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MINISTERE DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET DE L’ENVIRONNEMENT PROGRAMME RISQUE INONDATION Ce rapport a été réalisé dans le cadre du contrat de recherche n° RI 98026 conclu entre le Ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement et l'Université de Haute Alsace INONDATIONS : RESPONSABILITES ET FORCE MAJEURE Equipe : Centre Européen de Recherche sur le Droit des Accidents Collectifs et des Catastrophes (CERDACC) Université de Haute-Alsace Place du 2 Février, BP 568 Colmar Cedex Tel. 03 89 20 61 84 Fax : 03 89 20 29 19 e-mail : [email protected] Responsable scientifique de la recherche : Marie-France STEINLE-FEUERBACH, Codirecteur du CERDACC AVRIL 2002 Ont participé à la recherche : Hervé ARBOUSSET, Maître de conférences en Droit public, Université de Haute-Alsace, membre du CERDACC Marie-Pierre CAMPROUX-DUFFRENE, Maître de conférences en Droit privé, Université Strasbourg III, codirecteur du Centre de Droit de l'Environnement de la faculté de Droit de Strasbourg, membre du CERDACC Marie DEROCHE, Doctorante, Université Strasbourg III Françoise GEISMAR, secrétaire-assistante du CERDACC Valentine HEINTZ, Docteur en Sciences économiques, membre du CERDACC Caroline LACROIX, Doctorante, Université de Haute-Alsace, membre du CERDACC Claude LIENHARD, Professeur des Universités, Université de Haute-Alsace, directeur du CERDACC Marie-France STEINLE-FEUERBACH, Maître de conférences en Droit privé, Université de Haute-Alsace, codirecteur du CERDACC II Nous remercions Monsieur le Doyen Jean VIRET, directeur du CREDASC, faculté de Droit d'Avignon, pour ses conseils avisés. III SOMMAIRE Introduction Première partie : Analyse des éléments constitutifs de la force majeure retenue pour faire échec à une action en recherche de responsabilité Titre I : Inondations : responsabilité et force majeure en droit civil Chapitre 1 : La notion juridique de force majeure à travers la doctrine et la jurisprudence de la Cour de cassation Chapitre 2 : La typologie des éléments de la force majeure exonératoire de responsabilité Titre II : Inondations : responsabilité et force majeure en droit public Chapitre 1 : La notion juridique de force majeure à travers la doctrine et la jurisprudence du Conseil d'Etat et des Cours administratives d’appel Chapitre 2 : La typologie des éléments de la force majeure exonératoire de responsabilité Titre III : Inondations : responsabilité et force majeure en droit pénal Chapitre 1 : La notion juridique de force majeure à travers la doctrine et la jurisprudence de la Chambre criminelle de la Cour de cassation Chapitre 2 : La typologie des éléments de la force majeure exonératoire de responsabilité Deuxième partie : Les dispositifs légaux et réglementaires : entre déresponsabilisation et recherche de responsabilités Titre I : La loi n° 82-600 du 13 juillet 1982 relative à l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles Chapitre 1 : La loi du 13 juillet 1982 : entre indemnisation et prévention Chapitre 2 : Les assureurs face aux risques naturels Chapitre 3 : Les communes face au risque inondation : une enquête sur la sensibilité au risque “ Inondation ” des élus locaux Titre II : Les incidences juridiques de l'absence de prise en considération du risque inondation Chapitre 1 : La méconnaissance des dispositifs et des risques existants Chapitre 2 : L'absence de création de dispositifs IV Table des abréviations utilisées A.J.D.A. A.J.D.I. Art. Ass. nat. Biblio BO. Bull. Bull. crim. C. C. cass. C. C. C. const. C.A. C.A.A. Cat'nat C.C.C. C.E. Com. Chr. Cit. in. Civ. (1, 2, 3) Com. Concl. D. DEA. Doct. Dr. Adm. Ed. EDCE. Fasc. Gaz. Pal. I.R. J.A.C. J.C.P. (Revue) JO Juris. L. La Doc. fr. Lamy assur. L.G.D.J. Loc. cit. Min. Obs. Op. cit. Actualité juridique - Droit administratif (Revue) Actualité juridique - Droit immobilier (Revue) Article Assemblée nationale Bibliographie Bulletin Officiel Bulletin de la Cour de cassation Bulletin de la Chambre criminelle de la Cour de Cassation Contre Cour de cassation. Code civil Conseil constitutionnel Cour d'appel Cour administrative d'appel Catastrophe naturelle (arrêté) Contrats Concurrence Consommation (Revue) Conseil d'Etat Chambre commerciale de la Cour de cassation Chronique Cité dans Cour de cassation, 1ère, 2ème, 3ème chambre civile Chambre commerciale de la Cour de cassation Conclusions Dalloz (Revue) Diplôme d'étude approfondie Doctrine Droit administratif (Revue) Edition Etudes et Documents du Conseil d'Etat Fascicule Gazette du Palais (Revue) Informations rapides Journal des Accidents et des Catastrophes Juris-Classeur Périodique, sauf précision, il s'agit de l'édition générale Journal Officiel de la République française Jurisprudence Loi La Documentation française Lamy assurances (Revue) Librairie générale de droit et de jurisprudence Locus citatum Ministre Observations Opus citatum V Ord. P. P.A. Par. PER Pp. PPR PPRI Pr. PUF R.A. RD. Imm. R.D.P. Rec. Req. Resp. civ. et assur. R.F.D.A. R.G.A.T. R.J.E. R.R.J. R.T.D.Civ. Soc. Somm. Spéc. Suiv. T. TA TI T.G.I. Trib. corr. V. Vol. Ordonnance Page Les Petites Affiches (Revue) Paragraphe Plan d’exposition aux risques naturels Pages Plan de prévention des risques naturels prévisibles Plan de prévention des risques naturels prévisibles d’inondation Professeur Presses universitaires de France Revue administrative Revue de droit immobilier Revue du droit public et de la science politique, en France et à l'étranger Recueil des décisions du Conseil d'Etat statuant au contentieux et du Tribunal des conflits, des arrêts des cours administratives d'appel et des jugements des tribunaux administratifs. Requête Responsabilité civile et assurance (Revue) Revue française de droit administratif Revue générale des assurances terrestres Revue juridique de l'environnement Revue de la recherche juridique, droit prospectif. Revue trimestrielle de droit civil Chambre sociale de la Cour de cassation Sommaires Spécialement Suivantes Tome Tribunal administratif Tribunal d'instance Tribunal de grande instance Tribunal correctionnel Voir Volume 1 INTRODUCTION GENERALE Par Marie-France STEINLE-FEUERBACH "La grande inondation dura quarante jours sur la terre (…) L'eau monta finalement jusqu'à plus de sept mètres au-dessus des sommets (…) Sur l'ensemble de la terre, tout ce qui possédait un souffle de vie mourut" (Genèse, 7-17 ; 7-20 ; 7-23) C'est ainsi que l'Ancien Testament décrit le Déluge, châtiment de Dieu. Plus tard, au Moyen-Age c'est toujours à la colère de Dieu que sont attribuées les catastrophes naturelles. Même si dans l'étiologie des catastrophes naturelles les démons sont bien présents, il reste que la principale cause des calamités est la réponse de Dieu aux péchés des hommes1. La morale est présente également. Ainsi ne seront pas sauvés ceux qui attachent trop d'importance aux biens terrestres. Le récit de l'inondation dévastatrice de Grenoble, qui eut lieu dans la nuit du 14 et du 15 septembre 1219 suite à la rupture d'un barrage naturel, est à cet égard exemplaire : - "Voilà ce qui arriva à Grenoble, vers l'année du Seigneur 1220, alors que se tenaient des foires au mois de septembre, lors de la fête de la Sainte-Croix. Des montagnes de par leur chute avaient obstrué le lit d'une rivière ; celle-ci grossit durant de nombreuses années pour former un très grand lac. Ce dernier, lors de la dite fête et vers le milieu de la nuit envahit les dites foires où se trouvaient un grand nombre d'hommes venus des diverses parties du monde. Beaucoup purent s'échapper en se réfugiant sur les hauteurs ; en revanche, ceux qui se préoccupaient plus de leurs biens que d'eux-mêmes voulant emporter ces biens avec eux et ployant sous leur poids, perdirent, esclaves de leur marchandise, leur vie et leurs biens" 2. L'idée selon laquelle les catastrophes sont le fait de Dieu est remise en cause à partir du XVIII ème siècle et, suite au tremblement de terre de Lisbonne en 1755, la plume de Voltaire mérite citation : " Philosophes trompés qui criez : tout est bien, Accourez, contemplez ces ruines affreuses, Ces débris, ces lambeaux, ces cendres malheureuses, Ces femmes, ces enfants l'un sur l'autre entassés, Sous ces marbres rompus ces membres dispersés (…) Direz-vous : c'est l'effet des éternelles lois Qui d'un Dieu libre et bon nécessité le choix ? Direz-vous, en voyant cet amas de victimes : 1 J. BERLIOZ, "Les récits exemplaires, sources de l'histoire des catastrophes naturelles au MoyenAge", in Histoire des catastrophes naturelles, Sources Travaux historiques, 1993, Histoire au Présent 2 Passage extrait du recueil de récits exemplaires du dominicain Etienne de BOURBON, prédicateur et inquisiteur, rédigé entre 1250 et 1261, cité par J. BERLIOZ 2 Dieu s'est vengé, leur mort est le prix de leurs crimes ?"3 En s'éloignant de l'idée de la fatalité, la société s’engage dans un processus de défense réactive. On se réfère à l'expérience, à l'observation pour prendre des mesures de prévention. Ainsi, puisque l’on connaît à l'époque des phénomènes comme les fortes pluies ou encore la fonte des neiges en montagne, pouvant provoquer des inondations, on prend les précautions qui s'imposent : "Les habitants des parties basses des villes ou des campagnes inondables mettent à l'abri ce qu'ils peuvent déplacer" 4. De même l'idée d'une contribution financière se fait jour, on retrouve dans les archives des demandes d'aide pour les constructions ou la reconstruction de ponts et de digues, également des demandes de décharge d'imposition pour les dommages causés 5. Par ailleurs, il ressort des archives départementales de l'Ariège qu'au XIIIème siècle, "après une inondation ou tout autre paroxysme hydro-météorologique, les communautés s'empressaient de solliciter auprès de l'Intendant, via son sub-délégué pour le pays de Foix, une vérification des pertes essuyées. Celui-ci nommait à cet effet des experts vérificateurs pour l'occasion. Cette procédure était la voie obligée pour l'obtention d'une indemnisation" 6. C’est pourquoi, "l'approche moderne situe donc la catastrophe dans le domaine de l'intolérable, parce qu'aucune théologie ne vient plus la justifier et qu'elle relève à présent d'un jeu mécanique de forces naturelles que l'homme est présumé connaître, sinon maîtriser" 7. L'homme moderne n'accepte plus la fatalité et dès lors que les éléments de la nature lui causent un dommage, il ne se tourne plus vers Dieu mais cherche parmi les hommes ceux qui sont responsables, ceux qui d'une manière ou d'une autre n'ont pu empêcher le dommage, le prévenir. L’idée s’impose alors qu’il entre dans la mission régalienne de l’Etat, des pouvoirs publics, mais aussi dans le rôle des professionnels et même des particuliers d’œuvrer à la prévention des catastrophes naturelles afin de limiter leurs effets destructeurs. Chacun est aujourd'hui convaincu de la nécessité de la prévention et nombre de mesures ont déjà été prises. Lorsque la prévention a échoué se pose alors inévitablement la question de la responsabilité. Nous savons que la France est exposée à plusieurs risques naturels, les périls qui la menacent sont les tempêtes et cyclones, les mouvements de sol y compris la sécheresse, les tremblements de terre et les avalanches et surtout les inondations qui constituent le risque naturel le plus fréquent et le plus destructeur. L'Office international de l'eau définit les inondations comme "une submersion temporaire, naturelle ou artificielle, d'un espace terrestre". En 1992, une typologie des inondations a été retenue, on peut ainsi distinguer plusieurs types d'inondation : les inondations de plaines, les crues de type torrentiel, les ruissellements en secteur urbain, les inondations littérales, les inondations exceptionnelles 3 Extrait du "Poème sur le désastre de Lisbonne", écrit en 1756 J. DELUMEAU, Y. LEQUIN, "Les malheurs des temps. Histoires des fléaux et des calamités en France", in Risques naturels en montagne, 1996 5 B. RUDELIN, Séchilienne, Chronique d'une catastrophe annoncée, Certificat de Victimologie, Université Claude Bernard, Lyon 1, faculté de Médecine, Département de Médecine légale, 2000 6 J.M. ANTOINE, "Catastrophes torrentielles et géographiate des sources historiques. Le cas de la Baronnie de Château-Verdun au XVIII ème siècle", CNRS, Toulouse, n° 33, p. 51 7 Ph. SEGUR, "La catastrophe et le risque naturel, essai de définition juridique", R.D.P., fév. 1997, 1693 4 3 dues à la rupture d'ouvrage8. Ces distinctions sont certes essentielles pour les scientifiques mais ne sont pas la préoccupation première des magistrats chargés d'apprécier les responsabilités, davantage préoccupés des caractères d'imprévisibilité et d'irrésistibilité du phénomène naturel que de sa nature ou de sa classification scientifique 9. La préoccupation des pouvoirs publics face aux risques naturels et en particulier aux inondations s'est concrétisée par de nombreux rapports au Gouvernement, à l'Assemblée nationale ou au Sénat10. De même le champ judiciaire est amené à fournir ses contributions à tel point que, pour utiliser une sémantique venant de sciences autres que juridiques, on a pu écrire que le procès, "qu'il soit civil, commercial ou pénal, quel que soit son objet… est toujours un formidable laboratoire de retour d'expérience…" 11. Il était dès lors logique, inévitable et nécessairement pertinent, d’englober dans le regard que nous allions porter au titre de cette étude l’attitude des juridictions civiles, administratives et pénales. Ainsi, à chaque stade de ce rapport, le champ de cette trilogie sera balayé tout en distinguant soigneusement les trois ordres de responsabilité. En effet, alors que la responsabilité civile et la responsabilité administrative ont pour finalité l'indemnisation des victimes, la responsabilité pénale a pour but la sanction des coupables. Si des responsabilités administratives ou civiles peuvent dans certaines hypothèses être retenues 8 V. not. M. DOUTE, Face aux Risques, n° 375, sept. 2001 A titre d'illustration, suite à la catastrophe du Grand Bornand survenue le 14 juillet 1987, la Cour administrative de Lyon énonçait le 13 mai 1997 que "le 8 juillet 1936, à la suite d'un orage violent en fin d'après midi, ce torrent (le Borne) et ses affluents ont sur le territoire de la commune arraché des ponts et des barrages et inondé les propriétés riveraines… qu'ainsi, et quelle que soit la violence de la crue à l'origine de la catastrophe du 14 juillet 1987, dont la cause était identique à des inondations précédemment constatées, l'événement à l'origine des dommages… n'était pas imprévisible". La référence aux inondations précédentes est contestée par des membres de la communauté scientifique car il ne s'agissait pas, selon eux, des mêmes phénomènes 10 Voir not. : Rapport de l'Instance d'évaluation présidée par P.-H. BOURRELIER, Comité interministériel de l'évaluation des politiques publiques, Premier ministre, Commissariat général au Plan, La Documentation française, septembre 1997 ; Rapport de Ch. KERT sur les techniques de prévision et de prévention des risques naturels en France, Assemblée nationale, 12 avril 1999 (n°1540), Sénat, 8 avril 1999 (n° 312) ; Rapport de Y. DAUGE au Premier Ministre sur l’évaluation des enjeux et des modalités de création d’un éventuel “ lieu de débat ” sur les politiques publiques de prévention des inondations en France métropolitaine et outre mer, octobre 1999 ; Rapport de E. DOLIGE (n° 3046) sur les propositions de résolutions de J.-L.DEBRE, J.-F. MATTEI et Ph. DOUSTE-BLAZY (n°2982) tendant à la création d'une commission d'enquête sur les causes notamment climatiques, environnementales et urbanistiques des inondations exceptionnelles afin d'établir les responsabilités, d'évaluer les coûts et de prévenir les crues à répétition, de J. FLEURY (n° 3041) tendant à la création d'une commission d'enquête sur les causes des inondations répétitives et sur les moyens propres à faire face aux aléas climatiques, Assemblée nationale, 9 mai 2001 ; Mission d’expertise sur les crues de décembre 2000 et janvier 2001 en Bretagne, par P. HUET, 19 juin 2001 ; Rapport de la commission d'enquête sur les inondations de la Somme par M. DENEUX, (n° 34), Sénat, 18 octobre 2001 ; Rapport de R. GALLEY sur la commission d’enquête sur les causes des inondations répétitives ou exceptionnelles et sur les conséquences des intempéries afin d’établir les responsabilités, d’évaluer les coûts ainsi que la pertinence des outils de prévention, d’alerte et d’indemnisation (n° 3386), Assemblée nationale, 14 novembre 2001 11 H. SEILLAN, "Le retour d'expérience et le droit", Préventique n° 48, nov.-déc. 1999, 44 9 4 même en l'absence de faute, il n'en est pas de même en matière pénale puisque la responsabilité pénale n'est engagée que lorsqu’un individu a commis un acte sanctionné par les lois répressives, c’est-à-dire qu’il a commis une infraction pénale. Le droit pénal donne des définitions très étroites des infractions punissables. S'agissant de la sanction, le juge pénal, dans le cadre strict des lois répressives, est compétent pour juger les comportements des personnes physiques et morales qu'elles soient privées ou relèvent du droit public ; s'agissant en revanche de l'indemnisation, la compétence du juge civil est en principe limitée aux personnes de droit privé alors que la responsabilité des personnes et des agents publics relève du juge administratif. Un même événement dommageable est susceptible, dès lors que les conditions sont réunies, d'être apprécié à la fois par le juge civil, le juge administratif et le juge pénal 12. Les fondements des trois responsabilités diffèrent ainsi que l’approche et l'attitude des juges respectifs. L'intérêt d'une étude générale transcendant la distinction entre les juridictions judiciaires et administratives peut être illustré par l'interprétation différente de la notion de force majeure qu’ont eu le juge pénal et le juge administratif suite à l'avalanche ayant, le 10 février 1970, emporté un chalet de l'U.C.P.A. entraînant la mort de 39 stagiaires, 40 ayant été blessés. Le juge administratif écarte la force majeure et retient la responsabilité pour moitié de la commune de Val d'Isère et de l'Etat alors que le maire, poursuivi pour homicides et blessures involontaires, bénéficie d'un non-lieu. La décision du tribunal administratif de Grenoble, rendue le 19 juin 1974, figurait dans le mémoire que la partie civile avait déposé auprès de la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Lyon. Le 9 juillet 1985, la Chambre d'accusation estimait que "compte tenu des dépositions de tous les témoins si les avalanches paraissaient possibles en l'état des conditions météorologiques, il était impossible de prévoir qu'une avalanche d'une telle ampleur partirait de la Grande Gorge, franchirait l'Isère (d'autant plus que d'importants travaux l'ont canalisée) et pourrait atteindre le chalet de l'U.C.P.A.’’ La chambre criminelle, le 11 mars 1986 (pourvoi n° 85.94.431, biblio Cerdacc), pour des raisons de procédure, déclare non recevable le pourvoi introduit par la partie civile. Trois jours plus tard, le 14 mars 1986, le Conseil d'Etat considère que l'avalanche "ne présentait malgré sa violence exceptionnelle, compte tenu de ce que trois fois au moins depuis 1917 des avalanches de même provenance avaient atteint la zone de la rive gauche de l'Isère où était situé le chalet, le caractère de force majeure" (C.E., commune de Val d'Isère c/ Mme BOSVY et autres, n° 96.272 et 99.725). Cette tragique affaire est particulièrement révélatrice des divergences de perception de l’imprévisibilité que peuvent avoir les juges pour un même phénomène naturel. 12 Ainsi, à la suite d'un accident ayant entraîné un dommage corporel, le juge pénal peut avoir à connaître d'une action en responsabilité à la fois contre une personne privée et un agent public, le juge civil d'une action en indemnisation dirigée contre le défenseur personne privée et le juge administratif d'une action en indemnisation dirigée contre l'agent public 5 Pour approcher au mieux la vérité du lien entre responsabilités et force majeure, et pour faire une proposition d’usage utile de la vérité ainsi dévoilée, même si tout dévoilement est toujours relatif, nous avons choisi de structurer notre démarche en deux étapes. Tout d’abord nous nous sommes attachés à analyser, et décoder par un travail de recollement et de balayage inédit ce qu’il en est dit par les juges, mais aussi par la parole structurante, porteuse de sens et de mise en perspective de la doctrine, tant il est vrai qu’il importe ici de rendre de la lisibilité à une recherche portant sur de la prévisibilité (Première partie). Fort de ces constats, il restait, et ce n’était pas là le moindre des enjeux et des défis, à s’interroger sur les effets directs, ou à tout le moins induits, des dispositifs légaux et réglementaires. On s’aperçoit qu’ils oscillent entre déresponsabilisation et recherche de responsabilité (Deuxième partie). 6 PREMIERE PARTIE : Analyse des éléments constitutifs de la force majeure retenue pour faire échec à une action en recherche de responsabilité La force majeure est classiquement présentée comme un événement réunissant trois caractères : extériorité, imprévisibilité, irrésistibilité. L'apparente simplicité de cette trilogie contraste singulièrement avec la difficulté de son interprétation. En effet, "la force majeure est un concept de notre droit dont l'importance apparaît comme inversement proportionnelle à sa précision"13. Non seulement la notion juridique de la force majeure diffère selon les trois ordres de responsabilité, mais de plus, à l'intérieur de chacun des ordres, la notion est susceptible de nuances. Nous nous sommes attachés à dégager cette notion tant en droit civil (Titre I), qu'en droit administratif (Titre II) et en droit pénal (Titre III), mais également et surtout à établir la typologie des éléments constitutifs de la force majeure en cernant l'influence éventuelle d'un arrêté de catastrophe naturelle sur la reconnaissance de la force majeure. 13 J.Y. CHOLEY, note sous TI Saint Denis, 25 août 1983, D., 1985, 26 7 TITRE I Inondations : responsabilité et force majeure en droit civil Les règles de la responsabilité civile, délictuelle ou contractuelle, s’appliquent aussi bien aux rapports entre personnes privées qu’aux rapports entre une personne privée et une personne publique agissant comme une personne privée. Dans le cas de dommages causés par un élément naturel la force majeure invoquée par celui dont la responsabilité est recherchée permet, si elle est reconnue, de faire échec à l'action. La recherche a été effectuée à la fois dans le champ documentaire classique ainsi que dans un champ documentaire inédit. Pour le champ documentaire classique la méthode employée a consisté dans la récolte de données c’est-à-dire essentiellement des écrits de doctrine et des décisions judiciaires dans les revues et les ouvrages spécialisés ainsi que par l’utilisation de banques de données. Le Cerdacc, dans le cadre d’accords de coopération passés avec l’Institution judiciaire a pu récolter des décisions inédites. Les résultats de l’analyse de ce champ documentaire classique sont exposés dans les deux premiers chapitres : - Chapitre 1 : La notion juridique de la force majeure en droit civil à travers la doctrine et la jurisprudence de la Cour de cassation - Chapitre 2 : La typologie des éléments factuels de la force majeure exonératoire de responsabilité 175 contentieux soumis à des juridictions civiles depuis 1980, ont été exploités. Le nombre de décisions est bien entendu supérieur puisque la moitié environ des contentieux ont fait l'objet d'un pourvoi en cassation. La récolte des données a été notamment effectuée par des interrogations juris-data avec pour mots-clés “ Inondation ou catastrophe naturelle et force majeure" ainsi que par la consultation de CD rom juridiques, complétées par des demandes aux cours et tribunaux. La recherche a été volontairement limitée au vingt dernières années afin d’obtenir un éventail de décisions à la fois suffisamment large et d’actualité. Il nous a semblé pertinent de ne pas nous limiter au risque inondation car l’appréhension de la force majeure se fait selon des critères comparables quel que soit l’élément naturel en cause. Nous avons étendu la recherche en droit civil à des événements autres que les inondations, tels la sécheresse ou la tempête, afin de cerner au plus près la conception qu’a le juge civil de la force majeure14. A ce stade une première remarque s’impose : les inondations alimentent environ la moitié du contentieux relatif aux événements naturels, les autres événements étant la sécheresse, les effets du vent, les glissements et éboulements de terrain, les chutes de neige, le verglas. S'agissant des inondations, un quart du contentieux est relatif aux débordements de rivières, les trois autres quarts se répartissant entre les crues d'étang, les remontées de nappes phréatiques et les inondations dues à la mauvaise évacuation des eaux pluviales. Le En droit administratif, le plus grand nombre de décisions rendues en matière d’inondation nous a en revanche permis de limiter la recherche à ce phénomène 14 8 contentieux relatif aux avalanches relève lui essentiellement du droit pénal dans le cadre des poursuites pour homicide ou blessures involontaires. La plupart des décisions ont trait à la responsabilité de vendeurs, constructeurs ou lotisseurs. Si les responsabilités recherchées sont majoritairement celles de personnes privées, physiques ou morales, il apparaît que les communes sont également visées dans certaines décisions. Il est ainsi démontré que les communes sont susceptibles de voir leur responsabilité civile engagée dans ce domaine, les règles applicables étant alors les mêmes que pour un simple particulier. Ce résultat peut surprendre a priori car dans la majorité des cas, une collectivité territoriale voit sa responsabilité en matière de catastrophe naturelle, et plus particulièrement en cas d’inondation, recherchée devant le juge administratif. Ainsi, la première Chambre civile, dans un arrêt en date du 2 février 1999 (pourvoi n° 96-22.479) s'est prononcée pour l'incompétence des juridictions judiciaires à statuer sur un litige portant sur la responsabilité d'une association syndicale à raison de l'exécution de travaux d'entretien d'un cours d'eau dont elle avait la charge dans le cadre d'une mission de service public. Mais les communes peuvent également agir comme des personnes privées, en tant que propriétaires, vendeurs, constructeurs ou lotisseurs. Dans de telles situations, c’est au juge civil qu’il appartient de décider si la collectivité territoriale est susceptible d’être responsable et si l’événement est ou non constitutif de force majeure exonératoire de la responsabilité civile. L’application des critères du droit civil conduit alors à la responsabilité ou à la nonresponsabilité de la commune agissant en tant que personne privée. Précisons qu'une commune ayant subi des dommages peut également agir en tant que demandeur. Avant d’analyser plus à fond la notion de force majeure, il convient de rechercher à titre liminaire les principaux fondements des actions intentées 15. PROLEGOMENES : Les principaux fondements des actions intentées en matière de responsabilité civile Par Marie-France STEINLE-FEUERBACH Dans la majorité des cas la force majeure est invoquée pour faire échec à une action en responsabilité. Il peut également s'agir de contentieux déclenchés par des assureurs. En effet selon l’article L. 121-12 du Code des assurances - “ L’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur… ” Le défendeur à l'action sera la personne dont la responsabilité est recherchée et/ou son assureur de responsabilité civile. Signalons, en marge de notre étude que la force majeure peut également être invoquée, bien que plus rarement dans d'autres contentieux : 15 Voir : Le contentieux des inondations : Les responsabilités, étude réalisée pour le MATE sous la direction de B. DROBENKO, décembre 1999, p. 189 et s. 9 - - Dans des litiges, rares il est vrai, opposant un assuré à son assureur dommage qui refuse de l’indemniser en invoquant une exclusion de garantie due à une faute de l’assuré. L’assuré peut essayer d’invoquer la force majeure. En matière de droit du travail, lorsque l'employeur poursuivi pour licenciement abusif, cherche à se justifier en invoquant une cessation d'activité suite à un événement naturel l'ayant contraint à cesser ou à réduire considérablement son activité. En effet, la rupture des contrats de travail doit être considérée comme légitime dès lors que la cessation d'activité de l'entreprise est consécutive à un cas de force majeure comme des inondations d'une ampleur exceptionnelle ayant détruit complètement les moyens de production (Agen, Ch. soc., 1er juin 1995, juris-data n° 046638). Ainsi il y a eu rupture des contrats de travail par force majeure dans le cas d'une entreprise ayant subi une inondation d'une ampleur imprévisible dès lors que la production de l'usine avait complètement cessé pour ne reprendre que très partiellement plus tard (Nancy, Ch. soc., 27 mai 1991, juris-data n° 042636). En revanche, l'inondation d'une usine par la rivière sur la berge de laquelle elle est installée, rivière qui sort régulièrement de son lit, ne constitue pas un événement imprévisible et n'entraîne pas de façon insurmontable la cessation de l'exploitation justifiant la rupture d'un contrat de travail pour force majeure (Soc., 19 mai 1988, Bull., n° 297) ; de même une gelée tardive bien que classée "calamité agricole" et qui a détruit en grande partie le vignoble destiné à une production de cognac n'est pas un événement imprévisible, la distillerie est donc condamnée à payer aux salariés qu'elle a licencié les indemnités de rupture et des dommages-intérêts pour licenciement abusif (Soc., 25 octobre 1995, D., I.R., 258). Si l'événement n'a pas entraîné de façon insurmontable la cessation de l'exploitation, l'employeur n'est pas libéré de ses obligations face aux salariés (Soc. 3 mai 1984, pourvoi n° 86.3719 ; 6 juin 1984, pourvoi n° 86.3718, Jurisques 2000, p. 158) Les fondements principaux des actions en responsabilité suite aux dommages causés par des événements naturels peuvent être regroupés en 3 catégories : - Actions ayant trait à la construction ou à la vente d’un immeuble Ces actions concernent environ 47% du contentieux que nous avons pu récolter en ce qui concerne l’ensemble des événements naturels ayant occasionné des dommages et 44% en ce qui concerne les seules inondations. Il s’agit donc là du contentieux le plus important ; dans l’hypothèse d’un pourvoi en cassation, il relève essentiellement de la troisième chambre civile. - Actions fondées sur des rapports contractuels autres que ceux issus du droit de la construction ou la vente Elles alimentent environ 30% de l’ensemble du contentieux risques naturels et 36% du contentieux inondation. - Actions fondées sur des rapports avec les tiers Elles représentent environ 23% de l’ensemble du contentieux et 20% du contentieux inondation Plusieurs textes peuvent, dans chacune de ces catégories, être invoqué par le demandeur en réparation. 1°) Les actions ayant trait à la construction ou à la vente d’un immeuble 10 Il s’agit principalement d’actions menées par des propriétaires pour engager la responsabilité des constructeurs, architectes, entrepreneurs, vendeurs. a) La responsabilité des constructeurs (garantie décennale) Un des fondements textuels est l’article 1792 du Code civil permettant d'engager la responsabilité des constructeurs. Ce texte introduit une responsabilité particulière Article 1792 du Code civil : " Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultants d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination." Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère. " La garantie est d'une durée de dix ans à compter de la réception des travaux (art. 2270 C.C.), la responsabilité des constructeurs est connue sous l'appellation "garantie décennale". Ainsi lorsqu’un immeuble présente des dommages, le constructeur est exposé à une responsabilité de plein droit, il ne pourra se libérer qu’en établissant que l’élément naturel est constitutif d’un cas de force majeure. En effet, " si l’art. 1792 du code civil fait peser sur les constructeurs architectes et entrepreneurs une véritable faute ils peuvent s’exonérer de celleci par la preuve d’un cas fortuit ou de force majeure représentant les conditions d’imprévisibilité, d’irrésistibilité et d’extériorité " (Angers, 7 juin 1982, juris-data n° 041765 – inondation du sous-sol). La notion de constructeur est large, elle est définie à l'article 1792-1 C.C. Article 1792-1 du Code civil : - "Est réputé constructeur de l'ouvrage : 1°) Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ; 2°) Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ; 3°) Toute personne qui, bien qu'agissant en qualité de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, accompli une mission assimilable à celle d'un locateur d'ouvrage." On comprend que le contentieux soit important d’autant que l’action peut être intentée non seulement par le propriétaire victime des dommages mais également par son assureur dommage au titre d’une action souvent subrogatoire exercée envers le constructeur ou envers l’assureur en responsabilité de celui-ci. Le contentieux de la construction est également alimenté par des actions en garantie exercées par des constructeurs, responsables au titre de la décennale, envers d'autres professionnels ayant participé à la réalisation de l'immeuble. C’est en tant que constructeur que la commune de Saint Christol les Alès a été condamnée à payer plus d’un million de francs à une société, acquéreur clé en main d’un bâtiment industriel que lui avait vendu la commune et qui avait subi des dommages consécutifs à deux inondations. La Cour d’appel de Nîmes, le 6 juin 1996 (juris-data n°030310) confirme la décision du Tribunal de grande instance d’Alès "en ce qu’il a retenu la responsabilité de la 11 commune sur la base des articles 1792 et suivants en reprenant intégralement la motivation du Tribunal qui a justement écarté la force majeure invoquée par la commune pour s’exonérer de sa responsabilité ". Il est à noter que la responsabilité des constructeurs ne cède que très rarement devant la force majeure. Signalons également la responsabilité des syndicats de copropriétaires. Aux termes de l'article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis : - " Il (le syndicat) est responsable des dommages causés aux propriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toute action récursoire." La responsabilité d'un syndicat de copropriété a ainsi été retenue en raison de la dimension insuffisante de chenaux (Paris, 10 novembre 1995, juris-data n° 023562). b) L'obligation de conseil Les constructeurs comme les vendeurs, et de manière générale les professionnels, sont tenus d'une obligation de conseil dont le non-respect est source de responsabilité. Le devoir de conseil connaît un essor jurisprudentiel particulier, il se rencontre dans tous les contrats d'entreprise. Ainsi l'architecte devra éclairer le maître d'œuvre sur les difficultés liées à la nature du terrain. - Paris, 6 juin 1990 (juris-data n° 023277) : le parking d'un immeuble avait été inondé par une remontée de nappe phréatique, la Cour d'appel considère que "L'architecte maître d'œuvre investi d'une mission complète qui a manqué à ses obligations de conception et de conseil et qui ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un événement imprévisible et irrésistible à l'origine des malfaçons doit réparation des désordres relevant de la garantie décennale et résultant de sa carence fautive". - Civ. 3ème, 8 octobre 1997 ( Resp. civ. et assur., 1997, comm., 364 ; R.T.D.Civ., 1998, 383, obs. P. Jourdain) : des désordres étant apparus dans un immeuble, l'architecte et l'entreprise de gros œuvre furent condamnés in solidum à garantir le maître d'ouvrage des condamnations prononcées contre lui au profit du syndicat des copropriétaires "Les locateurs d'ouvrage sont tenus à l'égard du maître de l'ouvrage d'un devoir de conseil qui leur fait obligation de signaler les risques présentés ainsi que de veiller à l'adéquation des procédés de construction à une conception correcte de l'ouvrage en vue de le livrer exempt de vice". De manière générale, "L'architecte chargé de la conception d'un projet de construction et de l'établissement des plans du permis de construire, tenu d'un devoir de conseil envers le maître de l'ouvrage, doit concevoir un projet réalisable, qui tient compte des contraintes du sol" (Civ. 3ème, 25 février 1998, D. aff., 1998, 467). La cour d'appel d'Angers (7 juin 1982, juris-data n° 041765) a retenu la responsabilité de l'architecte et de l'entrepreneur pour violation du devoir de conseil alors même que l'inondation avait présenté les caractères de la force majeure exonérant ces professionnels de leur responsabilité fondée sur l'article 1792 du Code civil. 12 Ce devoir de conseil a toutefois des limites et l'entrepreneur ne peut être tenu pour responsable de la décision du maître de l'ouvrage lorsque celle-ci est prise en connaissance de cause : - Civ. 3ème, 7 octobre 1998 (pourvoi n° 96-22.837) : "Les maîtres de l'ouvrage… avaient, en toute connaissance de cause et de propos délibéré, commandé des travaux insuffisants en sachant qu'ils ne permettaient pas d'atteindre le résultat attendu dans des circonstances normales, l'architecte n'avait donc pas manqué à son obligation de conseil". S'agissant du vendeur, la jurisprudence a développé une obligation d'information et de conseil. L’obligation est plus ou moins contraignante selon que l’acheteur est un professionnel ou un profane, son intensité varie également en fonction de la nature du produit. Le vendeur professionnel est présumé connaître parfaitement la chose qu'il vend et il doit prendre l'initiative de communiquer ce qu'il sait à l'acheteur. Tout comme pour le constructeur, l'obligation de conseil du vendeur trouve ses limites dans la connaissance qu'avait l'acquéreur du risque auquel se trouve exposé le bien acquis : - Civ. 3ième, 22 janvier 1997 (pourvoi n° 95-11.990) : une commune s'était vue condamner à indemniser une partie des pertes subies par l'acquéreur d'un terrain figurant sur le plan d'occupation des sols sur zone constructible au motif que la commune, qui connaissait la nature du sous-sol du terrain vendu en raison de précédents glissements ayant affecté les coteaux, avait manqué à son obligation d'information et de conseil lui imposant de signaler à l'acquéreur les risques de nature à grever la chose vendue. La Cour de cassation, en cassant l'arrêt d'appel retient que l'acheteur était originaire de la commune, dont il était membre du conseil municipal, et qu'il avait donc acquis l'immeuble en toute connaissance de cause. c) Le droit spécial de la vente Le droit spécial de la vente peut également servir de fondement à une action en responsabilité et en particulier l'obligation de délivrance et la garantie des vices cachés. Article 1603 du Code civil : - "Il (le vendeur) a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend." L'obligation de délivrance est définie à l'article 1604 du Code civil : - "La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et la possession de l'acheteur." L’acheteur est en droit d’invoquer l’inexécution de l’obligation chaque fois qu’il y a une différence d’ordre quantitatif ou qualitatif ou même esthétique entre la chose achetée et la chose livrée. En cas d’inexécution totale ou partielle, les règles applicables sont en principe celles du droit commun des obligations : exécution forcée, exception d’inexécution, résolution, dommages-intérêts. La prescription de l’action est de 30 ans, réduite à 10 entre commerçants. La carence du vendeur doit être sanctionnée sauf s’il existe des faits justificatifs. Le vendeur est libéré en cas de force majeure, mais de simples difficultés d’exécution ne suffisent pas. S'agissant de la garantie des vices cachés, l’article 1641 énonce que : - "Le vendeur est tenu de la garantie à raisons des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que 13 l’acheteur ne l’aurait pas acquise, on n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus." Ajoutons que : - "Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur." (art. 1645 C.C.) A partir des années 50 cette garantie est devenue prééminente, la jurisprudence a étendu la garantie et assoupli les conditions afin que l’acheteur soit mieux protégé. Le vice doit être rédhibitoire c’est-à-dire qu’il empêche l’usage de la chose, il doit être occulte, c'est-à-dire que l'acheteur ne pouvait le découvrir et l'a ignoré. Il faut que le vice soit déjà présent lors de la vente, ou au moins en germe à ce moment là, il ne doit pas être imputable à une mauvaise utilisation par l’acheteur. L’article 1644 ouvre deux actions en garantie : "L’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix, telle qu’elle sera arbitrée par experts." Si le vendeur connaissait le vice, il est de mauvaise foi et doit des dommages-intérêts que l’acheteur soit ou non un professionnel. S’agissant d’un vendeur occasionnel de bonne foi, il ne sera pas tenu des dommages-intérêts. Mais la situation est différente pour le vendeur professionnel, en effet une jurisprudence maintenant cinquantenaire considère que le vendeur professionnel ne peut ignorer les vices de la chose qu’il vend (Civ. 1ère, 24 novembre 1954, J.C.P., 1955, II, n° 8565). Cette présomption est irréfragable. C’est ce qui fait tout l’intérêt de la garantie des vices cachés, l’acheteur étant certain d’obtenir réparation dès lors que le vendeur est un professionnel. Un arrêt de la première chambre civile, en date du 8 juin 1999 (D. Aff., n° 170, 22 juillet 1999, 1171) affirme qui plus est que " Le vendeur professionnel ne peut ignorer les vices de la chose vendue, même lorsqu’il a fait procéder à une livraison directe de la chose à son client ", c’est-à-dire sans qu’elle passe par ses mains. Le vendeur a eu beau plaider qu’il était dans l’impossibilité de connaître le vice. Il s'agit donc là d'une action particulièrement favorable à l'acheteur surtout lorsque le vendeur est un professionnel. Toutefois l'action en garantie des vices cachés présente l'inconvénient d'être limité par un "bref délai" d'exercice, l’article 1648 dispose en effet que " L’action résultant des vices rédhibitoires doit être exercée par l’acquéreur, dans un bref délai, suivant la nature des vices, et l’usage du lieu où la vente a été faite ". Le point de départ du délai est la découverte du vice. La durée du délai n'est pas fixée et varie en fonction des juridictions. A été ainsi jugée irrecevable, car hors délai, l'action menée en 1992 par les acheteurs qui avaient découvert des infiltrations dès 1984 (Civ. 3ème, 4 mai 2000, pourvoi n° 98-14.376). La durée et le point de départ du "bref délai", bien qu'abandonnés à l'appréciation souveraine des juges du fond, nourrissent un contentieux abondant qui invite la Cour de cassation à distinguer notamment la garantie des vices cachés du défaut de conformité. La distinction entre l'action en délivrance non conforme et l'action en garantie de vices cachés peut s'avérer délicate. Nous donnerons pour exemple de vice caché, le cas d’un terrain loti et vendu par la commune d’Ossun et qui était situé sur un sol argileux, anciennement exploité comme carrière et depuis remblayé. A la suite de chutes de neige, qualifiées par arrêté ministériel de catastrophe naturelle, un glissement de terrain a gravement endommagé des maisons construites sur l’ancien terrain communal. 14 La première Chambre civile, le 15 juillet 1993 (R.G.A.T., 1994, 185, note H. PérinetMarquet), releva qu’ "en l’état dans lequel le terrain litigieux a été vendu par la commune, celle-ci n’ignorait pas qu’il était impropre à la construction en raison des risques graves de déstabilisation en sous-sols et des glissements dont les circonstances atmosphériques n’ont fait que provoquer la réalisation ; que la Cour d’appel en a justement déduit que la commune était tenue envers les acheteurs de la garantie de ces vices dans les termes de l’article 1645 du Code civil ". C'est également sur le fondement de la garantie des vices cachés qu’a été condamnée en cassation la commune de Ligueux, vendeur d'un terrain pour lequel "le rapport de l'expert ne laisse subsister aucun doute sur la gravité des erreurs commises par le lotisseur… les fortes intempéries étaient prévisibles …" (Civ. 3ème, 8 novembre 1995, pourvoi n° 83-17.508). La Cour d'appel avait condamné la commune sur le fondement de l'obligation de délivrance, la Cour de cassation considère qu'il convenait d'agir sur le fondement de la garantie des vices cachés En l'espèce la commune s'était toujours refusée à exécuter les travaux nécessaires à l'assainissement de la zone inondable. d) Responsabilité délictuelle Un constructeur peut également voir sa responsabilité engagée sur le fondement délictuel de l'article 1382 du Code civil dès lors qu'il n'est pas directement lié au maître de l'ouvrage par un contrat mais qu'il agit en tant que sous-traitant (arrêt "Besse", Ass. plén., 14 juillet 1991, D., 1991, 549, note J. Ghestin ; JCP, 1991, II, 21743, note G. Viney), bien que le fondement ne soit donc pas contractuel nous avons néanmoins considéré que les actions intentées contre de tels professionnels par le maître de l'ouvrage ou son assureur avaient trait à la construction. 2°) Actions fondées sur des rapports contractuels autres que ceux issus du droit de la construction ou de la vente a) Droit commun de la responsabilité contractuelle L’inexécution d’une obligation contractuelle est sanctionnée par le droit général des contrats. Ainsi, aux termes de l’article 1147 du Code civil : - "Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part." L’article 1148 ajoute : - " Il n’y a lieu à aucun dommages et intérêts lorsque, par la suite d’une force majeure ou d’un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou faire ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit." Ici encore, la force majeure constatée vient au secours du débiteur défaillant. Elle a permis notamment à un restaurateur organisateur d’un mariage d’être exonéré de sa responsabilité contractuelle car ses installations ont été détruites, moins d’un mois avant la réception, par un orage particulièrement violent (Aix-en-Provence, 20 mars 1991, juris-data n° 049580). 15 C’est au titre de cette responsabilité contractuelle de droit commun qu’a été condamné le vendeur d’un immeuble à construire pour son retard dans la livraison, retard dû à une inondation évitable du terrain (Versailles, 18 novembre 1994, juris-data n° 046353). b) Droit spécial des contrats Outre ces dispositions générales, peuvent être invoqués des textes relatifs à des contrats spéciaux. Nous avons déjà évoqué ci-dessus le droit de la construction et de la vente, ont été recherchées également les responsabilités de dépositaires sur le fondement de l’article 1927 du Code civil : - " Le dépositaire doit apporter, dans la garde de la chose déposée, les mêmes soins qu’il apporte dans la garde des choses qui lui appartiennent." Bien que l’obligation du dépositaire (exploitant d’un parking inondé, d’un entrepôt) ne soit donc en principe que de moyens, la jurisprudence met à sa charge la preuve de son absence de faute. Etablir la force majeure lui permettra bien évidemment de s’exonérer. Nous avons relevé également des contentieux relatifs aux rapports locatifs. Aux termes de l’article 1719 du Code civil le bailleur est tenu d’assurer au preneur la jouissance paisible de la chose louée, l’obligation ne cessant qu’en cas de force majeure. Il y a également ici une source de contentieux lorsque les locaux loués ont été inondés. 3°) Actions fondées sur des rapports avec les tiers Ici, la personne ayant subi un dommage n’est pas liée au défendeur par un contrat. Il s’agit d’actions fondées sur la responsabilité civile délictuelle ou sur des obligations légales particulières. a) Responsabilité délictuelle de droit commun S’agissant de la responsabilité délictuelle ont été invoqués aussi bien l’article 1382 que l’article 1384 alinéa 1 ou encore l'article 1386 du Code civil. Responsabilité pour faute : D’après l’article 1382 : - "Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer." La responsabilité n’est pas de plein droit, il appartient au demandeur de prouver une faute du défendeur. La force majeure fait obstacle à la faute. Toutefois, si une faute a précédé ou provoqué l'événement il n'y a plus force majeure et la responsabilité du défendeur demeure 16. Fait des choses en général : Selon l’article 1384 al. 1 - "On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde." 16 Voir not. François CHABAS, "Force majeure", Répertoire civil Dalloz, n°7 16 Cette disposition est à l’origine de la jurisprudence relative au fait des choses : le gardien d’une chose est présumé responsable des dommages causés par la chose. Il ne peut s’exonérer que par la faute de la victime ou la force majeure. Le gardien d'une chose est celui qui a les pouvoirs d'usage de direction et de contrôle sur celle-ci. Ainsi la garde d'une digue, laquelle s'était rompue sous la pression des eaux, appartient non au propriétaire de la digue mais au département "dès lors que l'aménagement des évacuations avait été effectué par le service départemental de l'équipement ou sous son contrôle, ce service ayant assuré dans l'exercice de ses attributions, la conception et la réalisation des travaux hors de toute intervention du propriétaire auquel il avait seulement été demandé d'en régler le prix" (Civ. 2ème, 21 juillet 1986, pourvoi n° 85-12.825). Les choses en question peuvent être ici des terrains, des murs, des arbres, des débris encombrant le lit d’une rivière… Ainsi, la responsabilité de la commune de Biarritz, propriétaire d’un terrain, a été recherchée par un autre propriétaire qui soutenait que les désordres affectant un terrain et des immeubles lui appartenant avaient pour cause le défaut de consolidation et la dégradation progressive, due à des infiltrations d'eau, d’un terrain appartenant à la commune de Biarritz. Il assigna la commune en exécution de travaux et en paiement de dommages-intérêts sur le fondement délictuel des articles 1382 et 1384 alinéa 1 du Code civil. La seconde Chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu le 21 janvier 1981 (J.C.P., 1982, II, 19814, note N. Dejean de la Batie) approuva la Cour d’appel de Pau laquelle avait considéré que la commune n’avait commis aucune faute et que le phénomène d’infiltration, connu depuis longtemps, était dû à la présence d’eaux souterraines “ normalement insurmontable ” ce qui constituait un cas de force majeure. C'est sur le fondement de l'article 1384 al. 1 qu'a été condamnée à réparation la commune de Beaulieu-sur-Mer suite à un éboulement de rochers en provenance d'un terrain lui appartenant (Civ. 2ème, 17 mars 1993, Bull., n° 116). Et c'est également en tant que gardienne de terrains dont le glissement a provoqué la mort de 56 enfants et 15 adultes qu'a été condamnée la commune de Passy à indemniser les victimes pour moitié (Chambéry, 24 novembre 1980, J.C.P., 1982, II, 19777, obs. J.C. Detharre). Il est à noter que cet arrêt présente la très rare particularité d'admettre un partage de responsabilité civile en cas de force majeure. Ruine des bâtiments : Le Code civil consacre également une disposition à la ruine des bâtiments : Article 1386 du Code civil : - "Le propriétaire est responsable du dommage causé par sa ruine, lorsqu’elle est arrivée par suite du défaut d’entretien ou par le vice de sa construction." Cette disposition n’est applicable qu’au propriétaire même si l’immeuble est loué ; le locataire n’étant responsable que sur le fondement général. Le terme “ bâtiment ” désigne tout édifice incorporé au sol ou tout autre immeuble par nature ou par incorporation. Ce peut être par exemple un pont, le châssis d’une fenêtre, un balcon, des tuiles… La “ ruine ” est constituée par une chute même partielle de la construction. La victime doit prouver un défaut d’entretien ou un vice de construction, le régime lui est donc moins favorable que le régime général du fait des choses fondé sur l'article 1384 al.1 17. La 17 Dans son rapport annuel 2000 la Cour de cassation suggère au législateur l'abrogation de l'art. 1386 C.C. : "En vertu de l'article 1386 du Code civil, le propriétaire d'un bâtiment est responsable du 17 force majeure est exonératoire, qu’elle ait provoqué la ruine, ou qu’elle ait empêché l’entretien. Elle a été admise pour les dommages causés lors du passage d'un cyclone en Polynésie française : "La ruine de l'immeuble était due à l'action conjuguée de l'eau et du vent lors du passage du cyclone… Les locataires ne prouvaient pas un mauvais entretien de l'immeuble" (Civ. 3ème, 12 avril 1995, pourvoi n° 92-18.955) b) Obligations légales particulières Des responsabilités particulières sont également fondées sur des textes spécifiques à certaines situations. Ainsi, s’agissant plus particulièrement des contentieux opposant en cas d’inondation le propriétaire d’un fond supérieur à celui d’un fond inférieur, il convient encore d’invoquer l’article 640 du Code civil relatif aux servitudes d’écoulement des eaux. Article 640 du Code civil : - "Les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés, à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l’homme y ait contribué. Le propriétaire inférieur ne peut élever de digue qui empêche cet écoulement Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur. " Constitue par exemple une aggravation de la servitude d’écoulement des eaux un drainage du fonds supérieur provoquant des inondations du fonds inférieur (Paris, 7 novembre 1994, jurisdata n° 024246). C’est une matière propice aux litiges et dans laquelle la notion de force majeure trouve sa place. La Cour d’appel de Reims a ainsi refusé de reconnaître le caractère de force majeure exonératoire à une pluie violente ayant provoqué l’inondation du bâtiment du fonds inférieur “ car il appartenait au propriétaire du fonds supérieur de prévoir l’installation d’avaloirs des rigoles d’écoulement d’eau pluviale d’une capacité susceptible de faire face aux orages les plus violents ” (Rennes, 17 mars 1994, juris-data n° 042000). La responsabilité des syndicats de copropriétaires vis-à-vis des tiers est prévue à l'article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis : - " Il (le syndicat) est responsable des dommages causés aux propriétaires ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes, sans préjudice de toute action récursoire" A ainsi été récemment retenue la responsabilité du syndicat de copropriétaires d'un centre commercial pour des dommages causés à des tiers car les éléments du choix architectural avaient joué un grand rôle dans la survenance du sinistre (Civ. 3 ème, 26 janvier 2000, pourvoi n° 98-17.045) dommage causé par sa ruine, lorsqu'elle est arrivée par une suite du défaut d'entretien ou par le vice de sa construction. Compte-tenu de l'évolution jurisprudentielle qu'a connu depuis deux siècles l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, cette disposition, à l'origine plus favorable aux victimes que l'article 1384, ne l'est plus aujourd'hui et n'a plus de justification. Même si la jurisprudence la plus récente (Civ. 2ème, 23 mars 2000, commenté dans le présent rapport) n'applique plus l'article 1386 lorsque l'action en responsabilité est dirigée contre un gardien de l'immeuble autre que le propriétaire, il reste qu'à l'égard du propriétaire gardien la victime se trouve dans une situation plus contraignante pouvant conduire à des absences d'indemnisation. Dans ces conditions, alors qu'une assurance couvre généralement le risque, il est souhaitable que l'article 1386 du Code civil soit purement et simplement abrogé, de telle sorte que les victimes, quelle que soit la qualité de la partie responsable, bénéficient du même régime." 18 Signalons encore, pour les cas particuliers d'abordages dus à des vents violents, les règles de la responsabilité fondées sur les articles 2 et 3 de la loi n° 67-545 du 7 juillet 1967 relative aux événements de mer : article 2 : - "Si l'abordage est fortuit, s'il est dû à un cas de force majeure, ou s'il y a un doute sur les causes de l'accident, les dommages sont supportés par ceux qui les ont éprouvés, sans distinguer le cas où soit les navires, soit l'un d'entre eux, auraient été au mouillage au moment de l'abordage." article 3 : - "Si l'abordage est causé par la faute de l'un des navires, la réparation des dommages incombe à celui qui l'a commise." Ici encore, la force majeure établie est exonératoire car si l'abordage est fortuit les dommages sont supportés par ceux qui les ont éprouvés alors que si l'abordage est causé par la faute d'un des navires, la réparation incombe à celui qui l'a commise. Comme nous venons de le constater, nombreux sont les textes pouvant fonder une action en responsabilité civile, action à laquelle un événement naturel, et plus particulièrement une inondation peut être rattachée. Evénement qui, s’il est qualifié de force majeure, peut être opposée par le défendeur et l’exonérer de toute responsabilité. Afin de cerner au plus près ce mécanisme, il nous a semblé indispensable d’étudier la notion juridique de la force majeure en droit civil (chapitre 1) avant de nous pencher sur les éléments pris en compte par les juridictions pour reconnaître ou non à l’élément naturel un caractère de force majeure exonératoire (Chapitre 2). 19 Chapitre 1 : La notion juridique de la force majeure en droit civil à travers la doctrine et la jurisprudence de la Cour de cassation Par Marie-Pierre CAMPROUX- DUFFRENE Nous allons donc étudier le mécanisme juridique de la force majeure (§1). Mais précisons que la force majeure est une construction prétorienne et qu’elle est donc susceptible d’évoluer en fonction des arrêts de la Cour de Cassation pris en la matière. Il nous faut constater qu’une telle évolution a eu lieu au sein de la Cour de Cassation quant aux éléments à prendre en compte pour caractériser cette force majeure. Cette évolution n’est cependant que le fait de deux chambres de la Cour sur six (§2). Dans notre étude l’inondation peut être qualifiée par l’administration de “ catastrophe naturelle ”, il nous faudra aussi voir quels sont les liens entre l’arrêté de catastrophe naturelle et la qualification exonératoire de la notion de force majeure (§3). §1 : Le mécanisme de force majeure Le cas de force majeure fait partie, avec les événements anonymes (guerre, émeute, grève, attentat, bousculade) et du fait individuel d’un tiers ou du fait de la victime elle-même, de ce qui est appelé juridiquement une cause étrangère. Cette cause étrangère permet d’exclure la responsabilité du débiteur. Traditionnellement la force majeure est définie comme tout événement (il peut s’agir de forces naturelles comme l’eau, le vent, la foudre, le tremblement de terre, le verglas) ayant des caractères imprévisible, irrésistible et extérieur aux parties entraînant pour eux une impossibilité absolue d’empêcher le dommage. Le cas de force majeure est un événement ou une circonstance empêchant absolument l’agent défendeur de se comporter autrement qu’il ne l’a fait. Elle rend impossible l’accomplissement du devoir ou l’exécution de l’obligation. Dans ces circonstances aucune faute, aucun fait ne peuvent être reprochés au défendeur car à l’impossible nul n’est tenu. Etudions le contenu de ces trois caractéristiques (A) ; puis son incidence en matière de responsabilité civile (B). A. Les caractères de la force majeure Aucun texte du Code Civil ne définit le cas de force majeure, seule l’expression y est reprise comme cause d’exonération ou non dans le cadre de la responsabilité civile. C’est la jurisprudence et surtout celle de la Cour de Cassation qui a permis la qualification du cas de force majeure et la définition des caractères de la force majeure. En effet, il appartient à la Cour de Cassation de rechercher et de contrôler si les circonstances ont le caractère légal de la force majeure. Selon François Chabas “ La force majeure, plus qu'un événement, ce sont des caractères : rien n'est en soi force majeure, tout peut le devenir à condition d'être extérieur, imprévisible et irrésistible ”18. - L'extériorité 18 F.CHABAS, Gaz. Pal., 1984, doct., p. 108 20 L'extériorité signifie que l'événement est indépendant de la volonté de celui qui est intervenu dans la réalisation du dommage. Par contre, le vice inhérent à la chose qui a causé le dommage ne constitue pas au regard du gardien un cas de force majeure 19. S'agissant de la responsabilité des constructeurs20, certains auteurs considèrent que le vice du sol ne saurait être considéré comme extérieur. Ainsi, pour MM. Malinvaud et Gestard21 "il faut exclure le vice du sol sur lequel repose la construction, puisque ce vice est précisément un cas d'ouverture à garantie et ne présente d'ailleurs aucun caractère d'extériorité". Gilbert Leguay22estime, quant à lui, que "le vice du sol, sol qui n'est en réalité que le support naturel de la construction pris en compte dans les données nécessaires pour la conception et l'exécution de l'ouvrage, ne présente à l'évidence aucun caractère d'extériorité". Cette opinion est discutée23. - L’imprévisibilité L’imprévisibilité signifie que l’événement ne pouvait pas être prévu (ex : une tempête tropicale à une période de l’année inhabituelle et d’une formation très rapide 24). L’événement normalement prévisible est apprécié par référence à un homme de “ type moyen, celui de l’homme normalement prudent et diligent, le standard du bon père de famille adapté à l’activité exercée par le défendeur et au degré de spécialisation qu’il implique ” 25 . Mais lorsque la personne en question est un spécialiste, comme par exemple un constructeur, la jurisprudence exige d'elle des diligences particulières, spécialement au cas de recherches préalables circonstanciées. Si le spécialiste les exécute correctement et que l'événement survient malgré tout, ces diligences peuvent corroborer le caractère insoupçonné des événements rencontrés. Ainsi en a-t-il été jugé, par exemple, dans le cas de mouvements imprévisibles de la nappe phréatique 26. En revanche, si la situation en question a connu un précédent, celui-ci est alors une circonstance dans laquelle l'imprévisibilité n'est pas reconnue (effondrement d'une carrière 27, éboulement de rochers 28, crues à un niveau connu 29). - L’irrésistibilité L'événement est irrésistible si rien ne peut être fait pour le contrer. Ainsi selon Geneviève Viney et Patrice Jourdain "La jurisprudence a toujours fait preuve d'une extrême sévérité, exigeant de l'événement invoqué qu'il empêche absolument l'agent de remplir son devoir" 30. Et il ne suffit pas que l'événement soit simplement plus difficile à contrer. 19 Pour un glissement de terrain : Civ. 2ème, 20 novembre 1968, J.C.P., 70, II, 16657 Voir Dalloz Action, n° 7380 21 MALINVAUD et GESTARD, Droit de la Promotion immobilière, n° 103 22 G. LEGUAY, RD imm., 1991.244 23 Voir not. B. BLANCHARD, "La sécheresse constitue-t-elle une cause exonératoire de la responsabilité des constructeurs vis-à-vis du maître de l'ouvrage ?", Gaz. Pal., 1992, 1, doct., 14 24 Civ. 2ème, 25 janvier 1994, Bull. civ., II, n° 13 25 G. VINEY et P.JOURDAIN, Les conditions de la responsabilité, Traité sous la direction de J.GUESTIN, L.G.D.J., 2ème éd., 1998, n° 399 26 Civ. 3ème, 4 novembre 1992, Bull. civ., II, n° 285 27 Civ. 2ème, 5 février, 1992, Bull. civ., II, n° 45 28 Civ. 3ème, 17 mars 1993, Bull. civ., II, n°116 29 Civ. 3ème, 4 juin 1997, Gaz. Pal., 1998, 1, pan. 30 G. VINEY et P.JOURDAIN, Les conditions de la responsabilité, op.cit. , n° 399 20 21 Ainsi, les caractères d’irrésistibilité ou d’imprévisibilité de l’événement extérieur permettent l’exonération car le cas fortuit démontre que le dommage ne peut être imputé au défendeur qui n’a pu empêcher l’événement ni en éviter les conséquences dommageables 31. B. Les effets de la force majeure sur la responsabilité civile Force majeure et responsabilité civile sont des termes antinomiques et inconciliables. La force majeure lorsqu’elle est constatée est en principe exclusive de toute responsabilité. En effet, la force majeure vient anéantir le lien de causalité qui existe entre le dommage et le fait générateur. En dehors de certains régimes spécifiques 32, le cas de force majeure exonère ainsi totalement le défendeur de sa responsabilité. D’où l’attrait de cette notion pour le défendeur à l’action lorsque sa responsabilité civile est recherchée. La question de l’application d’une causalité partielle au cas de force majeure devait tout de même être posée. Envisager cette causalité partielle permettrait en cas de force majeure une exonération simplement partielle du défendeur. Quelques arrêts ont admis ce partage de causalité entre la force majeure et la responsabilité du défendeur gardien 33. Ainsi, a été admis le rôle partiellement exonératoire de la force majeure résultant d'un violent orage34. Dans cette célèbre affaire, le naufrage du navire Lamoricière, une tempête d'une extrême violence n'avait que partiellement exonéré le transporteur de sa responsabilité de gardien. Mais aujourd'hui, la Cour de cassation fait généralement prévaloir la solution de la responsabilité intégrale. Par contre, des décisions des juges du fond ont admis une exonération partielle du débiteur, spécialement en cas de faute de celui-ci, sur le fondement de la théorie de la “ causalité partielle ”. La Cour d'appel d'Aix-en-Provence a ainsi retenu, dans le cas d'une chose détruite par inondation due à la crue d'un fleuve, la responsabilité partielle du dépositaire qui avait entreposé la chose dans un lieu insuffisamment clos et couvert 35. 