
en tenant compte des seules ressemblances , sans tenir compte des
differences et par rapport a l'impression d'ensemble produite dans
1'esprit du public ;
- en reponse aux conclusions adverses
• que si, selon la Ste BELLURE, tous les parfums seraient les memes a
quelques nuances pres, on ne peut que s'interroger sur les raisons pour
lesquelles it serait alors necessaire d'avoir recours a "une expertise
realisee par des "grands nez" et "des expertises chimiques,
organoleptiques et chromatographiques" ;
• que contrairement aux propos de la Ste BELLURE, le bien fonde du
grief de contrefacon est etabli par l'analyse chromatographique des
Page 23
.1 .
n
3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
produits incrimines versee aux debats et, surtout, par les tests
comparatifs realises par les demanderesses aupres du public concerne ;
* qu'il est rappele que ce sont des parfums precis et identifies qui sont
invoques et contrefaits et non une famille de parfums ;
- qu'il ressort d'un test aupres des consommatrices "dont la
perception est primordiale, puisqu' elles constituent la cible commerciale
des deux produits" que les fragrances opposees sont confondues par
77 % des consommatrices interrogees ;
Attendu que la Ste BELL URE fait valoir
a) a titre liminaire, sur les conditions de conception et de
fabrication d 'une fragrance de parfum
- que le parfum, qui West pas un domaine reserve de l'industrie
du luxe et des grands parfumeurs, concerne egalement les fabricants de
cosmetiques et de savons, les lessiviers, les fabricants de detergents et
1'industrie agro-alimentaire utilisant de plus en plus d'aromes, obligeant
l' industrie de la parfumerie a sans cesse innover, concevoir et fabriquer
de nouvelles fragrances ;
- que les parfums commercialises sous les noms de grands
couturiers ne sont pas crees par ces maisons de couture mais par des
maisons de parfumeurs qui sont environ une dizaine sur le marche ;
- que generalement, lorsqu'un industriel s'adresse a un parfumeur
pour la conception d'une fragrance, it decrit le style, l'atmosphere et les
impressions que le parfum doit degager, voire meme le nom d'un grand
parfum pour identifier le type de fragrance dont it veut se rapprocher, et
qu'il existe ainsi des "familles de parfums" et, comme dans le domaine
de 1'habillement ou de la decoration, des "tendances" comme cela resulte
d'ailleurs des pieces communiquees par les demanderesses elles-memes
(cf. Extrait du site Internet www.fragonard.com et "interview de M .
Giorgio ARMANI, pieces n' 97 et 99) et qu'en consequence, aucun
parfumeur ne saurait revendiquer un monopole sur une "famille" de
parfum, ni sur une tendance, ni meme sur un des composants majeurs de
la fragrance (tous les parfumeurs pouvant concevoir des parfums autour
du muguet, de la violette ou de la cannelle) ;
b) sur 1'absence de protection par le droit d'auteur des
fragrances revendiquees par les Stes demanderesses
- a titre liminaire, la controverse jurisprudentielle et doctrinale
concernant la protection d 'une fragrance par le droit d 'auteur
* que la seule decision rendue en la matiere par une Cour
d'Appel est une decision ancienne de la cour d'Appel de Paris qui, tout
en admettant que la liste des oeuvres de l'esprit dressee par Particle L
112-2 du C .P .I. West pas exhaustive et qu'elle n'exclut pas a priori les
oeuvres de l'esprit pouvant etre percues par d'autres sens que l'ouie ou
la vue, a cependant refuse d'appliquer la protection du droit d'auteur au
cas d'espece, a savoir la formule d'un "parfum de luxe"(Paris 3 juillet
1975), considerant que des formules permettant d'obtenir un produit
industriel - meme destine a l'industrie du luxe - en melangeant dans des
proportions donnees des essences naturelles, des produits synthetiques
et des composants specifiques, ne constituent pas dans leur contenu des
oeuvres de I'esprit protegeables par le droit d'auteur meme si elles ne
sont pas brevetables dans les faits ;
* en reponse aux conclusions adverses
a que I'arret de la Cour d'Appel de Paris du 28 juin 2000, s'il paralt
admettre de maniere implicite le principe de la protection d'une
fragrance par le droit d'auteur, refuse toutefois de dappliquer en I'espece
aux motifs que la preuve de l'originalite de l'oeuvre West pas rapport6e
Page 24
VP
,
3 eme Chambre l ere Section
Jugement du 26 mai 2004
o que le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris en date du 28
mais 2002 qui a juge "qu'une fragrance [sic] ( . . .) constitue une oeuvre de
l' esprit perceptible et individualisee beneficiant de la protection du droit
d'auteur" est une decision isolee et surtout n'est pas definitive puisque
la Ste BELLURE en a interjete appel ;
* qu'a ce jour, it existe toujours un debat doctrinal et
jurisprudentiel concernant la protection d'une fragrance par le droit
d'auteur comme le montrent de facon eclatante les differentes
consultations de professeurs de droit versees aux debats ;
- en tout etat de cause, sur les conditions de protection d'une
oeuvre de /'esprit par le droit d'auteur qui ne sont pas remplies en
1 'espece
• qu'une oeuvre n'est susceptible d'etre protegee par le droit d'auteur
qu'a condition, premierement d'etre perceptible, identifiable et
descriptible de maniere objective, deuxiemement, d'etre originale et que
tel n' est pas le cas en 1' espece ;
• qu'en effet, la Ste demanderesse ne decrit pas les fragrances dont elle
revendique la protection, n'identifie pas les oeuvres dont elle reclame la
protection alors qu'une oeuvre West protegeable qu'a la condition d'etre
concretisee, sortant ainsi du domaine de l'idee non protegeable par
principe ;
• que la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautes
Europeennes a juge qu'une marque olfactive ne peut etre representee ni
"par une formule chimique, ni par une description au moyen de mots
ecrits, ni par le depot d'un echantillon d'une odeur ou par la combinaison
des ces elements"au motif qu' "une formule chimique ne represente pas
l'odeur d'une substance mais la substance en tant que telle et West pas
non plus suff samment claire et precise" et qu' "un echantillon d'une
odeur nest pas suffisamment stable et durable"(CJCE 12/XII/1002) ;
• qu'en outre, en ne decrivant pas et n'identifiant pas les fragrances des
parfums qu'elle revendique, les societes demanderesses ne permettent
pas au Tribunal d'etre en mesure d'apprecier la pertinence du grief de
contrefacon allegue puisque /'oeuvre revendiquee n'est pas identifiee
autrement que par une analyse chromatographique des parfums, sauf
