LES ACCIDENTS DOMESTIQUES CHEZ LES ENFANTS DE MOINS

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LES ACCIDENTS DOMESTIQUES CHEZ LES ENFANTS DE MOINS
ARTICLE ORIGINAL
LES ACCIDENTS DOMESTIQUES CHEZ LES ENFANTS DE MOINS DE
5 ANS : A PROPOS DE 752 CAS RECENSES A L’HOPITAL NATIONAL
DE NIAMEY.
Hamadou Djibo (1), Souna Badio(2), Seidou Guidah(3), Issa Kamaye (1),
Ibrahima A.Toure (4).
1. Département de Santé publique, Faculté des Science de la Santé (FSS), Université Abdou Moumouni
de Niamey.
2. Service de chirurgie orthopédique, Hôpital National Lamordé de Niamey (HNL).
3. Service de radiologie (HNL).
4. Service de médecine interne et de cardiologie, HNL.
J Afr Imag Méd 2011; (4), 7: 363-367
RESUME :
But :Identifier les aspects épidémiologiques des accidents domestiques chez les enfants de
moins de 5 ans, de décrire la typologie de ces accidents et de déterminer les facteurs
favorisants.
Matériels et méthodes : il s’agissait d’une étude descriptive et analytique sur 3 ans ayant porté
sur 752 cas d’accidents domestiques chez des enfants âgés de moins de 5 ans référés à
l’Hôpital National de Niamey de Janvier 2001 à Décembre 2003.
Résultats : l’analyse des dossiers a permis de constater une prédominance masculine à tous
les âges. Les enfants âgés de 12 à 24 mois représentaient 20% des cas. L’essentiel des
accidents soit 40,90% des cas étaient survenus entre 13 et 16 heures ; les poumons et les
oreilles représentaient les organes les plus touchés soit 16,40% chacun.Ils sont causés surtout
par les corps étrangers (35,20) suivis par les traumatismes (32,30) et les intoxications (21%).
Conclusion : les accidents domestiques sont fréquents chez les enfants de moins de 5 ans. La
connaissance des facteurs de risque par les parents permettrait de trouver des solutions afin de
réduire au maximum leur fréquence.
Mots clés : accidents domestiques, enfants, Hôpital National de Niamey.
Correspondance et tiré à part :
Seidou GUIDAH, Hôpital National Lamordé de Niamey,
BP : 10146, Tel : 0022793913570,
Email : [email protected], [email protected]
J Afr Imag Méd 2011; (4), 7: 363-367
S Guidah et al
SUMMARY:
Aim: to identify epidemiologic aspects of domestic accidents among children less than
5 years old, to describe the typology of these accidents and to determine the risk
factors.
Materials and methods: it was a descriptiveand analyticstudy conducted within a 3
years period on 752 domestic accidents occurred in children less than 5 years old
referred to National Hospital of Niamey from January 2001 to December 2003.
Results: the male sex group was predominant. The group of 12 to 24 months totalised
20% of cases. The most frequent accidents (40, 90%) occurred between 13 and 16
o’clock. The lungs and ears were the most organs affected (16, 40% each other). They
are caused by extern corps (35, 20%) followed by traumatisms (32, 30%) and
intoxications (21%).
Conclusion:Domestic accidents were frequent in children less than 5 years old. The
knowledge of the risk factors by the parents can lead to find solutions to reduce their
occurrence.
Key words: domestic accidents, children, National Hospital of Niamey.
INTRODUCTION :
Les accidents domestiques impliquent à la fois
l’individu, la collectivité, l’environnement et
les conditions de vie ou de travail. Leur
fréquence est plus élevée chez les enfants.
Problème majeur pour la santé, la sécurité et la
vie des individus, les accidents domestiques
suscitent beaucoup d’intérêt en raison de leur
fréquence et de leur gravité. Ils représentent
85% des accidents chez les enfants de moins de
5 ans [1]. Le taux proportionnel de mortalité
par accident non lié au transport par rapport au
total des décès varie de 3,60% à 20% chez
l’enfant [2].
Si les statistiques de mortalité et de morbidité
concernant les accidents de la voie publique
sont établies de façon routinière, la fréquence
des accidents domestiques est quant à elle mal
connue du fait de la difficulté de recueil des
données. Certains auteurs affirment qu’ils
constituent la première cause de mortalité chez
l’enfant [1, 3].Une connaissance de la situation
pidémiologique est donc nécessaire pour une
bonne approche préventive. Les objectifs de
cette étude étaient :
- d’identifier
les
aspects
épidémiologiques
(âge,
sexe,
fréquence),
- de décrire la typologie de ces accidents
domestiques,
- de déterminer les facteurs favorisants.