31 P. JOURDAIN, obs. R.T.D.Civ., 1999,113 Notamment la loi du 5 juillet 1985 relative aux accidents de la circulation qui dans son article 2 empêche l'opposabilité à la victime de la force majeure, ou encore la Convention de Paris sur la responsabilité civile en cas d’accidents nucléaires laquelle énonce dans son article 9 que l'exploitant d'une installation nucléaire ne peut s'exonérer de sa responsabilité en invoquant un cas de force majeure sauf "cataclysme naturel de caractère exceptionnel". 33 Arrêt Lamoricière, Com, 19 juin 1951, D. 1951, 717 ; J.C.P. 1951, II, 6426 ; R.T.D.C., 1951 ; 515: Com., 19 juin 1951, D., 1951, 717, note G. RIPERT ; S., 1952, 1, 89, note R. NERSON ; J.C.P., 1957, II, 6426, note J. BECQUE ; R.T.D.Civ. 1951, 515, obs. MAZEAUD. Une autre affaire présente des points de similitude avec l'arrêt Lamoricière dans la mesure où a été admis un partage de causalité entre la faute du propriétaire d'un bateau et un ouragan, toutefois, dans cette espèce le caractère de force majeure de l'événement naturel avait été dénié : Com., 14 février 1973, D., 1973, 562, note G. VINEY. 34 Civ. 2ième, 13 mars 1957, J.C.P., 1957, II, 10084, note P. ESMEIN ; D., 1958, 73, note J. RADOUANT ; S., 1958, 77, note R. MEURISSE. 35 Aix-en-Provence, 10 juin 1975, Bull. Cour d'Aix n° 270, V. aussi Cour d'appel de Chambéry, le 24 novembre 1980 (J.C.P., 1982, II, 19777, obs. J.-C. DETHARRE), arrêt dans lequel le partage causal pour moitié entre la force majeure et la responsabilité d'une commune, gardienne du terrain a été admis pour un glissement de terrain ; mais il est vrai qu'en l'espèce le caractère particulièrement dramatique de la catastrophe qui a causé la mort de 71 personnes n'est probablement pas étranger à l'attitude des juges 32 22 Mais cette théorie paraît incongrue à la plupart des auteurs36. Toute impossibilité est absolue et il ne peut y avoir de partage de responsabilité entre la force majeure et le fautif ou le gardien. 36 Ph. Le TOURNEAU et L. CADIET, Dalloz Action 2000/2001 Droit de la responsabilité et des contrats ; G. VINEY, Les conditions de la responsabilité, 1998, L.G.D.J., n° 402 23 §2 : Evolution des caractères constitutifs de la force majeure et divergence au sein de la Cour de Cassation Il a été constaté à travers certains arrêts de la Cour de Cassation et certains écrits de la doctrine que les caractéristiques de la force majeure ont fortement évolué. La réunion de la trilogie traditionnelle ne serait plus exigée (A). Mais cette évolution n’est le fait que de deux chambres de la Cour de Cassation ce qui permet de dire qu’actuellement il y a divergence au sein de la Cour suprême quant aux conditions à réunir pour constater l’existence d’un cas de force majeure (B). Cette nouvelle conception de la force majeure met en exergue le rôle important joué par le comportement du débiteur (C). A. L’évolution des caractères conditionnant l’existence de la force majeure - L’extériorité : A priori, l’événement est le fait de la nature, il est donc forcément extérieur à l’agent. Il paraît cependant bon de signaler que la jurisprudence refuse de se laisser enfermer dans une position de principe et abandonne selon les circonstances le critère de l’extériorité. Ainsi un arrêt de la première Chambre civile 37 de la Cour de Cassation a confirmé un arrêt d'appel qui avait jugé que la maladie d'un élève, cocontractant au titre d'un contrat de formation, constituait un événement de force majeure, bien que n'étant pas extérieur à lui 38. Il appert ainsi que la Cour de cassation ne prend pas toujours en compte l'extériorité comme condition de la force majeure. Nous le verrons cette absence de prise en compte de l’extériorité semble liée à la montée en puissance de l’irrésistibilité. Mais peu importe, en ce qui concerne notre étude, l’inondation apparaît de prime abord toujours être un phénomène extérieur aux parties. - L’imprévisibilité Aujourd’hui, l’imprévisibilité est un critère contesté et marginalisé. Pour Paul-Henri Antonmattéi, "exiger l’imprévisibilité n’est pas satisfaisant en matière de phénomènes naturels". Grâce au développement des techniques météorologiques, ces événements sont prévus mais leur irrésistibilité est avérée. L’arrêt de la première chambre civile de la Cour de Cassation du 9 mars 1994 marginalise l’imprévisibilité, ce qui est désormais recherché c’est l’inévitabilité (comportement du sujet avant la réalisation de l’événement), l’irrésistibilité permet une telle appréciation pendant la réalisation39. L’imprévisibilité n’est pas prise en compte quand la prévision de l’événement ne le rend pas surmontable. Dans cette logique, l'imprévisibilité ne prend son véritable sens qu'en rapport avec l'irrésistibilité en tant qu'elle l'a confirme et la justifie. - L’irrésistibilité L’irrésistibilité apparaît ainsi comme l’élément fort en matière de force majeure. Ainsi la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, bien que le phénomène ait été "connu depuis longtemps", approuve la Cour d'appel d'avoir retenu la force majeure exonératoire pour la commune gardienne de son sol car la présence d'eaux souterraines provenant d'autres terrains était "normalement insurmontable" ce qui faisait échec à l'action en 37 Civ.1ère, 10 février 1998, R.J.D.A., juin 1998, n° 684, J.C.P., 1998, II, 10124, obs. G. PAISANT Egalement, pour un voyageur victime d'un accident de santé, Metz, 24 septembre 1992, J.C.P., 1993, IV, 1706 39 Civ. 1ère, 9 mars 1994, R.J.D.A., août-sept. 1994, n° 910. 38 24 responsabilité exercée, sur le fondement de l'article 1384 al.1, par le propriétaire du terrain affecté par les désordres40. D’après Patrice Jourdain, si le plus souvent l’imprévisibilité doit être requise, il est des cas où l’exiger n’a aucun sens. Lorsque toutes les précautions ont été prises pour éviter un événement prévisible ou ses conséquences dommageables et à plus forte raison si on ne peut rien faire pour empêcher l’événement ou éluder ses effets, l’irrésistibilité devrait suffire car le dommage devient inévitable 41. Refuser l’exonération du défendeur paraît injuste. Paul-Henri Antonmattéi propose de "remplacer la vielle trilogie - extériorité, imprévisibilité, irrésistibilité - qui relève désormais plus du mythe que d'une démarche scientifique, par la trilogie - inévitabilité, irrésistibilité, impossibilité - créée par l'événement"42. Il est en effet des événements absolument irrésistibles tel les raz de marée. Dans ces cas même prévus, le défendeur ne peut en éviter les conséquences. Et les juges doivent décréter l’événement cas de force majeure et cause étrangère bien qu'il ait été prévu. Pour M. Antonmattéi, exiger pour les catastrophes naturelles l’imprévisibilité serait dénué de toute signification43. L’inévitabilité suffit alors à caractériser la force majeure. “ Attendu que l’irrésistibilité de l’événement est à elle seule constitutive de la force majeure, lorsque sa prévision ne saurait permettre d’en empêcher les effets sous réserve que le débiteur ait pris toutes les mesures requises pour éviter la réalisation de l’événement ” 44. D’après cet attendu de la chambre commerciale de la Cour de Cassation, il semble qu’un garde fou soit établi quant à la suprématie de l’irrésistibilité. La notion d’irrésistibilité est étroitement liée à la capacité de l’homme de réagir aux éléments naturels, elle est mêlée à la faute comportementale du débiteur d’indemnisation. En effet, un examen scrupuleux du comportement du défendeur pour éviter le dommage est exigé. Lorsqu'un événement irrésistible est prévisible, il appartient au débiteur de prendre toutes les mesures requises pour en éviter la réalisation Même insurmontable dans ses effets, l’événement cesse de constituer un cas de force majeure si le débiteur n'a pas pris toutes les mesures requises pour empêcher qu’il survienne. - Pour Geneviève Viney et Patrice Jourdain45, on constate d’après certains arrêts que la jurisprudence n’exige plus l’imprévisibilité. Il suffit que l’événement en cause soit à la fois irrésistible et inévitable au sens où, même prévu, il n’aurait pas pu être empêché (phénomène naturel d’une exceptionnelle violence). La condition d’imprévisibilité ne réapparaît que lorsque la prévision de l’événement peut permettre, par la mise en œuvre de moyens appropriés, d’éviter ses effets dommageables. Si l’événement était évitable et prévisible, la force majeure n’est pas admise et si l’événement est prévisible mais inévitable quelles que soient les précautions, l’imprévisibilité n’a plus de sens car l’événement est inévitable. Pour ces auteurs, le critère fondamental de la force majeure est l’irrésistibilité accompagnée de l’insurmontabilité. 40 Civ. 2ème, 21 janvier 1981, J.C.P., 1982, II, 19814, obs. N. DEJEAN DE LA BATIE 41 P. JOURDAIN, obs. R.T.D.Civ., 1994, 870 et R.T.D.C., 1998, 161 42 P.-H. ANTONMATTEI, Contribution à l'étude de la force majeure, thèse, L.G.D.J., 1992. 43 P-H. ANTONMATTEI, "Ouragan sur la force majeure", J.C.P., 1996, I, 3907. 44 Com., 1er octobre 1997, C.C.C. 1998, n° 4 ; Dalloz Aff., 1997, 1217 ; R.J.D.A., novembre 1997, 1317 45 G. VINEY et P. JOURDAIN, Les conditions de la responsabilité, L.G.D.J., 1998 25 Ainsi les critères de la force majeure ont évolué mais une étude approfondie de la jurisprudence révèle en réalité l'existence d'une divergence entre les Chambres de la Cour de cassation quant à la nécessité de réunir les trois critères classiques de la force majeure : imprévisibilité, irrésistibilité, extériorité. 26 B. La divergence entre les chambres de la Cour de Cassation quant aux caractères essentiels de la force majeure En réalité l'évolution que nous venons d'étudier est le fait de deux chambres de la Cour de Cassation : la première Chambre civile et la Chambre commerciale. Seules ces deux chambres évoluent sur la conception de la force majeure (b), les autres formations s’en tiennent à la trilogie traditionnelle (a). a- La deuxième et la troisième chambres civiles de la Cour de Cassation La deuxième et la troisième chambres civiles de la Cour de Cassation exigent la réunion des trois critères et confirment régulièrement la nécessité de l'imprévisibilité pour admettre l'existence de la force majeure. Précisons que les trois quarts des arrêts de cassation analysés pour cette étude sont rendus par ces deux chambres46. - En effet il faut noter la sévérité de la deuxième chambre civile. Par exemple : "attendu qu'un événement n'est constitutif de la force majeure que s'il est extérieur, imprévisible et irrésistible. L’existence d’un règlement de copropriété prévoyant l’installation d’un tampon étanche rend prévisible ce type d’inondation, d’où l’exclusion de la force majeure et l’application de l’article 1384 al. 1 du Code Civil". Il était question de la responsabilité d’un syndicat de copropriétaires pour les dégâts d’eaux sur l’immeuble 47. Plus récemment, la seconde chambre civile de la Cour de Cassation a estimé dans une formule générale et de principe que c'était à bon droit que l'arrêt attaqué a énoncé que "l'imprévisibilité de l'événement invoquée comme cause exonératoire de la présomption de responsabilité est exigée au titre des éléments constitutifs de la force majeure". Par cette motivation en termes généraux cette chambre civile semble prendre le contre-pied de la jurisprudence considérant l'irrésistibilité comme seule constitutive de la force majeure 48. - De même pour la troisième chambre civile de la Cour de Cassation : "la Cour d'Appel, retenant que l'éboulement de la terrasse résulte de la conjonction de fortes pluies assimilées à l'état de catastrophes naturelles par un arrêté ministériel de la situation vulnérable des lieux en pente et de la nature du terrain, n'a pas caractérisé la force majeure imprévisible et irrésistible exonératoire de responsabilité"49. b- La première Chambre civile et la Chambre commerciale de la Cour de Cassation En revanche, pour la première Chambre civile et la Chambre commerciale l’imprévisibilité n’est pas exigée de manière stricte : - s’il y a imprévisibilité, le comportement de celui qui invoque la force majeure sera alors jugé indifférent. - si le dommage est prévisible, il y aura tout de même force majeure dès lors que l’événement est jugé irrésistible ou insurmontable : on apprécie le comportement de celui qui invoque la force majeure. Si ce comportement est celui d’un homme prévoyant, il y aura force majeure. 46 Et plus de la moitié par la troisième Civ. 2ème, 1er avril 1999, D. 1999, IR, 118. 48 Civ. 2ème, 13 juillet 2000, Resp. civ. et assur., 2000, Comm., R.T.D.Civ., 2000, 848 49 Civ. 3ème 14 février 1996, R.J.D.A., oct. 1996, 1160. 47 324, et obs. P. JOURDAIN, 27 Donc, pour ces deux Chambres, en cas de dommage prévisible, l’irrésistibilité au regard de la prévoyance équivaut à la force majeure. Voici quelques exemples de décisions : - "Attendu que l'irrésistibilité de l'événement est à elle seule, constitutive de la force majeure lorsque sa prévision ne saurait permettre d'en empêcher les effets, sous réserve que le débiteur ait pris toutes les mesures requises pour éviter la réalisation de l'événement"50. - "Le cas de force majeure peut être constitué par la seule irrésistibilité de l’événement (humidité et encombrement du port : prévisibles) car la prévision ne saurait permettre d’en empêcher les effets"51. L’exonération suppose que le débiteur ait pris des précautions pour empêcher le préjudice mais il n’est pas besoin de prouver l’imprévisibilité de l’événement. - "Les circonstances invoquées comme constitutives de la force majeure n’étaient pas insurmontables", ce qui correspond en réalité au critère d’irrésistibilité (annulation d’un voyage au Maroc suite à la guerre du Golfe) 52. - "Les bâtiments n’auraient pu, même s’ils n’avaient pas été affectés de vices, s’avérer étanches en présence d’inondations d’une intensité anormale", préjudice ayant pour cause déterminante l’intensité anormale des pluies et considéré comme une catastrophe naturelle et un cas de force majeure, le constructeur est exonéré de sa présomption de responsabilité décennale fondée sur l’art 179253. - "Attendu que la cour d'appel a constaté que la destruction des marchandises entreposées dans la chambre froide se trouvant dans les locaux de la société Gondolfruit résultait de l'incendie allumé par des agriculteurs dont la manifestation avait dégénéré en émeute, et que les émeutiers avaient échappé au contrôle des forces de l'ordre ; qu'elle a retenu souverainement que l'événement était irrésistible ; que, par ce seul motif, elle a légalement justifié sa décision caractérisant ainsi la force majeure"54. Il est intéressant de constater que la chambre commerciale, dans un contentieux opposant la société Gondolfruit à un autre demandeur, pour le même événement, a tenu un raisonnement identique55. Ainsi, dans la conception évoluée de la force majeure, le caractère d'irrésistibilité prédomine. Mais en arrière plan de cette évolution un élément supplémentaire est pris en compte : le comportement fautif du défendeur en relation avec l’événement irrésistible. Ce comportement prend une importance capitale dans l’appréciation par le juge de l’existence de la force majeure. C. L'incidence de la faute du débiteur de l’indemnisation sur la notion de force majeure 50 Com. 1er octobre 1997, C.C.C. 1998, n° 4 ; Dalloz Aff., 1997, 1217 ; R.J.D.A., novembre 1997, 1317 51 Com., 28 avril 1998, R.J.D.A., sept. 1998, n° 0 949.699 ; D., 1999, 469. 52 Civ. 1ère, 8 décembre 1998, C.C.C., 1999, n° 36 ; Dalloz Aff., 1999, 167 53 Civ. 1ère, 26 janvier 1999, Lamy assur., n° 49, mars 1999, bulletin d'actualité n° 1614 54 Civ. 1ère, 17 novembre 1999 Société Faure et autre contre Société Gondolfruit , Groupe Efic 55 Com., 26 juin 2001, Société Agrunor contre société Gondolfruit, Groupe Efic, Resp. civ. et assur., octobre 2001, n° 279. 28 La force majeure en principe fait obstacle à la faute car l'événement est dans ce cas qualifié de cause exclusive. Toutefois, si une faute a précédé ou provoqué l'événement il n'y a plus force majeure56. La conception de la force majeure de la première chambre civile et de chambre commerciale de la Cour de Cassation donne une importance plus grande à la faute du débiteur. En déclarant force majeure un événement irrésistible et non pas imprévisible, les juges intègrent une autre donnée, le comportement du débiteur. La prévision de cet événement devrait entraîner chez le débiteur un comportement visant à faire tout ce qui était à sa disposition pour éviter et prévenir le risque. Ainsi le comportement du débiteur est essentiel pour statuer sur l'existence du cas de force majeure et donc sur l'exonération. Si le débiteur avait la possibilité, par la mise en place de mesures adéquates, d’éviter le dommage, c’est donc que l’inondation ne peut être considérée comme la cause exclusive du dommage. Il existe une autre cause à son dommage qui est le comportement fautif du débiteur. Ainsi la victime peut demander réparation au débiteur sans que celui ne puisse invoquer la force majeure pour s’exonérer de sa responsabilité. Il ne peut y avoir dans ce cas de partage de responsabilité ou d’exonération partielle de responsabilité. Le débiteur devra alors entière réparation. D'après Patrice Jourdain, l’événement prévisible peut souvent être évité en prenant certaines précautions, ce qui exclut le cas de force majeure, mais quand aucune mesure ne permet d’éviter l’événement ou ses conséquences, l’irrésistibilité suffit puisqu’elle se double de l’inévitabilité57 . Cette référence au comportement du débiteur de l’indemnisation réintroduirait un élément subjectif dans les cas de responsabilité civile objective (1384 al. 1) dont les conditions sont remplies. La responsabilité serait engagée du fait de l’existence d’un comportement fautif du responsable potentiel excluant une cause d’exonération. La faute du débiteur correspondant au fait de n’avoir pas tout mis en œuvre pour éviter et prévenir le risque empêcherait la qualification de l'événement en cas de force majeure et permettrait alors le jeu de la responsabilité du fait des choses. Le comportement passif (faute ou négligence) du débiteur compromettrait ses chances d’exonération et permettrait à la victime d’être indemnisée. Cette faute démontrerait l'intervention de la main de l'homme et donc empêcherait l'événement causal d'être purement naturel. A l'inverse si le comportement du débiteur est positif c'est à dire qu'il va dans le sens de la prévention et de la prudence, la conception de ces deux chambres aboutit à un élargissement de l’exonération au bénéfice du débiteur de l'obligation à réparation et au détriment de la victime : l’irrésistibilité doublée de l’inévitabilité serait suffisante. 56 57 V. F. CHABAS, "Force majeure", Répertoire civil Dalloz, n° 7 P. JOURDAIN, obs., R.T.D.Civ., 1998, 122. 29 §3 : Le lien existant entre la force majeure et l'arrêté de catastrophes naturelles Reste à étudier le lien existant entre la force majeure, cause exonératoire de responsabilité, et l'arrêté de catastrophes naturelles permettant le fonctionnement de l’indemnisation par l’assurance. Rappelons que l'article 1er de la loi nº 82-600 du 13 juillet 1982 relative à l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles vise “ l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir le dommage n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises ”. Rappelons aussi qu'il faut que l'Etat prenne un arrêté déclarant la localité en état de catastrophe naturelle pour permettre à la compagnie d'assurance d'indemniser la victime. Pour Christian Atias : “ Aucune disposition légale ne détermine les rapports entre les notions de force majeure et de catastrophe naturelle ; le bon sens dit qu’elles ne sont pas étrangères l’une à l’autre. Il est vrai que la première joue en faveur du responsable qu’elle exonère et la seconde en faveur de la victime qui bénéficie d’un régime protecteur ; les mécanismes mis en œuvre sont pourtant suffisamment étrangers l’un à l’autre - une situation donnée dont la réalisation du dommage est la pathologie et une convention conclue en vue de l’indemnisation des conséquences de ce dommage -, pour que la création de la seconde qualification ne prive pas la première de ses effets normaux. La délimitation de deux unités conceptuelles distinctes - droit de la responsabilité, incluant l’inexécution du contrat, et droit des assurances - conduit à admettre que la constatation administrative d’une catastrophe naturelle ne suffit pas à établir l’imprévisibilité du phénomène qui n’exclut pas l’application du droit commun de la responsabilité (Cass. civ. 3ème, 28 janvier 1998, K.c/ D. inédit) ”58. Effectivement, cet arrêté n'induit pas nécessairement la force majeure, des exemples existent nombreux en jurisprudence 59. L’événement qualifié par l’arrêté de catastrophe naturelle ne correspond pas forcément à la qualification juridique de force majeure, l’intensité anormale d’une inondation n’a pas forcément les caractères d’imprévisibilité et surtout d’irrésistibilité de la force majeure. Tout dépend des circonstances concrètes et des effets réels de l’événement sur l’agent. Pour Loïc Cadiet, en matière de phénomènes naturels, il faut constater le caractère exceptionnel eu égard aux conditions climatiques locales 60. Il faut aussi que cet événement naturel remplisse en principe, comme il vient d'être étudié, les caractéristiques de la force majeure. Ainsi, un exemple rendu par la troisième chambre civile de la Cour de Cassation : afin de débouter une commune et son assureur de leur demande, l'arrêt retient que l'éboulement de la terrasse résulte de la conjonction de fortes pluies assimilées à l'état de catastrophe naturelle par un arrêté ministériel, de la situation vulnérable des lieux en pente et de la nature du terrain ; "qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la force majeure imprévisible et irrésistible exonératoire de responsabilité, a violé le texte susvisé" 61. 58 C. ATIAS, Philosophie du droit, Collection Thémis, Droit privé, PUF, 1999, p. 331 Civ. 3ième, 24 mars 1993, Bull. civ., III, n° 46 ; Civ. 3ème, 14 février 1996, R.J.D.A., oct. 1996, n° 1160. 60 In Dalloz Action, Droit de la responsabilité et des contrats, 1998, 61 Civ. 3ème, 14 février 1996, R.J.D.A., oct. 1996, n° 1160 ; Civ. 3ème, 1er décembre 1999, La Tribune de l’assurance n°33, mars 2000, n° 96. 59 30 En effet, il n’y a aucune raison juridique pour que l’assimilation soit faite. Cependant il est évident que les juges peuvent se servir de cet arrêté ou de son absence pour apprécier la situation au regard de la notion de force majeure. Il est parfois arrivé que les juges du fond tirent de la simple constatation administrative de catastrophe naturelle, donnée à un événement, la conséquence nécessaire que ce dernier avait le caractère de force majeure dans les rapports entre les parties contractantes 62. Nous pouvons dors et déjà estimer que cette déduction est quelque peu rapide et insuffisante d'après l'étude faite sur la notion de force majeure. 62 Civ. 3ème, 24 mars 1993, Bull. civ., III, n° 46. 31 Chapitre 2 : La typologie des éléments de la force majeure exonératoire de responsabilité Par Marie-France STEINLE-FEUERBACH C'est aux juges du fond qu'il appartient d'apprécier les éléments de fait caractérisant ou non la force majeure, la Cour de cassation contrôlant la qualification de la force majeure. Sur l'ensemble des arrêts de cassation que nous avons pu réunir 70% sont des arrêts de rejet c'està-dire confirmant la décision des juges du fond. La cassation intervient notamment lorsque la Cour de cassation estime que les juges du fond n'ont pas tiré des éléments de fait la qualification exacte de l'événement ou encore n'ont pas recherché ces éléments avec suffisamment de précision ; la cassation peut également porter sur un point de droit différent alors que la Cour de cassation approuve les premiers juges quant à leur appréciation de la force majeure. Avant de procéder à une analyse plus approfondie de la jurisprudence il nous a paru pertinent d'effectuer quelques statistiques sous les réserves suivantes : - le droit est une matière a priori rebelle aux prévisions étant donné, d'une part, le pouvoir d'appréciation des juges du fonds et, d'autre part, l'interdiction faite à la Cour de cassation de procéder par arrêts de règlements63. En effet, la Cour de cassation a toujours la possibilité d'opérer un revirement dans une matière essentiellement prétorienne. - la collecte des décisions bien qu'ayant été faite le plus largement possible ne saurait prétendre être exhaustive. Malgré ces réserves, il nous a semblé que certains pourcentages pouvaient être révélateurs d'une tendance. Chacune des 175 affaires traitées a été comptabilisée suivant plusieurs paramètres : - Nature de l'événement : inondation, sécheresse, vent, autres - Fondement de l'action : construction ou vente d'immeuble, autres rapports contractuels, rapports avec les tiers - Présence ou non d'un arrêté de catastrophe naturelle - Reconnaissance ou non de la force majeure. Nous avons déjà rapporté plus haut que les inondations représentaient environ la moitié du contentieux (plus précisément 48%, le vent y prend place pour 20%, la sécheresse pour 16%, les 16% restant se partageant principalement entre la neige, les glissements ou effondrements de terrain ou le gel) 64. La répartition selon les fondements de l'action a également déjà été rapportée, rappelons que 47% du contentieux est relatif aux actions ayant trait à la construction ou à la vente d'un immeuble. Les statistiques effectuées présentent l'intérêt de renverser l'idée communément admise selon laquelle les forces de la nature présentent les trois caractères de la force majeure (extériorité, imprévisibilité et irrésistibilité). Ne s'agit-il pas là d'ailleurs de l'exemple type livré pendant longtemps aux étudiants de deuxième année de droit et qui n'a disparu que récemment des manuels de cours. 63 64 C'est-à-dire valables pour l'avenir et fixant définitivement la jurisprudence Voir en annexe le tableau de la jurisprudence civile 32 Nous avons constaté lors de cette étude que la force majeure est rejetée dans plus de 75% des contentieux en recherche de responsabilité en cas de dommages liés aux événements naturels. Au regard du juge civil les caractéristiques de la force majeure présentées par ces événements ne sont donc réunies que dans moins un quart des affaires qui lui sont soumises. Si on se limite aux actions ayant trait à la construction ou à la vente d'un immeuble on constate que la force majeure n'est retenue que dans une proportion inférieure à 15%. Les magistrats sont donc particulièrement sévères envers les constructeurs, professionnels tenus d'une responsabilité de plein droit et envers les vendeurs garants des vices cachés. Le fait naturel n'est pas considéré par les juges, notamment pour les inondations, comme ayant d’emblée les caractéristiques de la force majeure. De manière générale les juges se montrent plus sévères envers les professionnels qu'envers les simples particuliers. Ainsi que le souligne Nathalie Sempé, "en définitive, en matière de force majeure, une hiérarchisation des débiteurs se dessine au gré des interprétations jurisprudentielles. L'appréciation par les juges des caractères propres à la force majeure apparaît ainsi plus stricte en présence de professionnels"65. Les résultats relatifs aux seuls contentieux liés aux inondations ne présentent pas de différence significative avec ce résultat général : En matière d'inondation la force majeure est rejetée de manière générale dans 75% des cas (dans la même proportion qu’il s’agisse de cas de débordement de cours d'eau ou d’autres inondations) 66. et lorsque l'action est fondée sur la construction ou la vente d'un immeuble la proportion de refus de la force majeure atteint plus de 86%. Par une étude systématique des décisions relatives à la force majeure en matière d'événement naturel nous avons recherché quelle était l'appréciation factuelle de la force majeure (§1), ainsi que l'incidence de l'existence d'une faute sur la force majeure (§2) et de celle de la présence d'un arrêté constatant d’état de catastrophe naturelle (§3). §1 : L’appréciation factuelle de la force majeure Quelques décisions admettent ou rejettent globalement la force majeure (A), mais dans la plus grande majorité des cas les critères de cette force majeure sont examinés de manière plus approfondie, le juge civil prenant soin de vérifier que les caractères de la force majeure sont bien réunis (B). A. L'appréciation globale de la force majeure Nous avons constaté que quelques rares décisions admettaient l'existence de la force majeure par la seule présence d'un arrêté de catastrophe naturelle sans que les juges vérifient la réunion des trois éléments de la force majeure. 67 Par ailleurs, la soudaineté et la violence d'un 65 Nathalie SEMPE, "La difficile qualification de force majeure en matière de responsabilité des constructeurs (Toulouse, 10 septembre 1996)", P.A., 3 février 1997, n° 15, 11 66 et donc sensiblement dans la même proportion que pour l’ensemble des événements naturels 67 voir infra § 3 de cette section 33 événement, sa nature "exceptionnelle" peuvent emporter la décision du juge sans que soient nécessairement déclinés les éléments de la force majeure. Ainsi a été reconnue globalement la force majeure pour la violence exceptionnelle du phénomène naturel : - Civ. 2ème, 6 janvier 1982 (bull. civ., n° 3) : alors que l'auteur du pourvoi soutenait que "un phénomène météorologique, fut-il exceptionnel, n'étant pas nécessairement imprévisible et irrésistible, la Cour d'appel aurait omis de rechercher et d'énoncer en quoi consistaient ces deux éléments constitutifs de la force majeure" la Cour de cassation répond que "attendu que l'arrêt relève que la hauteur des pluies ininterrompues constatée à la date et dans les lieux rapprochés du dommage, retient que l'intensité maximum de la crue du ruisseau, qui, généralement réduit à un filet d'eau, s'était transformé en un torrent furieux, avait provoqué le ravinement et les éboulements des rives, et précise, que dans la région des magasins, des caves et des campings avaient été inondés… ; qu'il énonce que l'effet des pluies, d'une abondance anormale, avait été aggravé par la soudaineté et la violence des orages… la Cour d'appel a pu déduire … que les troubles atmosphériques, qui étaient à l'origine de la crue ayant causé le dommage, avaient revêtu un caractère de violence exceptionnelle constitutif de force majeure". Ou pour l'importance et la généralité de l'inondation : - Montpellier, 22 juin 1988 (juris-data n° 001850) : L'inondation ayant affecté l'immeuble loué est due à des intempéries généralisées à tout le quartier au point d'entraîner le lendemain une circulaire du maire de la commune annonçant que les prévisions météorologiques restaient mauvaises. La Cour retient "Eu égard à l'importance et à la généralité de cette inondation celle-ci peut être qualifiée de force majeure". Ou encore pour l'intensité de l'inondation : - Paris, 4 novembre 1988 (juris-data n° 027985) : le propriétaire d'un fond servant qui a diminué l'usage d'une servitude d'écoulement des eaux… "doit donc être condamné à réparer les conséquences dommageables des inondations survenues sur le fonds dominant, à l'exception toutefois de celle provoquée par un cataclysme local d'une rare intensité ayant le caractère d'un cas de force majeure". B. L'appréciation des éléments de la force majeure La preuve des trois éléments de la force majeure incombe au défendeur ainsi que le rappelle la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt récent du 16 juin 1999 (pourvoi n° 97-15.056) : "la bailleresse ne rapportait pas la preuve que les pluies, ayant provoqué les inondations des 23 juillet et 6 décembre 1988, étaient exceptionnelles, imprévisibles et irrésistibles de sorte qu'elles ne revêtaient pas le caractère de force majeure". La même formulation se trouve dans un arrêt de la première Chambre civile en date du 1 er avril 1999 (pourvoi n° 97-17.960) : "il appartient à celui qui s'en prévaut de prouver que l'événement était à la fois irrésistible, imprévisible et extérieur". Les juges du fond disposent d'un pouvoir souverain d'appréciation quant à la caractérisation des éléments de la force majeure. A travers les décisions collectées nous avons recherché successivement les critères de l'extériorité, de l'imprévisibilité et de l'irrésistibilité. Pour chacun des critères, les décisions 34 sont regroupées par phénomène naturel : les inondations en premier lieu, les autres par ordre alphabétique. 1°) Les critères de l’extériorité Le critère de l'extériorité est rarement invoqué, la catastrophe étant le fait de la nature, il est a priori extérieur à l'homme 68 sans lien avec l'activité humaine. Il est pourtant maintenant établi que, dans certaines situations, la catastrophe n'est pas totalement extérieure aux activités humaines. Ainsi que le relève Jacqueline Domenach, "en droit on a su diviser des catégories qui relevaient d'événements naturels et d'autres qui relevaient d'événements humains. C'est bien une séparation entre la nature et l'humain. En réalité, dans les faits et dans les événements, il n'y a pas de séparation claire entre la main de l'homme et l'événement naturel"69. Les inondations exceptionnelles et particulièrement dramatiques de la Somme en 2001 ont entraîné une prise de conscience politique de l'influence de l'homme sur les inondations et a été crée une commission d'enquête parlementaire sur les causes des inondations, création approuvée le 17 mai 2001 par l'Assemblée nationale. Ses membres ont été chargés d'étudier les causes des inondations que celles-ci soient répétitives ou exceptionnelles. En particulier les causes liées au climat, à l'environnement, à l'urbanisme, à l'utilisation des sols, à la gestion des fleuves et des rivières à l'échelle des bassins versants70. De même une commission d'enquête a été diligentée par le Sénat, elle porte en partie sur la recherche des causes 71 En jurisprudence, l'extériorité est parfois rappelée comme étant un des trois critères de la force majeure mais elle est fort peu discutée. Quelques arrêts évoquent l'extériorité. Admission de l'extériorité : Inondation : - Angers, 7 juin 1982 (juris-data n° 041765) : "Le phénomène étant dû au fait que le sol argileux environnant draine très mal les eaux de pluie jusqu'à la nappe phréatique, il a bien une origine extérieure au sol sur lequel le pavillon a été édifié et des vices desquels le maître d'œuvre et l'entrepreneur devaient répondre". - Paris, 3 décembre 1982 (juris-data n° 029062) : les précipitations exceptionnelles ayant entraîné l'inondation du sous-sol de l'immeuble étaient un fait extérieur aux locateurs d'ouvrage. Refus de l'extériorité : Neige : - Civ. 1ère, 19 juillet 1988 (bull., n° 249) : l'effondrement du toit d'un poulailler ne peut être considéré comme extérieur à l'activité des éleveurs. En l'espèce il n'y avait aucune faute de la part des éleveurs. 68 P. SEGUR, "La catastrophe et le risque naturels. Essai de définition juridique", R.D.P, février 1997, 1693 69 J. DOMENACH, "L'événement risque naturel et le juge", Actes du séminaire "Des disciplines à la rencontre de l'événement naturel", Groupement Interdisciplinaire de Recherche sur les Risques Naturels, Grenoble, 27 mars 1998 70 Rapport n° 3046, par Eric DOLIGE, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 mai 2001 71 Rapport d'information (n° 34), président Marcel DENEUX, remis au président du Sénat le 18 octobre 2001 35 Vent : La condition d'extériorité a été refusée en raison d'une faute du débiteur : - Civ. 3ème, 1er décembre 1993 (pourvoi n° 01-19.972), suite à un sinistre provoqué par un vent soufflant à 187 km/h la Cour de cassation approuve la Cour d'appel de Rennes qui avait considéré que "la condition d'extériorité ne serait pas satisfaite, en l'espèce, puisque l'inexécution de l'obligation serait imputable à une faute du débiteur et que la faute est exclusive de la notion de cause étrangère". En l'espèce il y avait un défaut de scellement entre la maçonnerie et la coque à ossature de bois de la charpente. La rareté des décisions invoquant l'extériorité est surprenante car l'influence de l'homme sur le dommage naturel devrait supprimer le caractère d'extériorité. Il est vrai qu'il s'agit davantage de l'Homme72 que de l'homme et qu'en matière de responsabilité civile c'est essentiellement le comportement d'un individu particulier, ou d'un groupement d'individus ayant des activités privées, qui est examiné. La dimension politique se trouve donc absente du débat judiciaire. Dans la plus grande majorité des cas, la discussion porte sur l'imprévisibilité ou l'irresistibilité de l'événement. 2°) Les critères de l’imprévisibilité Il s'agit la plupart du temps de critères temporels ou géographiques, les deux pouvant être cumulés, d'autres éléments peuvent aussi être pris en compte. a) Critères temporels Quelle doit être la récurrence d'un événement pour que la jurisprudence le considère comme imprévisible ? Il n'est pas possible de donner une réponse précise à cette question. La fixation d'une limite temporelle se heurterait d'ailleurs au libre pouvoir d'appréciation du juge. Nous pouvons simplement constater que l'imprévisibilité n'est que rarement admise pour l'éloignement dans le temps de l'événement comparable précédent. Admission de l'imprévisibilité Inondation : De manière surprenante, un délai de 15 ou 20 ans a suffi pour que la Cour d'appel de Paris admette l'imprévisibilité, en l'espèce il y avait également une impossibilité de concevoir des collecteurs assez robustes : - Paris, 3 décembre 1982 (juris-data n° 029062) : après une inondation des sous-sols de la Tour Maine Montparnasse suite à de fortes pluies, l'imprévisibilité sera retenue au profit des locateurs d'ouvrage au motif qu'il était impossible pour eux de prévoir ces précipitations, la preuve de leur caractère exceptionnel étant rapportée par la direction de la météorologie nationale des chutes de pluies aussi violentes ne se produisant qu'une fois tous les 15 ou 20 ans. Ont été considérées comme imprévisibles des précipitations égalées seulement 2 fois en 50 ans : - Le 27 juin 1990, un orage très violent s'est abattu sur Paris, les locaux de la cité de la Musique ont été inondés en raison notamment de la rupture d'une galerie d'égout public ; 72 Voir en particulier H. SEILLAN, "Inondations de Béziers. La main de Dieu ? La main de l'homme ?", Préventique, n° 25 janvier-février, 1996 36 à la suite de cette inondation le maître d'ouvrage de l'opération de la cité de la Musique a assigné le maître de l'ouvrage de l'immeuble voisin considéré comme étant à l'origine de la venue des eaux dans les locaux sinistrés. Une expertise a été étendue à différents constructeurs et cabinets intervenants, à la Socotec et à la ville de Paris. Les défendeurs ont invoqué la force majeure et, détail intéressant que "si responsabilité il y avait, ce serait celle de la collectivité publique qui laisse utiliser les égouts hors d'âge et en piètre état, et qui, en ayant permis le bétonnage d'un quartier autrefois constitué d'espaces verts, a aggravé les conséquences des précipitations"… Le demandeur a été débouté car la Cour d'appel de Paris, approuvé par la Cour de cassation (14 avril 1999, pourvoi n° 97-12.946) a considéré qu'en l'espèce il y avait deux causes étrangères : - La première est le phénomène atmosphérique : il s'agissait de “ précipitations égalées uniquement 2 fois en 50 ans... orage le plus violent enregistré par l'observatoire de Montsouris en 100 ans ”, la Cour de cassation en a déduit qu "il s'était produit un phénomène atmosphérique d'une si rare violence qu'il ne pouvait raisonnablement entrer dans les prévisions des entreprises travaillant dans la zone". - La seconde cause étrangère, bien que non naturelle, mérité d'être signalée puisqu'il s'agit du fait exonératoire du tiers : "le seul ouvrage ayant occasionné les dommages appartenait à la ville de Paris (collecteur d'égout centenaire, construit en mauvais ciment…)", la cour d'appel en déduit que : "Tout autre ouvrage que le collecteur public n’a joué qu’un rôle passif. Qu’ainsi il existe une deuxième cause étrangère exonératoire de la responsabilité des intimés”, la Cour de cassation approuvant : "les eaux ayant inondé la cité de la Musique, provenaient de la rupture de la canalisation publique", l'immeuble (voisin) n'ayant eu qu'un rôle passif dans la circulation des eaux, la cour d'appel a pu en déduire à bon droit qu'il ne pouvait être admis de rechercher la responsabilité des propriétaires voisins". Neige : - Civ. 3ème, 7 mars 1979 (D., 1979, I.R., 380, J.C.P., 1979, IV, 169) : l'effondrement de la toiture était dû à d'abondantes chutes de neige, le phénomène météorologique avait les dimensions d'une véritable calamité dont l'O.N.M. n'avait jamais enregistré l'équivalent dans ses archives. La présomption de responsabilité de l'architecte et de l'entrepreneur est donc écartée. Vent : - Toulouse, 29 septembre 1998 (juris-data n° 045514) : Un vent supérieur à 112 km/h est exceptionnel par rapport aux statistiques de Météo France, "c'est à juste titre que le tribunal a considéré que cette tempête dont le caractère exceptionnel est révélé par les statistiques de Météo France portant sur une durée de 30 ans présentait les caractères de la FM et exonérait par conséquent le locataire". Refus de l'imprévisibilité Inondation : L'imprévisibilité a été refusée en cas de crues, de remontées de nappes phréatiques et de pluies. Crues : La fréquence et le caractère cyclique des crues interdisent qu'elles puissent être considérées comme imprévisibles : 37 - Les coffres d'une banque avaient été inondés suite à une crue lente et progressive, la Cour d'appel de Metz (4 octobre1985, juris-data n° 041993) relève le caractère cyclique des crues et la défectuosité du système de pompage : "une banque, qui a manqué à son devoir de diligence relatif aux biens déposés dans un coffre-fort loué par les clients, est responsable des dommages causés par une inondation qui n'était ni imprévisible, ni irrésistible". Il convient de tenir compte de toutes les crues antérieures même si elles n'ont fait l'objet d'aucun enregistrement à l'époque de leur survenance. Ainsi, suite à des crues exceptionnellement hautes de l'Ill qui se sont produites pendant trois années consécutives de 1981 à 1983, les habitants d'un lotissement construit dans un village alsacien assignèrent le constructeur en responsabilité, le Tribunal de grande instance de Mulhouse (17 novembre 1989) et la Cour d'appel de Colmar (24 juin 1994) ont admis la force majeure : - "il est établi qu'au cours de la période allant de décembre 1981 à février 1984, et particulièrement au printemps 1983, la rivière l'Ill a connu des crues exceptionnellement hautes, ainsi qu'en témoignent les journaux de l'époque, et que la nappe phréatique a atteint des niveaux si élevés que de nombreuses habitations ont été inondées dans la région… au moment de la conception de ce lotissement le constructeur ne pouvait disposer que des seules mesures et observations enregistrées depuis 1974 par le piézomètre du puits... à une distance de 1.500 mètres... il résulte des constatations de l'expert.… que les caves des immeubles du lotissement ont été implantées à 20 -40 centimètres au-dessus du niveau des plus hautes eaux connues à l'époque". Le raisonnement suivi jusque là par la Cour d'appel justifie l'admission de la force majeure et on pourrait s'étonner de la cassation si les juges du fond n'avaient ajouté cette petite phrase - "il est vrai que de précédentes crues exceptionnelles étaient survenues en 1954-1955 mais qu'elles n'avaient pas donné lieu à des enregistrements". La Cour de cassation (Civ. 17 juillet 1996, 3 arrêts, pourvois n° 94-18.541, 94-18.542, 9418.543) rejeta la qualification de force majeure : - " Attendu que pour débouter les acquéreurs de leurs demandes, l'arrêt retient que si l'Ill a connu en 1955 des crues exceptionnelles, elles n'ont pas fait l'objet d'enregistrements de niveau, que celles de 1982 et 1983 ont donné lieu à des arrêtés constatant l'état de catastrophe naturelle des lieux, et que les dommages proviennent donc d'une cause étrangère. Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'imprévisibilité et l'irrésistibilité des inondations, de nature à exonérer le constructeur de sa présomption de responsabilité, a violé l'article 1792". La prise volontaire de risque pour des raisons d'économie est civilement sanctionnée. - Ainsi, la Cour d'appel de Grenoble, (28 janvier 1997, juris-data n° 049719) statuant sur renvoi de la Cour de cassation (25 janvier 1995, juris-data n° 000110), retient l'entière responsabilité du vendeur qui avait décidé en connaissance de cause et à moindre frais de limiter la mise hors d'eau du deuxième sous-sol à une cote correspondant à celle atteinte lors des crues quinquennales. - Remontée de nappe phréatique : Civ. 17 décembre 1985 (pourvoi n° 84-15.911) : un immeuble ayant été inondé à la suite de la remontée d'une nappe phréatique, la Cour de cassation, confirme la décision des juges du fond condamnant la Socotec pour faute, les juges du fond s'étaient livrés à une étude très poussée des mouvements de la nappe et avaient statué "sur les infiltrations permanentes dues à la remontée du niveau de la nappe phréatique… ce niveau, dont la 38 variation peut tenir à des facteurs humains, tels la construction du R.E.R. ou la désindustrialisation relative de Paris, a subi des modifications sensibles, en montant ou en descendant, depuis 1850… de 28 mètres à cette date, il était tombé à 20 mètres en 1900, remonté à 26 mètres en 1908, descendu à 17 mètres en 1910, passé à 26 mètres en 1930, à 22 mètres en 1932, à 25 mètres en 1950, à 23 mètres en 1960, puis descendu de façon constante jusqu'en 1969, enfin remonté en 1972 à 22 mètres". On comprendra que face à ce yo-yo hydraulique les magistrats aient considéré que la Socotec a commis une faute en limitant son information à une étude de la B.R.G.M. publiée en 1966, l'imprévisibilité ne pouvait guère prospérer sur un tel terrain ! - Paris, 22 janvier 1985 (juris-data n° 020227) : remontée de la nappe phréatique dont le niveau est lié à celui de la Seine, les écarts de plus d'un mètre ne constituant nullement une circonstance exceptionnelle, des observations sur une période de soixante ans, laps de temps inférieur à la durée prévue de l'immeuble, montrent que la cote du fleuve a atteint et dépassé 16 fois celle existant au moment de l’inondation. S'agissant des nappes phréatiques l'entrepreneur a l'obligation de se renseigner : - Civ. 3ème, 15 juin 1988 (bull. n° 109) : "attendu que pour débouter la SFCB de sa demande, l'arrêt retient que l'entrepreneur ne pouvait prévoir la remontée de la nappe phréatique qui, contrairement à l'évolution précédente, ne s'est produite qu'à partir de 1968, postérieurement à la construction ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la société Sainrapt et Brice s'était renseignée auprès des organismes compétents sur une possibilité de fluctuation du niveau de la nappe phréatique sur une période de temps suffisamment longue et si elle en avait tenu compte, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision". Dans le même sens : Paris, 6 juin 1990 (juris-data n° 023277). Pluies : La récurrence empêche l'imprévisibilité : - Une société, acquéreur clé en main d'un bâtiment à usage industriel vendu en 1984 par la commune de Saint Christol les Alès a assigné cette commune suite à deux inondations importantes du bâtiment survenue en octobre 1987 et en octobre 1988. La Cour d'appel de Nîmes, (6 juin 1996, arrêt n° 295-4, ste RACS Sarl c/ Commune de St Christol les Ales) confirme la décision rendue par le tribunal de grande instance d'Alès le 14 décembre 1994 : la responsabilité de la commune sera retenue suite à l'examen des relevés pluviométriques depuis 1950, il sera notamment pris en considération le fait que "la pluviométrie des années 1987 et 1988 était prévisible et n’a pas atteint les précipitations exceptionnelles des années 1950, 58, 63 et 76". - Montpellier, 3 décembre 1996 (juris-data n° 034657) : les pluies, bien que classée catastrophe naturelle n'étaient pas imprévisibles "puisque lesdites pluies se sont reproduites à la même époque deux années consécutives et qu'elles sont le propre des climats méditerranéens". - Civ. 2ème, 1er avril 1999 (pourvoi n° 97-17.960) : "si les pluies diluviennes qui se sont abattues le 24 septembre 1986 sur la commune… ont motivé un arrêté interministériel de classement en catastrophe naturelle, elles n'ont pas revêtu un caractère irrésistible et imprévisible de nature à exonérer M. P., dès lors que, selon le service de météorologie, elles étaient susceptibles de se reproduire tous les 4 ans". 39 L'arrêt suivant illustre bien la sévérité de la Cour de cassation vis-à-vis des professionnels de la construction puisqu'une pluviométrie, bien qu'excédant notablement les moyennes habituellement relevées, n'est pas reconnue comme un événement imprévisible, ni irrésistible : - Civ. 3ème, 8 juillet 1998 (pourvoi n° 96-22.788) : suite à des pluies d'une ampleur exceptionnelle, un mur séparatif s'était effondré, l'architecte dont la responsabilité pour faute est recherchée aura beau invoquer le fait que le mois de décembre 1990 avait été, le mois le plus pluvieux depuis au moins un siècle, et l'année la plus pluvieuse depuis 1910, la Cour de cassation approuve la Cour d'appel de Limoges qui avait condamné l'architecte à réparation le 28 octobre 1996 : "Si les infiltrations d'eau de pluie, ayant participé à l'effondrement du mur, avaient été abondantes, elles ne pouvaient cependant être considérées comme un événement imprévisible et irrésistible, de telles précipitations ayant déjà eu lieu antérieurement". Neige : - Cass. civ. 3ième, 19 juillet 2000 (pourvois n° G 98-22.571, V 98-23.088, X 99 -10.283) : "Les chutes de neige n'avaient dépassé les quantités prévues pour le calcul des normes et la quantité de neige tombée… n'était pas exceptionnelle, des quantités plus élevées ou quasi équivalentes ayant été relevées lors des décennies précédentes". Sécheresse : La jurisprudence n'admet pas que la sécheresse puisse être un phénomène imprévisible car il se reproduit à l'échelle du temps. Il est à noter que la troisième chambre civile ne reconnaît jamais la sécheresse comme cause d’exonération73. - Toulouse, 13 septembre 1993 (RD. Imm. 16 (3), juil.-sept. 1994, 459, note Philippe Malinvaud et Bernard Boubli) : les conditions de la force majeure ne sont pas réunies "lorsque le fait provient d'une situation antérieure qui se prolonge plusieurs années". - Il suffit pour le juge de constater que la sécheresse s'était déjà produite quelques années avant la construction (Civ. 3ème, 22 novembre1994, R.G.A.T., 1995, note H. Périnet-Marquet ; Versailles, 4 novembre 1994, RD. imm. 17 (3), juil.-sept. 1995, note Ph. Malinvaud et B. Boubli ; Orléans, 17 décembre 1996, juris-data n° 047506 ; Toulouse, 11 mai 1998, juris-data n° 043512 ; Paris, 20 mai 1998, juris-data n° 021435 ; Civ. 3ème, 8 mars 2000, pourvoi n° 98-15.732 et récemment Civ. 3 ème, 27 juin 2001, n° 1074 FS-D, biblio Cerdacc). - Elle peut même se révéler être "devenue depuis plusieurs années un facteur structurel et non conjoncturel" (Orléans, 2 octobre 1996, juris-data n° 048661). Il ressort également de la jurisprudence que le constructeur a l'obligation de précéder à une étude du sol. Vent : - L'imprévisibilité n'est pas caractérisée par un temps de retour supérieur à 10 ans (Civ. 3ème, 7 mai 1996, pourvoi n° 94-17.019). 73 Civ. 2ème, 18 mars 1998 (Resp. civ. et assur., juin 1993, 13) : un vent à 216 km/h pendant le passage du cyclone Firinga est prévisible dès lors que des rafales de vent plus violentes Voir not. B. BLANCHARD, "La sécheresse constitue-t-elle une cause exonératoire de la responsabilité des constructeurs vis-à-vis du maître de l'ouvrage ?", Gaz. Pal., 1992, 1, doct., 14 40 avaient été enregistrées moins de dix ans avant et moins de dix ans après les événements en cause. b) Critères géographiques Le critère géographique conduit invariablement au rejet de l'imprévisibilité car il révèle la connaissance du risque soit par des données climatiques connues pour une région, soit par la situation particulière du bien dans une zone où un risque est connu : La connaissance du risque dans la région conduit à réfuter l'imprévisibilité : Inondations : - Paris, 3 octobre 1984 (juris-data n° 025138) : le lieu et la date des précipitations sont à considérer, la possibilité totale d'eau recueillie à la date du trouble est en dessous de la précipitation décennale de la région pour 24 heures. - Paris, 9 juillet 1987 (juris-data n° 024288) : survenance normale de pluies importantes avec crue à cette époque de l'année et dans cette région. - Civ. 3ème, 2 mars 1988 (2 arrêts, pourvois n° 86-18.851, 86-18.852) : pour des chutes de pluies ayant provoqué l'inondation de terres agricoles et ayant fait entraîné l'application du régime des calamités agricoles :"La chute de 130 mm d'eau en une nuit ne présente pas dans une région méditerranéenne un caractère exceptionnel" - Civ. 3ème, 26 novembre 1991 (pourvoi n° 90-13.968) : "sans doute les pluies avaient présenté un caractère violent et exceptionnel à ces époques mais il n'était nullement démontré que ces pluies aient présenté un caractère de force majeure … pour cette région proche de la côte de la Manche et du Détroit du Pas-de-Calais". Sécheresse : - Agen, 15 décembre 1992 (Gaz. Pal., 1996, 1, 128, commentaire J. Bergel-Hatchuel) : "Une sécheresse dans le sud-ouest de la France est un phénomène prévisible". - Toulouse, 10 septembre 1996 (P.A., 3 février 1997, n° 15, 11, note N. Sempé) : "Le fait générateur du dommage provient de la dessiccation du sol sous l'effet de la sécheresse, phénomène bien connu dans le Sud-Ouest". Vent : - T.G.I. Paris, 6 mars 1981 (Gaz. Pal., 1982, 1, somm., 31) : "Le vent et la tempête ne présentent de caractère imprévisible que s'ils excèdent la normale des troubles atmosphériques auxquels il faut s'attendre dans la région. Le site de Gravelin classé à ce point de vue dans la région II correspond à des vitesses normales de vent par mauvais temps de 121,7km/h et à des vitesses extrêmes de 160 km/h. La vitesse de 133,3 km/h correspond à une tempête non exceptionnelle". - Civ. 3ème, 16 janvier 1985 (pourvoi, n° 83-16.476) : pour un vent de 125/128 km/h., " les circonstances atmosphériques n'étaient pas exceptionnelles le jour du sinistre, la vitesse des vents étant demeurée inférieure à la vitesse extrême prévue dans la région". - Paris, 15 février 1985 (Gaz. Pal., 1985, 2, somm., 249) : "Le vent a soufflé à une vitesse atteignant des pointes de 28 m/s et dépassant celle de 24,5 m/s admise par les services de 41 météorologie comme constitutive de tempête, il n'en demeure pas moins qu'il ne justifie pas que la tempête constatée constituait un phénomène imprévisible, alors qu'il est notoire que la région concernée n'est pas à l'abri de vents soufflants en rafales". - Besançon, 15 février 1995 (juris-data n° 041015 ) : "au vu des éléments météorologiques et des antécédents relevés dans la région de Thise, le vent et l'orage de grêle s'étant produits, ne revêtent pas un caractère de violence exceptionnelle excédant la normale". - Rouen, 20 avril 1995 (J.C.P., 1996, IV, 397) : n'est pas une cause exonératoire de responsabilité, une tempête avec un coup de vent de 101 km/h dans une région proche de la mer. Le refus de l'imprévisibilité provient également de la situation particulière du bien : Inondations : La situation à proximité d'un cours d'eau sujet à débordement rend évidemment l'inondation prévisible : - Com., 13 décembre 1988 (pourvoi n° 87-13.238) : l'entrepôt était situé à proximité d'un fleuve sujet à de fortes crues en cas de fortes pluies conjuguées avec la marée, d'autres quartiers de la ville avaient été préalablement inondés. Particulièrement lorsque la construction a été faite à un niveau insuffisant. - Civ. 3ème, 31 mai 1989 (2 arrêts, pourvois n° 87-13.674 et 87613.675) : la Cour de cassation approuve la Cour d'appel de Metz selon laquelle "il résulte du rapport d'expertise que le lotissement a été réalisé à une très faible distance du cours de la Moselle sur ce qu'on appelle le lit majeur ou lit d'inondation par rapport au lit mineur où coule la Moselle, que le lit majeur est rempli d'alluvions apportées par la Moselle, notamment au cour des crues. Que les cotes de berge de la Moselle, dont le seuil d'inondation, vont de 162,25 NGF à 163,55 ; que le niveau moyen du terrain où est établi le lotissement est autour de 163 NGF et que les crues normales de la Moselle sont de 163,50 ; que de toute évidence, au moindre débordement du cours d'eau, les flots envahissent le lotissement et les égouts refoulent… les crues ne sont évidemment pas imprévisibles mais constituent au contraire un phénomène inéluctable à intervalle de temps plus ou moins rapprochés". Civ. 3ème, 4 juin 1997, (R.G.D.A., 1997, n° 3, 785, note H. Périnet-Marquet) : "Selon le service de la navigation de Lyon, le niveau des plus hautes crues de la rivière s'établissait à la cote 267, 40 NGF, et que, si le bâtiment avait été implanté à cette altitude, les eaux de crue n'auraient pas envahi l'usine, la Cour d'appel… qui a exactement relevé que le classement des crues en catastrophes naturelles par l'autorité administrative n'emportait pas qu'elles aient les caractères de la force majeure, et qui a souverainement retenu que les crues de 1983 et 1990 n'étaient pas imprévisibles, en a déduit, à bon droit, que la société G.A., qui était tenue de la garantie décennale de l'article 1792 C.C., et qui, quelles que soient les erreurs de l'Administration dans la délivrance du permis de construire, avait l'obligation de rechercher la cote altimétrique de protection contre les inondations, ne démontrait pas l'existence d'une cause étrangère". On notera que pour la Cour de cassation la délivrance erronée d'un permis de construire ne permet pas au constructeur de s'exonérer de sa responsabilité. - 42 La nature du terrain est aussi prise en compte : - Civ. 3ème, 8 novembre 1995 (pourvoi n° 93-17.508) : un lotissement avait été réalisé par la commune de Ligueux sur un terrain peu perméable, le fonds est d'autant plus exposé aux inondations qu'il est situé dans une cuvette (la commune, vendeur d'un lotissement communal, s'était toujours refusée à exécuter les travaux nécessaires à l'assainissement de la zone inondable, les fortes intempéries, même peu fréquentes, sont prévisibles et les effets aussi bien que les inconvénients inhérents à un terrain marécageux peuvent être limités par la mise en œuvre d'aménagements appropriés). Et il convient bien entendu de se renseigner : - Paris, 14 mars 1984 (juris-data n° 022148) : des inondations par remontée de nappes phréatiques étant fréquentes dans le voisinage, l'architecte n'ayant effectué aucune étude du sol et ne s'étant pas informé auprès des voisins est tenu intégralement à la garantie décennale. Avalanche : - Le 2 février 1978, dans le village du Tour, une avalanche détruit tout ou partie du lotissement "les Combes". Le lotissement était situé au débouché du couloir du Nantet. Les défenseurs invoquent la fore majeure. Afin de déterminer si l'avalanche du 2 février relevait d'un tel phénomène, le juge examine en premier lieu si l'événement était imprévisible. Or, il détermine que les conditions météorologiques de la journée du 2 février n'avaient rien d'exceptionnelles, et que le phénomène avalancheux pour ce couloir était bien connu et même indiqué sur les fiches de l'institut géographique national. Cette avalanche était donc normalement prévisible et ne relevait dès lors pas d'un cas de force majeure : “ Sur le caractère normalement prévisible de l’avalanche (… )qu’il ressort des cartes d’avalanche(…)que celle du Nantet était parfaitement connue (…). Attendu surtout qu’il est établi qu’en 1966 une avalanche venant toujours du Nantet a traversé l’Arve et a atteint l’emplacement actuel du premier chalet sinistré ainsi qu’en atteste une fiche de l’ING produite au débat. " (Chambéry, 25 juin 1985 74, Jurisque Avalanche, www.anena.org , Civ. 3ème, 24 février 1988, pourvoi n° 85-15.642). La société immobilière a donc vu sa responsabilité engagée pour vice caché. Glissements de terrain : La nature même du terrain rend le risque prévisible : - Civ. 2ème, 17 mars 1993 (bull., n°116 ; J.C.P., 1993, I, 327, G. Viney) : la responsabilité de la commune de Beaulieu-sur-Mer est recherchée suite à la chute d'un rocher dû à l'effritement d'une falaise, la Cour de cassation refuse l'imprévisibilité : "L'effritement d'une falaise calcaire sous l'effet de l'érosion n'est pas un événement imprévisible et des purges artificielles auraient pu être réalisées". - Civ. 3ème, 24 mars 1993 (bull., n° 46 ; J.C.P., 1993, IV, 1379 ; R.T.D.Civ., juil.-sept. 1993, 594 ) : suite au glissement du terrain dont la commune d'Ossun était lotisseur, la Cour de cassation refuse l'imprévisibilité : "La parcelle étant située sur un sol argileux, Voir Jurisque avalanche : “ Notons que les requérants, ayant également mis en cause la responsabilité de la commune de Chamonix ainsi que celle de l'Etat (CE 19/05/89 BussereauPillot/Etat-commune de Chamonix), n'ont pas eu gain de cause devant le juge administratif, car l'antériorité du phénomène n'a pas été démontrée. Ceci s'explique essentiellement par les moyens mis en avant dans l'instruction du dossier ” 74 43 anciennement exploité comme carrière puis remblayé, le glissement de terrain était très prévisible". - Civ. 1ère, 15 juillet 1993 (R.G.A.T., 1994, 185, note H. Périnet-Marquet) : statuant sur les mêmes faits que ceux de l'arrêt précédent, la Cour de cassation précise : "En l'état dans lequel le terrain a été vendu par la commune, celle-ci n'ignorait pas qu'il était impropre à la construction en raison des risques graves de déstabilisation en sous-sols et des glissements dont les circonstances atmosphériques n'ont fait que provoquer la réalisation". Sécheresse : Ici encore la nature du sol, et notamment la présence d'argile, peut exclure l'imprévisibilité : - T.G.I. Périgueux, 5 juillet 1994 (RD. Imm. 16 (4), oct.