pour "ACQUA DI GIO", "ACQUA DI GIO POUR HOMME", et sans
distinguer s'il s'agit de la version pour homme ou pour femme en ce qui
concerne "ROMANCE" ;
• que I'analyse precitee, qui est une technique analytique qui permet la
separation des constituants d'un melange en phase liquide ou gazeuse, ne
permet pas d'identifier tous les constituants d'un parfum et ne permet
donc pas a elle seule d'identifier et de decrire la fragrance dans sa
globalite;
• que cette analyse chromatographique doit donc etre completee par
d'autres analyses telles que des analyses olfactive, organoleptique et/ou
de metrologie sensorielle ;
• que les societes demanderesses Wont meme pas pris le soin de preciser
en quoi les fragrances des parfums qu'elles revendiquent sont originales
et meriteraient a ce titre, la protection par le droit d' auteur;
- subsidiairement, sur l 'absence de preuve de la contrefacon des
fragrances revendiquees
* que le document consistant en deux tests "de
proximite/similarite " qui auraient ete realises aupres d'un panel de "200
repondantes agees de 8 a 45 ans utilisant regulierement des parficms de
prestige et achetant en parfirmerie " ne peut constituer la moindre preuve
de la contrefaron alleguee, faute d'avoir ete realise contradictoirement,
en /'absence d'indication sur les conditions de selection du panel ainsi
Page 25
k
11
3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
que sur le caractere objectif de la comparaison effectuee par les
"repondantes " n' ayant aucune competence specifique en la matiere alors
que les parfums sont des produits complexes composes de nombreux
ingredients selon des dosages precis ;
* que le document consistant en un rapport d'analyse effectue par
un centre de recherches prive a la demande de L'OREAL
a a ete etabli de maniere non contradictoire et dans des conditions
inconnues que la defenderesse n'a bien evidemment pas pu verifier ;
a conclut a une forte similitude entre les fragrances en cause alors que
selon les premieres constatations de ce rapport, les "parfums elabores par
la societe Creation LAMIS sont nettement moins riches en matieres
premieres entrant dans la composition des parfums L'OREAL" et que
"les proportions entre les differentes matieres premieres entrant dans la
composition des parfums L'OREAL sont differentes de celles des
parfums Creation Lamis associes", alors que la Ste BELLURE a fait
effectuer une experience par un laboratoire d'analyses independant sur
deux de ses parfums mis en cause par L'OREAL : LA VALEUR et
PURE BLACK, en faisant faire des melanges d'ingredients dans des
proportions differentes de celles utilisees dans les parfums qu'elle
commercialise et qu'il apparait a la simple analyse olfactive que chacun
peut faire, que la reprise des meme ingredients dans des proportions
differentes aboutit a des resultats totalement differents ;
• que les extraits de sites Internet communiques par les societes
demanderesses, soit n'existent pas (www.parfumsillusions .de) soit ne
presentent aucun lien avec la Ste BELLURE (pour les six autres sites
cites) ;
• que le rapport de M . Pierre BREESE
• n'est pas contradictoire et n'est pas objectif, identifiant les
parfums BELLURE soul l'appellation generique de "contrefacon" ;
a propose une "echelle de mesure" absolument fantaisiste et sans
aucun fondement scientifique ;
a n' annexe pas les rapports d' analyse physico-chimique par CPG
ce qui ne pen-net pas a la Ste BELLURE d'analyser les donnees qui lui
sont opposees ;
a donne des resultats d'analyse qui ne sont pas aussi edifiants que
son auteur voudrait le faire croire
• faisant etat de differences significatives confirmees par l'analyse des
composants des parfums compares,
• alors que, outre que les eventuels composants communs ne se
retrouvent pas dans les memes proportions (alors qu'une difference
meme infime du pourcentage d'un composant modifie la formule et la
senteur finale du produit), les parfums compares presentent des
differences dans leur composition ainsi de "SWEET PEARL" par rapport
a "NOA", de "ACQUA DI GIO" par rapport a "ARRIVEDERCI
FEMME", de "NICE FLOWERS" par rapport a "ANAIS ANAIS", de
"MIRACLE" par rapport a "PINK WONDER", etc . . . ;
a indique lui-meme que des parfums de marques differentes mais
dont la senteur est tres proche coexistent sur le marche, tels "b OUP' de
LANCOME et "ROMANCE" de RALPH LAUREN alors qu'il ressort
par ailleurs des "cercles de correlation" resultant de l'analyse ACP
annexee au rapport que sont egalement tres proches les parfums
"ACQUA DI GIO HOMME" et "ROMANCE HOMME", "MIRACLE"
et "NOA", "ROMANCE FEMME" et "GIO FEMME" ;
Attendu que 1' article L 112-2 du C .P .I .enumere une liste des oeuvres
de l'esprit susceptibles d'etre protegees au titre du droit d'auteur,
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3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
que 1article L 112-1 du C .P.I . prevoit la protection de "toutes les
oeuvres de 1'esprit, quelqu'en soit le genre, la forme d'expression et le
merite ou la destination.", enfin, que Particle L 122-4 du meme Code
dispose que "Toute representation ou reproduction integrale ou partielle
faite sans le consentement de dauteur ou de ses ayants droits ou ayants
cause est illicite ." et constitue donc une contrefacon engageant la
responsabilite civile de son auteur, independamment de la bonne ou
mauvaise foi de ce dernier ;
Attendu que la titularite des droits des societes demanderesses
n'etant pas contestee, ii y a lieu de rechercher si les parfums, egalement
designes "fragrances", sont effectivement protegeables au titre du droit
d'auteur comme le pretendent les societes demanderesses et, dans
I'affirmative, s'ils ont fait l'objet de contrefacon par les
parfums/fragrances fabriques et commercialises par la societe
defenderesse, etant observe, en reponse a cette derniere, que si un debat
doctrinal et jurisprudentiel concernant la protection d'une fragrance par
le droit d'auteur existe toujours, cela n'exclut aucunement que des
elements de reponse non negligeables aient deja ete apportes a la
question comme en temoignent d'ailleurs tant les arguments avances que
les pieces versees par les parties elles-memes ;
a) sur le caractere protegeable des parfums/fragrances au titre
du droit d'auteur
Attendu qu'en 1'espece, si Particle L 112-2 precite ne cite comme
exemple d'oeuvres de l'esprit que des oeuvres perceptibles par la vue ou
par l'ouIe, la presence de l'adverbe "notamment" ne permet pas
d'exclure a priori les oeuvres pouvant eventuellement titre perceptibles
