Leonard Bernstein (1918-1990)
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Leonard Bernstein (1918-1990)
Concert du vendredi 6 Décembre 2013 Séance de 10h30 Programme Leonard Bernstein (1918-1990) Alberto Ginastera (1916-1983) Leonard Bernstein (1918-1990) Issu d'une famille de juifs russes immigrés, Bernstein, pianiste de talent, chef d'orchestre fougueux, compositeur populaire, va être, jusqu'à sa mort, l'un des personnages les plus en vue de la musique américaine. Diplômé d'Harvard, il étudie le piano et la direction d'orchestre et l'orchestration à Philadelphie. Il fait des arrangements musicaux sous le pseudonyme de Lenny Amber. Chef assistant d'Arthur Rodzinski à l'Orchestre Philharmonique de New-York, il est amené à remplacer Bruno Walter, et c'est le début d'une grande carrière de chef d'orchestre. De 1945 à 1948, Bernstein dirige le New-York City Center Orchestra. En 1953, il est le premier chef américain invité à l'Orchestre Symphonique de la Scala de Milan. Puis encore le premier américain à être nommé directeur musical de l'Orchestre Phiharmonique de New-York (1958). L'Orchestre lui donnera, à son départ, le titre honorifique de «chef lauréat» jamais décerné auparavant. A partir de 1969 Bernstein mène une carrière de chef invité dans le monde entier et il consacre davantage de temps à la composition. Comme chef d'orchestre Bernstein a fait connaître la musique contemporaine en créant des œuvres de Ives, Poulenc, Messiaen, Copland, Henze, Barber... En plus de la composition, les activités de Bernstein ont toujours été multiples : concerts, enseignement, conférences, il joue également en soliste des concertos de Mozart, Ravel et Gershwin, et publie aussi quelques poèmes. La gloire est venue en 1957 lorsque Leonard Bernstein a composé la comédie musicale West Side Story pour Broadway, dont il a été tiré un film. Mais il a écrit aussi des œuvres pour orchestre (notamment trois Symphonies), de la musique de chambre (Brass music, 1948 ; Red, White and Blues pour trompette et piano, 1984), un opéra (Trouble in Tahiti, 1952), une opérette (Candide, 1955), de la musique sacrée (Messe, 1971), des musiques de scène (Wonderful town, 1953 ; A Quiet place, 1983), et de nombreuses musiques de film... Le style de Bernstein mêle le jazz, la musique populaire, le choral religieux, les songs, l'opéra italien, la pop music... On retrouve dans ses œuvres les influences de Stravinsky, Copland, Mahler et Hindemith. Dans un langage universel et accessible, il parvient à traiter certains grands thèmes, celui de la condition humaine, celui de la foi perdue et reconquise. Candide - Ouverture Candide (1956) est une opérette du compositeur américain Leonard Bernstein basée sur le conte philosophique éponyme de Voltaire. Le livret original a été écrit par Lillian Hellman mais depuis 1974, c’est souvent le livret d’Hugh Wheeler qui est utilisé car il est plus fidèle au texte de Voltaire. Origines Candide fut d’abord conçu par Lillian Hellman comme une pièce de théâtre musical dans le style de sa précédente mise en scène de l’Alouette de Jean Anouilh. Berstein fut si enthousiasmé par ce projet qu’il convainc Hellman d’en faire une «opérette comique» ; elle rédigea ainsi le livret original. De nombreux paroliers travaillèrent sur le show : d’abord James Agee puis Dorothy Parker, John Latouche et Richard Wilbur. Les paroles de «I Am Easily Assimilated» furent écrites par Leonard et Felicia Bernstein et les paroles d’«Eldorado» par Lillian Hellman. Hershy Kay réalisa toutes les orchestrations exceptées celle de l’ouverture, réalisée par Bernstein lui-même. Échec initial Candide fut créé le 1er décembre 1956 à Broadway dans une production mise en scène par Tyrone Guthrie et un orchestre dirigé par Samuel Krachmalnick. Le décor et les costumes avaient été créés par Oliver Smith et Irene Sharaff respectivement. La chorégraphie était de Anna Sokolow. Même si cette production fut un désastre, ne durant que deux mois pour un total de 73 représentations, la plupart des chansons furent enregistrées sur un album devenu culte depuis. Le livret de Hellman a été critiqué dans The New York Times comme étant trop sérieux. L'Ouverture classique en tant qu'œuvre Bien que le show lui même ait reçu des critiques mitigées, la musique attira immédiatement l’attention des critiques. À peine un mois après la première, Overture to Candide fut présenté par le New York Philharmonic. Cette ouverture devint immensément populaire et fut jouée par des centaines d’orchestres à travers le monde pendant les deux années suivantes. Une partie de l’ouverture fut également utilisée par Dick Cavett, pour