Le cadre de santé et la polyvalence infirmière

Transcription

Le cadre de santé et la polyvalence infirmière
INSTITUT DE FORMATION DE PROFESSIONS DE SANTE
Centre Hospitalier Universitaire de Besançon
FORMATION CADRE DE SANTE
Le cadre de santé et la polyvalence infirmière :
Entre accompagnement et développement des
compétences
Mémoire présenté en vue de l’obtention de Diplôme de Cadre de Santé
Option Infirmière
Laurence MIEUZET
Promotion 2014-2015
Sous la direction de Madame Jeanne-Antide ROUGE
Cadre Supérieur Infirmière Anesthésiste
Coordinatrice pédagogique à l’Institut de Formation des Professions de Santé
de Besançon, unité de formation Infirmier Anesthésiste
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2
INSTITUT DE FORMATION DE PROFESSIONS DE SANTE
Centre Hospitalier Universitaire de Besançon
FORMATION CADRE DE SANTE
Le cadre de santé et la polyvalence infirmière :
Entre accompagnement et développement des
compétences
Mémoire présenté en vue de l’obtention de Diplôme de Cadre de Santé
Option Infirmière
Laurence MIEUZET
Promotion 2014-2015
Sous la direction de Madame Jeanne-Antide ROUGE
Cadre Supérieur Infirmière Anesthésiste
Coordinatrice pédagogique à l’Institut de Formation des Professions de Santé
de Besançon, unité de formation Infirmier Anesthésiste
3
REMERCIEMENTS
4
Je tiens à remercier tout particulièrement :
Mon directeur de mémoire Jeanne-Antide ROUGE pour son aide, ses conseils
et ses encouragements tout au long de ce travail
Tous les professionnels que j’ai rencontré et qui ont participés à
l’enrichissement de ce travail de recherche
Ma famille pour le soutien qu’elle m’a prodigué : Vincent, Corentin et Pauline
pour tout le temps que je n’ai pas pu leur consacrer, Mamie Colette fidèle au
poste de correcteur
Mon amie Catherine, ma force invisible
Ainsi que tous ceux qui ont contribué à leur manière à l’élaboration de ce
mémoire
5
SOMMAIRE
6
INTRODUCTION................................................................................................ 9
1.
CHEMINEMENT PROFESSIONNEL ........................................................ 11
1.1
LE CONTEXTE ................................................................................... 12
1.2 CHEMINEMENT VERS MA PROBLEMATIQUE ET MON
HYPOTHESE................................................................................................ 13
2.
CADRE CONCEPTUEL ............................................................................ 15
2.1
LA POLYVALENCE ............................................................................ 16
2.1.1
Définitions ..................................................................................... 16
2.1.2
Un incontournable de la polyvalence : La mobilité ....................... 19
2.1.3
La polyvalence infirmière .............................................................. 20
2.1.3.1
Les avantages de la polyvalence : ......................................... 23
2.1.3.2
Les limites de la polyvalence : ............................................... 24
2.1.4
2.2
LA COMPETENCE ............................................................................. 28
2.2.1
4.
Définitions ..................................................................................... 29
2.2.1.1
La compétence infirmière ....................................................... 31
2.2.1.2
La compétence collective ....................................................... 33
2.2.2
3.
La polyvalence infirmière, un postulat dès la formation initiale ..... 26
Manager et développer les compétences ..................................... 34
METHODOLOGIE ..................................................................................... 36
3.1
METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE ........................................... 37
3.2
CHOIX DE LA METHODOLOGIE D’ENQUETE ................................. 37
3.3
L’ENTRETIEN SEMI-DIRECTIF ......................................................... 37
3.4
ELABORATION DES CANEVAS D’ENTRETIEN ............................... 38
3.5
CHOIX DU LIEU ET DE LA POPULATION ........................................ 39
3.6
LES ENTRETIENS ............................................................................. 40
3.6.1
Mon ressenti ................................................................................. 41
3.6.2
Les limites de l’entretien ............................................................... 41
ANALYSE .................................................................................................. 43
4.1
RESULTATS ET ANALYSE DES DONNEES .................................... 44
4.1.1
Résultats des entretiens ............................................................... 44
4.1.2
Le profil de la population interviewée : ......................................... 45
4.1.3
La polyvalence.............................................................................. 46
4.1.3.1
La représentation de la polyvalence ...................................... 46
4.1.3.2
La polyvalence, une dynamique d’établissement ................... 48
4.1.3.3
Le point de vue des infirmiers polyvalents ............................. 49
4.1.4
Les éléments facilitateurs de la polyvalence ................................ 50
4.1.4.1
La notion d’entraide ............................................................... 50
7
4.1.4.2
Le volontariat ......................................................................... 51
4.1.4.3
La polyvalence planifiée, organisée, uniformisée................... 52
4.1.4.4
La formation ........................................................................... 55
4.1.5 Le management du cadre de santé : accompagnement et
communication .......................................................................................... 57
4.1.6
4.1.6.1
Entre polyvalence et expertise ............................................... 60
4.1.6.2
Le développement des compétences .................................... 62
4.1.7
La polyvalence au service de la qualité des soins ........................ 64
4.1.8
L’œil neuf du professionnel polyvalent ......................................... 67
4.2
LA DISCUSSION ................................................................................ 69
4.2.1
Les déterminants sociaux : facteurs d’influence ? ........................ 69
4.2.2
La polyvalence : comment est-elle perçue ? ................................ 69
4.2.3
La polyvalence : comment est-elle vécue ? .................................. 70
4.2.4
Les éléments facilitateurs : Leviers de motivation ? ..................... 71
4.2.5
Quel management pour le cadre de santé ? ................................ 73
4.2.6
De la compétence individuelle à la compétence collective ........... 74
4.2.7
Polyvalence et qualité de prise en soins....................................... 76
4.3
5.
Les compétences ......................................................................... 60
SYNTHESE DE L’ANALYSE .............................................................. 77
ENSEIGNEMENTS TIRES ........................................................................ 80
CONCLUSION ................................................................................................. 82
BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................. 84
ANNEXES ........................................................................................................ 87
Annexe 1 ............................................................................................ 88
Annexe 2 ............................................................................................ 89
Annexe 3 ............................................................................................ 90
Annexe 4 ............................................................................................ 91
8
INTRODUCTION
9
Le thème de ce mémoire fait suite à mon expérience professionnelle d’aidesoignante puis d’infirmière polyvalente. Le facteur déclenchant réside dans
l’observation des attitudes adoptées par mes collègues infirmières qui
n’adhèrent pas au principe de la polyvalence. J’ai retrouvé ce même ressenti
chez les professionnels durant mon expérience de faisant fonction cadre de
santé.
Mes motivations pour traiter ce thème sont multiples :
•
Appréhender les différentes approches des concepts concernés par ce
thème.
•
Prendre
un
temps
de
réflexion
afin
d’améliorer
ma
pratique
professionnelle.
•
Me positionner en tant que cadre santé dans une éventualité de
manager une équipe polyvalente.
Cette recherche me semble pertinente, vu le contexte économique actuel des
établissements de santé et le souhait de mutualisation du personnel.
En préambule, je décris mon cheminement personnel.
Dans la première partie, je fais état d’un constat, puis je recentre mon sujet et je
formule une problématique, enfin j’émets une hypothèse.
La deuxième partie apporte des éléments théoriques. Cette conceptualisation
est nécessaire à l’analyse de la problématique.
La troisième partie est réservée à la méthodologie et à l’analyse des entretiens.
Je confronte les données recueillies avec les idées émergentes des différents
concepts, en lien avec mon hypothèse.
10
1. CHEMINEMENT
PROFESSIONNEL
11
1.1
LE CONTEXTE
Les dernières réformes mises en place dans le secteur hospitalier (plan
hôpital2007, loi HPST,) visent à rendre les structures hospitalières plus
réactives. La répartition de l’offre de soins au sein des hôpitaux n’est plus figée
mais fluctuante en fonction des besoins. Dans les établissements de santé la
mutualisation des ressources humaines est devenue nécessaire, afin de
maintenir une qualité et une sécurité des soins. Cette mutualisation, dans une
logique économique permet de réduire les coûts engendrés par l’absentéisme
du personnel. Du point de vue de G. DEVRED : « La polyvalence peut
constituer une réponse pour aller vers plus de flexibilité et rendre ainsi
l’organisation plus réactive » [1p.106]. La flexibilité demandée aux employés
entraine un changement organisationnel du travail afin de s’adapter aux
différentes contraintes (absentéisme, conjoncture).
Aujourd’hui le développement de professionnels polyvalents est devenu un
enjeu majeur dans les centres hospitaliers. Le plan hôpital 2007 a réorganisé
les services en les regroupant en pôles d’activité. Ces pôles sont consacrés par
la loi HPST comme le seul niveau de structure obligatoire. Ils sont le support de
l’organisation interne de l’hôpital public.
La constitution des pôles est faite soit par discipline soit par regroupement de
services de médecine et de chirurgie d’une même spécialité. Pour exemple, le
pôle cœur-poumon permet de regrouper deux spécialités assez proches, et
d’associer une discipline chirurgicale et une médicale. C’est un pôle qui donne
une visibilité sur le parcours du patient. Selon les établissements ce
regroupement de services peut prendre diverses appellations. En effet, on peut
entendre parler de secteur ou de pôle, mais l’objectif de mutualisation du
personnel reste le même.
Dans les structures privées de petite envergure l’organisation en pôle d’activité
n’est pas toujours applicable. Les cadres de proximités peuvent avoir comme
12
supérieur hiérarchique une directrice des soins, qui a alors une double fonction
dont celle de cadre supérieur.
Dans les grandes structures de type CHU, les affectations des professionnels
commencent à être proposées par pôle. Cependant dans les établissements de
plus petite envergure les agents sont affectés plus particulièrement à un
service. Le turn-over des employés y est moindre, les agents ont souvent une
ancienneté conséquente et n’ont pas une culture de mobilité. De ce fait, les
professionnels en poste dans un service peuvent développer un sentiment
d’appartenance à celui-ci.
1.2
CHEMINEMENT VERS MA PROBLEMATIQUE ET MON
HYPOTHESE
Le sujet de ma recherche est étroitement lié à mon expérience professionnelle.
Je débute ma carrière professionnelle en 1988 comme aide-soignante dans un
centre hospitalier d’environ 600 lits, je suis affectée dans les services selon les
besoins et je n’ai pas le choix de mes affectations. Diplômée infirmière, je suis
affectée sur différents postes qui nécessitent de la polyvalence. Cette
expérience me permet de développer des compétences spécifiques à chaque
service, une découverte de différents fonctionnements de services, un
enrichissement tant personnel que professionnel. En 2013, j’obtiens un poste
de faisant-fonction de cadre de santé au sein d’un service de soins de suite
cardiologique et pneumologique. Dans un contexte d’absentéisme, je sollicite
les agents de ces deux services qui ont l’habitude d’être mobiles chaque weekend et ce afin de maintenir la permanence des soins. Malgré ce fonctionnement
instauré depuis plusieurs années, je me retrouve confrontée plusieurs fois à de
l’inquiétude, du refus, de la part des agents malgré un accompagnement et un
fonctionnement basé sur le volontariat et la notion d’entraide.
A ce jour, il n’y a pas de projet institutionnel autour de la polyvalence et chaque
cadre de santé fait ce qu’il peut dans son secteur de soins. L’équipe soignante
est relativement ancienne dans l’établissement, les habitudes de travail bien
ancrées, ce qui ne facilite pas le changement.
13
Ce constat m’interroge. Pourquoi la mutualisation des ressources humaines au
sein d’un secteur de soins rencontre-t-elle autant de difficultés ? Quel
management le cadre de santé doit-il adopter pour accompagner au mieux
l’équipe dans ce nouveau mode de travail qu’engendre la polyvalence ?
Pour m’aider à explorer cette problématique, j’étudie ce qu’est la polyvalence.
Je
m’interroge
sur
la
perception
qu’ont
les
professionnels
et
plus
particulièrement les infirmières sur la polyvalence et sur le rôle que le cadre de
santé a à jouer dans la mise en place de celle-ci.
En tant que cadre de santé, manager des personnes polyvalentes assure une
qualité et une continuité des soins aux personnes soignées. L’établissement
dans lequel je travaille est de petite taille (90 lits) et la polyvalence pourrait être
un atout pour le soignant qui souhaiterait élargir son champ de compétences.
C‘est un projet qui pourrait impulser la motivation des agents à se former ou à
se perfectionner dans les différentes spécialités de l’établissement.
Cette expérience m’amène à proposer cette problématique :
Dans un contexte hospitalier de restriction budgétaire des dépenses de santé,
comment le cadre de santé peut-il développer la polyvalence des infirmiers sur
différentes unités de soins tout en garantissant au patient des soins de qualité ?
En regard de mon constat et de ma problématique, j’avance l’hypothèse
suivante pour ma recherche :
La polyvalence bien managée élargit le champ de compétence de l’infirmier(e)
en conservant la qualité des soins.
A partir de cette hypothèse je vais développer les concepts suivants :
-
La polyvalence, afin de comprendre ce qu’elle revêt et d’en délimiter les
contours grâce aux différentes définitions d’auteurs, puis d’étudier celle
qui concerne le milieu hospitalier et plus précisément les infirmières.
-
La compétence, en l’étudiant sous différents angles d’approches
d’auteurs puis plus particulièrement en zoomant sur la compétence
infirmière.
14
2. CADRE CONCEPTUEL
15
Mais de quoi parle-t-on lorsque l’on parle de polyvalence ? Je me suis appuyée
sur différentes lectures pour définir ce concept qui est reconnu difficile à définir
et relativement flou dans beaucoup d’ouvrages. Je choisis d’aborder la
polyvalence tout d’abord de façon générale avec plusieurs approches
d’auteurs. Puis je parlerai du terme de mobilité et enfin de la polyvalence
infirmière.
2.1
LA POLYVALENCE
2.1.1 Définitions
Selon le dictionnaire Robert, l'adjectif « polyvalent » est apparu en France à la
fin du XIXe siècle, dans la médecine et la chimie. Le terme « valence », en
chimie, se réfère aux liaisons possibles d'un atome avec d'autres atomes. Ainsi,
les mots multivalence ou polyvalence renvoient à l'idée de liaisons multiples
entre les éléments d'une catégorie quelconque ou entre des éléments d'une
catégorie avec ceux d'une autre catégorie.
Selon Patrick MICHELETTI, il existe deux modes de polyvalence qui sont la
multivalence et la polycompétence.
« Un multivalent est un individu susceptible de changer de poste sans pour
autant changer de métier » [2, p32]. Un professionnel peut assurer un poste
dans un service différent de celui où il exerce. Il garde ses fonctions, mais doit
toutefois s’adapter à un nouvel environnement surtout si l’organisation du travail
n’est pas la même. Cela demande au professionnel qui se voit affecté dans un
autre service, de posséder des capacités d’adaptation à un nouvel
environnement et des capacités de compréhension par rapport aux exigences
de poste. Un employé multivalent n’a pas pour commande d’acquérir une
nouvelle qualification mais plutôt de savoir transférer ses divers savoirs actuels
dans un autre service.
16
C’est un mode de travail qui casse la routine des horaires et des actes, et
permet de côtoyer de nouvelles personnes, de connaitre de nouveaux
collègues.
« Un multi compétent est un individu susceptible de changer de poste ou de
mettre en œuvre une part plus ou moins importante de la qualification d’un ou
plusieurs autres métiers en possédant une partie ou sa totalité » [2, p36]. Un
individu peut être amené à occuper une autre fonction sur une durée
déterminée dans une journée. C’est une fonction qui peut relever de son champ
de compétences, mais qui est non assurée dans le poste actuel. Un
professionnel de santé qui possède une qualification d’esthéticienne qui est
autre que le métier qu’il exerce aujourd’hui, va lui permettre de mettre en place
une activité sur le soin de confort corporel tel que " le massage ". Dans ce cas
la personne possède une compétence ne relevant pas de son métier d’origine,
mais elle peut l’exercer car elle peut être associée à celui-ci. C’est également le
cas pour un professionnel qui reçoit une formation spécifique qui lui confère
une nouvelle compétence. S’il est reconnu compétent, il sera sollicité, puis
extrait de son poste initial, pour répondre à un besoin identifié. Posséder
plusieurs domaines de compétences reste un atout pour le professionnel et
pour le manager.
Selon le guide du travail, la polyvalence est : « l’aptitude d’un salarié à occuper
plusieurs emplois ou activités différentes au sein d’une même entreprise ». [3]
Il propose différentes formes de polyvalence :
-
La polyvalence verticale : Le salarié exerce des fonctions relevant d’une
qualification professionnelle supérieure à sa qualification initiale.
-
La polyvalence horizontale : Le salarié occupe différents postes de
travail relevant du même niveau de classification. C’est la flexibilité qui
est demandée aux agents.