-déc. 1994, 664, note Ph. Malinvaud et B. ; 672, note G. Leguay) : " La modification du volume d'argiles gonflantes ne saurait constituer, pour un professionnel avisé du bâtiment ; agissant en qualité d'ingénieur conseil, un événement imprévisible". - Civ. 3ème, 13 mai 1986 (pourvoi n° 84-16.481) : la présence d'argiles creuses devait nécessairement être connue avant la construction. - Civ. 3ième, 28 janvier 1998 (J.C.P., 1998, IV, 1576) : les propriétaires d'un immeuble ayant constaté des désordres dans leur maison en construction, un expert a été désigné par la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics. Il est reproché à cet expert de n'avoir pas pris en compte divers éléments de sorte que les travaux n'avaient pas permis la stabilisation de l'ouvrage. Malgré la présence d'un arrêté de catastrophe naturelle, la responsabilité de l'expert est donc retenue car il avait connaissance de l'influence de l'hygrométrie sur les caractéristiques physiques et mécaniques de la couche d'argile du sous-sol. c) Autres éléments Admission de l'imprévisibilité Inondation : Des Cours d'appel admettent l'imprévisibilité dès lors que le phénomène n'était pas décelable : - Angers, 7 juin 1982 (juris-data n° 041765) : "il résulte du rapport d'expertise que la création du pavillon a détruit une couche drainant des eaux de pluies en sous-sol, celle-ci en s'accumulant, a maintenu l'eau sous forme de poche produisant le même effet qu'une nappe phréatique…il convient d'admettre l'imprévisibilité du phénomène qui ne pouvait être décelé par un sondage du terrain avant les constructions". - 75 Amiens, 11 septembre 1989 (juris-data n° 046828) : "La société bailleresse doit être exonérée de la responsabilité encourue sur le fondement des articles 1719 et 1721 C.C. à la suite d'inondations ayant endommagé les lieux loués, dès lors qu'il est établi que ces dommages sont dus à une pluviométrie exceptionnelle et que des telles précipitations étaient imprévisibles puisque la DDE, qui avait prêté son concours à la construction du pont, avait avisé le constructeur que les dispositions prévues pour le franchissement de la rivière ne soulevaient pas d'objection".75 En droit pénal, en revanche, l'autorisation administrative est inopérante 44 Glissement de terrain : - Chambéry, 24 novembre 1980 (J.C.P., 1982, II, 19777, obs. J.C. Detharre) : si d'une façon générale, il existe toujours des signes précurseurs des glissements de terrain, aucun signe particulier ne trahissait en l'espèce l'instabilité des terrains, d'autant plus que l'importance de la végétation qui le recouvrait interdisait toute appréciation de l'épaisseur du manteau superficiel meuble et que les signes qui auraient pu se manifester les jours précédents étaient cachés sous la neige 76. Il est à noter qu'après la catastrophe provoquée le 5 avril 1970 par ce glissement de terrain (71 morts dont 56 enfants), un certain nombre de textes ont tenté de faire établir des zones de risque et obliger les maires à prévenir ces risques 77. Vent : - Civ. 2ème, 5 janvier 1994 (bull., n° 13) : la formation rapide et la trajectoire inhabituelle des vents constituent une anomalie dans la chronologie des cyclones établie depuis plus d'un siècle ; la lente évolution de la situation ne laissait pas présager une formation aussi rapide d'une dépression tropicale. L'événement est à la fois imprévisible et irrésistible. Refus de l'imprévisibilité Ce refus peut provenir de la connaissance des risques qu'avait le défendeur Inondation : - Poitiers, 4 juin 1986 (juris-data n° 047942) : le propriétaire d'un terrain de camping ne peut invoquer la force majeure suite à une inondation due à une crue de la Creuse dès lors que des informations avaient été données par la mairie des risques d'inondation encourus. - Angers, 17 juin 1997 (juris-data n° 044071) : "le bailleur n'ignorait pas que son bien se trouvait en zone inondable". - Civ 2ème, 1er avril 1999 (bull. n° 65 ) : "L'existence d’un règlement prévoyant l’installation d’un tampon étanche, fut-il facultatif pour le syndicat, rendait prévisibles les inondations dues à un engorgement des égouts de la ville". - Montpellier, 9 juillet 1997 (juris-data n° 034578) : "l'événement n'était ni imprévisible ni insurmontable dans la mesure où le marché de travaux attirait l'attention du syndicat sur le caractère limité de la protection". Vent : - Com., 16 octobre 1990 (Droit maritime français, 1991, note Acherd) : "Si la direction du vent à l'ouest la nuit de l'abordage était plus exceptionnelle que celle nord-sud, ces phénomènes atmosphériques ne pouvaient être qualifiés de cyclone ou d'ouragan tel qu'ils n'auraient pu être prévu ou évité… bulletin météo ayant annoncé un vent par rafale". 76 Cet arrêt est un des rares à avoir décidé d'un partage causal en cas de force majeure. La commune gardienne des terrains a été retenue responsable pour moitié. 77 l'article 97-6 du Code municipal et l'article R. III-3 du Code de l'urbanisme alors en vigueur ainsi que deux décrets des 28 octobre 1970 et 7 juillet 1977 45 - Com., 17 mai 1994 (pourvoi n° 92-14.865) : Le cyclone annoncé - l'alerte n°1 ayant été donnée- ne peut être considéré comme un événement imprévisible et exceptionnel exonératoire de responsabilité, même si la force des vents a dépassé les prévisions météorologiques, alors que si de nombreux navires ont été endommagés, tous n'ont pas rompu leurs amarres. Insuffisance d'amarrage établie, "la Cour d'appel a souverainement apprécié les éléments de fait du litige". 46 3°) Les critères de l’irrésistibilité Quelles sont les limites de la prévention ou de l'action pour faire face aux forces de la nature ? "A l'impossible nul n'est tenu" dit le proverbe. Contrairement à l'imprévisibilité, il n'existe pas une variété de critères de l'irrésistibilité, son admission ou son exclusion s'apprécie en fonction des possibilités humaines face au déchaînement des éléments naturels. Admission de l'irrésistibilité Elle révèle l'impuissance de l'homme. Inondations : - Paris, 3 décembre 1982 (juris-data n° 029062) : l'inondation du sous-sol de la tour Maine Montparnasse était due non seulement à des précipitations imprévisibles mais également irrésistibles puisqu'il était impossible pour les locateurs d'ouvrage de concevoir et de prévoir des collecteurs assez robustes pour de telles pressions. - Civ. 2ème, 10 mars 1988 (pourvoi n° 86-19.514) : "Le niveau de l'eau et la force du torrent ont été tels qu'à deux km en amont de la passerelle un mur de protection avait été emporté et que le flot avait charrié divers matériaux qui ont contribué à faire barrage…les précipitations ont dépassé très largement les prévisions et la violence du vent a été irrésistible…l'origine véritable des dommages se trouve… dans l'action violente du torrent et dans l'intensité anormale des pluies…". Signalons également un arrêt lié à l'eau mais ne concernant pas à proprement parler une inondation puisqu'il s'agissait d'une érosion due à une infiltration d'eau : - Civ. 2ème, 21 janvier 1981 ( J.C.P., 1982, II, 19814, obs. N. Dejean de la Batie) : bien que le phénomène ait été "connu depuis longtemps", la Cour de cassation approuve la Cour d'appel d'avoir retenu la force majeure exonératoire pour la commune gardienne de son sol car la présence d'eaux souterraine provenant d'autres terrains était "normalement insurmontable" ce qui faisait échec à l'action en responsabilité exercée par le propriétaire du terrain affecté par les désordres. La responsabilité de la commune étant également recherchée ici sur le fondement de l'article 1382 C.C., la Cour de cassation considère qu'il n'y a pas de faute car "la cause d'affaissement de la parcelle de la commune de Biarritz était beaucoup plus la présence d'eaux d'infiltration que l'action érosive de la mer… à supposer qu'une défense efficace eût pu être entreprise en temps opportun contre ce dernier phénomène, rien ne permettait d'affirmer qu'il était possible de faire disparaître en même temps la nappe provenant des eaux d'infiltration, reçues de tous les terrains voisins…" La notion d' "irrésistibilité" ou plutôt d' "insurmontabilité" coexiste avec l'absence de faute. - Civ. 1ère, 26 janvier 1999 (Lamy assur., n° 49, mars 1999, 1614) : "les bâtiments n'auraient pu, même s'ils n'avaient pas été affectés de vices de construction, s'avérer étanches en présence des eaux d'inondation, en raison de l'importance et de la pression de ces eaux stagnantes". Glissement de terrain : - Chambéry, le 24 novembre 1980 (J.C.P., 1982, II, 19777, obs. J.C. Detharre) : "dès lors que l'événement était imprévisible et qu'aucun signe avant-coureur ne s'était produit, le seul moyen d'y résister aurait été de supprimer tout séjour en montagne en raison des risques inhérents à celle-ci, ou tout au moins de faire évacuer les lieux de séjour dans ces 47 régions dès l'apparition de neige ou de pluie, ce qui serait certes radical, mais dénué de sens". - Lyon, 30 juin 1981 (J.C.P., 1982, IV, 224) : un glissement de terrain de 50 000 m3 avait dévalé une pente à plus de 180 km/h en sautant une falaise, détruisant au passage un immeuble. La responsabilité de la ville de Nantua, propriétaire du terrain fut écartée au motif que, même si le phénomène n'était pas absolument imprévisible scientifiquement, il était irrésistible, "le propriétaire des lieux n'ayant ni les moyens de l'empêcher de se produire, ni ceux d'en prévenir les effets". Neige : - Civ. 3ième, 28 octobre 1992 (RD imm., 15 (1), janv.-mars 1993, 85 ; Themexpress Francis Lefèvre, "Force majeure" n° 80) : la perte de l'ouvrage n'était pas due à l'impéritie du maître d'œuvre mais à un événement climatique irrésistible, les dommages n'auraient pus être évités par les mesures préconisées par la Socotec. - Besançon, 25 janvier 1994 (1ère ch. civ., Fallue c/ Prudent, ; Themexpress Francis Lefèvre, "Force majeure", n° 82) : "Ces conditions climatiques exceptionnelles rendaient manifestement trop dangereuse toute intervention destinée à dégager la neige surchargeant le toit". Sécheresse : - Civ. 1ère, 7 juillet 1998 (juris-data n° 003304) : Une sécheresse provoquant des mouvements de terrain dus à la sensibilité du sol argileux, avait sévi dans le département des Deux-Sèvres, entre le mois de mai 1989 et le mois de décembre 1990, un arrêté interministériel du 12 août 1991 ayant constaté "l'état de catastrophe naturelle… cette sécheresse exceptionnelle par sa durée dans ce département et dont les effets s'étaient manifestés progressivement au fur et à mesure du déficit en pluviométrie, était la cause des désordres affectant le pavillon… aucune précaution, notamment quant au choix des semelles de l'immeuble, n'aurait pu suffire à éviter les graves dommages". Il s’agit d’un des rares arrêts admettant que la sécheresse est exonératoire, rappelons que la troisième chambre civile s’y refuse. Vent : Un arrêt déduit simplement l'irrésistibilité de la violence du vent : - Civ. 1ère, 22 novembre 1994 (pourvoi n° 92-21.116) : "La cause de l'accident résidait dans la tempête qui avait sévi à Palavas-les-Flots et aux environs dans la matinée du 10 octobre 1987, des vents qui atteignaient 122 kilomètres à l'heure, et correspondaient à la force douze sur l'échelle de Beaufort, ayant été enregistrés au moment de la chute du navire… la cour d'appel, a ainsi caractérisé l'existence d'événements extérieurs imprévisibles et irrésistibles, constitutifs de la force majeure, de nature à exonérer le bailleur (commune) de son obligation." - Com., 12 juin 2001 (pourvoi n° 99-11.716) : le vent soufflant à plus de 133 km/h a entraîné la rupture des amarres du bateau, les conditions d’amarrage n’étant pas insuffisantes. 48 Mais, de manière plus classique l'irrésistibilité est admise si toute action préventive était vouée à l'échec : - Civ. 2ème, 5 janvier 1994 (bull., n° 13) : relève que la soudaineté du phénomène a empêché toute intervention. - Paris, (5e ch. SA Pelras c/Sté Gan incendie accident ; Themexpress Francis Lefèvre, "Force majeure" n° 91 ) : des vents à 144km/h, vitesse dépassant celle atteinte en moyenne une fois tous les 110 ans, alors que les prévisions météo étaient : Orages localement assez forts… vent sud-est, ont était considérés comme irrésistible et la Cour d'appel a retenu que "la soudaineté et la violence du phénomène naturel - qualifié de tornade- n'ont permis aucune action préventive". Ou encore si aucune résistance n'était possible : - Civ. 3ème, 11 mai 1994 (bull., n° 94) : "Les contreventements vertical et longitudinal, aussi solides qu'ils aient pu être, n'avaient pas permis à la structure de résister". S'agissant des arbres, un vent d'une violence exceptionnelle et imprévisible est considéré comme irrésistible à condition que les arbres soient sains et solidement implantés : - Rouen, 13 décembre 1989 (Gaz. Pal., 1991, 1, somm., 138) : "la violence exceptionnelle du vent ne réduit en rien le caractère imprévisible et irrésistible de la tempête qui a abattu un arbre. Encore faut-il que cet arbre ait opposé à la tempête une résistance normale et vitale". L'examen de l'arbre ayant révélé qu'il était solide, la force majeure a été retenue. Un défaut aurait donc empêché la reconnaissance de l'irrésistibilité. Refus de l'irrésistibilité Le refus de l'irrésistibilité est lié à une faute, à une absence de précaution, puisque des mesures auraient pu être prises pour empêcher le sinistre. Inondation : - Civ. 2ème, 7 octobre 1987 : "les dispositions pour parer aux conséquences des orages n'avaient pas été prises, du fait notamment de l'impossibilité de mettre en fonctionnement les pelles de sécurité qui, bien qu'indispensables en cas de crue, étaient hors d'usage". - Civ. 3ème, 2 mars 1988 (2 arrêts, pourvois n° 86-18.851 et 86-18.852) : "les pannes de courant affectant la station de pompage auraient pu être évitées si, comme il aurait été normal de la prévoir pour une installation de l'importance de celle en cause, un bouclage des lignes électriques avait été installé". - Cass. com., 13 décembre 1988 : l'inondation aurait pu être évitée notamment par une édification de murets de sable visant à empêcher l'eau de passer sous les portes du hangar, "en raison de leur emplacement et de l'absence d'aménagements internes, les hangars où avait été entreposée la marchandise étaient, indépendamment de la conjonction exceptionnelle de plusieurs éléments naturels… exposés au risque d'inondation… des mesures de protection appropriées eussent permis d'éviter le sinistre". - Civ. 2ème, 26 avril 1990 (pourvoi n° 88-19.820) : à la suite de fortes pluies, la crue d'un étang a provoqué l'inondation de propriétés appartenant à la commune de Briare et à d'autres propriétaires, la crue de l'étang aurait pu être évitée par un entretien vigilant, la Cour d'appel, approuvée par la Cour de cassation en déduit l'absence de force majeure au regard du propriétaire de l'étang. Le même arrêt approuve la cour d'appel d'avoir 49 dégagé la responsabilité de la commune de Briare laquelle n'avait pas manqué à ses obligations dans l'exercice de la police municipale. - Civ. 3ème, 4 janvier 1991 (pourvoi n° 89-12.589) : une usine avait été inondée par une crue du Doubs en mai 1983, or le permis de construire avait été délivré sous réserve que les constructions soient au-delà de la cote 267, 40 NGF, et l'usine est construite entre 266, 73 et 266,79. La troisième chambre civile de la Cour de cassation en déduit que "L'entrepreneur ne pouvait ignorer la cote 267,40 figurant sur plusieurs documents de 1980 concernant le niveau de la zone inondable classée par le service de l'équipement…il ne pouvait se soustraire à son obligation de construire un immeuble totalement hors de l'eau". La même usine a à nouveau été inondée en 1990, ce qui donna à la troisième chambre de la Cour de cassation l'occasion de se prononcer une seconde fois le 4 novembre 1993 (pourvoi n° 91-22.266) selon des termes identiques : le constructeur "avait l'obligation de construire un immeuble totalement hors de l'eau, le sinistre ne se serait pas produit si l'implantation avait été correcte". - Civ. 3ème, 26 novembre 1991(pourvoi n° 90-13.968) : L'entrepreneur "aurait dû effectuer les travaux de façon à ne pas provoquer de danger pour le fonds voisin, en cas de pluies d'une exceptionnelle violence, prévisibles dans la région". - Civ., 1ère, 23 février 1994 (D., 1995, 214, note N. Dion) : l'exploitant du parking "aurait pu, en fermant les regards du siphon éviter les dommages". - Montpellier, 9 juillet 1997( juris-data n° 034578) : l'événement n'était pas insurmontable "dans la mesure où il était possible d'apporter une protection efficace, fût-ce pour un coût plus élevé". Neige : - Civ. 2ème, 5 février 1992 (pourvoi n° 90-21.091) : "le syndicat n'avait pris aucune mesure de sécurité adéquate". Pluies : - Aix-en-Provence, 7 novembre 1995 (R.G.A.T., 1996, 383, note M. Bruschi) : des pluies avaient été considérées comme imprévisibles, mais le caractère de la force majeure a été refusé à l'événement naturel car "le caractère irrésistible des pluies n'était pas démontré puisque la fragilité du mur avait pour cause des malfaçons". Sécheresse : - Civ. 3ème, 13 mai 1986 (pourvoi n° 84-16.481) : "Les conséquences tenant à la sécheresse n'étaient pas insurmontables … Au lieu des mesures requises, celles envisagées s'étaient avérées nettement insuffisantes". Tout comme pour l'imprévisibilité, on note que la sécheresse n'est généralement pas considérée comme irrésistible, dès lors qu'on peut y remédier par des techniques de construction adaptées. En ce sens : - Rouen, 13 décembre 1989 (Gaz. Pal., 1991, 1, somm., 138) - Toulouse, 13 septembre 1993 (RD. Imm. 16 (3), juil.-sept. 1994, 459, note Ph. Malinvaud et B. Boubli) - Civ. 3ème, 22 novembre 1994 (R.G.A.T. 1995, 123, note H. Périnet-Marquet) - Paris, 4 septembre 1996 (juris-data n° 022237) 50 - Toulouse, 10 septembre 1996 (P.A., 3 février 1997, n° 15, 11, note N. Sempé) Nîmes, 5 mars 1998 (juris-data, n° 030782) Toulouse, 11 mai 1998 (juris-data n° 043512) Toulouse, 11 août 1998 (juris-data n° 044252) Civ. 3ème, 1er décembre 1999 (La Tribune de l'Assurance, n° 33, mars 2000, n° 96) Civ. 3ème, 8 mars 2000 (pourvoi n° 98-15.732) Civ. 3ème, 27 juin 2001 (pourvoi n°C 00-13.112, RD. Imm., nov.-déc. 2001, chr. ; biblio Cerdacc) 51 §2 : L'incidence de l'existence d'une faute du défendeur sur la force majeure L'existence d'une faute peut écarter la condition d'extériorité et, ainsi que nous venons de le constater au paragraphe précédent, la présence d'une faute exclut fréquemment l'irrésistibilité. En effet, dès lors qu'une faute a précédé, suivi ou provoqué l'événement faussement invoqué comme constitutif de force majeure, la responsabilité du débiteur demeure 78. L'événement naturel n'est pas alors la cause du dommage, il n'est que le révélateur de la faute du débiteur dès lors que les dommages auraient pu être évités par les mesures nécessaires. Le débat se place sur le terrain de la causalité : la cause du dommage n'est pas l'événement naturel mais la défaillance du débiteur. Cette jurisprudence, abondante, a déjà été citée au paragraphe précédent pour le refus de l'irrésistibilité. En matière de responsabilité des constructeurs, "la responsabilité présumée des entrepreneurs ne peut être dégagée que si le dommage trouve sa cause exclusive dans un cas de force majeure" 79. Parfois, la carence du débiteur a aggravé les effets de l'événement naturel. - Civ. 3ème, 29 avril 1997 (pourvoi n° 95-16.618) : "la carence de Mme S. dans l'exécution de son obligation était antérieure aux pluies diluviennes des 11, 12 et 13 février 1987… elle avait accentué les affaiblissements et ruptures de la digue aux cours des années, donnant ainsi plus d'ampleur aux inondations de 1987 et excluant que celles-ci puissent être retenues comme un cas de force majeure". Il est parfois affirmé, de manière plus drastique que la faute est exclusive de la force majeure, et qu'il n'y a donc pas lieu de vérifier les éléments de celle-ci : - Reims, 17 mars 1994 (juris-data n° 042000) : "il n'y a pas lieu de retenir qu'un orage particulièrement violent puisse constituer un cas de force majeure car il appartenait au propriétaire du fonds supérieur de prévoir l'installation d'avaloirs des rigoles d'écoulement d'eau pluviale d'une capacité susceptible de faire face aux orages les plus violents". - Civ. 2ème, 5 février 1992 (Gaz. Pal., 1993, 1, somm., 12 ; bull., n° 45) : une personne avait été tuée par un bloc de glace tombé d'un toit, son héritière demande réparation au syndicat des copropriétaires de l'immeuble. Condamné à réparation par la Cour d'appel de Paris le 4 octobre 1990, le syndicat introduit un pourvoi reprochant à la Cour d'appel de ne pas avoir recherché si la chute de neige et son accumulation sur les toitures de Paris, sous forme de congères, excédait ou non la normale des perturbations nivales habituelles à cette époque de l'année au centre de Paris. La Cour de cassation approuve la cour d'appel : "Le toit de l'immeuble, très penché, était démuni de tout système de protection, la neige s'était accumulée depuis une dizaine de jours, le syndicat n'avait pris aucune mesure de protection adéquate ; la Cour d'appel n'était pas tenue de justifier si les chutes de neige excédaient la normale". Bien que la force majeure soit en principe totalement exonératoire, s'est posée la question de savoir s'il peut y avoir coexistence entre la force majeure et la faute. Ainsi, avait été admis le 78 Voir F. CHABAS, "Force majeure", Répertoire civil Dalloz, n° 3 Douai, 12 septembre 1984 (juris-data n° 042045) : alors que le service météorologique estimait que "par l'importance des précipitations et la grosseur des grêlons, cet orage peut être considéré comme un cas de force majeure", la Cour d'appel considère que "la responsabilité présumée des entrepreneurs ne peut être dégagée que si le dommage trouve sa cause exclusive dans un cas de force majeure. Dans le cas présent, elle est surtout consécutive à une insuffisance du système d'écoulement des eaux pluviales." 79 52 rôle partiellement exonératoire de la force majeure résultant d'un violent orage justifiant une exonération partielle du débiteur fautif pour avoir intercepté la voie naturelle d'écoulement des eaux par une digue (Civ. 2ème, 13 mars 195780). L'effet partiellement exonératoire de la force majeure est critiqué par la doctrine 81. Un arrêt de cour d'appel, rendu en matière de responsabilité des constructeurs, semble pourtant bien admettre une exonération partielle pour force majeure : - Angers, 7 juin 1982 (juris-data n° 041765) : le sous-sol d'un immeuble avait été inondé et il résultait du rapport d'expertise que la création de l'immeuble avait détruit une couche drainant des eaux de pluies en sous-sol, celle-ci en s'accumulant a maintenu l'eau sous forme de poche produisant le même effet qu'une nappe phréatique. La Cour admet l'imprévisibilité du phénomène naturel qui ne pouvait être décelé par un sondage du terrain avant la construction. Le phénomène est bien considéré comme irrésistible et extérieur, par conséquent l'entrepreneur et de l'architecte "s'exonèrent ainsi des conséquences de ce cas fortuit" sur le fondement de l'article 1792 du Code civil. Et, pourtant, l'arrêt ajoute cependant que le maître d'œuvre en tant que chargé de la conception et l'entrepreneur, professionnel averti tenu d'un devoir de conseil, auraient du prévoir un drainage périphérique en raison de l'environnement argileux, "que si le coût de ce drainage doit être supporté par le maître de l'ouvrage, le fait de ne pas l'avoir prévu ni réalisé en temps utile a eu pour effet d'aggraver les désordres et d'en rendre les remèdes plus onéreux" ce qui entraîne une condamnation in solidum de l'entrepreneur et de l'architecte pour le paiement de la moitié du coût des travaux. Il est intéressant de constater que la faute du constructeur peut déclencher la garantie décennale même en l'absence de dommage à l'ouvrage par le seul risque créé. C'est tout l'intérêt de l'arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation rendu le 8 avril 1998 (R.G.D.A., 1998, 285, note A. d'Hauteville) : les propriétaires "avaient eu connaissance de l'implantation de leur maison à un niveau inondable… la cour d'appel en a déduit à bon droit que la mauvaise implantation de leur immeuble constituait un vice caché et que la garantie décennale du constructeur était engagée". De même, doit la garantie des vices cachés le vendeur d'un immeuble situé en bordure d'une falaise dès lors qu'il existe un risque réel d'éboulement ignoré par les acheteurs (T.G.I. Nantes, 4ième ch., 19 décembre 1995, n° 2732/94, biblio Cerdacc). 80 Civ. 2ième, 13 mars 1957, J.C.P., 1957, II, 10084, note P. ESMEIN ; D., 1958, 73, note J. RADOUANT ; S., 1958, 77, note R. MEURISSE. Dans une autre (célèbre) affaire, le naufrage du navire Lamoricière, une tempête d'une extrême violence n'avait que partiellement exonéré le transporteur de sa responsabilité de gardien : Com., 19 juin 1951, D., 1951, 717, note G. RIPERT ; S., 1952, 1, 89, note R. NERSON ; J.C.P., 1957, II, 6426, note J. BECQUE ; R.T.D.Civ. 1951, 515, obs. MAZEAUD. Une autre affaire présente des points de similitude avec l'arrêt Lamoricière dans la mesure où a été admis un partage de causalité entre la faute du propriétaire d'un bateau et un ouragan, toutefois, dans cette espèce le caractère de force majeure de l'événement naturel avait été dénié : Com. 14 février 1973, D., 1973, 562, note G. VINEY. Le partage causal pour moitié entre la force majeure et la responsabilité d'une commune, gardienne du terrain a été admis par la Cour d'appel de Chambéry, le 24 novembre 1980 (J.C.P., 1982, II, 19777, obs. J.-C. DETHARRE) pour un glissement de terrain ; mais il est vrai qu'en l'espèce le caractère particulièrement dramatique de la catastrophe qui a causé la mort de 71 personnes dont 56 enfants n'est probablement pas étranger à l'attitude des juges 81 Voir infra Titre I, chapitre 1, §1, B 53 §3 : L'incidence de la présence d'un arrêté constatant l'état de catastrophe naturelle L'indemnisation des effets des catastrophes naturelles a été instaurée par la loi n° 82-600 du 13 juillet 1982. Selon l’alinéa 3 de l’article L. 125-1 du Code des assurances, les effets des catastrophes naturelles sont : - "les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel lorsque les mesures habituelles de prévention n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises". L'intensité de l'agent naturel doit donc avoir été anormale. La détermination du caractère de cette anormalité est laissée à l'appréciation de l'autorité administrative, l'état de catastrophe naturelle étant constaté par un arrêté interministériel. La parution de l'arrêté au journal officiel déclenche le processus d'indemnisation mais c'est par le biais de l'assurance que se fait cette indemnisation. L'assureur est donc obligé d'indemniser qui de droit dès lors que l'état de catastrophe naturelle aura été officiellement constaté. Dans le cas contraire, aucune indemnisation n'est due 82. A la lecture du troisième alinéa de l'article L. 125-1 du Code des assurances, on pourrait penser que si un événement est qualifié de catastrophe naturelle par un arrêté, cet événement constitue un cas de force majeure. Il était donc nécessaire de rechercher à travers l'examen de la jurisprudence si la décision des pouvoirs publics influence le juge judiciaire. La formule de l'article 125-1 al.3 du Code des assurances est largement inspirée de celle de la loi du 10 juillet 1964 relative aux calamités agricoles. Lorsque les éléments de la nature se déchaînent sur des cultures au sol, des récoltes non engrangées ou sur du bétail hors bâtiment le régime d'indemnisation applicable est celui des calamités agricoles. L'indemnisation des calamités agricoles concerne les dommages non assurables d'importance exceptionnelle et de caractère spécifiquement agricole : - Est considéré comme calamité agricole un dommage dû à un agent naturel qui a subi des variations anormales d'intensité et qui n'a pas pu être empêché par les moyens préventifs et curatifs habituellement pratiqués dans l'agriculture. Les risques non assurables en matière agricole sont essentiellement les inondations, les avalanches, la sécheresse. C'est l'autorité administrative qui constate la calamité (arrête ministériel conjoint Agriculture-Finance) après consultation de la Commission nationale des calamités agricoles83. Rappelons que, tous risques naturels confondus, la force majeure n'est reconnue que dans un quart des cas ; la présence d'un arrêté de constatation de l’état de catastrophe naturelle, ou de calamité agricole, n’entraîne pas de différence significative84. 82 Pour davantage de détails, voir infra Partie II, Titre I A propos des calamités agricoles, voir not. Risques n° 20, oct.-déc 1994 : A. de BEAUCARON, "Assurance climatique sur les récoltes agricoles", p. 25 ; D. CHAPUIS, "Calamités agricoles et assurance agricole", p. 33 ; P. VIOLIER, "L'assurance agricole, une nouvelle approche", p. 59 84 Les effets du vent ne sont pas concernés par les arrêtés de catastrophe naturelle sauf, depuis une loi du 13 décembre 2000, ceux des cyclones les plus importants 83 54 En matière d'inondation, c'est également dans la même proportion de un quart que la force majeure est retenue de manière générale, en présence d’un arrêté le taux d’admission de la force majeure augmente pour atteindre un tiers85. Ces derniers chiffres laissent présager une influence de la présence d'un arrêté interministériel sur la décision du juge judiciaire, mais ils démontrent également qu'on est fort loin d'une équivalence entre la présence d'un arrêté de constatation de l’état de catastrophe naturelle et l'admission judiciaire de la force majeure exonératoire. Examinons de plus près l'attitude du juge. Celui-ci admet rarement la force majeure par la seule présence d'un arrêté de catastrophe naturelle (A), bien au contraire, la force majeure est fréquemment refusée malgré la reconnaissance par arrêté d'un état de catastrophe naturelle (B) mais on peut noter que celle-ci a parfois une influence sur la décision (C). Pour les décisions ne mentionnant pas l’existence d’un arrêté inondation, le taux de reconnaissance de la force majeure est de 20% 85 55 A. La rare admission de la force majeure par la seule présence d'un arrêté Nous n'avons relevé que quelques arrêts isolés 86 affirmant clairement une équivalence entre la constatation de l'état de catastrophe naturelle et la force majeure. Ils concernent tous des pluies exceptionnelles, il s'agit d'arrêts rendus par des Cours d'appel dont l'un trait à un recours en garantie exercé par l'assureur du propriétaire contre le constructeur et son assureur 87, deux concernant la responsabilité afférente à l'inexécution de contrats. 1°) Responsabilité des constructeurs La cour d'appel de Nîmes (22 septembre 1992, R.G.A.T., 1992, n°4, 872, note J. BIGOT) avait à se prononcer sur la responsabilité d'une entreprise quant aux désordres apparus dans un immeuble cerné par les eaux à la suite de pluies exceptionnelles. En l’espèce un vice de construction ayant été démontré, il y avait concours causal d’une faute du constructeur et de la cause étrangère. Alors qu'en principe la faute du débiteur fait échec à l’admission de la force majeure, la Cour d'appel de Nîmes a considéré que la force majeure a exclu la responsabilité fautive. Alors que le demandeur soutient, avec raison, que : - "les dispositions légales sur l'état de catastrophe naturelle ne sont pas exclusives de recherche de responsabilité, et qu'en l'espèce se trouve caractérisé un défaut de conception de nature à engager la responsabilité du constructeur sur le terrain de l'article 1792 du Code civil." La Cour répond : - "Attendu… que le Tribunal, par de justes motifs qui tiennent essentiellement à la publication d'un arrêté… instituant le canton en état de catastrophe naturelle et qui sont adoptés par la Cour, a rejeté à bon droit la demande comme mal fondée." Ce raisonnement est tout à fait inattendu, surtout en matière de responsabilité des constructeurs où, nous l'avons vu, la force majeure est très rarement admise. Il a été dit avec justesse que "La Cour de Nîmes a péché par simplisme en limitant sa réflexion à cette seule phrase"88. 2°) Responsabilité contractuelle Pluies : - Paris, 7 décembre 1988 (juris-data n° 026415) : "L'état de catastrophe naturelle, constatée par arrêté interministériel, conformément aux dispositions de l'article 1 er de la loi du 13 juillet 1982, qui résulte de l'intensité anormale des pluies, est constitutif d'un cas fortuit 86 D'autres arrêts sont parfois cités comme admettant l'équivalence mais à la lecture de l'intégralité des décisions il apparaît qu'en réalité l'arrêté n'est qu'un des éléments d'appréciation, ainsi parmi les arrêts d'appel : Orléans, 30 octobre 1996 87 Un arrêt rendu par la première chambre civile par la Cour de cassation le 16 janvier 1999, Lamy assur., n° 49, mars 1999, bulletin d'actualité n° 1614, a été interprété comme déduisant de l'état de catastrophe naturelle l'exonération de la responsabilité des constructeurs. Néanmoins il ne nous semble pas que l'équivalence entre l'arrêté et la force majeure y soit clairement exprimée, mais plutôt que l'arrêté ait été un élément d'appréciation. 88 G. COURTIEU, "Catastrophe naturelle, force majeure et vice du sol", L'Assur. fr., n° 706, février 1995, 54 ; pour une opinion opposée, voir J. BERGEL-HATCHUEL, "Sécheresse : catastrophe naturelle, quand les tribunaux ajoutent à la loi", Gaz. Pal., 1996, 1, 128 : "Pour notre part, nous pensons que c'est cette jurisprudence qui doit prévaloir et prospérer" 56 ou de force majeure qui exonère la société T. D., exerçant le métier de garde-meuble, de la responsabilité des dommages causés aux meubles déposés par ses clients, les mesures habituelles à prendre n'ayant pu les empêcher". Rien dans l'arrêt n'indique qu'il y a eu vérification des mesures habituelles invoquées. Il semble donc bien que la décision s'inspire des termes mêmes de l'article L. 125-1 du Code des assurances. Sans pour autant affirmer l'équivalence entre l'arrêté de catastrophe naturelle et la force majeure la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 20 mars 1991 (juris-data n° 04958) déduit, assez curieusement l'imprévisibilité de la présence de l'arrêté : - "que cette décision (l'arrêté) atteste du caractère imprévisible de cette intempérie même dans une région habituée à la survenance de pluies torrentielles". L'irrésistibilité était déduite de l'importance des ravages occasionnés, laquelle ne pouvait être raisonnablement surmontée à temps pour l'organisateur d'une réception devant avoir lieu quelques jours plus tard. Les quelques arrêts d'appel admettant l'équivalence entre un arrêté constatant l'état de catastrophe naturelle et la force majeure ne sont guère représentatifs de la jurisprudence en la matière laquelle est très majoritairement opposée à l'admission d'une telle assimilation. 57 B. Le refus de l'assimilation Le refus de l'assimilation est beaucoup plus fréquent que l'admission de celle-ci, la lecture des décisions est à cet égard tout à fait éloquente. Quel que soit l'événement susceptible de faire l'objet d'un arrêté de catastrophe naturelle, il est réaffirmé à maintes reprises que le simple fait que l'autorité administrative ait reconnu le caractère de catastrophe naturelle ne saurait conférer à l'événement un caractère de force majeure : Inondation : - Paris, 9 juillet 1987 (juris-data n° 024288) : "La qualification de catastrophe naturelle par un arrêté préfectoral est sans incidence sur le litige ". - Civ. 3ème, 4 juin 1997 (R.G.D.A., 1997, n° 3, 785, note H. Périnet-Marquet) : "la Cour d'appel… a exactement relevé que le classement des crues en catastrophes naturelles par l'autorité administrative n'emportait pas qu'elles aient les caractères de la force majeure ". On retrouve les mêmes formulations à propos de pluies, de glissement de terrain ou de la sécheresse : Pluies : - Toulouse, 3 février 1997( juris-data n° 040387) - Paris, 10 novembre 1995 (juris-data n° 023562) Glissement de terrain : - Civ. 3ème, (bull., n° 46 ; J.C.P., 1993, IV, 1379 ; R.T.D.Civ., juil.-sept. 1993, 594 ) - Civ. 1ère, 15 juillet 1993 (R.G.A.T., 1994, 185, note H. Périnet-Marquet) Sécheresse : - Orléans, 2 oct. 1996 (juris-data n° 048661) En effet, la présence d'un arrêté de catastrophe naturelle ne saurait dispenser le défendeur de ses obligations ou l'exonérer de ses fautes : Inondation : - Civ. 1ère, 4 janvier 1991(pourvoi n° 89-12.589) - Civ. 3ème, 8 novembre 1995 (pourvoi n° 83-17.508) - Civ. 3ème, 29 avril 1997 (pourvoi n° 95-16.618) Sécheresse : Civ. 3ème, 1er décembre 1999 (La Tribune de l'Assurance, n° 33, mars 2000, n° 96) Mais surtout, il apparaît très nettement que le fait que l'autorité administrative ait reconnu le caractère de force majeure à l'événement naturel ne signifie nullement que celui-ci soit imprévisible et irrésistible. Il convient donc de vérifier les caractères d'imprévisibilité et d'irrésistibilité malgré la présence d'un arrêté et ceci quel que soit l'événement naturel : Inondation : - Civ. 2ème, 1er avril 1999 (pourvoi n° 97-17.960) : pour des dommages causés au chemin communal par les crues d'un étang la Cour de cassation relève que si les pluies diluviennes qui se sont abattues le 24 septembre 1986 sur la commune… ont motivé un 58 arrêté interministériel de classement en catastrophe naturelle, elles n'ont pas revêtu un caractère irrésistible et imprévisible de nature à exonérer le défendeur. Pour des formulations comparables : - Civ. 3ème, 4 novembre 1993 (pourvoi n° 91-22.266) - Metz, 21 avril 1994 (juris-data n° 043527) - Civ. 3ème, 17 juillet 1996 (3 arrêts, pourvois n° 94-18.541, 94-18.542, 94-18.543) - Montpellier, 3 déc. 1996 (juris-data n° 034657) - Bordeaux, 26 mai 1998 (juris-data n° 044344) Et concernant une inondation reconnue comme calamité agricole : - Civ. 3ème, 2 mars 1988 (2 arrêts, pourvois n° 86-18.851, 86-18.852) Glissement de terrain : - Cass. civ. 3ième, 19 juillet 2000 (pourvois n°G 98-22.571, V 98-23.088, X 99 -10.283) Pluies : - Aix-en-Provence, 7 nov. 1995 (R.G.A.T., 1996, 383, note M. Bruschi) - Civ. 3ème, 14 février 1996 (R.J.D.A. octobre 1996, n° 1160 ; Themexpress Francis Lefèvre, "Force majeure", n° 89) - Montpellier, 3 déc. 1996 (juris-data n° 034657) Sécheresse : En matière de sécheresse, les juges ont une position invariable de rejet de l'équivalence : - Toulouse, 10 septembre 1996 (P.A., 3 février 1997, n° 15, 11, note Nathalie Sempé) : "Il est de jurisprudence constante que la sécheresse, même ayant donné lieu à un arrêté de catastrophe naturelle, n'est pas un cas de force majeure exonérant le constructeur de sa responsabilité. En effet, la cause étrangère, synonyme de force majeure, s'entend d'un événement imprévisible, revêtant une violence ou une intensité exceptionnelle". Dans le même sens : - T.G.I. Périgueux, 5 juillet 1994 (RD. Imm. 16 (4), oct.-déc. 1994, 664, note Ph. Malinvaud et B. Boubli, 672, note G. Leguay) - Civ. 3ème, 22 novembre 1994 (R.G.A.T., 1995, note H. Périnet-Marquet) - Paris, 4 septembre 1996 (juris-data n° 022237) - Toulouse, 8 septembre 1997 - Civ. 3ème, 28 janvier 1998 (J.C.P., 1998, IV, 1576) - Nîmes, 5 mars 1998 (juris-data, n° 030782 - Toulouse, 11 mai 1998 (juris-data n° 043512) - Civ 3ème, 9 décembre 1998 (pourvoi n° 97-12.913) - Civ. 3ème, 1er décembre 1999 (La Tribune de l'Assurance, n° 33, mars 2000, n° 96) - Civ. 3ème, 27 juin 2001, n° 1074 FS-D, biblio Cerdacc Ce refus de reconnaître l'équivalence s'explique fort bien car - "l’existence d’un arrêté cat-nat suppose que les dommages soient seulement dus à l’intensité anormale d’un agent naturel, alors que la force majeure requiert, outre l’extériorité, l’imprévisibilité et l’irrésistibilité de l’événement" (Civ. 3ème, 1er décembre 1999, La Tribune de l'Assurance, n° 33, mars 2000, n° 96). Sur le plan juridique la notion d'intensité anormale d'un agent naturel ne recouvre pas celle de force majeure car cette anormalité peut fort bien être prévisible et les moyens d'y résister 59 peuvent exister. En effet, bien qu'anormale, l'intensité de l'agent n'est pas nécessairement telle que toute possibilité d'empêcher les dommages soit exclue. N'oublions pas que "les élus locaux, par faveur pour les administrés sollicitent fréquemment la prise d'arrêté de déclaration de catastrophe naturelle dans des situations de gravité fort variable nécessitant, dans un procès civil, une analyse des données factuelles" (T.G.I. Périgueux, 5 juillet 1994 RD. Imm. 16 (4), oct.-déc. 1994, 664, note Ph. Malinvaud et B. Boubli, 672, note G. Leguay) 89. C. L'arrêté peut être un élément d'appréciation Si l'existence d'un arrêté de catastrophe naturelle ne suffit pas à établir la force majeure il peut néanmoins être pour le juge un élément d'appréciation de celle-ci. Ainsi, la reconnaissance administrative de l'état de catastrophe naturelle ajoutée à l'absence constatée d'autres causes du sinistre peut conduire à conférer à l'événement naturel les caractères de la force majeure. Inondations : - Bordeaux, 16 décembre 1986 (juris-data n° 045002) : "Etant exclus le vice de l'immeuble, la faute du propriétaire, et le caractère de catastrophe naturelle étant reconnu aux circonstances atmosphériques à l'origine du trouble de jouissance, c'est à bon droit que le premier juge a constaté que le bailleur était exonéré de toute responsabilité". - Chambéry, 22 février 1995 (J.C.P., 1995, IV, 2067) : "la preuve n'est pas rapporte que le défendeur n'a pas exécuté son obligation d'entretien du lit du ruisseau et de la berge lui appartenant, ni que seuls les arbres lui appartenant sont venus obstruer le lit du ruisseau", et "enfin et surtout les pluies … ont bien présenté un caractère exceptionnel puisque l'autorité Administrative a déclaré la commune sinistrée au titre des catstrophes naturelles". Si cet arrêt met en avant l'arrêté de catastrophe naturelle, l'admission de la force majeure est tout de même passée par la vérification de l'absence de faute. - Orléans, 30 oct. 1996 (juris-data n° 055148, biblio. Cerdacc) : un film avait été détruit lors de l'inondation ayant affecté le site de production de la société Maury Imprimeur. Afin de déclarer la société non responsable à raison de la force majeure, la Cour d'appel estime "qu'il ne saurait être contesté l'ampleur de la catastrophe naturelle" en tenant compte de divers éléments dont l'arrêté de catastrophe naturelle mais également des coupures de presse faisant état de l'inondation du site, de l'attestation du lieutenant des sapeurspompiers ayant dirigé les opérations dans l'usine et de la facture du déménagement des machines. - Civ. 1er, 26 janvier 1999 (Lamy assur., n° 49, mars 1999, bulletin d'actualité, 1614) : une société avait fait construire des bâtiments à usage d'usine et de bureaux, ces immeubles ont été endommagés par une inondation provoquée par des pluies d'une intensité exceptionnelle et pour lesquelles un arrêté interministériel a reconnu l'état de catastrophe naturelle. L'assureur du propriétaire a formé un recours en garantie contre les constructeurs de l'ouvrage en soutenant que les désordres provenaient d'un vice de 89 Voir infra Seconde Partie, Titre I, chapitre 1 60 construction. Le recours en garantie fut rejeté par la Cour de cassation. Il sera prédit peu de notoriété cet arrêt en raison de l'affirmation suivante90 : - "par motifs adoptés, la cour d'appel ayant retenu que … ce préjudice avait pour cause déterminante l'état de catastrophe naturelle reconnu par l'arrêté interministériel, elle a relevé que, pour ce préjudice, les constructeurs se trouvaient exonérés, pour cas de force majeure". Par ces termes, la Cour de cassation semble en effet admettre l'équivalence entre l'arrêté constatant l'état de catastrophe naturelle et l'exonération des constructeurs. Néanmoins, il ne nous semble pas que cette équivalence soit clairement affirmée car la Cour de cassation avait préalablement retenu l'irrésistibilité de la pression des eaux pour en conclure que le préjudice avait pour cause déterminante l'intensité anormale des pluies et devait être considéré comme l'effet de la catastrophe naturelle. L'arrêté n'est donc ici qu'un élément d'appréciation parmi d'autres. - Civ. 3ème, 14 avril 1999 (pourvoi n° 97-12.946) : pour l'orage le plus violent enregistré par l'observatoire de Montsouris en 100 ans, "il s'était produit un phénomène atmosphérique d'une si rare violence qu'il ne pouvait raisonnablement entrer dans les prévisions des entreprises travaillant dans la zone, cela avait été au moins implicitement reconnu par les pouvoirs publics qui avaient déclaré l'état de catastrophe naturelle". Neige : - Besançon, 25 janvier 1994 (1ère ch. civ., Fallue c/ Prudent) : "lorsque l'accident est survenu…, la neige tombait en abondance depuis de nombreuses heures en s'accumulant sur la toiture ; que cet enneigement extrêmement rapide était suffisamment exceptionnel pour cette région du bas Jura pour désorganiser la commune de Vielle Loye où se trouvait le bâtiment et pour motiver une demande, d'ailleurs généralisée dans le département, de reconnaissance de catastrophe naturelle, que ces conditions climatiques exceptionnelles rendaient manifestement trop dangereuse toute intervention destinée à dégager la neige sur le toit. qu'il y a donc bien un événement normalement imprévisible et irrésistible constituant un cas de force majeure exonérant M. P. de sa responsabilité". - Montpellier, 18 juin 1996 (juris-data n° 034095) : "Les abondantes chutes de neige de janvier 1991 ont été classées catastrophes naturelles. La présence sur le toit au moment de l'effondrement d'une surcharge de 110 kilos par mètre carré de neige ayant entraîné l'effondrement de la toiture, excédant les prévisions des normes en matière de surcharge, constituait un événement imprévisible et inévitable, et ce même si l'ouvrage présentait un défaut d'assemblage". Sécheresse : - Pau, 3 mai 1995 (juris-data n° 051668) : "L’arrêté constatant l'état de catastrophe naturelle ne peut pas à lui seul caractériser un cas de force majeure, mais dès lors que le sol ne présentait pas de vice et que les fondations ont été réalisées dans les règles de l’art, la sécheresse constitue bien une cause étrangère ". - 90 Orléans, 5 octobre 1998 : "dès lors que la cause première des désordres … est la sécheresse qui sévit dans la région deux étés de suite, dont l'intensité et la gravité amenèrent le pouvoir exécutif d'en qualifier les conséquences de "catastrophe naturelle" pour permettre l'indemnisation des victimes au sens des articles L. 125-1 et suivants du Lamy assur., n° 49, mars 1999, bulletin d'actualité n° 1614 : "On ne s'étonnera pas que l'arrêt rendu le 26 janvier 1999 par la première chambre civile n'ait pas vocation à une large diffusion" 61 code des assurances, il s'ensuit que cette sécheresse constitue pour le propriétaire voisin de la victime dont le thuya a aggravé la sécheresse du sol un événement imprévisible et irrésistible et donc un cas de force majeure. Il est constaté au surplus que par le passé d'autres sécheresses s'étaient produites sans que la présence du thuya litigieux planté antérieurement … ait eu quelques effets sur la construction voisine ". Par ailleurs l'arrêté, sans caractériser l'imprévisibilité ou l'irrésistibilité, constitue parfois un indicateur de la violence, de l'imprévisibilité ou du caractère exceptionnel de l'événement. Ainsi un arrêt de la première Chambre civile de la cour de cassation ( 7 juillet 1998, R.G.A.T., 1998, n° 4, p. 841, note F. Vincent) constate d'une part l'existence d'un arrêté de catastrophe naturelle et d'autre part que la sécheresse était exceptionnelle et qu'aucune précaution n'aurait pu suffire à éviter les dommages. En revanche, l'absence d'arrêté a permis d'emporter la conviction du juge quant à la non réalisation d'un cas de force majeure. Il est vrai qu'en l'espèce c'est la commune elle-même invoque la force majeure !!! - Toulouse, 20 mai 1997 (juris-data n° 043600) : La commune de Virac s'était désintéressée de l'entretien d'un pont qu'elle avait fait construire. Le pont s'était effondré provoquant des amas qui ont détourné les eaux d'un ruisseau de leur lit naturel, lesquelles, lors de violentes pluies, se sont transformées en coulées de boue aboutissant sur le fonds inférieur. Pour s'exonérer de sa responsabilité, la commune invoqua de violents orages qui avaient accru de débit des eaux. La Cour d'appel de Toulouse refuse à ces orages les caractères de la force majeure et souligne que la commune est tenue de dédommager le propriétaire du fonds inférieur "des dommages liés à la modification de l'écoulement des eaux dès lors qu'elle ne peut soutenir, en l'absence d'arrêté de catastrophe naturelle la concernant pour la période considérée, et d'un caractère véritablement imprévisible des orages alors constatés, que les dommages sont dus exclusivement à un cas exonératoire de force majeure". 62 TITRE II Inondations : responsabilité et force majeure en droit public par Hervé ARBOUSSET L’action des personnes publiques au travers de leurs agents ou des réglementations qu’elles édictent, peut amener à des dommages plus ou moins importants. C’est en 1873 que le Tribunal des conflits, par la décision Blanco (8 février 1873, D., 1873, III, p .20), pose le principe de la responsabilité de l’Etat dans le cadre de ses attributions de collectivité souveraine du “ fait des personnes qu’il emploie dans les services publics ”. Depuis lors, les victimes des agissements des autorités administratives, et non pas seulement de l’Etat, ont le droit de leur demander réparation du préjudice qu’elles subissent. Elles peuvent aussi saisir le juge administratif d’une demande d’indemnisation si la personne publique refuse de les dédommager ou propose une indemnisation jugée trop faible. Afin d’atténuer leur responsabilité, les personnes publiques peuvent invoquer diverses causes exonératoires que l’on regroupe en deux catégories. Il y a tout d’abord les exonérations issues d’une personne et qui prennent la forme d’une faute de la victime et du fait du tiers. On trouve ensuite les exonérations non issues d’une personne et qui regroupent la force majeure et le cas fortuit. Or, dans le domaine des événements naturels, force majeure et cas fortuit sont souvent invoqués par les autorités administratives et en définitive peu fréquemment reconnus par le juge administratif. On doit dès lors retenir l’analyse de Michel Despax 91 pour qui dans le domaine des phénomènes naturels, la force majeure notamment reste un élément clé pour les juristes. Les inondations, événements naturels par excellence, auxquelles la France est confrontée depuis longtemps mais aujourd’hui avec des effets d’une ampleur impressionnante, amènent les personnes publiques à invoquer, devant les juridictions administratives, l’existence d’événements de force majeure qui, selon elles, les exonèrent partiellement ou en totalité. C’est l’occasion pour les juges administratifs de préciser, au cas par cas, si la qualification d'événements de force majeure doit être retenue afin de rompre au bénéfice des personnes publiques, comme l’écrit Jean François Couzinet, la chaîne des responsabilités 92. Depuis l’année 1980, ce sont 346 décisions, issues des juridictions administratives (Tribunaux administratifs, Cours administratives d’appel et Conseil d’Etat) ayant trait aux événements naturels et à l’éventuelle reconnaissance de cas de force majeure, qui ont été exploitées. Parmi elles, on trouve 260 décisions qui touchent plus précisément les inondations et la force majeure. Ce dernier chiffre, assez élevé, démontre tout à la fois l’ampleur des inondations, la volonté des victimes de voir les personnes publiques reconnues responsables et le souci légitime, dès lors que l’on se place du côté de ces dernières, de tenter de s’exonérer de leur responsabilité. La récolte des données a été notamment effectuée, comme en droit civil, par des interrogations juris-data avec pour mots-clés “ Inondation ou catastrophe naturelle et force majeure ” ainsi que par la consultation de CD roms juridiques dont ceux réunissant les arrêts du Conseil d’Etat et des Cours administratives d’appel (Juridisque Lamy, C.E et C.A.A. ). 91 M. DESPAX, Introduction au colloque sur Les risques naturels et technologiques majeurs : aspects juridiques, Toulouse, 14 et 15 octobre 1985, Droit et ville, 1985, n°20, p.21 92 J.-M. COUZINET, "Cas de force majeure et cas fortuit : Causes d’exonération de la responsabilité administrative", R.D.P., 1993, p.1385 et s., p.1388 63 La recherche a été volontairement limitée aux vingt dernières années pour plusieurs raisons. Tout d’abord, on dispose ainsi d’un éventail de décisions suffisamment large sur une période très récente, ce qui permettra de dégager éventuellement les changements d’analyses retenues par les juges administratifs, et notamment depuis 1989, par les Cours administratives d’appel, intervenant désormais plus souvent que le Conseil d’Etat. Ensuite, l’examen des vingt dernières années de la jurisprudence administrative permettra de déceler les caractères de l’événement de force majeure tels que les énoncent, dans la période la plus récente, les juridictions administratives. Enfin, on découvrira avec quelle fréquence la qualification d’événement de force majeure est retenue. Sur les 260 décisions concernant le risque inondation en notre possession, les Cours administratives d'appel se sont prononcées 115 fois et le Conseil d'Etat 137 fois. Ce sont ces décisions qui ont été principalement exploitées. Leur grand nombre, en rendant l’analyse plus complexe, permet néanmoins d’avoir une vue d’ensemble de la notion de force majeure telle qu’elle est appréhendée par les juridictions administratives. Il convient néanmoins de préciser que la collecte des données a été rendue difficile par le fait que fort peu de décisions émanant des tribunaux administratifs font l'objet d'une publication ou d'un recensement par les banques de données. La majorité du contentieux est alimenté par les actions en responsabilité exercées par une personne physique ou par une personne morale de droit privé (S.A., S.A.R.L., association…) contre une personne morale de droit public mais aussi par les actions de ces dernières. En effet, un ministre au nom de l’Etat, une collectivité territoriale locale, un syndicat de communes, un établissement public, notamment par l’intermédiaire de leurs représentants peuvent, eux aussi, agir en justice pour qu’un jugement de première instance leur étant défavorable soit infirmé ou afin d’obtenir, depuis 1989, la cassation par le Conseil d’Etat, d’un arrêt rendu par une Cour administrative d’appel les ayant condamné. On note également des actions exercées contre les personnes publiques par des assureurs et plus particulièrement par des mutuelles d’assurance. La plupart des décisions concernent des atteintes aux biens (effondrements de murs, submersions de cultures, inondations de sous-sols, inondation d’habitations ou de locaux commerciaux, etc). Des décisions, heureusement peu nombreuses, sont relatives à des décès dont la tristement célèbre inondation du camping du grand Bornand, le 14 juillet 1987, au cours de laquelle 23 campeurs périrent noyés. Les fondements invoqués devant les juridictions administratives, afin que les personnes publiques soient déclarées responsables des dommages subis, sont nombreux. On trouve tout d’abord ceux ayant un rapport avec les ouvrages publics. Il y a en premier lieu, le défaut d'entretien normal d'un ouvrage public, régime de responsabilité pour faute présumée qui bénéficie aux usagers des ouvrages publics puisqu’ils ont seulement à prouver l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité entre le dommage et le fait générateur, sans avoir dès lors à apporter la preuve d’une faute. Il y a, en second lieu, les dommages dus à la présence d'un ouvrage public et à ses caractéristiques propres, à un vice de conception le touchant, à sa mauvaise utilisation ou à son fonctionnement défectueux. On découvre ensuite un autre fondement qui tient à l'insuffisance du réseau d'évacuation des eaux. Au-delà, l'implantation d'un camping ou de toute autre construction en zone inondable peut justifier l’engagement de la responsabilité tout comme un déboisement sans dispositif permettant de recueillir les eaux pluviales. 64 Enfin, les retards dans l'annonce des crues et les déficiences du service de lutte contre les inondations peuvent conduire le tribunal à déclarer responsable la collectivité publique mise en cause et plus précisément la commune. Il convient d’étudier dans un premier temps ce à quoi correspond la notion de force majeure pour le Conseil d’Etat et la doctrine (Chapitre 1er), afin ensuite d’examiner plus précisément les éléments qui, selon le juge, permettent de caractériser un événement de force majeure (Chapitre 2). Chapitre 1er : La notion juridique de force majeure à travers la doctrine et la jurisprudence du Conseil d'Etat et des Cours administratives d’appel Sur le fond, et cela constitue l’élément fondamental immédiat, il ressort d’une première analyse de la jurisprudence une nette tendance à retenir de plus en plus souvent, et ainsi très facilement, la responsabilité des personnes publiques dans l’hypothèse d’événements naturels importants et gravement dommageables tels des inondations. D’une part, la force majeure semble ainsi être de moins en moins admise tout en étant peu facile à définir (§1). D’autre part, quand bien même elle serait reconnue, la force majeure ne remplit, le plus souvent, que partiellement son rôle de cause exonératoire (§2). Enfin, le fait que la force majeure ne soit pas systématiquement retenue, n'implique pas nécessairement la responsabilité pleine et entière de la personne publique, un partage de responsabilité entre celle-ci et les victimes étant parfois retenu par le juge administratif (§3). §1 : Le déclin de la force majeure et l’imprécision des caractères permettant de l’identifier Une étude statistique des décisions rendues par les juridictions administratives laisse apparaître que la force majeure n’est retenue que dans un nombre de cas extrêmement faible. En effet, c’est seulement dans environ 6,5% des hypothèses où elle est invoquée par les personnes publiques qu’elle est considérée comme établie. Pour être plus précis, sur les 260 décisions ayant trait aux inondations, la force majeure n’est reconnue que dans 17 cas. A titre de comparaison, sur 84 décisions portant sur des événements naturels autres que des inondations, la force majeure est retenue 7 fois. Ainsi, les juges administratifs ont estimé que certains événements naturels autres que des inondations répondent un peu plus souvent aux critères de la force majeure que ce n’est le cas dans le domaine des inondations même si la différence entre les pourcentages de reconnaissance d’un événement de force majeure paraît infime. En effet, l’écart est de 2 points entre le pourcentage de décisions reconnaissant la force majeure en matière d’inondations (6,5%) et le pourcentage de celles indiquant qu’il y a force majeure en matière d'événements naturels autres que des inondations (8,5%). Le Conseil d’Etat reconnaît la présence d’un événement de force majeure seulement dans 5 arrêts (soit un peu plus de 3,5%). Ce déclin de la reconnaissance de la force majeure s’explique, à notre sens, de diverses façons. Tout d’abord, cela tient à l’effet immédiat de la qualification de force majeure : l’exonération totale de la personne publique dans le meilleur des cas. Ainsi, une telle conséquence, qui ne peut que satisfaire les autorités administratives actionnées devant le juge administratif, ne s’inscrit pas dans l’évolution actuelle de la jurisprudence administrative de 65 plus en plus favorable aux victimes. Car, exonérer totalement une personne publique au motif qu’il y a événement de force majeure conduit à une absence d’indemnisation de la victime. A l’inverse, reconnaître dans la majorité des cas l’inexistence d’un événement de force majeure, c’est, de la part, du juge ne pas oublier les victimes et leur souci d’être indemnisées du préjudice souvent très important qu’elles subissent. Dès lors, moins il y a de décisions reconnaissant la force majeure et plus les victimes pourront obtenir réparation des autorités administratives voyant ainsi leurs droits reconnus. Ainsi, le mouvement actuel de la jurisprudence, cherchant à protéger beaucoup plus que jadis les victimes, s’inscrit totalement dans l’orientation consistant à ne reconnaître la force majeure que dans des cas très peu nombreux. Ensuite, les progrès techniques considérables réalisés depuis quelques décennies laissent sans doute croire au juge que la reconnaissance de la force majeure ne peut désormais survenir trop fréquemment. Ainsi, et nous y reviendrons, les évolutions technologiques peuvent faire perdre à un événement les caractéristiques de la force majeure. Au-delà, les trois critères traditionnels sur lesquels le juge administratif s’appuie pour qualifier un événement de force majeure sont peu précis, ce qui lui permet de se reconnaître une marge de manœuvre importante. Dès lors, la perception de la force majeure varie au gré des contentieux et des circonstances et relève du seul juge administratif. Ce n’est qu’en 1988 que le Conseil d’Etat a, pour la première fois depuis 1980, estimé que les conditions de reconnaissance de la force majeure étaient réunies en matière d’inondation (C.E., section, 27 juillet 1988, Compagnie marseillaise de Madagascar contre Etat). Si l’on peut retenir sans difficulté la définition de la force majeure présentée par Latournerie selon lequel elle correspond à une force insurmontable, supérieure à la volonté humaine et aux moyens techniques dont on dispose93, une discussion existe au sein de la doctrine sur les caractéristiques de la force majeure telles que le juge administratif les présente. En effet, celui-ci reste le plus souvent très laconique eu égard aux éléments permettant d’identifier, selon lui, la force majeure, ce qui conduit la doctrine à s’engouffrer dans cette brèche. Il est traditionnel de considérer un événement comme étant de force majeure dès lors que trois éléments se rencontrent. Il faut, en premier lieu, que l'événement soit extérieur au défendeur. Il est nécessaire, en second lieu, que le fait soit imprévisible. Il convient, en dernier lieu, que l’événement soit irrésistible. Pourtant, un seul arrêt qui ne concerne d’ailleurs pas les inondations, présente ces trois caractéristiques (C.E., 16 janvier 1998, O.N.I.C., n°154779 “ il ne ressort pas de l’instruction que le défaut de qualité des céréales livrées soit consécutif à un événement extérieur, imprévisible et irrésistible ; que par suite, ce défaut ne saurait être regardé comme résultant d’un cas de force majeure ”), ce qui laisse la doctrine perplexe face aux éléments constitutifs de la force majeure. D’autant plus, comme l’écrit G. Darcy, qu’en “ …réalité, la jurisprudence frappe surtout par la grande relativité des solutions qui rend délicats aussi bien la conceptualisation que le décodage des éléments constitutifs généralement admis ”94. S’agissant de l’irrésistibilité et de l’imprévisibilité, le Conseil d’Etat, qui cite très souvent seulement de façon expresse cette dernière, semble adopter une approche purement empirique écartant toute quantification, laissant ainsi au juge du fond une totale liberté dans l’appréciation des circonstances. LATOURNERIE, "De la faute et du risque à propos des dommages causés par les travaux publics’’, R.D.P., 1945, p.5 94 G. DARCY, note sous C.E, 25 mai 1990, M. Abadie et autres, A.J.D.A. 1990, p. 824 et s., p.826 93 66 Or, si les auteurs reprennent à leur compte les trois éléments traditionnellement considérés comme permettant de déceler un cas de force majeure, ils ne s’accordent pas sur leur valeur respective et sur l’éventuelle existence d’autres caractéristiques à la force majeure. De ce dernier point de vue, on trouve tout d’abord des auteurs qui affirment que pour le juge administratif la force majeure a seulement trois caractères : elle est extérieure, irrésistible et imprévisible. Ce sont notamment, mais pas seulement, des manuels de droit administratif qui présentent une telle vision. Or, la jurisprudence, dans la majorité des cas, ne fait pas référence explicitement à ces trois caractères. Ensuite, il y a les membres de la doctrine qui considèrent, qu’à côté des trois éléments permettant d’identifier un cas de force majeure, il faut prendre en compte le caractère connu de l'événement en cause. Telle est la position de Jean François Couzinet95 mais aussi de MM. F.P. Bénoit 96 et Jacques Moreau97. Ces deux derniers auteurs rejettent l’imprévisibilité comme critère d’identification de la force majeure alors que Jean François Couzinet conserve les trois éléments classiques permettant d’identifier la force majeure, en y ajoutant la nécessité que le fait soit connu. Selon lui, “ C’est à la date du jugement sur la responsabilité que doit être apprécié le caractère connu…de la cause réelle du dommage, ni plus tôt (date du fait dommageable)…ni plus tard… ”. En tout état de cause, le juge administratif ne se réfère pas expressément à l’aspect éventuellement connu de l’événement. Au-delà, et sans doute en raison du laconisme du juge à l’égard de la notion de force majeure, les difficultés importantes sur lesquelles la doctrine se penche, portent sur la valeur des éléments caractérisant la force majeure et sur la détermination de ce à quoi correspond chacun d’eux. En ce qui concerne l’importance respective des caractères permettant de déceler un événement de force majeure, de très nombreux arrêts font seulement mention de l’imprévisibilité. Cette caractéristique semblerait, dès lors, être l’élément déterminant dans la reconnaissance d’une situation de force majeure. Pourtant, sur ce point, les auteurs sont partagés. En premier lieu, il y a ceux qui considèrent que le critère fondamental, sur lequel le juge s’appuie pour décider qu’il y a ou non force majeure, reste le caractère irrésistible de l’événement en cause. Telle est l’analyse présentée par Jean François Couzinet même si, selon lui, le juge se réfère le plus souvent de manière implicite à cet élément en faisant référence à l’imprévisibilité98. Pour Mme Deguergue 99 et M. Lemaire100. le critère déterminant de la force majeure est aussi l’irrésistibilité. Selon ce dernier, les caractères extérieur et imprévisible sont seulement des indices de l’irrésistibilité et non des critères de la force majeure. D’autant que “ Si l’imprévisibilité est souvent perçue comme une condition à part entière de la force majeure, c’est en raison de l’ambiguïté de la jurisprudence. Le plus souvent, elle ne se réfère ni à l’imprévisibilité ni à l’irrésistibilité mais à la nature exceptionnelle ou anormale de l’événement. L’exceptionnel est considéré comme renvoyant à l’irrésistible ”. 95 J.