par les autres sens que sont le gout, le toucher et, egalement l'odorat ;
Attendu, des lors, qu'un parfum/fragrance ne peut titre exclu, a
priori, de la protection revendiquee meme dans l'hypothese ou celui-ci
donnerait lieu a une exploitation a caractere industriel au regard de la
protection qui est accordee par le droit d'auteur aux creations d'art
applique fabriquees a grande echelle, des lors que le createur d'un
parfum realise d'abord une composition qui se traduira ulterieurement
dans une formule de laboratoire ;
Attendu en effet, comme cela resulte de la reflexion tant
jurisprudentielle que doctrinale reprenant souvent des termes musicaux
dans les discussions relatives aux parfums, que la composition creee par
dauteur du parfum/fragrance peut titre comparee a une partition
permettant de reproduire une musique comme la formule retenue par
l'auteur du parfum permet de reproduire la fragrance, dune comme
1'autre n'etant pas plus predefinie au moment de leur creation ; qu'ainsi,
la fragrance peut effectivement, comme cela a deja ete juge, titre
consideree comme "le resultat d'une recherche intellectuelle d'un
compositeur faisant appel a son imagination et a ses connaissances
accumulees pour aboutir a la creation d'un bouquet original de materiaux
odorants choisis dans un but esthetique ", constituant ainsi une oeuvre
de l'esprit ;
Attendu par ailleurs, que peu importe que l'impression produite par
une forme olfactive soit fugace et que sa perception soit differente selon
les personnes, des lors que toutes les perceptions sensorielles dependent
plus ou moins de la personne qui les recoit et, surtout, que le Code de la
Propriete Intellectuelle ne prevoit pas une telle exclusion ;
Attendu enfin, etant rappele que le present debat ne releve pas du
droit des marques ou des brevets mais de celui du droit d'auteur, que
1'exigence d'une description objective du parfum, qui ferait defaut en
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3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
1'espece, ne se fonde sur aucune base legale en 1'etat de la legislation et
rend donc la discussion sur ce point parfaitement inutile ;
Attendu, en consequence, qu' it y a lieu de considerer que la creation
d'un parfum/fragrance, constituant une oeuvre de 1' esprit, est susceptible
d'etre protegee au titre du droit d'auteur sous reserve de remplir les
conditions propres a ce type d'oeuvre, en particulier 1'apport creatif de
son auteur caracterisant l'originalite du parfum en cause ;
b) sur 1'apport creatif de 1'auteur des parfums/fragrance
litigieux et 1'originalite de ces derniers
Attendu qu'il est de principe que c'est a celui qui reclame la
protection d'une oeuvre de 1'esprit d'apporter les elements caracterisant
l'apport creatif et, par consequent, l'originalite de 1oeuvre en cause ;
Attendu qu'en l'espece, la paternite de la creation des parfums
concernes, tout comme la titularite des droits en d6coulant, West pas
contestee par les parties ;
Attendu que les societes demanderesses versent aux debats un
dossier de presse et des analyses chromatographiques des parfums en
cause;
Attendu que le dossier de presse presente les differents parfums des
societes demanderesses dans "ELLE", "GALA" et "COSMETIQUES
MAGAZINE";
Attendu cependant, outre le fait qu'il n'existe aucune garantie de
l'independance des auteurs desdits articles, qu'un certain nombre de
ceux-ci ne renseignent pas sur la particularite du parfum presente qu'en
outre, les references de ces extraits presentes en photocopies ne figurent
qu'en surcharge manuscrite sur Particle lui-meme, ce qui ote toute date
certaine aux divers documents produit aux debats ;
Attendu par ailleurs, que les analyses chromatographiques produites
(pieces n* 70, 73 et 81), qui semblent effectivement incompletes (ne
distinguant pas le parfum "ROMANCE" femme ou homme et ne
semblant pas viser "ACQUA DI GIO" et "ACQUA DI GIO pour
homme"), sont versees sans commentaires explicatifs ce qui rend
incomprehensible donc inexploitable la lecture des chiffres alignes en
colonnes ;
Attendu, enfin, que l'analyse chromatographique contenue dans le
rapport d'analyse de M . BREESE du Cabinet SIMONOT (piece n' 87),
qui, pourtant, ne presente pas l'inconvenient releve dans les documents
precites, ne permet pas de connaitre le cheminement des travaux et
recherches effectues par les demanderesses pour mettre au point les
fragrances en cause et, partant, de distinguer ainsi le "savoir faire", non
protegeable, de l'aspect creatif de dauteur, ce dernier etant pourtant une
condition necessaire pour accorder la protection sollicitee des onze
parfums en cause ;
Attendu, des lors, l'originalite et l'apport creatif des oeuvres
revendiquees n'etant pas etablis pour les documents verses dans la
presente procedure, que la question de la contrefacon de celles-ci n'a
plus lieu d'etre examinee ;
4° s'agissant de la concurrence deloyale et parasitaire
Attendu que la Ste L 'OREAL et les societes demanderesses font
valoir
- que la liberte du commerce et de l'industrie, droit fondamental
dont chacun peut user, doit se faire dans le respect de la concurrence
saine et legitime qui impose a tout industriel d'avoir une strategie
commerciale visant a distinguer ses produits de ceux d'autrui, pour que
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Jugement du 26 mai 2004
la clientele les differencie, et non pas d'avoir une demarche asservie a
une politique de "coups defendus" portes a des produits concurrents ou
a un concurrent lui-meme ;
- que faction en concurrence deloyale, qui a pour objet d'assurer la
protection de celui qui ne peut se prevaloir d'un droit privatif, est
destinee a sanctionner le commercant qui meconnait ses devoirs et fausse
les regles de la concurrence et qu'il en est ainsi de la confusion entre les
produits qui provoque des troubles commerciaux qu'il importe de faire
cesser et de reprimer dans un but de securite du commerce et
d'assainissement du marche ;
- que tel est le cas de l'imitation du conditionnement des produits
d'un concurrent, qui s'apprecie d'apres les ressemblances et non d'apres
les differences, ce qui est contraire aux usages loyaux du commerce et
constitue une faute qui engage la responsabilite de son auteur sur le
fondement de Particle 1382 du Code Civil ;
- que des actes de concurrence parasitaires existent "des lors qu'une
entreprise consciente de l'innovation commerciale exploitee par un
concurrent, adopte un comportement suiveur, afin de tirer profit des
efforts de celui-ci, en imitant son produit, tendant ainsi a s'approprier
