Regard d`observateurs médicaux sur l`état sanitaire de la Tunisie

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Regard d`observateurs médicaux sur l`état sanitaire de la Tunisie
Regard d’observateurs médicaux sur
l’état sanitaire de la Tunisie sous le
Protectorat français (1881-1956)
BENOIT GAUMER
Résumé. De l’occupation militaire de la Tunisie par la France en 1881 à
l’Indépendance du pays en 1956, se succèdent plusieurs groupes d’observateurs médicaux qui nous ont légué une connaissance précieuse des états de
santé des populations composant la mosaïque tunisienne. Alors que la Tunisie
précoloniale a été souvent présentée comme une terre de «calamités et de
fléaux», les «topographes médicaux», pour la plupart des médecins militaires qui
accompagnent le corps expéditionnaire français, mettent plutôt l’accent sur la
relative rareté des épidémies dans la Régence. Pour certains d’entre eux la situation sanitaire serait nettement meilleure qu’en Algérie, pourtant colonisée
depuis un demi-siècle. Avec les travaux de l’Institut Pasteur de Tunis et les
thèses de doctorat en médecine des internes des hôpitaux de la capitale de la
Régence nous disposons d’un second corpus de connaissances quasi exhaustives sur les principales maladies infectieuses qui sévissaient dans le pays. Dans
l’entre Deux Guerres mondiales, l’apparition de l’hygiène sociale met l’accent
sur la lutte antituberculeuse et la protection de la santé de l’enfant et de la
mère. Le regard des observateurs médicaux se déplace vers les maladies sociales
ou «ordinaires» et leur conditionnement. A la veille de l’Indépendance du pays,
un troisième corpus de connaissances produit par le groupe d’études médicosociales de l’Université nouvelle, renforce cette notion d’une forte relation entre
niveaux de vie et santé. L’analyse et la confrontation des corpus de ces trois
groupes d’observateurs médicaux permettent de dresser un portrait plutôt
nuancé de la situation sanitaire de la Tunisie sous le Protectorat français.
Abstract. From the military occupation of Tunisia by France in 1881 to that
country's independence in 1956, several successive medical observers left
behind a wealth of information on the state of health of the populations composing the Tunisian mosaic. Even though pre-colonial Tunisia has often been
described as a land saddled with disasters and plagues, medical “topographers,”
Benoit Gaumer, Département d’administration de la santé de la Faculté de médecine,
Université
de Montréal.
Author, position
CBMH/BCHM / Volume 22:1 2005 / p. 83-102
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BENOIT GAUMER
most of whom were military doctors accompanying the French expeditionary
corps, focused on the fact that few epidemics ever occurred in Tunisia at the
time of the Regency. According to some of them, the health situation was better
than in Algeria who had been a colony for half a century. The research conducted by the Institut Pasteur in Tunis and medical dissertations by hospital
interns in the Regency’s capital provide a second source of information comprising invaluable information about endemic infectious diseases. In the interwar period, the social hygiene movement concentrated upon fighting tuberculosis, and protecting infant and maternal health, shifting medical focus to social
or “ordinary” diseases and their treatment. Prior to Tunisian independence, a
third wave of studies conducted by the new university’s socio-medical research
group reinforced the connection between lifestyle and health.
INTRODUCTION
Un quart de siècle après son Indépendance, la Tunisie peut s’enorgueillir d’une amélioration spectaculaire de l’état de santé de sa population,
mesurée à partir de quelques indicateurs. Le taux de mortalité infantile
passe en effet de 189,7 pour mille en 1956 (à Tunis), à 80 pour mille en
1981; la mortalité générale régresse de 20,3 pour mille (toujours à Tunis)
à 8,1 pour mille durant la même période. Les planificateurs, préparant le
VIième plan de développement du pays, peuvent ainsi déclarer : «la
disparition des grands fléaux épidémiques est aujourd’hui chose faite.
De même les maladies épidémiques, telles que la tuberculose, le trachome, ont connu un recul spectaculaire»1.
Parmi ces fléaux endémo épidémiques enfin contrôlés, le paludisme
constitue le meilleur exemple des problèmes sanitaires dont la résolution
n’est pas due seulement à la campagne d’éradication volontairement
mise en œuvre aux lendemains de l’Indépendance avec l’aide de
l’O.M.S., mais aussi aux efforts entrepris dans la Régence sous le Protectorat français, trop tardivement sans doute2.
Peut-on dresser un bilan sanitaire objectif du régime de Protectorat de
la France sur la Tunisie, entre 1881 et 1956? Près d’un demi siècle après la
disparition de ce régime, le recul de l’observation, la passion retombée
des acteurs de l’Indépendance nationale, comme celle des partisans du
maintien de la France à tout prix, permettent d’aborder ce bilan de l’action sanitaire avec plus de sérénité. Nous devons saluer en particulier les
efforts entrepris par l’Institut supérieur d’histoire du mouvement
national, pour dresser un premier tableau de l’infrastructure et de la
politique sanitaire dans la Tunisie des XIXième et XXième siècles3, ceux
de Mohamed Moncef Zitouna, dégageant un portrait de la médecine
en Tunisie de 1881 à 19944 et d’Anne Marie Moulin, esquissant la participation française à la modernisation de la médecine en Tunisie5. Salvatore
Speziale est lui beaucoup plus réservé concernant le bilan sanitaire de la
colonisation française, s’interrogant sérieusement sur son succès réel6.
Regard d’observations médicaux sur l’état sanitaire
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S’il est un premier bilan sur lequel semblent s’accorder les historiens,
chercheurs tunisiens ou étrangers, ce serait celui de la contribution de
l’école pastorienne de Tunis à la connaissance des maladies endémo
épidémiques sévissant en Tunisie à la fin du XIXième et au début du
XXième siècle. En réalité, des topographies médicales du corps de santé de
l’armée d’occupation aux études sur les niveaux de vie de la Tunisie pré
indépendante, le diagnostic de l’état sanitaire des populations du pays
s’est considérablement transformé tout au long de la période du Protectorat français. C’est ce que démontre l’analyse des travaux de trois
groupes d’observateurs médicaux, présentés dans cet article et qui se
succèdent de la conquête à l’indépendance. Les études épidémiologiques
entreprises sous les auspices de l’Institut Pasteur ne constituent pas la
seule source d’informations concernant les états de santé des différents
groupes sociaux qui composent la Tunisie coloniale. Faute de données
démographiques fiables avant le recensement de 1921 et la mise en place
tardive d’un système d’état civil comptabilisant les décès et leurs causes,
les premières estimations seront d’abord qualitatives et relèveront des
autorités militaires d’occupation. Progressivement cependant, les civils
prennent le pas sur les militaires et le bureau d’hygiène de la ville de
Tunis, sous la houlette du docteur Ernest Conseil, fait figure de pionnier
dans la collecte des données de mortalité et des causes de celle-ci, à partir de 1909. C’est encore à Tunis que surviendra, beaucoup plus tard, une
seconde innovation épidémiologique avec les enquêtes sur les niveaux de
vie, mesurant la situation socio-sanitaire et non seulement la mortalité des
différents groupes sociaux constituant la mosaïque du pays.
Mais quelle était la situation avant l’instauration du Protectorat? Celuici a-t-il fait tabula rasa du passé?
LA TUNISIE PRÉCOLONIALE, UNE TERRE DE CALAMITÉS OU UN
ELDORADO?
Entre 1845 et 1880, on recense pas moins de cinq estimations de la population de la Régence par des observateurs étrangers, anglais ou
français. Les évaluations, de moindre amplitude que dans les deux autres
pays du Maghreb, oscillent entre 2 061 000 en 1845 (Richardson) et
800 000 en 1853 (Pélissier de Reynaud), pour se stabiliser à 1 000 000 en
1880, à la veille de l’occupation par l’armée française7.