-M. COUZINET, loc. cit, p. 1404 BENOIT, "Le cas fortuit dans la jurisprudence administrative", J.C.P., 1956, I,1328 97 MOREAU, "Principes généraux et concepts fondamentaux de la responsabilité administrative", Juris-classeur administratif, fascicule 700, n°131 98 loc. cit. 99 DEGUERGUE, "Causalité et imputabilité", Juris-classeur Administratif, fascicule 830 100 F. LEMAIRE, "La force majeure : un événement irrésistible", R.D.P., 1999, p. 1723 et s 96 67 En second lieu, pour d’autres auteurs, le juge administratif privilégie l’aspect imprévisible de l’événement à l’origine du dommage. Géraldine Derozier 101 et Erwan Le Cornec102 retiennent cette analyse. Selon Géraldine Derozier, comme l’imprévisibilité est une notion vague, elle recouvre les aspects de l’irrésistibilité et le juge examine alors les deux éléments sous le seul vocable d’imprévisibilité. Il faudra vérifier si, pour le juge administratif, la distinction entre les notions d’imprévisibilité et d’irrésistibilité a réellement un sens. Pour ce qui a trait à la détermination du contenu des éléments permettant d’identifier un événement de force majeure, le caractère extérieur au défendeur ne pose pas de difficulté pour la doctrine. Elle considère ainsi qu’il est nécessaire que cet élément existe afin de déceler un cas de force majeure. Néanmoins, M. Lemaire estime que l’extériorité n’est pas toujours indispensable à la reconnaissance de la force majeure. Elle serait, dès lors, simplement un indice de l’irrésistibilité et ainsi de la force majeure. Dans le domaine des catastrophes naturelles, telles que les inondations, l’événement en cause présente, de toute évidence, un caractère extérieur au défendeur. La condition d’extériorité, à laquelle le juge ne se réfère guère expressément, ne pose pas ainsi de difficulté. En revanche, le problème est beaucoup plus délicat en ce qui concerne l’irrésistibilité et l’imprévisibilité de l’événement d’autant que le juge administratif est ici le plus souvent très laconique, laissant le lecteur en plein désarroi. Certes, toute la doctrine s’accorde à considérer que pour que la force majeure soit établie, il faut aussi un événement imprévisible dans sa survenance et irrésistible dans ses effets. Mais les auteurs ne s’accordent pas sur le contenu de ces deux caractères. Pour Jean-Marie Pontier 103 dont l’idée est reprise par Géraldine Derozier, dans le silence du juge, l’imprévisibilité est composée de quatre caractéristiques : la soudaineté, la durée, l’intensité et la probabilité de l’événement. Pour ce dernier auteur, chacun de ces critères ne permet pas, à lui seul, de caractériser l’imprévisibilité. Il faut en effet, qu’ils apparaissent à plusieurs. D’autre part, Géraldine Derozier considère que c’est la probabilité de l’événement qui reste l’élément déterminant de l’imprévisibilité (“ C’est parce qu’un événement naturel, dans son aspect le plus violent est hautement improbable qu’il est imprévisible"). Selon Erwan Le Cornec, au contraire, “ seule la probabilité se rattache comme critère déterminant à l’imprévisibilité, les autres éléments se rattachant à la condition de l’irrésistibilité ”. Au-delà, certains membres de la doctrine, soulignent que le juge administratif emploie souvent, pour déceler un cas de force majeure, la formule “ événement exceptionnel et imprévisible ”. Ainsi, revient avec insistance un autre paramètre : le caractère exceptionnel de l’événement, qui ne se confond pas forcément, selon la doctrine, avec l’imprévisibilité et/ou l’irrésistibilité. Jean-François Couzinet estime que le Conseil d’Etat paraît distinguer les deux termes “ sans qu’il soit possible de bien saisir la nuance ”. Selon M. Lemaire, comme la force majeure est souvent présentée comme un événement irrésistible et imprévisible, lorsque le juge fait état d’un événement exceptionnel et imprévisible, on donne au terme exceptionnel le sens d’irrésistible. Plus précisément, le Conseil d’Etat emploie très fréquemment des formules où l’adjectif exceptionnel est présent (“ intensité exceptionnelle ”, “ caractère exceptionnel ”, “ durée exceptionnelle ”, “ importance et intensité exceptionnelles ”…). Il 101 G. DEROZIER, " Le juge administratif et la force majeure : vers la disparition de l’imprévisibilité ?", P.A., 12 juillet 1996, p.14 et s., p.17 102 E. LE CORNEC, "Les autorités de l’urbanisme face aux risques naturels", A.J.D.I., 1999, p.198 et s., p.205 103 J.-M. PONTIER, "L’imprévisibilité", R.D.P.,1986, p. 11 68 semble ressortir de la jurisprudence, la nécessité que l’événement soit exceptionnel dans sa survenance, mais aussi dans son intensité, sa violence, son importance ou sa durée. Enfin, Maryse Deguergue considère que seule l’irrésistibilité doit être absolue alors que l’imprévisibilité ne peut être que relative car “ l’imagination humaine peut tout prévoir et l’évolution technique peut à terme conduire à rendre presque tout prévisible ”. Cette analyse l’emporte aussi chez Jean-François Couzinet : “ L'événement imprévisible n’est pas l'événement inconcevable…mais simplement celui qu’on ne pouvait raisonnablement envisager, qu’on ne pouvait normalement prévoir ”. Des auteurs précisent également la méthode qui, selon eux, est utilisée par le juge administratif. Tout d’abord, il s’appuie sur les circonstances de l’espèce mais peut étendre son analyse à ce qui a pu se produire dans la région. Il faut alors que l’événement naturel ait été extraordinaire. En second lieu, il est indispensable que la mémoire humaine n’ait pas gardé souvenir d’un sinistre aussi important et comparable à l’événement en cause. Dans le domaine des inondations, selon Géraldine Derozier, “ la force majeure est constatée lorsque le sinistre tel qu’il s’est passé, est sans précédent dans une longue période ”. Le délai est fixé à 100 ans. En troisième lieu, le juge s’appuie très souvent sur les avis d’experts, ce que la lecture des décisions de justice ne dément pas. En définitive, la proportion de décisions juridictionnelles qualifiant un événement de force majeure est très faible. Au surplus, les juges administratifs sont le plus souvent très laconiques dans les explications qu’ils fournissent parfois, ce qui laisse croire qu’ils décrètent plus la force majeure qu’ils ne la constatent. Le laconisme des juridictions administratives amène alors la doctrine à tenter, peut-être en vain, de clarifier la notion de force majeure sans nécessairement qu’une unanimité réelle se dégage en son sein. 69 §2 : Le caractère exonératoire partiel ou total de la force majeure Alors qu’en droit privé, la reconnaissance d’un cas de force majeure a pour effet significatif, dans la très grande majorité des contentieux, d’exonérer totalement de sa responsabilité la personne physique ou morale poursuivie, la solution retenue par le droit administratif n’est pas toujours celle-ci. En effet, l’identification d’un cas de force majeure n’exclut pas obligatoirement l’engagement de la responsabilité des personnes publiques, suivant une jurisprudence qui paraît aujourd’hui solidement établie et dont les membres de la doctrine se font l’écho. Ainsi, le juge administratif, estimant que tel phénomène doit être qualifié d’événement de force majeure, peut décider, selon les circonstances de chaque espèce, qu’une exonération totale ou partielle doit l’emporter. Il y aura exonération totale si la force majeure apparaît être la cause exclusive du dommage. En revanche, l’exonération sera seulement partielle si les conséquences dommageables d’un événement de force majeure sont aggravées par le fait du défendeur. On va ainsi atténuer la responsabilité sans pour autant la faire disparaître. Il ne faut pas oublier que la force majeure exonère totalement ou partiellement aussi bien dans les régimes de responsabilité pour faute que dans les hypothèses de responsabilité sans faute. Cela constitue une différence remarquable par rapport au cas fortuit qui n’exonère jamais dans les systèmes de responsabilité sans faute (C.E., 28 novembre 1986, Communauté urbaine de Lille, Droit administratif 1987, n°50). Le cas fortuit est défini en droit public comme un événement imprévisible, irrésistible mais non extérieur au défendeur. Dans le domaine de la responsabilité pour faute, qui recouvre une multitude de situations, Jean-François Couzinet estime que la présence réelle d’un cas de force majeure n’efface pas immédiatement la responsabilité de la personne publique. Le " …juge vérifie qu’effectivement, en l’espèce, aucune faute administrative n’ait été commise qui aurait eu une influence sur la production du dommage" 104. La doctrine reste partagée en ce qui concerne la cause de l’exonération. Pour certains auteurs, c’est parce que la force majeure est irrésistible qu’elle entraîne une exonération de responsabilité car le fait de force majeure ne pouvait pas être évité ou atténué 105. Pour d’autres, comme la force majeure est extérieure à la personne publique, il n’y aurait plus de lien de causalité entre le dommage et la personne publique 106. Pour Jean-François Couzinet, en matière de responsabilité pour faute “ le caractère irrésistible de la force majeure est suffisant pour justifier l’exonération ”. En ce qui concerne la responsabilité sans faute, la force majeure exonère, selon la doctrine, parce qu’elle fait disparaître le lien de causalité entre le préjudice et le fait imputable à la personne publique. Selon Jean-François Couzinet, la force majeure exonère ici seulement parce que l’événement est totalement extérieur à la personne publique 107. Sur les 17 décisions identifiant un événement de force majeure, le juge administratif (pas seulement le Conseil d’Etat) reconnaît une exonération totale seulement dans 7. Dans les autres, il décèle des exonérations uniquement partielles qui correspondent à deux hypothèses. Il nous a paru intéressant de prendre en compte l’analyse du Conseil d’Etat mais aussi des autres juridictions administratives. 104 loc. cit., p. 1408 Cf. LAMARQUE et MODERNE, A.J.D.A, 1972, p.316 106 BONNARD, Note sous C.E., 25 janvier 1929, Compagnie du gaz de Beauvais, Sirey, 1929, III, 83 ; CHAPUS , Responsabilité publique et responsabilité privée, thèse de doctorat, Paris 1954, p. 444 107 loc. cit., p.1413 105 70 En premier lieu, c’est la défectuosité d’un ouvrage public, son mauvais entretien ou bien l’exécution de travaux publics qui facilitent la réalisation des dommages, permettant uniquement une exonération partielle. Ainsi, d’une part, le juge administratif retient une exonération seulement partielle : lorsque l’aggravation de la situation provient des procédés d’évacuation des eaux insuffisants (C.E., 23 décembre 1988, Ville de Sèvres, n°70.883 ; C.A.A. de Nancy, 6 juillet 1991, Commune de Lachy), ou défectueux (C.A.A. de Nantes, 27 mai 1993, n°92NT00039, Meriadec/Compagnie des eaux et de l’ozone), ou encore de “ l’existence de deux buses placées dans le canal de Berry…ces buses [ayant] formé un obstacle à l’écoulement normal des eaux ” (C.E., 10 mai 1989, n°38.611, Commune de Saint-Amand-Montrond-Département du Cher-Ministre de l'agriculture). D’autre part, le défaut d’entretien des collecteurs et réseaux d’assainissement a amené la Cour administrative d’appel de Paris à retenir une exonération partielle (C.A.A. de Paris, 5 juin 1990, n°89PA01808, Ministère de l’équipement/Daligault). Au-delà, le Tribunal administratif de Lyon semble être allé encore plus loin en affirmant qu’un pont, propriété d’une commune, constitue un obstacle au débit d’un cours d’eau “ que l’obstacle a été accentué par l’accumulation de branches, d’herbes et de divers objets flottants, qu’un barrage s’est formé et a détourné les eaux du lit du cours d’eau ”, et qu’il “ est à l’origine des conséquences dommageables de l’inondation des bâtiments…cet ouvrage public a aggravé ces conséquences par rapport à ce qu’elles auraient été en son absence ” (26 juin 1997, n°9204836, Société Proud et Compagnie Cigna). En second lieu, la faute du défendeur, qui aggrave le dommage, ne permet, elle aussi, qu’une exonération partielle. Jusqu'à présent seule la faute lourde du service concerné était prise en considération par le juge : - C.E. 25 mai 1990 Abadie, Recueil p.1026, A.J.D.A. 1990 p.824, R.D.P. 1991, p.1462 “ les pluies…ont présenté…les caractères d’un événement de force majeure ; que dès lors, la responsabilité de l’Etat à l’occasion de ces inondations ne peut être retenue que pour autant que les conséquences dommageables de cet événement ont été aggravées par un ouvrage public appartenant à l’Etat par rapport à ce qu’elles auraient été en son absence ou que les services de l’Etat ont commis des fautes lourdes ayant pu avoir pour conséquence d’aggraver les dommages subis par les requérants ”. Il convient de se demander, néanmoins, si l’exigence d’une faute lourde va demeurer dès lors que le juge est de plus en plus enclin, depuis quelques années, à supplanter la nécessité d’une faute lourde au profit de l’exigence d’une faute simple 108 alors que la responsabilité de l’Etat du fait de l’exercice du contrôle de légalité sur les actes des collectivités locales ne peut être retenue qu'en cas de faute lourde109 . voir le cas des services de lutte contre l’incendie : C.E., 29 avril 1998, Commune de Hannappes, R.D.P. 1998, p. 1001, note X. PRETOT ; des services de secours : C.E., 20 juin 1997, Theux, Dalloz 1999, sommaire commenté, p. 46, observations P. BON et D. de BECHILLON 109 C.E., 21juin 2000, Commune de Roquebrune-Cap-Martin, R.D.P., 2000, p.1257; C.E., 6 octobre 2000, Commune de Saint Florent, A.J.DA., 2001, p. 201 108 71 La force majeure en droit administratif peut exonérer totalement ou partiellement. Cette appréciation relève exclusivement du juge. Celui-ci semble le plus souvent privilégier la seconde solution, sans doute ici aussi pour ne pas oublier les victimes, d’autant plus que la situation a parfois été aggravée par l’attitude d’une personne publique. 72 §3 Le partage de responsabilité entre la personne publique et les victimes en cas d’absence de reconnaissance de la force majeure Le fait que la force majeure ne soit pas systématiquement retenue, n'implique pas nécessairement la responsabilité pleine et entière du défendeur, ici la personne publique. En effet, il serait faux de penser que lorsque le juge se refuse à qualifier tel événement de cas de force majeure cela implique automatiquement l’engagement de la responsabilité de la personne publique. On peut ainsi relever plusieurs décisions juridictionnelles par lesquelles le juge administratif retient un partage de responsabilité en raison d'une faute de la victime, principalement de l'imprudence de celle-ci, en dépit de la connaissance, par cette dernière, du risque. Quelques exemples sont, sur ce point, révélateurs. Ainsi, le Conseil d’Etat a considéré que l'inondation d’une commune, du fait de pluies non qualifiées d’événement de force majeure (car, selon le juge, elles n’étaient pas imprévisibles) trouvait son origine dans le mauvais aménagement des collecteurs d’eau mais aussi dans l'imprudence des victimes qui n’avaient pas installé sur leur canalisation un dispositif propre à empêcher le reflux des eaux en provenance des égouts dans le sous-sol de leur habitation, contrairement aux prescriptions du règlement sanitaire départemental (C.E., 10 juillet 1981, n°17.733, Commune d'Ermont). Le juge conclut à un partage de responsabilité entre la commune et les victimes. Au-delà, le Conseil d’Etat a aussi retenu cette solution à la suite d’un dommage causé par une inondation du fait de l’insuffisance du réseau départemental d’évacuation des eaux de pluies et de l’absence de précaution de la victime entreposant “ dans son sous-sol un matériel coûteux et des stocks avariables ” (C.E., 9 juin 1982, n°23.625 , Préfet de la Seine-SaintDenis). Enfin d’autres exemples de partage de responsabilité en l’absence d’identification d’un cas de force majeure peuvent être simplement cités (C.E., 26 avril 1985, n°36.098, Département de la Marne contre M. Fransoret : mauvais entretien d’un ouvrage public départemental et imprudence de la victime qui savait sa parcelle exposée au risque d’inondation ; C.E., 28 janvier 1987, n°62.327, M. Torgano/commune de Chassagne-montrachet : dommage lié à l’existence d’un ouvrage public mais imprudence du propriétaire qui savait sa maison particulièrement exposée au risque inondation ; C.E., 14 décembre 1990, n°46.796, Société provençale d'équipement-Ministre de l'Urbanisme et du Logement : mauvaise conception du réseau d’évacuation des eaux mais les sociétés ont commis une imprudence en s’installant dans une zone dont elles ne pouvaient ignorer le caractère inondable sans prendre les précautions imposées par la nature des lieux). Ainsi, alors même qu’aucun cas de force majeure n’est identifié, dans de nombreuses décisions le juge administratif souligne que le dommage est issu des agissements des personnes publiques mais aussi de l’attitude des victimes. Le plus souvent, elles ont construit là où elles ne devaient pas, alors qu’elles le savaient. Le juge en déduit alors logiquement que la responsabilité du dommage ne relève pas uniquement de la personne publique. Ainsi, il prend en compte l'absence de précaution de la victime, ce qui atténue en conséquence l’importance de l’indemnisation de cette dernière. 73 Chapitre 2 : La typologie des éléments de la force majeure exonératoire de responsabilité Il convient de se pencher sur deux aspects intéressants. Tout d’abord, il s’agit de souligner la façon dont la force majeure est présentée par le juge administratif (§1). Il conviendra ensuite d’aborder les effets éventuels produits par la présence d’un arrêté de catastrophe naturelle (§2). §1 : L’appréciation factuelle de la force majeure Le juge administratif paraît, dans la majorité des cas, peu enclin à expliquer la ou les raisons qui le poussent à juger qu’un événement ne caractérise par un cas de force majeure (A). Au-delà, le juge présente parfois des explications dans lesquelles la place des critères communément admis dans l'identification de la force majeure est très variable (B). A) Un manque réel d’explications données par le juge administratif sur l’inexistence d’un événement de force majeure Lors d'une précédente étude "Responsabilité, Risques et Catastrophes Naturelles" d'avril 1998, menée par l'Institut Français de Recherches et d’Etudes sur la Sécurité, en réponse à l'appel d'offres “ Recherche juridique en environnement ” du Ministère de l'Environnement, Géraldine Derozier a rédigé une note sur la force majeure110. Nous ne pouvons qu'approuver l'auteur lorsqu'il constate que “ pour les événements d'origine naturelle, l'extériorité est, par définition réalisée. Les deux autres critères de la force majeure - imprévisibilité et irrésistibilité- sont, eux plus difficilement identifiables ”. Or, très souvent la force majeure est rejetée en bloc par le juge administratif sans qu’il s'exprime réellement sur le ou les critères faisant défaut. Ainsi, pour établir un ordre de grandeur, sur l’ensemble des décisions juridictionnelles étudiées, c’est seulement dans environ 70 cas que le juge administratif explique pour quelle(s) raison(s) il juge qu’on ne peut qualifier de cas de force majeure tel ou tel événement. Dans plus de 180 décisions, aucune explication n’est présentée, le juge se contentant d’affirmer simplement qu’il n’y a pas de force majeure. Le juge est même allé jusqu’à employer une formule bien mystérieuse : “ événement non assimilable à un cas de force majeure ” (C.E., 10 mai 1985, n°33.460, Entreprise Roginsky/Ville de Saintes…). Le plus souvent, il estime qu’il n’y a pas force majeure par l’utilisation de formules lapidaires telles : - “ malgré l'intensité exceptionnelle des pluies ” (C.E., 11 mars 1983, n°17.752, Communauté urbaine de Lyon/Société “ Papeterie F. Dumas ”), - “ malgré leur abondance exceptionnelle ” (C.E., 29 avril 1983, n°22.893, Ministre des Transports/Société “ Les Maïseries du Nord ”), - “ malgré leur importance exceptionnelle ” (C.E., 14 décembre 1984, n°31.195, Communauté urbaine de Lyon/Société OBBO), 110 G. DEROZIER, "Réflexions à propos du jugement du Tribunal administratif de Grenoble, 2 juin 1994, M. Claude Raymont et autres", p. 100 à 115 74 - “ malgré l’importance et l’intensité exceptionnelle des pluies orageuses (C.E., 17 janvier 1986, n°48941, 49.390, 49.953, Syndicat intercommunal d’assainissement du Rû de Marivel…/Ministre de l’Urbanisme et du Logement). La mise en place des Cours administratives d’appel, et les premiers arrêts de celles-ci, ne les ont pas conduit à expliciter systématiquement leur appréciation de l’inexistence d’un cas de force majeure. Ainsi, dans une majorité des cas, comme le fait le Conseil d’Etat, elle ne donne aucune explication. Le juge administratif paraît donc moins enclin que le juge civil à affiner l'appréciation de la force majeure eu égard à des éléments factuels. Néanmoins un certain nombre de décisions sont plus éclairantes. B) L'existence de décisions juridictionnelles explicitant pourtant quelque peu les caractéristiques de la force majeure L’extériorité ne pose pas a priori de difficulté dans le domaine des événements naturels telles des inondations. Néanmoins, lorsque la responsabilité de l’Etat est recherchée en matière d’inondation, on peut se demander si la ou les causes de cet événement ne se trouvent pas dans l’inaction des autorités étatiques à prendre telles ou telles mesures de nature à limiter les effets climatiques désastreux de telle industrie ou de telle activité. Ainsi, il est possible de croire que l’intervention de l’Etat voire son inaction à agir provoque des changements notamment climatiques pouvant aboutir à une recrudescence des inondations, excluant dès lors toute possibilité de découvrir un événement extérieur permettant d’identifier un cas de force majeure. Au-delà, il faut essayer de cerner quels sont les autres critères retenus par le juge administratif et tout particulièrement, mais pas seulement, le rôle des caractères imprévisible et irrésistible de l’événement cause du dommage. L'appréciation de l'imprévisibilité peut être tout à fait laconique, celle de l'irrésistibilité est quasi inexistante. Toutefois, récemment, le Conseil d'Etat a exigé davantage de précisions de la part des juges administratifs. Ainsi le 16 octobre 1995, il a reproché aux juges du fond de ne pas fournir suffisamment d'éléments (n°150.319, M. et Mme Meriadec/Compagnie des eaux et de l’ozone) : “ La Cour administrative d’appel de Nantes s'est bornée à relever "qu'il résulte de l'instruction que ces précipitations ont présenté, en raison de leur violence et de leur intensité exceptionnelles et imprévisibles, le caractère d'un événement de force majeure" ; qu'en se bornant à faire référence aux résultats de l'instruction et en s'abstenant de préciser les faits sur lesquels a porté son appréciation, la Cour administrative d'appel ne met pas le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la qualification juridique qu'elle a donnée à ces faits ”. Une telle analyse a, peut être, porté ses fruits en ce qui concerne le cyclone Firinga, où les époux Roux et la société Fideco Réunion cherchaient à engager la responsabilité de l'Etat et de la commune de Saint-Pierre. Le 11 mars 1993, la Cour administrative d'appel de Paris considère, s'agissant des eaux “ que leur violence et leur volume ont été tels que l'inondation…était inévitable…les chutes de pluies ont présenté sur la région de la commune de Saint-Pierre, en raison de leur violence et de leur intensité exceptionnelles et imprévisibles par rapports à tous les précédents connus ” un caractère de force majeure (Société Fideco Réunion/Etat et commune de Saint-Pierre et Miquelon). Or, par une décision du 16 octobre 1996, le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt du 11 mars 1993, estimant que la Cour administrative d’appel ne mettait pas le juge de cassation en mesure “ d’exercer son contrôle sur la qualification des faits ” (S.A. Fideco Réunion, n°148970). Le 4 novembre 1999, la Cour 75 administrative d’appel de Paris, à laquelle le Conseil d’Etat a renvoyé l’affaire, se livre à une analyse détaillée des événements climatiques à grand renfort de chiffres et de cotations pour en conclure que les pluies qui ont accompagné le cyclone ont présenté le caractère d’un événement de force majeure “ en raison de leur violence et de leur intensité exceptionnelles et imprévisibles, y compris au regard de leur occurrence dans la période annuelle traditionnelle de l'activité cyclonique qui s'étend à l'île de la Réunion de janvier à mars ” (n°96PAO4314, Société Fideco Réunion). Ainsi, le Conseil d’Etat exige une précision suffisante des juges du fond afin, lorsqu’il est saisi, qu’il puisse se prononcer en toute connaissance de cause. Dans le cas contraire, il censure ce manque de précision. Il faut tout d’abord examiner les éléments, qui pour le juge, permettent de caractériser l’imprévisibilité (1). Il s’agira ensuite de faire de même pour ce qui est de l’irrésistibilité (2). Il conviendra enfin d’aborder le caractère exceptionnel (3). 1°) Les critères de l'imprévisibilité Est imprévisible, l’événement qui n’a pas pu être prévu. Si la doctrine s’accorde sur cette définition, tout se complique dès lors que l’on cherche à découvrir précisément à quoi l’imprévisibilité correspond dans l’esprit du juge administratif. Le laconisme de ce dernier est d’ailleurs pour beaucoup dans l’incertitude qui règne autour de ce caractère entrant dans la définition de l’événement de force majeure. Pourtant, deux aspects semblent se dégager de la jurisprudence : le caractère temporel de l’événement imprévisible (a) et son aspect géographique (b). a) Critères temporels Les membres de la doctrine qui ont étudié la notion d’imprévisibilité au regard de la jurisprudence administrative s’accordent à identifier ce concept principalement d’un point de vue temporel. Ainsi, rappelons que pour Jean-Marie Pontier111, dont l’idée est reprise par Géraldine Derozier112, dans le silence du juge, l’imprévisibilité est composée de quatre caractéristiques : la soudaineté, la durée, l’intensité et la probabilité de l’événement. Selon Erwan Le Cornec, au contraire, “ seule la probabilité se rattache comme critère déterminant à l’imprévisibilité, les autres éléments se rattachant à la condition de l’irrésistibilité ”113. L’examen minutieux des décisions juridictionnelles laisse un sentiment mitigé en raison de l’absence de ligne de conduite claire et uniforme retenue par les juges administratifs. En effet, les formules auxquelles ces derniers se réfèrent sont souvent mystérieuses et rendent ainsi délicate la compréhension du point de vue qu’ils adoptent. Très fréquemment, on rencontre les expressions “ malgré leur intensité ”, “ malgré leur importance et leur intensité ”, “ malgré leur intensité exceptionnelle ”, “ malgré leur soudaineté et leur importance exceptionnelles ” les événements n’ont pas le caractère de violence imprévisible. De telles formulations laissent perplexes car on peut les interpréter comme impliquant que l’intensité, l’importance et la soudaineté ne sont pas des critères de l’imprévisibilité. Mais, ces expressions peuvent aussi être comprises comme impliquant peut être que l’intensité, tout comme notamment la soudaineté, sont bien des caractères de l’imprévisibilité, le juge voulant seulement signifier que les événements n’avaient pas atteint 111 loc. cit., p. 11 loc. cit. 113 loc. cit., p.203 112 76 un degré d’intensité ou de soudaineté tel qu’ils puissent permettre de considérer qu’il y a réellement une imprévisibilité. Les juridictions administratives admettent parfois l’existence d’un événement de force majeure en s’appuyant sur l'imprévisibilité appréhendée d’un point de vue temporel. Tel est le cas dans l’arrêt M. et Mme Roux où la Cour administrative d’appel de Paris (11 mars 1993, n°91PA00858) juge qu’il y a événement de force majeure “ imprévisibles par rapports à tous les précédents connus ”, (lire aussi C.A.A. de Paris, 11 mars 1993, Société Fideco-Réunion, n° 91PA00859). Dans le même sens T.A. Marseille, M. Bourdon contre Département des Bouches du Rhône, 29 janvier 2000, n° 94-5759 : “ les pluies qui sont à l’origine de l’inondation litigieuse ont présenté, en raison de leur extrême violence et de leur fréquence de retour probablement centennale, le caractère d’un événement de force majeure ”. En revanche, des juges considèrent comme prévisibles, et rejettent ainsi la qualification d’événement de force majeure, des “ précipitations compte tenu des précédents connus dans la région à cette période de l’année ” ( C.A.A. de Nancy, 6 août 1996, Ministre de l’équipement, des transports et du tourisme, Département des Vosges, n° 94NC01354). Ils retiennent également cette solution, donnant ainsi à l’imprévisibilité un caractère temporel, dans les arrêts concernant des régions cycloniques où ils jugent souvent que les pluies à l’origine d’une inondation, étaient prévisibles dans une telle région, et donc qu’elles s’étaient déjà produites auparavant : - C.A.A. de Paris, Ville de Nouméa contre Epoux Rolland, 22 octobre 1991, n° 89PA02589 : “ les précipitations qui se sont abattues le 13 janvier 1988 sur Dumbéa lors du passage du cyclone “ Anne ” ne constituaient pas, eu égard à leur caractère prévisible dans une telle région...un événement de force majeure ”. Dans le même sens, à propos de l’affaire du Grand Bornand, la Cour administrative d’appel de Lyon estime que la sortie de son lit par le torrent Le Borne était prévisible car des inondations s’étaient déjà produites précédemment (C.A.A. Lyon, 13 mai 1997, Balusson, n°94LY00923). En effet, la Cour souligne qu’en plusieurs occasions au cours du 19ème siècle mais aussi le 8 juillet 1936, de violents orages avaient provoqué des inondations. - Ainsi, le juge estime que le risque d’inondation était prévisible en raison de ce qui était arrivé dans le passé et notamment 50 ans avant, “ quelle que soit la violence de la crue à l’origine de la catastrophe constatée, l’événement à l’origine des dommages subis par les demandeurs n’était pas imprévisible et ne peut, dès lors, être assimilé à un cas de force majeure ”. Dans ces hypothèses, c’est l’aspect probable ou improbable de l’événement qui semble important. Néanmoins, et cela souligne le flou de l’analyse des juges administratifs, il arrive que certains d’entre eux rapprochent les critères de l’imprévisibilité et de l’irrésistibilité tout en dissociant l’imprévisibilité des phénomènes semblables à ceux en cause apparus précédemment. Ainsi, pour la Cour administrative d'appel de Nancy, - “ L'Etat ne peut être dégagé de sa responsabilité pour les dommages causés par une crue intervenue en 1980 en se fondant sur la force majeure alors que la rivière en cause avait déjà connu d'importantes inondations avant 1973 et que la crue de 1980 ne présentait pas un caractère imprévisible et irrésistible ” (C.A.A. Nancy, 9 juillet 1992, Société Spie. Batignolles, n°90NC00150). 77 Dès lors, une telle jurisprudence jette un doute sur l’idée selon laquelle seul le caractère imprévisible nécessite de prendre en compte l’existence éventuelle de précédents comparables. Mais la plupart du temps, les juges administratifs n’expliquent pas leur prise de position en faveur de la reconnaissance ou non du caractère imprévisible de l’événement. De nombreux arrêts considèrent simplement que l'événement n'est pas imprévisible, ce qui exclut la force majeure. b) Critères géographiques Il arrive parfois que les juges administratifs prennent en compte la situation rencontrée sur le lieu où les dommages sont intervenus pour décider si le critère de l’imprévisibilité est présent ou non. Tel est le cas par exemple dans l’arrêt Commune du Vernet c./GMF et consorts (C.E., 28 février 1986, n°42258) où la haute juridiction prend en compte la situation de la localité où l’inondation est intervenue. Ainsi, le camping municipal inondé se situait sur des terrains exposés à des crues importantes alors qu’aucun travail de défense contre les eaux n’avait été accompli ni aucune précaution efficace adoptée pour permettre l’évacuation des installations de manière rapide. Dès lors, “ Dans les circonstances de l’espèce, la crue de l’Ariège…n’a pas revêtu le caractère d’un événement de force majeure ”. Telle est aussi la situation rencontrée dans l’arrêt Territoire de la Nouvelle-Calédonie et dépendances, MM. Jollivel et Ludeau (C.E., 25 mars 1988, n° 56809) dans lequel on lit que les pluies avaient un “ caractère prévisible dans une telle région ”. Au-delà, avec l’arrêt Commune d'Etting c/M. Bena (CE, 19 mai 1989, n°71308) le Conseil d’Etat affirme que “ si les relevés pluviométriques produits par la commune font état d’une hauteur de pluie de 74,5 mm tombée en 24 heures, exceptionnelle pour la région, ces pluies n'ont cependant pas présenté un caractère imprévisible ”. On peut aussi lire l’arrêt M. et Mme Mériadec du 30 décembre 1996 dans lequel la Cour administrative d’appel de Nantes indique “ la grande variabilité de l’importance des précipitations orageuses en fonction des conditions locales ne permettent pas de considérer que les pluies à l’origine de l’inondation…ait eu un caractère imprévisible ” (n° 95NT01504). Par certaines décisions, les juges combinent les considérations temporelles et géographiques pour déceler ou non un événement imprévisible. Ainsi, on découvre dans l’arrêt M. et MM. Mériadec la formule “ tant le caractère très récent des relevés des stations de Maison Blanche et de Portzic que la grande variabilité de l’importance des précipitations orageuses en fonction des conditions locales ne permettent pas de considérer que la violence des pluies à l’origine de l’inondation…ait eu un caractère imprévisible ” (préc.). Divers arrêts laissent croire que pour certains juges, le critère de l’intensité ne suffit pas à lui seul pour permettre de qualifier un événement d’imprévisible. Ainsi, dans l’arrêt S.N.C.F. c/ Consorts Berthon, la Cour administrative d’appel de Lyon précise qu’“ à supposer même que les précipitations…aient revêtu une force particulière, il n’est pas établi qu’elles étaient imprévisibles ” (24 mars 1994, n°92LY00520). 78 On retrouve une telle analyse dans l’arrêt Ville de Nouméa contre Epoux Rolland où “ les précipitations…ne constituaient pas, eu égard à leur caractère prévisible dans une telle région, et malgré la violence, un événement de force majeure ” (22 octobre 1991, n°89PAO2589 ; Dans le même sens, C.A.A. de Paris, Société d’importation de pharmaciens réunis, 17 mai 1994, n°92PA01030 “ eu égard à leur caractère prévisible dans une telle région, [les précipitations] n’ont pas constitué, malgré leur violence, un événement de force majeure ”). Ainsi, selon certains juges, la violence ou l’intensité des pluies ne permet pas à elle-seule d’identifier un événement de force majeure, il faut aussi qu’il y ait imprévisibilité, comme si cette dernière était distincte de la violence ou de l’intensité des précipitations. Le critère de l’imprévisibilité est souvent mentionné dans les décisions du Conseil d’Etat et des Cours administratives d’appel. Cela ne permet pourtant pas toujours de déceler ce à quoi il correspond précisément pour le juge. En effet, soit celui-ci le présente sans véritablement indiquer ce qu’il recouvre, soit il le combine avec le critère de l’irrésistibilité sans, là encore, donner les explications qui permettraient de comprendre les points de vue retenus. Au-delà, assez souvent, le juge se réfère explicitement seulement à l’intensité, à la violence des précipitations et indirectement à la probabilité qu’elles surviennent ou non, sans dès lors se référer, en tout cas explicitement, à la soudaineté ainsi qu’à la durée de celle-ci (pour une exception, C.E., Commune d’Etting, op.cit., prise en compte de pluies d’une hauteur de 75,5 mm tombées en 24 heures, sans qu’il y ait pourtant de caractère imprévisible), ce qui pourtant apparaît pour une partie de la doctrine comme caractérisant les éléments qui permettent d’identifier un événement imprévisible. Ainsi, le critère de l’imprévisibilité est foncièrement subjectif en ce sens qu’il correspond à ce que le juge veut bien en faire en raison des incertitudes, qu’il entretient sans aucun doute, lui permettant de disposer d’une marge d’action plus importante. 79 2°) La notion d’irrésistibilité L’événement irrésistible est celui qui n’a pas pu être évité ou dont on n’a pas pu arrêter les effets. Pour M. Bénoit “ en matière de responsabilité administrative générale, l'imprévisibilité se fond dans l'irrésistibilité ”114. Selon Géraldine Derozier, ne l’oublions pas, le juge étudie l’imprévisibilité et l’irrésistibilité sous le seul vocable d’imprévisibilité 115. Or, l'irrésistibilité est très rarement invoquée par les juges administratifs, ce qui ne facilite pas la détermination de l’éventuelle importance de ce critère dans la définition de la force majeure. Ainsi, la prise en compte explicite de cette caractéristique, afin d’identifier un cas de force majeure, ne se rencontre que dans trois décisions, une du Conseil d’Etat, une de la Cour administrative d’appel de Lyon, une dernière de la Cour administrative d’appel de Bordeaux. Dans un arrêt du 28 janvier 1983, on peut lire “ en dépit de leur intensité, les chutes de pluies violentes qui se sont abattues les 13 et 14 octobre 1974…ainsi que la rupture de digues…n’ont pas présenté le caractère d'événements imprévisibles et irrésistibles consécutifs d’un cas de force majeure ” (C.E., 28 janvier 1983, Société d’économie mixte Estérel Côte d’Azur, n°20177). La Cour administrative d’appel de Lyon fait, elle-aussi, référence à l’irrésistibilité dans une décision du 22 janvier 1991 (Ministre de l’équipement, du logement, des transports et de la mer c/M. Cinquini, n°90LY00135) : “ les pluies qui se sont abattues…n’ont pas présenté, en dépit de leur importance, un caractère imprévisible et irrésistible tel qu’elles doivent être regardées comme constituant un cas de force majeure ”. La solution est la même dans l’arrêt rendu le 12 juin 2001 par la Cour administrative d’appel de Bordeaux (Commune de Saint Denis, n°97BX02312). Dès lors, on pourrait croire que la dimension irrésistible d’un événement ne joue quasiment jamais dans l’identification d’une force majeure, ce qui mettrait à mal la trilogie retenue par la doctrine afin de déceler la force majeure. Néanmoins, la question est de savoir si le juge administratif ne s’appuie pas implicitement sur ce caractère. Au-delà, dans ces deux jurisprudences, le rapprochement effectué par les juges entre l’imprévisibilité et l’irrésistibilité ne donne lieu à aucune explication, comme si ces deux critères étaient très proches l’un de l’autre voire se confondaient l’un avec l’autre. On pourrait même croire que c’est parce que l’événement est très important qu’il est à la fois imprévisible et irrésistible. Mais alors, qu’est-ce qui peut justifier que les juges distinguent les deux critères ? Aucune explication ne nous est donnée. Dans les autres jurisprudences, aucune référence explicite, et donc claire, à l’irrésistibilité ne se rencontre. Cela veut-il pour autant signifier que ce critère n’entre pas ou n’entre plus dans l’identification d’un cas de force majeure ? Certains membres de la doctrine, parmi lesquels Jean-François Couzinet, ne le croient pas, considérant que c’est de manière implicite que le juge administratif se réfère à l’irrésistibilité. Il semble que les juges, alors même qu’ils ne citent pas celle-ci, s’y réfèrent au moins implicitement, car si un événement avait pu être évité, on ne voit pas ce qui empêcherait d’engager la responsabilité d’une personne publique. Il arrive que les juges prennent en compte le caractère inévitable d’un événement. Mais, si cet aspect paraît d’emblée caractériser la dimension irrésistible d’une situation, le juge ne semble pas qualifier celle-ci d’irrésistible en raison de cet aspect inévitable. Tel est le cas dans l’arrêt Compagnie marseillaise de Madagascar (C.E., 27 juillet 1988, n°50977) où après avoir 114 115 BENOIT, Le droit administratif français, Dalloz, 1968, n°1094 loc. cit. 80 indiqué la présence d’une force majeure “ en raison de leur violence et de leur intensité exceptionnelles et imprévisibles ”, le juge, bien après, fait état du caractère inévitable du débordement. Dans le même sens : C.A.A. de Paris, 11 mars 1993, Société Fideco-Réunion, n°91PA00859 : il y a événement de force majeure en raison de la violence et de l’intensité exceptionnelle et imprévisible par rapport à tous les précédents connus des chutes de pluies et “ leur violence et leur volume ont été tels que l’inondation des locaux de la société…était inévitable ”. Il serait grand temps que le juge administratif, et particulièrement le Conseil d’Etat, détermine avec précision ce à quoi correspond l’irrésistibilité et si elle doit être prise en compte de manière claire et explicite par les juges administratifs. Cela permettrait de clarifier leur prise de position sur les éléments constitutifs d’un cas de force majeure. 81 3°) Le caractère exceptionnel de l’événement climatique Les décisions juridictionnelles rendues sur les inondations et dans lesquelles se pose le problème de savoir s’il y a un événement de force majeure, conduisent parfois les juges à prendre en compte la dimension exceptionnelle ou non d’un événement. Il s’agit de découvrir quelle est la place de cet aspect par rapport aux autres critères permettant, en théorie, de caractériser un cas de force majeure. Il est exact que le Conseil d’Etat et des Cours administratives d’appel emploient souvent des formules où l’adjectif exceptionnel est utilisé : “ intensité exceptionnelle ”, “ caractère exceptionnel ”, “ durée exceptionnelle ”, “ importance et intensité exceptionnelles ”, “ violence exceptionnelle ”, “ pluviosité exceptionnelle ”…Pour un exemple lire l'arrêt du Conseil d'Etat en date du 10 mai 1989 (Commune de Saint-Amand Montrond - Département du Cher - Ministère de l'agriculture, n°38611) : les inondations ont été la conséquence des précipitations exceptionnelles qui se sont abattues sur le département, “ après une période de plus de vingt jours de pluies anormalement abondantes…des précipitations particulièrement abondantes sont tombées sur un sol déjà gorgé d'eau…en raison de son abondance et de sa durée exceptionnelle, cette concentration pluviométrique a présenté les caractères de la force majeure ”. Lire également C.A.A. Marseille, Syndicat du canal de Carpentras, 25 juin 2001, n°98MA00481 : orage qui “ n’était pas en lui-même d’une violence exceptionnelle constitutive d’un cas de force majeure ”. Il semble donc ressortir de la jurisprudence, la nécessité souvent invoquée que l’événement soit exceptionnel dans sa survenance, dans son intensité, dans sa violence, dans son importance ou sa durée. Certains arrêts combinent d’ailleurs ces différents aspects. Dès lors, la dimension exceptionnelle de la situation ayant provoqué l’inondation entre souvent, mais pas toujours, en ligne de compte pour déterminer s’il y a ou non force majeure. Dans certains arrêts, le caractère exceptionnel est l’unique critère présenté et permet ainsi, semble-t-il à lui seul, de déceler ou non un événement de force majeure : - “ les pluies tombées…n’ont pas présenté un caractère exceptionnel permettant de les regarder comme constituant un cas de force majeure ” (C.E., 24 octobre 1984, Ville de Toulouse c/Société S.O.A…, n°38753) ; - dans le même sens : C.E., 26 avril 1985, Département de la Marne contre M. Fransoret, n°36098, C.A.A. de Bordeaux, 13 novembre 1995, Commune de Guéret, n°94BX01246, “ les débordements constatés…ne résultent pas d’intempéries de caractère exceptionnel pouvant constituer des événements de force majeure ” ; C.A.A. de Lyon, 6 novembre 2000, Département des Alpes Maritimes, n°95LY01.684 Ainsi, les juges administratifs se réfèrent parfois au caractère exceptionnel de telle ou telle situation pour déterminer s’il y a force majeure ou non. Mais, cela n’a rien de systématique et laisse dès lors penser que l’aspect exceptionnel est l’un des éléments permettant d’identifier l’événement de force majeure sans qu’il soit toujours facile de déterminer le lien entre ce caractère et les critères considérés, de manière classique, comme permettant d’identifier un cas de force majeure. Les décisions juridictionnelles concernant la force majeure laisse le lecteur pantois car elles ne permettent pas de dégager avec certitude ce qui conduit le juge administratif à déceler, dans telle hypothèse une force majeure et dans telle autre aucune force majeure. L’attitude adoptée par les juridictions administratives n’a donc rien de satisfaisant car elle ne clarifie pas la notion de force majeure qui apparaît incertaine dans ses caractéristiques. Dès lors, la force majeure n’est rien d’autre que ce que le juge qualifie comme tel, sans que ses explications soient claires, complètes et convaincantes. 82 83 §2 : La présence d'un arrêté de catastrophe naturelle sans effet décisif sur la reconnaissance de la force majeure L’existence d’un arrêté constatant l’état de catastrophe naturelle ne semble pas mentionnée dans les arrêts du Conseil d'Etat. Au-delà, à notre connaissance, une seule décision de la Haute juridiction indique que l’Etat a déclaré un quartier zone sinistrée (C.E., 22 mars 1985, n°38.875, M. Alain Guiran, cf infra). La présence d’un arrêté constatant l’état de catastrophe naturelle est en revanche invoquée par les tribunaux administratifs et les Cours administratives d'appel (à 18 reprises pour ces dernières, ce qui représente 15,5% de l’ensemble des arrêts des Cours administratives d’appel portant sur les inondations et la force majeure). Or, il est de jurisprudence constante dans les arrêts des Cours administratives d’appel que la publication d'un arrêté ministériel constatant l’état de catastrophe naturelle n’a jamais pour effet de qualifier un événement de force majeure : - C.A.A. Lyon, n°89LY01345, 7 novembre 1990, M. Letourneur : “ circonstances météorologiques inhabituelles n'ayant pas présenté le caractère d'un cas de force majeure nonobstant le fait qu'il ait été désigné comme catastrophe naturelle au sens de la loi du 13 juillet 1982 ” ; - C.A.A. Lyon, 22 janvier 1991, n°90LY00135, Ministère de l'équipement/Cinquini : “ il résulte de l'instruction que nonobstant la circonstance qu'elles aient justifié un arrêté déclaratif de catastrophe naturelle, les pluies qui se sont abattues…à l'endroit du sinistre n'ont pas présenté, en dépit de leur importance, un caractère imprévisible et irrésistible tel qu'elles doivent être regardées comme constituant un cas de force majeure ” ; - C.A.A. de Paris, 19 septembre 1991, n°89PA00541, Commune de Livry-Garagnan/M. Grumelard et M. Bouvier : “ l’orage qui est à l’origine du sinistre n’a pas présenté le caractère d’un événement de force majeure, alors même que l’état de catastrophe naturelle a été constaté… ” ; - C.A.A. Lyon, 2 février 1993, n°92LY00163, Commune de Bellerive sur Allier : la commune n’établit pas l’existence d’une force majeure en faisant valoir qu’un arrêté ministériel a été édicté ; - C.A.A. Lyon, 19 avril 1994, n°93LY00948, Département de la Haute Corse/Hoiri : “ La déclaration de l’état de catastrophe naturelle ne suffit pas nécessairement à établir le caractère de force majeure exonératoire… ” ; Dans le même sens : - C.A.A. Nancy, 19 mai 1994, n°93NC00046, Département du Jura. - C.A.A. Lyon, 21 mars 2000, n°95LY01443, Association syndicale d’assainissement et d’irrigation par le canal du Réal - C.A.A. Lyon, 21 mars 2000, n°95LY01444, Association syndicale d’assainissement et d’irrigation par le canal du Réal Ainsi, dans aucune des décisions examinées, la force majeure n'est reconnue en raison de la présence d'un arrêté de catastrophe naturelle. Dès lors, comme l’écrit Maryse Deguergue, la force majeure ne se présume pas. Récemment, le Tribunal administratif de Montpellier mais aussi des Cours administratives d’appel ont utilisé une formule qui laisse penser que l’existence d’un arrêté de catastrophe naturelle est un élément parmi d’autres, dès lors non suffisant, qui peut permettre au juge administratif d’en déduire, selon les circonstances, qu’il y a ou non événement de force majeure : 84 - TA Montpellier, 13 mai 1994, Cie d'assurances Le Continent SA/Commune de Poulx : “ La circonstance selon laquelle l'orage ayant provoqué l'inondation a été considérée comme une catastrophe naturelle, ne suffit pas à établir la force majeure ” ; - C.A.A. Lyon, 15 juin 1994, n°91LY00615, Département de la Haute Corse, Commune de Bastia ; C.A.A. Bordeaux, 3 avril 1995, (2 espèces : n°93BX01043, n°94BX00378) Commune de la Tour-sur-Orb, Consorts Boyer ; - C.A.A. Paris, 12 septembre 1996, n°93PA00366, Association syndicale autorisée des propriétaires du domaine de Grandchamp “ la circonstance que l’inondation…s’est vue reconnaître par arrêté ministériel le caractère d’une catastrophe naturelle, cet arrêté ne suffit pas, à défaut d’autres précisions, à établir le caractère de force majeure ”. Ainsi, dans l’attente d’une intervention du Conseil d’Etat, des juridictions inférieures semblent admettre que la publication d’un arrêté de catastrophe naturelle peut, dès lors qu’elle s’accompagne “ d’autres précisions ”, formule au demeurant extrêmement vague, conduire le juge à considérer que tel événement est ou n’est pas un cas de force majeure. 85 TITRE III Inondations : responsabilité et force majeure en droit pénal Par Caroline LACROIX On assiste depuis quelques années à un développement du contentieux pénal lié aux risques naturels. Le droit pénal possède un certain nombre d’infractions susceptibles de s’appliquer en cas d’inondation. Aujourd’hui les victimes et la société demandent de plus en plus, même dans le cadre de la réalisation de risques naturels, que les personnes soient reconnues coupables de ces faits, surtout lorsque des vies humaines sont en jeu. Cette demande existe à l’encontre des simples particuliers, des professionnels et des agents publics tels que les maires. Il a été procédé à une interrogation juris-data aux fins de collecter des décisions qui auraient été rendues dans le champ de la recherche, rares sont pour l'instant les décisions intéressant directement notre sujet. En revanche, il convient de faire remarquer que les magistrats sont sensibles à la question. En effet, dans un arrêt de la Cour d’appel de Paris (chambre 143 section b du 20 septembre 1996, juris-data n°022391), dans un contentieux relatif au droit de l’urbanisme, les juges ont estimé nécessaire de préciser que : “ La situation dramatique due aux nombreuses inondations ayant eu lieu sur le territoire français depuis quelques années, doit impérativement commander le respect des règles de l’urbanisme. De plus, la situation n’est pas régularisable et il existe un risque important pour les habitants ”. Signalons également une décision récente retenant le délit de mise en danger d'autrui pour le non-respect de l'interdiction d'exercer une activité dans une zone inondable 116. Si le contentieux pénal n’est pas très développé en matière d’inondation, il est possible de faire un parallèle avec ce qui se passe dans le cadre d’autres risques naturels car le droit pénal est appelé à connaître un essor en matière d’inondation : aujourd’hui, l’affaire du Grand-Bornand relèverait du juge pénal. Il existe un contentieux important relatif aux avalanches transposable en matière d’inondations, la problématique mise en œuvre étant identique. Il est nécessaire de préciser dans une remarque liminaire les fondements de la mise en jeu de la responsabilité pénale. Les poursuites ont lieu principalement dans le cadre de la responsabilité pour délits d’imprudence à l’encontre des différents auteurs. Cette responsabilité intervient sur les fondements des articles 226-1, 222-19 et 229-20 du Code pénal réprimant les homicides et blessures involontaires. Selon l’article 221-6 du Code pénal ( nouveau texte) : “ Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3 CP par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement la mort d’autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. En cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende ”117. 116 117 Crim., 31 janvier 2001, juris-data n° 008587 anciennement, respectivement 300 000 et 500 000 francs 86 De même, l’article 222-19 du Code pénal prévoit que : “ Le fait de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois est puni de 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. En cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende ”118. Les actions intentées sont alors dirigées contre plusieurs groupes de personnes : les particuliers, les professionnels et enfin les décideurs publics. En effet, ces derniers sont investis d’un pouvoir général de police. L’article L 2122-24 du Code général des collectivités territoriales dispose que : “ le maire est chargé sous le contrôle administratif du représentant de l’Etat dans le département, de l’exercice des pouvoirs de police dans les conditions prévues aux articles L 2212-1 et suivants ”. Notamment, l’article L 2212-2-5° précise que la police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : “ (…) le soin de prévenir, par des précautions convenables et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux, ainsi que les pollutions de toutes natures, tels les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels… ”. La violation de ces obligations constitue le point d’ancrage sur lequel va pouvoir se greffer la mise en œuvre de la responsabilité pénale des maires. La jurisprudence étudiée dans le champ de cette recherche a été rendue sous l’empire de la loi du 13 mai 1996. Or est intervenue une modification législative avec l’entrée en vigueur de la loi du 10 juillet 2000 redéfinissant les délits non intentionnels ( article 121-3 du Code pénal). Le nouvel article 121-3 al. 3 et 4 du Code pénal prévoit que : “ Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer ”. 118 anciennement, respectivement 200 000 et 300 000 francs 87 Enfin l’évolution de notre société tendant vers une plus grande sécurisation, le droit pénal accompagne ce mouvement avec l’article 223-1 CP relatif à la mise en danger d'autrui. Il s’agit là d’un champ d’incrimination appelé à connaître un essor important et dont il convient de mesurer l’effet en jurisprudence. Comme en matière de droit civil, dans le cas de dommages causés par un élément naturel, la force majeure permet alors de faire échec à une action en recherche de responsabilité. Chapitre 1 : La notion juridique de la force majeure en droit pénal à travers la doctrine et la jurisprudence de la Chambre criminelle de la Cour de cassation La force majeure n’est pas ignorée du droit pénal. On trouve à deux reprises cette notion dans le code pénal. L’article 121-3 du Code pénal dispose qu’ “ il n’y a point de contravention en cas de force majeure ” et selon l’article 122-2 “ n’est pas pénalement responsable la personne qui a agi sous l’empire d’une force ou d’une contrainte à laquelle elle n’a pu résister ”. Les tribunaux répressifs utilisent indifféremment les expressions “ force majeure ” ou “ contrainte ”. La contrainte envisagée par le code pénal évoque nécessairement la force majeure du droit civil, telle qu’elle est prévue par l’article 1148 du Code civil et la jurisprudence. Pourtant, l’autonomie du droit pénal fait que la notion pénale et la notion civile ne se recoupent pas totalement. Le triptyque classique qui forme la force majeure en droit civil, extériorité, imprévisibilité et irrésistibilité, ne se retrouve pas en droit pénal. Le domaine de la contrainte est plus vaste. Le juge pénal qualifie de force majeure toutes les circonstances supprimant la liberté de l’agent. A ce titre, le droit pénal accorde un effet exonérateur à la contrainte physique, d’origine externe ou interne et à la contrainte morale externe. L’élément d’extériorité exigé en droit civil ne l’est pas toujours en droit pénal. Quelle que soit l’origine de la contrainte, celle-ci devient cause d’irresponsabilité, ce qui signifie qu’elle ne fait pas disparaître l’infraction mais seulement la responsabilité personnelle de l’auteur d’une infraction. Quelle que soit la nature de l’infraction, celle-ci est susceptible d’obtenir le bénéfice de la force majeure. La chambre criminelle avait rappelé dans un arrêt du 15 mars 1988 (pourvoi n° 87-83.428) que la force majeure était aussi applicable aux délits matériels (ces derniers ont été supprimés depuis l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal) : “ Pour tenter d’échapper aux poursuites, le prévenu avait soutenu que ses installations d’épuration fonctionnaient normalement et que la concentration de substances inoffensives en période ordinaire, mais devenues nuisibles par excès, était imputable à la réduction considérable du débit de la rivière consécutive à la sécheresse qui sévissait alors (…) ”. La Cour d’appel en écartant le fait justificatif de la force majeure a méconnu les principes de l’article 64 du code pénal (nouvel article 122-2 CP). 88 Dans le domaine qui nous intéresse plus directement, nous étudierons la contrainte physique externe. Celle-ci peut provenir d’une force de la nature, telles la foudre, les tempêtes, les inondations…. ainsi les juges retiennent-ils la contrainte en faveur du propriétaire d’un mur qui s’est écroulé sur la voie publique du fait de pluies torrentielles (Crim., 28 juillet 1881). Selon une formule classique de la jurisprudence, “la contrainte au sens de l’article 122-2 du code pénal ne peut résulter que d’un événement indépendant de la volonté humaine et que celle-ci n’a pu ni prévoir ni conjurer ” (Crim., 8 mai 1974, Bull. crim. n°165). Elle doit résulter d’ “un événement imprévisible et insurmontable ” (Crim., 31 octobre 1963, Bull. crim. n° 302). La force majeure doit être irrésistible et imprévisible. Il est donc nécessaire d’étudier ces deux éléments constitutifs de la force majeure en droit pénal, que la jurisprudence apprécie généralement de façon rigoureuse. 1°) L'imprévisibilité Cette condition ne paraît pas être requise aux termes de l’article 122-2 du Code pénal, mais a été imposée par les tribunaux. Ces derniers excluent le bénéfice de la contrainte en cas de faute antérieure de l’agent (génératrice de la dite force majeure). La contrainte prévisible n’est jamais exonératoire. Ainsi, en a-t-on refusé le bénéfice à un marin pour désertion parce qu’il n’avait pas rejoint à temps son navire alors qu’il était en garde à vue pour ivresse. L’arrêt Trémintin indique : “ la contrainte, physique ou morale, ne peut être retenue que si elle est imprévisible, c’est à dire notamment, si elle n’a pas été occasionnée par une faute de ce lui qui l’invoque ” (Crim., 29 janvier 1921). De même, a-t-on refusé la faveur de la contrainte lors de poursuites pour blessures ou homicide involontaire à un automobiliste dont la voiture, tombée en panne d’essence, glisse sur une flaque d’eau résultant d’un violent orage (Crim., 14 octobre 1975, D. 1975, I.R., 230, Bull. crim. n° 215). Celui qui par sa faute, se trouve contraint de commettre une infraction, ne peut pas prétendre que cela était imprévisible. La jurisprudence restreint le bénéfice de la nonimputabilité résultant de la contrainte aux seuls individus objectivement étrangers à l’acte qui leur est reproché. 2°) L'irrésistibilité La loi et la jurisprudence posent comme condition que l’agent doit se trouver dans l’impossibilité de résister à la force qui le contraint. La jurisprudence interprète avec rigueur cette condition. Ainsi, dans un arrêt de la chambre criminelle du 8 février 1936 (arrêt Rozoff), la contrainte doit être irrésistible, ce qui implique une impossibilité absolue de se conformer à la loi. Elle se montre sévère dans son interprétation de la contrainte, par exemple, dans ce cas, elle a estimé en cas de violation d’un arrêté d’expulsion, que la contrainte ne pouvait résulter que de la preuve que la personne s’était vue opposer un refus d’entrée de la part, non seulement de tous les pays limitrophes de la France, mais également de tous les pays du monde. De même, le conducteur qui est surpris par le brouillard mais qui maintient sa vitesse élevée et cause ainsi un accident ne saurait efficacement arguer qu’il a été contraint par un événement irrésistible. En effet, surpris par le brouillard, il avait la possibilité de ralentir, 89 voire de s’arrêter. La force qui doit peser sur l’individu, ne doit pas être une simple difficulté à observer la loi. La jurisprudence réserve le bénéfice de la contrainte aux seuls agents dont la liberté a été totalement neutralisée. Cette impossibilité est appréciée in abstracto par la jurisprudence alors même que l’article 122-2 du Code pénal semblait indiquer une appréciation in concreto (le texte parle de force à laquelle la personne n’a pu résister). L'absence d'irrésistibilité a été invoquée par la partie civile lors du pourvoi en cassation contre l'arrêt d'appel qui avait relaxé les ingénieurs poursuivis pour homicides et blessures involontaires suite à la rupture du barrage de Malpasset survenue le 2 décembre 1959. L'auteur du pourvoi reprochait à la Cour d'appel d 'avoir attribué la cause de la catastrophe à "un piège préparé par la nature" c'est-à-dire à un cas de force majeure alors que, selon les termes du pourvoi "la force majeure doit présenter un caractère imprévisible et irrésistible et que les juges du fond, s'ils ont longuement insisté sur le caractère imprévu de la rupture du barrage, n'ont à aucun moment recherché le caractère irrésistible de la cause de cette rupture". La Chambre criminelle rejette toutefois le pourvoi au motif que la responsabilité des prévenus avait été écartée car aucune faute n'avait été commise par eux, la Cour n'avait donc pas à justifier de l'existence d'une force majeure (Crim., 7 décembre 1967, Bull. crim., n° 320). 90 Chapitre 2 : La typologie des éléments de la force majeure C’est aux juges du fond qu’il appartient d’apprécier les éléments de fait qui caractérisent ou non la force majeure. La cour de Cassation garde le pouvoir de contrôler l’existence des conditions de la qualification. C’est ce qu’elle rappelle dans son arrêt du 8 octobre 1996 (pourvoi n° 95-81.302). Un ouvrier avait été blessé suite à la chute d’une grue tombée sous de fortes rafales de vent. Les juges soulignent : “ Attendu que, pour relaxer le prévenu et débouter la partie civile de ses demandes, l’arrêt attaqué énonce que le facteur déterminant de la chute de la grue a été la force exceptionnelle du vent, le rôle causal de l’insuffisance de l’ancrage de l’engin n’étant pas établi (…) en statuant ainsi, sans rechercher si la tempête cause de l’accident, présentait les caractères de la force majeure, et si en l’absence d’une telle exonération, une faute d’imprudence ne pouvait être retenue, les juges ont privé leur décision de base légale ”. Pour apprécier si un risque naturel est susceptible de caractériser la force majeure, les juges peuvent s’aider d’autres éléments ou être influencés par une décision administrative, telle la prise d’un arrêté catastrophe naturelle. Il ne saurait être question d’admettre une équivalence entre la présence d’un arrêté ministériel de catastrophe naturelle et l’admission par le juge pénal de la force majeure exonératoire. Mais une étude des attitudes jurisprudentielles peut être intéressante. La présence d’un arrêté de catastrophe naturelle est très rarement mentionnée dans la jurisprudence des tribunaux répressifs et de la chambre criminelle, et tout aussi rarement cet arrêté est invoqué à l’appui d’une reconnaissance de la force majeure. Cependant, il est possible d’admettre que, comme en matière civile ou administrative, la seule présence d’un arrêté n’est pas une condition suffisante et nécessaire à la reconnaissance de la force majeure. 