17
-
La polyvalence structurelle : Elle est liée à l’activité et à la structure de
l’entreprise. Les professionnels peuvent être amenés si leur contrat le
stipule par une clause de mobilité, à bouger géographiquement sur le
site de l’établissement, voire sur le département ou la région. La
polyvalence structurelle est conditionnée par le contexte économique
actuel qui demande aux établissements de s’adapter selon la
gouvernance hospitalière.
La polyvalence horizontale et la polyvalence structurelle sont deux modes très
proches que l’on retrouve dans le monde du travail hospitalier. Je fais le choix
de développer plus particulièrement la polyvalence horizontale car c’est celle
que l’on retrouve dans les services de soins, donc plus proche de ma
problématique de départ.
•
La polyvalence horizontale
Cette polyvalence est liée à l’activité d’un service voire à la diversité des
activités, des postes de travail. Elle permet de rétablir un équilibre de charge de
travail en fonction du niveau d’activité. Le but est d’avoir du personnel
possédant une compétence spécifique et qui serait disponible pour effectuer
ses missions dans le service où le besoin se fait sentir. L’objectif pour les
structures reste d’assurer une production quantitative et qualitative. Dans le
milieu de la santé, un professionnel qui exerce dans un service d’hospitalisation
et qui est formé pour assurer également des consultations, sera sollicité pour
assurer ce poste. Sa polycompétence permet cette polyvalence. On retrouve
dans la polyvalence horizontale également la mobilité des professionnels. Le
professionnel a une qualification initiale, ce pourquoi il a été embauché mais il
peut être sollicité pour qu’il la mobilise dans un autre contexte. Sur les périodes
de week-end et de congés annuels, le personnel assure ainsi la continuité du
travail. Cette mobilité peut être une contrainte d’organisation imposée à tous les
employés et ce dès leur prise de poste.
18
La flexibilité demandée aux agents et la diversité des postes occupés dans la
polyvalence horizontale engendrent une organisation de travail où la mobilité
semble nécessaire.
2.1.2 Un incontournable de la polyvalence : La mobilité
Pour les générations précédentes, le métier s’exerçait durant toute la vie.
Aujourd’hui, les professionnels n’ont plus cette assurance et certaines
personnes verbalisent d’ailleurs le besoin de changer de profession au cours de
leur vie. Pour les structures hospitalières, la mobilité est aujourd’hui une
solution envisagée pour mutualiser les moyens humains.
Selon la définition du dictionnaire Larousse la mobilité est une « Propriété,
caractère de ce qui est susceptible de mouvement, de ce qui peut se mouvoir
ou être mû, changé de place, de fonction ». [4]
Dans la littérature traitant de la gestion des ressources humaines, la mobilité
est envisagée selon trois dimensions qui sont :
-
La mobilité verticale : Il s’agit de la promotion. Le professionnel monte
en grade et prend des responsabilités autres souvent accompagnées
d’une augmentation dans sa rémunération. On parle de mobilité interne
si celle-ci s’effectue au sein de l’entreprise ou de mobilité externe si
l’employé part vers une autre structure.
-
La mobilité environnementale : Il s’agit de la mutation. Le professionnel
quitte l’établissement mais garde le bénéfice de son grade, de son
ancienneté.
-
La mobilité horizontale : Il s’agit d’un changement d’emploi. Le
professionnel mobilise des compétences. En effet, selon Nicole
RAOULT : « elle correspond à un changement de métier ou d’emploi.
Ce changement demande à l’agent de faire appel à des compétences
qu’il exerçait auparavant ou du moins de la même manière » [5, p.242].
19
Il s’agit d’une activité transversale. Le professionnel qui détient une
compétence spécifique, va permettre grâce à sa mobilité de faire bénéficier
toute la structure de cette compétence. Dans le monde du travail, la mobilité du
personnel peut être un atout. La charge de travail est souvent fluctuante et
amplifiée selon les moments de la journée ou de la semaine. La mobilité des
professionnels permet d’harmoniser et de répartir la charge de travail
engendrée à un moment donné. Un agent qui est mobile peut aider l'équipe
qu'il va suppléer au travers de ses compétences, et en parallèle développer les
siennes grâce à l'équipe accueillante.
G.DEVRED précise que « Le développement nécessaire de la mobilité, au
travers de la polyvalence, doit être conciliable avec un impératif de « qualité »
de la prestation-clientèle et un impératif de «compétence» des professionnels »
[2, p106].
Il est essentiel pour le professionnel que la qualité des soins soit associée à la
prise en charge des patients. Sans quoi il risque de ne pas adhérer à un mode
de polyvalence nécessitant une mobilité. Ce mode de fonctionnement de travail
doit apporter un bénéfice partagé. Le client a ses exigences de prestations et
des droits. Le professionnel a ses projets de carrière et attend une certaine
qualité de vie au travail. La mobilité recherchée dans le but de satisfaire aux
besoins de la structure doit prendre en compte ces deux critères. En effet un
professionnel doit être reconnu compétent pour assurer un travail de qualité.
Suite à ce travail de recherche la différence entre polyvalence et mobilité me
permet de penser que la mobilité semble être un moyen de développer la
polyvalence.
2.1.3 La polyvalence infirmière
Afin de pallier l’absentéisme du personnel et d’assurer les remplacements des
congés annuels, la polyvalence semble devenir une nécessité déjà déployée
depuis de nombreuses années au sein des structures de soins.
20
En effet la polyvalence est déjà un concept ancien, puisque Pierre JOANNON,
médecin, la décrit pour la première fois en 1930 en déclinant « les quatre
domaines d’activité de l’infirmière polyvalente : l’hôpital, la lutte contre certains
fléaux sociaux, le sanitaire et le social » [6, p.92].
Le métier infirmier évolue, les connaissances et les compétences s’ajustent au
progrès, et l’environnement de travail est en mouvance. Dans ce contexte,
Géraldine DEVRED parle d’une polyvalence infirmière qu’elle qualifie de
«circonscrite » afin de permettre :
« Une bonne qualité de la prestation client, un épanouissement personnel et
professionnel du personnel, une gestion efficiente des ressources humaines ».
Dans le paragraphe précédent sur la mobilité, il y a pour cette auteure deux
exigences recherchées, qui sont « la qualité » et « la compétence ». Dans le
monde hospitalier, travailler en polyvalence signifie souvent être mobile et de
ce fait Géraldine DEVRED suggère de limiter la polyvalence à deux ou trois
domaines d’activités pour pouvoir trouver le « bon rapport entre compétence et
qualité de prestation à fournir au patient ». [1, p.112]
En effet, être infirmier polyvalent demande au professionnel d’avoir des
aptitudes ou des compétences dans d’autres domaines, d’autres spécialités
que celles pour lesquelles il est actuellement compétent. Il s’agit pour
l’infirmier(e) d’élargir son champ d’activité à d’autres prises en soins des
patients. Il peut donc avoir l’impression de perdre de son expertise s’il faut qu’il
partage son temps de travail sur différentes activités.
Cependant, il ne lui est pas forcement demandé d’être pointu en savoirs et
connaissances mais de les élargir et les transférer dans un autre contexte de
travail. C’est pour cela que G.DEVRED suggère de limiter la polyvalence à
seulement deux voire trois domaines d’activités. Le professionnel risque de se
trouver en difficulté voire en échec si la prise en charge de la personne soignée
ne correspond pas à ses critères de qualité (ou n’est pas conforme à ses
attentes (ou ses valeurs)).
21
Pour G. DEVRED, la polyvalence doit être :
-
Sectorielle
Elle définit, délimite le champ d’intervention. Elle concerne un secteur d’activité
déterminé. Elle favorise le décloisonnement et permet les échanges
professionnels.
Une
période
d’apprentissage
semble
nécessaire
afin
d’organiser cette polyvalence dans un climat de sécurité.
Exemple : sur plusieurs services de médecine ou sur un domaine d’activité qui
comporte deux spécialités (hématologie, rhumatologie), ou sur une même
spécialité (ORL en hospitalisation, bloc, consultation), ou bien une zone
géographique.
-
Managée
Parmi mes diverses lectures sur la polyvalence en milieu hospitalier, j’ai relevé
cette citation de G DEVRED : « la polyvalence est insuffisamment managée à
l’hôpital, ce qui induit les multiples interprétations, les résistances, les
incompréhensions…» [1, p.113]. Dans une politique d’établissement, il
appartient au cadre de santé de s’interroger sur l’organisation. Il s’agit pour lui
de recenser les besoins afin de piloter au mieux cette polyvalence. Les outils
nécessaires à cette mise en œuvre et à son suivi doivent être prévus. Le cadre
doit avec son équipe identifier les compétences, afin de définir avec chaque
employé ses axes d’amélioration et de mettre en place les mesures
nécessaires pour parvenir au niveau de compétence attendu pour exercer en
polyvalence.
-
Organisée
La formalisation des organisations soignantes (harmonisation des pratiques,
uniformisation de l’organisation des espaces de travail et de rangements) et la
planification des durées d’exercices des infirmiers dans les différents secteurs
doivent être connues et appliquées. L’adhésion au changement est d’autant
plus acceptée par le professionnel qu’il participe activement en prenant part à
des réunions de travail en vue d’une organisation commune à l’ensemble des
services de la structure.
22
Une polyvalence planifiée à l’avance permet à l’agent de se projeter dans le
temps. Le stress et l’inquiétude qui peuvent être générés seront mieux gérés.
Selon Patrick MICHELETTI : « la polyvalence organisée est systématiquement
recherchée, soit par la structure, soit par le salarié, soit par les deux. Elle
présente la caractéristique d’une non spontanéité » [2, p.44].
2.1.3.1
Les avantages de la polyvalence :
Ils sont multiples.
Selon l’auteur G. DEVRED « Les avantages relatés de la polyvalence
témoignent des nombreuses possibilités d’adhésion des personnels à une
organisation polyvalente, à condition qu’elle soit comprise, anticipée et
négociée » [7, p.40].
-
Pour la structure
Pour l’entreprise, la polyvalence peut être bénéfique de plusieurs manières.
Tout d’abord dans un souci de partage d’expériences et de connaissances,
favorisant le développement des compétences de ses salariés, ainsi que de
l’activité réalisée. Un autre avantage est de développer une cohésion plus large
que secteur par secteur et ainsi favoriser une véritable culture de l’entreprise.
La polyvalence est pour l’institution, une possible réponse organisationnelle à
promouvoir afin de concilier contraintes, objectifs économiques et exigences
des patients. La polyvalence permet l’utilisation des compétences au sein de
l’entreprise et évite d’avoir recours au personnel extérieur ou intérimaire qui eux
auront besoin d’un temps d’adaptation pour accomplir la mission qui leur est
confiée.
-
Pour le patient
Ils sont pour le patient une assurance de continuité des soins. Le patient aura
grâce à un effectif de personnel conservé, la garantie de recevoir des soins
adaptés et de qualité. Le personnel travaillant en polyvalence est habilité à
dispenser ces soins et se doit d’avoir des compétences requises pour un tel
poste.
23
La personne soignée peut ainsi bénéficier de soins par un infirmier ayant des
compétences spécifiques dans un domaine particulier. La polyvalence améliore
la compétence collective.
-
Pour le professionnel
Ils sont pour les soignants une opportunité de mettre à jour leurs
connaissances, de développer des compétences, mais aussi de répartir les
charges de travail. Etre polyvalent permet d’éviter une certaine routine et
favorise la reconnaissance de ses compétences par ses pairs et sa hiérarchie.
Cela offre à l’agent l’opportunité de connaitre d’autres professionnels, de
partager des expériences et confronter des pratiques. Ces infirmiers peuvent
transmettre l’envie de vivre cette expérience aux autres membres de l’équipe
en relatant un vécu positif de cette situation de travail. L’objectif pour un cadre
est d’assurer la continuité des soins en maintenant un effectif minimum de
personnel auprès des patients. Le cadre combine ainsi la continuité, la sécurité
et la qualité de la prise en soins.
2.1.3.2
-
Les limites de la polyvalence :
Pour la structure
G. DEVRED, dans son étude sur le sujet à l’hôpital en 2001, montre que
l’organisation du travail est le frein dominant à la polyvalence. Le manque
d’uniformisation des protocoles, de la gestion des matériels, des commandes
mais aussi celle des plannings de travail entraine une perte de repères et
génère du stress chez les professionnels.
-
Pour le patient
Cette polyvalence est censée assurer une continuité des soins mais au
détriment de la relation qui ne pourra s’instaurer dans la durée s’il ya une forte
rotation de personnel. Comment le patient peut-il se repérer avec une telle
organisation ? En effet, trop de personnels différents avec une organisation où
les rotations sont fréquentes peuvent fragiliser les repères d’un patient âgé,
confus ou désorienté.
24
Certains patients ont besoin d’avoir une personne référente, ressource, qui les
guide, les resitue dans le contexte des soins. Face à un patient anxieux ou à un
enfant, un turn-over trop important de personnel infirmier ne facilitera pas la
mise en place d’une relation de confiance.
-
Pour le professionnel
Les soignants peuvent ressentir un mal être, avoir l’impression d’être un pion,
de subir cette polyvalence surtout si celle-ci est mal anticipée. La notion
d’insécurité est évoquée si les soignants ne sont pas, ou sont insuffisamment
accompagnés. Si la polyvalence n’est pas bien organisée, planifiée, l’agent
risque de se fatiguer et de se démotiver surtout s’il n’y a pas de continuité dans
la prise en soins des personnes soignées. En effet, la priorité des transmissions
faite sur les soins à effectuer est au détriment d’une information sur les
habitudes de vie du patient. Une frustration peut ainsi naitre chez l’infirmière.
En effet, la prise en soins du patient, réalisée de façon morcelée, peut être
vécue comme insatisfaisante par le soignant.
« L’incertitude et la crainte font de la polyvalence un risque à ne pas prendre.
Une polyvalence subie et improvisée devient synonyme de déqualification
professionnelle, de baisse de la qualité des soins, de charge physique et
psychologique de travail accrue… » [7, p.40].
Une polyvalence vécue de façon contrainte, peut engendrer une baisse de
motivation de l’agent. La peur de ne pas être à la hauteur des attentes de sa
hiérarchie ou de ne pas savoir exécuter des actes de soins voire de ne pas
s’adapter aux exigences du poste ou de l’équipe est un énorme frein pour une
telle prise de risque. Le rôle du manager est de capitaliser les expériences de
son personnel, afin de répartir et manager au mieux leurs compétences, pour
obtenir une organisation efficace et qui se pérennise.
P.MICHELETTI fait un constat similaire, il dit que : « La polyvalence peut être
considérée comme un moyen de déstructuration ou de déqualification de
l’individu » [2, p.80]. L’accompagnement que mettra en place le cadre
conditionnera la mise en place d’une organisation de travail propice à l’équilibre
et l’épanouissement professionnel des agents.
25
Il s’agit pour le cadre d’avoir une très bonne connaissance de son équipe pour
être judicieux dans ses choix. La communication et la concertation sont à
privilégier dans la mise en place d’un tel projet. L’agent non mis en confiance
aura du mal à adhérer à ce projet si le cadre ne lui offre pas cet
accompagnement, dont il a besoin pour se sentir qualifié.
2.1.4 La polyvalence infirmière, un postulat dès la formation initiale
« L’émergence de la polyvalence est favorisée par le souhait d’un nouveau
profil infirmier défini par le programme du diplôme infirmier, suite à l’arrêté du
23 mars 1992 » [6, p.92].
En effet, c’est dès 1992 que le programme des études infirmières a pour
objectif de former des professionnels aptes à répondre aux besoins de santé et
pouvant travailler dans tous les secteurs d’activités. Les qualités attendues des
futures infirmières sont la polyvalence, l’autonomie et la responsabilisation.
A ce jour, le nouveau référentiel de formation précise qu’il « a pour objet de
professionnaliser le parcours de l’étudiant. Les professionnels formés sont
compétents, capables d’intégrer plus rapidement de nouveaux savoirs et savent
s’adapter à des situations variées » [8].
Les études en soins infirmiers imposent aux étudiants de travailler trois paliers
d’apprentissage qui sont :
-
Comprendre : L’étudiant acquiert les différents savoirs, savoir-faire.
-
Agir : l’étudiant agit et évalue son action en mobilisant ses savoirs.
-
Transférer : l’étudiant est dans la capacité de transposer ses acquis
dans de nouvelles situations professionnelles.
Le référentiel de formation infirmière actuel place l’approche par compétences
au cœur du dispositif de cette formation. Les IFSI développent ainsi les
compétences des étudiants afin de les rendre polyvalents.
26
Tout au long de leur formation en alternance, les étudiants développent des
capacités d’adaptation en changeant de lieux de stage. Ils s’approprient cet
esprit de polyvalence au fil de leurs trois années d’études. La formation
infirmière doit pouvoir assurer à l’étudiant d’être un professionnel capable
d’analyse, de discernement dans sa pratique de soignant.