Quelle était la situation sanitaire de la Tunisie au moment de la signature du Traité du Bardo en 1881 et dans les décennies qui l’ont immédiatement précédé?
Rares sont les observateurs qui disposent d’informations quantitatives suffisamment étendues et de longues durées, permettant de
dégager un portrait, même approximatif, de l’état de santé de l’ensemble
des populations de la Tunisie et non seulement de Tunis. Ce sont d’abord
les fléaux comme la peste et le choléra ou les calamités comme les
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famines et les guerres civiles qui sont retenus par les chroniqueurs. Les
chiffres ne manquent pas lorsqu’il s’agit de catastrophes démographiques, bien qu’ils soient peu sûrs et souvent exagérés8. Le docteur
Lumbroso, médecin en chef de Son Altesse le Bey de Tunis, né dans
cette ville mais ayant fait ses études de médecine dans les «savantes
écoles de Toscane», nous donne une description topographique de la
ville permettant surtout de mesurer «l’étendue des services que rend la
nouvelle municipalité de Tunis»9. Plutôt dithyrambique vis-à-vis de son
maître, son témoignage doit être reçu avec prudence. Nous sommes en
1860, un premier bureau d’hygiène vient d’être mis en place. Comme
beaucoup de ses contemporains médecins, le docteur Lumbroso accorde
une grande importance au climat et à la géographie des lieux dans la survenue des maladies qu’elles soient endémiques ou sporadiques.
Imprégné de la conception «miasmatique» de l’époque, il s’étonne «de ce
que les indigènes n’éprouvent aucun effet fâcheux de leur négligence à
repousser les plus simples précautions d’hygiène». En simplifiant, selon
lui, les causes seraient reliées aux conditions d’habitat, d’ailleurs
meilleures chez les musulmans que chez les israélites. Dans l’ensemble,
il croit «pouvoir conclure avec raison que la salubrité de notre climat
doit influer extraordinairement sur le maintien de la santé publique, sur
l’heureuse réussite des plus importantes opérations chirurgicales et que
cette salubrité est le principe de notre bien-être physique».10 En 1806 le
docteur Franck, un autre médecin personnel du Bey de Tunis Hamouda
Pacha, décrivait lui aussi, à cette époque, la situation sanitaire dans la
Régence sous un jour plutôt favorable. Il écrivait alors : «Les maladies
chroniques y sont moins communes qu’en Europe, et l’on peut rapporter cette rareté, à la bonté du climat, à la simplicité des institutions,
des mœurs et surtout du régime de vie»11. Il conteste d’ailleurs la croyance selon laquelle «la Barbarie est un foyer de peste permanent et
inépuisable». Pour lui en effet «il est constant qu’il y a eu, dans le dix
huitième siècle, un intervalle de quatre vingt deux années pendant
lesquelles ce fléau n`y a exercé aucun ravage».
A partir de sources secondaires, il est possible de reconstruire l’histoire des principales épidémies survenues au cours du XIXième siècle et
qui auraient marqué le passage d’une médecine arabe à une médecine
européenne12. Deux épidémies majeures de peste seraient survenues en
1784 et 1818, deux autres épidémies sévères de choléra en 1849 et 1867,
avec de nombreuses apparitions du typhus dont celles de1868 et 1874,
particulièrement éprouvantes pour le pays. Ces épidémies seront l’occasion d’introduire en Tunisie l’hygiène publique telle qu’elle se pratiquait
dans les pays européens. Elles offriront également l’opportunité d’une
mobilisation communautaire comme celle qu’entraîne la survenue du
choléra en 1856 et 186713. Les grandes épidémies de peste ont surtout été
analysées quant à leurs répercussions sur les échanges commerciaux
plutôt que sur l’état de santé quotidien de la population tunisienne14.
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Des recherches subséquentes sont donc nécessaires pour mieux préciser cela et nuancer, sinon réfuter, le tableau d’une Tunisie, terre de
fléaux et calamités sous «domination turque ou arabe», entre deux périodes de colonisation civilisatrice, celles de Rome et de la France15.
Des sources primaires encore inexploitées attendent les chercheurs qui
pourraient renouveler notre représentation de la santé des tunisiennes et
tunisiens avant 1881.
LES TROIS PREMIÈRES DÉCENNIES DU PROTECTORAT ET LES
TOPOGRAPHIES MÉDICALES
Avec l’occupation de la Régence par les troupes françaises, nous disposons d’une série de topographies médicales rédigées le plus souvent
par les médecins militaires en charge du service médical et médico-légal
des cercles militaires qui quadrillaient l’ensemble du territoire, sur le
modèle des bureaux arabes d’Algérie. Ces topographies médicales ont
été confiées, la plupart du temps, aux Archives de médecine et de pharmacie
militaires et aux Archives de médecine navale, parfois reproduites dans la
Revue Tunisienne ou conservées aux archives de l’Hôpital du Val de Grâce
à Paris. Nous disposons ainsi d’une série d’études précieuses, bien que
qualitatives et seulement cliniques, sur les maladies et accidents qu’ils
rencontraient le plus fréquemment lors de leurs consultations des
«indigènes». Ces portraits de l’état sanitaire des populations rurales, de
Tabarka au Djérid, mais aussi de la ville de Tunis, s’échelonnent entre
1881 et 1894.
Le médecin aide major de première classe J.F. Guéguan, affecté au
15ème dragon, arrive en janvier 1883 à Ghardimaou, à l’hôpital militaire
temporaire. A partir de ce poste d’observation, pendant un an, il consigne «de manière imparfaite», estime-t-il, ses observations concernant la
topographie des lieux mais aussi la pathologie qu’il rencontre quotidiennement16. Assurant gratuitement le service médical indigène tôt le
matin, d’abord avec un interprète, en raison de son ignorance de la
langue arabe, puis seul après un déboire mémorable avec un interprète
malhonnête, l’affluence qu’il provoque (jusqu’à une centaine de consultants le mardi, jour de marché), flatte son amour-propre! Signalant la
préférence qu’accorderaient les «indigènes» aux médecins français sur
ses confrères arabes, il attribue cela au peu de succès des traitements de
ces derniers, ainsi qu’au prix élevé de leurs consultations. «Chez les
Arabes, écrit-il, le médecin qui fait payer le plus cher ses visites n’est
pas comme en France réputé le meilleur par la majorité». Son récit fourmille d’anecdotes reproduisant fidèlement les représentations populaires de la maladie et des traitements de l’époque. Ses cartons de rendezvous, qu’il institue pour encourager le suivi des traitements, sont utilisés
comme des amulettes. Ses pilules n’ont aucun succès, les consultants
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préférant les médicaments liquides et surtout amers. Ce médecin militaire se flatte même d’avoir une clientèle féminine, en particulier les
jours de marché où des femmes arabes viennent, accompagnées de leur
mari. Bien qu’il n’ait pas toujours de chiffres à nous offrir, «ayant commis
la faute regrettable de prendre des notes insuffisantes au début», il nous
a laissé cependant un portrait local apparemment exhaustif concernant
«les principales affections observées en 1883 chez les arabes de Ghardimaou et des tribus environnantes».
Pour lui, la syphilis occupe le premier rang dans le cadre pathologique
de la région, trois cent personnes environ ayant consulté entre le 15 janvier et le 20 novembre 1883, avec deux tiers d’accidents tertiaires, c’est-àdire des formes avancées de la maladie, dont il décrit exactement les
formes cliniques : perforations du voile du palais et de la voûte palatine,
caries, nécroses, gommes, tumeurs blanches, douleurs ostéoscopes (sic).