91 1°) Les critères de l'imprévisibilité a) Critères temporels Dans les décisions rendues en matière de risques naturels, la survenance antérieure d'un événement analogue supprime toute possibilité d'invoquer l'imprévisibilité. Refus d’imprévisibilité : Avalanche Il s'avère que pour rechercher les responsabilités il convient de procéder à "l'examen d'éléments tels que les conditions nivo-météo du moment, l'antériorité du phénomène…" (Trib. corr. de Tarbes, 20 janvier 1978, Jurisque Avalanche, www.anena.org). - Une avalanche survenue le 22 décembre 1991 sur la station de ski de La Plagne avait enseveli trois appartements du rez de chaussée d'un immeuble faisant un mort. Les magistrats relèvent qu' “ une avalanche était survenue en janvier 1981, qui avait déjà envahi le rez de chaussée du même immeuble, dès lors qu’une avalanche s’est déjà produite en un lieu déterminé, elle ne peut plus être considérée comme imprévisible ” (Trib. corr. Albertville, 26 janvier 1998, avalanche de la Plagne, biblio Cerdacc). Le même raisonnement est tenu en appel (Chambéry, 13 janvier 1999) et confirmé par la Cour de cassation (Crim., 5 janvier 2000, pourvoi n° 99-81.817). En l’espèce sept avalanches avaient déjà eu lieu sur le site en 10 ans dont une qui s ‘était engouffrée dans le même appartement 10 ans auparavant. A l’issue de la procédure le directeur de la société d’aménagement du site et le constructeur seront condamnés pour homicide involontaire. b) Critère géographique Admission de l’imprévisibilité Pluie - Un automobiliste ayant causé un accident mortel est relaxé car "est constitutive de force majeure faisant disparaître l'infraction la présence d'une grande quantité d'eau due à de violentes pluies d'orage sur une route à grande circulation en bas d'une descente" (Caen, 9 février 1987, juris-data n° 050365) Avalanche - Le 10 février 1970, une avalanche avait dévasté un chalet de l'UCPA sur la commune de Val d'Isère et entraîné la mort de 39 personnes. La Chambre criminelle approuve la Chambre d'accusation de Lyon laquelle considère qu'il n'y avait pas lieu de poursuivre le maire en raison de l'imprévisibilité de l'événement : “ En l’état des conditions météos, il était impossible de prévoir qu’une avalanche d’une telle ampleur partirait de la grande Gorge, franchirait l’Isère et pourrait atteindre le chalet ” (Crim., 11 mars 1986, biblio Cerdacc). Il est à noter que pour le même événement, et seulement quelques jours après l'arrêt de la Chambre criminelle, le Conseil d'Etat (14 mars 1986) rejette la force majeure et confirme la responsabilité de l'Etat et de la commune. Verglas - Une voiture dérape sur une plaque de verglas et blesse une personne. La Cour d’appel de Rouen avait constaté que le prévenu, poursuivi pour blessures involontaires, roulait depuis deux heures et avait parcouru 100 Km lorsque l’accident est arrivé, et qu’il n’avait pu prévoir l’existence de la plaque de verglas en l’absence de toute signalisation. La chambre criminelle a estimé que les faits et circonstances de la cause relevaient du pouvoir 92 souverain des juges du fond et ajouté que “ si la présence de verglas sur une route ne saurait, de façon générale et absolue, constituer le fait imprévisible et inévitable caractérisant la force majeure, il n’en était pas de même lorsque, comme en l’espèce les juges du fond constatent que le danger en résultant s’est trouvé en raison des conditions atmosphériques, subitement localisé sur une surface réduite ” (Crim., 18 décembre 1978, Bull. crim., n° 357). Refus d’imprévisibilité Dès lors que l’événement est connu et répertorié dans une carte ou un document, la force majeure est inopérante car le caractère d’imprévisibilité est inexistant. Avalanche - Une avalanche se déclenche alors qu'un moniteur accompagné par trois élèves se trouvent arrêtés à mi-pente, le moniteur soutient que l'avalanche était imprévisible. Le tribunal refuse de reconnaître l'imprévisibilité car “ cette avalanche bien que relativement rare est inscrite au plan d’intervention du déclenchement des avalanches (PIDA) ; attendu qu’une avalanche qui s’était déjà produite le 22 décembre avait dans la station causé plusieurs morts et s’était déclenchée dans les mêmes conditions météorologiques (…) ” (Chambéry, 28 janvier 1982, avalanche du Peigne (les Arcs 1800) du 28 décembre 1980, Jurisque Avalanche www.anena.org ). - Un moniteur de ski accompagne un groupe de skieurs sur un itinéraire hors-piste, le groupe a marqué un temps d'arrêt sur un replat situé à 2200 mètres d'altitude et a été enseveli par une coulée de neige, quatre skieurs ne purent être sauvés, le tribunal correctionnel d'Albertville relève que “ le prévenu n'ignorait pas l'existence de cette avalanche qui s’est déjà déclenchée plusieurs fois dans cette combe, ce qui explique qu’elle figure sur la carte de l’institut géographique national ”. (Trib. corr. Albertville, 7 janvier 1985, avalanche de la Roche de Mio à Champagny, le 12 février 1983, Jurisque Avalanche www.anena.org). - Deux skieurs d'un groupe emmenés par un moniteur sont emportés par une avalanche. Avant de se prononcer sur les responsabilités, les juges soulignent : “ Attendu qu’il importe également de prendre en considération le fait constant que depuis le 26 décembre 1984, treize avalanches avaient déjà causé la mort de quatorze skieurs(…) ” (Chambéry, 22 janvier 1986, avalanche de Tovières à Tignes, Jurisque Avalanche, www.anena.org). - Le 23 février 1997, un couple part faire du ski de fond sur la piste verte de La Daille, ouverte ce jour au public, il est enseveli par une avalanche, le mari décède et son épouse souffre d'une fracture. Il est reproché au maire et au chef des pistes et de la sécurité d'avoir omis de prendre la décision de fermeture de la piste alors que le risque d'avalanche était fort, le danger répertorié à cet endroit et le déclenchement préventif non institué au P.I.P.A. Le tribunal relève que : “ La piste verte de la Daille se trouve dans le couloir de l’avalanche répertorié (…) elle était déjà dans le passé descendue à plusieurs reprises jusqu’à la route, donc plus bas que la piste de la Daille ”. Les deux prévenus, professionnels de la montagne et parfaitement aptes à apprécier les risques en la matière seront condamnés (Trib. corr. Albertville, 7 avril 1997, avalanche de la Daille, Jurisque Avalanche, www.anena.org , biblio Cerdacc) Il résulte des ces décisions que les juges recherchent dans le temps la connaissance acquise sur les risques naturels, ce critère permettant ou non de caractériser la force majeure. 93 Les magistrats dénient l’imprévisibilité lorsque des avalanches comparables ont déjà eu lieu ou que le lieu est réputé avalancheux. Ce raisonnement est donc facilement transposable en matière d’inondation. Une étude historique ou géographique ferait obstacle au bénéfice de la force majeure par défaut d’imprévisibilité, en matière d’inondation si une ou plusieurs crues s’étaient déjà produites par le passé au même endroit, que ce risque eut été répertorié ou connu de mémoire d’homme. Signalons également que l’absence d’imprévisibilité est soulignée par les magistrats après l’effondrement d’une grue sur un bâtiment scolaire (trib. corr. Nancy, 7 juillet 1997, Nancy, 26 mars 1998, biblio Cerdacc). Pour la Cour d’appel, “ ainsi que l’a relevé le tribunal, aucun élément du dossier ne permet d’établir que le vent ait présenté un caractère soudain et imprévisible s’apparentant à des formations cycloniques ”. Le tribunal avait examiné les prévisions météorologiques et notamment les messages d’avertissement standards diffusé la journée du drame et noté “ que le Directeur départemental du centre météorologique a précisé que l’analyse des relevés de vent, sur des sites proches de Toul, par l’homogénéité des relevés constatés, permettait d’avoir un ordre de grandeur transposable sur le site de Toul ; qu’il y aurait eu selon lui un accroissement continu et non brutal de la vitesse du vent, hors de tout phénomène cyclonique, accompagné de phénomènes tourbillonnants très localisés. ” 94 2°) Les critères de l'irrésistibilité Il existe peu de jurisprudence concernant cet élément, peu de discussion à son sujet. Nous avons relevé deux décisions, l'une relative à des chutes de pluie subites et l'autre à un cyclone. Pluie Dans une affaire ne concernant pas une recherche en responsabilité mais ayant trait au déroulement d'une procédure pénale, une chute de pluies ayant entraîné l'inondation des routes a été admise comme circonstance "insurmontable" justifiant le fait qu'un mis en examen n'ait pas pu être extrait pour être présenté au magistrat instructeur : - “ attendu que pour refuser d’annuler l’ordonnance de placement en détention provisoire (…) prise en l’absence de la participation de l’intéressé (…), l’arrêt retient que la réquisition d’extraction n’a pu être mise à exécution en raison de la chute de pluies subites qui ont provoqué une inondation des routes rendant impossible toute circulation à cette date entre la maison d’arrêt et le palais de justice ; attendu qu’en l’état de tels motifs qui caractérisent la circonstance insurmontable ayant fait obstacle à la comparution de la demanderesse devant le juge d’instruction, l’arrêt attaqué a justifié sa décision ” (Crim., 28 mars 2000, pourvoi n° 00-80.099) Vent Les conséquences d'un cyclone ont été considérées comme "insurmontables" pour un employeur : - “ Un cyclone ayant entièrement dévasté une bananeraie exploitée en Martinique (…) c’est à bon droit que pour relaxer l’employeur, prévenu de licenciement fondé sur un motif économique d’ordre conjoncturel, effectués sans autorisation de l’administration compétente, la Cour d’Appel a d’une part déduit des circonstances de la cause que les conséquences du cyclone, à l’origine imprévisibles, étaient insurmontables et que la rupture des contrats de travail résultait, non de la volonté de l’employeur, mais de la force majeure(…) ” (Crim., 4 janvier 1984, Bull. crim., n° 6). 95 3°) L’existence d’une faute Le refus de reconnaître l'imprévisibilité d'un événement naturel peut provenir de la connaissance du risque qu’avait ou qu’aurait dû avoir le défendeur. Cette connaissance du risque constitue alors une faute d’imprudence ou de négligence. Brouillard - Le tribunal correctionnel de Bernay avait à connaître d'une affaire particulièrement difficile, à savoir le monumental carambolage de l'A13 survenu par temps de brouillard le 27 septembre 1997 au niveau de Bourg Achard. Entre 9heures 50 et 10 heures 30, 134 véhicules et 224 personnes se trouvèrent impliquées dans un accident gigantesque faisant 12 morts et 94 blessés. Pour leur défense les prévenus avancent notamment qu’il s'agissait en l'espèce d'un cas de force majeure, le tribunal réfuta l'argument : “ La présence du brouillard est signalée par les services de la société des autoroutes (…) Les prévenus confirment la présence du brouillard depuis le matin et le début de leur déplacement, et signalent une intensité variant selon le lieu. (…) Dans la mesure où les conditions météorologiques très mauvaises sont connues de tous depuis le début des déplacements, sont clairement signalées par les services de la SAPN (Société des autoroutes ParisNormandie), et où les variations de visibilité ont déjà été constatées par les conducteurs, la cause d’irresponsabilité pénale tirée de la force majeure ne peut-être retenue puisque le phénomène météorologique n’est plus imprévisible et doit inciter les automobilistes à la plus grande prudence, même sur une autoroute. ” (Trib. corr. Bernay, 4 septembre 2000, JAC n° 11, http://www.iutcolmar.uha.fr/cerdacc/ , commentaire Marie-France SteinléFeuerbach) 119 Risque montagne - Un skieur, guide de haute montagne, provoque une avalanche en pratiquant du "ski sauvage", une personne est blessée et une autre tuée, sa culpabilité est retenue car “ Le déclenchement d’un phénomène naturel, tel une avalanche n’est exclusif de toutes poursuites pénales que si celui qui a provoqué cette avalanche n’a commis aucune faute dans la pratique normale et prudente des sports de haute montagne ; Tel n’est pas le cas, du guide de haute montagne qui a commis l’imprudence de se livrer sur une neige vierge au ski hors piste, alors que les autorités locales avaient signalé le danger d’avalanche ” (Crim., 13 novembre 1980, Bull. crim., n° 298). - Deux lycéens, qui suivaient un stage de préparation sportive en vue du baccalauréat, trouvent la mort dans une avalanche le 8 mars 1988, vers 10 heures 30, alors qu'ils En revanche, la force majeure a été admise pour le carambolage de l’A 10 du 10 novembre 1993 ayant fait de nombreuses victimes, les prévenus ont fait valoir qu’ils se sont trouvés confrontés à des circonstances imprévisibles constitutives d’un cas de force majeure, à savoir un mur de fumée qu’ils ont confondu avec une nappe de brouillard. Le tribunal correctionnel de Poitiers, le 14 mars 2002 (biblio Cerdacc) a été sensible a leur argumentation : “ La conjugaison de l’ensemble des éléments physiques ci-dessus décrits constitue le cas de force majeure au sens de l’article 122.2 du Code Pénal et de l’article 64 de l’ancien Code Pénal. L’écran de fumée, le ‘’trou noir’’ évoqué par la plupart des automobilistes ne permettait pas de pouvoir réagir en temps utile à l’obstruction totale des 2 voies de circulation : il s’agit d’une contrainte extérieure à laquelle les automobilistes n’ont pu résister malgré la manœuvre de ralentissement et de freinage à laquelle ils ont prudemment procédé ” ; le Parquet a interjeté appel général à l’encontre de cette décision 119 96 skiaient sur la piste de liaison reliant le domaine skiable de la commune de Villard de Lans à celui de la commune de Corrençon en Vercors. La Cour d'appel de Grenoble confirme, le 5 août 1992, la condamnation pénale du maire de la commune prononcée par le tribunal correctionnel de Grenoble le 14 novembre 1991 : “ (…) le maire n’a tenu compte ni du rapport de l’ONF, ni des recommandations du préfet, ni des bulletins de service de la météorologie nationale ; il n’a pris aucune disposition consistant à ordonner la fermeture de la piste alors qu’il n’existait par ailleurs aucun dispositif permettant un déclenchement artificiel des plaques neigeuses qui auraient permis l’élimination du risque ; le tribunal correctionnel de Grenoble en a déduit à bon droit que le maire avait commis une faute de négligence, d’imprudence, et d’inobservation des règlements en relation de causalité directe avec le décès des deux skieurs ; le maire doit donc être déclaré coupable du délit d’homicides involontaires ”. Les magistrats ont estimé que le maire devait se tenir personnellement informé du risque pour décider en toute connaissance de cause des mesures de polices à prendre pour assurer la sécurité des skieurs en l’état d’un risque notoire. (Grenoble, 5 août 1992, Avalanche à Corrençon en Vercors du 8 mars 1988, Jurisque Avalanche www.anena.org, biblio Cerdacc). - Un moniteur de ski prend en charge cinq clients pour une sortie hors-piste, une avalanche déclenchée par trois skieurs en amont emporte trois membres du groupe. La responsabilité pénale des skieurs ayant déclenché l'avalanche est retenue car “ ces trois professionnels expérimentés avaient connaissance des conditions nivologiques défavorables(…) ils ont pris néanmoins le risque de casser une corniche ” (Trib. corr. Albertville, 13 janvier 1997, Jurisque Avalanche, www.anena.org, biblio Cerdacc). - Trois skieurs de fond effectuent une sortie sur la piste verte de La Daille à Val d'Isère. Une avalanche ensevelit les trois skieurs, en tuant une et en blessant une autre. La responsabilité du maire et celle du chef de piste sera retenue. Le tribunal relève que : “ Les deux prévenus sont des professionnels de la montagne parfaitement aptes à apprécier les risques en la matière. Ainsi, face à l’existence le jour des faits d’un risque fort et prévisible d’avalanche pouvant atteindre la piste de la Daille, il appartenait tant à M.C., responsable de la sécurité en matière d’avalanche sur la commune en sa qualité de maire, qu’à M. N., agent municipal, chef des pistes et de la sécurité, de décider de fermer la dite piste au public. Il s’agissait d’une décision, simple d’exécution, que les intéressés n’auraient eu aucune difficulté, technique ou autre, à mettre en œuvre. En s’abstenant de le faire, les prévenus ont commis une faute en relation directe avec les blessures subies par Mme P. et le décès de M. L. ” (Trib. corr. Albertville, 7 avril 1997, Jurisque Avalanche, www.anena.org, biblio Cerdacc). - Le 1er janvier 1996, sur le domaine skiable de l'Alpe d'Huez, une avalanche se déclenche sur une piste noire ouverte. Plusieurs personnes sont emportées, l'une d'entre elles est ensevelie et décède. Cette piste, non damée du fait de sa raideur, était ouverte pour la première fois de l'année. Une reconnaissance ainsi que des tentatives de purge avaient été effectuées la veille sans résultat. Il est reproché au chef de secteur ainsi qu'au directeur de la sécurité des pistes de ne pas avoir suffisamment sécurisé la piste. Pour la Cour d'appel de Grenoble, “ L’étude réalisée par une personne du centre d’étude de la neige prouve que les pentes supérieures du cirque de Sarenne se trouvaient dans un état d’instabilité très marqué, proche de la limite de déclenchement naturel spontané et que dès lors, les responsables techniques de la société d’aménagement touristique ont commis une faute en autorisant l’ouverture des pistes dans de telles conditions : l’accumulation d’une très 97 grande quantité de neige fraîche instable était en effet nécessairement connue ; la raideur de la pente rendait le risque parfaitement prévisible. Manifestement, les techniciens de la société d’aménagement se sont fiés à l’absence de précédents connus en ce lieu pour estimer que le risque d’avalanche y était négligeable : la force de l’habitude a pu ainsi abolir leur esprit critique. Il en résulte donc que la décision d’ouvrir la piste de Sarenne est constitutive d’une faute qui doit être considérée comme la cause de décès. ” (Grenoble, 25 février 1998, Jurisque Avalanche, www.anena.org, biblio Cerdacc). En conséquence, la Cour d'appel de Grenoble retient la responsabilité du chef de secteur et du directeur des pistes. Ces condamnations seront confirmées en cassation (Crim., 9 novembre 1999, Jurisque Avalanche, www.anena.org). Toute la question réside dans l’appréciation de la faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement. En effet, un comportement qui cause involontairement un résultat dommageable, n’est sanctionnable pénalement que si une faute est établie. Dans le cadre des infractions non intentionnelles, la faute peut prendre deux formes : soit la violation d’un texte, c’est à dire “ le manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement ”, soit en l’absence de tout manquement à une telle règle, la faute découle du fait de ne pas se conduire, dans un domaine d’activité considéré, comme un homme normalement prudent et diligent, ce qui renvoie à l’imprudence, la négligence, l’inattention, la maladresse. La jurisprudence a longtemps apprécié l’imprudence ou la négligence in abstracto, c’est à dire par référence au “ bon père de famille ”. La loi du 13 mai 1996 avait opéré une modification de l’article 121-3 du code pénal précisant que le juge était désormais tenu d’apprécier la faute d’imprudence in concreto, en tenant compte de la situation de l’auteur de l’infraction, de ses compétences et de son autorité (“ de la nature des ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait ”). Cette loi avait été essentiellement introduite en vue de limiter la responsabilité pénale des élus locaux, mais elle ne l’a finalement pas circonscrite de façon satisfaisante120. De plus, la jurisprudence estimait qu’en matière d’infraction d’imprudence, n’importe quelle faute engageait la responsabilité pénale de son auteur si elle avait causé un dommage, y compris de façon indirecte et non exclusive, compte tenu du principe d’équivalence des conditions. La faute était répréhensible dès lors qu’elle avait concouru à la réalisation du dommage. Une nouvelle modification de l’article 121-3 du code pénal a été introduite par la loi du 10 juillet 2000. Celle-ci distingue en matière de délits d’imprudence selon la gravité de la faute et la nature du lien de causalité. Ou bien il existe un lien direct entre la faute et le dommage, et dans ce cas l’appréciation de la faute reste identique à celle faite sous l’empire de la loi du 13 mai 1996 ; ou bien le lien est indirect et le concept de causalité indirecte correspond à deux hypothèses. Soit “ les personnes ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis sa réalisation ”, soit “ n’ont pas pris les mesures nécessaires permettant d’éviter le dommage ”. Par exemple, un maire qui n’ordonnerait pas la fermeture d’un établissement qui reçoit du public et où un incendie se déclarerait ensuite serait responsable pénalement. Il sera exigé une faute qualifiée en cas de causalité indirecte entre la faute et le dommage, consistant soit en une faute de mise en danger délibérée soit en une faute caractérisée 120 M.F. STEINLE-FEUERBACH, " La responsabilité pénale des maires en cas de catastrophe (au regard des procès de Bruz et de Barbotan) ou la fausse nouveauté de la loi n° 96-393 du 13 mai 1996", J.C.P., 1997, I, 4O57 98 exposant autrui à un risque grave. Dans ce cas, la faute devra alors présenter un certain degré de gravité. Elle devra ensuite exposer autrui à un risque grave et le dommage devra être prévisible. Enfin il faudra constater que la personne poursuivie ne pouvait ignorer ce risque. Ainsi, dès lors qu’un décideur public aura été alerté de l’existence d’un risque, de quelque manière que ce soit et qu’il restera inactif, sa responsabilité pénale sera susceptible d’être engagée si un accident se produit. La nouvelle loi a pour objectif l'allégement du risque pénal pour les auteurs indirects. Toutes les solutions jurisprudentielles présentées ne vont pas être bouleversées, les solutions pour les fautes ayant directement concouru à la réalisation du dommage restent identiques. Seules celles concernant les auteurs indirects seront appréciées différemment. Cependant, l'allégement du risque pénal dans ce cadre n’aura qu’un effet réduit en présence de la connaissance du danger. Une abstention ou une omission d’agir, alors même que le risque est connu, est susceptible de caractériser la faute grave permettant d’entrer en voie de condamnation à l’encontre des auteurs indirects. Ainsi la solution retenue par Cour d'appel de Grenoble, le 5 août 1992, qui avait condamné pour la première fois un maire de station de montagne au motif qu’il n’avait pas agi pour assurer la sécurité des skieurs alors même qu’il avait été prévenu des risques prévisibles d’avalanche resterait identique. Aujourd’hui, cette abstention pourrait être constitutive d’une “ faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer ” (article 121-3 al. 4 CP)121. On notera que dans les arrêts relatifs au risque montagne, dès lors que les prévenus sont des professionnels, cette qualité est relevée par les juges : en tant que professionnels ils se doivent de mesurer les risques. 121 Ce point sera développé dans la seconde partie de cette étude 99 CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE En droit civil, la collecte des décisions relatives aux inondations nous permet, confortée par les décisions concernant d’autres événements naturels, de cerner l’opinion du juge. Celui-ci accepte la force majeure exonératoire en cas d’inondation dans une proportion de 25% environ, son appréciation étant plus sévère envers un constructeur ou un vendeur d’immeuble lesquels ne bénéficient de l’exonération que dans moins de 15% des contentieux. Parmi les trois éléments classiques de la force majeure exonératoire, l’extériorité suscite peu de discussion. S’agissant de l’imprévisibilité, les juges se réfèrent aux événements antérieurs, sans toutefois être liés par leur récurrence, également à la situation géographique des biens, et dans ce cas la connaissance du risque implique le rejet de l’imprévisibilité. Quant à l’irrésistibilité, elle est admise dès lors que l’homme est impuissant à faire face aux déchaînements des éléments de la nature ou que toute mesure de prévention était vouée à l’échec ; mais l’irrésistibilité est refusée lorsque le dommage est lié à une faute, à un manque de précaution. La présence d’un arrêté de constatation de l’état de catastrophe naturelle suffit rarement à caractériser la force majeure mais peut constituer un élément d’appréciation pour les magistrats. C’est en droit administratif que la collecte de décisions relatives à la recherche de responsabilités consécutives à des dommages occasionnés par des inondations a été la plus riche, elle révèle que le juge administratif est très peu enclin à admettre qu’une inondation est un événement constitutif de force majeure puisqu’il ne reconnaît celle-ci que dans environ 6,5 % des contentieux qui lui sont soumis. La force majeure exonératoire doit présenter les trois mêmes caractères qu’en droit civil, toutefois son admission n’emporte pas nécessairement une exonération totale. La condition d’extériorité ne soulève guère d’objection. La question est plus délicate en ce qui concerne l’imprévisibilité et l’irrésistibilité car le laconisme des juridictions administratives rend difficile l’analyse de l’approche du juge. Le critère de l’imprévisibilité est subjectif et l’irrésistibilité est très rarement invoquée. L’attitude du juge administratif ne clarifie pas la nature de la force majeure laquelle apparaît bien incertaine. L’existence d’un arrêté conférant à une inondation la qualification de catastrophe naturelle est pour le juge administratif un élément parmi d’autres, non suffisant en lui-même pour caractériser la force majeure. Le triptyque classique de la force majeure en droit civil et en droit administratif ne se retrouve pas en droit pénal lequel a de la contrainte une conception plus large. Bien que des pertes humaines aient été à déplorer lors d’inondations, nous n’avons pas connaissance à ce jour de condamnation pour homicide ou blessures involontaires. Toutefois, le juge pénal a été saisi suite à des atteintes corporelles ou des décès provoqués par d’autres événements naturels, plus particulièrement des avalanches. Si le nombre de décisions rendues n’est pas suffisamment important pour nous permettre d’avancer des pourcentages, il nous est pourtant possible de constater que pour le juge pénal, la survenance d’un événement naturel n’est pas un facteur d’irresponsabilité. 100 DEUXIEME PARTIE : Les dispositifs légaux et réglementaires : entre déresponsabilisation et recherche de responsabilité Par Marie-France STEINLE-FEUERBACH Avec la collaboration d’Hervé ARBOUSSET pour les éléments de droit public En 1982, le législateur a souhaité lier indemnisation et prévention ; il importe de faire le point sur l’efficacité de la loi par rapport à ces deux objectifs (Titre I). Dès lors que le risque inondation existe, il ne doit pas être ignoré. L’absence avérée de prise en considération de ce risque n’est pas sans incidence juridique (Titre II) 101 TITRE I La loi n° 82-600 du 13 juillet 1982 relative à l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles Suite à d'importantes inondations notamment dans les vallées de la Saône, du Rhône et de la Garonne en 1981 et 82, le législateur organisa l'indemnisation des victimes des catastrophes naturelles par la loi n° 82-600 du 13 juillet 1982, complétée par les lois n° 90-509 du 25 juin 1990, n° 92-509 du 16 juillet 1992, puis par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 (dite loi Barnier) et enfin par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002. La loi avait pour objectif de combiner indemnisation et prévention, ceci notamment par l’instauration des plans de prévention des risques (PER). Le Parlement, par cette disposition législative intégrée au Code des assurances (articles L.125-1 et s.), abandonne l’idée de secours appliquée jusque là aux calamités publiques, au profit d’une garantie des effets des catastrophes naturelles par une extension de garantie obligatoire dans les contrats d’assurance couvrant les dommages aux biens. Il est à noter que seule l'indemnisation des dommages aux biens est organisée par le législateur 122. Le législateur avait à choisir entre un système de solidarité nationale et un système fondé sur l'assurance. A l'issue des débats parlementaires, le choix s'est porté sur un système mixte original fondé à la fois sur la solidarité et sur l'assurance avec la garantie de l'Etat. Que faut-il entendre par catastrophe naturelle 123,une réponse un peu vague est donné par l’alinéa 3 de l’article L. 125-1 du Code des assurances (dans sa rédaction actuelle) qui définit les effets des catastrophes naturelles comme étant - "les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel lorsque les mesures habituelles de prévention n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises". La prévention est donc expressément visée par cette disposition. Le terme "non assurable" limite le champ d'application de la garantie 124. C'est bien parce qu'ils sont assurables depuis 1990 que les effets du vent ne peuvent en principe être 122 Fin avril 1996, la Fédération française des sociétés d'assurances avait proposé au Gouvernement d'étendre la garantie aux cyclones tropicaux et aux dommages corporels. Dans le rapport présenté en juin 1996 au Parlement (Rapport présenté par le Gouvernement au Parlement en application de l'article 83 de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, 7 juin 1996), le Gouvernement se montre très réticent envers les propositions des assureurs. Je vous livre les dernières lignes de ce rapport : "Il apparaît essentiel de renforcer en amont les mesures de prévention des risques naturels qui conditionneront en grande partie l'avenir du mécanisme institué en 1982. C'est la raison pour laquelle la préservation de la sécurité du système actuel d'indemnisation doit précéder toute réflexion sur l'extension éventuelle de son champ d'application qui ne saurait, dans les conditions actuelles, être envisagée qu'avec la plus extrême prudence". Finalement l’extension de garantie a eu lieu pour les cyclones les plus importants (loi n° 2000-1207 du 13 décembre 2000), mais la question du dommage corporel n’a pas été abordée dans des négociations menées en 1999. Il n'y a donc pas de prise de position gouvernementale en faveur d'une indemnisation du dommage corporel. 123 Voir not. H. MARGEAT et J.M. MICHEL, "La loi sur les catastrophes naturelles (Loi n° 82-600 du 13 juillet 1982 - J.O. 14 juillet p. 2242)", Gaz. Pal., 1984, 2, 500 102 indemnisés au titre des catastrophes naturelles. Entrent en revanche dans la catégorie des "cat'nat" des événements tels que : inondations, séismes, mouvements de terrain, raz de marée, avalanche... et depuis la loi d'orientation pour l'Outre-mer n° 2000-1207 du 13 décembre 2000, “ les effets du vent dû à un événement cyclonique pour lequel les vents maximaux de surface enregistrés ou estimés sur la zone sinistrée ont atteint ou dépassé 145 km/h en moyenne sur dix minutes ou 215km/h en rafale ”125 sont soumis au régime des catastrophes naturelles. Ensuite, l'intensité de l'agent naturel doit avoir été anormale. Alors que l’article 125-1 du Code des assurances ne vise que les dommages causés par un agent naturel, le champ d’application de la garantie des catastrophes naturelles est depuis quelques semaines élargi, par la loi n°2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité126, aux sinistres liés aux effondrements de terrain provoqués par la présence de marnières ou de cavités souterraines dont l’origine réside le plus souvent dans une intervention de l’homme et non de la nature. Sont toutefois expressément exclus les dommages résultant de l’exploitation d’une mine. L’article L.125-1 alinéa 1 modifié du Code des assurances énonce désormais : - “ Les contrats d'assurance, souscrits par toute personne physique ou morale autre que l'Etat et garantissant les dommages d'incendie ou tous autres dommages à des biens situés en France, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles et des affaissements de terrain dus à des cavités souterraines et à des marnières sur les biens faisant l'objet de tels contrats. ” Le régime repose sur l'assurance, la garantie est obligatoirement rattachée à un contrat d'assurance dommage. Seuls les biens assurés par une garantie "dommages" sont donc indemnisés, il s'agit des contrats dommages aux biens (incendie, vol, multirisque habitation...) et de ceux couvrant les dommages relatifs aux véhicules terrestres à moteur. Si l'assuré est en outre couvert contre les pertes d'exploitation, cette garantie est étendue aux effets des catastrophes naturelles. Afin que toutes les personnes puissent bénéficier de la garantie cat'nat, celles qui ont essuyé un refus d'assurance de la part de deux compagnies peuvent s'adresser au Bureau central de tarification (BCT) lequel imposera à une compagnie d'assurer le demandeur (art. L. 125-6 al.6). Il convient de souligner qu’à notre connaissance, le BCT n'est en fait intervenu qu’à quelques reprises127. Le régime repose également sur la solidarité nationale puisque la prime à payer par les assurés ne dépend pas du taux de sinistralité de la région où se situent leurs biens. Le taux de prime est le même pour tous. Ce taux, initialement 9% de la garantie dommage, est passé à 12% par 124 L'inapplication de la garantie des catastrophes naturelles aux dommages normalement assurables n'était pas édictée par les dispositions de la loi du 13 juillet 1982. Mais le principe contraire prévalait et la constatation de l'état de catastrophe naturelle n'intervenait le plus souvent que si les événements naturels étaient inassurables. Depuis la loi no 92-665 du 16 juillet 1992, JO 17 juillet, les dommages matériels directs indemnisés par la garantie catastrophe naturelle doivent être “ non assurables ” ; voir Lamy Assurances, 2002, n° 1645 125 art. L. 122-7 du Code des assurances, alinéa 1 modifié 126 art.159, IV, JO du 28 février 2002 127 9 interventions ont été portées à notre connaissance 103 un arrêté du 3 août 1999128. Le principe de solidarité sur lequel repose le régime d'indemnisation peut être mis en œuvre grâce à la garantie financière de l'Etat par l'intermédiaire de la caisse centrale de réassurance (CCR). La CCR assure l'équilibre du système. La CCR a fait appel à la garantie de l'Etat pour une avance de quelques 2,7 milliards de Francs à la suite des inondations dans le Sud-Ouest en novembre 1999 et des événements de décembre 1999. La garantie due par l'assureur est déclenchée par la parution d'un arrêté interministériel de constatation de l’état de catastrophe naturelle. Nous avons pu constater que si la présence d'un arrêté de catastrophe naturelle peut constituer un élément d'appréciation de la force majeure par le juge elle n'implique pas, et de loin, la reconnaissance de la qualification de force majeure à l'événement. Cette position des juges peut surprendre si on s'attache à la lettre de l'alinéa 3 de l'article L. 125-1 du Code des assurances issu de la loi du 13 juillet 1982 En effet, l'anormalité de l'agent naturel laisse supposer que l'événement est exceptionnel et donc imprévisible, et le fait que la survenance de l'événement n'ait pu être empêchée laisse présager l'irrésistibilité. Et pourtant, ainsi que nous avons pu le constater dans la Première Partie de cette étude, la réalité n'est guère conforme à la lettre de l'article 125-1. Il convient donc de s'interroger quant aux raisons de cette différence d'appréciation entre les pouvoirs publics et les magistrats en se penchant sur les objectifs de la loi du 13 juillet 1982 (Chapitre 1) avant d’aborder la vision des assureurs (Chapitre 2). Par ailleurs, le Cerdacc a envoyé un questionnaire à 5718 communes de France ayant fait l’objet d’au moins deux arrêtés de constatation de l’état de catastrophe naturelle pour inondation depuis 1995. Les très nombreuses réponses obtenues nous permettent de connaître la position des communes face au risque inondation (Chapitre 3). 128 Il s’agit des biens autres que les véhicules terrestres à moteur, pour ces derniers le taux est de 6% 104 Chapitre 1 : La loi du 13 juillet 1982 : entre indemnisation et prévention L'institution d'un lien entre la prévention et l'indemnisation figurait parmi les intentions du législateur de 1982, même si sa préoccupation première était l'indemnisation. La loi de 1982 présente la particularité de mêler indemnisation et prévention, mais également, et sur les deux volets, les rôles des pouvoirs publics et des assureurs. Pourtant, ainsi que le constate un rapport présenté par le Gouvernement au Parlement en juin 1996, le principe général d'un lien entre prévention et indemnisation est resté à bien des égards lettre morte dans les faits, "de façon générale, le phénomène parfois constaté de reconnaissance multiple de l'état de catastrophe naturelle dans les mêmes zones à la suite de la réalisation du même risque manifeste l'insuffisance des mesures de prévention susceptibles d'éviter la répétition de sinistres identiques"129. Il est convient de s'interroger sur le rôle des pouvoirs publics tant en ce qui concerne l'arrêté déclaratif de catastrophe naturelle (§1) que la prévention (§2). §1 : L'arrêté de constatation de l'état de catastrophe naturelle, déclencheur de l'indemnisation L'article L. 125-1 alinéa 4 du Code des assurances dispose : - “ L'état de catastrophe naturelle est constaté par arrêté interministériel qui détermine les zones et les périodes où s'est située la catastrophe, ainsi que la nature des dommages résultant de celle-ci, couverts par la garantie visée au premier alinéa du présent article ”. L'autorité administrative est donc seule compétente pour reconnaître l'état de catastrophe naturelle130. La circulaire n° 84-90 du 27 mars 1984 précise que, sur proposition du préfet, une commission interministérielle émet un avis sur la base duquel les ministres des Finances et de l'Intérieur constatent l'état de catastrophe naturelle 131. La demande de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle doit être formulée par les maires qui la transmettent au préfet. Celui-ci dispose alors d'un mois pour constituer un dossier destiné à être examiné par une commission interministérielle laquelle émet un avis. Le secrétariat de cette commission est assuré par la Caisse centrale de réassurance. La parution de l'arrêté déclenche le processus assurantiel : l'assuré doit déclarer à son assureur tout sinistre susceptible de faire jouer la garantie dès qu'il en a connaissance et au plus tard 10 jours après la publication de l'arrêté (dommages matériels) ou dans les 30 jours (pertes d'exploitation). L'assureur a alors l'obligation de verser l'indemnité dans les 3 mois à compter de la date de la remise par l'assuré de l'état estimatif des dommages ou de la date de la publication de l'arrêté si elle est postérieure. 129 Bilan du fonctionnement de régime d'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles institué par la loi n° 82-600 du 13 juillet 1982, Rapport présenté par le Gouvernement au Parlement en application de l'article 83 de la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, 7 juin 1996 130 Voir not. Lamy Assurances, 2002, n° 1639 et s. 131 M.B. CRESCENZO-d'AURIAC, "Le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles à l'épreuve du temps, RGAT, 1988, p. 445". 105 En cas d’indemnisation, une somme reste à la charge des sinistrés. Les franchises sont prévues à l’article A. 125-1 du Code des assurances, elles s’élèvent actuellement à 380 euros (2 500 FF) pour les habitations, les véhicules à moteur et les autres biens à usage privé 132 et à 10 % du montant des dommages avec un minimum de 1140 euros (7 500 FF) pour les biens à usage industriel, commercial, artisanal ou agricole. 132 sauf en ce qui concerne les dommages imputables aux mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et/ou à la réhydratation des sols, pour lesquels le montant de la franchise est fixé à 1520 euros. 106 Avant d’étudier l’un des aspects sur lequel porte cette disposition législative (la déclaration de catastrophe naturelle), il convient d’emblée de rappeler quelles sont les caractéristiques du concept de catastrophe naturelle devenu une notion juridique. En effet, alors que la force majeure est une notion exclusivement jurisprudentielle, la catastrophe naturelle fait l’objet d’une définition législative, ce qui peut, au moins en théorie, clarifier l’approche qu’il faut en avoir. La définition de la catastrophe naturelle repose sur plusieurs éléments133. Tout d’abord il faut que le fait à l’origine de celle-ci soit naturel. L’homme doit, dès lors, ne pas être partie prenante. Cet aspect peut poser problème en raison des activités industrielles et technologiques réalisées par l’homme qui peuvent plus ou moins directement être à l’origine de catastrophes. Devra-t-on les qualifier de catastrophes naturelles ? Dans “ certaines situations, il est difficile d’exclure la catastrophe naturelle alors même qu’elle n’est pas tout à fait extérieure aux individus ”134. Ensuite, le phénomène doit être anormal, l'alinéa 3 de l'article L. 125-1 visant l' “ intensité anormale d’un agent naturel ”. La loi vise donc l'intensité de l'agent et non celle du dommage ce qui pose la question de l'importance des dommages indemnisables : faut-il indemniser tous les dommages quelle que soit leur importance ?135 La difficulté à ce stade est de déceler à quel moment l’anormalité apparaît. Il convient d'accorder la plus grande importance aux relevés météorologiques ; eux seuls pourront prouver que l'événement était imprévisible et que les communes ne pouvaient raisonnablement se prémunir 136. Selon le Rapport public 1999 de la Cour des Comptes relatif à la prévention des inondations en France, - "Pour ouvrir droit à l'indemnisation, la loi ne définit les effets des catastrophes naturelles que par leur cause exigeant seulement l'intensité anormale de l'agent (…) S'agissant des inondations, le critère interne concrètement appliqué par la commission interministérielle compétente se fonde sur la période de retour au moins décennale de l'événement météorologique (intensité de la pluie) ou hydrologique (débit ou hauteur d'eau) à l'origine de l'inondation, quel que soit le cours d'eau, cette période étant ellemême déterminée par les experts de Météo France et les services techniques de l'Etat. Dans la pratique, le dispositif ne distingue donc pas les aléas courants des véritables catastrophes, d'où la profusion des arrêtés de catastrophe naturelle en général et l'abonnement au système de certaines communes qui subissent des crues à répétition sans chercher à s'en prémunir". Au-delà, le phénomène doit être irrésistible en ce sens que les pouvoirs publics mais aussi les particuliers sont totalement impuissants puisque, selon le texte, il faut que les mesures habituelles de prévention n'aient pu empêcher la survenance des dommages ou n'aient pu être prises (ce dernier point concerne l'objectif "prévention" de la loi de 1982 que nous aborderons dans le paragraphe suivant). La déclaration de catastrophe naturelle revêt trois aspects fondamentaux : 133 P. SEGUR, "La catastrophe et le risque naturel. Essai de définition juridique", R.D.P., 1997, p.1693 et s. 134 P. SEGUR, op. cit., p. 1700 135 F. SERVOIN, "L'événement risque naturel et le droit", Séminaire GIRRN, Grenoble, 27 mars 1998 136 F. DELAUNAY, "Inondations : la course aux assurances", Journal des Maires, Janvier 1994 107 En premier lieu, elle est une décision juridique notamment parce qu’elle produit des effets juridiques et peut être contestée devant le juge administratif comme d’ailleurs le refus opposé par le Gouvernement de la reconnaître. - En second lieu, elle est une décision administrative qui fait grief dont la légalité relève de la compétence du juge administratif. - En troisième lieu, la déclaration de catastrophe naturelle a un caractère politique car elle est édictée par des autorités politiques (un arrêté interministériel) et on a pu affirmer que "Les élus locaux, par faveur pour les administrés sollicitent fréquemment la prise d'arrêté de déclaration de catastrophe naturelle dans des situations de gravité fort variable nécessitant, dans un procès civil, une analyse des données factuelles"137. Rappelons également cette formule de la Cour d'appel de Paris (4 sept. 1996, juris-data n° 022237) : "même si un arrêté déclarant que pour la localité dont il s'agit la sécheresse constitue une catastrophe naturelle, cette décision administrative, prise à des fins d'indemnisation des victimes, n'a pas pour effet de déterminer si l'événement qu'elle vise revêt les caractères juridiques de la force majeure". - Il est vrai qu' "à travers ce problème se pose en fait la question du rôle des pouvoirs publics qui, en prenant l'arrêté de constat de catastrophe naturelle, se trouvent être juge et partie. C'est particulièrement vrai pour les préfets dont le rapport au ministère de l'Intérieur est déterminant pour déclarer l'état de catastrophe alors même qu'à la suite du renforcement constant de leurs prérogatives, ce sont eux qui sont largement responsables de la mise en œuvre des politiques publiques de prévention des risques naturels"138. Pour illustrer l'aspect politique de la déclaration il suffit de se reporter aux tempêtes de fin décembre 1999 : 69 départements étaient déclarés en état de catastrophe naturelle alors que le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles ne s'applique nullement aux effets du vent139. L'incohérence des pouvoirs publics a été soulignée. Monsieur Jean-Marc Lamère, délégué général de la direction assurances Biens et responsabilité, FFSA, s'indigne dans la revue Risques140 : "Précipitation et pédagogie sont difficilement conciliables : dès le 30 décembre, le Journal officiel publiait un arrêté interministériel déclarant l'état de catastrophe naturelle pour 69 départements. Or le régime des catastrophes naturelles ne peut intervenir en la circonstance que pour les effets de l'eau (Inondation, raz-de-marée, coulée de boue…). Le sinistre de décembre 1999 est évalué à 32 milliards de francs, dont seulement 3 milliards au mieux au titre du régime des catastrophes naturelles. Mais dans l'esprit du gouvernement et des parlementaires, il fallait que cette tempête d'une grande violence soit qualifiée de catastrophe naturelle. Beaucoup étaient persuadés que ce classement en catastrophe naturelle aurait pour conséquence une meilleure indemnisation… Il a fallu apporter toutes les explications techniques nécessaires pour apaiser les craintes, défaire les idées reçues et éviter que l'indemnisation du régime des catastrophes naturelles ne soit étendue à des biens et pertes 137 Ph. MALINVAUD et B. BOUBLI, note sous T.G.I. Périgueux, 5 juillet 1994, RD. Imm. 16 (4), oct.-Déc. 1994, 664 138 C. GILBERT, "Le traitement des catastrophes : entre assurance et solidarité", rapport pour la Table Ronde "Affronter les catastrophes" du 13 décembre 1993 139 Certains effets du vent on rejoint la catégorie des “ cat’nat ” depuis la loi n° 2000-1207 du 13 (JO du 14 décembre 2000) modifiant l’art. L. 122-7 du Code des assurances, il s’agit des vents d’origine cyclonique les plus violents (145 Km/h sur dix minutes ou 215 km/h en rafales) survenant dans les départements d’Outre-Mer. 140 J.-M. LAMERE, "Assurance et catastrophe : aujourd'hui et demain", Risques n° 42, juin 2000, p. 107 108 non assurés." En fait seulement 10% des sinistres relevèrent du régime des catastrophes naturelles. Il est à noter que ces arrêtés pris à la hâte et pas nécessairement sur l’initiative des communes sont comptabilisés au titre des arrêtés pris depuis le 2 février 1995 pour la modulation de franchise instituée depuis le 1er janvier 2001141. L'indemnisation est une réponse au caractère intolérable de la catastrophe ; "c'est parce qu'aux yeux de la collectivité, le dommage apparaît d'une importance exceptionnelle qu'il est souvent ressenti comme une injuste. Il y a là un élément psychologique qui est au centre de la notion de catastrophe. Il suffit que l'événement soit perçu comme une catastrophe naturelle, pour qu'il soit effectivement considéré comme tel par les pouvoirs publics" 142. Le juge administratif intervient d’ailleurs pour empêcher que de telles considérations puissent l’emporter ne faisant dès lors plus prévaloir le souci de satisfaire l’intérêt général. Ainsi, si l’Etat est seul compétent pour édicter l’acte constatant l’état de catastrophe naturelle, afin de ne pas laisser les assureurs juges de la situation, ce qui pourrait amener à des abus, cette compétence ne lui est pas reconnue sans limite. Le juge administratif est, en effet, le garant du respect de la légalité grâce au recours pour excès de pouvoir exercé contre la décision administrative relative à l’état de catastrophe naturelle. Récemment, le recours en appréciation de légalité de l’arrêté constatant l’état de catastrophe naturelle a été retenu (C.E., 15 mars 2000, S.A. Assurances du Crédit mutuel143). La situation est la suivante : dès lors qu'un arrêté constate l’état de catastrophe naturelle, un tribunal de grande instance, comme dans la présente affaire, saisi d’un recours ne peut se prononcer sur le fond sans que le juge administratif ait statué sur la légalité de cet acte administratif. Le juge judiciaire n’a pas d’autre choix que de surseoir à statuer et de demander au juge administratif son point de vue sur la légalité de l’acte administratif. Une fois celui-ci donné, le juge judiciaire peut alors statuer sur le fond. Dans le cadre de l’appréciation de légalité, le juge administratif applique la méthode de contrôle qu’il utilise lorsqu’il est saisi d’un recours pour excès de pouvoir. Il convient de présenter les modalités du contrôle réalisé par le juge administratif sur l’acte administratif déclarant ou non l’état de catastrophe naturelle. En premier lieu, il existe deux types de requérants. Il y a tout d’abord les particuliers et les personnes morales de droit privé qui peuvent saisir le juge administratif, contestant ainsi l’absence de déclaration de l’état de catastrophe naturelle ou le refus de constater cet état, ne leur permettant pas en effet d’obtenir une indemnisation. On trouve ensuite les assureurs qui peuvent contester, soit la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, soit le refus d’une telle reconnaissance. En second lieu, deux éléments se dégagent des prises de position adoptées par le juge administratif. Il affirme tout d’abord “ qu’il appartient à l’autorité administrative seulement de rechercher si un agent naturel a revêtu une intensité anormale engendrant un état de catastrophe naturelle ”. Ainsi, jusqu’en 1992 l’autorité administrative devait seulement se demander s’il y avait un tel phénomène et, si tel était le cas, constater l’état de catastrophe naturelle car si elle allait plus loin dans son appréciation, le juge la censurait (C.E., 12 décembre 1990, Syndicat des sylviculteurs du Sud Ouest, Recueil p.357). Ce n’est plus le cas depuis 1992 car, désormais, l’arrêté constate l’état de catastrophe naturelle mais détermine 141 Voir Chapitre suivant §2 P. SEGUR, "La catastrophe et le risque naturels. Essai de définition juridique", R.D.P, février 1997, p. 1693 143 R.G.A.T., 2000, n°3, p. 921 et s. 142 109 aussi les zones et périodes où la catastrophe est intervenue et la nature des dommages qu’elle a provoqués (article L.125-1 alinéa 4 du Code des assurances). S’il n’y a pas un agent naturel d’une intensité anormale, deux solutions existent. Tout d’abord, la décision refusant de constater l’état de catastrophe naturelle sera jugée légale dès lors qu' “ il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre de l’intérieur ait commis une erreur manifeste d’appréciation en refusant de reconnaître à l’orage…un caractère d’intensité anormale ” (C.E., 10 janvier 1992, n°106356, Epoux Sandrin Renard) . Ensuite à l’inverse, la décision constatant l’état de catastrophe naturelle, peut être déclarée irrégulière. La première annulation de ce type est intervenue en 1999 et portait sur un glissement de terrain : C.E., 12 mars 1999, Les mutuelles régionales d’assurances 144, le Conseil d’Etat juge qu’il n’y a pas d’événement d’une intensité anormale et ainsi que l’arrêté constatant l’état de catastrophe naturelle est entaché d’une erreur de droit et sera ainsi considéré comme n’ayant jamais existé. Si à l’inverse le juge considère, contrairement à l’analyse de l’autorité administrative, qu’il y a bien un agent naturel d’une intensité anormale, il annule la décision refusant de reconnaître l’état de catastrophe naturelle ce qui implique alors pour l’Etat de prendre un tel arrêté et permet d’engager sa responsabilité à l’égard du requérant. Pour certains auteurs, le contrôle réalisé par le juge administratif sur l’arrêté constatant l’état de catastrophe naturelle “ n’ira sans doute pas au-delà du contrôle de la matérialité des faits et de l’erreur manifeste d’appréciation et ne pourra porter sur l’opportunité de la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle ”145. Pourtant, selon M. Le Cornec, "Il semble bien que le contrôle de légalité de l'arrêté de constatation soit un contrôle normal. En revanche, le contrôle du refus de constatation semble être un contrôle limité à l'erreur manifeste d'appréciation (C.E., 10 janvier 1992, Epoux Sandrin-Renard)". Le juge administratif précise ensuite que c’est aux organismes d’assurance, une fois la présence d’un agent naturel d’une intensité anormale constatée, “ de déterminer sous le contrôle des juridictions compétentes si dans le cadre de cet état de catastrophe naturelle certains assurés réclament à bon droit le bénéfice de cette loi ” (C.E., 26 mai 1995, n°128159, S.A.R.L. La cardinale). En tout état de cause, sur l’ensemble des décisions des juridictions administratives étudiées portant sur les inondations et la force majeure, lorsque le juge administratif fait état de l’existence d’un arrêté de catastrophe naturelle, c’est seulement pour décider que ce document ne permet pas de déceler un événement de force majeure ou ne suffit pas pour permettre de conclure qu’il y a force majeure (cf. supra, 1 ère partie). 144 145 Cité par la R.G.A.T., 2000, n°1, p. 199. R.G.A.T., 2001, p. 660. 110 § 2 : La loi de 1982 et la prévention L'objectif poursuivi par le législateur lors du vote de la loi du 13 juillet 1982 était double puisqu'il s'agissait à la fois de permettre l'indemnisation des biens endommagés par une catastrophe naturelle et d'organiser la prévention de ces risques. L'objectif de prévention est présent dès le premier article de la loi puisque le troisième alinéa de cet article dispose que - "Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prise". On ne peut qu'approuver Claude Gilbert lorsqu'il affirme que : "Autrement dit, et en toute logique, l'indemnisation des dommages ne devrait pas avoir lieu lorsque, de toute évidence, la réalisation d'un risque naturel résulte d'une prévention insuffisante, de la mauvaise ou de la non application des textes dans ce domaine. La loi rappelle en effet clairement l'obligation de prévention, notamment pour les mesures que les collectivités publiques doivent prendre au titre de l'exercice des pouvoirs de police administrative, pouvoirs qui, on le sait sont ceux du maire et du préfet"146. Ainsi, aux termes de la loi, il convient de vérifier que la victime a agi en "bon père de famille" mais que les précautions, pourtant prise en temps voulu se sont avérées inopérantes ou bien que, compte tenu des circonstances, les mesures de préventions ont été impossibles à prendre147. On sait que cette vérification n'a pas lieu, privant ainsi la loi de 1982 d'une très grande partie de son efficacité en matière de prévention. Ainsi que le souligne Paul-Henri Bourrelier lors d'un séminaire organisé par le C.N.R.S. en mars 1999148, "La loi d'indemnisation de 1982 n'a en réalité pas été appliquée : elle indiquait explicitement que l'indemnisation était de droit si les mesures de précautions classiques, traditionnelles, avaient été inopérantes, chose que jamais aucune compagnie d'assurances ni l'Etat n'a vérifié. Lorsqu'il y a une catastrophe, l'aspect victimisation, qui est bien connu, fait que le préfet transmet immédiatement le dossier de déclaration de catastrophe naturelle en disant que c'est un événement imprévisible, etc…, et les préfets les plus influents, ou les services préfectoraux les plus efficaces font passer les dossiers des maires, personne ne posant la question des mesures de prévention". Par ailleurs le législateur de 1982 avait instauré l'élaboration de plans d'exposition aux risques naturels (PER) ; selon l'article 5-I de la loi, - "l'Etat élabore et met en application des plans d'exposition aux risques naturels prévisibles qui déterminent notamment les zones exposées et les techniques de 146 C. GILBERT, "Le traitement des catastrophes : entre assurance et solidarité", rapport pour la Table Ronde "Affronter les catastrophes" du 13 décembre 1993 147 M.B. CRESCENDO-d'AURIAC, "Le régime des catastrophes naturelles (loi du 13 juillet 1982°", R.G.A.T., 1988, n° 3; p. 445 148 P.H. BOURRELIER, “ Evaluation d’une politique publique et retour d’expérience : le cas de l’Instance d’Evaluation de la Politique Publique de Prévention des risques Naturels ”, Séminaire C.N.R.S., 24 mars 1999, “ Retours d’expérience, apprentissage et vigilances organisationnels. Approches croisées ”, Programme Risques Collectifs et Situations de Crise, Actes du séminaire, p. 124 111 prévention à y mettre en œuvre tant par les propriétaires que par les collectivités ou les établissements publics". Ces plans devaient permettre la prévention des catastrophes naturelles et servir de base à l'assurance. Selon la rédaction initiale de l'article L. 125-6 du Code des assurances, jusqu'à la date de mise en vigueur des plans d'exposition aux risques, les entreprises d'assurances n'ont pas l'obligation d'insérer la clause de garantie des dommages résultant des catastrophes naturelles dans les contrats d'assurances de choses pour "les biens immobiliers construits et les activités exercées en violation des règles administratives en vigueur lors de leur mise en place et tendant à prévenir les dommages causés par une catastrophe naturelle". Après la publication des PER commence une deuxième période : les entreprises d'assurances peuvent alors refuser d'étendre la garantie en cause aux biens et activités lorsque les terrains sur lesquels ils auront été installés sont "classés inconstructibles par un plan d'exposition aux risques" au moment de leur édification. Pour les biens et activités implantés antérieurement aux plans en question, les entreprises d'assurance ont la possibilité d’exclure certains biens de leur garantie ou d’opérer des abattements sur décision du Bureau central de tarification149. La loi Barnier a substitué les PPR aux PER et actuellement, l'article L. 125-6 du Code des assurances dispose : - “ Dans les terrains classés inconstructibles par un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé dans les conditions prévues par la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987 relative à l’organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l’incendie et à la prévention des risques majeurs, l’obligation prévue au premier alinéa de l’article. 125-2 ne s’impose pas aux entreprises d’assurance à l’égard des biens et activités mentionnés à l’article L 125-1, à l’exception, toutefois, des biens et des activités existant antérieurement à la publication de ce plan… - A l’égard des biens et activités situés sur des terrains couverts par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, les entreprises d’assurances peuvent exceptionnellement déroger aux dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 125-2 sur décision du Bureau ventral de tarification... lorsque le propriétaire ou l’exploitant ne se sera pas conformé dans un délai de cinq ans aux mesures visées au 4° de l’article 40-1 de la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987” La mise en place d'un PER était prescrite par un arrêté du préfet du département après consultation des maires des communes concernées 150. Le bilan de la mise en place de ces PER est des plus négatifs. La procédure est longue, elle gêne les propriétaires car elle fait chuter la valeur des biens, les élus locaux ne manifestent pas un enthousiasme excessif envers les PER. Sur 2000 communes répertoriées à risques en 1984 seules environ 300 d'entre elles se sont vues dotées d'un PER. Le "demi-échec" des PER a été attribué à plusieurs causes dont une procédure trop lourde, peu déconcentrée, des crédits insuffisants et surtout un "manque de courage évident des préfets, souvent empêtrés dans des considérations de politique locales" 151. 149 Voir D. TOMASIN, "La loi du 13 juillet 1982 sur les catastrophes naturelles", Droit et Ville, 1986, n° 21, p. 215 150 L’élaboration des PER était organisée par le décret n° 84-328 du 3 mai 1984 (JO, 6 mai 1984, p. 1338), abrogé par le décret n° 93-351 du 15 mars 1993 (JO, 17 mars 1993, p. 4145) 151 E. LE CORNEC, "Les plans de prévention des risques naturels prévisibles", l'Assur. fr., n° 716, décembre 1995 112 En janvier 1994, un comité interministériel s'est penché sur la question et la loi Barnier du 2 février 1995 relative à la protection de l'environnement, actualise et modernise les règles antérieures. L'article 16 de la loi du 2 février 1995 a introduit les articles 40-1 à 40-7 et un article 41 dans la loi du 22 juillet 1987 relative à l’organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l’incendie et à la prévention des risques majeurs 152 ; ces dispositions figurent maintenant dans le Code de l'environnement 153 sous les articles L. 562-1 à L. 562-7. Selon Erwann Le Cornec la loi de 1982 "est désormais une coquille vide. On se trouve en présence de deux textes dont la vocation est très différente : la loi du 22 juillet 1987 pour la prévention ; le Code des assurances pour la réparation" 154. La prévention n'est toutefois pas totalement absente de la loi de 82 puisque subsiste la possibilité du refus de garantie de l'article 125-6 du Code des assurances lequel, par son effet dissuasif vis-à-vis des assurés, serait un instrument de prévention s'il était effectivement utilisé. Depuis la loi Barnier, un document unique, le plan de prévention des risques naturels (PPR) remplace désormais les systèmes existants. La procédure d'élaboration a été simplifiée, l'initiative en appartient aux préfets lesquels ont par ailleurs la possibilité, dans les situations les plus urgentes, d'appliquer un PPR par anticipation sur l'approbation finale (art. 40-2 de la loi de 1987 maintenant art. L.562-2 du Code de l'environnement). L'élaboration du PPR débute par la réalisation d'une carte des aléas et une concertation avec les différents partenaires locaux. Le document final est composé d'un rapport de présentation, d'une carte réglementaire qui précise les zones réglementées et d'un règlement qui précise les règles applicables à chaque zone 155. Les plans de prévention contiennent des interdictions et des prescriptions pour deux types de zones : les zones directement exposées aux risques et différenciées selon la nature et l'intensité du risque encouru et les zones non directement exposées mais où des réalisations peuvent aggraver les risques existant ou en provoquer de nouveaux. Dans les zones directement exposées le principe est celui de l'interdiction de "tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle" mais la loi ouvre la possibilité de déroger à cette interdiction puisqu'il est précisé que "dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient y être autorisés", il incombe au PPR de " prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités". Après enquête publique et après avis des conseils municipaux des communes sur le territoire auquel il doit s'appliquer, le plan de prévention des risques est approuvé par arrêté préfectoral (art. 40-3 de la loi du 22 juillet 1987 modifié devenu article L. 562-3 du Code de l'environnement) 152 JO, 23 juillet 1987, p. 8199 JO, 21 septembre 2000 154 ibid 155 Voir not. J. VIRET, "La refonte des plans de prévention des risques naturels", Droit de l'Environnement, déc. 1995 , fév. 1996, n° 35 ; J. CARTRON, "Les plans de prévention des risques naturels prévisibles : quelles améliorations du dispositif juridique de prévention", R.J.E., 2/1995 ; J. FAYE, P. DOUARD, Géomètres, n° 2, février 2000 153 113 Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il s'impose à tous, particuliers ou collectivités, notamment lors de la délivrance d'un permis de construire. Il est annexé au plan d'occupation des sols, conformément à l'article L. 126-1 du Code de l'urbanisme (art. 40-4 de la loi du 22 juillet 1987 modifié devenu article L. 562-4 du Code de l'environnement) et donc aux nouveaux plans locaux d'urbanisme instaurés par la loi n° 20001208 du 13 décembre 2000 (JO du 4 décembre 2000), entrée en vigueur le 1 er avril 2001. Selon un avis du Conseil d'Etat en date du 3 décembre 2001 156 les plans de prévention des risques naturels prévisibles constituent des documents d'urbanisme, soumis à la formalité de notification de l'article R. 600-1 du Code de l'urbanisme. L'information du public a été renforcée par des dispositions imposant des publicités dans la presse locale (art. 40-4 al. 2 de la loi de 1987 et art.7 al. 5,6,7,8 du décret d'application 157). Actuellement, chacun peut consulter le site Internet http://prim.net/ afin de connaître la situation de sa commune. Alors que le non-respect des PER n'était pas constitutif d'une infraction pénale, l'article 40-5 nouveau (devenu article L. 562-5 du Code de l'Environnement) renvoie au droit pénal de l'urbanisme des articles L. 480-4 et suivants du Code de l'urbanisme ce qui permet désormais de sanctionner pénalement le non-respect de ces textes. Les plans de préventions des risques ont été intégrés dans le récent code de l'environnement et l'article L. 562-1 dispose notamment que l'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones et indique les objectifs du plan (Voir texte en annexe de ce rapport) Par ailleurs, la loi du 2 février 1995 précitée a également inséré au chapitre 1er du Titre II du Code des assurances relatif aux assurances de dommages non maritimes un article L 121-16 ainsi rédigé : - “ Toute clause des contrats d'assurance tendant à subordonner le versement d'une indemnité en réparation d'un dommage causé par une catastrophe naturelle au sens de l'article L 125-1 à un immeuble bâti à sa reconstruction sur place est réputée non écrite dès lors que l'espace est soumis à un plan de prévention des risques naturels prévisibles ”. L'élaboration des PPR n'est pas toujours vue d'un regard favorable et à côté du contentieux classique lié à la responsabilité de l’administration notamment pour défaut de délimitation des zones à risques, se développe un contentieux relatif à la contestation du contenu des 156 CE, avis, 3 décembre 2001, req. n° 236910, JO du 24 janvier 2002, p. 1639 Décret n° 95-1089 du 5 octobre 1995 (JO du 11 octobre) pris en application de l'article 40-7 de la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987 modifiée par la loi susvisée. Actuellement article L 562-4 du Code de l'environnement : Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan d'occupation des sols, conformément à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme. Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé fait l'objet d'un affichage en mairie et d'une publicité par voie de presse locale en vue d'informer les populations concernées. 157 114 documents d’urbanisme de même qu'un contentieux relatif aux PPR 158. Le contentieux sur les PPR, tout en ayant pour l’instant peu d’ampleur, va logiquement s’accroître au fur et à mesure qu’ils seront plus nombreux. En ce qui concerne les PPR, le juge administratif se limite, à ce jour, à un contrôle restreint sur le zonage. Ainsi, dans une décision du Tribunal administratif de Caen, où une commune souhaitait obtenir l’annulation d’un arrêté préfectoral approuvant un PPR de mouvements de terrains, les juges ont conclu qu’“ il ne ressort pas des pièces du dossier que la délimitation des zones fondée sur les études réalisées notamment lors de l’établissement...de la carte des zones exposées à des risques...soit entachée d’erreur manifeste d’appréciation ” (7 juillet 1998, Commune de Gonneville sur Mer). Le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, quant à lui, rétorque aux requérants invoquant des erreurs dans la description d’un ouvrage hydraulique, que ces erreurs, à supposer qu'elles soient établies, "ne sont pas de nature à remettre en cause la fiabilité des études réalisées", ce qui exclut que le classement retenu puisse être entaché d'une erreur manifeste d'appréciation (26 mai 1998, Mme Affidi et M. et Mme Ribier contre Préfet de l’Allier). Ont été également déboutés des requérants contestant la délimitation de la zone orange d'un PPR et qui se sont bornés à soutenir que la justification de cette délimitation est insuffisante et que le zonage "n'est pas sérieux", et à affirmer que les points les plus bas des carrières souterraines sont à plus de cinq mètres au-dessus des bords de la Marne, sans apporter, toutefois, aucun élément de nature à établir que le Préfet ait commis une erreur manifeste d'appréciation (T.A. Melun, 11 juin 1998, Association "Il faut agir à Thorigny et dans ses environs", Association "Les Combeaux"). En qui concerne les PPR, les imprécisions quant au tracé des différentes zones ne suffisent pas remettre en cause leur légalité. Alors que les méthodes employées pour le zonage des PPR ne sont donc guère remises en cause par le juge administratif, le non-respect de la procédure d'élaboration peut conduire à leur annulation, même si c’est peu fréquent. Ainsi, il faut obtenir l'avis des Conseils municipaux, à peine de nullité pour vice de procédure. Au-delà, d'autres avis doivent être demandés. Par exemple, un PPR relatif aux risques d'affaissements miniers a été annulé à la demande de la commune de Lommerange car il avait été édicté sans l'avis de la chambre d'agriculture et du centre régional de la propriété forestière alors que la consultation de ces instances est requise par le décret du 5 octobre 1995 relatif aux PPR ( TA. Strasbourg, 23 février 1999, Commune de Lommerange et autres contre Préfet de la Moselle). De même le Conseil d’Etat précise que les dossiers déposés lors de l’enquête publique dans chacune des communes concernées par un PPRI doivent comprendre les documents relatifs à l’ensemble du projet, à défaut “ cette irrégularité qui, compte tenu de la nature même d’un tel document dont le contenu doit s’apprécier globalement ” revêt un caractère substantiel et entache d’illégalité la procédure d’élaboration du plan (C.E., 22 juin 2001, Association des professionnels de la zone portuaire et autres, req.n°214421, 214613, 215360, RD. Imm., nov.déc. 2001, chr., obs. L.D.) Enfin, l'impartialité et l'indépendance de la commission d'enquête dans le cadre d'une procédure d'élaboration d'un PPR, doit être assurée comme le souligne un jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand (26 mai 1998, Mme Affidi et M. et Mme Ribier contre Préfet de l'Allier). Le tribunal considère qu'il n'est pas établi qu'un géomètre expert, appelé à siéger dans cette commission et qui, selon les requérants, aurait travaillé pour l'une 158 M.F. STEINLE-FEUERBACH et H. ARBOUSSET, "La contestation, devant le juge administratif, des outils de mise en œuvre des Plans de Prévention des Risques", Géomètres, n° 11, novembre 2001 115 des communes concernées par le PPR en réalisant des opérations de bornage et d'alignement touchant la propriété des requérants "n'ait pas exercé ses fonctions au sein de la commission dans les conditions d'impartialité et d'indépendance requises; que dans ces circonstances, sa participation ne saurait être regardée comme ayant entaché les travaux de la commission d'enquête d'un vice de procédure". Les PPR, comme les PER, rencontrent parfois la résistance des résidents qui craignent, à juste titre, une diminution de la valeur de leur immeuble159. S'agissant des maires il est clair que le classement d'une partie de la commune en zone rouge, très exposée et donc inconstructible n'est pas acceptée de gaieté de cœur. "Le classement en zone à risque n'est pas encore perçu comme un thème porteur aux élections municipales" 160. Néanmoins, suite aux drames récents, la population peut se révéler plus sensible au souci de prévention de l'élu local. Ainsi, après les inondations du Sud-Ouest en novembre 1999, René Marques, maire de Saint-Laurent-de-la Salanque et sénateur des Pyrénées orientales se félicite des mesures de prévention prises : il avait dû affronter les nombreuses pressions de ceux qui voulaient des permis de construire dans les zones inondables mais pour y résister il disposait d'un atout maître à savoir un PPR !161 Le Rapport public de la Cour des comptes rendu en 1999 sur la prévention des inondations en France note que la nouvelle procédure des PPR s'accompagne d'une nette amélioration du rythme des plans relatifs aux inondations mais ne fait guère preuve d'optimisme par ailleurs : "Les carences qui subsistent dans l'élaboration de ces plans et dans la sensibilisation de la population à ce risque ne permettent pas de considérer que celle-ci soit bien informée du risque d'inondation. Les retards accumulés ne laissent pas espérer une couverture satisfaisante du territoire pour la connaissance de ce risque avant au moins vingt ans." La question des zones à risques s’est posée avec acuité lors des avalanches de février 1999. On se souviendra peut-être de cet homme dont le chalet avait été entièrement détruit et qui déclarait devant les caméras qu’il avait construit en zone blanche mais que celle-ci était devenue rouge suite à un déboisement. 159 Le Monde, 26 janvier 1999 : "Des habitants d'Agde refusent les contraintes des préventions des crues" 160 E. CHESNAIS, "Inondations à répétition", Que Choisir 364, octobre 1999, p. 35 161 Le Monde, 17 novembre 1999, J.P. BESSET, “ A Saint-Laurent-de-la-Salanque, la prévention a limité des dégâts ” ; V. not. T. PERRIN et C. DUCLOT, Regards de collectivités locales sur les objectifs et la mise en œuvre des PPR, 1° Approche socio-économique, outils de négociation, Cemagref, MATE, juin 1998. Les élus savent se montrer persuasifs pour imposer des mesures de prévention des risques, pour exemple cet interview de M. Jean VAN WYNENDAELE, adjoint à l'urbanisme, lu (à l'occasion de vacances studieuses consacrées au risque inondation) dans le bulletin municipal de la Colle sur Loup de juillet/ août 2001 : "A l'automne dernier, les intempéries importantes que nous avons connues ont provoqué des situations dramatiques : de nombreuses maisons ont été inondées, les chemins ont été transformés en rivière, des véhicules ont été emportés et des vies ont été mises en danger. Il était impératif d'agir comme nous nous y étions engagés. Nous avons donc décidé de prendre nos responsabilités et d'agir vite et fort en fixant une zone comprenant les bassins versants directs de l'Escours et du Desfoussat sur laquelle toutes les demandes de permis de construire et les extensions seront analysées dans le détail et pour lesquelles un sursis à statuer sera délivré le temps de mettre en place un calendrier de résolution des problèmes d'inondation et de séparation des réseaux à partir d'études hydrologiques réactualisées et nouvelles si cela est nécessaire." 116 On a encore beaucoup parlé des PPR lors des inondations du Sud-Ouest en novembre 1999162. Il a bien fallu constater que les communes les plus touchées et où on relevait le plus de victimes ne disposaient pas d'un PPR. Alors que 17 PPR étaient prescrits dans l'Aude, 2 seulement avaient été validés. Dans le Tarn, aucun des 49 PPR prescrits n'était entériné 163. Dominique VOYNET avait précisé alors que "Dans ces circonstances extrêmes, je tiens à rappeler la priorité qui doit être donnée à des politiques résolues de prévention et de protection contre les risques par la maîtrise de l'urbanisme dans les zones inondables". Le gouvernement annonçait à cette occasion que plus de 2000 communes étaient désormais dotées d'un PPR, Le ministère de l’Environnement estimant que 10 000 communes devraient faire l’objet d’un PPR à l’horizon de l’an 2010. Selon Philippe Vesseron, directeur de la prévention des risques (DPPR), “ C’est un chantier considérable. Mais l’objectif de 5000 plans avant 2005 semble atteignable. L’Etat a consacré à cette politique 70 millions de francs en 1999, soit 50% de plus que l’année précédente. ” 164. 2631 PPR étaient prescrits dont 2301 approuvés en juillet 2000165. Les inondations répétitives et dramatiques de la Somme en 2001 ont relancé le débat sur la prévention. Le rapport de la commission d’enquête sur les inondations de la Somme 166 tout en soulignant les progrès réalisés signale que l’effort est à accentuer : "Tout en se félicitant de cette accélération du rythme d'élaboration des PPR, votre commission considère qu'elle ne peut s'en satisfaire pleinement. En particulier, elle juge insuffisant l'objectif affiché par le ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement en 1994 et révisé en 1998 qui fixe à 5.000 le nombre de PPR approuvés en 2005." Le rapport propose "d'augmenter de 50 % le rythme d'élaboration des plans de prévention des risques (PPR) approuvés pour atteindre et dépasser l'objectif fixé pour 2005."167 Au-delà, "la commission d'enquête souligne que le PPR est un bon outil d'aménagement et de prise en compte du risque dans l'occupation des sols, et qu'il a déjà fait la preuve de son efficacité, dans certaines communes qui ont eu à subir de nouvelles inondations. Néanmoins il pourrait être mieux utilisé afin le rendre plus efficace". Elle insiste sur la nécessaire concertation avec les collectivités locales. En réponse au problème posé par les délais de l’élaboration des PPR, elle encourage l’application l'application anticipée du plan de prévention des risques et recommande de "recourir, en tant que de besoin, à l'application anticipée du projet de PPR, en concertation avec les collectivités territoriales."168 La commission constate encore que "dans leur conception actuelle, les PPR sont presque toujours exclusivement orientés vers l'avenir, puisqu'ils comportent essentiellement, en matière d'urbanisme, des règles d'inconstructibilité pour la zone rouge et de constructibilité conditionnelle pour la zone bleue qui ne concernent que les projets nouveaux" et elle propose d’adopter "de manière plus systématique, dans les PPR, des mesures concernant l'urbanisme 162 V. not. F. GRELOT et N. GENDREAU, "Le risque inondation se négocie-t-il ?", Séminaire sur la Négociation Sociale du Risque, ANDRA, Paris, 9 novembre 2000 163 V. Le Monde, article précité 164 Libération, 15 novembre 1999 165 Voir P. BIDAN, “ Le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles a-t-il un avenir ? ”, R.G.D.A., 2001, n° 2 166 Marcel DENEUX, Rapport n° 34, remis au Président du Sénat le 18 octobre 2001 167 Proposition n° 12 168 Proposition n° 13 117 existant, en améliorant leur financement par un recours aux subventions de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH)." 169 Il n'est pas discutable que l'objectif d'indemnisation que s'était fixé le législateur en 1982 ait été pleinement atteint 170, s'agissant toutefois de la prévention il s'avère que bien des progrès restent à faire. Il apparaît que la facilité avec laquelle les victimes sont indemnisées est un facteur de déresponsabilisation. Le rapport de l'Instance d'évaluation présidée par Paul-Henri Bourrelier 171 est particulièrement sévère : "Une des critiques les plus sérieuses que l'on puisse faire au dispositif est qu'il a un effet de déresponsabilition générale et qu'il n'incite à aucun progrès technique ou professionnel ; c'est un système de facilité, dépourvu de signaux d'alerte et comme tel préparant à des réveils douloureux pour tous. A aucun moment les assureurs n'ont engagé de recours pour sanctionner les défauts flagrants de prévention, contrepartie considérée dans les manuels comme indispensable au fonctionnement sain d'une mutualisation, et lorsque certaines mutuelles172 ont commencé à réagir devant des situations qui leur paraissaient abusives, elles ont soulevé un tollé général". Néanmoins, les assureurs ne sont pas restés inactifs face aux risques naturels. Chapitre 2 : Les assureurs face aux risques naturels Le rapport Bourrelier reproche aux assureurs l'absence d'actions récursoires, notamment devant les tribunaux administratifs, laquelle n'a pas permis de créer une pression pour accélérer l'élaboration des PPR. Toutefois, il apparaît qu'un contentieux relatif à l’indemnisation se developpe peu à peu devant le juge civil, ce qui peut influer sur l'attitude des personnes privées et notamment des constructeurs, et devant le juge administratif (§1) ; par ailleurs les assureurs ont mené des réflexions et des négociations lesquelles ont porté récemment leurs premiers fruits (§2). § 1 : Le contentieux de l’indemnisation des sinistres L'étude de la jurisprudence civile et administrative nous a révélé la présence d'assureurs de dommages aux biens, tenus de la garantie "cat-nat". Les assureurs, contrairement à l'opinion communément répandue n'indemnisent pas toujours aveuglement leurs assurés dès lors qu'est pris un arrêté constatant la catastrophe naturelle. Outre, la contestation de l’arrêté lui-même 169 Proposition N° 14 En cas de catastrophes, les assureurs ont démontré leur volonté de venir en aide rapidement aux victimes ainsi que leur efficacité. Ce point est souligné dans le rapport de la commission d’enquête après les inondations de la Somme : “ Les compagnies d'assurance ont participé aux cellules de crise, elles ont parfois versé des acomptes sans attendre la publication des arrêtés de catastrophes naturelles (75 % des dossiers avaient fait l'objet d'acomptes en juillet 2001) et ont financé des réparations provisoires lorsque cela était possible. En outre, dans des documents transmis à votre commission, il a pu être constaté que les associations représentatives des compagnies d'assurance appelaient leurs adhérents à faire preuve de “ souplesse ” en faveur des assurés. ” 171 P.H. BOURRELIER, La prévention des risques naturels, Rapport de l'instance d'évaluation, la Documentation française, Paris, 1997, p. 176 172 La MACIF avait en octobre 1993 résilié 150 contrats de sociétaires vauclusiens dont les immeubles se trouvaient en zone inondable 170 118 (A), nous avons pu relever que des assureurs ont avancé que le dommage subi par l’assuré n’était pas en relation de causalité avec l’événement de catastrophe naturelle (B). Après avoir indemnisé leur assuré, les assureurs exercent parfois des actions subrogatoires notamment envers des constructeurs et leurs assureurs. Ils estiment ainsi que l’existence d’une procédure permettant d’indemniser les catastrophes naturelles n’implique pas l’impossibilité que des actions en justice puissent voir le jour afin que soit établies les responsabilités des différents intervenants. Ils considèrent donc, en d’autres termes, que la mutualisation du risque lié aux catastrophes naturelles n’interdit pas de rechercher d’éventuelles responsabilités voire les responsables (C). Récemment la Cour de cassation a admis le recours après paiement de l'assureur sur le fondement de l'enrichissement sans cause (D). A. La contestation de l'arrêté On trouve d’abord des décisions récentes émanant des juridictions administratives où ce sont les arrêtés interministériels eux-mêmes qui sont l'objet, de la part des assureurs, d'un recours pour excès de pouvoir tendant à leur annulation. Ainsi, tel est le cas dans l’arrêt du 2 février 2000 (C.E., n° 201847, Compagnie d’Assurances Générales de France, Lamy assurances, n° 62, mai 2000, n° 1618), le Conseil d'Etat juge l'annulation dépourvue d'intérêt en raison de la date tardive du recours. Citons également l’arrêt de la haute assemblée du 15 mars 2000 dans lequel le Conseil d’Etat considère que l'arrêté interministériel portant constatation de l'état de catastrophe naturelle est entaché d'illégalité : “ il ressort des pièces du dossier que l'affaissement de terrain constaté en mai 1997 sur le territoire de la commune de Saumur n'a pas eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel ” (C.E., n° 213215, Assurances du Crédit Mutuel, Lamy assurances, n° 62, mai 2000, n° 1618, il s'agissait d'un recours en appréciation de légalité, cf. supra § précédent). B. La contestation du lien de causalité entre l'événement naturel et le dommage On relève un certain contentieux relatif à la cause déterminante du dommage dans des hypothèses où l'assureur conteste le lien de causalité entre l'événement naturel et le dommage subi par des biens situés dans une commune ayant bénéficié d’un arrêté. Rappelons que l’article 125-1 al. 3 du Code des assurances vise les dommages “ ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel ”. C’est à l’assuré qu’il appartient d’établir que l'état de catastrophe naturelle déclarée est la cause déterminante de son sinistre. Ce principe a été rappelé par un arrêt récent de la Cour d’appel de Paris en matière de sécheresse (Paris, 19e ch. B, 10 janv. 2002, RG n° 1999/06219, D. Actualité, 25 février 2002, note S. Rougon-Andrey). L’absence de causalité peut dès lors être invoquée par l’assureur à l’occasion d’un refus de garantie opposé à son assuré ou de la mise en cause du constructeur. Inondations : - Civ. 1ère, 7 février 1995 (R.G.A.T., 1995, 440, note J. Kullmann ; D., 1995, I.R., 57) : Obstruction de la canalisation des eaux de pluies, les trop-pleins prévus par la norme NPF 30-201, art. 6-36 de janvier 1948 n'ont pas été mis en place "les dommages, qui auraient pu être évités si l'installation avait été correctement réalisée, n'avaient pas eu pour cause déterminante l'intensité anormale des pluies". 119 Effondrement de terrain : - Les Mutuelles du Mans ont demandé aux juges de dire qu'il n'y avait pas de dommage matériel direct au sens de la loi du 13 juillet 1982 pour un immeuble exposé à un risque d'effondrement dès lors qu'il n'existait aucun lien de causalité entre le dommage allégué et l'effondrement de la chaussée car les risques d'effondrement étaient antérieurs et avaient pour origine l'existence sous les fondations, de carrières très anciennes. La Cour d'appel de Paris, le 23 juin 1989 (Gaz. Pal., 6 juillet 1989, 515) accueillit favorablement la demande de l'assureur et l'arrêt fut confirmé en cassation (Civ. 1ère, 20 octobre 1992, R.G.A.T., 1992, note J. Kullmann). Sécheresse : - Paris, 7 mai 1998 (juris-data n° 021024) : L'expert n'a pas retenu l'état de catastrophe naturelle comme étant à l'origine des désordres ; elle n'apparaît pas comme la cause déterminante des dommages qui sont imputables à un défaut sérieux d'étude du sol, à l'absence de mesures adéquates et à des violations des règles de l'art. - Civ. 1ère, 23 juin 1998 (Lamy assur., n° 43, août-septembre 1998, n° 1590) : la MAIF soutenait que les désordres provenaient d'une absence de précautions du constructeur, elle a obtenu gain de cause :"Attendu, cependant, que, selon l'article L. 125-1, alinéa 3, du code des assurances, sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles les dommages matériels directs ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises ; qu'aux termes de l'art. 6 de la police souscrite auprès de la MAAF, celle-ci garantit à l'assuré la réparation pécuniaire des dommages matériels directs aux biens garantis et ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel. Attendu qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si l'intensité anormale de la sécheresse avait été la cause déterminante des dommages subis par l'immeuble assuré et si, dès lors, ces dommages pouvaient être considérés comme les effets d'une catastrophe naturelle au sens desdits textes, la Cour d'appel a privé de base légale les textes susvisés". - Toulouse, 11 mai 1998 (juris-data n° 043512) : GROUPAMA soutenait que la garantie "catastrophe naturelle" n'était que subsidiaire et qu'en l'espèce les constructeurs étaient responsables. La cour d'appel lui a donné raison. - En revanche, la Mutuelle de Poitiers assurances s'est vue condamnée à indemniser son assuré en multirisque habitation suite à une sécheresse reconnue comme exonératoire pour le constructeur (Civ. 1ère, 7 juillet 1998, R.G.A.T., 1998, n° 4, p. 841, note F. Vincent). - Toulouse, 11 août 1998 (MAAF/ Préservatrice foncière de France, juris-data n° 044252) : "l’assureur qui ne doit sa garantie dans le cadre de l'assurance catastrophe naturelle que pour les dommages ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, n'est pas tenu de garantir l'assuré suite aux désordres subis par les immeubles appartenant à ce dernier que s'il est certain que la sécheresse - qui a fait l'objet de deux arrêtés de catastrophe naturelle - a contribué à la 120 déstabilisation de l'ouvrage, il est tout aussi certain que ce phénomène naturel n'est pas la cause déterminante des désordres qui auraient pu être évités si les mesures habituellement nécessaires pour les prévenir avaient été prises. " - Civ. 1ère, 7 mars 2000, (Dubier c/ MACIF, R.G.A.T. 2000, 599 , note F. Vincent ; Argus, n° 6731, 30 mars 2001) : la cause prépondérante des dommages est le défaut de fondation, et d'évacuation des eaux et la sécheresse n'a pu qu'aggraver les effets de l'implantation de l'ouvrage sur un massif argileux. - Paris, 19e ch. B, 10 janv. 2002 ( RG n° 1999/06219, D. Actualité, 25 février 2002, note S. Rougon-Andrey) : la cour d’appel infirme la décision des premiers juges qui avaient admis l’état de catastrophe naturelle constaté par trois arrêtés pour un immeuble dont l’expertise révélait que les dommages étaient dus à la sécheresse pour 50%, le reste étant attribué au mauvais état préexistant. Pour la Cour, le demandeur n'apporte pas la preuve, dont il a la charge, que les dommages trouvent leur origine dans la sécheresse, les désordres de l'immeuble ont été “seulement” aggravés par la sécheresse. Ajoutons que le refus du lien de causalité a été également admis en matière de garantie contractuelle des effets du vent : - Civ. 1ère, 23 mai 2000 (n° 928 F-D, Caro c/ AXA assurances, Argus, n° 6731, 30 mars 2001) : un mur pignon s'était effondré, les assurés demandent l'exécution de la garantie "Tempêtes". Ils seront déboutés de leur demande tant en première instance qu'en appel et leur pourvoi sera rejeté. En effet, la Cour d'appel relève que l'effondrement du mur résultait de ce que, pendant une période de pluviosité exceptionnelle, l'eau s'était infiltrée dans le pissé composant le mur, et de ce que l'inadaptation de l'enduit au matériau du mur avait empêché l'évaporation. Le vent n'a donc pas joué un rôle déterminant et n'était pas la cause directe de l'effondrement du mur. C. Les actions subrogatoires De telles actions sont prévues à l'article L. 121-12 du Code des assurances : - "L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur". Ce recours peut-être exercé contre toute personne responsable, quel que soit le fondement de la responsabilité (Civ. 1 ère, 9 novembre 1999, pourvoi n° 97-16.306). De telles actions ont été menées à l'encontre de personnes privées et de personnes publiques. 1°) Les actions subrogatoires devant le juge civil Ainsi, suite à une inondation, la société Les Mutuelles Unies, assureur d'un locataire a exercé, mais sans succès, une action en responsabilité à l'égard du propriétaire (Civ. 3 ème, 29 novembre 1989, pourvoi n° 88-15.460). L'arrêt controversé173 de la Cour d'appel de Nîmes en 173 Partie I, Titre I, chapitre 2, §3 121 date du 22 septembre 1992 (R.G.A.T., 1992, n° 4, 873, note J. Bigot) a été rendu suite à l'appel de l'U.A.P., assureur multirisques habitation, subrogé dans les droits de l'assuré indemnisé par lui, introduit après un refus du Tribunal de grande instance de Nîmes de reconnaître la responsabilité du constructeur. En revanche, la SA Préservatrice Foncière Assurance IARD a obtenu gain de cause contre le vendeur de l'appartement de son assuré, l'arrêté de catastrophe naturelle relatif aux pluies n'ayant pas caractérisé la force majeure (Montpellier, 3 décembre 1996, juris-data n° 034657), de même pour les AGF envers l'entrepreneur ayant réalisé les canalisations (Toulouse, 3 février 1997, juris-data n° 040387) ou le constructeur d'une usine (Civ. 3ème, 4 juin 1997, R.G.A.T., 1997, n° 3, 785, note H. Périnet-Marquet). Une précision intéressante est apportée par l'arrêt précité du 4 juin 1997, le pourvoi reprochait à l'arrêt d'appel d'avoir déclaré recevable le recours des A.G.F. car "lorsqu'un assureur a payé à tort une indemnité au titre des catastrophes naturelles, le préjudice étant dû en réalité à la faute d'un tiers, il lui incombe d'exercer une action en répétition contre l'assuré après avoir démontré que les indemnités avaient été versées à tort le préjudice étant du à une autre cause". La Cour de cassation, interprétant fidèlement l'article L. 121-12, accepte pleinement le recours subrogatoire de l'assureur : - " Ayant relevé que l'état de catastrophe naturelle n'absorbait pas la responsabilité des tiers, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que les AGF étaient fondées, quelle qu'ai été la cause de leur paiement, à se prévaloir de la subrogation légale de l'article L. 121-12 du Code des assurances vis-à-vis de la société GA, dont la responsabilité été retenue sur le fondement de la garantie décennale, aucune disposition légale n'imposant à l'assureur de recourir préalablement à l'encontre de son assuré." Si la compagnie AIG Europe a été déboutée de son recours en garantie contre les constructeurs et leur assureur par la première Chambre civile le 26 janvier 1999 (pourvoi n° D 97-10.028, Lamy assurances, mars 1999, n° 1614), l'arrêt casse partiellement sans renvoi l'arrêt d'appel ayant condamné l'assureur à payer des dommages-intérêts pour procédure abusive. La présence d'un assureur dommage aux biens dans un litige avec un constructeur n'est bien entendu pas limitée aux seules inondations. Ainsi, la S.M.A.L.C a exercé avec succès un pourvoi en cassation contre les propriétaires d'un immeuble qui avait endommagé un bâtiment communal suite à un glissement de terrain consécutif à de fortes pluies (Civ. 3 ème, 14 février 1996, juris-data n° 000632). En matière de sécheresse, la GMF a obtenu gain de cause en cassation contre les constructeurs (Civ. 3ème, 30 janvier 1996, pourvoi n° 94-13.029). De même pour la MACIF envers le constructeur et son assureur le GAN lequel était à son tour reçu dans son action en garantie contre les architectes (Civ. 3ème, 9 décembre 1998, pourvoi n° 97-12.913) Signalons également une action subrogatoire contre le locataire ( Civ. 1ère, 7 février 1995, R.G.A.T., 1995, 440, note J. Kullmann), bien que l'arrêté de cat'nat ait été pris suite à des pluies exceptionnelles, la Cour a refusé l'indemnisation d'un dommage parce que la canalisation de descente des pluies n'avait pas été correctement réalisée. 2°) Les actions subrogatoires devant le juge administratif 122 Il en va de même en droit public où certaines compagnies d’assurance agissent contre les personnes morales de droit public. Ainsi on peut relever une quinzaine de décisions émanant des juridictions administratives dans lesquelles une mutuelle d’assurance est partie. Ce chiffre est relativement faible par rapport au nombre total de décisions consultées portant sur les inondations et la force majeure. L'existence de tels recours, même peu nombreux, prouvent en tout état de cause que des assureurs ne sont pas toujours disposés à assurer aveuglément la charge de l'indemnisation des victimes d’inondations. On trouve des recours devant le juge administratif qui ont pour fondement une action dirigée par une compagnie d’assurance contre une personne morale de droit public, telle une commune, un département voire l’Etat. - Ainsi, dans l’arrêt du 29 février 1980 le Conseil d’Etat condamne le District urbain de Nancy à payer une indemnité à la compagnie Lloyd's (District urbain de Nancy c/Société des “ Etablissements Jules Weiller ” et Compagnie Lloyd's de Londres, n°3.875). - Dans une décision du 28 février 1986 (C.E., Commune du Vernet c/Groupement français d’assurance, assureur de M. Lucien Bessières, n°42.258), la haute assemblée admet la condamnation de la commune à verser au Groupement français d’assurance, subrogé à M. Bessières, une somme d’argent. - Au-delà, dans une autre affaire, La MACIF a recherché la responsabilité de la puissance publique mais son action a échoué : “ En l'espèce les crues de la Loire provoquées par des pluies de classe millénaire ont présenté, en raison de la violence des pluies, de l'intensité et du caractère imprévisible de la montée des eaux, le caractère d'un événement de force majeure. Ainsi, la responsabilité des personnes publiques ne pouvait être engagée que dans la mesure où les conséquences dommageables de la crue auraient été aggravées du fait de leur comportement fautif ou du fait d’un défaut d’entretien normal ou de conception d’ouvrages publics ”, ce qui n’apparaît pas en l’espèce (TA Lyon, 11 février 1987, MACIF et FONSOMACIF). Il est intéressant de se référer à un exemple jurisprudentiel dans lequel, l’action est dirigée contre l’Etat. Telle est la situation rencontrée dans un arrêt du 12 juin 1989 où on peut lire, - “ les inondations survenues dans les propriétés…ont pour origine le système insuffisant d’écoulement des eaux pluviales de la route nationale 7 et engagent la responsabilité de l’Etat ; qu’aucune faute ne peut être retenue à la charge des victimes, que la caisse régionale des mutuelles agricoles Drôme-Ardèche, subrogée dans les droits des victimes était, dès lors, en droit de demander remboursement à l’Etat des sommes qu’elle a versées à MM…en exécution des contrats d’assurances souscrits par ces derniers au titre des inondations… ” (C.E., Ministre de l’urbanisme, du logement et des transports c/MM Seignobos et Mion et Caisse régionale des Mutuelles agricoles Drôme-Ardèche, n°71.291). Il existe d’autres exemples dont on ne citera ici que les références et la solution retenue : - CAA de Nantes, 28 novembre 1991, Commune de Thaon c/ M. Anne et la MACIF, n°89NTO1552, C.A.A. de Nantes, 28 novembre 1991, Commune de Thaon c/ M. Varagnat et la MACIF, n°89NTO1556, CAA de Nantes, 28 novembre 1991, Commune de Thaon c/ M. Mauger et la MACIF, n°89NTO1555 : responsabilité de la commune condamnée à rembourser les assureurs subrogés dans les droits de leurs assurés ; 123 - CAA Paris, 19 septembre 1991, Commune de Livry-Gargan c/MAIF, n°89PA00541 : suite à une mauvaise conception de l'égout communal, la commune a été condamnée à rembourser la MAIF ; - T.A. Montpellier, 2 février 1994, GMF c/commune de Nîmes : des inondations violentes sont survenues à la suite d'un orage auquel le caractère de force majeure est refusé par le tribunal. L'origine des désordres "doit être attribué à l'insuffisance du réseau public d'évacuation des eaux pluviales, qui s'est révélé inapte à collecter sans débordement, les importantes masses d'eau issues de l'orage". La commune de Nîmes est condamnée à payer à la GMF la somme de 74 571, 33 F versée par la compagnie d'assurances à ses sociétaires. - T.A. Montpellier, 13 mai 1994, Compagnie d’assurances “ Le Continent ” SA c/ Commune de Poulx : responsabilité de la commune car le sinistre est dû aux insuffisances du réseau public d'évacuation d'eau ; C.A.A. Nantes, 24 mars 1994, n°92NT00227, Norbert Guilbaud et Société Mutuelles Régionales d’assurances : condamnation du département à verser 328 594, 50 F à l'assureur ; - TA Montpellier, 18 décembre 1996, MAIF c/commune de Saint Jean Pla de Corts : pas de force majeure malgré un arrêté interministériel d’état de catastrophe naturelle mais il y a eu construction sans permis dans une zone inondable classée non constructible, donc faute du propriétaire limitant l’indemnisation ; - TA Saint-Denis de la Réunion, 11 juin 1997, n°74.95, Melle Hen-Ting, la MAIF c/Conseil général de la Réunion, Préfet de la Réunion (D.D.E.), commune du Tampon : remboursement à la MAIF “ laquelle subroge Mlle Hen Ting à hauteur des sommes qu’elle lui a versées dans le cadre de son contrat d’assurance ”. Et récemment, le 8 mars 2002, le tribunal administratif de Marseille a condamné la commune de Perthuis et le syndicat Durance-Perthuis à rembourser les 781 541 euros versées par deux compagnies d’assurance à la suite des inondations de 1994. Le tribunal, saisi par les assureurs, a considéré que la commune n’avait pas convenablement entretenu les digues, l’état de catastrophe naturelle avait donc été déclaré à tort174. D. L'enrichissement sans cause Signalons également en droit civil, la possibilité pour l'assureur qui a versé une indemnité d'assurance dans la croyance erronée qu'il devait garantir le sinistre d'exercer un recours après paiement contre celui qui est réellement débiteur. Il ne s'agit pas là d'une action subrogatoire mais d'une action fondée sur l'enrichissement sans cause. Civ. 1ère, 4 avril 2001 (n° 98-13.285 ; AM Prudence / Mutuelles du Mans, Lamy assurances, juillet 2001, n° 867) : un assureur garantissant une maison individuelle au titre d'une police d'assurance habitation avait indemnisé les propriétaires à la suite de désordres qu'il imputait à un phénomène de sécheresse. Une expertise judiciaire ayant révélé ultérieurement que les désordres avaient en réalité été causés par des vices de construction imputables au seul On notera que la presse a employé les termes “ une commune condamnée à une lourde amende” entretenant ainsi la confusion entre la sanction pénale et une décision du juge administratif ; voir not. Le Monde, 12 mars 2002 174 124 constructeur, la Cour de cassation admet la demande en remboursement de l'assureur habitation auprès du constructeur et de son assureur : - " En application du principe général du droit selon lequel nul ne peut s'enrichir injustement au dépens d'autrui, celui qui, par erreur, a payé la dette d'autrui de ses propres deniers, a, bien que non subrogé aux droits du créancier, un recours contre le débiteur … " Ainsi, l'existence de telles actions mises en œuvre par des compagnies d’assurance prouvent qu’elles ne sont pas toujours disposées, et on les comprend, à assurer aveuglément la charge de l'indemnisation. En effet, il est normal sinon indispensable de découvrir quels sont les responsables et d’obtenir la constatation de leur responsabilité dans les drames issus d’inondations. Outre les actions que nous venons d’évoquer, il convient de rappeler les possibilités de refus de garantie prévues par l'article L. 126-1 du Code des Assurances pour les constructions neuves situées en zone rouge et pour les constructions existantes qui ne sont pas conformes aux PPR dans un délai de 5 ans. Dès lors que l'assuré essuie le refus de deux entreprises d'assurance, il a la faculté de saisir le bureau central de tarification afin que celui-ci impose à l'une d'entre elles de le garantir. Or, le bureau de tarification fixe des abattements spéciaux dont les montants maximaux sont prévus par catégorie de contrats. Le BCT n'a été que peu saisi, mais ces cas pourraient bien faire école175. Ne devrait être indemnisé que celui qui mérite de l'être, il conviendrait notamment de vérifier que l'assuré a pris toutes les mesures habituelles pour prévenir un dommage futur. Mais est-ce techniquement réalisable ? 175 Ont été portées à notre connaissance, cinq interventions en 1995, une fois en 97, deux en 2000 et une fois en 2001. Cf. également § suivant 125 § 2 : Les réflexions et réactions des assureurs face aux risques naturels Les professionnels de l'assurance sont sensibles à la question des risques naturels et ont clairement manifesté leur intention de mener une réflexion approfondie sur la gestion de tels risques par la création au début de l'année 2000 d'une association "Risques naturels" également appelée "Mission risques naturels" commune à la FFSA (Fédération Française des Sociétés d'Assurance) et au GEMA (Groupement de Entreprises Mutuelles d'Assurance) et comportant 24 membres. La direction de cette Mission a été confiée à Monsieur Roland Nussbaum. Monsieur Nussbaum a présenté cette Mission dans la Revue Risques (N° 42, juin 2000). Parmi les objectifs fixés on notera notamment :"développer des synergies avec les pouvoirs publics dans le sens de l'incitation à la prévention et de la gestion intégrée des risques, et ce, à l'échelon national, régional ou local. Les synergies pourraient utilement porter sur tout le cycle de vie des Plans de prévention des risques, de leur prescription pour les services de l'Etat, à l'information sur l'exposition aux risques et au débat public sur les niveaux de risques acceptables". Pour son Directeur, "La création d'une association, la Mission Risques Naturels, au sein des groupements techniques de la profession des assurances répond à la volonté des sociétés d'assurance de se positionner parmi les nombreux acteurs intervenant dans la gestion des risques naturels, autour des Pouvoirs publics. L'enjeu n'est rien moins que contribuer à un pilotage plus optimal du système de gestion des risques en France, notamment par le développement d'une connaissance économique des risques naturels" 176. La volonté des professionnels de l'assurance de participer, dans leur sphère professionnelle d'activité, à la prévention est donc clairement annoncée. Des discussions avaient été initiées dès 1998 au niveau des pouvoirs publics et en 1999 les organisations professionnelles engagèrent une réflexion commune avec les services de l'Etat. Un groupe fut créé afin de trouver des solutions car "pour la plupart des acteurs du régime Cat-nat, hormis peut-être des assurés qui n'en avaient pas conscience, une réforme d'ensemble du système d'indemnisation mis en place en 1982 était devenue inévitable sous peine de le voir rapidement exploser et disparaître"177. L'équilibre financier du régime est bien entendu une préoccupation majeure des professionnels, l'aspect prévention n'a toutefois pas été négligé lors des discussions et des propositions. On peut d'ailleurs s'interroger sur le point de savoir si la prévention ne serait pas un moyen s'assainir financièrement le régime d'indemnisation de la loi de 1982. Parmi les mesures envisagées on peut distinguer deux catégories, celles relatives à la définition même de l'événement naturel, notamment son intensité et le lien de causalité, et celles portant sur plus précisément sur l'aspect financier du régime. Patrick Bidan178, de la Caisse centrale de réassurance décrit dans la revue Risques de juin 2000 les principales composantes de la réforme pour laquelle au cours de l'été 1999, le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie marqua son accord : - Mesures visant la procédure de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle : 176 R. NUSSBAUM, "Pour une géographie économique des risques naturels", Revue de géographie de Lyon, novembre 2000 177 P. BIDAN, "Indemnisation des catastrophes naturelles : de la naissance vers l'âge adulte", Risques n° 42, juin 2000, p. 80 178 loc.cit. 126 - - - - - Nouvelle approche de l'instruction des dossiers par les préfectures et notamment des dossiers sécheresse - Nouvelle rédaction des arrêtés catastrophes naturelles mettant davantage l'accent sur la nécessité de l'existence d'un lien de causalité entre l'événement naturel et les dommages constatés Mesures visant à restaurer l'équilibre financier du régime et à reconstituer les provisions d'égalisation dont le relèvement de trois points du taux légal de la surprime catastrophes naturelles Mesures d'encadrement des dépenses : - Actualisation des franchises - Création d'une franchise spécifique pour les sinistres provoqués par la sécheresse Mesures visant à promouvoir la prévention : - Mise en place d'une modulation des franchises par commune. Un coefficient multiplicateur sera appliqué au montant de la franchise légale en fonction du nombre d'arrêtés de reconnaissance de catastrophe naturelle dont la commune a déjà fait l'objet pour une même nature de péril depuis le 2 février 1995 (loi Barnier), et ce dès lors qu'elle n'aura mis en œuvre aucune mesure de prévention. Cette modulation prendra fin dès la prescription d'un plan de prévention des risques (PPR) - Prise en charge par le Fonds national de prévention des risques naturels majeurs d'une partie du financement des PPR Mesures techniques : - Modification de l'assiette sur laquelle est appliquée la surcotation "Cat-Nat" - Harmonisation des méthodes d'expertise et de gestion des sinistres Une variation du taux en fonction de la sinistralité n'a pas été retenue de crainte de déséquilibrer le régime mais également en raison d'obstacles matériels en l'état actuel de la cartographie des risques. C'est ce que précise Serge Magnan, Président du Centre National de Prévention et de Protection179 : "Pour favoriser la prévention, certains auraient souhaité que les cotisations soient différenciées selon les risques encourus par chaque assuré. Cette orientation pourrait déséquilibrer le régime, voire le ruiner, car elle conduirait à alléger la contribution de la grande masse des assurés qui sont peu exposés aux risques, alors que celle des assurés très exposés, infiniment moins nombreux, ne pourrait être suffisamment majorée... Au demeurant, il n'existe pas de cartographie des risques naturels couvrant l'ensemble du territoire, et la lenteur avec laquelle sont établis les plans de prévention des risques ne nous laisse guère espérer pouvoir en disposer avant de nombreuses années. Dès lors, toute approche technique de la tarification des risques est en l'état actuel des choses irréaliste". S'agissant de l'événement naturel lui-même, il serait souhaitable de limiter la solidarité nationale aux événements ayant entraîné des dommages d'une certaine ampleur et conformément à la lettre de l'alinéa 3 de l'article L. 125-1 du Code des assurances de limiter l'indemnisation aux dommages ayant eu pour cause l'intensité "anormale" de l'événement naturel. Mais, s'interrogent Philippe Vesseron, Directeur de la Prévention des pollutions et des risques, et Pascal Douard, Délégué adjoint aux risques majeurs 180, "comment traiter les événements moins exceptionnels ? Ne faut-il pas être plus sélectif que nous le sommes actuellement pour déterminer l'intensité anormale d'un agent naturel ? Le rapport du député Dauge remis au Premier ministre à la fin de l'année 1999 insiste sur les dangers d'une banalisation de la notion de catastrophe. Nous devons seulement considérer comme catastrophes naturelles les événements dont le retour est localement de l'ordre de cinquante ou 179 180 S. MAGNAN, "Solidarité et catastrophes naturelles", Risques n° 42, juin 2000, p. 89 Ph. VESSERON et P. DOUARD, "Prévention et solidarité", Risques n°42, juin 2000, p.98 127 cent ans, voire plus, mais certainement pas de quelques années : il est impératif que les particuliers, les entreprises et les communes se donnent les moyens de gérer directement la prévention et la mitigation des événements dont le temps de retour est faible… Progresser dans ce sens suppose une réflexion sur la notion d'intensité anormale (qui ne se réduit pas, en fait, à une simple fréquence), une publicité et une transparence des règles retenues pour déclarer catastrophe naturelle un événement particulier, et surtout une possibilité de couverture assurantielle proposée systématiquement dans le cadre de la couverture multirisque habitation mais demeurant optionnelle, pour garantir l'assuré pour les événements de faible intensité. Cette possibilité rejoindrait dans ses effets l'approche consistant à moduler les cotisations d'assurance catastrophes naturelles à l'intérieur d'une certaine fourchette, créant ainsi une information sur l'exposition aux risques naturels, et permettant d'encourager financièrement des comportements de prévention. Cette mesure suppose cependant une modification de la loi de 1982 qui n'envisage qu'un taux de cotisation unique. Les réflexions actuelles ont privilégié pour l'instant une modulation des franchises en fonction de la sinistralité et de l'existence de démarches de prévention." Pour Philippe Moulay, de la Macif, garantir en cat'nat' seulement les événements exceptionnels est un principe fondamental, "il est donc nécessaire que les arrêtés ne soient pris que pour des phénomènes de récurrence minimale de dix ans" 181. Se pose également la question des termes de la loi de 1982 selon lesquels la déclaration de catastrophe naturelle suppose que les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises, on sait le peu d'importance attaché à cette exigence légale. Pour Philippe Vesseron et Pascal Douard 182, "cette condition précisée par le législateur est rarement mise en œuvre, probablement faute d'un référentiel adéquat. Or, ce référentiel ne résulte pas uniquement de la mise en place des PPR… En ce qui concerne une activité située en zone inondable pour laquelle existe une cartographie, on pourrait estimer que le stockage des produits en deçà de la cote de l'inondation décennale a par trop ignoré les mesures à prendre pour prévenir les dommages. Dans une commune ayant connu depuis vingt ans plus de dix catastrophes naturelles, l'absence de projet de prévention réalisé ou projeté par cette commune pourrait être jugée anormale." Les travaux communs entre la FFSA, le GEMA et la CCR effectués en 1998 et 1999 ont permis d'aboutir à une proposition concrète de réforme qui avait été approuvée par le ministère des finances en juillet 1999. Parmi les mesures adoptées figurent l'augmentation du taux de la surprime catastrophes naturelles de 9 à 12% laquelle a été appliquée dès septembre 1999, le projet de loi d'orientation pour l'Outre-Mer, et celle qui est susceptible d'avoir un effet sur la prévention est la publication d'un arrêté pris le 5 septembre 2000 par le Ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie portant modification du régime d'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles. En effet, outre un rehaussement des taux de franchise, c'est donc finalement, parmi l'arsenal des mesures proposées, le système de la franchise modulable qui sera privilégié pour encourager la prévention. 181 Ph. MOULAY, "Catastrophes naturelles, un régime à restaurer", La Tribune de l'assurance, n° 26, juillet-août 1999 182 loc.cit. 128 Ainsi un des trois arrêtés du 5 septembre 2000183 ( NOR : ECOT0091129A) dispose : - " Art. 1er. - Après le troisième alinéa du paragraphe d de l'annexe 1 et de l'annexe 2 de l'article A. 125-1 du code des assurances est inséré l'alinéa suivant : - "Dans une commune non dotée d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles pour le risque faisant l'objet d'un arrêté portant constatation de l'état de catastrophe naturelle, la franchise est modulée en fonction du nombre d'arrêtés pris pour le même risque à compter du 2 février 1995, selon les modalités suivantes : - premier et second arrêté : application de la franchise ; - troisième arrêté : doublement de la franchise applicable ; - quatrième arrêté : triplement de la franchise applicable ; - cinquième arrêté et arrêtés suivants : quadruplement de la franchise applicable. Les dispositions de l'alinéa précédent cessent de s'appliquer à compter de la prescription d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles pour le risque faisant l'objet de l'arrêté portant constatation de l'état de catastrophe naturelle dans la commune concernée. Elles reprennent leurs effets en l'absence d'approbation du plan précité dans le délai de cinq ans à compter de la date de prise de l'arrêté ayant prescrit le plan." - Art. 2 - Il est ajouté au code des assurances un article A. 125-3 ainsi rédigé : - "Dans les communes non dotées d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles pour le risque concerné, l'arrêté interministériel portant constatation de l'état de catastrophe naturelle prévu à l'article L. 125-1 précise le nombre d'arrêtés relatifs au même risque pris depuis le 2 février 1995" Ces dispositions sont applicables depuis le 1er janvier 2001. Concrètement, s’agissant des habitations, des véhicules à moteur et des autres biens à usage privé pour un ou deux arrêtés, la franchise s’élève à 380 euros pour (2 500 FF). Avec un 3 e arrêté, cette franchise double et pour un 4e voire un 5e arrêté, elle passe respectivement à 1140 euros (7 500 FF) et 1520 euros (10 000 FF). Pour les biens à usage industriel, commercial ou artisanal, le coefficient multiplicateur aura pour effet de rehausser la franchise à 20 ou 30 ou 40% du montant des dommages 184. Ce système, ainsi que le relèvement des taux de franchise, devrait permettre un rééquilibrage des comptes mais c'est principalement l'impact sur la prévention qu'il conviendra de mesurer. En l'absence de PPR, c'est l'assuré qui fera "les frais" de cette carence. La commune ellemême n'en supportera les conséquences que si elle est parmi les assurés victimes d'un dommage. L'objectif ne peut donc être ici que de rendre l'absence de PPR impopulaire auprès des administrés de telle sorte qu'ils admettent plus facilement l'élaboration de tels plans ou même aient un rôle d'incitation. Pour Roland Nussbaum, "La France entre donc dans une ère d'action volontariste, autant que précautionneuse, de la part de l'administration qui fait dire que rien ne sera plus comme avant et qu'enfin le jour viendra où les PPR existeront là ils sont nécessaires et joueront pleinement 183 Arrêté du 5 septembre 2000 portant modification de l'article A. 125-1 et création de l'article A. 1253 du code des assurances, J.O. n° 211 du 12 septembre 2000, p. 14300 184 rappelons que pour les dommages imputables aux mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et/ou à la réhydratation des sols, pour lesquels le montant initial de la franchise est fixé à 1520 euros. 129 leur rôle de servitude d'utilité publique lors de la délivrance des permis de construire… ou lors des transactions foncières ou immobilières" 185. Il apparaît que nombre de maires se sont sentis concernés par cette disposition qui a provoqué une recrudescence de demandes d'élaboration de PPR186. Néanmoins, il est à craindre que les nouvelles mesures ne soient réellement incitatives qu'après un sinistre supplémentaire. Une interview de Daniel Cadoux, préfet de la Somme, publiée dans le journal Le Figaro du 27 avril 2001 et relative aux inondations de la Somme est particulièrement révélatrice des dispositions d'esprit de certains décideurs publics. - Question du journaliste : "Comment expliquez-vous la situation des 9 communes de la Somme qui sont menacées d'augmentation de leur franchise ? Et comment résoudre ce problème ?" - Daniel CADOUX, Préfet de la Somme : "Je viens de prendre un arrêté prescrivant ces PPRI. Cet arrêté paraîtra au recueil des actes administratifs avant que l'arrêté de catastrophe naturelle ne paraisse au Journal Officiel. Il ne devrait donc pas y avoir de problèmes avec les assureurs" - Journaliste : "Ne craignez-vous pas que les compagnies d'assurances attaquent le dispositif ?" - Réponse : "Les voies du droit sont ouvertes à tous. On ne peut cependant pas me reprocher de me précipiter après m'avoir dit que j'avais trop tardé !" Les réponses apportées au questionnaire 187 que nous avons diffusé aux maires ainsi que les nombres appels téléphoniques qui ont suivi cet envoi témoignent d’une réelle volonté des maires d‘ “ avoir un PPR ”, il apparaît également que l’arrêté du 5 septembre 2000 relatif à la modulation des franchises contribue à cette volonté. Il est à noter que les arrêtés de constation de catastrophe naturelle pour inondation pris, la plupart à tort, après les tempêtes de décembre 1999 sont comptabilisés pour les modulations de franchise. Des élus nous ont fait part de leur désarroi face à cette situation, les arrêtés relatifs aux tempêtes ayant concerné l’ensemble du département alors qu’habituellement le classement se fait par commune, des communes non inondées se sont vues imposer un arrêté “ inondation ”. Il apparaît également que ce sont parfois les préfets qui estiment la commune “ non prioritaire ” pour l’élaboration d’un PPR alors qu’il existe déjà, depuis 1995, plusieurs arrêtés de constatation d’inondation. Ainsi, se plaint le maire d’une commune des Yvelines “ comment expliquer ce décompte aux administrés, qui paieront une franchise triple, soit 7500F, à déduire du montant de leur remboursement. Concrètement (…) il ne semble pas que les habitants aient à déclarer des pertes d’un montant très largement supérieur ; ils en seront donc quasiment tous pour leur frais ”. Une autre remarque s’impose : en prenant comme point de départ du comptage des arrêtés portant constatation de l'état de catastrophe naturelle le 2 février 1995, date de la loi de Barnier et donc de l’instauration des PPR, l’arrêté du 5 septembre 2000 a un effet rétroactif. Sont en effet pris en compte les arrêtés cat’nat pris entre le 2 février 1995 et le 1er janvier 2001, or nombre de communes ont déjà à cette date deux arrêtés cat’nat pour inondation, ce qui signifie que lors de la prochaine inondation constatée et en l’absence d’élaboration d’un PPR, la franchise sera majorée. 185 R. NUSSBAUM, "Pour une géographie économique des risques naturels", Revue de géographie de Lyon, novembre 2000 186 P. BIDAN, intervention aux Rendez-vous de l'automne de l'ADRECA, Strasbourg, 12 novembre 2001. 187 Voir chapitre suivant 130 On relèvera également qu’en tenant compte des arrêtés pris à partir du 2 février 1995, sont comptabilisées des inondations antérieures à la loi Barnier, et donc antérieures à l’existence des PPR, dès lors que les arrêtés constatant ces événements ont été pris après le 2 février. Ainsi, entrent dans le décompte des inondations ayant affecté largement le Nord de la France entre le 17 et le 31 janvier 1995. Il aurait été plus judicieux que l’arrêté du 5 septembre 2000 sur la modulation des franchises vise les événements naturels postérieurs au 2 février 1995 et ayant donné lieu à des arrêtés de constatation de l’état de catastrophe naturelle. Que se passe-t-il si l'élaboration d'un PPR est engagée ? La pénalisation par la franchise disparaîtra et la disposition alors applicable est l'article L. 125-6 Code des assurances déjà cité : - “ Dans les terrains classés inconstructibles par un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé dans les conditions prévues par la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987 relative à l’organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l’incendie et à la prévention des risques majeurs, l’obligation prévue au premier alinéa de l’article 125-2 ne s’impose pas aux entreprises d’assurance à l’égard des biens et activités mentionnés à l’article L 125-1, à l’exception, toutefois, des biens et des activités existant antérieurement à la publication de ce plan. - ... A l’égard des biens et activités situés sur des terrains couverts par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, les entreprises d’assurances peuvent exceptionnellement déroger aux dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 125-2 sur décision du Bureau central de tarification... lorsque le propriétaire ou l’exploitant ne se sera pas conformé dans un délai de cinq ans aux mesures visées au 4° de l’article 40-1 de la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987”. Or cette disposition n'a guère démontré son efficacité lorsque le texte visait les PER. En 1994, Alexis Ruset, président de la Caisse centrale de réassurance déplorait que les assureurs utilisent rarement les dispositions qui leurs confèrent la possibilité de refuser un risque si celui-ci est contraire aux règles de l'urbanisme ou de saisir le Bureau central de tarification lorsque l'assuré ne s'est pas conformé aux prescriptions édictées par un PER dans le délai requis de 5 ans : "Ce faisant, ils n'exercent pas la pression souhaitable sur les collectivités locales afin de stimuler des mesures de prévention"188. Il ne semble pas qu'en pratique, le passage au PPR ait conféré davantage de succès à l'article L. 125-6 ; un questionnaire adressé aux membres de la Mission "risques naturels" avait pour objectif de nous permettre de connaître plus précisément la position des assureurs par rapport à ce texte. Malheureusement, aucune réponse n'a été donnée malgré les démarches entreprises par le Directeur cet organisme. Par ailleurs, on se heurte ici à un problème technique à savoir la connaissance exacte du risque par l'assureur en l'absence d'une cartographie suffisamment complète et lisible. Des progrès ont été récemment réalisés dans ce domaine : la Mission Risques Naturels a créé un site portail professionnel donnant notamment accès à toutes les cartes d’aléas publiées sur internet par les différentes sources publiques productrices de cartographie réglementaire ou informative du risque ainsi qu’à des informations de situation d’avancement des différents 188 A. MELLY, "Entretien avec Alexis RUSET : Force et faiblesse de la loi d'indemnisation des cat. nat. En France", L'Assur. Fr., n° 691, 15 au 28 février 1994 131 documents administratifs sur le risque par commune complétées par une restitution cartographique sous forme d’atlas des situations annuelle par région et par département. Ainsi que le souligne Roland Nussbaum, “ de façon irréversible, la connaissance des risques naturels en France fait irruption parmi les nombreux domaines d’application des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) et de l’ingénierie de la connaissance (knowledge management). Cet apport irremplaçable devrait rapidement permettre aux praticiens d’accéder à de nouveaux savoirs faire et de nouvelles façons d’exercer leur métier ”189. Par ailleurs, les assureurs pourraient refuser d'indemniser les dommages si après expertise il s'avère que le bien sinistré était situé dans une zone classée inconstructible. En effet l'assuré est tenu de déclarer exactement lors de la conclusion d'un contrat d'assurance toutes les circonstances connues de lui et de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend à sa charge (art. 113-2, al. 2 Code des assurances) et le souscripteur est obligé de déclarer à l'assureur les circonstances spécifiées dans la police qui ont pour conséquence d'aggraver les risques (art. 113-2, al.3). Il serait souhaitable que tous les contrats ayant trait à la garantie cat-nat contiennent une rubrique à remplir par l'assuré et concernant la situation du bien par rapport au PPR. Roland Nussbaum rappelle fréquemment l'existence le l'article 125-6 comme mécanisme d'incitation à la prévention au travers de la modulation de la franchise, nous le citons 190 : " Cette franchise peut faire l’objet de majorations qui deviennent substantielles, en particulier pour les entreprises, et ce dans plusieurs cas : Un premier cas résulte de la faculté que conservent les sociétés d’assurance de ne pas souscrire un risque ou de résilier après sinistre. La garantie étant obligatoire, le code des assurances prévoit alors la faculté pour les assurés qui ont essuyé un refus d’assurer191 de deux sociétés d’assurance de saisir le bureau central de tarification (BCT) pour que celui-ci impose les conditions à l’assureur retenu par l’assuré. Le BCT a compétence pour majorer dans certaines limites le niveau de franchise et éventuellement restreindre l’étendue de la garantie (les biens couverts) dudit contrat. La majoration de franchise peut atteindre jusqu’à : o 25 fois la franchise en risques de particuliers (soit 62,5 kF), o 30 % des dommages, avec un minimum de l’ordre de 200 kF en dommages directs, et 30 jours en pertes d’exploitation, avec un minimum de l’ordre de 200 kF également, en pertes d’exploitation, par établissement et par événement, en risques professionnels et d’entreprise. Un second cas, également prévu dans le code des assurances, dispense l’assureur, dès lors qu’un PPR est adopté, de garantir toute construction neuve en zone rouge et R. NUSSBAUM, “ Connaissance et prévention des inondations en France, enjeux d’assurance ”, MRN-23 janvier 2002 190 R. NUSSBAUM, "Présentation du site portail de la Mission Risques Naturels", SIRNAT 2001, Sophia Antipolis, 6-7 décembre 2001 ; Intervention à la Journée AFPCN, ENGREF, Paris, 1 er octobre 2001 191 Pour R. NUSSBAUM “ Cela se produit davantage, en raison de la meilleure connaissance du zonage de risques par les assureurs (ce fut notamment le cas d’un hypermarché situé en zone rouge du PPR de Saint Nicolas de Redon, dont l’assureur a résilié le contrat après les inondations de l’hiver dernier et qui, ne trouvant plus d’assureur, a fait appel au BCT) ”, nous précisons qu’il s’agit de l’hiver 2000-2001 189 132 subordonne la garantie au respect de mesures de réduction de la vulnérabilité pour les constructions nouvelles en zone bleue. Pour ces mêmes zones, les constructions existantes ont un délai de 5 ans pour se conformer aux prescriptions du PPR, délai au terme duquel l’assureur peut demander à vérifier la conformité. En cas de non conformité (immédiatement pour les constructions neuves, au terme des 5 ans pour les constructions existantes), il peut cette fois lui-même saisir le bureau central de tarification (BCT) pour que celui-ci impose à l’assuré la même gamme de conditions restrictives que celles évoquées ci-dessus (majoration de franchise). " En 2001, la Commission plénière des assurances de biens et de responsabilité a souligné que les sociétés d'assurance devaient faire preuve de souplesse devant les problèmes rencontrés par les assurés après les événements catastrophiques récents. Une des mesures préconisée est en faveur de la prévention : les conditions d'application de la garantie valeur à neuf (reconstruction sur place et à l'identique) ne doivent pas être appliquées avec rigidité lorsque l'assuré prend l'initiative de se déplacer dans une zone moins exposée 192. Comme en matière de PPR, les inondations de la Somme ont relancé le débat sur la prévention et la commission d’enquête s’est penchée sur la question et a fait des propositions193 pour que le régime des catastrophes naturelles respecte l’équité entre assurés et prenne mieux en compte leurs efforts de prévention. Afin de ne pas laisser certaines personnes “ au bord du chemin ” , la commission préconise "en liaison avec les assureurs, une meilleure information des populations résidant dans des zones à risque, sur la double nécessité de s'assurer et de réactualiser régulièrement ledit contrat."194 Est bien entendu abordé le problème de la relation entre assurance et prévention et on ne s’étonnera pas que la commission préconise : "Pour un régime plus préventif : utiliser l'indemnisation comme levier pour développer une véritable politique de prévention ". S’agissant de la nouvelle modulation des franchises en vigueur depuis le 1er janvier 2001, le rapport précise que "toutefois, il faut veiller à ce que la prescription de tels plans de prévention des risques, destinés à éviter les effets de la modulation des franchises, accélère véritablement leur approbation et qu'ils ne soient pas laissés “ en jachère ” pendant cinq ans". Il regrette que la modulation "fait peser les effets de la négligence des pouvoirs publics et des acteurs locaux sur les assurés." En ce qui concerne les primes, l’idée d’une modulation en fonction de la situation géographique a de nouveau été avancée mais il a été relevé également qu’un tel système serait relativement plus équitable. Une suggestion intéressante a été effectuée par M. Philippe Vesseron, délégué aux risques majeurs, il conviendrait "d'inciter les assureurs à développer un mécanisme de rachat des franchises, qui pourrait être fondé sur une tarification tenant compte de la prévention des risques. La multiplication des interventions du bureau central de tarification permettrait de réguler les tarifications, afin que chacun ne paie pas le même prix, quels que soient les efforts de prévention fournis". La commission d’enquête propose la suppression du tarif unique de la surprime “ cat’nat’ ”, l’Etat se contentant d’encadrer les tarifs : "le niveau minimal de la prime, fixé par l'Etat, 192 FFSA Infos, n° 6, juin 2001 Marcel DENEUX, Rapport n° 34, remis au Président du Sénat le 18 octobre 2001 194 Proposition n° 25 193 133 maintiendrait l'exigence de solidarité nationale et de mutualisation de la charge et la partie variable du taux de prime encouragerait les assurés à tout mettre en œuvre pour limiter le montant de leur prime." La commission propose donc de "rendre le taux de la surprime variable (dans une fourchette fixée par l'Etat), librement négocié par l'assureur et l'assuré en fonction des efforts de prévention entrepris" tout en ayant conscience du fait que la réduction portera le plus souvent sur une somme modique. A notre sens, il ne sera effectivement guère possible d’obtenir une décote de la prime suffisamment intéressante pour réaliser une incitation à la prévention. Parmi les solutions proposées, on trouve l’idée d’une décote de l’indemnisation pour les sinistres à répétition : "Il s'agirait ici de prendre en compte les “ mesures habituelles ” de prévention demandées à l'assuré et d'inciter l'assureur et l'assuré à définir ensemble un programme de petits travaux peu coûteux qui permette de limiter les futurs besoins d'indemnisation." La commission est dans le vrai lorsqu’elle considère qu’il "semble, en effet, important de bien distinguer la véritable catastrophe naturelle, imprévisible et pour laquelle le principe de solidarité nationale trouve évidemment à s'appliquer, de l'événement, certes naturel et d'intensité anormale, mais récurrent." Reste à savoir comment, et par qui, se feront les vérifications. De telles vérifications, tout à fait souhaitables, ont néanmoins un coût qu’il faudra alors bien financer. La commission suggère encore d’encourager les petits travaux de prévention qui peuvent être réalisés par les particuliers, en dehors de toute obligation liée à un plan de prévention des risques. Il apparaît que "le ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement, la profession des assureurs et les corps du bâtiment concernés se sont engagés dans une démarche de recensement des bonnes pratiques en cette matière". La commission propose par conséquent de "poursuivre le recensement des bonnes pratiques en matière de construction face au risque d'inondation. Engager une démarche de certification et subventionner les travaux correspondants sur le budget de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH)"195. 