illegitimement une notoriete preexistante, sans developper d'efforts
intellectuels de recherche et d'etudes et sans les engagements financiers
qui leur sont naturellement lies ;";
- qu'enfin, la preuve de l'intention de nuire ou la mauvaise foi de
l'auteur d'actes de concurrence deloyale ou parasitaire West pas une
condition du succes de faction ;
- en reponse aux conclusions adverses
* que si la Ste BELLURE conteste avoir commis des actes de
contrefacon en France, elle ne conteste pas y avoir commis des actes de
concurrence se bornant a contester le caractere deloyal ou parasitaire de
ces actes ;
* qu'en tout etat de cause, elle ne justifie aucunement sa demarche et ses
objectifs a savoir copier de maniere organisee au lieu de mettre a profit
1'importance de ses moyens au service d'un commerce honnete visant a
distinguer ses produits de ceux d'autrui ;
* que pretendre que les societes demanderesses invoquent les memes
faits au titre de la contrefacon et au titre de la concurrence deloyale
repose sur une telle meconnaissance des faits de 1'espece et des
demandes formulees qu'elle ne peut qu'etre feinte, la societe BELLURE
procedant a une dissection des produits au mepris de la regle selon
laquelle l' imitation de conditionnements impose d'apprecier les produits
dans leur ensemble ;
Attendu que la Ste BELL URE fait valoir
- concernant la reproduction de flacons et d 'emballages pour
lesquels les demanderesses revendiquent des droitsprivatifs de marques
et/ou de dessins ou de modeles
* que les demanderesses son irrecevables car elles tentent d'obtenir
la protection des elements de leur flacon ou de leur emballage qu'elles
Wont pas pris la precaution de faire proteger par 1' intermediaire de leurs
depots de marques ou de modeles tendant a faire jouer a la concurrence
deloyale le role de complement de protection par rapport a celle
decoulant des droits privatifs dans la mesure ou elles fondent leur action
en contrefacon de marque et/ou dessins et modeles sur les memes faits
que pour la concurrence deloyale;
* qu'a titre subsidiaire, si le Tribunal devait juger qu'une telle action
en concurrence deloyale est recevable, it constatera que les griefs
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3eme Chambre lere Section
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invoques sont mal fondes
a car elles revendiquent la protection de la couleur du jus de TRESOR
sans la definir, celle de MIRACLE ainsi que la couleur argent de
bouchon alors qu'il s'agit d'elements d'une grande banalite ;
a que les deux societes en cause ne craignent pas de revendiquer un
monopole d'exploitation de la couleur rose comme caracteristique du
parfum pour l'une, caracteristique de 1'etui pour 1'autre, alors que la
couleur rose est, a l'heure actuelle, une couleur a la mode utilisee dans
les domaines vestimentaires, decoratif et cosmetiques ;
a que s'agissant de parfums, 1'evocation des fleurs, est non seulement
banale et courante mais encore necessaire et it paralt pour le moins
audacieux qu'il existe un risque de confusion entre les emballages des
parfums NICE FLOWERS et ANAIS ANAIS du seul fait d'un
hypothetique rattachement intellectuel qui pourrait titre fait entre la
denomination NICE FLOWERS et la representation de fleurs sur 1'etui
ANAIS ANAIS, etant rappele que le consommateur d'attention moyenne
n'a jamais les deux emballages en cause simultanement sous les yeux ;
- concernant la pretendue reproduction de flacons et d'emballages
pour lesquels les societes demanderesses ne revendiquent pas de droits
privatifs de marque, de dessins et modeles
• que le risque de confusion consiste a se placer dans l'esprit du
consommateur moyen precedemment rappele ;
• que le commercant qui commercialise en premier un produit ne
peut reprocher a un concurrent de reprendre les caracteristiques de celuici que dans la mesure ou ses caracteristiques ne sont ni banales, ni
courantes ;
• que la creation de parfums nouveaux, qu'il s'agisse de flacon,
d'emballage ou de fragrance, repond aux exigences de la mode qui se
caracterise par des tendances communes exploitees concomitamment par
les operateurs economiques dudit marche ;
• s'agissant des produits en cause
• que tant la forme du flacon que 1'apparence generale de
1'emballage de NOA ne sont pas reproduites par SWEET PEARLS
# dont le flacon par sa taille et sa forme allongee n'a aucun rapport avec
la forme arrondie et la petite taille de NOA et ne peut donc titre percu
comme une declinaison de ce dernier ;
# dont la reference a une perle ne parait pas suffisante pour provoquer un
tel risque de confusion a moins d'accorder au consommateur d'attention
moyenne une connaissance bien trop precise des parfums en cause ;
a CHEEK TO CHEEK au regard de ROMANCE
# que l'utilisation du titre CHEEK TO CHEEK qui signifierait "dancer
joue contre joue" et renverrait directement au theme de la romance donc
a ROMANCE est une interpretation tendancieuse et totalement
fantaisiste qui ne peut titre suivie par le Tribunal ;
• que les elements pretendument copies relatifs au flacon et a
1'emballage sont d'une particuliere banalite s'agissant de la forme
rectangulaire des flacons et de leur couleur transparente, de la forme et
rectangulaire et de la couleur argentee des bouchons et de la transparence
des jus ;
• que l'usage de ces elements communs pour commercialiser deux
parfums sous deux marques differentes constitue seulement la preuve
que ces elements appartiennent a une tendance actuelle de la mode
dominee actuellement par ('utilisation de la couleur rose ;
a ARRIVEDERCI au regard de ACQUA DI GIO
• que le flacon du premier est en verre depoli blanc aux angles
asymetriques, de couleur vert clair, mum d'une bague verte et d'un
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w Ic)
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bouchon transparent rond faisant apparaitre un atomiseur, portant une
inscription en italique sur la premiere ligne et des caracteres batons sur
la seconde alors que le flacon du second est de couleur bleue, est muni
d'une bague et d'un bouchon dores sans rapport avec la marque
ARRIVEDERCI pas plus que le graphisme utilise ;
# que les memes differences se retrouvent sur les emballages concernes ;
0 ARRIVEDERCI au regard de GIO : les memes differences que
celle exposees au point precedent peuvent etre mises en valeur pour
demontrer 1'absence de risque de confusion ;
a PURE BLACK au regard de DRAKKAR NOIR
# que le flacon du premier est un rectangle banal surmonte d'un bouchon
classique de forme arrondie, le flacon du second est ovale a angles plus