D’après ce médecin les accidents secondaires sont beaucoup moins nombreux et de moindre gravité, tout comme les accidents «primitifs» (sic)
qu’il rencontre rarement17. Peut-être présomptueux sur l’efficacité de
ses interventions, il signale l’action rapide des médicaments qu’il
emploie, dont l’iodure de potassium, bien qu’il se plaigne de revoir
rarement les malades traités. Parmi les affections chirurgicales, il est surpris de constater la rareté des fractures et luxations. Peut-être sousestime-t-il le succès des confrères arabes et des barbiers! Les otites
externes et moyennes chroniques sont assez fréquentes, écrit-il, mais
«ce sont les maladies des yeux qui se sont montrées le plus souvent,
pendant son séjour en Tunisie : par ordre de fréquence la conjonctivite
granuleuse, le ptérygion, la kératite, enfin la cataracte». Se bornant à
constater la fréquence de la phtysie parmi les affections des organes respiratoires, il s’explique mal la variation des maladies des organes de la
circulation selon les différentes tribus qui le consulte. «Les embarras gastriques se rencontrent journellement chez les Arabes», écrit-il. Il rencontre également un grand nombre d’urétrites blennorragiques. Par contre
il s’étonne de rencontrer peu de parasitose intestinale comme le taenia.
Il termine son portrait sanitaire de cette région du nord de la Tunisie en
mentionnant : «l’extrême fréquence de la fièvre tellurique chez les
indigènes», surtout des «formes cachectiques», n’ayant par contre jamais
rencontré «d’accès pernicieux». Ses tentatives de vaccination contre la
variole se soldent toujours par un échec, les «indigènes» préférant la
variolisation, très répandue semble-t-il. Ayant remplacé le médecin de la
Compagnie des chemins de fer Bône Guelma, il ébauche une comparaison avec les maladies dominantes parmi les Européens. Chez ces
derniers, surtout les terrassiers de la Société des Batignolles, Calabrais
pour la plupart, le paludisme est fréquent et grave, leur cité étant située
sur les bords de la Medjerdah. Par contre, note-t-il astucieusement, les
employés de chemin de fer seraient protégés par des conditions d’ins-
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tallation satisfaisantes et l’absence de service de nuit, évitant ainsi en
partie les piqûres nocturnes de moustiques.
Cette description des maladies les plus fréquentes, rencontrées parmi
la population tunisienne consultant l’un des premiers hôpitaux militaires installés par le corps expéditionnaire français, paraît digne d’intérêt, bien qu’elle repose exclusivement sur le regard clinique d’un seul
médecin. L’auteur de ces notes et souvenirs, pratiquant l’anthropologie
médicale sans le savoir, cherche à se débarrasser de tout obstacle linguistique et peut-être culturel lui permettant de pénétrer les expressions
et représentations populaires de la maladie et des traitements. Sa description des médecins arabes et de leurs pratiques, «plus nombreux en
Tunisie qu’on ne le croit généralement», écrit-il, laisse percer une certaine
bienveillance à leur égard.
Le ton du docteur Louis Catrin, médecin major de deuxième classe,
est tout autre dans son essai de topographie médicale de Medjez el Bab18.
Nous sommes pourtant à la même époque et toujours dans le nord de la
Tunisie. Ghardimaou et Medjez el Bab sont deux localités situées dans la
vallée de la Medjerdah, la région la plus fertile du pays et bénéficiant
d’une ligne de chemin de fer parcourant toute cette plaine de l’est à
l’ouest. La population de Medjez el Bab est estimée par Catrin à neuf
cent habitants, réfutant les estimations antérieures à 1600, mais sans
véritable argumentation. Avant d’en arriver à la présentation de ses
observations sur la pathologie de la population indigène, la vision qu’il
donne des «habitudes» de celle-ci l’oppose au regard plutôt bienveillant de son collègue de Ghardimaou. Tous les clichés racistes des
Européens chrétiens et riches, sur les Maghrébins musulmans et pauvres,
sont alors présents. Pas surprenant que les «Arabes et surtout les
femmes» n’accourent pas en foule à sa consultation! Et pourtant, lui
aussi fait l’effort d’apprendre la langue arabe pour se passer des interprètes indigènes qu’il accuse de rançonner la population. Ses observations sont plus rigoureusement collectées que celles de son collègue.
Comme ce dernier il reconnaît la dextérité de certains confrères «arabes»,
en particulier pour suturer les plaies. A Medjez el Bab, c’est également la
syphilis qui domine le tableau de sa pathologie locale, avec une répartition presque égalitaire des cas entre les hommes et les femmes. Il s’agit
de formes avancées de la maladie puisque les accidents tertiaires dominent, avec cependant des guérisons spectaculaires par l’iodure de potassium, alors que les traitements au mercure échoueraient le plus souvent.
Les maladies des yeux sont aussi très fréquentes, essentiellement ce qu’il
appelle des «ophtalmies granuleuses», c’est-à-dire probablement le trachome. Viennent en troisième position les affections intestinales, «embarras gastriques, constipations et dyspepsies» qu’il attribue à «la nourriture
épicée des indigènes». Louis Catrin ne s’étonne pas de la relative rareté
des fièvres intermittentes chez les indigènes, en raison, écrit-il, de «l’ac-
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BENOIT GAUMER
coutumance à la malaria». Bien qu’il ait diagnostiqué un assez grand
nombre de cas de phtysie parmi les affections des voies respiratoire rencontrées, il ne croit pas à sa contagiosité, «n’ayant jamais observé
d’épidémies». Les anémies sont assez fréquentes, efficacement traitées
par le fer, ainsi que les maladies des oreilles. Comme à Guardimaou les
blessures sont rares, les indigènes préférant consulter les médecins
arabes ou les barbiers. Ces deux tableaux de la pathologie sévissant dans
la moyenne vallée de la Medjerdah reflètent probablement assez fidèlement les principaux problèmes de santé ressentis par les tunisiens de
cette région du pays, à cette époque de l’invasion du pays par l’armée
française. Les consultations ayant lieu en plein vent ou sous une tente,
les deux médecins connaissant imparfaitement la langue de ceux et celles
qui les consultent, les diagnostics, exclusivement cliniques, doivent être
retenus avec réserve. Malgré cela, la ressemblance des deux tableaux est
frappante, pouvant s’expliquer par la formation identique de ces deux
médecins, pourtant différents quant à la qualité du regard qu’ils portent sur ce pays nouveau pour eux. La situation sanitaire ne paraît pas
catastrophique, nos deux topographes médicaux la jugeant même
meilleure qu’en Algérie, colonisée depuis cinquante ans.
Dans une courte contribution à la géographie médicale du nord de
la Tunisie, le docteur Friocourt dresse un tableau assez semblable de
la pathologie sévissant à Bizerte autour de 188019. Là encore pour cet
observateur médical, «la syphilis, rare chez les Européens, fait de grands
ravages chez les Arabes». Il note également que les affections du tube
digestif sont des plus communes, de juillet à octobre, en particulier «l’entérocolite et la diarrhée qui moissonnent les enfants en grand nombre».