MATERIELS ET METHODES
Il s’agissait d’une étude rétrospective et
prospective ayant porté sur 752 enfants âgés de
0 à 5 ans référés à l’Hôpital National de
Niamey pour accidents domestiques. Cette
étude s’était déroulée sur 3 ans de Janvier 2001
à Décembre 2003.
Pour l’étude rétrospective les données ont été
fournies par les registres de consultation et
d’hospitalisation et les dossiers des patients. Ce
volet a porté sur 620 enfants.
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Pour l’étude prospective les informations ont
été recueillies par l’anamnèse des parents ou
des accompagnateurs, l’examen clinique
complet du patient et les examens
complémentaires. L’étude prospective s’est
étalée sur 4 mois (Septembre- Décembre 2003)
et a porté sur 132 enfants.
Les données ont été saisies et traitées sur le
logiciel Epi Info 6 ; l’analyse a porté sur le
calcul
des
différents
paramètres
et
l’appréciation des relations existant entre eux.
Les textes et les tableaux ont été traités sur le
logiciel Word 2000.
RESULTATS :
L’étude a concerné 752 patients dont 620 et
132 patients pour les études rétrospective et
prospective respectivement.
On notait une prédominance masculine à tous
les âges.
3,5% seulement de nourrissons de moins d’un
an étaient touchés.
20% des accidents étaient survenus chez des
enfants entre 12 et 24 mois.
Les tranches d’âge de 1 à 4 ans totalisaient 504
cas sur 752 soit environ 70% des cas.
39% des mères âgées de 18 à 25 ans étaient
concernées contre 34,10% et 26,90% pour les
26 à 30 ans et les plus de 30 ans
respectivement. Les jeunes mères âgées de 18 à
30 ans totalisaient donc 83,10% des cas.
30,30% des mères étaient analphabètes (contre
40% pour les pères) et parmi elles 78,30%
étaient des ménagères.
L’essentiel des accidents (40,90%) était
survenu entre 13 et 16 heures contre 20,69% la
nuit.
Environ70% des accidents étaient survenus à
l’extérieur des maisons et 15% seulement dans
la cuisine.
Dans 2 cas sur trois l’enfant était seul sur le
lieu de l’accident.Les organes les plus touchés
étaient les poumons et les oreilles (16,40%
chacun).Les étiologies les plus importantes
étaient les corps étrangers (35,20%), les chutes
(22,20%) etl’ingestion de produits (21%).
Parmi les corps étrangers les cailloux (19,40%),
les graines (14,80%), les perles (13,30%) et les
pièces de monnaie (6,10%) étaient les plus
représentatifs dans ce groupe.Les agents
toxiques par ingestion étaient dominés par le
pétrole lampant (52,25%), les aliments (22%),
les médicaments (12,25%) et les produits
caustiques (9,03%).
Fig2 ::Radiographie de l’épaule droite de face montrant
Fig1 : Brulure étendue par eau chaude des
2 bras
une fracture, luxation de l’épaule droite avec arrachement
du trochiter.
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DISCUSSIONS :
Le sexe et l’âge des enfants.
Presque 70% des patients étaient âgés de 1 à 4 ans
avec une prédominance du sexe masculin à tous
les âges. Ce constat a déjà été fait par Lévèque B.
en France (68%) et Zerhouni C. (59%) ainsi que
d’autres auteurs [3, 4, 5, 6,].
Les lieux des accidents.
Les accidents étaient survenus dans 69,70% des
cas à l’extérieur de la maison et dans seulement
15% des cas dans la cuisine. Une étude en Algérie
trouvait au contraire un maximum d’accidents
dans la maison et une répartition du lieu des
accidents dans les proportions de 29,80% dans les
chambres, 20,80% dans la cours de la maison et
20,40% des cas dans la cuisine [2]. La fréquence
des accidents était maximale entre 13 et 16 heures.
Cette période correspondant à un moment ou la
vigilance des parents est faible ; en effet elle
correspond à la période de repos des parents.
La nature des accidents.
1. Les traumatismes.
Ils représentaient 32,30% des accidents
domestiques. Alaoui [7] et Hambali [8] ont trouvé
leur prédominance dans les proportions de 85% et
68,10% respectivement.Dans ce groupe nous
avons enregistré 68,40% de traumatismes par
chute, 21,70% de plaies et 6,60% de chocs isolés.