ou moins droits englobant le bouchon ;
# que l' emballage du premier est une forme rectangulaire banale dont les
inscriptions et l'agencement Wont aucun rapport avec celles de
1'emballage de DRAKKAR NOIR ;
***
Attendu, a titre prsliminaire, qu' it y a lieu de rappeler qu'une action
en concurrence deloyale et parasitaire peut etre exercee conjointement,
a titre complementaire, ou subsidiairement a une action en contrefacon ;
que, des lors, l'irrecevabilite soulevee par la Ste BELLURE West pas
fondee d'autant que les societes demanderesses appuient leur action sur
des faits distincts de la contrefacon invoquee par ailleurs ;
a) s'agissant de la concurrence deloyale
Attendu que faction en concurrence deloyale se fonde sur les
dispositions de Particle 1382 du Code Civil et suppose donc l'existence
d'actes deloyaux, d'un prejudice et d'un lien de causalite entre ces actes
et ce prejudice ; qu'il y a lieu de rappeler a cet egard que, selon une
Jurisprudence constante, it y a concurrence deloyale des lors qu'un
commercant commet dans 1'exercice et au benefice de son commerce, a
I'encontre d'un autre commercant exercant une activite similaire, un acte
fautif susceptible de porter prejudice a ce dernier dans le but de
detourner sa clientele, notamment par la confusion entretenue avec les
produits en cause ;
Attendu qu' iI est donc necessaire d'examiner ces divers elements au
regard des pretentions des parties ;
* le flacon de TRESOR (divulgue sous le nom de la Ste
LANCOME) par le flacon de LA VALEUR
Attendu qu'independamment des elements retenus dans le cadre de
la discussion de la contrefaron dudit flacon, le seul element distinct
retenu par les demanderesses est la couleur du jus contenu dans les
flacons respectifs ;
Attendu cependant, qu'en l'absence d'autres elements, le seul fait
de commercialiser une couleur de jus tres proche de celle du parfum en
cause ne peut caracteriser a lui seul les actes de concurrence deloyale
allegues ;
* 1'etui de TRESOR (divulgue sous le nom de la SteLANCOME)
par I'etui de LA VALEUR
Attendu qu'independamment des elements retenus dans le cadre de
la discussion de la contrefacon dudit emballage, la Ste BELLURE a
souligne en couleur or les lettres figurant sur son emballage, evoquant
ainsi la denomination du parfum des demanderesses et a represents, de
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3eme Chambre lere Section
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surcroit, un coffre rempli de bijoux evoquant intellectuellement et
directement la notion de tresor, appellation precisement retenue par les
demanderesses pour designer leur parfum ;
Attendu que ces elements caracterisent des actes de concurrence
deloyale a l'encontre de la Ste BELLURE qui a ainsi cree une confusion
entre les deux produits que le consommateur d'attention moyenne n'a
pas simultanement sous les yeux ;
* MIRACLE (divulgue sous le nom de la Ste LANCOME) par
PINK WONDER
Attendu qu'independamment des elements retenus dans le cadre de
la discussion de la contrefacon dudit flacon, en reprenant la couleur rose
du jus et de 1' emballage de MIRACLE, la couleur argent du bouchon, cet
ensemble etant associe a une denomination designant une merveille rose
pouvant titre mis en relation avec l'appellation "miracle" du parfum des
demanderesses, la Ste BELLURE a ainsi cree une confusion entre les
deux produits que le consommateur d'attention moyenne n'a pas
simultanement sous les yeux ;
Attendu que ces elements caracterisent des actes de concurrence
deloyale a l'encontre de la Ste BELLURE ;
* 1'emballage d'ANAIS ANAIS (divulgue sous le nom de la Ste
PARFUMS CACHAREL) par NICE FLOWER
Attendu qu'independamment des elements retenus dans le cadre de
la discussion de la contrefacon dudit emballage, en combinant la reprise
de l'emplacement en haut de 1'etui et la couleur gris/vert de gris du nom
du parfum avec le choix d'une denomination evoquant 1'univers
d'ANAIS ANAIS, en 1'espece NICE FLOWER, la Ste BELLURE a ainsi
cree une confusion entre les deux produits que le consommateur
d'attention moyenne n'a pas simultanement sous les yeux ;
Attendu que ces elements caracterisent des actes de concurrence
deloyale a l'encontre de la Ste BELLURE ;
* NOA (divulgue sous le nom de l a StePARFUMS CACHAREL)
par SWEET PEARL
Attendu que si les deux produits sont conditionnes dans un etui de
couleur sable, la forme de ceux-ci differe cons iderablement, celui de
NOA etant constitue d'une petite boite carree dont le couvercie est
caracteristique par l'agencement de ses rabats quant celui de SWEET
PEARL est constitue d'une grande boite rectangulaire classique et sans
signes distinctifs particuliers ;
Attendu de meme que la couleur nacree commune aux deux produits
ne peut caracteriser un acte de concurrence deloyale, des lors que sa
reprise sur le col du bouchon et, surtout, dans le jus de SWEET PEARL
presente une perception particulierement trouble au point de faire
disparaltre la notion de nacre ;
Attendu, egalement, que la forme du flacon SWEET PEARL
apparait vraiment trop allongee et etiree par rapport a la forme ronde de
NOA pour laisser penser qu'il s'agit d'une declinaison de ce dernier ;
Attendu, par contre, qu'en combinant 1'ensemble de ces divers
elements avec la reprise de l'idee d'introduire une perle dans le flacon
de SWEET PEARL ainsi que sur 1'etui de ce dernier avec 1'appellation
SWEET PEARL, totalement depourvue d'ambiguite, alors que la
presence d'une perle a l'interieur du flacon, lui-meme en forme de perle,
constitue la caracteristique du parfum NOA, la Ste BELLURE, a ainsi
cree une confusion entre les deux produits que le consommateur
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I
1r,
-
I'll
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d'attention moyenne n'a pas simultanement sous les yeux ;
Attendu que ces elements caracterisent des actes de concurrence
deloyale a l'encontre de la Ste BELLURE ;
* ROMANCE (version homme et version femme, divulgue sons
le nom de la Ste PARFUMS RALPH LAUREN) par CHEEK TO
CHEEK (version homme et version femme)
a concernant les flacons
Attendu que s'il est exact que pris individuellement les elements
releves par les demanderesses presentent une banalite manifeste (forme,
couleur et bouchon pour un meme jus transparent) la combinaison de
1'ensemble de ceux-ci cree une confusion manifeste des deux flacons en
cause, dont la forme est geometrique rectangulaire et anguleuse, dont le
verre est egalement transparent et dont la forme du bouchon presente la