Alors que la fièvre typhoïde règne aussi à l’état sporadique, la fièvre
intermittente, c’est-à-dire le paludisme, serait abscente à Bizerte même,
du fait de la proximité de la mer, sévissant par contre sous forme d’un
foyer intense à Mateur, ville située près d’un lac saumâtre. Alors que ses
deux confrères ne mentionnent pas cette affection, Friocourt identifie
«le rhumatisme, tant aigu, fébrile que chronique, comme excessivement
fréquent», atteignant aussi bien les Européens que les Arabes et responsable de complications cardiaques, «fournissant un chiffre élevé de la
mortalité». La diphtérie serait assez fréquente, la rougeole et la scarlatine
excessivement rares. Contrairement aux deux observateurs précédents,
il note rarement des maladies respiratoires de même que des affections
des yeux. Pour lui, «les plaies, les traumatismes de quelque nature qu’ils
soient guérissent vite et bien», mais prudent il ajoute : « le tétanos comme
complication des plaies serait inconnu». Certaines informations qu’il
fournit concernant la variole et le choléra paraissent surprenantes. Il
a probablement raison lorsqu’il déclare : « la variole, en dehors des
épidémies est excessivement rare», rappelant les épidémies de 1872 et
1878. La première aurait provoqué mille décès sur une population
Regard d’observations médicaux sur l’état sanitaire
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estimée à Bizerte de six mille «âmes». Quant à la seconde, ses estimations
de la mortalité paraissent assez approximatives : «deux à trois cents
Arabes, une cinquantaine d’Israélites et trois Chrétiens». Estimant que la
vaccination est fort répandue chez les indigènes, il confond probablement celle-ci avec la variolisation. Quand il affirme péremptoirement :
«Depuis 1850, le choléra n’a point fait d’apparition à Bizerte, non plus
que dans la Régence», ses sources d’informations, qu’il ne nous fournit
pas, mériteraient une vérification. Rejoignant ses confrères lorsqu’il
estime que «les vers intestinaux, ascaris, lombricoïdes et oxyures, sont
très communs chez les enfants, alors que le taenia est quasiment
inconnu», il complète son tableau de la pathologie sévissant à Bizerte en
nous fournissant des chiffres sur l’endémicité relative de la lèpre (huit
à dix lépreux). Cette maladie sera l’objet de la première étude épidémiologique d’envergure qu’entreprendra Charles Nicolle, directeur de
l’Institut Pasteur de Tunis, quelques décennies plus tard20.
Ces trois topographies médicales, remarquables par leur convergence,
nous renseignent assez bien sur la situation sanitaire dans le nord de la
Tunisie, au début des années 1880. Qu’en fût-il dans le reste du pays?
Pour cette même période, nous ne disposons pas d’études aussi précises
concernant le centre de la Régence. Cependant le témoignage d’un autre
médecin militaire est précieux. Joseph Bertholon, médecin aide major de
première classe au quatrième Régiment de cuirassiers, s’étonne «après
quelques temps passés dans les services hospitaliers de la portion
orientale de la Tunisie, de n’y point rencontrer les diverses affections si
soigneusement décrites par les médecins militaires en Algérie»21. Le paludisme serait rare et ce n’est pas ce dernier qui tue les soldats européens,
mais la fièvre typhoïde. Celle-ci, en effet, provoque des ravages dans le
corps expéditionnaire français, les premiers cas étant signalés dès avril
1881. Sur vingt mille hommes de troupe ayant passé en Tunisie, quatre
mille deux cent seront atteints de fièvre typhoïde avec un taux de
létalité avoisinant les vingt cinq pour cent. Les causes de l’épidémie sont
astucieusement classées par un autre médecin militaire en «cinq ordres :
l’acclimatement (sic), l’infection du sol, la chaleur et les influences atmosphériques, le jeune âge des troupes, les fatigues et les privations»22. La
gravité de l’épidémie déclenche un mouvement d’inquiétude en France.
Les autorités politiques, en particulier les ministères concernés, se
mobilisent et envoient en Tunisie un comité d’experts qui dénonce
vigoureusement les responsabilités du service de santé du corps d’occupation, mais aussi des ministères français de tutelle et propose des
mesures de prophylaxie23.
Le médecin aide major de première classe Marix nous offre, en 1883,
une étude médicale sur le Djérid et l’ensemble du sud tunisien qui complète, heureusement, ce portrait de l’état sanitaire de la population du
pays au moment de l’instauration du Protectorat24. Parcourant les oasis
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du Djérid au cours de six premiers mois de l’année, il recueille de nombreuses observations sur la météorologie, l’hydrologie et l’ethnologie,
mais aussi la nosologie des principaux problèmes de santé rencontrés
parmi les populations du sud qui le consultent. Pour lui, «les affections
du tube digestif, principalement la dysenterie avec ses complications
hépatiques, dominent le cortège morbide», alors que «l’impaludisme
(sic) est rare». De manière plus précise, il écrit : «La dysenterie pendant
l’été est endémique. Chez les jeunes enfants, du mois de juin au mois
d’août, la mortalité est énorme…C’est surtout de quatre à douze et
quinze mois que ces accidents sont fréquents, coïncidant avec la dentition». Ayant observé que les aveugles sont nombreux au Djérid, il
attribue cela à deux causes : «la conjonctivite granuleuse, endémique» et
les complications cornéennes de la variole. Bien entendu il note la
présence du clou de Biskra ou clou de Gafsa (la leishmaniose actuelle),
parfois sous forme épidémique, en particulier chez les soldats de la garnison de Tozeur. Discutant la nature parasitaire, non encore prouvée de
cette maladie de peau, il la compare plutôt« à l’ecthyma, dit de misère,
greffé sur un terrain lymphatique».
Dix ans plus tard, nous disposons de trois nouvelles topographies
qui complètent ce tableau géographique de l’état sanitaire des populations tunisiennes à la fin du XIXième siècle.
En 1895, le docteur Aubert, médecin major de première classe des
hôpitaux de la division d’occupation, dresse un tableau plutôt ambigu de
cette situation dans le centre de la Tunisie25. D’une part il écrit : «Sousse
jouit d’une salubrité remarquable pendant huit mois de l’année». Ce
n’est qu’avec l’été qu’apparaissent «quelques cas de fièvre typhoïde, la
dysenterie sous forme bénigne et la conjonctivite granuleuse». D’autre
part il signale «le grand nombre d’aveugles que l’on rencontre dans la
population arabe et même israélite, chez les enfants, les adultes et les
vieillards». Il attribue cela, comme ses confrères, à la variole, mais aussi
aux «granulations, entretenues et propagées par la contagion, la malpropreté, l’air vicié et humide dans lequel la plupart des habitants
passent leur vie». La description qu’il donne du système d’alimentation
en eau potable, essentiellement des puits dans lesquels sont retrouvés le
«bacterium coli commune» et des citernes mal isolées des fosses d’aisances, explique la survenue d’épidémies de fièvre typhoïde chez les
militaires, entre 1888 et 1892, bien après la formidable épidémie de 1881.
L’année suivante le même Aubert, médecin à l’hôpital militaire du
Belvédère, dresse un tableau nettement plus favorable de la situation
sanitaire de Tunis, mais tout aussi contrasté. Estimant qu’«en dehors de
la fièvre typhoïde, du paludisme et de la dysenterie, les autres affections sont rares», il considère que la capitale de la Régence «jouit d’une
salubrité que pourraient lui envier un grand nombre de nos villes
françaises»26. Et pourtant, les chiffres qu’il nous donne concernant
Regard d’observations médicaux sur l’état sanitaire
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la population estimée de Tunis ainsi que la répartition des décès par
nationalités, pour les années 1886 à 1895, font ressortir, d’une part la
surmortalité liée à une épidémie de variole en 1888 qui frappe les trois
grandes communautés de la ville : Musulmans, Israélites et Européens,
d’autre part un taux brut de mortalité relativement élevé : 28 pour mille
en 1895 (37,4 pour mille chez les Musulmans, 14 pour mille chez les
Israélites et 28 pour mille chez les Européens). Aubert signale également
une épidémie de rougeole en 1895 qui «a fait de nombreuses victimes
parmi les arabes et les italiens dont les locaux sont humides, froids, mal
ventilés». Par contre il n’aurait observé la diphtérie que très rarement. La
tuberculose serait «relativement plus fréquente chez les indigènes qui
sont mal nourris et mal vêtus». Sans surprise la diarrhée, note-t-il, sévit
en été chez les enfants en bas âge de toutes nationalités, touchant
préférentiellement ceux qui ne sont pas soumis à l’allaitement maternel qui dans la population arabe et israélite constitue la règle. Pour
Aubert cependant, la maladie qui fait le plus de ravage chez les arabes est
la variole, une nouvelle épidémie survenant en 1894, entraînant la création d’un service vaccinogène, adjoint au laboratoire de bactériologie
dirigé par le docteur Adrien Loir, premier directeur de l’Institut Pasteur
de Tunis. C’est ce dernier qui va fournir les premières études statistiques
de la population de la capitale de la Régence en s’appuyant, comme
Aubert, sur les données de l’état civil dont les décès sont régulièrement
comptabilisés depuis 1885 avec identification des principales causes27.