la télévision américaine. Revivals Le show connut un revival en 1973. Harold Prince, connu pour son adaptation de Un violon sur le toit, demanda à Hugh Wheeler de réécrire un livret puisque Hellman avait catégoriquement refusé que son travail soit réutilisé. Le seul élément du livret d’Hellman qui fut conservé est le nom inventé pour le frère de Cunégonde, Maximilian qui n’est pas nommé dans la nouvelle. Cette version de 105 minutes en un acte, qui ne comprend que la moitié des numéros musicaux, est connue sous le nom de «version de Chelsea» car la première eut lieu au Chelsea Theater Center dans l’académie de musique de Brooklyn. En 1974, le show déménage à Broadway, et, toujours dirigé par Harold Prince fut beaucoup mieux reçu par le public. La version de Chelsea était également connue pour sa mise en scène unique. Eugene Lee aida Prince en créant des platesformes qui permettait de rediriger l’attention du spectateur sans changer de décor. Les acteurs étaient juchés sur ces plates-formes qui évoluaient en permanence, descendant, s’ouvrant ou se couplant pour former une autre scène. Un orchestre composé de 13 membres, répartis aux quatre coins de la scène, étaient dirigés par le chef d’orchestre, qui portaient un costume d’époque et pouvaient être vu par les musiciens et le public sur un écran. Il y a une longue description de cette mise en scène et des réponses du public dans le livre de Davi Napoleon. À la suite de la demande par les compagnies d’opéras pour une version plus légitime, comprenant l’intégralité des morceaux, le spectacle fut réécrit sur la base du livret de Wheeler. La «version Opéra» en deux actes, reprend la majorité de la musique de Bernstein, plus quelques chansons qui n’avaient pas été orchestrées pour la première production. La première performance de cette nouvelle version eut lieu en 1982 au New York City Opera sous la direction de Prince et dura trente-quatre représentations. En 1988, après la mort de Hellman, Bernstein se remit au travail avec John Mauceri pour une version qui correspondait plus à ses souhaits. Il pensait que dans les versions récentes, trop de choses avaient été modifiées, changeant totalement le contexte de certaines chansons. La première de cette nouvelle version fut mise en scène au Scottish Opera et après quelques autres changements, Bernstein lui même dirigea sa «version finale» avec Jerry Hadley, June Anderson, Christa Ludwig et Adolph Green. Dix ans quand le Royal National Theatre décida de mettre en scène «Candide», une autre version fut jugée nécessaire, et le livret de Wheeler fut réécrit par John Caird. Cette version est beaucoup plus proche de celle de l’œuvre originale de Voltaire qu’aucune autre auparavant. Les chansons restent principalement telles que Bernstein les avaient voulues dans sa «révision finale», avec quelques emprunts à Sondheim et Wilbur. Cette version est appelée «version RNT» et connut un grand succès. Candide fut remis au goût du jour à Broadway en 1997, dirigé encore une fois par Harold Prince. La production reçut des critiques mitigées. En 2004, Lonny Price a mis en scène une version dirigée par Marin Alsop, pour quatre représentations du 5 au 8 mai 2004. Cette production fut diffusée dans l’émission «Great performances» sur la chaine américaine PBS. Cette production incluait deux duos, rarement chantés, entre Cunégonde et La Vieille Dame, «We are Women» et «Quiet». En 2006, en l’honneur des 50 ans de la création de «Candide», le Théâtre du Châtelet créa l'œuvre en France en proposant une production sous la direction de Robert Carsen. La production a rejoint la Scala de Milan en 2007 et l'English National Opera en 2008. La mise en scène reproduisait le plateau d’une émission de télé américaine des années 1950 et faisait apparaître Voltaire, changeant de chaîne ente les différentes scènes et faisant office de narrateur. Carsen situa l’action dans les années 1950-1960 dans un monde américanisant, et critiquant la société et la politique contemporaines. Cette production fut filmée et diffusée sur Arte. Dans le cadre des European Opera Days, un week-end portes ouvertes dans les grands opéras français fut organisé. À cette occasion la vidéo de cette performance fut utilisée et projetée en haute définition sur un écran au Théâtre du Châtelet. Cette production fut sévèrement critiquée par le mensuel «American Record Guide» pour son mélange des styles. En 2008, Vernon Mound dirigea une production de Candide à Karlstad en Suède, basée sur la «version RNT» de John Caird. Au départ un échec, Candide est maintenant devenu un classique, et jouit d’une grande popularité, notamment dans