Cependant, René MAGNON, infirmier, a écrit « Cette polyvalence ne rend pas
apte immédiatement tous les étudiants à exercer avec expertise » [9, p.114]. Le
diplôme d’état nous confère des connaissances théoriques et pratiques mais
l’expertise viendra seulement avec l’expérience. Cet auteur démontre qu’un
jeune infirmier diplômé qui est donc débutant, possèderait les armes pour
développer des compétences lui permettant d’être polyvalent mais que seule
l’expérience lui apporterait de l’expertise.
Dans le monde de la santé, la polyvalence correspond à un ensemble de
missions
plutôt
généralistes.
Les
formations
initiales
des professions
paramédicales y compris en soins infirmiers sont essentiellement polyvalentes.
Les diplômes autorisent l’exercice professionnel, dans un grand nombre de
spécialités. Cette notion de polyvalence s’oppose à celle de spécialiste ou
d’experte que l’on retrouve dans le Taylorisme qui est : « une méthode de
travail qui préconise l’organisation scientifique du travail grâce à une analyse
détaillée des modes et techniques de production dans le but d’obtenir la
meilleur façon de produire, de rémunérer et donc le meilleur rendement
possible » [10]. Il s’agit pour Frederick TAYLOR d’affecter un homme à une
tâche de travail, c’est ce que l’on appelle « le travail à la chaine ». On ne
demande pas au salarié de réfléchir, juste d’agir de façon précise, répétitive. Ce
procédé fait de l’employé une personne qui maitrise parfaitement son travail.
Plus tard, dans les années 1980, le toyotisme améliorera cette organisation de
travail puisque Taïichi OHNO met en place la rotation des postes,
l’élargissement et l’enrichissement des tâches, la notion d’autonomie des
salariés dans l’organisation du travail et la notion de qualité des produits.
27
Cette organisation de travail s’apparente plus à ce que le monde du travail est à
ce jour. La réflexion est admise et même demandée à l’employé pour l’intégrer
dans une démarche de recherche de qualité.
Les différentes approches des auteurs concernant la polyvalence mettent en
évidence la notion d’aptitude à occuper plusieurs postes, la capacité
d’adaptation à un nouvel environnement, à une nouvelle organisation. Ils
s’accordent pour dire que la personne polyvalente possède plusieurs domaines
de compétences.
La polyvalence revêt trois formes mais une seule retient mon attention plus
particulièrement car elle est en lien avec ma problématique. Il s’agit de la
polyvalence horizontale car on la retrouve dans le milieu hospitalier, au sein
d’un pôle ou d’une équipe. La polyvalence engendre une organisation de travail
où la mobilité semble nécessaire. Est-ce un hasard ? La polyvalence et la
mobilité vont-elles de pair ?
Atout pour l’employeur en termes de redéploiement du personnel selon la
charge de travail, cette polyvalence sectorielle, managée et organisée présente
des avantages et des inconvénients.
La notion de développement de compétences est bien présente dans la
polyvalence
infirmière.
La
polyvalence
engendre
nécessairement
un
questionnement sur la compétence du professionnel. Je vais donc maintenant
approfondir ce concept.
2.2
LA COMPETENCE
Mais qu’entend-on par compétence ?
Elle semble être une valeur reconnue dans le monde du travail. Mais en milieu
hospitalier, de quelle manière l’infirmière est-elle concernée par l’acquisition et
la mobilisation de ces compétences au cours de son parcours professionnel ?
28
Je choisis d’aborder ce concept à travers différents prismes d’auteurs, puis je
zoomerai sur la compétence infirmière. Pour finir, j’exposerai le rôle du cadre
dans sa pratique managériale sur le développement des compétences de ses
collaborateurs.
2.2.1 Définitions
Selon Philippe ZARIFIAN « La compétence est une intelligence pratique des
situations qui s’appuie sur des connaissances acquises et les transforme, avec
autant plus de force que la diversité des situations augmente » [11, p.69].
Pour cet auteur, l’individu s’engage pleinement. Il ne reproduit rien
d’automatique, il initie du renouveau en s’adaptant à la situation. Il possède des
connaissances qu’il sait mobiliser et transférer voir transformer. Il apporte
également une notion de partage et de coopération entre individu. Selon lui
l’interdisciplinarité prend là tout son sens. Etre compétent est donc également
reconnaitre compétents d’autres professionnels, savoir solliciter ces acteurs à
bon escient, autour d’une même situation ou problématique de travail. C’est
aussi accepter de partager des responsabilités en s’engageant dans un projet
qui se veut commun.
R.WITTORSKI rejoint P.ZARRIFIAN dans ses propos pour donner la définition
suivante : « La compétence est produite par un individu ou un collectif dans une
situation donnée. Elle correspond à la mobilisation dans l’action d’un certain
nombre de savoirs combinés de façon spécifique en fonction du cadre de
perception que se construit l’acteur de la situation » [12, p29].
Pour cet auteur la notion de compétence est composée de trois champs :
•
Biographie et parcours de socialisation : toute son histoire personnelle
joue un rôle dans l’évolution des compétences de l’individu.
•
L’expérience professionnelle.
•
La formation.
29
Ces deux auteurs s’accordent à dire que les compétences s’acquièrent grâce
aux connaissances apprises mais qu’elles sont reconnues lorsque la personne
les possédant les mobilise à bon escient dans des contextes différents.
Selon Guy LE BOTERF, « la compétence est une certaine combinaison de
capacités ou d’aptitudes pour résoudre un problème donné ». Il s’agit « d’un
savoir agir » qui n’est pas l’addition mais la combinaison de plusieurs savoirs
en situation de travail [13, p17].
Le savoir agir : Dans une organisation Taylorienne, le professionnel exécute
son travail avec des consignes précises. Il détient une compétence définie en
termes de « savoir-faire en situation ». Dans une organisation faisant appel à la
polyvalence, le professionnel exécute son travail en s’adaptant à
l’environnement en faisant preuve d’initiatives. Cette compétence requise est
définie en terme de « savoir agir en situation ». Le professionnel est donc
reconnu compétent lorsqu’il sait s’adapter à diverses situations. Pour cela il doit
combiner plusieurs compétences et les mobiliser avec pertinence.
Le pouvoir agir : L’autonomie du professionnel et les moyens mis à sa
disposition par le manager favorise la mise en œuvre de l’action. La capacité du
professionnel à interroger et à mobiliser un réseau est tout aussi nécessaire.
Le vouloir agir : C’est pour le professionnel l’opportunité de donner du sens à
son travail. Cela demande une certaine assurance, une confiance en soi. Etre
reconnu dans sa fonction est également un levier de motivation à vouloir agir.
Le savoir combiné : Il s’agit là, non pas d’additionner les compétences, mais de
faire en sorte qu’elles soient sélectionnées, mobilisées et organisées de façon
adaptée. « La compétence est donc une combinatoire ».
Pour lui, il existe deux modèles de compétences, qui se différencient mais se
complètent aussi dans les organisations.
30
Le premier modèle considère le professionnel comme un exécuteur de tâches
bien définies. Ce travail correspond à une conception taylorienne du travail.
« La compétence fait l’objet d’un management par le contrôle » [14, p91]. Il n’y
a pas de place pour l’initiative. L’agent exécute son travail avec l’objectif d’une
réalisation attendue, sans réflexion associée.
Le deuxième modèle de compétence pressenti dans le contexte budgétaire
d’aujourd’hui considère le professionnel comme un acteur. Il agit après réflexion
sur la manière la plus pertinente de réaliser son travail. La personne va
mobiliser voire combiner ses connaissances et ses aptitudes afin d’adopter une
posture professionnelle et des actes adaptés au mieux à la situation de travail.
« Le professionnel n’est pas celui qui possède des savoirs ou des savoir-faire,
mais celui qui sait les mobiliser dans un contexte professionnel » [14, p50].
Tous ces auteurs s’accordent à dire que la compétence est un ensemble de
connaissances combinées qui sont à mobiliser et à savoir transférer autant de
fois que les situations le demandent. La capacité d’adaptation aux différentes
situations est donc un facteur indispensable pour le professionnel.
2.2.1.1
La compétence infirmière
Dans les instituts de formation en soins infirmiers, l’approche pédagogique de
l’apprentissage est basée sur l’acquisition de compétences en situations. En
effet, la compétence est au centre du dispositif de formation initiale.
Patricia BENNERT s’appuie sur le modèle de DREYFUS (mathématicien) et
DREYFUS (philosophe) pour nous démontrer que l’étudiant passe par plusieurs
stades successifs pour acquérir et développer une compétence. Il serait
d’abord :
-
Novice : L’étudiant n’a aucune expérience. Les formateurs le préparent
en travaillant sur des situations emblématiques, afin de lui permettre de
comprendre les situations de travail qu’il va rencontrer et ainsi l’aider à
développer des compétences.
31
La pratique de l’étudiant est limitée et ses actes ne sont pas forcément
adaptés. Le tutorat dès l’arrivée sur son terrain de stage permet un
guidage. L’infirmier novice n’a pas d’expérience face aux situations qu’il
va rencontrer.
-
Débutant : l’étudiant a une expérience de situation réelle, il peut faire
des liens entre la théorie et la pratique, mais ne sait pas encore prioriser
ses actes et sa prise en charge n’est pas optimale. L’infirmier débutant
doit encore apprendre à distinguer les priorités dans les diverses
situations de travail rencontrées. C’est le cas de l’infirmier nouvellement
diplômé.
-
Compétent : l’étudiant sait planifier et organiser son travail, il est en fin
de stage, ou en fin de formation. Les priorités sont adaptées à la
situation.
L’étudiant n’a pas toute la dextérité requise mais est apte à faire face aux
situations imprévues. L’infirmier compétent maitrise les situations et est capable
d’y faire face même dans des cas d’urgence. Il analyse les problèmes et
planifie des projets de soins. C’est après plusieurs années d’expériences que
ce professionnel se sentira compétent.
-
Performant : L’infirmier se base sur son expérience pour avoir une
attitude professionnelle d’instinct cohérente et adaptée aux situations. Il
sait s’adapter et réorienter ses priorités. Il s’appuie encore dans sa
pratique sur des règles et une analyse. Ce professionnel perçoit les
situations de travail dans leur globalité.
-
Expert : L’infirmier est très expérimenté. Il a une vision intuitive des
situations. « L’infirmier expert cultive la notion« de ce qui est possible »
» [15]. Il possède des capacités d’adaptation et un niveau élevé de
compétence. Ce professionnel est reconnu pour ses jugements
cliniques pertinents et pour ces capacités à gérer efficacement des
situations très complexes.
32
L’infirmier peut se décrire expert si les compétences acquises et mobilisées
sont évaluées et validées par son supérieur hiérarchique et ce tout au long de
son parcours professionnel. L’accompagnement des étudiants et des nouveaux
infirmiers
par
des
professionnels
expérimentés,
favorise
une
professionnalisation de qualité.
La mobilité de certains professionnels les amène à partager des expériences,
des savoirs et des compétences avec d’autres agents.
Mais peut-on être compétent tout seul, lorsque l’on exerce une profession où
l’on est amené à travailler en équipe ?
2.2.1.2
La compétence collective
Parmi les définitions proposées par des auteurs en référence à la compétence
collective, je choisis d’en retenir deux qui sont les suivantes :
DEJOUX (1998) propose « ensemble de compétences individuelles des
participants d’un groupe plus une composante indéfinissable, propre au groupe,
issue de la synergie et de la dynamique de celui-ci » [16 p11].
BATAILLE (2001) considère qu’il s’agit de « la capacité reconnue à un collectif
de travail de faire face à une situation qui ne pourrait être assumée par chacun
de ses membres seul » [16 p.11].
Le professionnel qui agit avec compétence le fait en se servant dans ses
ressources personnelles qui sont ses connaissances, son vécu, ses
expériences. Il puise également dans son environnement, auprès de ses
collègues et autres professionnels. L’individu ne peut pas être performant seul
de façon permanente sur toutes les tâches de travail. Il convient pour lui de
s’informer et de chercher les compétences chez les collègues qui les
possèdent. Lors de travaux de groupe la compétence collective et la
coopération sont nécessaires et indispensables, tout comme lors d’un projet de
service où toute une équipe est concernée.
33
Il y a donc nécessité d’une volonté à travailler ensemble. Les personnes qui
constituent
le
collectif
partagent
des
règles
communes,
un
langage
professionnel commun afin de communiquer aisément. Pour résoudre des
problématiques qui leur sont communes, ils recherchent et prennent des
décisions dites collégiales.
Il y a des liens assez forts entre polyvalence, compétence et mobilité. Selon
Simone DUMAS : « La mobilité qui s’impose de plus en plus dans les hôpitaux
sera source d’amélioration des soins par la richesse des qualités des uns et
des autres » [17, p10]. La mobilité utilisée comme moyen pour développer une
polyvalence permet un brassage de compétences de multiples professions et
de
complémentarité.
Etre
un
professionnel
mobile
nécessite
une
réactualisation de ses compétences et une acquisition de nouvelles, d’en
acquérir d’autres en vue de maintenir un niveau d’exercice professionnel
personnel
et
collectif.
La
mobilité
permet
un
partage
d’expériences
interdisciplinaires et mobilise ainsi les compétences d’un groupe.
Les compétences collectives dépendent donc des compétences individuelles.
Tel un entraineur sportif, le cadre de santé, s’il arrive à mobiliser les
compétences de chaque membre de l’équipe, parviendra à fédérer ce groupe
autour d’un projet.
2.2.2 Manager et développer les compétences
•
Le rôle du cadre de santé :
« Le management de la compétence ou du professionnalisme est un
management par le pilotage » [14, p.92].
Le cadre s’efforce d’agir dans un contexte ou un environnement propice à
l’émergence de la compétence du professionnel. Piloter c’est guider mais aussi
accompagner l’équipe.
34
En effet, il est au carrefour entre la direction et les équipes, et son rôle parait
essentiel en matière de mobilité. Pour cela, il doit explorer certaines pistes de
réflexion.
-
Donner du sens
Il s’agit d’expliquer et d’argumenter le besoin pour l’établissement de
développer la polyvalence. Ces explications vont limiter, voire éviter les
objections et les résistances. Elles offrent aux agents la liberté d’être acteur sur
la base du volontariat. Faire participer les infirmiers à une réflexion autour d’une
nouvelle organisation En travaillant en groupe, sur la polyvalence, la mobilité,
en abordant la notion de mutualisation du personnel au sein d’un pôle, le cadre
de santé va amorcer une réflexion d’équipe. Ce travail contribue à lever les
craintes, partager, confronter des idées. Cette implication des agents participe
à leur adhésion.
-
Reconnaitre et valoriser les compétences du professionnel infirmier.
La reconnaissance est un moyen pour le cadre de remercier ses agents pour
leur participation, leur implication dans la mise en place d’un projet. Etre
polyvalent requiert des compétences et un engagement. L’agent appréciera
d’être valorisé par son travail. L’accompagnement que met en place le cadre de
santé contribue à identifier les compétences avérées et celles nouvellement
acquises : compétences qu’il mobilisera en fonction des besoins identifiés.
Selon Corinne ORLUX « il faut s’interroger sur la façon dont le cadre de santé
peut développer et valoriser leurs compétences individuelles mais également
sur son rôle dans la transmission des compétences collectives » [18, p.56].
Cette partie conceptuelle apporte des éléments de compréhension en regard
de ma problématique. Les entretiens réalisés auprès de professionnels cadres
de santé et infirmiers vont éclairer ma recherche nécessaire à ce travail. La
partie suivante va donc relater les résultats obtenus.
35
3. METHODOLOGIE
36
3.1
METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Ce travail de recherche basé sur le recueil de données à partir d’entretiens
réalisés sur le terrain a nécessité une rigueur méthodologique. Dans cette
partie, je vais décrire toutes les étapes.
3.2
CHOIX DE LA METHODOLOGIE D’ENQUETE
Pour mener ce travail de recherche, la méthodologie retenue par l’équipe
pédagogique de formation cadre est celle de l’entretien semi-directif. Il a pour
avantage de permettre aux personnes interviewées de s’exprimer librement sur
le thème choisi. L’entretien semi-directif est un moyen intéressant pour recueillir
le ressenti, les attentes des personnes.
3.3
L’ENTRETIEN SEMI-DIRECTIF
R. QUIVY et L.VAN CAMPENHOUDT déclarent que le chercheur doit
rechercher : « un véritable échange au cours duquel l’interlocuteur du
chercheur exprime ses perceptions d’un évènement ou d’une situation, ses
interprétations ou ses expériences, tandis que, par ses questions ouvertes et
ses réactions, le chercheur facilite cette expression, évite qu’elle s’éloigne des
objectifs de la recherche et permet à son vis-à-vis d’accéder à un degré
maximum d’authenticité et de profondeur » [19].