Comparant les taux de mortalité par variole, selon les communautés, il
explique les différences par la vaccination, ayant constaté que «les
israélites sont presque toujours vaccinés, les européens négligent trop
souvent de se faire vacciner et les arabes sont rarement vaccinés». Avec
la mise en place d’un état civil dans les principales villes du pays et
l’établissement de statistiques faisant le bilan de la colonisation, l’état
sanitaire de la population française, autant qu’indigène, va devenir l’objet d’analyses plus quantitatives. Avec la fin du XIXéme siècle, l’ère des
topographies médicales se termine. Inspirées de la tradition Hippocratique, elles avaient le mérite de mettre l’accent sur la variabilité de la
pathologie selon les lieux. L’objectif pas toujours exprimé de ces observateurs médicaux est probablement de repérer les endroits les plus
favourables à l’implantation de garnisons militaires et de colonies de
peuplement. Le regard de ces médecins militaires est avant tout clinique,
complété cependant par des arguments anatomocliniques lorsqu’il s’agit
d’observations dans les premiers hôpitaux militaires. Malgré cela, il se
dégage de ces observations un portrait assez diversifié de la situation
sanitaire aux premiers temps de la colonisation, plutôt différent de celui
qui prévaut en Algérie à la même époque et dans l’ensemble, beaucoup
plus favorable. Est-ce pour attirer de nouveaux colons? Des quatre
grandes zones sanitaires du pays, une seule d’entre elles, le nord-ouest,
94
BENOIT GAUMER
présenterait des conditions sanitaires défavorables28. Ceci serait dû essentiellement au paludisme qui sévit au bord de la Medjerdah, expliquant
probablement l’implantation ancienne des villes romaines sur les hauteurs. C’est d’ailleurs dans cette région que seront entreprises les premières études de l’Institut Pasteur de Tunis sur cette maladie, ainsi que
les premières campagnes de «médication quinique(sic) préventive» et
d’assainissement des marais29. Par contre pour le même docteur
Bertholon certaines régions seraient particulièrement salubres comme le
Cap Bon et le Sahel. La situation sanitaire de ceux qu’on appelle alors les
indigènes ne serait peut-être pas aussi catastrophique que certains
voyageurs étrangers ont pu le noter à l’occasion d’épidémies, toujours
dramatiques, mais aussi passagères. Le docteur Dufour, médecin principal de la marine, décrit même, au tournant du XXième siècle, une situation sanitaire à Bizerte apparemment paradoxale. S’appuyant sur les
premières statistiques de décès de la ville, pour les années 1899 et 1900,
il note des taux bruts de décès sensiblement identiques et particulièrement bas chez les Européens (11,6 et 12,6 p mille) et chez les Indigènes
(12,8 p mille). Plus surprenant encore les taux de mortalité infantile
seraient deux fois plus élevés chez les premiers. Pour lui «la cause de
cette inégalité est certainement dans les mœurs et dans les habitudes
fort différentes des deux races». Il constate en effet que les femmes
indigènes, confinées à la maison, ont tout leur temps pour en assurer la
tenue et élever avec soin leurs enfants. Par contre les femmes européennes,
souvent astreintes à travailler au dehors pour compléter le salaire du
mari, un Italien pauvre la plupart du temps ne peuvent que délaisser
leurs enfants30. Regard d’homme voyant d’un mauvais œil le travail de la
femme en dehors de la maison? Préjugé d’un Français menacé par une
communauté italienne de plus en plus nombreuse? Nous ne saurions
trancher dans l’état actuel de nos recherches.
L’ÉCOLE PASTORIENNE DE TUNIS ET SA CONTRIBUTION À LA
CONNAISSANCE DES ÉTATS DE SANTÉ DU PAYS
Avec la thèse du docteur Dinguizli, premier médecin tunisien musulman diplômé d’une faculté de médecine française, débute toute une
série de publications sur l’état sanitaire du pays qui seront l’oeuvre d’internes de l’Hôpital civil français, lieu de stage agréé par les facultés de
médecine de Toulouse, Bordeaux, Paris ou Lyon31. Ces thèses, comme la
précédente, s’appuient très souvent sur les premiers travaux de l’Institut
Pasteur, créé officiellement en 1900. A partir de 1906 ce dernier publie ses
propres archives qui constituent une source importante d’information
sur la situation épidémiologique de la Régence. Au début du XXième siècle, les municipalités des grandes villes du pays se dotent de statistiques
d’état civil dont la qualité d’enregistrement va aller en s’améliorant.
Regard d’observations médicaux sur l’état sanitaire
95
C’est le cas de Tunis, grâce, en particulier, à Ernest Conseil qui publie
régulièrement dans le bulletin de la municipalité un état sanitaire de la
ville, à partir de 1909. Ces trois grandes sources combinées d’information
sanitaire nous permettent de dresser un portrait presque exhaustif des
épidémies les plus spectaculaires, mais aussi des maladies qui frappent
plus régulièrement et presque banalement la population tunisienne.
En 1906-07, Charles Nicolle, directeur de l’Institut Pasteur depuis 1903
et le docteur Bastide, directeur de la santé et de l’hygiène publique,
entreprennent la première enquête épidémiologique exhaustive sur la
fréquence, la gravité et la répartition de la lèpre dans la Régence32. Deux
foyers principaux sont reconnus, à Tunis et Djerba mais la situation est
loin d’être catastrophique. Ils estiment le nombre de malades à «prés de
100 lépreux vivant en Tunisie», ce qui ne les empêche pas de proposer la
création de léproseries, l’une pour les Européens, l’autre pour les
Indigènes! Ce projet, heureusement, ne verra jamais le jour.
En 1904 François Gomma, ancien interne de l’Hôpital civil français, se
basant sur son expérience dans cet établissement, mais aussi comme
médecin de colonisation dans le nord du pays, résume dans sa thèse la
vision dominante de la situation sanitaire véhiculée par ses confrères
de l’époque33. Fustigeant le retard pris dans la vaccination antivariolique,
par rapport à l’Europe, mais aussi d’autres colonies françaises, en particulier l’Indochine et Madagascar, il déplore également la faiblesse de la
lutte contre les maladies épidémiques comme la peste, la rougeole ou la
diphtérie, citant en exemple les mesures de prévention mises en place
par Galiéni à Madagascar. Pour lui des épidémies sévissent à l’intérieur
du pays, sans que les autorités sanitaires du pays ne se mobilisent.