les écoles de musiques américaines, pour sa musique et les opportunités qu’il offre aux chanteurs. . Danses Symphoniques de West Side Story West Side Story est un drame musical américain de Leonard Bernstein (musique), Stephen Sondheim (lyrics) et Arthur Laurents (livret), inspirée de la tragédie Roméo et Juliette de William Shakespeare et créée le 26 septembre 1957 au Winter Garden Theatre de Broadway. La chorégraphie et la mise en scène étaient de Jerome Robbins, les décors d'Oliver Smith et les costumes d'Irene Sharaff. Située dans le quartier de Upper West Side à New York dans le milieu des années 1950, l'intrigue cible surtout la rivalité entre Jets et Sharks, deux bandes de jeunes des basquartiers, pour le monopole du territoire. Les Sharks appartiennent à la première génération d'Américains émigrés de Porto Rico. Ils sont raillés par les Jets, jeunes de la classe ouvrière blanche qui se considèrent comme les véritables Américains car nés en Amérique, même si de parents eux-mêmes émigrés, qui d'Irlande ou de Suède ou encore de Pologne. Tony, ami du chef des Jets Riff, rencontre Maria, la sœur de Bernardo, chef des Sharks. Ils tombent amoureux pour le meilleur et le pire. La noirceur du thème, la musique sophistiquée, l'importance des scènes de danse, l'accent mis sur les problèmes sociaux ont constitué un tournant dans le théâtre musical américain. La partition de Bernstein est devenue extrêmement populaire grâce à des airs comme Something's coming, Maria, America, Somewhere, Tonight, Jet Song, I Feel Pretty, One Hand, One Heart, Gee, Officer Krupke et Cool. Produit par Robert E. Griffith et Harold Prince, le spectacle tient l'affiche durant 732 représentations avant de partir en tournée. Nommé en 1957 pour le Tony Award de la meilleure comédie musicale (finalement accordé à The Music Man de Meredith Willson), il remporte le prix de la meilleure chorégraphie pour Robbins. La production londonienne connaît une durée de représentation encore plus importante et le spectacle fait l'objet de nombreuses reprises et bénéficie d'un succès international. Une adaptation cinématographique est réalisée par Robert Wise et Jerome Robbins en 1961. Interprété par Natalie Wood, Richard Beymer, Rita Moreno, George Chakiris et Russ Tamblyn, le film remporte dix Oscars (sur onze nominations) lors de la 34e cérémonie des Oscars. Le livret original écrit par Laurents suit scrupuleusement Roméo et Juliette mis à part les personnages de Rosaline et des parents des deux amants supprimés dès le départ ainsi que les scènes de la mort feinte puis du suicide de Juliette un peu plus tard. La langue pose un problème : les jurons sont rares dans le théâtre élisabéthain et il faut absolument éviter les expressions argotiques qui ne manqueraient pas de paraître «datées» au moment de la première. Finalement, Laurents invente un langage aux sonorités proches de celles de la rue comme par exemple «cut the frabba-jabba» sorti tout droit de son imagination. Sondheim transforme en lyrics de longs passages dialogués, parfois juste une simple phrase comme «A boy like that would kill your brother». Avec l'aide d'Oscar Hammerstein, Laurents persuade Bernstein et Sondheim de la nécessité de déplacer vers la scène située dans la boutique de mariage One Hand, One Heart, considérée trop simpliste pour la scène du balcon et remplacée par Tonight écrite à cet effet. Laurents estime que la tension de la pièce doit être allégée pour accroître l'impact de l'issue tragique et ajoute dans ce but l'effet comique produit par l'officier Krupke au second acte. Sur d'autres questions il n'est pas suivi : il trouve les paroles d'America et I Feel Pretty trop spirituelles pour les personnages auxquels elles sont destinées mais elles sont conservées et se trouveront parmi les airs favoris du public. Une autre chanson, Kid Stuff, est rajoutée et rapidement éliminée lors de l'avant première de Washington, D.C., Laurents persuadant les autres qu'elle entraînerait le spectacle sur la pente de la comédie. Bernstein compose simultanément West Side Story et Candide, ce qui conduit à certains échanges de matériel entre les deux œuvres : le duo de Tony et Maria One Hand, One Heart, était initialement destiné à Cunégonde. La musique de Gee, Officer Krupke est tirée de la scène de Venise. Laurents explique ainsi le style voulu par l'équipe de la création : «De même que Tony et Maria, notre Roméo et notre Juliette, se démarquent des autres enfants par leur amour, de même, nous avons essayé de les situer à part par leur langage, leurs chansons, leurs mouvements. Chaque fois que possible dans le spectacle, nous avons essayé de renforcer l'émotion ou d'articuler l'inarticulé de l'adolescence au travers de la musique, du chant ou de la danse.» La partition En 1961, Leonard Bernstein tire de sa partition une suite orchestrale intitulée Symphonic Dances from West Side Story dont une des pièces, Mambo, est parfois jouée isolément en raison du brio de son orchestration. 