meme silhouette et le meme aspect visuel ;
Attendu que ces elements caracterisent des actes de concurrence
deloyale a l'encontre de la Ste BELLURE ;
0 concernant les etuis
Attendu que l'utilisation de la denomination CHEEK TO CHEEK
ne semble pas apparaitre spontanement, pour un consommateur
d'attention moyenne, comme une reference a 1'expression "to dance
cheek to cheek" pour en deduire un renvoi au theme de la romance donc
du parfum du meme nom ;
Attendu, par contre, que si des differences subtiles existent
effectivement sur les etuis (rayures horizontales couleur argent en relief
de CHEEK TO CHEEK/fins losanges en relief de ROMANCE, meme
fond noir mais attenue par les rayures precitees et fond rose plus soutenu
attenue par les rayures precitees de CHEEK TO CHEEK) it n'en
demeure pas moins que les caracteristiques de ROMANCE (couleur
noire/homme et rose/femme et metal argente) sont reprises dans CHEEK
TO CHEEK evoquant ainsi la declinaison des produits des
demanderesses ; que ce constat, combine avec les elements precedents
cree ainsi une confusion manifeste entre les deux produits pour le
consommateur d'attention moyenne n'ayant pas ceux-ci simultanement
sous les yeux ;
Attendu que ces elements caracterisent des actes de concurrence
deloyale a 1'encontre de la Ste BELLURE ;
* ACQUA DI GIO (divulgue sous le nom de la Ste GIORGIO
ARMANI PARFUMS) par ARRIVEDERCI DUE
13 concernant les flacons
Attendu qu'independamment d' une
forme approchante
(rectangulaire aux angles arrondis chez ACQUA DI GIO, avec
seulement deux angles arrondis sur quatre chez ARRIVEDERCI DUE)
et d'un bouchon subtilement different (dore d'un cote, vert de l'autre
mais laissant voir un atomiseur dore a 1'interieur), 1'association de la
matiere des flacons en cause (verre depoli) et la couleur de ceux-ci (vert
clair) cree immediatement une confusion visuelle qui est renforcee par
l'inscription en italique et en vert fonce, porte sur la face avant de chaque
flacon ;
Attendu que ces elements, de nature a creer une confusion entre les
deux produits que le consommateur d'attention moyenne n'a pas
simultanement sous les yeux, caracterisent des actes de concurrence
deloyale a 1'encontre de la Ste BELLURE ;
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M M
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• concernant les etuis
Attendu que le meme type d'observation peut titre fait concernant les
etuis, tous deux de couleur vert clair avec des inscriptions en vert fonce
et que, par voie de consequence, ces elements caracterisent des actes de
concurrence deloyale a l'encontre de la Ste BELLURE;
• GIO (divulgue sous le nom de la Ste GIORGIO ARMANI
PARFUMS) par ARRIVEDERCI
a concernant les flacons
Attendu que declines dans les teintes rose et orange, mais n'usant
pas d'une matiere en verre depoli, ces flacons presentent la meme
combinaison des elements par ailleurs precedemment releves pour
ACQUA DI GIO/ARRIVEDERCI DUE ;
Attendu que les memes causes produisant les memes effets, ces
elements caracterisent des actes de concurrence deloyale a l'encontre de
la Ste BELLURE ;
• concernant les etuis
Attendu que les memes observations que precedemment pouvant
titre faites a propos des etuis en cause, les elements ainsi releves
caracterisent des actes de concurrence deloyale a 1'encontre de la Ste
BELLURE ;
* DRAKKAR NOIR (divulgue par la Ste GUY LAROCHE) par
PURE BLACK
Attendu qu'en reprenant la forme rectangulaire, la couleur noire,
!'aspect de relief de l'emballage d'une part, en choisissant egalement les
couleurs rouge et blanche pour les inscriptions d' autre part, enfin, en
incorporant le terme "black" dans sa denomination, la Ste BELLLTRE a
donne au conditionnement de son produit les caracteristiques de celui des
demanderesses, presentant le meme aspect compact duquel se detachent
les dominantes rouge et blanc de son appellation ;
Attendu que ces elements, de nature a creer une confusion entre les
deux produits que le consommateur d'attention moyenne n'a pas
simultanement sous les yeux, caracterisent des actes de concurrence
deloyale a 1'encontre de la Ste BELLURE ;
b) s'agissant de la concurrence parasitaire
Attendu que le parasitisme peut titre defini comme le fait de
s'appuyer sur les initiatives et les efforts d'un concurrent afin d'entamer
sa position commerciale ; qu'il en est ainsi quand un commerrcant ou une
entreprise, profitant des investissements de conception et de promotion
voire de !'image vehiculee par des produits ayant acquis une place
importante dans le marche concerne, commercialise ses propres produits
avec suffisamment de difference pour eviter le grief de plagiat mais aussi
avec suffisamment de ressemblances pour beneficier du succes de son
concurrent, a moindre frais et en pratiquant le plus souvent un prix plus
attractif,
Attendu qu'en I'espece, it est indeniable que les produits litigieux
visent tres precisement des produits phares des societes demanderesses
dont la notoriete West pas contestee ; que par ailleurs, la difference des
prix (ceux-ci pouvant titre jusqu' a dix fois moins eleves) pratiques par la
Ste BELLURE est significative des economies d'investissements que
celle-ci a pu faire en se placant ainsi dans le sillage des societes
demanderesses; qu'en effet, ces dernieres demontrent la realite et
l'importance de leurs investissements de conception, de recherche, de
promotion des parfums en cause pour en assurer le succes depuis de
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nombreuses annees tant sur le marche francais qu'europeen, voir
mondial ;
Attendu que si le prejudice en resultant ne peut etre exactement fixe,
it n'en demeure pas moins qu'il existe inevitablement au regard de ce qui
precede ;
Attendu en consequence, qu'il y a lieu de retenir a 1'encontre de la
Ste BELLURE des actes de concurrence parasitaire ;
***
VI° En ce qui concerne les mesures reparatrices
* en ce qui concerne le prejudice
Attendu que le prejudice subi par les demanderesses resulte de la
simple atteinte a leurs marques et modeles comme de la concurrence
deloyale et parasitaire retenue precedemment ; que si les elements donnes
par les demanderesses ne permettent pas de les suivre, en 1'etat, dans
1'evaluation de leur prejudice, la Ste BELLURE ne peut pas plus limiter
l'ampleur dudit prejudice aux seules constatations resultant des P .V . de
constat d'achat ou de saisie-contrefacon diligentes a l'occasion d'autre(s)
procedure(s), ces documents ne donnant que des indices ponctuels d'une
situation a un moment donne et non un inventaire exhaustif du prejudice
subi;