Quand au paludisme, il estime que la maladie, sans atteindre la gravité
qu’elle présente à Madagascar, «existe à peu près partout et cause sinon
une mortalité, au moins une morbidité élevée». Parfaitement au courant
des mesures de prophylaxies «maintenant bien connues», il donne en
exemple l’Italie proche, où «des régions entières ont été mises à l’abri de
la malaria, à la suite des expériences concluantes tentées dans la campagne romaine». Reconnaissant «la fréquence inouïe des affections oculaires, surtout en milieu indigène», il dénonce encore une fois l’inertie du
Gouvernement, laissant à l’initiative privée du docteur Cuénod «l’organisation des soins oculistiques(sic)». Concernant la tuberculose, il conteste les médecins militaires qui auraient propagé l’idée que celle-ci serait
rare en Tunisie, là encore s’appuyant sur son expérience de l’Hôpital
civil français et surtout de l’Hôpital Sadiki, «où les décès de tuberculeux
sont très nombreux». Incapable de fournir des chiffres sur la mortalité
infantile qu’il estime considérable, il regrette «l’absence d’institutions
comme les pouponnières ou les gouttes de lait qui vulgarisent la puériculture en France depuis déjà de nombreuses années».
Vingt ans plus tard, Maurice Monnery, lui aussi ex-interne de l’Hôpital civil français, dresse un nouveau portrait des «grands fléaux qui
96
BENOIT GAUMER
ravagent la Régence»34. Le discours a changé. Nous sommes dans l’entre
deux guerres. L’hygiène sociale a remplacé l’assistance médicale. Cinq
problèmes dominent le tableau qu’il dresse de la situation sanitaire du
pays : la protection de la femme enceinte et de la première enfance, la
syphilis, la tuberculose, le trachome, et le paludisme. Le tableau est
plutôt dramatique, écrivant ainsi en 1924 : «contrairement à ce qu’on
pourrait penser de l’heureuse influence civilisatrice et protectrice de
notre intervention en Tunisie, nous voyons des maladies épidémiques et
contagieuses y prendre le caractère de véritables fléaux sociaux par
l’abondance de leurs victimes». Les chiffres qu’il donne de la mortalité
infantile à Kairouan sont considérables, bien que peu fiables. Pour lui la
tuberculose, au lieu de «rétrocéder s’est accrue au contraire avec l’intensité des échanges commerciaux, l’immigration étrangère et sous l’influence bien plus néfaste encore de l’alcoolisme que nous avons
importé». Dans un rapport au syndicat médical français de Tunisie, le
docteur Henry, lui aussi, constate que la tuberculose est devenue
endémique en 1927, alors qu’elle aurait été rare au début du siècle35.
Quelques années plus tard, les docteurs Félix Masselot et Edouard Bloch,
en se basant sur les statistiques de décès des grandes villes, principalement Tunis, insistent sur «l’énorme écart existant entre le chiffre des
tuberculeux indigènes musulmans et celui des autres fractions de la population»36. La situation est aussi dramatique pour le trachome, très
grand pourvoyeur de cécité. En juillet 1931, une mission, sous l’égide
de l’Organisation internationale pour la lutte contre le trachome et de
l’Association internationale de prophylaxie de la cécité, est chargée par la
Direction générale de l’intérieur d’enquêter sur cette pandémie. Sur 3642
élèves des écoles franco-arabes visitées dans le sud du pays, 71 % souffrent du trachome et 3,9 % sont atteints de cécité totale37. La carte de
l’implantation du paludisme est beaucoup plus complexe, des foyers
sévissant partout dans le pays, avec des taux d’impaludation variant de
20 à 100 %38. Jusqu’à l’épidémie de 1932, la lutte anti-malarique s’est
plutôt heurtée à l’indifférence générale, autant chez les colons que chez
les indigènes, la maladie faisant partie de l’ordinaire. En 1906 l’Institut
Pasteur inaugure cependant les premières études épidémiologiques dans
les centres de colonisation récemment ouverts, créant le premier service
antipaludique d’État, avant qu’il ne soit transféré à la Direction de l’intérieur en 191439. Progressivement une carte des régions impaludées en
Tunisie sera élaborée, mais l’intensité du paludisme varie beaucoup selon
les années, des épidémies venant se greffer périodiquement sur un fond
d’endémicité. Les années 1911, 1918, 1921, 1924, 1928 auraient été ainsi
des «années à paludisme»40. Lors de l’épidémie de 1932-33, d’après les
rapports des médecins de colonisation envoyés au Service de l’hygiène,
plus du tiers de la population du pays aurait été atteinte par le paludisme, se traduisant par une augmentation du taux brut de mortalité,
Regard d’observations médicaux sur l’état sanitaire
97
estimé à partir des statistiques mortuaires de certaines villes. Ainsi les
taux mensuels de mortalité passent de 17 à 51,4 p 10.000 habitants à
Kairouan, 10 à 23,3 p 10.000 à Sousse durant les dix premiers mois de
l’épidémie41. Cette épidémie entraîne la réorganisation du service
antipaludique qui sera alors rattaché à l’Office d’hygiène sociale en 1936.
Un corps d’infirmiers itinérants est créé, chacun d’entre eux étant
responsable d’un secteur géographique, chargé de la prophylaxie avec
les nouveaux antipaludiques et de la lutte antilarvaire. Ce dispositif sera
maintenu jusqu’à la campagne d’éradication entreprise au début de
l’Indépendance avec le concours de l’OMS. Grâce à ces mesures, l’incidence du paludisme put être rapidement contrôlée et considérablement
réduite, bien avant les années 1970.
Grâce à une collaboration étroite entre le Service d`hygiène de la
Direction de l’intérieur et l’Institut Pasteur, de nombreuses études permettent de connaître assez bien l’impact épidémiologique de la peste et
du typhus. C’est une épidémie de peste en 1907 qui sera à l’origine de
l’ouverture du lazaret de la Rabta.42. En milieu rural toute mortalité
signalée par les caïds dépassant 3 p mille par mois est révélatrice d’une
situation dont la cause doit être immédiatement recherchée. A Tunis le
bureau d’hygiène de la ville va consacrer beaucoup d’efforts à la dératisation et à la surveillance des épizooties chez les rats, expliquant probablement la disparition des épidémies urbaines, comme celle de 1930
dans la capitale de la Régence. A la campagne, si l’on en croit certains
médecins de colonisation, de petites épidémies continueront de sévir
au moins jusqu’à la deuxième guerre mondiale.
La situation du typhus exanthématique est assez semblable à celle de
la peste pulmonaire, plutôt endémique, surtout en milieu rural, avec de
petites épidémies comme celle de 1906 qui permettra à Ernest Conseil de
s’illustrer comme un des premiers épidémiologistes tunisiens43. Il signale
alors «la bénignité relative du typhus chez les Arabes», alors que cette
maladie serait grave chez «les Européens contagionnés (sic)». Ce
phénomène, alors mal expliqué, est probablement à l’origine de l’enflure du discours de certains observateurs médicaux sur les fléaux qui
ravageraient la Tunisie. L’histoire du choléra épidémique dans ce pays est
intimement liée au développement des pandémies qui se sont répandues
dans le monde au cours du XXième siècle. Leur impact en Tunisie a été
bien analysé, sans qu’il ait été noté de gravité différente de celle des
autres pays touchés44. Avec la création de l’Institut Pasteur de Tunis et le
développement des Services d’hygiène du Protectorat, l’accent est
d’abord mis sur la lutte contre les épidémies de variole, peste, typhus et
choléra. Et pourtant, comme le montre les statistiques de mortalité à
Tunis publiées mois par mois par Ernest Conseil à partir de 1910, ce sont
la tuberculose, la pneumonie mais aussi la gastro-entérite, «les maladies
ordinaires», qui provoquent le plus de décès prématurés parmi la population tunisienne, surtout les musulmans45.