195 Proposition n° 29 134 Chapitre 3 : Les communes face au risque inondation : une enquête sur la sensibilité au risque “ inondation ” des élus locaux Enquête diligentée par Marie-France STEINLE-FEUERBACH Dépouillement et analyse des résultats par Valentine HEINTZ Notre analyse porte sur l’ensemble du questionnaire. Elle se divise en deux parties afin de suivre un déroulement similaire à celui du support d’enquête (en annexe de ce chapitre). De ce fait, nous allons tout d’abord rappeler le contexte de l’enquête, puis nous intéresser aux réponses des maires telles qu’elles furent formulées par ceux-ci et enfin, aborder la phase d’évaluation économétrique du thème, à savoir la gestion du risque, par les maires, au moyen du plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPR). Ce chapitre se subdivise ainsi en deux grands titres : le premier présente les différents résultats statistiques en replaçant l’élu local face à sa gestion du risque “ inondation ”, puis en mettant en évidence les préférences des élus, donc ses relations avec les représentants de l’Etat (ici, en l’occurrence, le préfet). Le second analyse ces dernières en testant certaines hypothèses, le but étant de savoir si le PPR constitue, en tant que tel, une mesure de gestion des risques ou une amélioration de la prévention du risque. § 1 : Analyse statistique L’analyse statistique brute tente de répertorier les différentes réponses des maires en insistant, en filigrane, sur les diverses interrogations qui se sont posées à nous. En effet, force est de constater que l’étude sur la responsabilité en cas d’inondation et les actions de prévention mises en œuvre par les maires permet de dégager le besoin d’informations exprimé par eux. Paradoxalement, alors même qu’au départ, nous nous situons dans une position de demandeurs de renseignements, tout au long de l’enquête, nous nous sommes retrouvés en tant “ qu’informateurs ” des élus locaux. Indéniablement, les inondations reproduisent une préoccupation majeure des élus. A. L’enquête Cette étude a été réalisée par le CERDACC. Pour cette étude, l’échantillon total se compose de près de 2 450 individus qui se répartissent entre les différents départements. Le questionnaire avait été adressé au 5718 communes ayant fait l’objet d’au moins deux arrêtés de déclaration d’état de catastrophe naturelle pour inondation, la liste de ces communes nous a été transmise fin 2001 par le Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement. Ces zones sont homogènes du point de vue des risques naturels prévisibles, mais présentent certaines différences dans la mise en œuvre des plans de prévention, tel que nous allons le voir. L’enquête a été réalisée par voie postale en janvier 2002. 135 1. Le support d’enquête Les inondations représentent l’aléa dont la manifestation est la plus fréquente en France puisqu’elles touchent près de 10 % du territoire national. La réparation des dommages et la remise en l’état des lieux imposent de s’interroger sur la gestion de ce risque par les élus locaux. Ces derniers, susceptibles d’être mis en responsabilité en cas de non-réalisation de travaux de prévention, demeurent donc au premier plan de l’aléa inondation. Par conséquent, notre Centre a décidé de procéder à une enquête auprès des acteurs locaux afin de connaître leur position face à ce risque. a) Les objectifs de l’enquête Les objectifs de cette étude s’articulent ainsi autour de la stratégie des maires face au dit risque et, particulièrement, dans leur utilisation d’un PPR en tant qu’outil de prévention. Le support d’enquête est volontairement court pour éviter un faible taux de réponse. A ce titre, il mobilise immédiatement l’attention du maire, donc l’invite à partager son information sur son comportement face au risque avec notre Centre. Ipso facto, l’enquête comporte quatre volets différents : - le premier renseigne sur l’existence d’un contentieux portant spécifiquement sur les inondations : le contentieux est-il civil, administratif ou pénal ? Le cas échéant, l’élu est amené à préciser les références des éventuelles procédures ; - le second porte sur l’effet d’expérience : il s’agit de mettre en évidence la gestion ex post du risque du maire en observant un possible changement comportemental suite à des événements intervenus dans sa localité ; - les deux derniers volets permettent de dégager, soit directement soit indirectement, l’utilisation du PPR pour le risque “ inondation ”. Ici, le maire peut librement s’exprimer sur son élaboration (ou non), les difficultés rencontrées, etc. Immédiatement, nous sommes amenés à constater qu’un grand nombre de maires introduisent un autre volet dans notre enquête. Spontanément, ils expriment le besoin d’expliquer le contenu de leur stratégie face aux inondations. Ainsi, ils présentent les divers travaux ou études menés par leurs soins, les modalités de réalisation et les questions d’urbanisme ainsi posées. C’est pourquoi, nous développerons ces nouveaux points car les maires nous ont interpellés sur le niveau d’intervention des différents acteurs (dont eux) susceptibles d’avoir contribué à la gestion du risque. Nous évoquerons aussi les relations des acteurs locaux avec les services déconcentrés de l’Etat, ainsi qu’avec les assurances en posant le problème de la franchise supportée par les assurés. b) Les limites de l’enquête Diverses remarques d’ordre général sur l’enquête en elle-même peuvent être apportées. Il existe chez les élus une certaine confusion dans les genres, par exemple entre les glissements de terrains et les risques d’inondations, les coulées de boues, les ravinements des terres, la catastrophe naturelle pour sécheresse et les calamités agricoles. Le fait que des coulées de boue puissent être classées par l’arrêté interministériel en “ Inondation et coulées de boue ” et entrent donc dans le champ des inondations leur est inconnu. La spécificité juridique de chaque événement naturel échappe ainsi à la plupart des 136 maires. Ils sont notamment incapables de différencier le régime contractuel d’indemnisation des effets du vent de celui des catastrophes naturelles organisé par la loi de 1982. Il est vrai que la confusion a été entretenue par les pouvoirs publics après les tempêtes de 1999. Ainsi, 125 communes ont soutenu n’être pas concernées par le questionnaire car elles n’avaient jamais été inondées, après vérification par nos soins, une seule commune n’était effectivement pas concernée (homonymie), les autres ayant toutes fait l’objet de deux arrêtés d’inondation dont l’un n’est pas identifié par les communes puisqu’il correspond aux tempêtes de 1999. Cette question a provoqué de nombreux appels téléphoniques au secrétariat du CERDACC, les communes ont alors été invitées à se connecter sur prim.net. Il en est de même pour le terme de contentieux : se faire indemniser par les assurances ne constitue pas un contentieux en soi, mais le déroulement normal d’un contrat d’assurances dans lequel le risque s’est avéré, pourtant la demande d’un arrêté de constatation de l’état de catastrophe naturelle déclencheur de l’indemnisation est parfois comprise comme étant un contentieux. En outre, parfois le terme contentieux a été utilisé dans un sens général (non judiciaire). Il y a eu un litige avec la population : “ la commune a un contentieux moral avec la population ”. Notons aussi la non compréhension de l’expression “ retour d’expérience ” pour laquelle un maire répond par : “ qu’est ce que c’est en français ? ”. Ainsi, près de 10 % n’ont pas su répondre à cette question. Par ailleurs, certains n’ont pas connaissance de l’existence d’un PPR inondation et demande explicitement à ce que le CERDACC les renseigne après l’enquête. Au final, il existe un réel intérêt pour la question car les réponses des élus soulignent un besoin d’information et de communication. Pour une mise en œuvre optimale de la législation, une compréhension des enjeux s’avère patente. Les maires en ont conscience et nous invitent à les informer. La multitude des expressions du type “ je ne sais pas ce qu’il faut faire pour un PPR, pourriez-vous nous dire ” ou encore du nombre d’appels téléphoniques à gérer entérinent ce premier constat. Le questionnaire aurait pu apporter bien d’autres éléments, citons en vrac : la politique de gestion du risque par l’élu local, sa définition d’un risque naturel, le nombre d’habitants, la caractéristique urbaine ou rurale de la commune, l’obédience politique du maire, le nombre de mandats et son âge, etc… et, au vu du succès de l’enquête, nous en venons à regretter de n’avoir pas élargi nos interrogations. Cependant, le choix d’un questionnaire court, tenant impérativement sur une seule page, était délibéré afin de ne pas décourager les destinataires. 2. Profil de l’échantillon et taux de participation Les réponses sont assez nombreuses pour ce type d’enquête. Ainsi, sur un total de 5718 communes, plus de 2450 réponses ont été réceptionnées. Ceci représente un taux de réponse proche de 50 %. Indéniablement, les élus locaux portent un réel intérêt à l’aléa “ inondation ” et à la gestion des inondations. 137 En outre, il semble intéressant de noter que les communes ayant répondu ne sont pas forcément celles ayant subi des dommages ou des contentieux en liaison directe avec le sujet qui nous intéresse. B. Résultats statistiques Dans ce premier volet, nous allons présenter les principaux résultats statistiques tels qu’ils ressortent d’une analyse directe. Nous aborderons ainsi le retour d’expérience des inondations, et montrerons que les maires utilisent le PPR en tant qu’instrument de prévention des risques. Mais l’élaboration d’un plan ne s’effectue pas sans difficultés. 1. L’effet d’expérience et la perte de mémoire La grande majorité des communes n’a pas subi de contentieux puisque, pour près de 95 % d’entre elles, aucun contentieux n’a été relevé. Une infime partie de l’échantillon ignore l’existence d’un éventuel contentieux. Dans le cas de l’affirmative, celui-ci se révèle essentiellement administratif (schéma n° 1). Schéma n° 1 : le type de contentieux civil 33% pénal 3% administratif 64% Le contentieux des inondations se révèle multiple du fait de l’inexistence d’un régime unique de responsabilité. Les questions portant sur les mesures préventives et la réparation sont ainsi traitées par le tribunal administratif, alors que celles concernant la réparation et la sanction relèvent plus généralement de l’action judiciaire (civile pour les premières et pénale pour les secondes). Il est patent que l’action judiciaire est plus rare, puisque dans le cas des inondations, le litige porte le plus souvent sur un ouvrage public et/ou une personne publique (en l’occurrence le maire). Le tribunal administratif est donc généralement compétent car du fait de la loi, l’Etat délègue certaines obligations aux collectivités territoriales. Ipso facto, cette délégation du pouvoir s’accompagne d’une délégation de la responsabilité. Ainsi, la victime apporte la preuve d’une faute commise par le maire pour engager sa responsabilité (insuffisance ou absence de travaux d’entretiens ou de réseaux d’évacuation, autorisation d’une construction dans une zone à risques …). La victime a ainsi la possibilité de demander des indemnités à l’Administration en cas d’inaction de l’élu. La responsabilité civile peut néanmoins être mise en cause, par exemple, dans le cas d’une cession d’un terrain par la commune à une personne privée sur lequel celle-ci a construit une habitation, ensuite affectée par une inondation. La responsabilité pénale sanctionne l’auteur d’une infraction pénale. 138 Quoiqu’il en soit, dans tous les cas, la victime considère qu’un manquement à l’obligation de sécurité est du fait du maire. Ce dernier n’a pas mis en œuvre tous les moyens préventifs permettant de limiter les dégâts de l’inondation. En l’espèce, et vérifications faites a posteriori, des confusions avaient été opérées dans les réponses à notre questionnaire entre le contentieux pénal et les contentieux civil ou administratif et aucune commune de notre échantillon n’a, à notre connaissance, été concernée par un procès pénal. a) Le retour d’expérience Nous pouvons d’ores et déjà noter que l’existence d’un contentieux influence les élus locaux : plus de 31 % ayant subi un contentieux avoue qu’il existe un retour d’expérience au niveau de la commune (tableau n° 1). Ainsi, l’étude de cet aspect de l’aléa inondation insiste sur la place centrale qu’occupe la prévention. Tableau n° 1 : Le retour d’expérience est lié à l’existence d’un contentieux Existence d’un Effet d’expérience Contentieux Non Oui 17.90 % Non 74.20 % Oui 61.22 % 30.61 % 12.00 % NSP 36.00 % NSP Total 7.90 % 100 % 8.16 % 100 % 52.0 % 100 % Il semble donc que ce dernier précipite les actions de prévention. Par contre, trois communes sur quatre n’ayant pas subi de contentieux affirment n’avoir aucun retour d’expérience. Par contre, la compréhension de la seconde question n’est pas évidente pour tous les élus 196. A ce titre, 8 % de l’échantillon n’a pas su répondre à cette question. Ce taux d’ignorance se révèle significativement plus élevé chez les personnes ne sachant pas si les inondations dans leur commune ont suscité un contentieux (plus de 50 %). En outre, le nombre d’arrêtés catastrophe naturelle n’influence pas l’existence d’un contentieux : ce n’est pas parce que la commune a cinq arrêtés que la probabilité qu’un contentieux se mette en place soit significativement plus élevée (tableau n° 2). Tableau n° 2 : Nombre d’arrêtés et contentieux Existence d’un contentieux 2 Non 94.87 % Oui 3.97 % NSP 1.16 % Total 100 % 196 Nombre D’arrêtés 3 4 95.87 % 95.04 % 3.44 % 4.13 % 0.69 % 0.83 % 100 % 100 % 5 85.19 % 14.81 % 0.0 % 100 % 6 100 % 0.0 % 0.0 % 100 % Il n’est pas rare de voir un point d’interrogation notifié auprès de la question. 7 0.0 % 100 % 0.0 % 100 % 139 De façon générale, un effet d’expérience s’exprime à travers l’adaptation des règles de construction dans les espaces à risque d’inondation et la prévention du risque inondation. Par ailleurs, le PLU197 (ancien POS) trouve ici tous ses titres de noblesse. De nombreuses communes ont modifié les règles d’urbanisme en classant les zones à risques dans des zones non constructibles. De même, certaines en ont profité pour réaliser des travaux afin de construire des bassins de rétention d’eaux ou de rénover les canalisations. Cette volonté de maîtriser les risques d’écoulement s’inscrit véritablement dans une démarche ex ante de défense contre les risques d’inondations. Cet aspect s’affirme d’autant plus en prenant acte du développement de l’urbanisation : la réalisation de travaux conditionne la qualité de la gestion des milieux et détermine l’évolution des contentieux liés aux inondations. En tant que tel, il s’agit d’un élément de la politique d’aménagement du territoire. Le Plan d’Occupation des Sols (POS) créé en 1967 constitue le pivot en matière d’urbanisme puisqu’il représente un instrument de planification urbaine. Il a été remplacé par le Plan Local d’Urbanisme (PLU) depuis le 13 décembre 2000. Dans ce chapitre, nous utiliserons indifféremment les deux termes car les maires utilisent largement la première expression. Nous restons ainsi fidèles à leurs propos. 197 140 b) L’adaptation des règles d’urbanisme La prise en compte du risque inondation dans les documents d’urbanisme est donc réelle. Citons à titre d’illustrations, l’interdiction de construire dans des zones de moins de 20 mètres du ruisseau. En effet, pour la révision du POS, des recommandations préventives d’ordre urbanistique et constructif permettent aux nouvelles constructions de se prémunir contre les effets des risques et de mettre les personnes hors risque ou, à défaut, de ne pas aggraver les risques. De ce fait, des mesures de prévention individuelles sont prescrites au cas par cas notamment lors de l’accord de permis de construire ou autorisations diverses. Ces différentes mesures sont, par exemples : - dans le cas de terrains agricoles, la mise en place de pratiques culturales 198 qui s’opposent au ruissellement en nappe des eaux de surface et à l’entraînement des sols par les eaux de ruissellement, mise en place d’un trajet de collecte des eaux de ruissellement avec rejet vers un exutoire naturel ou aménagé, maintien et entretien des boisements existants … ; - dans le village, la stratégie consiste à annuler les effets de l’imperméabilisation des sols par la réalisation d’ouvrages (individuels ou collectifs) tamponnant les débits ruisselés. L’objectif, dans les deux cas, consiste à piéger les eaux de ruissellement en les dirigeant vers des exutoires capables d’évacuer les surplus. Ainsi, pour pallier le refus préfectoral d’un PPR, la commune décide d’établir une carte des aléas qui tienne compte, pour la délivrance des autorisations d’occupation des sols, des zones à risques. Celle-ci sera ensuite intégrée dans le nouveau PLU. De ce fait, pour protéger la commune contre les pluies d’orage, le manque de cours d’eaux ou l’insuffisance d’un puisard pour absorber les débits, des travaux de creusement du ruisseau, la construction de nouvelles canalisations ou fosses ou encore de nouveaux trottoirs, des collecteurs de rétention ont été posés aux endroits névralgiques suite à une étude d’ensemble. Par ailleurs, chaque nouvelle zone d’habitat créée oblige l’aménageur à réaliser des bassins de rétention et donc, en principe, à éviter ou limiter les risques. Ces travaux s’inscrivent dans une logique de prévention : les travaux sont effectués ex post, mais aussi a priori pour maîtriser les futurs risques d’écoulements d’eau, après avoir fait le constat que les moyens d’évacuation étaient insuffisants. A côté de cela, la collectivité locale effectue souvent des études pour pallier les risques des inondations. Elle cherche ainsi à maîtriser les écoulements d’eaux et leurs conséquences. En somme, la réalisation de travaux et/ou d’études permet de déterminer des préconisations d’urbanisme et de construction pour orienter préférentiellement la construction vers les endroits non affectés, ou introduire des règles de construction pour diminuer l’impact d’éventuels débordements. L’idée est que, face à des événements exceptionnels par définition inévitables, la commune cherche à en limiter les effets. 2. La commune face au risque inondation et ses relations avec l’Etat Il faut souligner l’importance des instances étatiques comme la direction départementale de l’agriculture et de la forêt (DDA) ou la direction départementale de l’équipement (DDE) dans la mise en place de projets ou de négociations mutuelles. En effet, la commune fait une 198 La culture du maïs, par exemple, n’offre aucun couvert végétal permettant de maintenir le sol. 141 demande auprès de la préfecture pour obtenir un PPR. Après concertation avec la DDE, le PPR inondation est élaboré en fonction : - des enjeux (importance, fréquence des phénomènes naturels, caractère urbain du secteur, densité des populations touchées) ; - des études disponibles, la réalisation d’un PPR suppose que des données relatives à la connaissance de l’aléa évalué pour un phénomène de référence (crue pour une rivière) soient acquises. Ces études sont prioritairement engagées à l’échelle d’un bassin de risque ; - les informations fournies par les arrêtés de constat de l’état de catastrophe naturelle reflètent des événements très divers qui n’ont pas toujours vocation à faire l’objet d’un PPR (ex : inondations ou coulées de boues très localisées, phénomènes dus à des défauts d’entretien de cours d’eau ou ouvrage). a) Le PPR comme un outil préventif Il faut avouer que la création d’un PPR Inondation constitue une forme de retour d’expérience puisqu’une commune sur trois ayant un PPR ou que celui-ci est actuellement en discussion exprime un effet d’expérience dans la commune (tableau n° 3). 142 Tableau n° 3 : Du retour d’expérience à l’élaboration d’un PPR Existence d’un PPR Non Oui NSP PPR en cours Non Oui NSP Effet d’expérience Non Oui 75.20 % 17.21 % 55.68 % 32.43 % 56.36 % 16.36 % NSP 7.59 % 11.89 % 27.27 % Total 100 % 100 % 100 % 77.93 % 54.37 % 57.37 % 6.52 % 14.89 % 16.32 % 100 % 100 % 100 % 15.55 % 30.74 % 26.32 % Le PPR Inondation représente ainsi un instrument, parmi d’autres, de prévention des risques. Par ailleurs, ce plan de prévention ne suscite en général aucune difficulté particulière avec la population. Au contraire, la question de la franchise supportée financièrement par les ménages semble plutôt constituer un argument en faveur dudit plan. Les seuls conflits avec la population concernent le classement en zones non constructibles des terrains concernés. Ceci s’explique alors par la réelle moins value sur lesdits terrains. La commune assume, par la modification des règles d’urbanisme, l’aléa en vertu du principe de prévention des risques. b) Les difficultés soulevées par les maires Nombreux sont les élus locaux qui soulignent l’arbitraire des décisions des représentants de l’Etat. Citons quelques communes qui regrettent, voire déplorent, le manque de communication des préfets : “ le préfet n’identifie pas de risque inondation alors qu’il existe et qu’il s’est réalisé ” ; “ le préfet ne veut pas et argumente sur le manque de moyens financiers et humains ” ; “ que peuvent faire les petites communes ? ” (sous entendu face à la décision d’un préfet) ; “ notre commune n’est pas prioritaire au niveau préfectoral ” ou encore “ pourquoi la franchise continue-t-elle d’augmenter alors que l’Etat ne veut pas élaborer le PPR qui a été demandé par la commune ? ” … Lorsqu’il existe une zone Natura 2000, il n’est pas possible de réaliser des travaux. Or la commune soulève que chaque hiver des caves sont inondées (“ noyées ”) et que “ nous serions favorables à un PPR mais que peuvent faire les petites communes dans de tels projets ? ”. Le refus du PPRI par le préfet qui argumente que “ il n’identifie pas de risques inondables alors qu’il existe ” est alors dans ce cas précis ressenti comme une injustice. Ces diverses difficultés soulevées par les maires posent la question de la négociation du PPR. L’autorité préfectorale provoque parfois un sentiment d’incompréhension. Un autre exemple mérite d’être présenté : une commune ne veut pas d’une nouvelle classification en catastrophe naturelle en raison du montant des franchises des sinistrés, mais le préfet maintient sa demande ; le maire souligne alors le fait que le PPR est surtout applicable dans les zones urbanisées et n’est pas forcément bien adapté aux spécificités du monde rural. Ainsi, selon certains élus, se pose un problème de priorité : le maire subit la décision préfectorale alors même qu’il l’estime injuste. Il ne se sent pas entendu par les autorités de l’Etat : “ notre commune n’est pas prioritaire au niveau préfectoral pour le PPR ”. De ce fait, l’acteur local recourt souvent aux règles de construction dans sa commune si bien qu’une révision du POS s’interprète comme une substitution à cette non reconnaissance. 143 Aussi, est-ce à dire que le préfet qui décide de l’inopportunité d’un PPR accepte le risque inondation ? Cette interrogation est de nature à provoquer le refus du droit à réparation pour les dommages prévisibles auxquels une personne, en l’occurrence, le préfet a, en connaissance de cause, pris le risque d’exposer la commune malgré la connaissance établie (selon le maire) de l’aléa inondation. De façon plus ou moins explicite, l’acceptation du risque est alors imposée au maire. En effet, comme nous l’avons souligné plus haut, le PPR est élaboré par l’Etat, les communes sont certes consultées puisque les plans sont soumis à une enquête publique, mais ils restent approuvés par le préfet. Les PPR répondent à des critères très rigoureux quant à leur adoption sur tel ou tel secteur. Un élu souligne ainsi que “ dans la région bocagère qui est la notre, les risques qui existent sont le plus souvent liés aux inondations, même si sont rares les années où les débordements de cours d’eau entraînent des effets aussi désastreux que ceux enregistrés fin 2000-début 2001. Cependant, nous ne sommes pas à l’abri de phénomènes exceptionnels pour lesquels des mesures exceptionnelles et ponctuelles pourraient être prises. Il serait intéressant de mettre en place une formule plus souple que celle du PPR dans les régions exposées de manière sporadique ”. Citons aussi le cas d’une commune qui désirait nettoyer les fossés près d’une rivière. Cette opération est soumise à l’autorisation de la DDA ; celle-ci ne le permet pas car il faut extraire des terres issues du drainage. D’où inondations. Le maire n’a pas le droit d’utiliser des engins mécaniques sinon il est verbalisé. Mais, une question se pose au maire : “ la commune doitelle enfreindre l’arrêté ? ”. La commune peut enlever les embâcles, effectuer le faucardage de la végétation gênant le libre écoulement des eaux. Or les travaux doivent se faire depuis la berge et ne doivent pas générer de pollution. En outre, au moins 8 jours avant le début des travaux, la commune doit avertir la DDA. Il en est de même pour les dégâts de la voirie du fait de l’inondation, qui ne sont pas pris en charge par la catastrophe naturelle : ici, la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle a été refusée car “ l’intensité de l’agent anormal n’a pas été démontrée ”. Les inondations peuvent avoir des causes différentes : crue, ruissellement urbain, débordement du réseau d’assainissement … il faudrait étudier la mise en place de PPR inondation différencié selon la cause (comme pour les mouvements de terrain) car les mesures de préservation sont forcément différentes. A ce jour, un PPR inondation pour crue de rivière ne permet pas de protéger les populations contre les inondations liées au débordement du réseau d’eau pluvial. Une commune qui en est couverte ne subira pas les conséquences des mesures des arrêtés du 5 septembre 2000 même si l’inondation est due à un phénomène autre que la crue. Cette commune peut ne pas envisager de méthodes de protection pour pallier ce risque d’origine différente. L’incitation de préservation de la population contre le risque inondation n’est pas réussie dans ce cas. Un élu insiste ainsi sur le fait que “ la mise en place d’un PPR est essentielle, mais il n’est pas nécessaire de prendre en otage les sinistrés pour rappeler aux maires leurs obligations de protection des personnes et des biens ”. Cette question concernant la légalité ou l’opportunité d’un PPR révèle aussi la possible mise en cause de l’Etat (à travers le préfet) lors d’une éventuelle inondation. Sa responsabilité pourrait être engagée pour les dommages causés par une inondation en l’absence de plan. Nous nous retrouvons ici en plein débat sur la décentralisation des compétences, puisque celle-ci offre aux collectivités locales de nouvelles autorités. 144 De façon générale, les maires déplorent le manque de communication et de discussion de la préfecture et insistent sur l’absence d’échanges d’informations. L’élu reste alors dans l’attente : il a demandé une reconnaissance de catastrophe naturelle en raison de l’existence de nombreux dossiers de sinistrés, mais aucune réponse n’a été communiquée par la préfecture. Il attend donc l’arrêté. Il découle ainsi de l’enquête une sorte de désarroi des maires du fait que le PPR soit à l’initiative du préfet et ne couvre que les risques naturels prévisibles (inondation, mouvements de terrain, avalanches, incendies de forêts, séismes, éruptions volcaniques, tempête ou cyclone). Or, certains s’inquiètent : “ comment prévoir une inondation suite à un orage qui ne résulte pas du débordement d’un cours d’eau, mais du ruissellement de précipitations exceptionnelles ? ”. En outre, d’autres soulignent que c’est le préfet qui décide de faire figurer des communes soumises au risque inondation de rivière, donc décide de (ou ne pas) envisager la prescription d’un PPR. De ce fait, le maire déplore que sa commune n’ait comme unique solution de voir la franchise de ses sinistrés augmenter qui deviennent ainsi une deuxième fois victimes, mais cette fois ci de l’inexistence d’un PPR concernant les inondations suite à un orage et/ou du fait des eaux de ruissellement. En effet, quatre paramètres sont déterminés par l’Etat à savoir la définition des périls couverts, la déclaration de l’état de catastrophe naturelle, le niveau des franchises applicables en cas de sinistre et le taux de couverture (i.e. la prime additionnelle). Par conséquent, une mutualisation des risques en résulte : aucune discrimination tarifaire ne peut être mise en place par les assureurs 199. Le régime d’indemnisation est donc fortement encadré par l’Etat. Nous venons ainsi à aborder un autre aspect fortement souligné par les élus locaux à savoir celui de la franchise. En effet, il se pose un vrai problème d’indemnisation si la zone n’est pas classée “ catastrophe naturelle ” après les inondations. Effectivement, la procédure de constatation de l’état de catastrophe naturelle a notamment pour objet l’indemnisation de dommages matériels “ non assurables ” c’est à dire l’indemnisation de dommages résultant d’événements naturels, qui ne sont pas directement pris en charge par les assureurs au titre des contrats d’assurance de droit commun. Il s’agit des inondations, des mouvements de terrain, des séismes, des avalanches… mais elle est sans effet pour les dommages aux biens généralement non assurables des collectivités (voiries, digues …) qui relèvent de la solidarité nationale. La garantie contre les catastrophes naturelles est offerte200 à toute personne ayant souscrit un contrat d’assurance couvrant les risques incendie, dommages aux biens (meubles, vêtements, véhicules terrestres à moteur, …) ou perte d’exploitation. Néanmoins, la garantie est limitée aux seuls dommages matériels directs c’est à dire ceux portant atteinte à la structure ou à la substance même de la chose assurée. Sont donc exclus les dommages indirectement liés à la catastrophe (dommage aux appareils électriques ou aux congélateurs dus à une perte de courant), mais aussi des dommages corporels puisque le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles mise en place par la loi du 13 juillet 1982 modifiée par les lois du 25 juin 1990, 16 juillet 1992 et 5 février 1995 est strictement limité à l’indemnisation des dommages aux biens. Nonobstant, en cas d’indemnisation, une somme reste à la charge des sinistrés : 380 euros (2 500 FF) pour les habitations, les véhicules à moteur et les autres biens 199 En effet, ces derniers pourraient être incités à appliquer des taux différents selon les zones à risques comme cela se pratique pour l’assurance véhicule. La couverture du risque naturel n’est donc pas liée au risque violant ainsi les principes mêmes de la théorie économique du risque. 200 Elle n’est pas obligatoire à proprement parler, mais constitue une extension de garantie obligatoire à tout contrat de dommages couvrant des biens situés sur le territoire national. 145 à usage privé et à 10 % du montant des dommages avec un minimum de 1140 euros (7 500 FF) pour les biens à usage industriel, commercial, artisanal ou agricole. Effectivement, l’arrêté ministériel du 5 septembre 2000 indique que, dans le cadre d’une procédure de catastrophe naturelle, la franchise appliquée aux sinistrés est modulée en fonction du nombre d’arrêtés pris pour un même risque à compter du 2 février 1995 et ce, uniquement pour les communes non dotées d’un plan de prévention des risques naturels prévisibles. Ainsi, pour un ou deux arrêtés, la franchise s’élève à 380 euros pour les habitations, les véhicules à moteur et les autres biens à usage privé (2 500 FF). Avec un 3 e arrêté, cette franchise simple double et pour un 4e voire un 5e arrêté, elle passe respectivement à 1140 euros (7 500 FF) et 1520 euros (10 000 FF). En somme, les sinistrés subissent à la fois des dégâts matériels et des dommages psychologiques, mais également, une augmentation de leur franchise d’assurance puisque cette dernière augmente proportionnellement à chaque arrêté de déclaration de l’état de catastrophe naturelle si la commune où ils résident n’a pas fait prescrire ou approuver un PPR. Ce problème de franchise sensibilise beaucoup les élus : “ pourquoi la franchise continue-telle d’augmenter alors que l’Etat n’est pas à même d’élaborer un PPR qui a été demandé par la commune ? ”. Or, l’inexistence d’un PPR a un effet positif sur la franchise supportée par les habitants de la commune. En l’occurrence, un maire propose “ de revoir les conditions d’indemnisation dans ce cas très particulier de l’état de reconnaissance de catastrophe naturelle à savoir les petits sinistres (moins de 1520 euros) ”. Au final, les plans locaux d’urbanisme peuvent poser des règles de protection contre les risques naturels puisqu’ils permettent, aux élus, de circonscrire les zones à risques (où le risque est probable). Ils justifient ainsi la non-constructibilité où précisent les conditions dans lesquelles la construction est possible. A ce titre, le PPR a pour objectif de délimiter les zones exposées et de déterminer les techniques de prévention devant être mises en œuvre par le propriétaire ou la collectivité locale. Le but de notre étude est de recueillir les données qui permettront de répondre à la question de l’amélioration de la prévention des risques naturels prévisibles. Notre travail comporte donc une finalité tant descriptive qu’explicative. Elle cherche à s’interroger sur la mise en place d’un PPR. En l’espèce, son objectif vise d’une part, à rechercher les variables explicatives du comportement des élus locaux face aux risques “ inondation ”, et d’autre part, à intégrer cette évaluation à l’intérieur d’un processus réel de prise de décision en matière de prévention desdits risques. Autrement dit, il s’agit de connaître, en termes de politiques publiques, les arguments (déterminants) économétriques explicatifs du choix des élus locaux. Notre travail n’a pas la prétention de décrire le comportement des individus observés, il se propose simplement de construire un modèle de développement, c’est à dire une représentation particulière de la réalité. Et de Montmollin (1967, page 21) d’ajouter : “ le modèle d’un pont, ce peut être sa maquette en bois, les plans de l’ingénieur, les formules mathématiques qui ont permis de calculer ses dimensions, etc. mais ce n’est pas le pont luimême. Il existe toujours une différence entre le modèle et l’objet ; la précision de l’approximation, les lois ne pourront être que probabilistes ”. Puisque l’enquête doit permettre d’estimer certains paramètres, il est intéressant de connaître les principaux critères qui peuvent servir à choisir les estimateurs. Ce second point présente alors les résultats de l’évaluation économétique telle qu’elle est maintenant exposée. 146 § 2 : Analyse économétrique des résultats de l’enquête sur les inondations Toute approche empirique repose sur la recherche de données susceptibles de valider des hypothèses. C’est la raison pour laquelle, faute de pouvoir inventorier toutes les collectivités locales, il est possible de se situer dans une démarche d’observation en vue d’élaborer un système explicatif : la prédiction est alors souvent remplacée par une hypothèse, qui sera ensuite elle-même testée en fonction des résultats obtenus lors de l’enquête. Les résultats présentent une évaluation des stratégies d’amélioration du risque “ inondation ” des élus locaux. Ainsi, nous l’avons vu, des études puis des travaux sont mis en œuvre afin de prévenir lesdits risques. Notre approche cherche maintenant à déterminer les variables pertinentes. Certaines hypothèses vont être posées ; nous allons tester leur validité. Ce second titre présente alors les résultats de cette approche économétrique en se référant, tout d’abord, aux préférences des élus. Ainsi, elle tente de définir les variables explicatives de la probabilité de mettre en place un PPR. Ensuite, il explique le PPR (existant, en cours ou en discussion) mais aussi, en filigrane, s’interroge sur la gestion du risque. A. Le PPR comme un dispositif ex post Ce premier point nous permet de mettre en exergue les variables significatives 201 des préférences d’un maire car diverses caractéristiques influent sur la fonction d’utilité d’un élu local. Rappelons qu’un PPR a pour objet de délimiter les zones à risques et de déterminer les techniques de prévention devant être mises en place pour minimiser les conséquences de l’aléa. 1. Première hypothèse : la mise en place d’un PPR dépend du nombre de contentieux Le modèle logit permet de définir les variables explicatives (xi) d’un choix individuel (yi). Il estime la probabilité de réalisation de ce choix, supposé binaire en définissant les variables (xi) ayant une influence sur cette probabilité. La réalisation de la variable qualitative observée se définit comme suit : yi = 0 si yi* = 0, yi = 1 si yi* > 0 avec yi*, la variable qualitative sous-jacente telle que yi* = xi + i, avec les i les termes d’erreur. La loi de probabilité de yi s’écrit : Prob(yi = 1) = Prob(yi* > 0) = Prob(i > - xi ) = Prob(i/µ > - xi /µ) = 1 – F(- xi /µ) = F(xi /µ) si la loi est symétrique avec i /µ qui suit une même fonction de répartition F. Nous allons donc procéder de cette manière pour appréhender les choix des élus en matière de Une variable explicative a une influence positive (négative) lorsqu’elle incite l’élu à préférer un PPR. 201 147 prévention des risques et la décision pour la mise en place éventuelle d’un PPR. Cette approche séquentielle des choix suppose implicitement l’indépendance des choix de l’individu, alors même qu’ils pourraient être considérés comme résultant d’un processus simultané. Cette hypothèse se justifie, en réalité, par la séquentialité du questionnaire. a) Formulation de la première hypothèse Un PPR, dans son corps, pose des règles de protection contre certains risques naturels dont l’inondation. En effet, il délimite des secteurs dits à risques justifiant que soient mises en place des conditions spéciales, voire des interdictions, pour des constructions ou installations de toute nature. En somme, il constitue une technique de prévention puisque, concrètement, il établit un zonage en fonction de la localisation du risque. Cette définition de servitude d’inconstructibilité interdisant certains types d’utilisation du sol s’inscrit directement dans une logique de prévention dans la mesure où l’acteur local cherche à prévenir, à l’avance, les effets d’une catastrophe. En ce sens, il peut être supposé que le maire s’inspire d’un vieux principe : “ mieux vaut prévenir que guérir, et pour cela, il faut réfléchir avant d’agir ”. Le maire se base ainsi sur l’existant pour adapter sa stratégie face au risque “ inondation ”. Hypothèse 1 : l’élu local consent à mettre en place un PPR dès lors qu’il existe un nombre important de contentieux dans sa commune Ainsi, au titre de ses pouvoirs de police, le maire intervient en élaborant un PPR. Il évite que son absence soit source de mise en cause de la responsabilité de la commune. Cette stratégie peut s’avérer d’autant plus authentique lorsque la commune a déjà connu des litiges. L’appréciation de ces circonstances est alors déterminante. Il s’agit ici de notre première hypothèse. Le maire répond ainsi à son obligation de mettre en œuvre les mesures de lutter contre les inondations. b) Résultats Dans l’échantillon, peu de communes sont déjà dotées d’un PPR Inondation : 90 % affirme ne pas en avoir contre un peu moins de 8 % qui en dispose un. Notons que plus de 2 % de maires (soit exactement 55) ne sait pas s’il en existe un dans sa commune. Par contre, l’intérêt porté au PPR Inondation n’est pas anodin. La variable observée pour chaque maire est le choix d’un PPR (yi = 1 pour l’existence d’un PPR, yi = 0 a contrario). La probabilité de préférer la mise en place d’un PPR a été choisie sous forme logistique, comme énoncée précédemment. La préférence pour le PPR s’explique (tableau n° 4) essentiellement par l’existence d’un contentieux. En effet, avec un risque d’erreur faible (0.4 %), la variable “ contentieux ” est une variable explicative de la variable “ PPR ”. Elle agit positivement sur l’élaboration d’un PPR. En d’autres termes, les élus envisagent le PPR comme une mesure ex post, leur permettant d’éviter la répétition d’un scénario déjà vécu. Le PPR agit ainsi contre une éventuelle récidive des dommages subis après une inondation. 148 Tableau n° 4 : Les variables significatives du PPR Variable expliquée Explicatives Nombre d’arrêtés Existence d’un contentieux Retour d’expérience PPR en cours PPR en discussion Soutien PPR Influence Coeff. 202 + 0.0408 + 1.0047 + 0.0043 + 3.121 + 0.1269 + 0.6822 P >|z| 0.800 0.004 0.980 0.000 0.567 0.001 En outre, on constate que l’arrêté du 5 septembre 2000 incite significativement le maire à soutenir l’élaboration d’un PPR inondation. Rappelons que cet arrêté modifie le calcul de la franchise à la charge des assurés : si la commune ne met pas en place un PPR, la franchise apparaît comme une sanction supplémentaire pour les assurés, car celle-ci est positivement corrélée au nombre d’arrêtés pris pour un même risque. 2. Seconde hypothèse : l’effet d’expérience La mise en œuvre d’un PPR n’est pas sans conséquence : certains terrains deviennent inconstructibles, ce qui entraîne une perte de valeur des terrains pour les propriétaires. Pour les élus, le PPR peut être également perçu comme un frein au développement de sa commune. a) Formulation de la seconde hypothèse La prévention se définit comme un comportement visant à empêcher la survenance de risques par des mesures appropriées aux aléas. L’action préventive est ainsi anticipatrice survenant a priori, alors qu’une mesure de réparation apparaît a posteriori. En réalité, ces deux aspects ne sont pas si exclusifs, mais complémentaires. L’effet d’expérience affirme cette complémentarité dans la mesure où l’acteur social adapte son comportement aux risques subis et probables. Notre seconde hypothèse résume cet aspect : le nombre d’arrêtés “ catastrophes naturelles ” et de contentieux ne laisse pas insensible l’élu local. Hypothèse 2 : l’effet d’expérience du maire dépend directement du nombre de contentieux dans sa commune et du nombre d’arrêtés constatés Cette alliance du bon sens et de la prévention caractérise l’effet d’expérience qui exprime alors un changement d’attitude et de mentalité. L’adage selon lequel “ administrer, c’est non seulement prévoir, mais c’est aussi se souvenir ” justifie cette seconde hypothèse. Il s’agit Pour GOURIEROUX (1989, page 28) : “ les valeurs numériques des coefficients n’ont pas d’interprétation directe ; en revanche leur signe et le fait qu’ils soient ou non significatifs sont interprétables. Le signe permet de savoir si la probabilité de réussite [ici choix du réseau de tri] est une fonction croissante ou décroissante de la variable explicative correspondante (toutes choses égales par ailleurs). ” 202 149 d’éviter une répétition des sinistres, le précédent n’est-il pas le meilleur moyen d’évaluation du risque naturel ? b) Résultats L’effet d’expérience s’explique positivement par le nombre d’arrêtés, l’existence d’un contentieux et la discussion pour l’élaboration future d’un PPR (tableau n° 5). Cette relation positive entre ces différents éléments préfigure de l’adaptation a priori et a posteriori de l’élu local au risque inondation. Tableau n° 5 : Les variables significatives de l’effet d’expérience Variable expliquée Explicatives Nombre d’arrêtés Existence d’un contentieux PPR PPR en cours PPR en discussion Soutien Effet d’expérience Influence Coeff. + 0.1820 + 0.4819 - 0.113 - 0.048 + 0.4491 + 0.3441 P >|z| 0.018 0.014 0.508 0.734 0.000 0.000 De ce point de vue, l’effet d’expérience des communes s’inscrit dans des interventions appartenant à un processus intégrant les transferts de compétences (résultant essentiellement de la décentralisation). L’existence de contentieux mettant en cause la responsabilité de la commune démontre l’importance du rôle du maire dans la gestion de l’aléa. En outre, l’appréciation du risque incite fortement le maire à discuter un PPR. Indéniablement, il s’avère patent de constater que lorsque la commune voit sa responsabilité engagée, elle s’inscrit dans une démarche d’écoute et d’action : en élaborant un plan, elle prend acte des demandes de ses habitants. B. Le PPR en cours d’élaboration Par principe, les communes ont toute latitude pour décider de l’affectation des parties de leur territoire couvert par un PLU (ancien POS). La prise en compte du risque inondation s’inscrit dans le zonage des sols. En l’occurrence, la commune peut compléter le PLU par un PPR qui prend en compte les terrains exposés au risque, et donc limiter les possibilités de construction. 1. Le critère de décision Jusqu’à présent, nous avons vu que l’existence d’un risque est prise en considération par l’élu et justifie la discussion et l’élaboration d’un PPR. De ce fait, la gestion du risque se trouve renforcée : la déclaration d’un état de catastrophe naturelle par le gouvernement suffit à enclencher une démarche préventive. En ce sens, le nombre d’arrêtés peut constituer un élément de référence. a) Formulation de la troisième hypothèse 150 Le classement en zones inondables s’effectue lorsque l’aléa est avéré ou qu’il y a eu des précédents. A défaut, la responsabilité du maire peut être engagée pour vices cachés ou erreur manifeste d’appréciation. En somme, le PPR s’appréhende aussi comme une protection de l’élu face à de futurs litiges. Les pouvoirs de police du maire l’obligent à prescrire les mesures de lutte contre les inondations. Il s’inscrit ainsi dans une perspective préventive dont l’absence peut engager sa responsabilité. Hypothèse 3 : un PPR n’est mise en place que si le nombre d’arrêtés est important b) Résultats Le zonage des terrains constitue un document d’urbanisme de référence puisqu’il permet d’identifier la politique d’aménagement du territoire en tenant compte du risque inondation. De ce fait, l’élu tient compte des événements passés (le nombre d’arrêtés) pour déterminer les zones à risques. Ipso facto, un PPR est aussi un document de mise à jour susceptible de protéger l’élu contre une éventuelle mise en responsabilité. Le PPR est annexé au POS ; il permet à l’élu de spécifier la prise en compte de l’aléa. Encore une fois, nous constater que le PPR s’inscrit dans une démarche préventive (tableau n° 6). Dès lors que la commune a fait l’objet d’un ou plusieurs arrêtés “ catastrophes naturelles ”, elle place le PPR comme un outil de gestion du risque. Tableau n° 6 : Les variables significatives d’un PPR en cours Variable expliquée Explicatives Nombre d’arrêtés Existence d’un contentieux Retour d’expérience PPR PPR en discussion Soutien PPR en cours Influence Coeff. + 0.3359 + 0.3045 + 0.1951 + 1.2900 + 2.740961 + 0.18211 P >|z| 0.007 0.372 0.164 0.000 0.000 0.218 2. Le soutien implicite de l’arrêté du 5 septembre 2000 La mise en œuvre d’un PPR n’est pas neutre : elle comporte des effets en matière d’utilisation des sols, mais aussi en matière de franchises. En ce sens, le PPR représente un document d’urbanisme basé sur la localisation du risque. Il établit, de ce fait, des servitudes d’inconstructibilité. a) Formulation de la troisième hypothèse 151 Les pouvoirs de police du maire l’obligent à prescrire les mesures de lutte contre les inondations. Il s’inscrit ainsi dans une prescription préventive dont l’absence peut engager sa responsabilité. Hypothèse 4 : les dispositions de l’arrêté du 5 septembre 2000 influencent le maire dans l’élaboration d’un PPR s’il appréhende le PPR comme un effet d’expérience Depuis le 5 septembre 2000, un arrêté instaure une modulation des franchises à la charge des assurés lorsque la commune n’est pas dotée d’un PPR. L’arrêté vise par-là même à créer une incitation à l’élaboration d’un plan. Autrement dit, selon le Code des assurances, les communes, sur le territoire desquelles un PPRI est prescrit, ne voient pas le montant de leur franchise majoré. Cette dernière augmente avec le nombre d’arrêtés puisque pour un même risque (depuis le 2 février 1995) dans les communes non dotées d’un PPR pour ledit risque. La modulation cesse avec la prescription d’un PPR, mais reprend si celui-ci n’est pas accepté dans un délai maximal de cinq années à compter de la date de prescription. b) Résultats Concernant le problème de la franchise des polices d’assurance, un vrai dilemme se pose au maire : - soit il décide de ne pas engager la procédure de demande de classement au titre de reconnaissance de catastrophe naturelle, mais empêche par-là même à certains sinistres d’être indemnisables ; - soit il engage cette procédure et voit le montant des franchises augmenter empêchant le règlement aux sinistrés de dommages moins importants pécuniairement mais tout autant traumatisant et financièrement lourd pour des budgets modestes. Cette démarche n’est pas anodine puisque le nombre d’arrêtés constaté dans la commune agit positivement sur le PPR. Le maire se place ainsi dans une optique proche des habitants et tente de faire face aux difficultés ou aux plaintes de certains sinistrés de sa commune (tableau n° 7). La modulation de la franchise, rappelons le, cesse dès la prescription d’un PPR. Tableau n° 7 : Les variables significatives d’un PPR soutenu Variable expliquée Explicatives Nombre d’arrêtés Existence d’un contentieux Retour d’expérience PPR PPR en cours PPR en discussion PPR en soutien Influence Coeff. + 0.2253 + 0.2412 + 0.37902 - 0.4977 + 0.6156 + 1.2581 P >|z| 0.008 0.265 0.000 0.054 0.001 0.000 L’arrêté du 5 septembre 2000 incite donc les élus à élaborer des PPR. Ce volet a été mis en place pour multiplier les stratégies de prévention à la source. Près de 800 communes ont 152 prescrit un PPR depuis novembre 2000; il est bien entendu encore trop tôt pour conclure de la capacité du dispositif, mais cet élément dénote l’accélération du développement des PPR. Nous trouvons ici un élément de réponse à cet engouement, qui n’est pas sans traduire, non plus un changement de comportement comme nous l’avons vu tout au long de ce chapitre 203. P. BIDAN, “ Le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles a-t-il un avenir ? ”, R.G.A.T., 2001, n° 2 203 153 Conclusion de l’enquête L’observation porte sur des comportements au sens équivalent de behavior ou Verhalten c’est à dire des manières d’être et d’agir. En somme, elle porte sur “ des manifestations objectives de leur activité globale ” (Piéron, 1973). Watson, le chef de file des béhavioristes n’affirmaitil pas que “ Mind is behavior and nothing else ” ? Cette allégation se trouve résumer dans le modèle “ R-S ” où S désigne le stimulus et R la réponse. Toute réponse du sujet est déterminée par le stimulus. L’objet de notre travail est donc de prédire la réponse du sujet à partir de l’analyse des caractéristiques du stimulus, mais surtout de révéler ce qui se situe entre S et R c’est à dire de décrire les états et les traitements intermédiaires qui aboutissent à l’expression d’une réponse. En reprenant l’analyse de Bachelard, nous insistons sur le fait que le but de notre travail est d’établir des relations plus stables que les données elles-mêmes. Des jugements sont formulés sur des comportements ; ces jugements reposent sur l’appréciation de certaines qualités, sur la comparaison de ces qualités à un modèle construit a priori. Notre ambition est donc de trouver des indicateurs qui permettent une appréciation plus précise et plus objective des préférences individuelles en matière de prévention des risques. L’objectif de ce travail est également de quantifier ces préférences. Il ne s’agit pas uniquement de dénombrer et de classer les réponses, mais aussi de créer une sorte “ d’échelle ”. La première optique se révèle simple : les réponses sont catégorisées selon certains critères préalablement définis. Le problème sera celui de la validité de l’indicateur retenu. Dans la seconde optique, il s’agit de mettre au point une échelle de mesure afin d’estimer la distance entre les préférences et de comparer celles-ci. De ce fait, une analyse économétrique a été mise en œuvre pour tester la validité des relations. Le but de cette approche est naturellement d’estimer un modèle explicatif du choix d’un élu et de comprendre le décideur public dans ses choix. Il est vrai que les résultats issus d’une enquête restent soumises à certaines incertitudes du fait du manque de certaines données. Mais ils constituent une première approche de la gestion des risques par les maires. En somme, l’expérimentation ne constitue pas une fin en soi, mais représente un moyen de produire et de recueillir des observations susceptibles soit, de valider une hypothèse ou une prédiction soit, de répondre à une question. On y trouve tout d’abord la présentation du contexte de l’enquête sur la stratégie de prévention des risques naturels prévisibles telle qu’elle est annoncée par les maires, particulièrement en ce qui concerne le risque “ inondation ” et l’applicabilité d’un PPR. 154 La prévention reste l’indispensable corollaire de la solidarité nationale mise en œuvre par la loi du 13 juillet 1982. Aucun régime d’indemnisation ne saurait être pérenne si rien n’est fait pour réduire la vulnérabilité aux risques qu’il est supposé couvrir204. En effet, la prévention de l’aléa inondation a connu une évolution significative : la responsabilité de l’Etat pour l’absence ou le manquement d’action préventive peut être engagée. L’élaboration d’un PPR s’inscrit donc directement dans cette perspective. En ce sens, il constitue un élément d’efficacité d’une gestion préventive du risque. P. BIDAN, “ Le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles a-t-il un avenir ? ”, R.G.D.A., 2001, n° 2 204 155 RECHERCHE CERDACC – MINISTERE DE L’ENVIRONNEMENT “ INONDATIONS : RESPONSABILITE ET FORCE MAJEURE ” Madame, Monsieur le Maire, Votre commune a, depuis 1995, fait au moins deux fois l'objet d'une constatation de l'état de catastrophe naturelle pour inondation. Dans le cadre d'une recherche pour le Ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement, il nous est indispensable, d'un point de vue scientifique, que vous acceptiez de nous fournir différents renseignements. 1. Ces inondations ont-elles suscité un contentieux (civil, administratif ou pénal ) oui non Si oui lequel ? Le cas échéant, pouvez-vous nous donner les références de la procédure en cours ou des décisions rendues ? ………………………………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………………………………… 2. Existe-t-il un retour d’expérience au niveau de la commune en ce qui concerne la construction dans des espaces à risque d'inondation et la prévention du risque inondation ? oui non 3. Votre commune est-elle dotée d’un Plan de Prévention des Risques naturels prévisibles pour le risque Inondation (PPR Inondation) ? oui non Si oui, l'élaboration de ce plan a-t-elle soulevé des difficultés particulières ? Lesquelles ? ………………………………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………………………………… 4. Si votre commune n'est pas encore dotée d'un PPR Inondation - Un tel plan est-il en cours d'élaboration ? oui non - Si ce n'est pas le cas, des discussions ont-elles déjà eu lieu à ce propos ? oui non - Les dispositions des arrêtés du 5 septembre 2000* relatives à la modulation de la franchise de l'assurance "catastrophe naturelle" sont elles susceptibles de vous inciter à soutenir l'élaboration d'un PPR Inondation ? oui non * Désormais la franchise à la charge des assurés est augmentée en fonction du nombre d'arrêtés pris pour un même risque, depuis le 2 février 1995, dans les communes qui ne sont pas dotées d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles pour le risque concerné 156 TITRE II Les incidences juridiques de l'absence de prise en considération du risque inondation Si les pouvoirs publics ne peuvent pas toujours empêcher la réalisation des catastrophes naturelles au nombre desquelles on trouve les inondations, ils doivent prendre des mesures tendant à prévenir au maximum la survenance de celles-ci afin de limiter leurs effets. Dès lors, en cette matière, l’idée de prévention constitue la pierre angulaire de l’action des pouvoirs publics. Or, que se passe-t-il lorsque les différentes parties prenantes en matière de catastrophes naturelles (Etat, communes, particuliers ou personnes morales de droit privé notamment) ne tiennent pas compte de risques connus ou des documents existant alors qu’ils mentionnent la présence d’un risque ou tentent de le prévenir (chapitre 1 er) ? Au-delà, il peut aussi arriver que les autorités publiques compétentes pour élaborer les dispositifs de prévention des risques d’inondation s’abstiennent d’intervenir (chapitre 2). 157 Chapitre 1 : La méconnaissance des dispositifs et des risques existants Deux grandes hypothèses se rencontrent. Il y a tout d’abord des situations où des responsabilités peuvent être recherchées pour une méconnaissance des dispositifs et des risques existants (§1). Ensuite, on trouve des situations dans lesquelles ce sont les victimes qui, d’elles-mêmes, n’ont pas tenu compte des risques et sont ainsi les auteurs de fautes aux conséquences négatives pour elles-mêmes (§2). § 1 : La méconnaissance volontaire du risque, source de responsabilité La méconnaissance des dispositifs et des risques existants peut être source de responsabilité civile (A), la responsabilité administrative peut également être mise en jeu dès lors que ce sont les autorités publiques compétentes qui délivrent des autorisations ou imposent des déclarations. Or, il apparaît dans la pratique que parfois, ces autorités n’ont pas tenu compte des risques et ont octroyé notamment des autorisations (permis de construire, autorisation de lotir, autorisation d’exploitation d’un camping…) alors même qu’elles avaient eu connaissance du danger ou que des indices auraient dû les alerter et les conduire à ne pas délivrer les autorisations (B). Sur le plan pénal, ont été crées des infractions pour non-respect des règles d'urbanisme, par ailleurs, la notion de risque et de la connaissance de celui-ci est actuellement un élément déterminant de la responsabilité pénale issue des infractions involontaires (C). A. La méconnaissance volontaire du risque, source de responsabilité civile La connaissance de l'existence d'un risque par le défendeur ne lui permet pas d'invoquer la force majeure ; par ailleurs la méconnaissance d'un risque ou de dispositifs de prévention peut être source de responsabilité civile délictuelle ou contractuelle. 1°) L'existence d'un règlement de sécurité rend le risque prévisible S'agissant des responsabilités objectives la connaissance du risque, rend celui-ci prévisible, il est clair que la force majeure est alors difficilement admise. L'existence d'une quelconque réglementation préventive exclut en effet la force majeure. Ainsi la Cour de cassation a récemment affirmé que "L'existence d’un règlement prévoyant l’installation d’un tampon étanche, fut-il facultatif pour le syndicat, rendait prévisibles les inondations dues à un engorgement des égouts de la ville". (Civ 2ème, 1er avril 1999, bull. n° 65). Cet arrêt figure dans le Rapport annuel de la Cour de cassation de 1999 ce qui démontre son importance : "La seconde Chambre civile a confirmé son exigence pour que le gardien d'une chose puisse voir la présomption de responsabilité pesant sur lui écartée du fait de la force majeure, en rappelant les caractères cumulatifs de l'extériorité, de l'imprévisibilité et de l'irrésistibilité que l'événement invoqué doit présenter afin de pouvoir déboucher sur une exonération. La simple existence de la possibilité d'une diligence préventive même non réglementairement exigée, donc facultative ; mais susceptible de prévenir les effets d'un sinistre empêchait, par elle-même de prétendre utilement à l'imprévisibilité." Il est bien évident qu'a fortiori l'existence d'un plan de prévention des risques supprime la condition d'imprévisibilité de la force majeure exonératoire. 