L’interviewer doit redoubler d’attention et maintenir une certaine concentration
pour mener et recueillir des propos en lien avec la problématique et
l’hypothèse. Il doit recentrer le fil du discours si celui-ci sort du cadre souhaité.
Toutefois, il est important de laisser à la personne interviewée une liberté
d’expression pour qu’elle livre son vécu d’expérience. La reformulation peut
être utilisée pour conforter les propos entendus, mais en étant vigilant pour ne
pas influencer le professionnel.
37
Cette méthodologie me permettra de recueillir les données nécessaires pour
confirmer ou infirmer mon hypothèse de travail : La polyvalence bien managée
élargit le champ de compétence de l’infirmier(e) en conservant la qualité des
soins.
Lors de chaque rencontre avec le professionnel interviewé, j’énonce les règles
suivantes :
•
L’anonymat
•
La confidentialité
•
Le volontariat
3.4
ELABORATION DES CANEVAS D’ENTRETIEN
L’entretien semi-directif nécessite l’élaboration d’un canevas d’entretien, qui est
la trame et le scénario de l’enchainement des questions. Son utilité est de
conduire les échanges par des questions ouvertes, laissant toute liberté à
l’interviewé. Il permet au chercheur d’être exhaustif dans ses questions et de
recentrer les échanges si nécessaire avec des questions de relance. J’élabore
deux canevas d’entretien afin de vérifier l’hypothèse. Je cherche à recueillir
auprès de la population infirmière leurs impressions quant à cette expérience,
et auprès des cadres de santé leur mode de management de cette polyvalence.
Une première question est commune aux deux catégories de personnel
interviewé.
Canevas destiné aux entretiens auprès d’une population infirmière [annexe 1]
Le canevas est organisé ainsi :
Je me renseigne dans un premier temps, sur certains déterminants sociaux afin
de voir si certains peuvent être des facteurs influençant.
Tout comme avec les cadres de santé, je leur demande leur définition de la
polyvalence. Je souhaite découvrir comment les infirmiers perçoivent et vivent
cette expérience de polyvalence. Quel rôle le cadre de santé a-t-il dans cet
accompagnement de mode de travail qu’est la polyvalence ?
38
Canevas destiné aux entretiens auprès de cadre de santé [annexe 2]
Le canevas est organisé ainsi :
Je me renseigne sur certains déterminants sociaux afin de voir si certains
peuvent être des facteurs influençant. Je pense plus particulièrement à leur
parcours professionnel.
Je leur demande leur définition de la polyvalence, puis quelle vision globale ontils de celle-ci dans leur établissement, leur pôle, leur service ?
Je m’intéresse à leur management, et aux effets de la polyvalence, constatés
par le cadre sur le niveau de compétences des infirmiers.
3.5
CHOIX DU LIEU ET DE LA POPULATION
Souhaitant retrouver le même contexte auquel j’ai été confronté pendant ma
période de faisant fonction de cadre de santé, j’expose à mon directeur de
mémoire le souhait de réaliser mes entretiens dans un établissement de
capacité d’accueil similaire au mien (90 lits) et au sein d’un CHU afin de
confronter les données recueillies. Notre choix se porte sur une population de
cadre de santé car ils sont les managers de professionnels polyvalents et sur la
population infirmière car elle est concernée par cette polyvalence.
Avant de réaliser mes entretiens, je rédige un courrier de demande
d’autorisation à la direction des soins de quatre établissements de taille
moyenne de la région. Je fais la même démarche auprès d’un CHU. Je leur
envoie un mail avec en pièce jointe ce courrier. Dans ce mail je précise que je
souhaite interviewer des professionnels étant concernés par ce mode de
management. Je vais obtenir deux réponses négatives argumentées par le fait
que la polyvalence n’est pas développée dans leur structure. Pour un autre
établissement, je n’obtiendrai pas de réponse. Seule une structure de moyenne
taille ainsi que le CHU répondront favorablement.
En première intention, je devais réaliser deux entretiens auprès de cadre de
santé et quatre auprès d’infirmiers soit au total six entretiens. Apres réflexion et
en accord avec mon directeur de mémoire, je décide de réaliser quatre
entretiens auprès de cadres de santé.
39
En effet je crains de manquer d’éléments comparatifs en interviewant
seulement un cadre exerçant dans une grande structure et un autre sur une
petite structure. Je choisis de répartir ainsi deux entretiens vers deux cadres
sur chaque type de structure.
Les entretiens se déroulent du 4 mars au 18 mars 2015.
3.6
LES ENTRETIENS
Avant de commencer chaque entretien, j’explique aux différentes personnes
interviewées que je suis étudiante à l’Institut de Formation des Professions de
Santé de Besançon et que dans le cadre de mes études je réalise un mémoire.
Je déroule mon parcours professionnel ce qui me permet de faire le lien avec le
thème abordé mais de manière succincte afin de ne pas influencer la
discussion. Je demande l’autorisation d’enregistrer la discussion, ce qui
m’aidera à restituer fidèlement leurs propos lors de la retranscription. Ces
précisions permettent d’instaurer un climat de confiance et de faciliter les
échanges. J’explique le déroulement de l’entretien et je choisis de commencer
par la liste des déterminants sociaux (âge, année d’obtention diplôme etc.…).
Pour cela je demande à la personne interviewée de se présenter, je recueille
ainsi
les
informations
dans
un
contexte
de
discussion
et
non
de
questionnement. Les entretiens ont lieu soit dans le bureau des cadres soit
dans un petit salon. Deux entretiens ont été interrompus, un cadre de santé a
eu un appel téléphonique, et un autre a été entrecoupé par la venue d’une
personne étrangère au service. Les autres entretiens se sont déroulés au
calme sans interruption. Pour la plupart des entretiens, je fais le choix de
m’installer à coté de la personne mais en respectant tout de même une certaine
distance. Je ne veux pas être intrusive. Leur durée varie de trente cinq à
cinquante minutes. Ils ont eu lieu sur un temps de travail, pour chaque
interviewé. Pour l’un d’entre eux, le rendez-vous a été reporté pour cause
d’arrêt maladie.
40
3.6.1 Mon ressenti
Lors de ces temps d’échange, les débuts d’entretiens pour les infirmiers se font
avec une certaine réserve alors que les cadres de santé sont plutôt à l’aise.
Puis certains infirmiers, recherchent mon approbation dans les premiers
échanges. Je leur précise qu’il n’y pas de bonnes ou de mauvaises réponses,
que ce qui m’intéresse est de recueillir leurs propres définitions et leur ressenti.
Le climat alors change et devient propice à la spontanéité des propos.
L’enregistrement est vite oublié, il n’apparait pas un frein. Au fil des entretiens,
mon attitude change, je maitrise mieux la reformulation et je me fais davantage
confiance quant à la façon de mener les échanges. Toutefois lors de la
retranscription de ceux-ci je prends conscience de l’écart qu’il y a entre ce que
j’ai cru comprendre et ce qui a été réellement verbalisé.
3.6.2 Les limites de l’entretien
Les formalités de demande d’autorisation pour effectuer des entretiens auprès
de professionnels, que ce soit dans une petite structure ou un grand
établissement ont été une première limite. En effet, ce sont les cadres
supérieurs qui m’ont dirigée vers des cadres de proximité qu’ils ont eux-mêmes
choisi. Pour la petite structure, le choix des infirmières à rencontrer s’est porté
sur une journée ou la charge de travail est moindre que les autres jours de la
semaine. Sur les deux premières infirmières rencontrées, une n’avait jamais
changé de service depuis l’obtention de son diplôme et une autre ne pouvait
pas me consacrer plus de dix minutes. J’ai dû demander à une cadre de me
diriger vers une professionnelle ayant vécue une expérience de mobilité ou de
polyvalence. Au sein du CHU la population infirmière rencontrée a été choisie
par la cadre supérieure d’un pôle. Je peux m’interroger sur la neutralité du
choix effectué par cette cadre supérieure qui a sûrement voulu me diriger de
façon bienveillante vers des personnes ressources.
41
C’est également lors d ‘une rencontre avec ma directrice de mémoire que j’ai
réalisé qu’un des entretiens réalisé ne m’apporterait pas de réponse en terme
de vécu puisqu’une infirmière interviewée n’avait occupé qu’un seul poste. J’ai
du reprogrammer un autre entretien auprès d’une autre infirmière. Ce dernier
entretien a lieu le 13 avril 2015.
42
4. ANALYSE
43
4.1
RESULTATS ET ANALYSE DES DONNEES
4.1.1 Résultats des entretiens
Dans un premier temps, j’analyse les données relatives aux déterminants
sociaux. Elles vont me permettre de dresser un profil de la population. (cf.
annexe 3 et 4). Dans un deuxième temps, j’effectue une lecture attentive et je
cherche à dégager les idées fortes, afin de les regrouper par thème. Je
dissèque chaque discours. Je trace sur un tableau les phrases clés de chaque
entretien. Cela m’aide à visualiser les similitudes et les contrastes.
Puis j’organise mon analyse en regard des thèmes suivants :
•
La polyvalence
-
La représentation de la polyvalence
-
La polyvalence, une dynamique d’établissement
-
Le point de vue des infirmiers polyvalents
•
Les éléments facilitateurs
-
La notion d’entraide
-
Le volontariat
-
Le rôle du cadre de santé : L’accompagnement
La communication
-
La polyvalence planifiée, organisée, uniformisée
-
La formation
•
Les compétences
-
Entre polyvalence et expertise
-
Le développement des compétences
•
La polyvalence au service de la qualité des soins
•
Œil neuf / dysfonctionnement
44
4.1.2 Le profil de la population interviewée :
•
Les infirmiers :
La moyenne d’âge est de trente-cinq ans, le temps de travail est de 100% sauf
pour l’IDE G qui travaille à 80%, par choix car elle a quatre enfants en bas âge.
Les infirmiers ont occupé de deux à sept postes différents. Trois des quatre
infirmiers ont fait le choix de leur affectation. L’IDE H qui a occupé seulement
deux postes est actuellement sur un pool de médecine à sa demande, et dit :
« J’avais envie de voir autre chose, voir comment fonctionnaient d’autres
services, besoin de rencontrer d’autres patients, d’apprendre d’autres
pathologies. J’avais besoin au niveau professionnel de m’épanouir un peu plus
». L’IDE I n’a pas choisi de travailler dans ce service de médecine. Aujourd’hui
il est sur ce poste depuis six ans et : « Ne veut plus le quitter ». Je m’intéresse
à l’expérience de ces infirmiers qui ont entre six et douze ans de pratique et
sont volontaires pour être mobiles. Leur parcours professionnel varié en est
l’illustration. Cette information sera à prendre en compte dans la discussion.
Ces deux éléments, leur expérience professionnelle et le volontariat peuvent
influencer leur positionnement infirmier. L’envie d’intégrer ce mode de travail en
polyvalence semble démontrer qu’ils possèdent des capacités d’adaptations et
des compétences ou qu’ils souhaitent les développer.
•
Les cadres de santé :
La moyenne d’âge est de cinquante-quatre ans et demi sur l’établissement 1 et
de trente-sept ans et demi sur l’établissement 2. Les cadres de santé ont toutes
eu des parcours professionnels en tant qu’infirmières dans différents domaines
de spécialités. Toutes ont eu une expérience de faisant fonction qui a duré de
un à trois ans. Sur les quatre cadres de santé interviewées, une seule a occupé
deux postes de cadre et ce sur deux établissements différents. Les trois autres
occupent toujours leur premier poste de cadre, depuis respectivement quatorze
ans, cinq ans et deux ans et demi.
45
4.1.3 La polyvalence
4.1.3.1
La représentation de la polyvalence
Lorsque j’ai posé cette question sur leur définition de la polyvalence, beaucoup
d’hésitations et de silences ont accompagné les propos des personnes
interviewées. Certaines phrases n’ont pas été terminées et l’IDE G a même fini
par me dire « Ce n’est pas facile comme question ».
La population infirmière interviewée s’accorde pour donner une définition assez
commune. La notion de capacité d’adaptation ressurgit dans les quatre
représentations. En effet pour l’IDE H, il s’agit de : « Capacité à pouvoir
s’adapter à tous types d’organisation de services et de patients ». Pour l’IDE F :
« La polyvalence permet d’apprendre, voir une autre façon de travailler, voir
une autre organisation ».
L’IDE F et G parlent d’exercer dans des domaines, des spécialités différentes.
La mobilité est également nommée, pour l’IDE F être polyvalent : « C’est être
mobile sur différents services ». La compétence et la connaissance sont citées
et pour l’IDE I il s’agit même de « Déjà bien connaitre son métier » avant d’aller
travailler dans d’autres services.
Les cadres de santé ont une vision plus large de la polyvalence. Elles sont
d’accord pour dire que la polyvalence demande des capacités d’adaptation
pour aller travailler d’un service à l’autre et de passer d’une activité à une autre.
La notion de changement de secteur de soins, de domaine d’activité n’est pas
une notion commune. Pour les cadres de l’établissement 1, une infirmière
polyvalente pratique des activités d’aide soignante, voire d’agent de service
hospitalier en cas de nécessité. La mobilité n’est pas systématiquement
assimilée à de la polyvalence. La CDS A dit qu’être polyvalente nécessite : «
Avoir des compétences qui puissent s’adapter dans un secteur comme dans un
autre » mais précise que pour elle : « Ce n’est pas de la polyvalence quand on
change d’étage sans changer de domaine d’activité ».
46
Alors que la CDS D qui travaille dans l’établissement 2 dit : « Moi je trouve
qu’on est polyvalent sur la même spécialité. Sur une autre spécialité, c’est déjà
plus compliqué, à mon avis ».
A ma question sur la différence qu’ils faisaient entre la polyvalence et la
mobilité, quelques uns en ont vu une, mais un amalgame est souvent fait.
Comme vu dans les concepts la mobilité dite « horizontale » demande à
l’employé d’être en capacité de mobiliser ses compétences sur un autre service
et la polyvalence horizontale demande au salarié de posséder une capacité à
occuper différents postes de travail. La nuance est difficilement perceptible ;
moi-même avant ce travail, j’avais du mal à différencier les deux termes. La
CDS D hésite dans sa définition en associant dans un premier temps la
polyvalence à de la mobilité : « Je ne suis pas sûre en fait que l’on fasse la
différence » puis me dit : « Je pense que l’une amène l’autre ». « C’est un peu
difficile de les dissocier ». Propos confortés par la CDS C : « Hum !! Je ne suis
pas d’accord la mobilité ne demande pas qu’un déplacement géographique,
elle demande de s’adapter à l’organisation, à la pathologie, à la spécialité etc.
donc, c’est la polyvalence ».
Les infirmiers s’accordent tous pour dire qu’être mobile implique de changer de
services. Ils émettent une nuance pour faire la différence avec la polyvalence à
l’image de la définition de L’IDE F : « C’est vrai qu’être mobile c’est d’aller d’un
service sur l’autre, être polyvalente c’est avoir suffisamment de capacité pour
pallier au manque de personnel, dans toutes les spécificités des services ». Les
infirmiers sont dans une dynamique de mobilité mais elle doit être limitée soit
sur une seule discipline, soit en remplaçant toujours sur les mêmes services.
La représentation de la polyvalence qu’ont les professionnels est en accord
avec les différentes définitions proposées dans le cadre conceptuel. Toutefois,
je constate des hésitations et des interrogations quant à la définition qu’ils me
proposent. L’étendue du champ d’action semble constituer la base. La
compétence semble être un élément à prendre en compte dès que l’on parle de
polyvalence.
47
4.1.3.2
La polyvalence, une dynamique d’établissement
Au sein de l’établissement 1, les infirmiers nomment une polyvalence pour
pallier l’absentéisme. Ils savent dès l’embauche que la polyvalence est une
volonté institutionnelle. Dans cette petite structure, l’absentéisme n’est pas
comblé par du personnel intérimaire. L’IDE F l’exprime ainsi : « C’est aussi une
volonté de la direction que le personnel soit polyvalent ». La CDS A 1 raisonne
en pôle et dit : « Que les unités sont sur 3 étages, l’objectif est de ne faire plus
que
deux
équipes ».
La
mutualisation
est
donc
bien
une
volonté
d’établissement. Pour l’établissement 2, les infirmiers le reconnaissent. Ils
définissent bien le fonctionnement du pôle, avec une notion d’effectif minimum
à conserver en cas d’absentéisme. Les CDS C et D parlent d’entraide entre les
cadres et les services : la CDS C précise : « Si on est en dessous de cet effectif
on fait appel à nos collègues c’est à dire que l’on envoie un mail à l’ensemble
de nos collègues cadres pour savoir si une a la possibilité de nous envoyer un
agent de son service » et la CDS D confirme en disant : « C’est une grosse
entraide, une grosse mobilité, une culture de pôle, je ne suis pas sûre que ça
existe ailleurs ».