98
BENOIT GAUMER
LA TUNISIE MÉDICO-SOCIALE ET LES ENQUÊTES SUR LES NIVEAUX DE
VIE DE L’APRÈS SECONDE GUERRE MONDIALE
Durant l’entre deux guerres des préoccupations sociales s’étaient déjà
manifestées sous la forme en particulier d’une étude très originale sur
l’alimentation en Tunisie, dirigée entre 1937 et 1939 par Etienne Burnet,
successeur de Charles Nicolle à la tête de l’Institut Pasteur46. Nous disposons alors d’une photographie assez nuancée de la ration calorique
moyenne selon les régions, le sud étant nettement défavorisé tout
comme la région de Tunis par rapport au nord et au centre du pays.
Globalement, parmi l’échantillon «raisonné» de 110 familles, 15,6 % sont
dans un état de «sous-alimentation certaine», 22,9 % de «sous-alimentation très grave» et 17,4 % de «profonde misère physiologique». Sur le
plan qualitatif on constate alors de fortes disparités selon les saisons, les
régions et les familles d’une même région. Etienne Burnet conclut cependant que «la triade graines de céréales, huile, végétaux frais est à la base
de la santé en Tunisie».
Peut-être inspiré par cette première étude, un second courant d’enquêtes alimentaires va prendre naissance durant la période de reconstruction de l’après seconde guerre mondiale, à l’instigation de la souscommission scientifique du Comité d’études et de recherche sur
l’alimentation et du Conseil tunisien de la recherche scientifique47. Les
résultats de trois études réalisées à Tunis, à Sousse et dans la région du
Kef confirment dans l’ensemble ceux de l’enquête d’Etienne Burnet. Ils
mettent en évidence une fois de plus les inégalités sociales entre français,
italiens, tunisiens musulmans et tunisiens israélites devant la santé.
Toujours dans la foulée de l’après-seconde guerre mondiale un
groupe d’études médico-sociales se crée à Tunis dont la naissance est
probablement stimulée par la terrible sécheresse des années 1946 à 1948,
provoquant une famine et accélérant l’exode rurale. Le regard de
ce groupe se déplace nettement de la description épidémiologique des
maladies et des états de santé à l’analyse de leurs causes sociales. La
mortalité infantile est ainsi étudiée en priorité48. La tuberculose et le
trachome sont également l’objet d’études qui démontrent l’importance
des facteurs sociaux favorisant leur développement comme l’insalubrité
de l’habitat49. Cette préoccupation pour la qualité de l’habitat et ses relations avec la santé est également une des composantes des enquêtes sur
les niveaux de vie en Tunisie entreprises peu de temps avant l’Indépendance sous l’égide de l’Institut des hautes études de Tunis50. Pour les
auteurs de ces enquêtes, dans l’ensemble sous le Protectorat, la diminution générale des revenus par tête d’habitant est indéniable. Elle s’accompagne d’un accroissement de l’écart entre les classes de la société.
Conjuguée aux sécheresses périodiques, elle expliquerait la mortalité
différentielle entre les régions, la survenue d’épidémies représentant
seulement une manifestation bruyante de celle-ci. Toujours pour ces
Regard d’observations médicaux sur l’état sanitaire
99
mêmes auteurs le régime du Protectorat par contre est marqué par une
stabilité politique, sans guerre civile, la mise en place d’infrastructures
d’assainissement et de santé publique souvent retardées mais s’accélérant durant certaines périodes. Cela expliquerait l’absence de véritables épidémies et la tendance générale à l’amélioration des états de
santé de 1881 à 1956.
CONCLUSION
La confrontation de différents regards sur les états de santé de la population de la Tunisie sous le Protectorat de la France ne permet pas d’en
tirer un bilan définitif. Des zones d’ombre demeurent, en particulier
pour les premières années de la colonisation fautes de données quantitatives. La multiplication des points de vue comme ceux des topographes
médicaux et des observateurs publiés par l’Institut de Carthage permet
cependant de nuancer considérablement l’imagerie d’une Tunisie précoloniale, « terre de calamités et de fléaux». Faut-il pour autant embrasser
le point de vue d’un collectif d’auteurs dressant le bilan sanitaire des
trente premières années de l’Indépendance et plutôt sévère vis-à-vis de
la situation qui prévalait auparavant51. Rappelant l’apartheid qui régnait
concernant les soins hospitaliers à Tunis, les auteurs de ce bilan estiment
que «la santé du citoyen semblait être alors non la préoccupation fondamentale des pouvoirs publics mais celle des médecins de ces temps
héroïques et vétustes». Point de vue exagéré ou reconnaissance à l’égard
de pionniers comme Ernest Conseil et sans doute Charles Nicolle mais
aussi beaucoup d’autres plus anonymes qui nous ont légué une connaissance relativement satisfaisante de l’état de santé des tunisiens. Ontils pour autant bataillé pour son amélioration? Avec les années leur
regard s’est modifié, passant d’une pure description des maladies les
plus fréquentes à une analyse de leurs causes sociales. Comme beaucoup d’observateurs médicaux dans d’autres pays, trop peu d’entre eux,
sans doute, se sont engagés socialement ou même politiquement pour
éradiquer ces causes à leur racine. Grâce à eux cependant les autorités du
Protectorat disposaient d’un instrument épidémiologique de pilotage
des politiques de santé publique qui n’avait rien à envier à ceux de la
métropole. Qu’en ont-elles fait réellement? Là encore la réponse n’est pas
aisée, mais il n’est pas sûr que les autorités sanitaires du Protectorat
aient été plus défaillantes que celles de la métropole, où les inégalités
sociales devant la maladie étaient tout aussi tranchées.
REMERCIEMENTS
Cet article a été l’objet d’une première communication, lors du congrès
annuel de la Société canadienne d’histoire de la médecine qui s’est tenu
à l’Université Laval au Québec du 25 au 27 mai 2001.
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BENOIT GAUMER
NOTES
1 Ministère de la santé publique, Rapport final relatif au VIe plan de la santé. 1982-1986
(République Tunisienne, Juin 1982), Introduction, p. 8.
2 Dr. M. E. Farinaud, paludologue consultant de l’O.M.S, Rapport sur les conditions
d’organisation d’une campagne d’éradication du paludisme en Tunisie (Tunis : Secrétariat
d’état à la santé publique. Service central de l’hygiène publique, 7 novembre 1957),
p. 8, 12.
3 Institut supérieur d’histoire du mouvement national, « Infrastructure et politique
sanitaires dans la Tunisie des XIXième et XXième siècles», Watha’IQ, 20-21 (1994-1995),
Tunis, Université de Tunis.
4 Mohamed Moncef Zitouna, La médecine en Tunisie. 1881-1994 (Tunis : Simpact, 1994).
5 Anne Marie Moulin, «Médecine et modernité : la participation française», dans
Itinéraires du savoir en Tunisie (Tunis et Paris : éditions Alif et C.N.R.S, 1995), p. 144-150.
6 Salvatore Speziale, «Le domaine de la santé en Tunisie pendant le protectorat : un
vrai tournant ou un échec», Revue d’histoire maghrébine, 25 (1997) : 151-168.
7 Moncer Rouissi, Population et société au Maghreb (Tunis : Cérès productions, 1977).
8 Dalenda et Abdelhamid Larguèche,«Les sources de la démographie historique dans
la Tunisie moderne», dans La démographie historique en Tunisie et dans le monde arabe
(Tunis : Cérès productions, 1993), p. 13-33.
9 A Lumbroso (le docteur), Lettres médico-statistiques sur la Régence de Tunis (Marseille :
Typographie Roux, 1860).