Attendu en consequence qu'il parait necessaire d'ordonner une
expertise aux fins de determiner l'entier prejudice subi par les societes
demanderesses du fait des contrefacons de marques et modeles ainsi que
des faits de concurrence deloyale et parasitaire retenus a l' encontre de la
Ste BELLURE ;
Attendu en outre que la realite du prejudice n'etant pas contestable,
it y a lieu, au vu des premiers elements verses aux debats par les societes
demanderesses, d'accorder a titre de provision la somme de 22 900 euros
a la Ste L'OREAL, la somme de 15 250 euros a la Ste LANCOME, la
somme de 12 200 euros a la Ste PRESTIGE ET COLLECTIONS
INTERNATIONAL, la somme de 9 150 euros a la Ste CACHAREL, la
somme de 6 100 euros a la Ste GUY LAROCHE et la somme de 6 100
euros a la Ste RALPH LAUREN ;
* en ce qui concerne les mesures d'interdiction et de confiscation
Attendu que le principe des mesures d' interdiction sollicitees par les
societes demanderesse est la suite logique de la reconnaissance des faits
de contrefacon et de concurrence deloyale et parasitaire ; qu'il y sera
donc fait droit sous astreinte de 150 euros par produit et par jour de
retard, a compter du 60eme jour suivant la signification du present
jugement ;
Attendu par contre, que les mesures d' interdiction qui viennent
d'etre prononcees rendent superfetatoires la mesure de confiscation
sollicitee qui sera donc rejetee ;
Attendu qu'il resulte de Particle 35 de la Loi n° 91-650 du 9 juillet
1991 que le juge naturel du contentieux de liquidation des astreintes est
le Juge de I'Execution, qu'il n'y a donc pas lieu pour le present Tribunal
de se reserver la liquidation de 1'astreinte precedemment prononcee ;
* en ce qui concerne la publication
Attendu, tout comme les mesures d'interdiction, que le principe de
la publication de la presente decision est la consequence logique de la
reconnaissance des faits de contrefacon et de concurrence deloyale et
parasitaire ; qu'en 1'espece, la notoriete et le nombre des produits
concernes justifient la publication du jugement dans trois journaux ou
revues au choix des societes demanderesses ainsi qu'en premiere page
des sites Internet www.creationlamis.com et www.bellure.be pendant
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deux mois, pour un montant global de 10 000 euros ;
* en ce qui concerne 1'execution provisoire
Attendu que cette mesure se justifie pour la mesure d'expertise, les
mesures d'interdiction et les provisions allouees aux societes
demanderesses ;
V° En ce qui concerne les autres pretentions
Attendu qu'au regard de ce qui precede, it y a lieu de reserver les
demandes relatives a l'application de Particle 700 du Nouveau Code de
Procedure Civile et la charge des depens;
***
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal,
Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort,
Vidant son delibere du 26 janvier 2004,
Ordonne la jonction des procedures n° 03-08805 opposant la
Societe 4CS S .A.R.L. A la Societe MANUFACTURE PARISIENNE DE
COSMETIQUES S .A.R.L. et n° 03-08799 opposant la Societe AU
FRANC BENEFICE S .A.R.L. a la Societe PSD S .A.R.L .,
Fixe la cloture des procedures n° 03-08805 et n° 03-08799
opposant les parties precitees a la date du 26 janvier 2004,
Constate la validite de 1'assignation A jour fixe en date du 04 avril
2003,
En consequence,
Deboute la Societe BELLURE N.V., societe de droit Belge, dont le
Siege social est situe Ter Stratevweg 29A, 2520 OELEGEM
(BELGIQUE), de sa fin de non recevoir,
Deboute la Societe BELLURE N.V., de sa demande de mise hors
de cause,
Constate le desistement d'instance des societes L'OREAL S.A.,
LANCOME PARFUMS ET BEAUTE & CIE S .N.C ., PRESTIGE ET
COLLECTIONS INTERNATIONAL S .N.C (exercant sous le nom
commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS), PARFUMS
CACHAREL S .N .C., PARFUMS RALPH LAUREN S .N.C . et
PARFUMS GUY LAROCHE S .A.S . A 1'encontre de la Societe AU
FRANC BENEFICE S .A.R.L., exercant soul les enseignes EURO
BENEFICES et AU FRANC BENEFICE et de la Societe 4CS S.A.R.L.,
Constate le desistement d'instance de la Societe AU FRANC
BENEFICE S .A.R .L . A l'encontre de la Societe P .S.D. S.A.R.L.,
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Constate le desistement d'instance de la Societe 4CS S .A .R.L . A
1'encontre de la Societe MANUFACTURE PARISIENNE DE
COSMETIQUES (MPC) S.A .R.L.,
Constate 1'acceptation de ces desistements par chacune des
societes concernees,
Declare ces desistements parfaits et dit que les societes concernees
par ces desistements conserveront a leur charge les frais qu'elles auront
engages a 1' encontre des unes et des autres ;
Recoit la Societe L'OREAL S .A ., la Societe LANCOME
PARFUMS ET BEAUTE & CIE S .N.C., la Societe PRESTIGE ET
COLLECTIONS INTERNATIONAL S .N.C (exercant sous le nom
commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS), la Societe PARFUMS
CACHAREL S .N.C., la Societe PARFUMS RALPH LAUREN S.N.C.,
et la Societe PARFUMS GUY LAROCHE S.A.S., en leurs demandes
mais les dit partiellement fondees,
En consequence,
Deboute lesdites societes de leurs actions en
* contrefacon des maraues
- TRESOR LANCOME n° 1 581 643 (flacon),
- MIRACLE n° 3 038 943 (flacon),
- ANAIS ANAIS n° 1 479 938 (etui) ;
* contrefacon du modele n° 035 521 relatif au flacon du parfum
ACQUA DI GIO POUR HOMME ;
* en contrefacon artistique de fragrance des parfums TRESOR
LANCOME, MIRACLE, ANAIS ANAIS, NOA, ROMANCE (homme
et femme), ACQUA DI GIO, GIO, ACQUA DI GIO POUR HOMME,
EMPORIO ARMANI (homme et femme) et DRAKKAR NOIR ;
Dit qu'en fabriquant, important et commercialisant les eaux de
parfums LA VALEUR, PINK WONDER, NICE FLOWER, SWEET
PEARL, CHEEK TO CHEEK, ARRIVEDERCI DUE, ARRIVEDERCI,
ARRIVEDERCI HOMME, PURE CLASS, PURE BLACK, la Societe
BELLURE N.V., societe de droit beige a commis
* des actes de contrefacon de la marque TRESOR n' 1 564 082,
* des actes de contrefacon du modele n° 97 3651 relatif a
l'emballage du parfum EMPORIO ARMANI,
* de concurrence delovale et parasitaire des parfums
- TRESOR, concernant 1'etui,
- MIRACLE, concernant le flacon et 1'etui,
- ANAIS ANAIS, concernant 1'etui,
- NOA, concernant le flacon et 1'etui,
- ROMANCE (femme et homme), concernant le flacon et 1'etui
- ACQUA DI GIO, concernant le flacon et 1'etui,
- GIO, concernant le flacon et 1'etui,
- DRAKKAR NOIR, concernant les conditionnements ;
Page 3 7
3 eme Chambre 1 ere Section
Jugement du 26 mai 2004
AVANT DIRE DROIT SUR LES PREJUDICES,
Ordonne une expertise,
Designe, pour y proceder
M. Pierre GENDRAUD
27 rue Hamelin
75116 PARIS
01 .47.27.15 .85 .