La taille de la structure n’est pas un élément qui semble influer sur la motivation
des infirmières à devenir polyvalentes. Toutefois pour l’IDE F, c’est ce qui a
guidé son choix : « C’est bien les petites structures, d’ailleurs c’est pour cela
que j’ai postulé ici ». Elle souligne que dans un petit établissement : « On se
connaît tous » cela semble être un élément facilitateur pour accepter d’être
mobile.
Les
professionnels
connaissent
la
dynamique
institutionnelle
de
leur
établissement. Cependant il y a toujours cette notion d’appartenance à un
service d’affectation. Lors des entretiens les infirmiers me nomment les services
et rarement les pôles dans lesquels ils exercent, hormis l’IDE qui travaille sur le
pool. Dans leurs propos on retrouve souvent l’expression « mon service ».
Toutefois, si la notion d’appartenance à un groupe est bien présente dans les
discours, chaque professionnel s’adapte à ce mode de travail qu’ils ont en
majorité choisi.
48
4.1.3.3
Le point de vue des infirmiers polyvalents
Globalement tous les infirmiers interviewés se sentent polyvalents. Cependant
à travers leurs propos se ressent une certaine réserve. En effet, trois infirmières
diront être bien dans leur polyvalence, mais souligneront le fait que c’est de la
polyvalence à une petite échelle, dans un petit établissement ou sur deux
services du pôle. Le propos de l’IDE G l’illustre bien : « Oui évidement, je me
sentirais plus polyvalente si j’étais dans un pôle avec plein de soins diversifiés,
je me sens bien dans ma polyvalence ici, c’est déjà bien diversifié ». Seule une
infirmière ne se trouve pas assez polyvalente. IL s’agit de l’IDE H qui se
sentirait vraiment polyvalente si elle avait une mobilité sur l’ensemble de
l’établissement : « Je ferais partie du pool, je ne sais pas comment il s’intitule,
du pool central je crois(…) où il y à la possibilité de faire de la psychiatrie, de la
chirurgie etc.… ». Pourtant cette infirmière travaille déjà sur un pool, et qui dit
pool sous entend travailler sur des remplacements et donc en « polyvalence ».
Les arguments qu’ont choisis ces professionnels sont de deux ordres. Le
premier semble une limite donnée au champ de cette polyvalence. En réponse
à ma question « Vous sentez vous polyvalent » L’IDE I me précise : « Dans
mon pôle oui, ponctuellement pour de petites missions » puis il s’explique : «
Oui mais en médecine quoi, pour rester dans le même style de soin ».
Le deuxième argument est de «se sentir compétent » pour être polyvalent. La
connaissance des pathologies et de la population soignée ainsi que la notion
d’efficacité est également citée par deux infirmiers.
Ces professionnels disent ne pas aimer la routine, et possèdent des capacités
d’adaptation. Pour une personne cela implique même de changer de métier.
L’IDE F : « Dans le service de long séjour c’est principalement ma fonction
aide-soignante qui ressort, dans le sens où on fait plus des soins de nursing,
des soins de confort ». Cette infirmière qui travaille de nuit sur différents
services de soins parle d’une fonction aide-soignante qu’elle assure certaines
nuits, mais elle omet de mettre en avant sa fonction de référente des plannings
de la nuit, fonction déléguée par la cadre de santé.
49
C’est une fonction qui fait d’elle une professionnelle polyvalente mais qu’elle ne
semble ne pas reconnaitre comme telle.
Tous ces infirmiers expriment des sentiments très différents de leur situation
d’agent polyvalent. Ils ont une perception qui leur est propre. Je retrouve dans
chaque proposition de définition un élément également présent dans celles
que proposent les auteurs choisis pour aborder ce concept sur la polyvalence.
4.1.4 Les éléments facilitateurs de la polyvalence
4.1.4.1
La notion d’entraide
La notion d’aide est assez prégnante, et ce dans les deux structures. Dans
l’établissement 1, dès le début de journée les équipes des différents services se
croisent dans les vestiaires et communiquent sur la charge de travail, d’ailleurs
l’infirmière F me dira spontanément : « Il y a une dynamique d’entraide, quand
on a terminé notre travail, si une autre équipe a besoin on y va, on va voir ». La
CDS B perçoit une cohésion. Pour elle : « L’effet de groupe aide, quand ils
voient les collègues qui vont aider dans le service du dessus ou du dessous, ils
suivent le mouvement ». Il semblerait que cette entraide qui s’est construite au
fil des années soit un élément facilitateur.
Dans l’établissement 2, les manques de personnel liés aux arrêts de travail de
courtes durées sont comblés par l’entraide instaurée au sein du pôle. La CDS C
dit : «Alors voilà, nous c’est notre politique ». Propos validés par la CDS D : «
Dans le pôle, il y a une grosse entraide entre les cadres et les services. S’il y a
un arrêt, au pied levé nos agents seront, pour la plupart, tous très mobiles ».
Cette cadre de santé remarque que cette dynamique d’entraide permet aux
agents de constater que dans les autres services, leurs pairs rencontraient eux
aussi des difficultés.
50
Je m’interroge sur cette notion d’entraide. Est-ce un élément facilitateur et
fédérateur d’une équipe qui s’élargirait « au-delà d’un service » ? Cette aide
ponctuelle entre pairs lèverait – elle cette appréhension qu’ont les infirmiers à
devenir polyvalents ? En effet, par le biais de cette aide mutuelle, les agents
réticents au changement, confrontent et partagent leurs craintes et leurs
difficultés. Un constat qui peut engendrer une certaine solidarité entre les
différentes équipes.
4.1.4.2
Le volontariat
La notion de volontariat est validée par l’ensemble de la population infirmière et
cadre de santé. C’est une notion incontournable pour assurer l’adhésion d’un
professionnel à la polyvalence. En effet, les cadres disent être attentifs à ne pas
mettre en difficulté les agents. La demande des directeurs d’établissements de
mutualiser le personnel est bien entendue par les cadres de santé. Cependant
ils ont tous des arguments en faveur de leur équipe sur leur condition de travail.
La CDS B dira : « Je suis peut-être de la vieille école mais euh…nous sommes
quand même des soignants, faut pas l’oublier, on travaille avec des humains »
« C’est une polyvalence volontaire et ça se passe toujours mieux dans ces cas
là ».
La notion de temps est également importante, « Ici on ne force pas les gens, il
faut leur laisser le temps ».
La CDS D insistera : «Je ne les force pas. Je ne les force pas du tout ».
Pour les infirmières qui sont polyvalentes, c’est un choix de travailler sur
différents services, de découvrir d’autres pathologies, d’autres prises en
charge. L’IDE I me confie : « J’aime bien apprendre, dans le but aussi de
m’enrichir personnellement mais aussi d’enrichir mon service, ma volonté aussi
c’est cela ». L’épanouissement personnel est cité par deux IDE, et sousentendu dans les propos des deux autres.
51
Les cadres sont dans la proposition et n’imposent pas aux agents cette
polyvalence. Ils sont dans la concertation voire la négociation dans un premier
temps. Il n’y a pas de notion de contrainte ni de rapport de force.
L’été le redéploiement de personnel suite à des fermetures de lits est inévitable
et pour la CDS B : « L’été chaque année le personnel du rez-de-chaussée se
dispatche entre le 1er et le 2ème étage. Euh, on a demandé aux gens de choisir
l’étage qu’ils préféraient ». A travers cet exemple, le volontariat pour les
remplacements d’été est facilité par le fait que le cadre laisse se répartir les
agents dans les services de leur choix.
Etre volontaire est un élément essentiel et revendiqué par tous les
professionnels rencontrés. Si la polyvalence pour ces infirmiers est imposée par
l’établissement, les cadres de santé sont attentifs à leur souhait et les incitent à
se prononcer quant à leur choix de service dans la mesure du possible.
4.1.4.3
La polyvalence planifiée, organisée, uniformisée
Les infirmières sont favorables à la polyvalence quand elles connaissent
l’organisation de travail des services qui les accueillent.
•
Planifiée :
Tous les infirmiers sont unanimes pour dire que les plannings de travail
élaborés à l’avance permettent d’anticiper une organisation tant professionnelle
que personnelle.
La CDS B : « Tout à fait la polyvalence est organisée, c’est neuf semaines puis
trois semaines et on recommence donc l’infirmière peut se projeter, elle sait
très bien où elle travaillera dans six mois et à quel étage ».
L’IDE H : « C’est assez simple je sais à peu près deux à trois mois à l’avance
dans quel service je vais, je contacte simplement la cadre du service où je suis
affectée pour avoir le planning qui était fait deux mois à l’avance ».
52
L’IDE F : «Je travaille de nuit de la façon suivante : trois nuits en EHPAD puis
trois nuits en médecine physique de réadaptation puis trois nuits en tant qu’aide
soignante sur un service de long séjour ».
Selon les cadres de santé, la polyvalence des agents permet de pallier
l’absentéisme et de répondre à une surcharge de travail. Ces évènements ne
sont pas toujours prévisibles et de ce fait peuvent engendrer un stress chez le
professionnel qui n’est pas préparé. Deux infirmiers sur quatre le verbalisent :
Pour l’IDE G : « Ne pas savoir où l’on va, juste la veille pour le lendemain dans
ce cas ce n’est pas de la polyvalence, c’est de l’urgence ce n’est pas la même
chose, là on n’a pas le choix on dépanne, et c’est stressant comme situation ».
La cadre de santé A, qui a la responsabilité de l’équipe de nuit souligne : «Il y a
des gens qui sont identifiés dans les deux équipes(…) donc dans chaque
roulement on a à peu près le nombre équivalent de ces personnes-là qui sont
capables d’aller partout ».
•
Organisée et Uniformisée :
Les infirmiers reconnaissent que la méconnaissance de l’architecture d’un
service est un frein à leur adaptation. Ils rencontrent des difficultés si au sein
d’un pôle ou d’un établissement les services ont une organisation très
disparate. Une structure construite avec des services identiques, favorise la
création d’une organisation commune. L’importance de cette rigueur dans
l’organisation est illustrée par ces différents propos :
L’IDE H : « Si c’est bien organisé et si c’est bien rangé, c’est très très important
pour le moral et pour le gain de temps ».
L’IDE G : « S’il fallait courir après tout, tout le temps oui cela me poserait
problème ».
L’IDE F : « Faut se souvenir que le chariot d’urgence à l’EHPAD ne se situe
que sur le premier étage ».
L’uniformisation des services et des outils de travail est également un élément
facilitateur. Sur l’établissement 2, l’outil informatique n’a pas été installé ou
réactualisé au même moment dans tous les services, et les infirmiers pouvaient
rencontrer des difficultés.
53
L’IDE I l’énonce de cette façon : « Les outils de travail euh là où j’ai eu
beaucoup de difficultés, c’est quand on a eu deux logiciels différents pour les
prescriptions et là j’avoue j’étais un poids et je ne pouvais rien faire ».
Aujourd’hui les outils informatiques sont identiques et ce professionnel ne
rencontre plus de difficultés.
La notion de gain de temps est importante. Ce temps perdu à chercher le
matériel et les protocoles serait dans un premier temps un élément agaçant,
puis générateur de gêne, de problème pour le professionnel. Cela impacterait la
qualité des soins auprès du patient, et risquerait de faire du soignant un
professionnel moins compétent. Une infirmière ira jusqu’à me dire : « Par
exemple : Pour la réfection d’une voie centrale si je ne trouve pas où sont
rangées les sur-blouses stériles, ça me gonfle, j’ai encore dix pansements
après tant pis je les fais sans sur-blouses, là je dis c’est un gain de temps, c’est
surtout un gain de qualité du soin pour le patient ».
Les infirmiers sont rassurés s’ils sont accueillis et accompagnés dans leur
travail. En effet, les aides soignantes ou infirmiers qui constituent ces binômes
sont des personnes ressources pour le professionnel qui ne connait pas bien
l’organisation du service dans lequel il assure un remplacement. A l’image de
ce que me dit l’IDE F lorsqu’elle travaille en binôme :« En effet ce sont de très
bons indicateurs, elles nous disent « non tu ne vas pas chercher au bon endroit
». Les cadres de santé ont bien conscience de cette nécessité d’organiser et
d’uniformiser les rangements des locaux ainsi que les outils.
Dans l’établissement 1, elles ont entamé un travail sur les commandes de
matériels et sur les chariots d’urgences. Ce travail est fait en collaboration avec
les infirmiers. La CDS B dit : « On travaille beaucoup là-dessus puisque l’on fait
des groupes de travail sur l’harmonisation entre les différentes unités ». « On a
listé les écarts de fonctionnement entre les différents services ». En effet si les
protocoles au sein d’un établissement sont les mêmes, les outils comme les
fiches de suivi de pansements ne le sont pas.
54
Sur l’établissement 2, c’est très difficile d’organiser les services de façon
identique car les extensions de bâtiment ont une architecture très différente.
Les services constituant un pôle n’ont rien en commun et les infirmiers qui y
travaillent ont mis beaucoup de temps à s’approprier les lieux et à s’adapter aux
organisations. D’ailleurs l’IDE I me confie qu’au sein de leur pôle un travail a été
mené sur l’organisation interne, celle qui concerne l’activité : « Les deux cadres
ont travaillé ensemble(…) ils ont fait en sorte que les horaires de perfusion
soient les mêmes ». Les médecins sont différents, ils travaillent différemment
mais l’organisation des soins a été retravaillée afin qu’elles soient quasi
identiques dans les différents services pour faciliter le travail des personnes qui
sont polyvalentes.
Un gros point cité par l’ensemble des professionnels est l’intérêt d’une
organisation commune, du moins le plus proche possible en ce qui concerne la
planification,
l’organisation
des
soins
et
l’uniformisation
des
outils.
L’organisation des rangements des matériels doivent être au maximum
identifiés et rangés dans une logique propice au déroulement des soins.
L’organisation humaine n’est pas à négliger car c’est important d’avoir des
collègues ressources sur lesquelles les infirmières polyvalentes puissent
s’appuyer.
4.1.4.4
La formation
Les infirmiers relatent tous les bienfaits et la sécurité qu’apportent une
formation si celle – ci est réalisée avant ou en simultanée d’une prise de poste.
Selon les besoins en compétences les cadres de santé anticipent certaines
formations. Mais en majorité les formations sont en lien avec la spécialité du
service voire du pôle. Elles sont donc programmées et dispensées avec un
ordre de priorité en fonction de la prise de poste du soignant.
55
Au sein de l’établissement 1, la formation est parfois dispensée par des
soignants eux –mêmes (en interne). C’est une garantie pour l’établissement
d’avoir des professionnels investis dans la dynamique de formation. Selon ce
principe, la CDS B explique : « Il y a des membres du personnel qui ont monté
une association de formation pour la rééducation avec différents rééducateurs
de la région ».Tout personnel ayant une prise en charge spécifique dans un
service ou au sein d’un établissement se voit proposer régulièrement des
formations ayant pour objectif une prise en soins uniforme et de qualité. L’IDE F
fait ce constat : «Il y a un projet de service. Ils essaient de former tout le
monde, ne serait-ce qu’à la formation Parkinson ».
La cadre B confirme : « Les agents qui viennent travailler au1er étage ont été en
partie formés pour le parkinson et ceux qui vont travailler au2 ème étage ont été
formés aux amputés du membre inferieur ». Les formations ne sont pas toutes
institutionnelles, même si elles sont majoritairement dispensées à tous les
agents et ce pour uniformiser les pratiques et les prises en charge des patients.
Les besoins sont répertoriés par spécialité ou par thématique. Les
professionnels formés sont souvent sollicités afin de communiquer à l’équipe
sur le contenu de la formation suivie. Il est probable que ces professionnels
formés soient en capacité d’être des personnes reconnues « ressources »,
comme me l’a confié la CDS C : « J’ai envoyé une infirmière à la formation de
la maitrise d’un individu violent, parfois on a des personnes très agitées, ca
peut servir ».
Toutefois, une formation dans une spécialité pointue ne peut être dispensée si
l’infirmière formée n’est pas en mesure de pratiquer régulièrement ce soin. Ce
qu’a confirmé la CDS C en expliquant : « Enfin si je les forme aujourd‘hui sur la
manipulation de la pompe à insuline et si ils vont faire un remplacement dans
six mois ils ne sauront pas manipuler la pompe, cela n’a pas d intérêt particulier
». La CDS D confirmera : « Il faut que ce soit rentable(…) Il y a un temps de
formation nécessaire, et il faut pratiquer derrière ». De plus les soins très
spécifiques nécessitent des formations relativement longues.
56
Ce que m’explique l’IDE H : « L’été 2013 j’ai fait deux mois d’hémodialyse pour
être formée à la dialyse(…) j’ai fait un remplacement de six mois de congé
maternité ensuite(…) me voici depuis le mois de novembre ici et je vais encore
y rester un an ». Il s’agit pour la cadre de santé de s’assurer que les infirmiers
formés resteront au sein d’un pôle ou d’un service ou cette formation spécifique
est requise pour exercer. Si la formation demande plusieurs mois, la cadre de
santé informe l’infirmière de la nécessité de rester un certain temps au sein de
ce service pour exercer et conforter cette compétence.