10 Lettres médico-statistiques, p. 26.
11 Dr. Louis Franck, Tunis. Description de cette régence, (Tunis: reëdition, Bouslama, 1806).
12 Nancy Gallagher, Medicine and Power in Tunisia 1780-1800, (Cambridge and New
York : Cambridge University Press, 1983).
13 Anne Marie Planel, «De la nation à la colonie. La communauté française de Tunisie
au XIXième siècle, d’après les archives civiles et notariées du consulat général de
France à Tunis», thèse de doctorat en histoire, Paris, E.H.E.S.S, 2000.
14 Salvatore Speziale, «Sanita, popolazione e società nella Tunisia Husaynita (17051956)», thèse de doctorat es Studi su Vicino Oriente e Maghreb dall’avvento
dell’islam all’età contemporanea, VIIè cycle de l’Istituto Universitario Orientale di
Napoli, 2 vol, p. 650.
15 Lucette Valensi, Le Maghreb avant la prise d’Alger (Paris : Flammarion, 1969).
16 J. F. Guégan, «Un an sur les bords de la Medjerdah. Notes et souvenirs». Document
manuscrit non daté, Archives de l’Hôpital du Val de Grâce, Paris, boîte 131
concernant la Tunisie. Un commentaire, lui aussi non daté et non signé, indique
dans la marge : «ce travail ne présente rien de particulièrement intéressant au point
de vue de la topographie ou de la pathologie de la région». S’agit-il d’un règlement
de compte avec son supérieur hiérarchique?
17 Guégan, «Un an sur les bords de la Medjerdah», appendice.
18 Louis Catrin, «Medjez el Bab. Tunisie. Essai de topographie médicale», Archives de
médecine et de pharmacie militaires, (1883) : 301-325.
19 Friocourt(Dr), médecin principal, «Contribution à la géographie médicale. I. Littoral
de la Tunisie», Archives de médecine navale, 42 (1884) : 5-30.
20 Benoît Gaumer, «Aspect épidémiologique de l’histoire de la lèpre en Tunisie à
l’époque contemporaine», IBLA, 52, 163 (1989) : 23-38.
21 Lucien Joseph, Bertholon, «Notes climatologiques sur les conditions de salubrité de
la côte orientale de la Tunisie, 23 novembre 1883», Archives de l’Hôpital du Val de
Grâce, Paris, boîte 131 concernant la Tunisie.
22 M. Czernicki, «La fièvre typhoïde au corps d’occupation de Tunisie en 1881», Archives
de Médecine et de Pharmacie Militaires, 2 (1883) : 397-415.
23 F. Poncet et L. Torthe, «De la fièvre typhoïde dans les garnisons de Tunisie de 1881
à 1884. Etiologie, mortalité, prophylaxie», Document non daté, Archives de l’Hôpital
du Val de Grâce, Paris, boîte 99 concernant la Tunisie.
Regard d’observations médicaux sur l’état sanitaire
101
24 M. Marix, «Etude médicale sur le Djérid et le sud tunisien», Archives de Médecine et
de Pharmacie Militaires, 4 (1884) : 1-15.
25 L. Aubert, «La Topographie médicale de Sousse», Revue Tunisienne, (1895) : 545-555.
26 Dr. Aubert, « Tunis. Topographie, conditions hygiéniques, maladies», Tunis, le 10 mai
1896. Document manuscrit, Archives de l’hôpital du Val de Grâce, Paris, boîte 99
concernant la Tunisie.
27 Adrien Loir, «Démographie. Statistique de la population de Tunis», Revue Tunisienne,
(1898) : 348-353.
28 Docteur Bertholon, «Étude statistique sur la colonie française de Tunisie 1881-1892»,
Revue Tunisienne, (1894) : 362-378.
29 Docteur Iversenc, «Note sur la topographie médicale de Tabarka (Tunisie) et l’état
sanitaire de la population au point de vue du paludisme», Revue Tunisienne, (1894) :
348-356.
30 Docteur Dufour, «Bizerte et les établissements de la marine dans le Goulet et le Lac»,
Archives de Médecine Navale, 79 (1894) : 321-345, 401-414.
31 Béchir Dinguizli, «La variole en Tunisie», thèse de doctorat en médecine, faculté de
médecine de Bordeaux, 1897.
32 Charles Nicolle, et Roger Bastide, «La lèpre en Tunisie», Archives de l’Institut Pasteur
de Tunis, 2 (1907) : 55-122.
33 François Gomma, «L’assistance médicale en Tunisie. Essai sur l’histoire de la
médecine et de l’hygiène publiques dans la Régence», thèse de doctorat en
médecine, faculté de médecine de Bordeaux, 1904.
34 Maurice Monnery, «La pratique de l’hygiène sociale et de l’action médicale en
Tunisie (essai d’hygiène sociale)», thèse de doctorat en médecine, faculté de
médecine de Lyon, 1924.
35 Docteur, A. Henry, «La lutte anti-tuberculeuse en Tunisie», Tunis le 1 mars 1927,
Archives Nationales de Tunisie (ANT), brochure 329.
36 Docteurs Félix Masselot et Édouard Bloch, «La tuberculose et la lutte antituberculeuse en Tunisie», extrait des rapports présentés au VIIIème congrés national
de la tuberculose, Marseille, 1935, Institut de recherche sur le Maghreb contemporain
(IRMC), Tunis, brochure R2 162.
37 Docteur Talbot, «Organisation et rendement d’une mission de prophylaxie du
trachome dans les oasis du sud tunisien», juillet 1931, IRMC, brochure R22.24.
38 Henri Charles, «La lutte anti-paludique en Tunisie», thèse de doctorat en médecine,
faculté de médecine de Paris, n° 617, 1936.
39 A. Husson, «Enquête sur le paludisme dans trois centres de colonisation Mateur,
Béja, le Goubellat», Archives de l’Institut Pasteur de Tunis, (1907) : 3-13
40 M. E. Farinaud, Rapport sur les conditions d’organisation, p. 8.
41 Docteur Hamida Mbarek, «Contribution à l’étude de l’anophélisme et de la
prophylaxie du paludisme en Tunisie», thèse de doctorat en médecine, Faculté de
médecine de Bordeaux, 1937.
42 Edouard Bloch, «La peste en Tunisie : aperçu historique et épidémiologique», thèse
de doctorat en médecine, Faculté de médecine de Paris,1929.
43 Ernest Conseil, «Le typhus exanthématique en Tunisie. Epidémie de 1906», thèse de
doctorat en médecine, Faculté de médecine de Paris, n° 178, Paris.
44 François Arnoulet, «Histoire du choléra épidémique en Tunisie», Tunisie médicale, 47,
6 (1969) : 399-408.
45 Ernest Conseil, «Rapport sur l’état sanitaire de la ville de Tunis», Bulletin municipal
de la ville de Tunis, 82 (1930).
46 Etienne Burnet, «Enquête sur l’alimentation en Tunisie» Archives de l’Institut Pasteur
de Tunis, (1939) : 28, 4.
47 «Enquêtes alimentaires en Tunisie», Bulletin économique et social de la Tunisie, 66
(1952) : 37-90.
48 J. G. Valensi, «Études sur la mortalité infantile», La Tunisie médico-sociale, 1, 1
(1949) : 17-24.
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BENOIT GAUMER
49 J. G. Valensi, «Habitat et santé en Tunisie», La Tunisie-médico-sociale, 2, 6 (1950) : 321.
50 «Travaux du colloque international sur les niveaux de vie en Tunisie», fascicule III,
les nivaux de vie en Tunisie, publication de l’Institut des hautes études de Tunis et
PUF, 1958.
51 «1956-1986, trente ans au service de la santé, un engagement, une éthique»,
Ministère de la Santé publique, Tunis, 1986.

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