Avec mission, apres avoir pris connaissance des pieces du dossier
et releve les observations des parties, de donner au Tribunal tour
elements permettant de determiner le montant des dommages et interets
dus aux societes demanderesses en reparation
* des actes de contrefacon concernant
o la marque TRESOR n° 1 564 082,
o le modele n° 97 3651 relatif a 1'emballage du parfum EMPORIO
ARMANI,
* des actes de concurrence deloyale et parasitaire relatifs aux
parfums
- TRESOR, (1'etui),
- MIRACLE, (le flacon et 1'etui),
- ANAIS ANAIS, (1'etui),
- NOA, (le flacon et 1' etui),
- ROMANCE, [femme et homme]), (le flacon et 1'etui),
- ACQUA DI GIO, (le flacon et 1'etui),
- GIO, (le flacon et 1' etui),
- DRAKKAR NOIR, (les conditionnements) ;
notamment apres avoir precise le nombre de flacons, d'etuis et de
conditionnements litigieux, fabriques ou commercialises ou importes par
la Societe BELLURE NV, en etablir les conditions d'exploitation ainsi
que le manque a gagner en resultant pour les societes demanderesses ;
Dit que 1'expert sera saisi et effectuera sa mission conformement
aux dispositions des articles 263 et suivants du Nouveau Code de
Procedure Civile et qu'il deposera l'original et une copie de son rapport
au Greffe avant le 17 decembre 2004 sauf prorogation de ce delai
dument sollicite en temps utile aupres du Juge du Controle ;
Fixe a 7 650 euros la provision a valoir sur les frais d'expertise qui
devra etre consignee par les Societes demanderesses tenues
solidairement, a la Regie du Tribunal (Escalier D, 2eme Etage) avant le
30 juin 2004 sous peine de caducite de la designation de 1'expert ;
Renvoie l'affaire a l'audience de mice en etat des causes du 14
septembre 2004 - 13H10 - pour verification de la consignation ou
constatation de la caducite ;
Condamne la Societe BELLURE NV . a verser a titre de provision
sur la reparation de leur prejudice
- la somme de 22 900 euros a la Societe L'OREAL S.A.,
- la somme de 15 250 euros a la Societe LANCOME PARFUMS ET
BEAUTE & CIE S .N .C .,
- la somme de 12 200 euros a la Societe PRESTIGE ET
COLLECTIONS INTERNATIONAL S .N.C (exerrant sous le nom
commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS),
Page 38
4,
M
3eme Chambre lere Section
Jugement du 26 mai 2004
-
la somme de 9 150 euros a la Societe PARFUMS CACHAREL
S .N.C.,
- la somme de 6 100 euros a la Societe PARFUMS RALPH
LAUREN S .N.C .,
- la somme de 6 100 euros a la Societe PARFUMS GUY
LAROCHE S .A.S .;
Fait interdiction a la Societe BELLURE N . V. de fabriquer,
distribuer, importer, commercialiser, utiliser les produits incrimines
portant atteinte aux droits des societes L'OREAL S .A., LANCOME
PARFUMS ET BEAUTE & CIE S .N.C ., PRESTIGE ET
COLLECTIONS INTERNATIONAL S .N.C (exerrant sous le nom
commercial GIORGIO ARMANI PARFUMS), PARFUMS
LAUREN S .N.C .,
CACHAREL S .N.C ., PARFUMS RALPH
PARFUMS GUY LAROCHE S .A.S ., sous quelque forme, de quelque
maniere et a quelque titre que ce soit, directement ou indirectement, par
toute personne physique ou morale interposee y compris sur tout site
Internet, et ce, sous astreinte de 150 euros par produit et par jour de
retard, astreinte prenant effet a compter du 60eme jour suivant la
signification du present jugement;
Dit n'y avoir lieu a confiscation ;
Autorise les societes L'OREAL S .A., LANCOME PARFUMS ET
BEAUTE & CIE S .N.C ., PRESTIGE ET COLLECTIONS
INTERNATIONAL S .N.C (exercant sous le nom commercial GIORGIO
ARMANI PARFUMS), PARFUMS CACHAREL S .N.C., PARFUMS
RALPH LAUREN S .N.C ., PARFUMS GUY LAROCHE S .A.S . afaire
publier le dispositif du present jugement dans trois journaux ou revues
de leur choix ainsi qu'en premiere page des sites Internet
www.creationlamis.co m et www.bellure .be pendant deux mois, aux frais
de la Societe BELLURE N. V. , le cout total de ces insertions ne pouvant
exceder a sa charge la de somme de 10 000 euros hors taxes
Ordonne l'execution provisoire en ce qui concerne 1'expertise et les
provisions ordonnees et les mesures d'interdiction ;
Reserve les demandes relatives a 1'application de 1'article 700 du
Nouveau Code de Procedure Civile ;
Rejette les autres demandes .
Reserve les depens ;
Prononce a Paris, le 26 mai 2004 par Madame APELLE, VicePresident assistee de Mme VENARD-COMBES, Premier-Greffier .
re `er
I( N -
Le res dent
Page 39
1
N° RG : 03/05891
EXPEDITION executoire dans 1'affaire
1 er Demandeur : S.A. L' OREAL et autres
contre 1 er Defendeur : Societe BELLURE NV "et autres
EN CONSEQUENCE, LA REPUBLIQUE FRANCAISE mande
et ordonne
A tous les huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ladite
decision a execution,
AuxProcureurs Generaux et aux Procureurs de la Republique pres
les Tribunaux de Grande Instance d'y tenir la main,
A tous commandants et officiers de la force publique de preter
main-forte lorsqu'ils en seront requis .
En foi de quoi la presente a ete signee et delivree par nous Greffier
en Chef soussigne au Greffe, du Tribunal de Grande Instance de
Paris
40 eme page et derriere .

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