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. Prologue (Allegro moderato) Somewhere (Adagio) Scherzo (Vivace e leggiero) Mambo (Meno presto) Cha-Cha (Andantino con grazia) Meeting Scene (Meno mosso) Cool / Fugue (Allegretto) Rumble (Molto allegro) Finale (Adagio) Alberto Ginastera (1916-1983) Élève de López Buchardo à Buenos Aires, Alberto Ginastera (1916-1983) est, avec Heitor Villa-Lobos, Carlos Chávez et Silvestre Revueltas, l'un des plus illustres compositeurs latino-américains du XXe siècle. Il enseigne la composition au Conservatorio Nacional à partir de 1941, mais, censuré par la dictature de la Révolution argentine, quitte son pays en 1970 pour s'établir en Suisse. Surtout porté vers l'écriture d'œuvres de grande envergure (opéras, symphonies, cantates, concertos), Ginastera laisse également de la musique de chambre, des partitions pour piano et quatre recueils de chants. Il est inhumé au Cimetière des Rois à Plainpalais (Genève). Suite du ballet Estancia Le ballet Estancia dépeint en termes héroïques et nostalgiques la vie dure des Gauchos nomades dans les plaines sauvages d'Argentine, avec une romance entre un garçon de la ville et une fille de ranch Bien qu’éloigné de son Argentine natale, Alberto Ginastera n’a, dans esprit, jamais quitté la maison. Même dans ses œuvres les plus cosmopolites, il ya des notes de musique folk, les sons de la guitare, les rythmes de la danse populaire. Dans ses plus jeunes années, presque toutes ses œuvres sont imprégnées de musique autochtone : le ballet Panambí, le Malambo pour piano, le cycle de chansons Horas de una estancia, et la suite du ballet Estancia. Une commission du Ballet Caravan de Lincoln Kirstein est venu trouver Ginastera pour Estancia mais la compagnie fut dissoute qu'elle ne puisse présenter un spectacle. Pour sauver la musique, le compositeur en a extrait une suite de quatre danses ; le ballet complet devant attendre plus de neuf ans avant la première représentation. Le titre vient du mot argentin pour désigner un ranch, ce qui pour Ginastera et d'autres argentins est une évocation très forte des on pays. Comme il l'explique dans la notice pour Pampanea n ° 3: Chaque fois que j'ai traversé la pampa, mon esprit s’est sentit inondé par des impressions changeantes, parfois joyeuses, parfois tristes, certaines euphorique et d'autres emplies d’une profonde tranquillité. Celles-ci se produisent par l’infinie immensité ainsi que par la transformation que subit la campagne au cours de la journée... D’ailleurs, dans certaines parties de mon ballet Estancia le paysage apparaît comme un véritable protagoniste, imposant son influence sur les sentiments des personnages. Ce sentiment de caractère presque humain dans le paysage est palpable dans le premier mouvement de la suite, où les rythmes puissants et l'orchestration suggèrent un paysage sauvage. La "danse du blé" évoque la "tranquillité profonde" -mentionnée cidessus par Ginastera-, dans les deux derniers mouvements, croquante. Le plus intéressant d'un point de vue folklorique est le final "Malambo", qui, en Argentine, est à la fois une danse et un rituel. Un livre d'histoire publié à Buenos Aires en 1883, a décrit son importance : En matière de danse, rien n'est comparable à la Malambo. Il s'agit d'un «tournoi» de gaucho lorsque celui-ci ressent l'envie d'afficher son talent de danseur. Deux hommes se placent en face l’un de l'autre. La guitare débute et l'un des gauchos se met à danser, puis il s'arrête et son adversaire continue et ainsi de suite. La joute peut durer jusqu’à six à sept heures ... Les spectateurs applaudissent, crient et font des paris sur un danseur ou sur l’autre. Même les femmes et les enfants sont emportés par l'enthousiasme frénétique engendre par le mouvement vertigineux. La partition Ouverture 1er mouvement "Les Travailleurs agricoles" : dynamique, motorique avec ostinatos et montée en puissance, 2ème mouvement, "Danse du Blé" : danse lyrique et mélancolique (douce, sensible, romanesque), 3ème mouvement "Les Eleveurs" : épopée sauvage (l'hacienda,) avec un rodéo, 4ème mouvement "Malambo" : final qui commence en tournoyant, se développe en transes fébriles, en devenant de plus en plus échevelées (avec un fort piment folklorique, du nerf, de l'énergie physique à l'état pur).