Ces résultats sont proches de l’étude algérienne
qui trouvait 65,30% de chute, 23,30% de plaie et
4,50% de chocs isolés. Hambali, en 1987 au
Niger, trouvait 50% de traumatismes et 30% de
chocs isolés.
2. Les corps étrangers.
Ils représentaient 35,20% des accidents
domestiques avec respectivement dans ce groupe
45,66% de ces cas dans l’oreille, 39,22% par
inhalation et 16,60% par ingestion.
Contrairement à ces chiffres, Hambali trouvait que
les corps étrangers dans les voies digestives
étaient dix fois plus fréquents que ceux introduits
par inhalation.
Les cailloux, les graines et les perles constituaient
les objets les plus retrouvés (19,40%, 14,80%,
13,30% respectivement). Selon une étude réalisée
en France par Lavaud la moitié des corps
étrangers de l’arbre trachéo-bronchique était
représentée par les cacahuètes et le quart par
d’autres corps étrangers végétaux (pistache, noix,
noisette, amande, maïs, petits pois …) [1].
3.Les intoxications.
Elles représentaient 21% des accidents
domestiques dans notre série. L’intoxication au
pétrole lampant venait en première place avec
52,25% parmi ces cas, suivie par les intoxications
alimentaires (22%)
et
les intoxications
médicamenteuses (12,30%).
Ces résultats étaient comparables à ceux rapportés
par une étude antérieure réalisée toujours à
l’Hôpital National de Niamey [8] qui trouvait dans
50% des cas d’intoxications le pétrole lampant
comme étiologie, suivies par les intoxications
alimentaires et les intoxications médicamenteuse
dans 29,67% et11, 61% respectivement.
Mais les étiologies varient en fonction de
l’environnement de l’enfant.
Ainsi au Maroc les produits ménagers et agricoles,
notamment les dérivés du pétrole occupaient la
première place avec 58,60% des cas, devançant de
loin les médicaments (15,90%) et les plantes
(13,30%) [2].Selon plusieurs études réalisées en
Europe, les intoxications médicamenteuses
restaient les plus fréquentes (45 à 60%), suivies
des produits ménagers (18 à 25%) et les produits
cosmétiques (9%) [1, 9, 10,].
4. Les accidents par inhalation.
L’inhalation par produit infusé, effectuée
traditionnellement comme fortifiant ou de bouillie,
peut être à l’origine d’accident chez les
nourrissons. Ce type d’accident qui est propre au
contexte africain n’a pas été retrouvé dans la
littérature. Nous avons trouvé ce type dans
53,85% de cas d’accident par inhalation. Il
survient lors du gavage du nourrisson. A coté de
ce type il faudrait aussi mentionner les inhalations
accidentelles par l’eau savonneuse au cours du
bain de l’enfant.
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5. Les brûlures.
Nous avons enregistré 42 cas de brûlures, soit
5,60% des accidents domestiques, dont 34 cas
récents et 8 cas vus au stade de séquelles. Les
grandes quantités de liquides chauds incriminées
déjà dans une étude ultérieure [11], étaient
responsables de ces accidents dans 58,73% de ce
type. Selon Lavaud le liquide chaud représentait
56% des causes de brûlure, le solide chaud dans
12% chez les tout petits enfants ; l’enfant de plus
de 5 ans est d’avantage victime de flamme et/ou
d’une explosion, par des produits inflammables
[1].
CONCLUSION :
Les accidents domestiques sont fréquents chez les
enfants de moins de 5 ans.
Ils représentent 85% des accidents chez les
enfants.
Ils surviennent le plus souvent à une période ou la
vigilance des parents est faible.
Ils sont causés surtout par les corps étrangers
(35,20%) (essentiellement dans l’oreille et par
inhalation), les traumatismes (32,30%) et les
accidents par intoxication (21%). Une surveillance
accrue des parents et surtout la mise hors de porté
de certains types de produit, notamment les
produits pétroliers et les médicaments, sont les
moyens les plus efficaces en vue de réduire la
fréquence de ces accidents
REFERENCES :
1. Lavaud J.Accidents chez l’enfant.
E.M.C. Pédiatrie 4-125-A-10, 1997 10P.
2. Chaoui N, Piette D.Les accidents
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l’enfant.EMC Urgences 24-311-A-10
6. Szanajder M, Chevallier B, Lerou G. et
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pendant 5 ans à l’hôpital provincial de
MeknèsThèse de Médecine, no 1134-1985
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à
l’étude
épidémiologique
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9. Lambert
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A propos de 824 cas (de 1992 à 1997).
Thèse, Université Henri Poincaré, Nancy1.
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Intoxications
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