Les formations sont nécessaires pour acquérir les compétences spécifiques à
certaines prises en charge. Une des missions du cadre de santé est de bien
répertorier les besoins de son personnel afin de répartir de façon judicieuse les
formations. Etant garant de la continuité et de la qualité des soins apportés aux
patients, le cadre de santé doit s’assurer des compétences acquises par ces
formations. Ces formations spécifiques doivent apporter aux soignants les
compétences nécessaires à leur exercice, en toute sécurité pour eux et pour
les patients. Cela implique au professionnel de pratiquer de façon régulière les
soins. La formation est donc un élément indispensable pour les infirmières
polyvalents ou en phase de le devenir.
4.1.5 Le management du cadre de santé : accompagnement et
communication
Le ressenti est très différent d’un infirmier à l’autre. Ils ne sont pas unanimes
pour dire qu’ils sont accompagnés dans la polyvalence :
Pour l’IDE G : « Non je ne me sens pas du tout accompagnée, je me sens
écoutée par notre cadre ». L’IDE I entend derrière le terme accompagnement,
la notion d’organisation. Il s’agit d’une attention du cadre de santé envers le
professionnel afin de le placer dans de bonnes conditions de travail en adaptant
ses horaires : « Je n’ai pas eu vraiment d’accompagnement mais la cadre ne
m’a pas mis vraiment en difficulté dans le sens ou les premières fois où je suis
allé dans les autres services, on me mettait de 8 h30 ».
57
L’IDE H me dit ne pas être accompagnée mais ne pas en souffrir, ne pas être
dans la demande : « elle m’a toujours dit : vous pouvez venir dans mon bureau
quand vous voulez ».
Seule l’IDE F dit être accompagnée: « Ah oui oui oui oui oui oui j’ai une cadre
qui m’épaule, qui me guide qui me (…) je peux l’appeler, elle reste très
disponible et à l’écoute ». La notion d’écoute est unanime et ressort dans tous
les entretiens. En effet, trois infirmiers citent l’écoute accordée par la cadre
comme élément très important. Deux infirmiers disent avoir eu de leur cadre de
santé l’information suivante « Que la porte est ouverte ». Cette notion semble
rassurer ces professionnels. Certains entendent cette possibilité et travaillent
en confiance en s’appuyant sur leur expérience, en demandant de l’aide si
besoin à des personnes ressources au sein même des services. D’autres
choisissent de communiquer directement avec le cadre de santé à l’image des
IDE F et I qui n’hésitent pas à le solliciter.
L’IDE I : « Moi le lendemain, j’étais dans le bureau de la cadre, je lui ai énoncé
le problème ». Un seul infirmier dit avoir eu un suivi de la part de son cadre de
santé sur son vécu d’expérience lors d’un remplacement dans un autre service.
L’IDE I me glisse dans la conversation : « Ma cadre est venue me voir les
premières fois où je travaillais dans un autre service(…) c’est plaisant ».
Les cadres de santé pour la plupart entendent l’accompagnement des agents
sous une forme organisationnelle. Il s’agit pour eux de préparer au mieux la
prise de poste en aménageant un parcours, avec un travail en tutorat, des
horaires aménagés et des formations facilitant l’intégration. Pour deux cadres
les infirmières qui prennent leur premier poste effectue une visite pour connaitre
tout le personnel et les missions de chacun au sein de chaque service. Ces
cadres font parties de l’établissement 1 et la structure est de petite taille.
Lorsque ces professionnels sont sollicités pour être polyvalents, ils ont déjà une
connaissance globale des différents services et des agents qui y travaillent.
58
Au sein de l’établissement 2 qui est une grosse structure la CDS D dit qu’en
cas de mobilité sur le pôle elle est attentive : « Si elles ont besoin d’aller visiter
le service avant, je les accompagne ».
La CDS C m’avoue : « Il n’y a pas grand chose d’établi » et elle ne va pas
systématiquement avoir une attention à l’égard de l’agent qui est parti dans un
service assurer un remplacement : « Je ne vais pas d’emblée les voir ». Et si
les infirmières le désirent elles lui font un retour : « Elles vont venir me dire, oui
il y avait beaucoup de travail ».
Toutefois elle précise que c’est plus compliqué de sortir les agents du service
d’affectation et : « Que c’est là tout le travail de management, d’explications ».
La communication entre cadres de santé et infirmiers semblent se faire à
travers des problématiques et par le biais de réunions organisées. C’est le
ressenti de l’IDE I et F qui reconnaissent aux cadres des qualités managériales
aidantes pour adhérer à cette dynamique de polyvalence. L’IDE F : « On a des
réunions tous les quinze jours, trois semaines(…) on fait le point sur certaines
choses à améliorer ». L’IDE F, référente de l’équipe de nuit favorise les
échanges du fait de sa proximité avec la cadre de santé. L’IDE H ne voit pas
d’intérêt à la réunion annuelle qui n’est pas propice aux échanges et au vécu de
chacun, le nombre de participants étant trop élevé : « On a une réunion une fois
par an où il y a toute l’équipe du pôle ».
Les cadres de santé de l’établissement 1 ont mis en place des réunions suite à
une demande des agents polyvalents de nuit qui travaillent sur les différents
sites. Elles ont été mises en place pour que s’instaurent des échanges sur les
éventuelles problématiques rencontrées au sein de l’établissement. Une autre
réunion mensuelle est organisée afin de présenter les différents travaux faits
par des personnels soignants. Et pour la CDS B : « Ce travail est présenté en
réunion de service qui a lieu tous les mois, où on parle de la vie de
l’établissement et la vie du service ». La CDS C choisit de communiquer le
rapport d’activité, le nombre de journées de remplacement et resitue toujours
ceux-ci dans un contexte de pôle.
59
La perception de la notion d’accompagnement est très différente d’un infirmier à
l’autre. L’écoute semble être la qualité du cadre de santé la plus mise en valeur,
mais globalement les agents ne se sentent pas assez accompagnés. Du coté
des
cadres
de
santé,
l’accompagnement
est
essentiellement
d’ordre
organisationnel. Des réunions sont bien réalisées mais répondent elles aux
attentes des infirmiers ?
4.1.6 Les compétences
4.1.6.1
•
Entre polyvalence et expertise
Etre compétent
Les infirmiers se disent compétents pour travailler en polyvalence à travers leur
capacité d’adaptation mais également grâce aux connaissances qu’ils
possèdent pour réaliser une prise en charge des patients. Le service qui
accueille
profite
des
compétences
du
professionnel
qui
assure
le
remplacement. L’IDE I dit ainsi mettre à profit de ce service des compétences
acquises dans un autre service : « Mais j’ai pu aider autrement car il y a eu une
urgence et c’était une hémorragie digestive, j’étais dans mon élément donc je
me suis embarqué sur l’urgence ». Cet infirmier se sert également de
compétences acquises dans un tout autre domaine d’activité. Aujourd’hui il les
transfère dans son métier d’infirmier : « Quand je suis arrivé ici c’était tout
mélangé, j’ai tout regroupé parce que moi, j’ai travaillé dans l industrie, il faut
que ce soit carré ». La notion de compétence est pour ces infirmiers liée à leur
expérience. Le propos de L’IDE G l’illustre bien : « Je pense être efficace
rapidement dans un service, parce que je connais la population soignée grâce
à mon expérience ». Ce sentiment est conforté par L’IDE I : « Une fois que je
suis bien, que je suis un ancien, je peux me permettre de me projeter dans un
autre service ».
60
L’expérience est bien une composante indispensable aux infirmiers pour se
sentir compétents. Ils disent pouvoir être mobiles et polyvalents car ils
maitrisent déjà bien un certain nombre de soins et de prise en charge. A l’image
de l’IDE G : « Je ne suis pas sûre que l’on puisse avoir la même efficacité en
début de carrière » et de l’IDE I : « On m’aurait dit cela au bout de trois ans
d’infirmier, je ne l’aurai jamais fait ».
Les cadres de santé disent que les professionnels polyvalents possèdent des
capacités d’adaptation et de savoir–faire qu’ils transfèrent aisément d’une
situation à une autre. C’est une compétence que ne possède pas ou peu un
professionnel non mobile. D’après la CDS A : « C’est souvent des personnes
qui vont gérer, parce qu’elles vont mettre en œuvre des choses que n’aura pas
l’infirmière du service ».
•
Etre expert
Dans chaque entretien infirmier, le mot expert ou expertise a été prononcé. Ces
professionnels s’accordent pour dire que seule l’expérience permet d’être
expert. Ils sont unanimes pour y associer l’ancienneté sur un même service. La
répétition des actes de soin permet une certaine maitrise et le temps passé
dans l’unité de soins contribue à avoir une bonne connaissance de la
population soignée.
La notion d’expertise est exprimée par les quatre infirmières de cette façon :
Pour l’IDE F : « Si on reste toute sa vie de soignant dans le même service alors
on va avoir des compétences exceptionnelles sur un domaine » « On a besoin
d’expériences, on a besoin de pratique pour devenir expert ».
Pour l’IDE G : « Depuis que je suis polyvalente, je ne me trouve pas du tout
experte pour autant, pourtant je commence à bien connaitre la rééducation ».
L’expertise développée au sein de son service d’affectation a permit à l’IDE I
d’être compétent sur un soin à réaliser dans un autre service : « Il m’est arrivé
d’aller (…) en dermatologie. Ils font une coloscopie tous les six mois (…) du
coup le fait que je sois expert en cela, j’ai réalisé la prise en charge ».
61
Les cadres de santé ont peu parlé d’expertise. Un cadre dit que l’expertise
permet au professionnel qui se reconnait comme tel d’apporter son aide aux
agents en difficulté.
Un autre cadre évoque le fait qu’elle va peut être choquer mais assume ses
propos : « Si je prends une IDE (…) qui vient remplacer parce que j’ai un arrêt
en néphrologie, est-ce qu’elle va connaitre vraiment tout le traitement
néphrologique antirejet et compagnie et tout ce qui…Enfin pour moi
polyvalence c’est maitrise ». Toutefois, ce cadre reconnaît qu’un infirmier n’a
pas besoin d’être expert pour faire du bon travail.
La compétence est acquise pour la majeure partie des professionnels par
l’expérience. Elle permet d’assurer une prise en charge des patients de façon
optimale. Le savoir – faire permet cette compétence qui est transférable, d’un
domaine d’activité à un autre. La compétence semble légitimer le statut du
professionnel polyvalent. L’expérience est nécessaire à l’expertise, comme le
stipule Patricia BENNER dans la partie conceptuelle. Les infirmiers polyvalents
interviewés ne se définissent pas experts, mais leur multi compétence est un
atout pour le service accueillant. L’expertise ne semble pas être un facteur
indispensable pour se considérer personnel polyvalent.
4.1.6.2
Le développement des compétences
Quel effet la polyvalence a-t-elle sur les compétences des professionnels ?
A l’image de l’IDE H : « Elle les fait évoluer, de jours en jours, c’est de jour en
jour ». Les infirmiers sont unanimes pour dire qu’ils élargissent leur champ de
compétences, en acquérant d’autres connaissances et en approfondissant
d’autres prises en charge. Ils reconnaissent avoir un métier qui donne des
possibilités de faire évoluer leur capacité, leurs compétences.
62
A chacun de saisir les opportunités qui lui sont offertes. Selon la CDS A les
infirmières : « Elles vont accroitre leurs compétences c’est ce qu’on leur
demande dans leur métier». Même si, comme le dit l’IDE F : «
Malheureusement on en perd un peu puisque l’on est sur différents domaines »
mais positive aussitôt : « Et au fil du temps on en laisse pour en acquérir
d’autres mais on élargit nos compétences, on sélectionne, on priorise les
compétences ».
La remise en question, la réflexion sont des axes de travail qu’offre la
polyvalence. L’IDE H a fait ce constat : « La connaissance permet de faire des
liens sur ce que je vois avec le patient ». Cette polyvalence incite les
professionnels à se documenter sur les pathologies, les prises en charge et les
protocoles de soins. Ces professionnels se donnent les moyens d’être en
phase avec les bonnes pratiques. Comme l’IDE F : « Il faut remettre à jour ses
compétences (…) après il faut avoir cette volonté d’aller chercher les
informations ».
Les cadres de santé s’accordent pour dire que les compétences des infirmiers
augmentent et qu’ils en développent d’autres. Ils font le constat également que
la personne polyvalente partage des informations et augmente ainsi les
compétences du reste de l’équipe qui apprend de nouvelles techniques. Ce
partage peut lever des doutes et permettre aux autres agents de se sentir
compétents. Il y a des infirmières qui le sont mais qui en doutent toujours. La
CDS B affirme que la polyvalence permet aux professionnels de développer «
une confiance en soi » : « Ces personnes se sentent plus à l’aise dans leur
domaine, donc elles ont plus confiance en elles et hésitent moins à être mobiles
». L’entretien annuel est pour les cadres un moment important pour recenser
les besoins et les perspectives professionnelles de l’agent. Ils peuvent ensuite
proposer des formations, ou organiser des journées de tutorat en vue
d’accroitre les compétences ou tout simplement de permettre à l’agent de
découvrir un autre environnement de travail. Deux cadres ont même créé un
entretien spécifique pour évaluer les compétences.
63
Le CDS B stipule qu’aujourd’hui, on écoute volontiers les demandes de
changement de services : « Dès que l’on peut intervertir deux agents sur deux
services, à leur demande on le fait. Ce n’est plus cloisonné comme avant ».
L’attention portée par le cadre à ces demandes de changement de service est
essentiel pour impulser cette dynamique de polyvalence. En effet en
s’inscrivant
dans
cette
démarche
les
professionnels
partagent
leurs
expériences et transmettent leurs compétences, pouvant ainsi susciter chez
d’autres professionnels l’envie de découvrir d’autres spécialités et de
développer ainsi d’autres compétences.
Les infirmières et les cadres de santé pensent que la polyvalence accroit les
compétences des professionnels. Elle renforce aussi les compétences des
collègues de l’équipe de l’infirmier polyvalent ainsi que ceux de l’équipe
accueillante. Cette mobilité doit toutefois être accompagnée de la volonté de
l’agent d’aller rechercher des informations facilitant le développement des
compétences pour être polyvalent. Les cadres de santé sont attentifs aux
demandes des professionnels en ce qui concerne les changements de
services. En effet, ils sont dans la dynamique de satisfaire ces demandes qui
vont permettre aux agents de développer des aptitudes à devenir polyvalents.
4.1.7 La polyvalence au service de la qualité des soins
Pour les cadres de santé la qualité des soins semble présente. Ils disent être
attentifs aux compétences des professionnels qu’ils envoient en remplacement.
La prise en charge des patients leur semble être acceptable. Toutefois, ils
émettent une réserve quant au respect des protocoles. En effet la CDS A doute
tout de même : « Une perfusion dans un service, puis dans l’autre service c’est
peut-être pas le même médicament, pas la même surveillance et moi là, il y a
un danger pour les patients ».
64
La CDS D pense que les connaissances apportées par les formations sont là
pour assurer la sécurité du patient lors d’un soin : « Elles vont en formation
avec les laboratoires donc…elles ont des connaissances. Je trouve que ça se
passe mieux, pour la sécurité du patient. Et puis elles aussi, ça ne les met pas
en difficulté ».Les personnes identifiées comme « personnel ressource » sont
aussi présentes pour sécuriser les soins. Ce que confirment les IDE F, G et I en
insistant sur l’importance de ne pas être deux personnes remplaçantes pour
s’occuper du service sur une même tranche horaire. La CDS C met en place un
tutorat et dit : « On n’a pas le droit à l’erreur, le patient est là deux jours, si on a
oublié une préparation à un examen grosso modo l’hospitalisation, elle ne sert
à rien ».
En ce qui concerne certaines procédures, les cadres notent l’importance de les
respecter. Sinon les patients se retrouvent avec des directives et des
explications confuses et erronées qui engendrent des tensions avec l’équipe
soignante. L’exemple des horaires de permission non respectés et qui varient
selon les services de soins illustre pour la CDS A ce genre de problème
rencontré.
Tous les infirmiers font en sorte de mettre en œuvre toutes les conditions pour
que la prise en soins soit de qualité. L’IDE F est convaincue qu’être polyvalente
et venir ponctuellement remplacer a un impact : « Il y a une cassure dans la
continuité mais pas dans la qualité des soins ». L’IDE H est formelle dans ses
propos et précise que même pour une courte durée de remplacement : « Ce
n’est pas parce que je ne connais pas le service (…) que je vais survoler ma
prise en charge du patient, elle reste globale, elle reste approfondie, rigoureuse
». L’IDE G dit également dispenser des soins de qualité mais le manque
d’éléments sur la connaissance du patient fait qu’elle doute sur la sécurité
apportée à la prise en charge : « Disons que les trois-quatre premiers jours je
ne suis pas bien tranquille, je ne connais pas bien les patients ».
