verlaine - MemoPage

Transcription

verlaine - MemoPage
VERLAINE
(1844–1896)
I. Dans les pas de Baudelaire
• Paul Verlaine naît à Metz, mais s’installe à Paris dès l’âge de 7 ans.
A peine reçu bachelier, en 1862, il commence à fréquenter avec
assiduité et passion les cafés parisiens du quartier latin.
• C’est alors une époque de grande émulation poétique : de
nombreux poètes, souvent sans talent, grossissent les rangs des
Parnassiens en prétendant devenir le nouveau Baudelaire. Verlaine
adhère spontanément à cette effervescence, tout en abandonnant
ses études de droit et en trouvant un petit emploi administratif à
l’Hôtel de ville.
• Après avoir publié quelques textes d’inspiration satirique dans les
deux numéros du Parnasse moderne et contemporain, il rend
hommage à Baudelaire, son maître incontesté, en intitulant son
premier recueil Poèmes saturniens (1866). Thèmes et formes
demeurent largement tributaires de la manière du maître. En
revanche, s’il semble avouer une dette à l’égard des cercles
parnassiens, c’est déjà avec une distance teintée d’ironie.
II. Un poète tiraillé
• Verlaine est un homme complexe. Il est imprégné d’un idéalisme
romantique aux échos presque mièvres (ce sera, du moins, le
jugement de Rimbaud) qui transparaît dans plusieurs de ses
poèmes de jeunesse bien connus, tels Mon rêve familier et
Nevermore.
• À la même époque, Verlaine s’éprend de Mathilde Mauté et, de
façon très romanesque, la courtise pendant plusieurs mois en y
voyant un idéal absolu de pureté et de bienveillance. En réalité,
l’union rêvée se dégradera très vite, à l’épreuve du quotidien et du
réel.
• Verlaine offre aussi le visage d’un homme brusque, voire brutal, qui
rudoie sa mère et tombe très vite dans la dépendance de l’alcool.
Ses contemporains lui donneront le surnom de «faune», terme
désignant une créature mythologique proche du satyre, connue
pour sa lubricité, son goût pour l’ivresse et son appétit sexuel.
• Verlaine écrit, simultanément aux Poèmes saturniens, plusieurs
poésies érotiques dans la veine de Baudelaire, abordant le thème
extrêmement sulfureux de l’homosexualité féminine : ces poésies
seront immédiatement censurées.
• Avec les Fêtes Galantes (1871), Verlaine reprend la veine de
l’érotisme, mais il utilise un ton subtil, jouant d’équivoques,
d’allusions voilées, et empruntant le décor et les fards des fêtes du
XVIIIe siècle. En lien étroit avec la peinture au pastel de Watteau,
l’image utopique de l’île de Cythère, l’obscène cède place à une
certaine lascivité, le langage cru à une douceur légèrement
insinuante. Verlaine crée dans ce recueil cet effet de « sourdine »,
ce « mode mineur » du langage qui va devenir la caractéristique
essentielle de sa poésie.
III. Rimbaud–Verlaine
• Un fait décisif survient cependant dans l’itinéraire poétique et
personnel de Verlaine, lorsque Rimbaud arrive à Paris, sur son
invitation. Les deux poètes se sont lus et admirés mutuellement (cf.
fiche Rimbaud) : cette rencontre consacre l’échec de son mariage
avec Mathilde. Les aspirations révolutionnaires de Rimbaud dans le
monde poétique éveillent en lui aussi une volonté d’innovation, de
démarcation qui demeurait encore en germes.
• Après avoir semé le scandale dans les cercles poétiques parisiens,
Verlaine et Rimbaud s’enfuient en Belgique puis à Londres, en
1872. Les Romances sans paroles, recueil issu de cette aventure,
passent souvent pour le chef d’œuvre du poète, et l’œuvre où il
pousse le plus loin ses expérimentations sur la poésie et la
musicalité (cf. infra). En effet, jamais après Verlaine n’osera si
audacieusement faire chanter la poésie.
• La séparation des poètes est tragique. Verlaine, ayant tiré deux
coups de feu sur Rimbaud, est emprisonné pendant deux ans
(1873-1875), tandis que sa femme obtient le divorce (1874)
IV. Expiations poétiques
• La prison est pour le poète une véritable épreuve d’expiation.
N’ayant jamais été croyant auparavant, il décide de se convertir et,
à sa sortie, est engagé comme professeur dans un collège
catholique.
• Sa poésie reflète cette illumination intérieure. Les titres des recueils
parlent d’eux-mêmes : Sagesse (1881), Jadis et naguère (1884),
Confessions (1896). Ce retour voulu à la quiétude, cette fascination
pour la sainteté semblent en réalité correspondre avec l’aspiration
du jeune Verlaine à l’impassibilité parnassienne, le «mode mineur»,
le demi-ton, le vague qui ont toujours nimbé ses œuvres.
• Dans un texte célèbre de 1893, vingt-cinq ans après ses premières
œuvres, Verlaine revient avec recul et autodérision sur sa
génération poétique : les Poètes maudits. Dans ce texte où il se
commente lui-même sous l’anagramme de «Pauvre Lélian»,
Verlaine se révèle lecteur et critique plein de finesse de cette
époque artistique finissante.
• Verlaine, reconnu de son vivant «Prince des Poètes», devient à la
fin de sa vie le porte-parole de toute cette génération maudite. Il
finira d’ailleurs, malgré son titre, dans une profonde misère.
V. La musique et le mode mineur
• L’«Art poétique» intégré à Cellulairement (1874) est l’un des
poèmes les plus célèbres de Verlaine. Cette parodie d’Horace et de
Boileau résume assez fidèlement ses tentatives poétiques, même si
elle est également, par sa nature de parodie, un amusement sapant
toute démarche théorique.
• «De la musique avant toute chose» : Verlaine veut rattacher la
poésie à son origine musicale (la lyre grecque) en pratiquant les
mètres impairs «plus vagues, et plus solubles dans l’air» et
composant une «chanson grise», sur le mode du mineur et de
l’indécis.
• En termes de versification, les césures sont effacées, le vers se
dissout dans un phrasé harmonieux, sans rupture. Le ton est celui
d’une tristesse pudique, mettant à distance souffrances et émotions
par des images indécises, tremblotantes «où l’Indécis au Précis se
joint»
MemoPage.com SA © / 2008 / Auteur : Joséphine Malara

Documents pareils