65
Cependant, ces professionnels disent que la prise en charge est moins bonne
s’il existe une désorganisation dans les soins. A l’image de l’IDE F : « Pour les
gens ca ne le fait pas, vous entrez dans la chambre, vous devez repartir 15 fois
». L’IDE I met l’accent sur les informations à communiquer aux patients : «
C'est plus sur les examens, parce qu’il faut les connaitre pour les expliquer au
patient ».
Dans les services de longue durée, les patients ont le temps d’observer les
professionnels et même de connaitre leur roulement. Ainsi les patients peuvent
interpeller les soignants en fonction de leur choix. Pour l’IDE F : « De par nos
approches différentes, c’est bien pour le patient d’avoir des personnes
différentes ».
Enfin L’IDE G dénonce le fait qu’être polyvalent est un frein pour la qualité des
soins apportés aux patients si l’encadrement des stagiaires ne se fait pas de
façon optimale et relate ce fait : « Cela faisait peu de temps que j’étais dans le
service, une étudiante 3ème année allait faire une héparine sous cutanée à une
patiente, elle transmet qu’elle a eu une prescription du médecin, donc OK, et en
fait entre temps je m’aperçois dans le dossier que la patiente était allergique à
l’héparine ».
Durant l’entretien ce professionnel prononce cette phrase : « Depuis que
j’occupe un poste comme cela, je dors mal, je pense que je connais pas assez
les patients donc je m’inquiète d’avoir bien pris en charge le service ».
Tous les infirmiers se prononcent pour dire qu’ils assurent des soins de qualité
ou du moins qu’ils essaient de garantir la meilleure prise en charge qu’ils
puissent fournir dans des conditions de remplacement. Ils énoncent les risques
pour les patients d’une prise en charge ponctuelle. La rupture dans la continuité
des soins est évoquée mais ne semble pas être un élément bloquant pour
assurer la qualité de la prise en charge. Les cadres de santé rejoignent les
infirmiers quant à la volonté de dispenser des soins de qualité. Ils abordent
toutefois la notion de danger et de sécurité.
66
4.1.8 L’œil neuf du professionnel polyvalent
Tous
les
infirmiers,
fonctionnements
de
de
part
service
leur
avec
mobilité
des
expérimentent
organisations
d’autres
différentes.
Des
dysfonctionnements sont observés et signalés aux cadres de santé par les
infirmiers
polyvalents
et
ce
dans
le
but
d’améliorer
les
pratiques
professionnelles. A l’image des propos de l’IDE H qui a rencontré des difficultés
pour s’adapter au fonctionnement d’un service. Cependant son intervention a
permit une réorganisation : « C’est bien d’être l’œil extérieur pour être aussi
cette personne neutre qui va en discuter avec l’équipe, en discuter avec la
cadre de ce qui ne va pas et les choses parfois se mettent en place beaucoup
plus facilement ».
Certains infirmiers sont confrontés à des pratiques où la personne soignée
comme le soignant sont en danger. Le défaut de fonctionnement, rapporté au
cadre de santé par l’agent polyvalent a permis une réflexion et une action visant
à stopper une pratique jusqu’alors consentie par les infirmiers de cette équipe.
L’IDE I a vécu une situation qui peut interpeller : « Je prépare les perfusions de
l’après midi puis on me dit : non, ce n’est pas toi qui les pose ». L’infirmier
soulève là un réel risque pour le patient, mais également pour lui. Ses
connaissances sur la législation encadrant sa fonction lui permet de dénoncer
des pratiques dites « dangereuses ». Le professionnel polyvalent se questionne
et compare les pratiques d’un service à l’autre.
Les surveillances de traitements évoluent et obligent les agents à réactualiser
leur connaissance et à s’adapter au changement. L’IDE F avoue qu’elle a
appris : « Les protocoles ici changent, les thérapeutiques changent(…) je ne
serais pas venue au centre de réadaptation, je ne me serai pas posé la
question ». Le fait d’avoir changé de service a permit à cette infirmière de se
questionner sur des pratiques, des protocoles. A l’inverse en étant cloisonnée
dans un service, cette infirmière dit perpétuer des pratiques sans forcément les
remettre en question. L’infirmière G déplore le fait de ne pas être sollicitée pour
travailler sur une harmonisation des services.
67
Cette professionnelle qui perçoit des dysfonctionnements aimerait bien pouvoir
améliorer les pratiques mais dit ne semble pas être entendue et évoque une
réponse de sa cadre de santé : « Ah, il faut y aller doucement, les habitudes
sont prises de longue date ».Cet agent finit par me dire : « Maintenant je me
suis fait une raison, je n’en parle même plus, je me suis essoufflée » « Je suis
la seule qui voit ce qui fonctionne bien dans un service et qui ne fonctionne pas
du tout dans l’autre ».
Les infirmiers relatent que le fait d’être seule à travailler en polyvalence n’est
pas aidant pour susciter des
réflexions autour des pratiques de soins.
L’infirmier polyvalent reconnu compétent est sollicité pour transmettre son
savoir et son savoir-faire auprès du service qui l’accueille.
Comme le signale l’IDE I : « Il m’est arrivé d’aller dans des services où c’est moi
qui apportait l’info(…) ça a déchargé complètement l’infirmière qui y aurait
passé du temps ». A l’inverse cet infirmier dit ramener des méthodes de travail
et du matériel nouvellement mis sur le marché et méconnu de son service
d’affectation. La CDS C confirme ses dires : « Tout comme l’infirmier l’autre jour
qui a dit : je suis allé en dermatologie, ils ont tel protocole (…) ça peut peut-être
s’adapter au service (…) » « c’est l’œil neuf ». Un autre aspect positif de la
polyvalence est celui du contact relationnel qui s’établit entre les équipes. Cette
polyvalence permet de tisser des liens entre services. L’IDE I n’hésite plus à
faire appel à ses pairs et me relate ce fait pour le besoin d’une personne en fin
de vie : « On avait besoin d’un matériel de dermato pour lui apporter du confort
et jamais sans avoir ces bonnes relations entre équipe on nous aurait prêté ce
matériel (…) (matériel pour couper des ongles que le service s’était payé avec
leur cagnotte) (…) vous voyez jusqu’ou ça va ».
En dehors des dysfonctionnements de services observés par les professionnels
polyvalents, il est intéressant de noter que des liens se tissent grâce aux
partages d’expériences communes visant à faire progresser les pratiques.
68
4.2
LA DISCUSSION
Après avoir élaboré l’ensemble des synthèses en regard de mes entretiens, je
croise ces éléments avec mon cadre conceptuel.
4.2.1 Les déterminants sociaux : facteurs d’influence ?
La flexibilité demandée aux employés entraine un changement organisationnel
du travail, et aussi un investissement personnel. Aucun des infirmiers n’a pointé
une difficulté de cet ordre. Deux infirmières d’une trentaine d’années, mères de
trois et quatre enfants ne mentionnent une difficulté d’organisation personnelle.
Sachant que la polyvalence engendre parfois de l’imprévu, je suis surprise de
ce constat. Leur parcours professionnel antérieur à ce jour les positionne dans
une dynamique de mobilité. En effet les quatre infirmiers interviewés ont tous
eu un parcours varié, dans diverses spécialités, ou en mobilité au sein d’un
pôle. Dans mes lectures, je n’ai pas relevé d’élément en faveur d’une
prédisposition à devenir un professionnel polyvalent. Toutefois tous ces
parcours diversifiés demandent aux professionnels une capacité d’adaptation et
une volonté à être mobiles et donc à acquérir d’autres compétences. D’ailleurs
tous ces infirmiers ont choisi ou accepté d’être polyvalents. Je pense qu’en effet
les expériences antérieures et diverses, peuvent avoir une influence sur la
motivation des agents pour accepter ce mode de travail.
4.2.2 La polyvalence : comment est-elle perçue ?
Le plan hôpital 2007 a réorganisé les services en les regroupant en pôles
d’activité. La dynamique institutionnelle sur la polyvalence des agents au sein
de l’établissement est bien connue des cadres de santé et appliquée afin de
répartir les charges de travail.
69
Les infirmiers connaissent cette réorganisation en pôles mais ne semblent pas
s’être appropriés les récentes évolutions législatives. La notion d’appartenance
à un service est encore bien présente. Ils possèdent une vision parcellaire du
pôle d’activité, souvent réduite au seul service d’affectation. Je m’interroge :
Qu’est ce qui fait que les employeurs affectent toujours le personnel à un
service et non à un pôle ?
Pour tous les professionnels la polyvalence est associée à de la mobilité mais
pas seulement. En effet, la polyvalence n’implique pas seulement un
déplacement d’un poste vers un autre mais inclut le fait de posséder des
aptitudes et des compétences. La multivalence est majoritairement nommée
puisqu’il s’agit bien de transfert de compétences d’un poste à un autre. Elle
semble prévaloir sur la poly compétence qui elle s’acquiert plus par le biais des
formations.
C’est toutefois une combinaison de compétences qui participe à faire de ces
professionnels des infirmiers polyvalents.
Les cadres de santé comme les infirmiers s’entendent sur une définition qui
combine leurs compétences et leurs capacités d’adaptation.
4.2.3 La polyvalence : comment est-elle vécue ?
Elle est relativement bien vécue car c’est un choix de ces quatre infirmiers
d’être mobiles et d’être en demande d’acquérir des connaissances et des
compétences. Cependant comme le dit G. DEVRED il faut que cette
polyvalence soit circonscrite. Tous les professionnels sont unanimes pour
reconnaitre qu’il faut être compétents donc formés aux domaines de spécialités
où une maitrise des soins est exigée afin d’assurer une qualité de prise en
charge. Le cadre de santé doit être attentif à la mobilité qu’il peut être amené à
imposer aux infirmiers.
70
En accord avec l’infirmier, un secteur peut être défini afin de circonscrire la
polyvalence et ainsi permettre au professionnel de conforter et de développer
ses compétences dans un ou deux domaines d’activité. Une mobilité réduite à
un secteur de soin peut lever des appréhensions, installer l’infirmier dans des
conditions de travail favorables, permettant des prises d’initiatives, véritables
leviers de motivation. A l’inverse une polyvalence non circonscrite serait
synonyme de déqualification, et générateurs de stress. En effet l’IDE H a eu
cette crainte : « le seul frein à attaquer le pool c’était la peur de changer toutes
les semaines, je me faisais des soucis pour mes compétences ».Comment
conforter des compétences si l’agent se trouve solliciter pour exercer dans trop
de spécialités différentes ?
4.2.4 Les éléments facilitateurs : Leviers de motivation ?
•
La polyvalence organisée :
Selon Patrick MICHELETTI « la polyvalence organisée est systématiquement
recherchée, soit par la structure, soit par le salarié, soit par les deux. Elle
présente la caractéristique d’une non spontanéité ».
Cette polyvalence organisée est en effet recherchée par les deux parties. Les
cadres par le biais de l’élaboration des plannings y participent. La notion de
gagnant - gagnant est énoncée par un cadre qui demande aux agents de
s’inscrire dans cette polyvalence afin de garantir un effectif minimum. En effet,
en acceptant d’être mobiles sur plusieurs services ils s’assurent une qualité de
vie personnelle puisque les besoins sont comblés sans avoir à être rappelés
sur des jours de repos ou de congés. Je pense en effet que l’’intérêt d’une telle
organisation est l’affaire de toute une équipe. L’entraide qui naît de ce
fonctionnement entre pairs au sein d’un pôle est ainsi un facteur facilitateur de
polyvalence. La caractéristique d’une non spontanéité, reviendrait donc à dire,
qu’il faut organiser cette polyvalence et la planifier suffisamment à l’avance. Elle
serait également reconnue comme « volonté institutionnelle ».
71
Ce qui est bien le cas pour le pôle où exerce la CDS D : « c’est un souhait de la
cadre supérieure, dans la mise en place des pôles. C’est écrit dans les fiches
de poste d’ailleurs, mobilité interne au sein du pôle ». Les agents ainsi
prévenus dès la prise de poste possèdent cette information et peuvent s’inscrire
dans cette éventualité.
L’uniformisation des locaux, des outils de travail, des organisations internes
semblent être un élément très important, voire prioritaire à l’adhésion du
personnel à cette polyvalence. L’infirmier peut évoluer avec une garantie de
qualité de vie au travail. Cette organisation facilement reconnue va permettre
au professionnel de se consacrer à la prise en soins des patients qu’il a en
charge.
Je m’interroge sur les architectures actuelles qui sont dans beaucoup
d’établissements des extensions de bâtiments. Au regard de l’importance que
portent les professionnels à l’organisation uniformisée des services, les cadres
de santé ont là un rôle à jouer afin de faire participer les agents aux différents
projets touchant les organisations ou réorganisations de service. Le personnel
concerné par la polyvalence, qui se verrait impliqué dans de tels projets serait
force de proposition.
•
L’accompagnement :
La perception de la notion d’accompagnement est très différente d’un infirmier à
l’autre. Certains se sentent accompagnés, d’autres pas. Certains le réclament,
d’autres pas. C’est ce que relate également G.DEVRED suite à une enquête
qu’elle a déjà réalisée sur la polyvalence infirmière. Cependant l’écoute que le
cadre accorde aux agents semble compenser ce manque, si des réponses font
suites aux échanges. Les infirmiers souhaiteraient être conviés à des réunions
portant sur l’amélioration de l’organisation de travail.
72
Leur regard extérieur est intéressant et à prendre en compte. Il permet de
détecter des dysfonctionnements mais aussi de repérer des techniques, des
protocoles ou des prises en charges différentes et transférables à d’autres
prises en soins.
Il convient de parler également des formations nécessaires au maintien mais
aussi à l’acquisition de compétences permettant d’exercer en polyvalence. Elle
assure au professionnel une qualité de prise en soins et une sécurité pour le
patient. Cette nécessité est reconnue par tous les professionnels interviewés. Il
est encore là question d’anticipation pour le cadre de santé afin d’être en
adéquation avec les offres et les besoins. La formation est indispensable pour
les infirmières polyvalentes ou en phase de le devenir. J’aborde une piste de
réflexion en lien avec la formation.
4.2.5 Quel management pour le cadre de santé ?
En m’appuyant sur le cours de B. VUILLEMENOT [20], je perçois trois styles de
management prédominants chez les cades de santé. J’ai identifié ces trois
styles au cours de mes entretiens et lors de la relecture de ceux –ci.
•
Le management situationnel :
-
Le style délégatif : le manager reconnait à son collaborateur
suffisamment de compétences et d engagement dans son travail.
Une cadre de santé de jour gère également d’une équipe de nuit. Elle se dit
décisionnaire mais confie la gestion des plannings de l’équipe de nuit à une
infirmière polyvalente qui en est issue. Elle reste en étroit contact avec sa
collaboratrice puisqu’elles ont des contacts téléphoniques réguliers. J’ai fait le
constat que cette infirmière est la seule à se sentir accompagnée par son cadre
de santé dans son travail en polyvalence.
73
-
Le style autoritaire : le manager porte un intérêt maximal aux résultats
et moindre envers les personnes.
Deux cadres de santé semblent employer ce management. Il s’agit des deux
cadres qui travaillent au sein d’un CHU. Elles concourent à la mutualisation des
ressources humaines par pôle et travaillent en collaboration. Une des cadres
produit un discours ambivalent entre la notion de volontariat auquel elle dit être
attentive et la décision prise d’affecter l’agent sur un autre poste. Son choix ne
se fait pas sur la base du volontariat du professionnel mais des compétences
de celui-ci. Ce cadre avoue ne pas mettre en place un accompagnement des
professionnels amenés à être mobiles. Elle n’ira pas s’enquérir du vécu de
cette expérience de remplacement de cet agent.
•
Le management participatif : le manager porte un intérêt aux
personnes et aux résultats.
Je le relève pour l’ensemble des cadres mais pour deux cadres plus
particulièrement. Il s’agit de cadres évoluant dans une structure de petite taille
et travaillant en collaboration. Elles ont instauré des travaux de groupe pour
travailler sur l’harmonisation des pratiques afin de faciliter le travail en
polyvalence et réalisent des entretiens annuels spécifiques aux compétences
des agents. Elles ont une réelle envie d’associer les équipes aux réflexions.
Elles sont attentives aux professionnels et privilégient le volontariat. A mon
sens, le cadre de santé doit adopter un management participatif pour
encourager la polyvalence. Il est essentiel que le personnel soit force de
proposition.
4.2.6 De la compétence individuelle à la compétence collective
Les professionnels définissent la polyvalence en associant deux notions qui
sont les aptitudes et les compétences. Etre compétent pour travailler en
polyvalence ne serait pas suffisant.
74
La notion de capacité d’adaptation y est adjointe. Les professionnels indiquent
bien qu’il faut s’adapter aux prises en charge des patients selon les différentes
pathologies et la spécificité des soins.
Il y a bien une notion combinatoire comme le précise P. ZARIFIAN et
G.LEBOTERF dans leur proposition de définition sur la compétence. Les
infirmiers se disent compétents grâce à leur expérience. D’ailleurs les infirmiers
sont tous d’accord pour dire que l’expertise ne s’acquiert que par l’expérience
et une certaine ancienneté dans le service voire une routine.
Les gestes récurrents, les prises en charge répétitives semblent en effet
consolider une compétence. Ce qui rejoint le concept du taylorisme qui consiste
à trouver la meilleure méthode de travail. Cependant, ce concept fait du
professionnel un spécialiste de son travail. Or, aucun infirmier ne se trouve
expert pour travailler en polyvalence. Ils sont en accord avec la définition
proposée par Patricia BENNER qui stipule que : « l’expérience est nécessaire à
l’expertise ». Ce terme d’expertise est utilisé par ces professionnels dans leur
polyvalence quand il maitrise un acte ou une prise en charge spécifique qu’ils
peuvent être amenés à prodiguer dans les autres services de soins où ils
interviennent ponctuellement. Dans ce cas, on peut dire que l’expertise est utile
et reconnue dans la polyvalence, à condition que cette polyvalence soit
circonscrite à seulement quelques spécialités. L’expertise ne semble pas être
un facteur indispensable pour se considérer personnel polyvalent.
Tous ces professionnels cadres de santé et infirmiers confirment que la mobilité
permet des rencontres entre pairs et des rencontres interdisciplinaires. Ce
temps de travail en commun favorise les échanges autour de pratiques de
soins
mais
aussi
d’organisation.
Toutes
ces
compétences
ainsi
complémentaires sont bien définies dans ces termes, dans ma partie
conceptuelle sur la compétence collective. Cette mobilité permet donc de tisser
des liens entre professionnels. Ce lien créé semble être un levier de motivation
également pour les infirmiers réticents à bouger.
75
Les cadres de santé constatent cette appréhension qu’ont les agents à aller
assurer des remplacements mais qui reviennent en général assez satisfaits
d’avoir vécu cette expérience.
Je pense que la compétence collective renforce la compétence individuelle de
chacun. Les travaux de groupe mis en place par deux cadres de santé afin de
travailler sur l’uniformisation des services le démontrent bien.
4.2.7 Polyvalence et qualité de prise en soins
G. DEVRED suggère de limiter la polyvalence à deux ou trois domaines
d’activités pour pouvoir trouver le « bon rapport entre compétence et qualité de
prestation à fournir au patient ». Le cadre de santé se doit d’être garant de la
continuité et de la qualité des soins. De par son choix parmi les agents, il doit
être attentif à combiner sécurité et qualité pour le soigné mais aussi pour le
soignant. Lors des entretiens, j’ai vraiment ressenti cette volonté d’effectuer une
prise en charge optimale de la personne soignée. Certes ils seront dans
l’obligation de sélectionner les informations prioritaires mais ne sacrifieront pas
la qualité de leur prise en soins. Il semblerait également que l’information
passée au patient soit aussi propice à ne pas inquiéter la personne soignée qui
verrait arriver dans sa chambre un visage inconnu.
L’IDE I en se présentant dit rassurer ainsi le patient : « Je suis franc avec le
patient, je lui dis que je suis de passage, que je ne peux pas toujours répondre
à ses questions mais je le redirige vers une collègue qui pourra apporter une
réponse ».
Dans une structure telle qu’un EHPAD, la polyvalence des agents ne semble
pas avoir un effet négatif. Il semblerait au contraire que les pensionnaires
connaissent le planning de travail des agents. Ils peuvent ainsi solliciter des
professionnels ressources selon leurs besoins.
76
La notion de risque est bien réelle, mais pas dans la prise en charge puisque le
professionnel saura se positionner et faire appel à des personnes ressources
identifiées comme telles. Le risque est cité par ces professionnels dans
l’encadrement des étudiants. Plusieurs infirmiers disent en effet ne pas pouvoir
prendre en tutorat ces futurs professionnels de façon optimale. En effet, le
professionnel polyvalent va déjà devoir s’adapter à un nouvel environnement. Il
s’agit pour lui de prendre ses marques. Sa priorité étant portée sur la prise en
charge optimale des patients qui lui sont confiés, il ne pourra pas être
également aussi disponible pour l’encadrement des étudiants.
Comme vu précédemment dans la partie conceptuelle l’étudiant a besoin
d’expérience
pour
être
compétent.
Il
passe
par
différents
stades
d’apprentissage. Il est essentiel que cet encadrement soit assuré par un
professionnel ayant suffisamment d’expérience dans le service. Je pense que
le cadre de santé doit veiller dans la mise en place de cette polyvalence à
équilibrer l’équipe avec une répartition rigoureuse du personnel en poste et du
personnel mobile. L’encadrement des étudiants doit être sécurisé. Afin
d’assurer la sécurité des soins, il est sans doute judicieux de retirer cette
mission d’encadrement des étudiants au professionnel polyvalent lorsqu’il
assure ponctuellement un remplacement. La méconnaissance du niveau de
compétences de l’étudiant est un facteur de risque pour l’infirmier. C’est donc
un risque à ne pas faire encourir au patient.
4.3
SYNTHESE DE L’ANALYSE
Le but de cette étude consiste à identifier les éléments pouvant être facilitateurs
pour la mise en place d’une polyvalence infirmière.
Au regard de ma problématique : « Dans un contexte hospitalier de restriction
budgétaire des dépenses de santé, comment le cadre de santé peut-il
développer la polyvalence des infirmiers sur différentes unités de soins tout en
garantissant au patient des soins de qualité ? ».
77
Tout d’abord, le contexte économique est connu par les professionnels. Les
politiques de pôle visant à mutualiser le personnel commencent a être intégrées
par les professionnels même si une appartenance au service d’affectation est
toujours présente. L’adhésion à un mode de travail en polyvalence semble se
faire sur la base du volontariat et avec une forte notion d’entraide. Les éléments
facilitateurs pour ces professionnels sont en priorité d’ordre organisationnel.
Les cadres de santé conscients de cette priorité travaillent sur cet axe
d’uniformisation des organisations et des outils. Les plannings de travail
réalisés de façon anticipée ainsi que la mise en place de formation encouragent
les professionnels dans cette démarche. Une polyvalence circonscrite est aussi
souhaitée par les infirmiers.
L’accompagnement par les cadres de santé dans cette dynamique de
polyvalence n’est pas ressenti par les professionnels de façon unanime mais
l’écoute qui leur est accordée semble être un élément facilitant Les infirmiers
reconnaissent aux cadres de santé des qualités managériales. Grâce à la
mobilité dans d’autres services les professionnels font profiter les autres
collègues de leurs compétences. La polyvalence leur donne l’opportunité de
développer d’autres compétences, et de partager des expériences avec
d’autres professionnels. Un autre avantage de cette polyvalence est la création
d’un réseau. En effet des liens se tissent entre agents de services différents.
L’hypothèse émise : « La polyvalence bien managée élargit le champ de
compétences des infirmiers, en conservant la qualité des soins. » est en partie
confirmée. En effet les cadres de santé ont cette volonté d’accompagnement
des agents polyvalents. Ils sont à leur écoute et mettent en place des
formations, des groupes de travail visant à faciliter l’adaptation aux différentes
organisations.
Cependant les infirmiers, malgré leur volonté d’assurer une prise en charge de
qualité aux patients dénoncent un risque par le biais de prise en charge des
étudiants causé par un manque d’encadrement de ceux-ci.
78
Il est en effet difficile pour ces professionnels d’être performants sur un
encadrement d’étudiant si leur présence reste très ponctuelle. Cela rejoint à
dire qu’une polyvalence circonscrite permet une meilleure connaissance des
acteurs qui œuvrent à la prise en charge des personnes soignées.
Au final, le développement des compétences se fait soit par le biais de
formations, de tutorat, de partage de compétences, d’entraide. Les personnes
ressources identifiées, le professionnel volontaire pour être mobile développe
des compétences visant à le rendre polyvalent.
Les infirmiers mettent également en exergue un enrichissement personnel et
professionnel par le bais des liens qu’ils tissent en étant polyvalent.
79
5. ENSEIGNEMENTS TIRES
80
•
L’initiation à la recherche :
J’ai déjà expérimenté un travail de recherche en 2003 dans le cadre de ma
formation infirmière. Mon thème de travail portait sur les troubles des conduites
alimentaires des adolescents et ciblait plus particulièrement l’anorexie. A cette
époque pour élaborer ce mémoire j’ai réalisé également deux entretiens. Le
passage à l’écriture était difficile et le reste encore aujourd’hui. La méthodologie
est acquise mais je rencontre des difficultés pour synthétiser. Je maîtrise un
peu mieux l’outil informatique, mais celui-ci est encore un frein à la réalisation
de ces travaux. Malgré cela j’ai pris plaisir à échanger avec des professionnels
sur le thème de ce mémoire. Ce travail m’a permis de prendre du recul quant à
mes représentations et à mon expérience.
•
L’étude des différents concepts :
Ce travail de recherche m’a permis d’aborder la thématique de la polyvalence
et de la compétence sous différents prismes. Il m’a permis de faire le lien avec
le contexte actuel, et d’évaluer ce que les professionnels en connaissaient.
•
Le management
En tant que cadre de santé je suis au carrefour d’une hiérarchie, des agents et
des patients. Je mesure l’importance pour le personnel d’avoir des informations
leur permettant de comprendre les enjeux d’un mode de fonctionnement en
polyvalence. Il s’agit pour moi dans ma future fonction, de m’attacher à donner
du sens aux décisions prises. Il me paraît essentiel de procurer aux équipes
des conditions optimales de travail
81
CONCLUSION
82
Ce travail de recherche mené dans le cadre de ma formation cadre de santé
m’a permis de découvrir des auteurs et des concepts sur le thème de la
polyvalence. Mes lectures m’ont permis une analyse de ma pratique. Une
seconde richesse provient des divers échanges réalisés auprès d’infirmiers et
de cadres de santé, lors des entretiens, mais aussi lors des différents stages
effectués dans le cadre de la formation.
Ce travail m’a également donné l’occasion de prendre du recul quant à mes
représentations et mon expérience de terrain .Lors du choix de mon thème,
j’étais persuadée que les difficultés rencontrées dans la mise en place de la
polyvalence étaient en lien avec la résistance au changement. Or la réalité est
différente. La démarche du cadre ne doit pas se tourner uniquement vers un
accompagnement au changement mais aussi vers une démarche d’écoute et
de communication. Ceci me fait prendre conscience de l’importance à prendre
de la distance entre ce que j’observe et ce que je pense. C’est pour moi encore
une occasion de me remettre en question.
Dans un monde hospitalier en pleine mouvance, soumis aux contraintes
économiques et aux exigences de la qualité et la sécurité des soins, la gestion
des ressources en personnel tend à être optimisée. Ma future position de cadre
de santé me conduira à manager, à coordonner des équipes pluridisciplinaires.
Ce travail sur la polyvalence m’aidera dans mes fonctions, pour offrir des
conditions de travail satisfaisantes à chacun et trouver les bons leviers de
motivation. La mobilité, si elle est bien menée, doit pouvoir engendrer des
avantages pour un établissement dans son ensemble. Les compétences
individuelles mises au service du collectif participeront au développement d’un
mode de fonctionnement en polyvalence.
83
BIBLIOGRAPHIE
84
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organisationnelle à promouvoir, Gestions hospitalières, février 2001, n° 403.
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Consulté le 25/1/2015.
[5] Nicole RAOULT. Gestion prévisionnelles, préventives des emplois et des
compétences en milieu hospitalier, 1991, Paris, édition l’Harmattan, 285p.
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[10] http://www.henryford.fr/fordisme/taylorisme/ consulté le 21/3/2015
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[14] Guy LE BOTERF. De la compétence à la navigation professionnelle, 1997,
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85
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consulté le 8/2/2015.
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Management et avenir, 2005, édition : Management
Prospective Ed, 228p.
[17] Simone DUMAS. Du décloisonnement à la mobilité : la richesse des autres,
Objectif soins, décembre 2000, n°91.
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[19] Luc VAN CAMPENHOUDT/ Raymond QUIVY. Manuel de recherche en
sciences sociales, 2011,4ème édition DUNOD, 260p
[20] Bernard VUILLEMENOT. « Management d’équipe »
Consultant et
formateur à l’IFPS Besançon, Cours de septembre 2014, cahier n°1.
86
ANNEXES
87
Annexe 1
•
Canevas d’entretien avec les infirmiers(e)
•
Déterminants sociaux :
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
Age
Situation familiale
Nombre d’enfant
Année d’obtention du diplôme d’état infirmier
Ancienneté dans le service
Ancienneté dans l’établissement
Nombre de postes occupés
Parcours professionnel
Projet professionnel
Avez-vous choisi de travailler dans ce service ?
Travaillez vous à temps plein ?
à temps partiel ?
Entretien
(Je pars du postulat que l’infirmier(e) est mobile)
•
Qu’est ce que pour vous la polyvalence ?
•
Vous considérez- vous polyvalente ?
•
•
Si oui : Quels constats (analyse, réflexion) faites-vous de votre
expérience d’infirmière travaillant en polyvalence ?
•
Question de relance : Quels effets cette polyvalence a-t-elle sur vos
compétences ?
•
•
Si non : pourquoi ? Que vous manque-t-il ?
Comment le cadre de santé vous accompagne t- il dans cette
mobilité ?
88
Annexe 2
Canevas d’entretien avec les cadres de santé
Déterminants sociaux :
•
•
•
•
•
•
•
Age
Année d’obtention du diplôme d’état infirmier
Date de faisant fonction
Année d’obtention du diplôme de cadre
Ancienneté dans le service
Parcours professionnel
Projet professionnel
Entretien
•
Qu’est ce que pour vous la polyvalence ?
•
•
Quelle vision globale avez-vous de la mobilité et de la polyvalence au
sein de votre service, pôle, établissement ?
•
Thèmes de relance :
Management
Organisation
Formation
• Rencontrez-vous des difficultés ?
(Si oui quelles sont-elles ?)
Quels effets constatez- vous quant au niveau de compétence des infirmières
qui assurent des postes en polyvalence ?
89
Annexe 3
Les déterminants sociaux
Les cadres de santé :
Age
Obtention
Diplôme état
infirmier
Date
de
faisant
fonction cadre
Obtention
Diplôme
de
cadre
de
santé
Ancienneté
dans
le
service
Parcours
professionnel
Projet
professionnel
Cadre A
ETB 1
55 ans
Cadre B
ETB 1
54 ans
Cadre C
ETB 2
35 ans
Cadre D
ETB 2
40 ans
1982
1982
2002
2003
2005
2001
2009
2007
2007
2002
2012
2010
2 ans
14 ans
2 ans 1/2
5 ans
Pool
de
remplacement
IDE
(médecine,
chirurgie,
pédiatrie,
Hôpital
de
semaine
et
conventionnel)
Puis CDS en
médecine
Pédiatrie,
Bloc
opératoire,
chirurgie,
médecine
interne, puis
CDS
en
médecine
non
Cadre
supérieur
Beaucoup de
services
de
soins
intensifs,
SAMU,
DE
puéricultrice,
CDS en CHU
Puis CDS en
MPR
Divers
services
de
médecine,
Bloc
opératoire,
pause de 2
ans
pour
congé
parental,
3
ans
d
activités hors
domaine
sanitaire,
EHPAD,
gériatrie, CRF
Puis CDS en
MPR
enseignement non
CDS : cadre de santé
SAMU : service d’aide médicale d’urgence
MPR : médecine physique de réadaptation
DE : diplôme d’état
EHPAD : établissement hospitalier pour personnes âgées dépendantes
CRF : centre de réadaptation fonctionnelle
90
Annexe 4
Les déterminants sociaux
Les infirmières :
Age
Situation
Nombre
d’enfants
Obtention DE
Ancienneté
dans l ETB
Ancienneté
dans
le
service
Temps
de
travail en %
Choix
de
travailler
dans
ce
service
Nombre
de
postes
occupés
depuis le DE
Parcours
professionnel
Projet
professionnel
IDE F
ETB 1
34 ans
mariée
3
IDE G
ETB 1
33 ans
mariée
4
IDE H
ETB 2
30 ans
mariée
0
IDE I
ETB 2
44 ans
marié
2
2002
2008
2003
2009
2009
2009
2008
2009
2 ans 1/2
2ans 1/2
5 mois
6 ans
100%
80%
100%
100%
oui
oui
oui
non
5
7
2
3
EHPAD,
Bloc
opératoire
en CHU
et
clinique,
nuit
en
EHPAD
et MPR
non
Chirurgie,
médecine,
IDE
libérale,
gériatrie,
MPR.
Médecine
interne,
Pool
EHPAD,
chirurgie,
médecine
IDE libérale non
non
91