158 2°) La méconnaissance des risques et des dispositifs existants, source de responsabilité La méconnaissance volontaire d'un risque auquel est exposé autrui peut constituer une faute civile au sens des articles 1382 ou 1383 du Code civil dès lors que le risque se réalise, la faute pouvant alors consister en la violation d'un devoir général de prudence. Les constructeurs s’exposent à voir leur responsabilité engagée. Par ailleurs, les notaires ne sont pas à l’abri d’une action en recherche de responsabilité pour faute. S'agissant des professionnels, et en particulier des constructeurs, l'article 123-43 du Code de la construction et de l'habitation leur impose de contrôler la conformité des installations avec la réglementation applicable en matière de sécurité205, de plus ils sont soumis à un devoir de conseil lequel les oblige à s'informer afin de renseigner leur client, ils sont donc tenus de consulter tous les documents d'urbanisme et leurs annexes. La Cour de cassation veille au respect de ces obligations. L'immeuble doit bien entendu être conforme aux règlements de sécurité et "les défauts de conformité d'un immeuble à des règlements de sécurité constituent des vices de construction susceptibles d'entrer dans le cadre de la garantie décennale" (Civ. 3ème, 8 juin 1977, Bull., n° 251). Est privé d'honoraires l'architecte qui avait omis de se renseigner auprès des services de l'urbanisme alors qu'existait une interdiction de construire résultant du plan d'aménagement communal (Civ. 1 ère, 18 octobre 1965, Bull., n° 545) ou que la situation, au regard de l'urbanisme, rendait le projet irréalisable (Civ. 3 ème, 27 novembre 1985, Gaz. Pal., 1986, 1, pan, 67). L'architecte peut même se trouver condamné pour faute pour n'avoir pas relevé les contradictions existant entre des décisions préfectorales (Civ. 3ème, 10 février 1982, RD. Imm., 385). Il n'est pas contestable que "l'architecte chargé de la conception d'un projet de construction et de l'établissement des plans du permis de construire, tenu d'un devoir de conseil envers le maître de l'ouvrage, doit concevoir un projet réalisable, qui tient compte des contraintes du sol" (Civ. 3ème, 25 février 1998, D. aff., 1998, 467). En matière de risque inondation, il est évident que les constructeurs sont tenus de consulter les documents de prévention des risques et les PPR lorsqu'ils existent. Le non-respect des plans de prévention des risques naturels prévisibles par les architectes et les constructeurs constitue par ailleurs une faute pénale ainsi que nous le verrons ultérieurement (art. L. 562-5 du Code de l'environnement). Les peines peuvent être prononcées contre les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou autres personnes responsables de l'exécution desdits travaux. Les constructeurs ne sont pas les seuls professionnels dont la responsabilité peut être retenue. Dans l'étude "Responsabilité, Risques et Catastrophes Naturelles" d'avril 1998, menée par l'Institut Français de Recherches et d’Etudes sur la Sécurité, en réponse à l'appel d'offres “ Recherche juridique en environnement ” du Ministère de l'Environnement, maître Philippe Buerch, notaire, s'est penché sur la responsabilité des notaires en matière de risques 205 Le non respect de cette obligation est également source de responsabilité pénale, V. ce chapitre, infra C. 159 naturels206. Cette contribution est tout à fait éclairante, l'auteur a fort opportunément mis en évidence l'importance du devoir de conseil du notaire dont la violation peut être constitutive d'une faute susceptible d'engager sa responsabilité207. Figurent en effet parmi les obligations professionnelles du notaire une obligation de vérification et une obligation de renseignements. De manière générale, ainsi que l'expose Maître J.C. Decorps dans une étude récente 208, "il s'agit pour le notaire de contrôler les éléments qui assurent la validité de l'acte (capacité des parties, désignation du bien concerné, origine de propriété, existence d'un droit de préemption, restrictions au droit de propriété, etc…(Cass. civ. 1 ère, 9 novembre 1999, Bull. civ., n° 299)". Il incombe notamment au notaire de vérifier les titres de propriétés, les servitudes. Le devoir de conseil est dû à tous les clients et la jurisprudence récente affirme que le devoir de conseil ne disparaît pas en raison des compétences dont dispose le client relativement à l'opération pour laquelle l'officier ministériel instrumente209, toutefois la responsabilité peut dans cette hypothèse être partagée avec la victime. Ainsi, la première Chambre civile, dans un arrêt en date du 29 février 2000 (Bull. Civ., n° 72) a énoncé que "si un notaire ne peut être déchargé de son devoir de conseil en considération des compétences personnelles de son client, en revanche, la faute commise par ce dernier et qui constitue une cause du dommage qu'il a subi peut être retenue pour fonder un partage de responsabilité". Ce devoir existe à l'occasion de tous les actes authentiques et s'étend à tous les actes auxquels le notaire intervient. Rappelons que les notaires ont le monopole de la rédaction des actes de mutation immobilière. Le notaire est donc redevable de ce devoir de conseil à l'occasion des actes afférents à l'acquisition d'un immeuble par son client. Il appartient au notaire de contrôler l'ensemble des éléments qui assurent la validité de l'acte. Par exemple, ainsi que le précise Maître Buerch, le notaire ne pourra pas impunément laisser un client acquérir un terrain en vue de l'implantation de bâtiments sans s'assurer de sa constructibilité au regard des règles d'urbanisme. Dans une décision en date du 16 janvier 1992, le tribunal de grande instance de Chaumont rappelait que le notaire avait pour obligation de procéder à toutes les vérifications utiles sur la situation de l'immeuble au regard des règles de l'urbanisme. En l'espèce, l'officier ministériel avait fait procéder à la signature d'un acte sans avoir obtenu tous les renseignements d'urbanisme nécessaires. La Cour d'appel de Paris, le 17 décembre 1992 (juris-data, n° 82-40346) considère qu’a manqué à son devoir de conseil le notaire qui dresse un acte de vente au vu du seul certificat d'urbanisme lequel ne fournissait pas suffisamment d'informations sur la situation du terrain vendu et n'attirait pas de façon précise l'attention sur le risque que représentait la construction projetée. 206 Ph. BUERCH, "La responsabilité des notaires et les dommages pour risques naturels", in Responsabilité, Risques et Catastrophes Naturelles, avril 1998, p. 119 ; V. également J.-P. DECORPS, " La victime et la responsabilité notariale dans l'espace judiciaire européen", Conférence- Débat organisée par l'Union des avocats européens sur le thème "Les victimes dans l'espace judiciaire européen", Marseille, 5 octobre 2001. 207 Cette responsabilité n'est pas fondée, comme on pourrait le croire sur l'art. 1134 C.C. relatif à la responsabilité contractuelle, mais sur l'art. 1382 C.C. relatif à la responsabilité délictuelle. 208 J.-P. DECORPS, " La victime et la responsabilité notariale dans l'espace judiciaire européen", loc. cit. 209 ibid 160 La Cour d'appel de Rouen, le 2 décembre 1998 (juris-data, n° 98-47343) estime qu'a commis une faute engageant sa responsabilité le notaire ayant fait expressément état dans un acte de vente d'un certificat d'urbanisme annexé alors qu'il n'avait relevé qu'une simple note de renseignement. Dès lors l'acquéreur n'a pas connu le caractère inconstructible du terrain en raison d'un risque d'inondation. De même la Cour d'appel de Montpellier (23 novembre 2000, juris-data, n° 00-142086) retient que le notaire a failli à sa mission dans la rédaction de l'acte en ne n'annexant pas le permis de construire qu'il s'était engagé à remettre aux acquéreurs. En l'espèce, la villa était construite sur un terrain inondable. La responsabilité des notaires peut être très lourde allant parfois jusqu'à être assimilée à celle du constructeur ainsi qu'en témoigne un arrêt de la Cour d'appel d'Angers du 5 janvier 1982 (juris-data, n° 82-40346). Selon la Cour, il appartenait au notaire de rechercher avec précision les conditions imposées à l'acquéreur d'un terrain dont l'intention était de construire. En l'espèce il y avait une obligation de construire sur pilotis ou de remblayer. La vente a été annulée et le notaire a été condamné in solidum pour un tiers avec le vendeur et le maître d'œuvre. Le devoir de conseil des notaires connaît toutefois des limites, outre le partage de responsabilité en cas de faute d'un client ayant des compétences particulières, "les obligations du notaire ne lui imposent pas de se substituer à l'autorité administrative pour évaluer ; suivant des appréciations subjectives, les chances de délivrance d'un permis de construire" (Cass. civ. 1ère, 5 décembre 2000, Bull. civ., n° 315). De même, bien que le notaire, rédacteur de l'acte de vente d'un bien immobilier, doit s'assurer du respect des règles d'urbanisme, une Cour d'appel a pu retenir que le notaire n'avait commis aucun manquement à son obligation de conseil dans la mesure où il ne lui appartenait pas de vérifier l'application d'une règle d'urbanisme au respect de laquelle les seuls architectes étaient tenus (Cass. civ. 3 ème, 10 novembre 1998, J.C.P., 1999, II, 10 007). S'agissant du caractère inondable d'un immeuble vendu, la responsabilité du notaire est engagée dès lors que le permis de construire, dont il a l'obligation de vérifier le contenu, informe des risques d'inondation ( Montpellier, 25 mars 1986, inédit). En revanche, il apparaît nettement qu'elle ne saurait être engagée dès lors que celui-ci ne figure pas dans les documents qu'il lui appartient de vérifier. Le notaire n'est donc tenu que par les informations figurant dans les documents, "il ne lui appartient pas d'enquêter sur le caractère fréquemment inondable ou non de l'immeuble vendu. A fortiori, il n'avait pas le devoir d'indiquer aux acquéreurs un risque dont il ignorait la gravité et le caractère permanent d'autant plus que le certificat d'urbanisme ne mentionnait pas ce risque et que les vendeurs ne rapportaient pas la preuve de la notoriété particulière de ce risque dans le quartier concerné" (T.G.I. Saint-Malo, 9 septembre 1986, inédit). De même, tribunal de grande instance de Nantes (24 mai 1994, inédit) a considéré que ne peut être reproché au notaire de n'avoir pas avoir mentionné le caractère inondable du terrain dès lors qu'il avait sollicité la délivrance du certificat d'urbanisme lequel ne présentait aucune mention quant au risque d'inondation. A été également jugé que n'avait aucune responsabilité le notaire qui n'avait pas signalé à l'acquéreur d'un immeuble le fait que celui-ci soit situé en zone inondable, la note de renseignement d'urbanisme annexée à l'acte de vente ne mentionnant pas que l'immeuble était soumis à un risque permanent d'inondation, "le notaire a rempli son obligation d'information en obtenant ladite note, dont il n'avait pas de raison de soupçonner le caractère erroné ou 161 incomplet…Le simple fait d'être installé de longue date dans la commune où se situait l'immeuble ne lui (le notaire) donnant pas l'obligation de connaître mieux que les services compétents de la municipalité la délimitation des terrains situés en zone inondable" (T.G.I. Guingamp, 8 janvier 1997, inédit). Cette décision est en accord avec la jurisprudence en matière de constructibilité qui dégage le notaire de sa responsabilité en présence de personnes plus compétentes que lui210. Qu'en est-il lorsqu’un plan de prévention des risques est établi ? Dès lors que la mention de la situation en zone inondable figure dans les documents que le notaire a l'obligation de vérifier, il lui appartient bien évidemment d'avertir son client de l'existence du risque. Il n'est toutefois pas responsable lorsque la mention ne figure pas dans les documents en question. Ainsi, une Cour d'appel a considéré que le notaire n'avait pas à vérifier si la parcelle vendue était concernée par le classement dans le futur plan d'exposition aux risques inondations dès lors qu'il a requis les pièces nécessaires à la vente à savoir la note de règlement d'urbanisme, le plan visé par les carrières et le certificat communal, "il ne peut lui être fait grief de ne pas avoir pris connaissance des parutions légales, peu de temps avant la vente, de l'arrêté préfectoral classant le terrain dans le futur plan d'exposition aux risques d'inondations fluviales de la vallée de l'Oise et de ne pas avoir recherché si la parcelle vendue était concernée" (C.A. Versailles, 20 janvier 2000, inédit). Il est vrai que l'arrêté préfectoral précédait de peu la vente et que le plan d'exposition aux risques d'inondations n'était que "futur" de plus, postérieurement à la vente, le service de la navigation de la Seine avait précisé que le terrain, non-riverain de l'Oise, n'était grevé d'aucune servitude vis à vis de Code du domaine fluvial et des voies navigables et se situait en dehors de la zone A, dite de grand écoulement des eaux. Il ressort de l'étude des décisions en notre possession 211 que la responsabilité du notaire est engagée dès lors que celui-ci est mentionné dans document d'urbanisme et même, par une interprétation a contrario, dès lors qu'il en a eu personnellement connaissance mais sa responsabilité s'arrête là, rien ne l'oblige à aller s'informer plus avant. Il n'est pas douteux que les notaires, professionnels souvent proches de leurs clients, aient un rôle déterminant à jouer en matière de prévention du risque inondation. Il serait souhaitable qu'ils aient la faculté d'être facilement informés de l'existence de ce risque afin qu'ils puissent utilement conseiller leurs clients. 210 Cass. civ. 3ème, 10 novembre 1998, préc. Nous remercions le Centre de Recherche d'Information et de Documentation Notariales pour les arrêts qu'ils nous a transmis 211 162 B. La méconnaissance volontaire du risque, source de responsabilité administrative Ce sont les services de l’Etat (dans les communes qui ne sont pas dotées de plans locaux d'urbanisme approuvés ou de cartes communales) ou la commune elle-même (dès lors qu’elle est dotée d’un Plan Local d’Urbanisme approuvé, anciennement dénommé Plan d’Occupation des Sols, ou d'une carte communale approuvée) qui délivrent les permis de construire. Or, il peut arriver que cette délivrance intervienne, sans que soient imposées de conditions spéciales ou que les conditions spécifiques exigées soient insuffisantes, alors que le représentant de la collectivité publique (soit la commune lorsque le maire délivre l’autorisation au nom de celleci, soit l’Etat lorsque la délivrance est réalisée au nom de l’Etat ) connaissait la présence d’un danger, d’autant comme le souligne Erwan Le Cornec que “ le maire et son service instructeur sont tenus de s’enquérir de l’état du sol ”212. Que se passe-t-il dans une pareille situation ? En toute logique, la responsabilité de la collectivité, sous l’autorité de laquelle a été délivrée l’autorisation, va pouvoir être recherchée devant le juge administratif puisque l’action est dirigée contre une personne morale de droit public dont le juge naturel reste le juge administratif depuis la décision Blanco du Tribunal des conflits de 1873 (op.cit.). Ainsi, celui qui délivre un tel document alors qu’il savait qu’il y avait un risque, entache sans aucun doute sa décision d’une illégalité qui, comme le droit administratif le reconnaît depuis des années, est constitutive d’une faute de nature à permettre un engagement de responsabilité (C.E., 26 janvier 1973, Driancourt, Recueil p. 77). Il est intéressant de se référer à quelques exemples jurisprudentiels de responsabilité du fait de la délivrance de permis de construire en connaissance du risque. Tout d’abord, on peut s’appuyer sur l’analyse de la Cour administrative d’appel de Lyon. En effet, “ les terrains devant lesquels furent édifiés les immeubles inondés ont été classés terrains constructibles par le plan d'occupation des sols... Les permis de construire ont été accordés au vu d'un avis émanant des services extérieurs du ministère de l'équipement qui excluait expressément tout risque de débordement depuis la canalisation…alors que les informations possédées par l'administration, à l'époque où ces décisions ont été prises, tant en ce qui concernait le régime du torrent que la nature et la situation des lieux, ne permettaient pas de considérer que tout risque était éliminé ; qu'ainsi, en accordant les permis de construire…, sans même les assortir des prescriptions qu'appelait le risque de débordement du Chardonnet, le préfet de la Savoie a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat" (C.A.A. de Lyon, 9 juillet 1990, n°89LY00734, n°89LY00737, n°89LY00738). Ensuite, le Tribunal administratif de Montpellier condamne l’Etat à verser aux requérants une somme de 25000 francs en réparation du préjudice subi du fait de la délivrance d’un permis de construire dans une zone inondable d’une commune ce qui constitue une faute car le préfet ne pouvait ignorer le grave danger d’inondation. Mais le juge souligne que les victimes en négligeant de s’assurer ont commis une imprudence justifiant qu’une part de responsabilité soit laissée à leur charge (T.A. de Montpellier, 8 juillet 1994, Sire c/ Etat ). L’existence d’une faute en raison de l’absence de prise en compte d’un risque connu s’impose également en ce qui concerne la délivrance d’une autorisation de lotir comme cela ressort d’un arrêt de la Cour administrative d’appel de Lyon. Selon celle-ci “ en accordant l’autorisation de lotir dans cette zone, dont les caractéristiques générales ne pouvaient être ignorées, sans assortir cette autorisation de prescriptions spéciales propres à prévenir les glissements de terrain risquant d’être générés par l’ensemble des travaux prévus, le préfet a…commis une erreur manifeste d’appréciation qui s’est répercutée lors de la délivrance du E. LE CORNEC, "Les risques naturels et le droit de construire ou d’aménager. Aspects de la responsabilité administrative et pénale", Petites affiches, 15 août 1997, p.4 et s. 212 163 permis de construire…par le maire…et qui constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat ” (C.A.A. de Lyon, 9 décembre 1992, n°91LY00327, Gire) ; dans le même sens, C.A.A. de Lyon, 8 juillet 1997, n°94LY01260, Société Valente et La Selva, Ministre de l’Equipement, des transports et du tourisme, et C.A.A. de Bordeaux, 8 février 1996, Mme Miquel, n°95 BX0049 : “ il résulte de l’instruction que le préfet…a délivré…une autorisation de lotir…qu’il ressort notamment du rapport de l’expert…que si aucun risque déclaré n’avait été signalé avant la demande d’autorisation de lotir, la présence d’une faille et de cavités naturelles sur l’un des rebords du plateau sur lequel devait être implanté le lotissement, rendant le terrain impropre à la construction de maisons individuelles, ne pouvait être ignorée des services de l’Etat auxquels il incombait…d’imposer les investigations géologiques nécessaires…que dans ces conditions, en classant ce terrain en zone constructible et en accordant l’autorisation de lotir sollicitée, d’aucune réserve, le préfet du Var a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat…d’autre part en autorisant Mme Miquel à construire une maison sur un terrain dont il ne pouvait ignorer le caractère inondable sans assortir son autorisation de conditions spéciales, le maire…a commis une faute, distincte de celle du préfet, et de nature à engager la responsabilité de la commune ”. A plus forte raison, la responsabilité de la collectivité publique pourra être recherchée si elle délivre une autorisation, tel un permis de construire, en méconnaissance de normes dont le respect s’impose à elle et qui cherchent à prévenir le risque inondation (Plan de Prévention des risques ayant la nature de servitudes d’utilité publique et annexé de ce fait au Plan Local d’Urbanisme qui est le document de référence de la réglementation locale en matière d’urbanisme). Ainsi, le Tribunal administratif de Strasbourg indique que le demandeur est “ fondé à soutenir que l'Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité envers lui en délivrant, par une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du Code de l'urbanisme, un permis de construire non assorti de prescriptions pour des terrains compris dans un secteur exposé à des risques d'inondation ” (8 novembre 1995 n°91-1508, 91-2323, 92-3939 et 93-177, SA Seloi et M. Gourdon/commune de Saint-Julien-lès-Metz et préfet de Moselle, BJDU 3/96, p. 217, concl. H. Blais).213. Dans beaucoup de ces jurisprudences, le juge administratif se réfère à l’exigence d’une faute de nature à engager la responsabilité de la personne publique mise en cause. La formule “ faute de nature à engager la responsabilité ” ne doit pas induire en erreur. Elle signifie que pour le juge il est indispensable que l’on puisse identifier une faute simple. Cette précision est fondamentale de plusieurs points de vue. En premier lieu, elle permet de souligner que le droit administratif distingue deux grands types de faute dans le régime de la responsabilité pour faute, qui reste le principe en matière de responsabilité administrative : la faute simple et la faute lourde. Cette dissociation est cruciale car, selon la nature de la faute exigée par le juge, la situation des victimes sera plus ou moins améliorée. En effet, il appartient en principe à ces dernières (sauf cas de présomption de faute peu nombreux) d’apporter la preuve qu’elles ont subi un préjudice, qu’il y a une faute et enfin qu’un lien de cause à effet entre celle-ci et le préjudice existe. Dès lors, l’important est de savoir quel est le type de faute que le juge exige. En effet, une faute lourde 213 Lire J. SIRONNEAU, "Les responsabilités en matière d'inondations et de réparation des dommages", Droit de l'environnement, novembre 1998, n° 63, p. 15 ; “ Urbanisation dans les zones inondables : des responsabilités de plus en plus partagées ”, Droit de l'environnement, mars 1999, n° 66, p. 13 ; B. GODBILLON, “ L'autorisation de construire et le risque naturel, Le devoir de vigilance en droit de l'urbanisme ”, A.J.D.I., 10 septembre 1999, p. 768 164 étant plus grave que la faute simple, prouver son existence ne sera pas toujours facile. Ainsi, la présence d’une faute simple paraît moins difficile à déceler qu’une faute lourde qui, parce qu’elle est d’une gravité importante, ne sera pas découverte systématiquement. Car, dans l’hypothèse de la faute simple, la moindre erreur commise par la personne publique est de nature à engager sa responsabilité sous réserve, bien évidemment, qu’un préjudice et un lien de causalité existent. En second lieu, la solution consistant à demander aux victimes d’apporter la preuve d’une faute simple s’inscrit totalement dans l’évolution apparue depuis quelques années tendant à réduire comme peau de chagrin les hypothèses de responsabilité fondée sur la faute lourde afin de faciliter la situation des personnes victimes. Ainsi, dans les exemples que nous venons de présenter, l’exigence d’une faute simple s’inscrit dans cette préoccupation tendant à défendre le plus complètement possible les intérêts des administrés. En revanche, le juge administratif demande toujours la preuve d’une faute lourde dans certaines situations. Tel est le cas en ce qui concerne l’Etat - en tant qu’organisateur des services d’annonce des crues (C.E., 11 janvier 1957, Dame veuve Etienne, recueil p.27 “ eu égard tant au caractère du service en question, institué par l’administration en dehors de toute obligation légale, qu’aux difficultés propres de son accomplissement en période d’inondation et de désorganisation des moyens de communication, seule une faute lourde dans son exécution pourrait engager la responsabilité de l’Etat vis-à-vis des victimes de l’inondation ”, - mais aussi dans l’entretien et le curage des cours d’eau non domaniaux. L’Etat, dans cette dernière hypothèse, est chargé de l’application de la police des cours d’eau et doit à ce titre prendre toutes les mesures utiles pour assurer l’écoulement de ces eaux en cas de carence des riverains. Ainsi C.E., 10 juin 1994, n°56.439, Ministre des transports : “ Considérant que par un arrêté en date du 13 janvier 1961, le Préfet des Bouches-duRhône avait rappelé qu’il appartenait aux riverains de procéder au curage des cours d’eau, il résulte de l’instruction que le lit du Vallat de Roubaud était, à la date des faits, obstrué, empêchant ainsi l’écoulement des eaux ; que le fait pour le préfet des Bouchesdu-Rhône de ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour assurer le libre écoulement des eaux, comme le lui en faisaient obligation les articles 103 et 115 du Code rural, a constitué…une faute lourde de nature à engager la responsabilité de l’Etat… ”. En ce qui concerne les communes, leur responsabilité peut être engagée sur le fondement d’une faute lourde, lorsqu’elles agissent en qualité d’autorité de police notamment en matière de mise en œuvre des mesures de prévention contre les inondations (C.E., 31 mars 1965, Consorts Peydessus c/Commune de Loudenvielle, n°61280, recueil p. 212 “ au moment du sinistre, et en vue de détourner du village les eaux qui s’étaient engouffrées dans un chemin creux conduisant à celui-ci, le maire a ordonné l’érection d’un barrage en travers dudit chemin et la destruction, au droit de la propriété des consorts Peydessus, d’un pan de la murette le bordant vers l’aval ; qu’en prenant ces décisions…le maire n’a pas commis de fautes lourdes seules de nature à engager le cas échéant la responsabilité de la commune dans l’exécution des mesures de police susmentionnées ”. La responsabilité d’une commune l’emporte également sur le fondement d’une faute lourde dans l’hypothèse d’une carence dans l’annonce des crues, aucune signalisation ou information n’ayant vu le jour : C.E., 22 juin 1987, Ville de Rennes c/ Compagnie rennaise du 165 linoléum et du caoutchouc, recueil p. 223 “ il résulte de l’instruction, notamment du rapport des experts…qu’alors que la côte d’alerte constatée…laissait présager l’imminence du débordement de l’Ille…les services de la ville de Rennes chargés de la lutte contre les inondations n’ont pas déclenché l’état d’alerte, ni averti les riverains des maisons exposées à l’inondation ; que cette carence a constitué une faute lourde et engagé la responsabilité de la ville de Rennes… ” ; dans le même sens, C.E., 16 novembre 1988, Ville de Rennes /Epoux Hervault, n°61589. Lorsqu’une commune intervient au titre de ses pouvoirs de police par la prescription de mesures de police, seule la faute simple est exigée : “ il n’est pas établi, dans les circonstances de l’affaire, que la municipalité ait commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune dans la prescription des mesures de police destinées à prévenir les accidents et fléaux calamiteux ” C.E., 31 mars 1965, Consorts Peydessus c/Commune de Loudenvielle, op.cit. ; même solution pour l'Etat. Au-delà, lorsqu’une autorisation d’ouverture d’un camping a été délivrée sans que des contraintes particulières aient été imposées alors qu’il y avait un risque, la responsabilité de l’auteur de la délivrance sera engagée là aussi sur le fondement d’une faute simple : C.A.A. de Lyon, 13 mai 1997, M. Balusson et autres, n°94LY00923, “ il appartenait au préfet lors de la délivrance de l’autorisation d’ouverture du terrain de camping aménagé de prendre en compte, s’agissant de mesures de police, la sécurité des usagers de cet équipement…qu’ainsi en accordant les autorisations précitées sans prescrire de mesures particulières susceptibles de protéger contre les inondations et les occupants du terrain, le préfet a commis une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat à l’égard des victimes de la crue du 14 juillet 1987 ”. L’explication souvent avancée à cette approche variée de la nature de la faute exigée dans le domaine des activités de police administrative tient à la difficulté que peut rencontrer l’autorité de police dans la mise en œuvre des mesures qu’elle édicte. Cela expliquerait que l’on ne puisse engager sa responsabilité que sur le fondement d’une faute lourde. A l’inverse, l’élaboration de mesures de police paraît ne pas se heurter à des difficultés importantes, dès lors, rien ne justifierait la nécessité d’une faute lourde. Néanmoins, l’évolution du droit administratif français est dans le sens d’une disparition progressive de la faute lourde au profit de la faute simple, ceci s’expliquant toujours par le souci de faciliter l’indemnisation des victimes. Or, comme l’écrit justement M. Chapus, “ comment peut-on raisonnablement continuer à justifier l’exigence d’une faute lourde par la difficulté des activités en cause, puisque, s’agissant d’autres activités, cette difficulté (qui n’est pas plus niable que niée) est désormais jugée comme ne le justifiant plus ? La cohérence de l’état de droit est en jeu ”214. Si la délivrance de l’autorisation a eu lieu alors que l’autorité compétente ne pouvait pas connaître l’existence d’un risque, sa responsabilité ne sera naturellement pas engagée. Comme l’écrit M.Godbillon215 “ Si administrer c’est prévoir, on ne saurait exiger des pouvoirs publics qu’ils puissent prémunir les particuliers contres des risques qu’ils ignoraient euxmêmes lors de la délivrance des autorisations de construire ”. Ainsi, lorsqu’une collectivité publique délivre des autorisations en passant outre l’existence de risques qu’elle connaissait, elle engage sa responsabilité vis-à-vis des victimes. Cela signifie dès lors que la personne publique doit, pour éviter au maximum de se retrouver 214 215 CHAPUS, Droit administratif général, tome 1, 14ème édition, 2000, p. 1287 loc. cit. 166 dans cette situation, réaliser une instruction minutieuse et attentive des demandes qui lui sont adressées. Ainsi, le stade de l’instruction constitue une phase fondamentale dans l’octroi ou non d’une autorisation car les conséquences de la solution retenue seront négatives si un risque naturel était connu au moment de la délivrance. 167 C. La méconnaissance volontaire du risque, source de responsabilité pénale La méconnaissance du risque est pénalement sanctionnée au titre des infractions aux règles du Code de l'urbanisme. En outre la méconnaissance volontaire d'un risque est prise en compte pour les infractions non intentionnelles à la sécurité des personnes. 1°) La mise en œuvre de la responsabilité pénale pour non-respect des règles d’urbanisme L'arsenal répressif en la matière est important. Aux termes de l'article L. 480-4 du Code de l'urbanisme la responsabilité pénale peut être mise en œuvre pour non-respect des règles d’urbanisme : - "L'exécution de travaux ou l'utilisation du sol en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier, II, IV et VI du présent livre (Livre IV), par les règlements pris pour son application ou par les autorisations délivrées en conformité avec leurs dispositions"216 L'infraction est un délit, elle peut être constituée soit dans le défaut de permis de construire, soit dans la non-conformité de la construction ou des travaux au permis de construire accordé. Les peines peuvent être prononcées contre les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou autres personnes responsables de l'exécution desdits travaux. Selon l'article L. 480-5 du Code de l'urbanisme, En cas de condamnation pour une infraction prévue à l’article L. 480-4, - le tribunal, au vu des observations écrites ou après audition du maire ou du fonctionnaire compétent, statue même en l'absence d'avis en ce sens de ces derniers, soit sur la mise en conformité des lieux ou celle des ouvrages avec les règlements, l'autorisation ou la déclaration en tenant lieu, soit sur la démolition des ouvrages ou la réaffectation du sol en vue du rétablissement des lieux dans leur état antérieur. art. L. 480-4 du Code de l’urbanisme : “ L'exécution de travaux ou l'utilisation du sol en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier, II, IV et VI du présent livre, par les règlements pris pour son application ou par les autorisations délivrées en conformité avec leurs dispositions, exception faite des infractions relatives à l'affichage des autorisations ou déclarations concernant des travaux, constructions ou installations, est punie d'une amende comprise entre 1200 euros et un montant qui ne peut excéder, soit, dans le cas de construction d'une surface de plancher, une somme égale à 6000 euros par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable au sens de l'article L.430-2, soit, dans les autres cas, un montant de 300 000 euros. En cas de récidive, outre la peine d'amende ainsi définie un emprisonnement de six mois pourra être prononcé. Les peines prévues à l'alinéa précédent peuvent être prononcées contre les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou autres personnes responsables de l'exécution desdits travaux. Ces peines sont également applicables : 1. En cas d'inexécution, dans les délais prescrits, de tous travaux accessoires d'aménagement ou de démolition imposés par les autorisations visées au premier alinéa ; 2. En cas d'inobservation, par les bénéficiaires d'autorisations accordées pour une durée limitée ou à titre précaire, des délais impartis pour le rétablissement des lieux dans leur état antérieur ou la réaffectation du sol à son ancien usage. ” 216 168 Le tribunal pourra ordonner la publication de tout ou partie du jugement de condamnation, aux frais du délinquant, dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans tout le département, ainsi que son affichage dans les lieux qu'il indiquera. L'article L.160-1 du Code de l'urbanisme, en rendant applicable l'article L. 480-4, réprime pénalement l'exécution de travaux ou l'utilisation du sol en méconnaissance des obligations imposées par les articles L. 111-1 à L. 111-1-4, L111-3 et L. 111-5-2 ainsi que par les règlements pris pour leur application : - "En cas d'infraction aux dispositions des projets d'aménagement et des plans d'urbanisme maintenus en vigueur dans les conditions énoncées soit à l'article L. 124-1, soit à l'article L. 150-1 (2ème alinéa), ou en cas d'infraction aux dispositions des plans d'occupation des sols, des plans locaux d'urbanisme, les articles L. 480-1 à L. 480-9 sont applicables, les obligations visées à l'article L. 480-4 s'entendant également de celles résultant des projets et plans mentionnés ci-dessus. Les sanctions édictées à l'article L. 480-4 s'appliquent également : a) En cas d'exécution de travaux ou d'utilisation du sol en méconnaissance des obligations imposées par les articles L. 111-1 à L. 111-1-4, L111-3 et L. 111-5-2 ainsi que par les règlements pris pour leur application …" S'agissant plus précisément des PPR, la loi Barnier du 2 février 1995 introduit un article 40-5 dans la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987 permettant de sanctionner pénalement le fait de construire, ou de ne pas respecter les conditions fixées par le PPR. Actuellement l'article L. 562-5 du Code de l'environnement dispose que : - "Le fait de construire ou d'aménager un terrain dans une zone interdite par un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé ou de ne pas respecter les conditions de réalisation, d'utilisation ou d'exploitation prescrites par ce plan est puni des peines prévues à l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme." L'application de l'article L. 480-4 du Code de l'urbanisme a donné lieu à une jurisprudence abondante217 dont nous donnons ici quelques exemples en matière de risque inondation. Ainsi, pour avoir construit à un niveau inférieur à celui autorisé dans une zone inondable, le prévenu, "en remblayant l'ensemble de son terrain alors qu'aucun remblai n'était autorisé aux termes du permis du construire, a commis l'infraction d'exécution de travaux en méconnaissance des obligations imposées par un permis de construire" (Paris, 12 novembre 1991, juris-data n° 024852). De même a été condamné un promoteur pour n'avoir pas mis en place le réseau pluvial imposé au permis de construire (Aix-en-Provence, 8 décembre 1994, juris-data n° 050677). Dans la majorité des cas, les poursuites fondées sur l'article L. 480-4 ont trait à la méconnaissance des dispositions relatives au permis de construire, mais elles peuvent également trouver leur origine dans la seule méconnaissance des règles du POS 218. Il n'est pas douteux que "le fait d'entreprendre, en connaissance de cause, la construction d'un chalet en bois, en contravention aux dispositions du POS, sur une zone d'espace naturel soumise à des 217 Mais toutes les infractions ne sont pas constatées et bon nombre d'entre elles demeurent inconnues, V. sur ce point H. PERINET-MARQUET, "L'inefficacité des sanctions du droit de l'urbanisme", D. 1991, chr., 39 ; M. ROUCHAYROLLE, “ Le risque pénal en droit de l’urbanisme – Les infractions ”, RD. Imm., nov.-déc. 2001, 416 ; G. ROUJOU de BOUBEE, “ Le risque pénal en droit de l’urbanisme – Les sanctions ”, RD. Imm., nov.-déc. 2001, 421 218 Crim., 9 novembre 1994, RD. Imm. 17 (3), juill.-sept., 1995, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli 169 risques d'inondation, sans solliciter ni autorisation ni permis de construire, constitue une infraction prévue par les articles L. 421-1 et L. 480-4 du code de l'urbanisme" (Paris, 20 septembre 1996, juris-data n° 022391). En imposant la démolition de la construction édifiée en violation des règles de l'urbanisme pour prévenir les risques inhérents au caractère inondable du site, la Cour d'appel se montre très sensible au risque inondation : "En effet, la situation dramatique due aux nombreuses inondations ayant eu lieu sur le territoire national depuis quelques années doit impérativement commander le respect des règles de l'urbanisme." La Chambre criminelle de la Cour de cassation (Crim. 10 mai 1995, pourvoi n° 94- 84.379, Dr. adm.,.1995, n° 543) a confirmé la condamnation d'un propriétaire “ Pour exécution des travaux en méconnaissance des dispositions du POS (…), pour avoir entrepris ou implanté une construction immobilière sans avoir obtenu, au préalable, un permis de construire (…)". En l'espèce le propriétaire avait fait creuser un étang sur une parcelle de terrain lui appartenant, "située en zone NDC, soumise à risques d’inondation ". A été également confirmée par la Chambre criminelle la condamnation de la gérante d'une société civile immobilière (Crim. 7 avril 1999, pourvoi n° 98-81.498) :" En ce que l’arrêt attaqué a déclaré Sonia Fxxxx coupable d’avoir exécuté les travaux sans respecter le permis de construire (…), s’agissant de l’édification aux lieu et place du parking prévu au permis de construire, d’un bâti abritant un atelier de peinture automobile, ouvert au public dans un immeuble implanté en zone d’inondation à haut risque ; qu’il y a donc lieu de sanctionner de tels agissements d’une sévère peine d’amende ". Dans ses conclusions d'appel, la demanderesse soutenait qu'une procédure était actuellement en cours devant le tribunal administratif de Montpellier visant à obtenir l'annulation du plan de prévention des risques d'inondations de la Commune de xxxxx ; qu'en confirmant le jugement sur la peine infligée eu égard au caractère inondable des lieux sans répondre à ce moyen pertinent, la Cour a privé sa décision de motifs, La Chambre criminelle n'est pas davantage sensible à cet argument que la Cour d'appel : "Attendu que l'illégalité alléguée du plan de prévention des risques d'inondations de la commune de xxxxx, à la supposer établie, ne saurait, en l'état, enlever aux faits poursuivis leur caractère punissable". L'article L. 480-4 vise les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou autres personnes responsables de l'exécution desdits travaux, il n'est toutefois pas exclu qu'un maire puisse être poursuivi pénalement pour avoir délivré une autorisation dans une zone à risques. Pour Christian Huglo "on peut voir dans le fait de délivrer une autorisation dans une zone à risques, soit un fait principal, soit un fait de complicité"219 . Il faut pourtant déplorer que les personnes morales ne puissent être poursuivies faute de texte spécifique, d’autant que très souvent le constructeur est une personne morale ; il s’agit là d’une lacune du nouveau Code pénal220. La responsabilité des personnes morales ne pourra 219 C. HUGLO, "Les délits liés au manque de précaution : risques technologiques et environnement", P.A., 15 février 1995, 22 220 Voir M.-H. GOZZI, “ Le risque pénal du droit de la construction ”, RD. Imm., nov.-déc 2001, 455 ; Crim., 28 avril 1997, n° 96-84.343 : “ L’article 121-2 n’est pas applicable en matière d’urbanisme faute de disposition spéciale et la Cour d’appel ne peut prononcer une amende à l’encontre de la société bénéficiaire des travaux… les dirigeants seront dès lors responsables au lieu et place de la personne morale propriétaire des sols ou responsable des travaux et l’amende sera prononcée à juste titre à l’encontre du gérant de la société bénéficiaire des travaux ” 170 être retenue que pour des infractions d’imprudence 221, avec une importante restriction pour les collectivités territoriales. S'agissant de ces dernières, la répression des violations du droit de l'urbanisme exclut, pour l'essentiel, le recours au juge pénal. Sauf dans de rares hypothèses, seul le juge administratif pourra être saisi222. Ces infractions aux règles de l'urbanisme entraient initialement dans la catégorie des délits matériels223 c'est à dire qu'elles étaient constituées par la seule violation de la réglementation sans qu'il soit besoin d'établir l'intention coupable du prévenu. Le délit était donc constitué même si le prévenu était de bonne foi et pouvait donc être condamnée une personne ayant violé les dispositions du POS même si la construction était conforme à un permis de construire accordé indûment 224. La réforme du Code pénal entrée en vigueur le 1 er mars 1994 a supprimé les délits matériels et désormais, aux termes du premier alinéa de l'article 121-3 du Code pénal il n'y a point de délit sans intention de le commettre. Néanmoins, il a été depuis jugé a plusieurs reprises 225, comme dans l'arrêt précité de la cour d'appel de Paris du 20 septembre 1996, que la seule violation en connaissance de cause d'une prescription légale ou réglementaire impliquait de la part de son auteur l'intention coupable. L'infraction est donc à classer dans la catégorie des délits intentionnels. Ainsi, dans un arrêt en date du 3 mars 1996 (pourvoi, n° 95-82.427), la Chambre criminelle relève qu' - "En l'état d'un arrêt qui, pour déclarer le prévenu coupable de construction sans permis, relève qu'il a édifié sans autorisation, en zone classée non constructible agricole inondable par le POS, il ne saurait être fait grief à la Cour d'appel de n'avoir pas caractérisé l'élément intentionnel des faits relevés à la charge du prévenu. En effet, la seule constatation de violation en connaissance de cause d'une prescription légale ou réglementaire implique, de la part de son auteur, l'intention coupable exigée par l'article 121-3 alinéa 1 du code pénal". Une formule identique est utilisée par la Chambre criminelle, le 28 septembre 1999 (pourvoi n° 99-80.760) en réponse au demandeur invoquant l'article 121-3 alinéa 1 du Code pénal et soutenant qu'il n'a personnellement accompli aucun acte matériel constitutif des infractions poursuivies et voulait éviter tout risque d'inondation. Toutefois, certains arrêts, interprétés a contrario il est vrai, laissent supposer qu'une solution moins sévère est possible. Ainsi dans l'arrêt précité rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation, le 10 mai 1995, il est précisé que l'interdiction avait été donnée par le maire et que le prévenu était passé outre "et ne peut de ce fait arguer de sa bonne foi". De même, toujours interprété a contrario, un autre arrêt de cette même Chambre (Crim., 15 221 Voir infra 2°) H. PERINET-MARQUET, "L'inefficacité des sanctions du droit de l'urbanisme", loc.cit. 223 Un doute subsiste quant à l'appartenance aux anciens délits matériels des infractions constituées par l'exécution de travaux de construction en méconnaissance des dispositions du code de l'urbanisme car la Cour de cassation retenait parfois l'inobservation volontaire de la prescription ; V. sur ce point G. ROUJOU de BOUBEE, "La mise en œuvre du code pénal de 1992", D., 1996, chr., 373 224 V. Dalloz Action, Droit de l'Urbanisme, 2000/2001, n° 8572 225 V. Crim., 12 juillet 1994, RD. Imm. 17 (3), juill.-sept., 1995, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli 222 171 novembre 1995, Dr. Adm., 1996, n° 189) laisse supposer que peut être invoquée l'erreur de droit de l'art. L. 122-3 qu'un permis de construire délivré par l'administration peut constituer. S'agissant des campings, l'article R. 443-7 du Code de l'urbanisme impose que : - "Toute personne physique ou morale qui reçoit de façon habituelle, sur un terrain lui appartenant ou dont elle a la jouissance, soit plus de vingt campeurs sous tentes, soit plus de six tentes ou caravanes à la fois, doit au préalable avoir obtenu l'autorisation d'aménager le terrain et un arrêté de classement déterminant le mode d'exploitation autorisé." Un arrêté du 6 février 1995 (JO du 15 février) fixe le modèle du cahier des prescriptions de sécurité destiné aux gestionnaires de terrains de camping et du stationnement de caravanes soumis à un risque naturel ou technologique prévisible. La circulaire interministérielle n° 9514 du 6 février 1995 précise les "mesures préventives de sécurité dans les campings soumis à un risque naturel ou technologique prévisible". Le non-respect des prescriptions peut justifier la fermeture du camping par arrêté préfectoral, sont également pénalement sanctionnée les violations des prescriptions concernant les campings. Ainsi, selon la Cour d'appel de Paris, (30 février 1995, juris-data n° 023909) : "se rend coupable de l'infraction prévue par l'article R. 443-7 du code de l'urbanisme le prévenu qui reçoit de façon habituelle sur un terrain lui appartenant plus de six caravanes à la fois sans avoir obtenu ni l'autorisation ni l'autorisation d'aménager le terrain, l'autorisation délivrée par le maire ne pouvant à cet égard être suffisante comme n'étant assortie d'aucune des prescriptions particulières visées par le paragraphe 3 du texte précité, ni l'arrêté de classement délivré par le préfet qui détermine le mode d'exploitation autorisé. Il convient, en outre, d'observer, que selon les dispositions du POS, le stationnement de caravanes et l'exploitation d'un terrain de camping ne sont pas régularisables, s'agissant d'un terrain situé sur une zone protégée et de surcroît dans un secteur à haut risque d'inondation." 2°) La méconnaissance volontaire des risques et les infractions d'imprudence Alors que le premier alinéa de l'article 121-3 du Code pénal pose en principe qu'il n’y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre, le second et le troisième alinéa introduisent deux exceptions à ce principe. Selon le second alinéa : - "Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d'autrui" et selon le troisième alinéa : - "Il y a également délit lorsque la loi le prévoit, en cas d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence, de négligence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement…"226 Ces incriminations pour violation des obligations de sécurité sont particulièrement propices à provoquer la responsabilité pénale d'un élu car c'est lui qui a la charge d'un grand nombre d'obligations de sécurité227. 226 La rédaction du troisième alinéa a été modifiée à deux reprises, par la loi du 13 mai 1996 et par celle du 10 juillet 2000, afin d'alléger la responsabilité pénale des décideurs 227 V. not. F. GALETTI, Le juge pénal nouveau juge de la responsabilité des agents publics et des élus, éd. L'Harmattan ; LEVY, L. BLOCH, D. BLOCH, La responsabilité pénale des collectivités territoriales, de leurs élus, de leurs agents, Guide pratiques de l’administration territoriale, Litec, 1997 172 Nous développerons plus particulièrement les infractions à la sécurité des personnes c'est-àdire le délit de la mise en danger d'autrui et les délits d'homicides et de blessures involontaires. a) Le délit de mise en danger d'autrui Cette infraction a été instituée par le législateur dans le code pénal de 1994. Elle réprime, indépendamment de la réalisation d’un résultat, le seul comportement dangereux. La loi incrimine le risque en lui-même. Ce délit constitue une infraction de prévention. Selon l’article 223-1 du code pénal : - “ Le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ”. Cette infraction est punie d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende228. Ainsi que le constate Marc Puech229, il est dommage que le législateur ait manqué à son devoir de clarté et que le style surabondant embrouille le texte. Il est par conséquent nécessaire de tenter de préciser les éléments constitutifs de l'infraction en nous aidant de la jurisprudence liée au délit de mise en danger délibérée d’autrui dans le domaine des risques naturels. Il est essentiel de relever que la jurisprudence vient récemment de s'enrichir d'un arrêt de la Chambre criminelle en date du 31 janvier 2001 (juris-data n° 008587) rendu dans le domaine qui nous préoccupe. La Chambre criminelle, en confirmant la condamnation prononcée par les juges du fond, affirme que : - se rend coupable de mise en danger délibérée d'autrui le propriétaire de terrains qui les donne en location à des personnes, dont certaines handicapées, résidant en permanence dans des caravanes, des chalets ou des mobil-home, "alors que ces terrains ont été classés par arrêté préfectoral du 22 mai 1995 en zone de risques graves en raison des crues de l'Hérault pouvant atteindre 1,20 mètres et obligeant à l'évacuation des résidents par les services de secours." Le prévenu a poursuivi son activité malgré l'absence des autorisations administratives exigées par les articles R. 443-4 et R. 443-7 du Code de l'urbanisme et en dépit d'un arrêté préfectoral interdisant toute activité sur ces terres. "En poursuivant en 1997, cette location de parcelles, en violation de la réglementation sur l'urbanisme et malgré l'interdiction qui lui avait été faite, en raison des risques graves encourus par les personnes, dont certaines très vulnérables, qui y avaient établi leur résidence, le prévenu a exposé directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente. L'information que le prévenu aurait donnée aux résidents sur les risques d'inondation n'était pas de nature à le décharger de sa responsabilité pénale." Approuvant la Cour d'appel de Montpellier d'avoir, le 4 janvier 2000, condamné le prévenu, la Chambre criminelle confirme - "qu'en statuant par ces motifs, qui caractérisent le lien existant entre la violation manifestement délibérée, par le prévenu, des obligations imposées à lui par la réglementation en matière d'urbanisme qu'elle (la Cour d'appel) a jugé, à bon droit ; V. BRAULT-JAMIN, Les élus et les fonctionnaires territoriaux devant la justice pénale, Droit et Collectivités locales, PUG, 2001 228 Anciennement 100 000 francs 229 M. PUECH, "De la mise en danger d'autrui", D., 1994, chr., 153 173 applicable, et le risque grave et immédiat non contesté par le prévenu auquel étaient exposés les résidents, la cour d'appel a justifié sa décision". Cet arrêt marque une étape supplémentaire dans la caractérisation des éléments constitutifs du délit de mise en danger et confirme notre conviction que ce délit peut-être constitué par la méconnaissance volontaire du risque inondation. Nous reste donc à cerner, à travers les décisions rendues les éléments constitutifs du délit de mise en danger. En premier lieu, il est nécessaire que la violation porte sur une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement. Les obligations visées sont toutes celles qui sont prescrites en vue de ne pas porter atteinte à la vie et à l’intégrité physique des personnes. L’obligation méconnue doit être “ particulière ”, c’est à dire que c’est “ celle qui impose un modèle de conduite circonstanciée ”230. Elle doit être définie avec précision en fonction des situations particulières. La notion d'obligation particulière présente des contours encore imprécis, il convient de se référer à la jurisprudence même si elle n'est pas encore suffisamment fournie pour nous donner des certitudes. Il faut tout d'abord de s'assurer que l'obligation violée incombait bien aux personnes poursuivies pour mise en danger. Ainsi, ne constitue pas une obligation "particulière de sécurité" pour les usagers un arrêté municipal n'édictant une obligation que pour l'exploitant d'une piste de ski. C’est ce que rappelle la Cour d’appel de Grenoble le 19 février 1999 ( Eriksson- Surcouf, J.C.P., 1999, II, 10 171, note P. Le Bas), en constatant que l’arrêté municipal ne comporte aucune règle objective directe pesant sur les usagers. Deux snowboarders avaient déclenché une avalanche qui n’avait pas fait de victime. En l’espèce le maire a édicté un arrêté mettant uniquement à la charge de l’exploitant une obligation de signaler et de prévenir le danger d’avalanche. Cet arrêté ne pose donc aucune règle de police concernant la restriction ou l’interdiction d’activité sportive sur le domaine skiable ou assimilé en raison du risque 4 d’avalanche : - “ L’arrêté municipal du 6 janvier 1988 visé par la prévention oblige l’exploitant à signaler les points dangereux du domaine ( …), à mettre en place une signalisation appropriée en cas de danger d’avalanche et éventuellement à arrêter les remontées mécaniques donnant accès aux pistes menacées (…) il ne comporte aucune obligation directe pesant sur les usagers (…)”. En revanche, un arrêté municipal s'adressant aux usagers constitue une obligation particulière comme l'illustre un arrêt de la Chambre criminelle en date du 9 mars 1999 (Jurisque Avalanche, www.anena.org) : deux surfeurs empruntent une piste noire interdite par un arrêté municipal dûment publié et déclenchent une avalanche, alors que des pisteurs travaillent en contrebas. Ils ne font aucune victime. Là encore, le texte en cause est un arrêté municipal, régulièrement publié, pris pour la sécurité des skieurs et contenant des devoirs imposés aux usagers du domaine skiable, notamment dans son article 7 aux termes duquel “ les skieurs ne sont autorisés à emprunter le parcours d’une piste de ski qui si celle-ci a été déclarée ouverte ”. La violation de l’arrêté municipal entre dans le champ d’application de l’article 223-1du Code pénal. 230 ibid 174 Il en est bien évidemment de même pour un arrêté préfectoral interdisant toute activité de camping dans une zone présentant des risques graves d'inondation ( Crim., 31 janvier 2001, précité). En outre, l’obligation particulière vise le contenu de l’obligation et non les personnes concernées par celle-ci. Cette obligation, légale ou réglementaire, doit présenter le caractère de généralité en ce qui concerne les personnes devant la respecter. Ainsi la violation d’un acte administratif individuel ne peut constituer le délit. Cette solution classique de la jurisprudence a trouvé application dans le cadre d’un risque d’inondation dans une affaire soumise au tribunal correctionnel d'Avignon (Trib. corr. Avignon, 15 septembre 1994, n°1683194) : la gérante d'un camping avait maintenu celui-ci ouvert malgré un arrêté lui imposant sa fermeture, poursuivie pour infraction de mise en danger d'autrui, la prévenue sera relaxée car l'arrêté la désignait nominativement ce qui lui ôtait le caractère de généralité nécessaire à la constitution de l'infraction : - “ (…) attendu que la prévenue est accusée d’avoir exposé autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation d’une obligation imposée par la loi ou le règlement, en l’espèce en conservant ouvert au public le camping dont elle est la gérante au mépris d’un arrêté du sous-préfet (…) ordonnant la fermeture dudit camping en raison des risques de submersion en cas de crue ; attendu que les actes administratifs individuels désignant nommément une personne physique ou morale ne comportent pas de prescriptions générales et impersonnelles comme la loi ou les règlements et ne sont pas visés par l’article 223-1 du code pénal ; attendu que l’arrêté sous préfectoral ne peut donc servir de fondement à la poursuite de Mme V…, puisqu’il est impuissant à instituer une obligation particulière de sécurité et de prudence ”. En revanche, présente bien un caractère de généralité l'arrêté préfectoral classant des terrains en zone de risques graves d'inondation ( Crim., 31 janvier 2001, précité). L'obligation n'est particulière que si elle fixe de manière objective l'attitude à adopter ce qu'illustre le jugement du tribunal correctionnel d'Albertville en date du 22 février 1999 : - “ Figure de toute évidence dans la catégorie des obligations générales la prescription contenue à l’article 7 qui prévoit que tout usager des pistes doit respecter le balisage et la signalisation (…) ; par contre l’obligation qui est faite par l’article 9 aux skieurs de n’emprunter le parcours d’une piste que si celle-ci a été déclarée ouverte constitue une obligation particulière car elle fixe de façon objective l’attitude à adopter dans l’hypothèse où une piste est fermée, excluant par la même toute faculté d’appréciation individuelle ”. Ainsi, une interdiction d'exercer dans une zone à risques fixe bien de manière objective l'attitude à adopter. Enfin l’obligation visée par le texte doit se trouver dans la loi ou le règlement, ce dernier étant entendu au sens constitutionnel du terme. Les arrêtés municipaux ou préfectoraux sont des règlements au sens de l'article 223-1 du Code pénal. 175 A la lecture des décisions rendues depuis 1994, et plus particulièrement au regard de l'arrêt de la Chambre criminelle en date du 31 janvier 2001, il ne fait aucun doute que la violation des dispositions d'un PPR entre dans le champ d'application de l'infraction de mise en danger d'autrui. Les plans de prévention contiennent des interdictions et des prescriptions en fonction des zones qu'ils délimitent, ces interdictions et prescriptions sont édictées afin d'assurer dans les zones en question la sécurité des biens mais également celle des personnes ; les obligations présentent un caractère de généralité en ce qui concerne les personnes devant les respecter, elles sont bien définies avec précision en fonction des situations particulières s'adressant aux personnes concernées par les zones précisément délimitées et elles imposent de manière objective un modèle de comportement circonstancié et bien entendu l'obligation de sécurité et de prudence est imposée par le règlement, le plan de prévention étant approuvé par arrêté préfectoral. Ajoutons que le non-respect des dispositions imposées par le PPR est pénalement sanctionné comme nous l'avons vu précédemment. Il est donc certain que les obligations imposées par un PPR constituent des "obligations particulières" au sens de l'article 223-1 du Code pénal. Leur violation est par conséquent susceptible d'entraîner des poursuites sur le fondement de cet article si les autres conditions de l'incrimination soient réunies. Ce délit suppose en second lieu une exposition directe à un risque immédiat de mort, de mutilation ou d’infirmité permanente. Concernant la nature du risque, le législateur n’a envisagé de prendre en considération que les risques les plus graves : la mort ou les atteintes à l’intégrité physique graves231. Ensuite le danger encouru doit être certain, actuel et non hypothétique. Ainsi, pour le tribunal correctionnel d'Avignon (15 septembre 1994 précité) : - “ l’article 223-1 du c.p sanctionne le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ; attendu qu’en l’espèce aucune inondation n’était annoncée ni prévue comme immédiate, voire seulement comme possible. Que l’immédiateté du risque faisant défaut, l’élément matériel manque à la poursuite ”. La Cour d'appel de Nîmes, le 13 juin 1995 232 reprend la même analyse en relevant que les exemples d'inondations se situaient tous en septembre, octobre et janvier et non au printemps ou au début de l'été : - "En l'absence de danger immédiat démontré, qui ne peut s'assimiler à un risque potentiel, envisagé voire possible, force est de constater que l'infraction n'est pas constituée". La violation des obligations d'un plan de prévention des risques inondation ne saurait donc être constitutive du délit de mise en danger que si le risque est immédiat. Selon Marc Puech, "l'agent doit avoir créé un danger certain et actuel et non hypothétique (…) Pour être consommée l'infraction suppose la réunion de l'indiscipline de l'agent et un risque de mort ou de blessures pour autrui". 231 Et les événements récents et répétés démontrent que les vies sont menacées en cas d'inondation V. J. VIRET "La responsabilité de l'administration et de ses agents à l'épreuve du droit pénal contemporain", R.J.D.A., 1995, doct., 763 ; l'auteur signale qu'en revanche, le tribunal administratif de Marseille, saisi d'un recours en annulation de l'arrêté de fermeture, en date du 25 mai 1994, a estimé ledit arrêté "fondé sur les risques encourus par les usagers du camping" 232 176 On peut faire le parallèle avec l'arrêt précité de la Chambre criminelle du 31 janvier 2001, bien que la date de l'arrêté préfectoral, 25 octobre 1995, laisse supposer que l'arrêté n'avait pas pour objet un PPR, il s'agissait bien d'interdire une activité dans une zone à hauts risques. - L'arrêt relève qu'en poursuivant la location en violation des règles de l'urbanisme, le prévenu "a exposé directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessure de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente". Enfin l’élément moral de l’infraction réside dans une violation manifestement délibérée de l’obligation. Il est nécessaire de démontrer l’existence d’une méconnaissance volontaire de l’obligation de sécurité imposée par la loi ou le règlement pour entrer en voie de condamnation. Généralement, cet élément constitutif est tiré des circonstances de fait. Ainsi, le tribunal correctionnel d'Albertville considère, le 22 février 1999 que le fait que trois skieurs s’engagent par mauvais temps sur une piste fermée ne démontre pas la conscience du danger : - “ De l’ensemble des circonstances de fait de l’espèce il apparaît que le caractère volontaire de la violation d’une règle de sécurité ou de prudence reste douteuse compte tenu du caractère succinct des constations relevées par les enquêteurs ; (…) n’établit pas que le matériel de signalisation interdisant l’accès à la face de Bellevarde était infranchissable y compris en cas de mauvais temps sans faute délibérée de transgresser l’interdiction c’est à dire avec la conscience du péril ou des risques que l’on fait courir par un comportement imprudent doublé de la volonté de s’engager malgré tout sur la piste qui était fermée ”. En revanche, s'agissant des surfeurs ayant emprunté une piste noire, la Chambre criminelle dans son arrêt du 9 mars 1999 (précité) approuve la Cour d'appel en ce : - “ (…) qu’elle relève que les intéressés, pratiquants expérimentés, se sont engagés sur une piste barrée par une corde signalée par des panneaux d’interdiction réglementaires, en dépit d’une mise en garde du conducteur du télésiège ”. Les prévenus avaient nécessairement conscience d’avoir exposé autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures. Enfin, l'arrêt de la Chambre criminelle du 31 janvier 2001 constate que l'existence du risque grave et immédiat n'était pas contestée par le prévenu. L’article 223-1 du Code pénal est applicable aux activités des particuliers, des professionnels, mais aussi aux activités de police des décideurs publics, ainsi qu’aux activités concernant l’urbanisme. Comme le relève Florence Galletti "le champ d'application potentiel de la mise en danger de la personne d'autrui est vaste, spécialement en ce qui concerne les agents publics. Ce délit pourrait parfaitement trouver à s'inscrire dans des carences aux obligations de police générale et spéciales"233. On peut imaginer que le juge pénal sera tenté de mettre en examen le ou les responsables de la délivrance d'un permis de construire ne prenant pas en compte le risque inondation sur la base de la mise en danger d'autrui234 et il est, selon nous, tout à fait envisageable d’engager la responsabilité pénale de l’autorité publique qui délivrerait une autorisation d’urbanisme alors que le terrain faisant l’objet de l’autorisation est exposé à des risques parfaitement connus 233 F. GALLETTI, Le juge pénal nouveau juge de la responsabilité des agents publics et des élus, op.cit. 234 J. HERMANN, "Les responsables publics et les personnes morales de droit public à l'épreuve de la responsabilité pénale", in Les transformations de la régulation juridique, LGDS -Droit et Sociétés-, décembre 1998 177 décrits dans un PPR et aurait pour effet de mettre en péril les occupants de la construction autorisée. De même que pourrait être pénalement sanctionnée la non application par les agents publics de l'expropriation pour cause de risque naturel majeur prévu par la loi Barnier 235. b) Les délits d'homicide et blessures involontaires Les délits d'homicide ou de blessures involontaires commis par des personnes physiques sont visés par les articles 221-6 et 222-19 du nouveau Code pénal, ces infractions supposent qu’une personne, physique ou morale ait involontairement causé la mort d’une personne ou lui ait occasionné une incapacité totale de travail de plus de trois mois “ par maladresse, imprudence, inattention ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements"236. La rédaction de ces articles, contenus dans le nouveau Code pénal de 1994, a subi depuis deux modifications au même titre que l'article 121-3 du Code pénal, d'abord par la loi n° 96-393 du 13 mai 1996 puis par la loi n° du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits nonintentionnels. Ces deux réformes législatives avaient pour finalité d'apaiser les craintes des décideurs publics devant ce qu'il est maintenant convenu d'appeler "le risque pénal". Le juge pénal est fermement invité par la loi de 1996 à tenir compte concrètement de la situation de l'auteur des faits, le législateur va jusqu'à lui fournir les éléments sur lesquels il devra se fonder son appréciation : nature de la mission ou des fonctions, compétences, pouvoirs, moyens. L'obligation faite au juge par la loi de 1996 d'apprécier in concreto le comportement du prévenu n'a guère obtenu l'effet escompté237 ce qui explique que, quatre ans plus tard, le législateur ait réécrit les infractions non-intentionnelles ajoutant un quatrième alinéa à l'article 121-3 du Code pénal. Nous joignons ici nos vœux à ceux de Francis Le Gunehec : "Adopté par le Parlement en juin 1992, modifié une première fois en mai 1996, puis une seconde fois en juillet 2000, l'article 121-3 du nouveau Code pénal traduit la difficulté de réprimer de façon juste et équitable les infractions qui n'ont pas été commises de façon intentionnelle. On ne peut qu'espérer que l'application des nouvelles dispositions par les juridictions pourra satisfaire le législateur, ce qui évitera une nouvelle réforme en 2004 ! Il serait en effet regrettable que soit pris l'habitude d'un rendez-vous législatif tous les quatre ans, une telle périodicité convenant mieux aux matchs de la coupe d'Europe de football qu'à l'élaboration des normes répressives fondamentales" 238. Les deux modifications ont été d'application immédiate car il s'agissait à chaque fois d'une loi pénale plus douce. Il convient donc de tenir compte des modifications successives dans la 235 Titre II, chap. 1er, art. 11 : "Lorsqu'un risque prévisible de mouvements de terrain, d'avalanches ou de crues torrentielles, menace gravement des vies humaines, les biens exposés à ce risque peuvent être expropriés par l'Etat dans les conditions prévues par le Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, et sous réserve que les moyens de sauvegarde et de protection des populations s'avèrent plus coûteux que les indemnités d'expropriations". V. F. SERVOIN, " Les ruines de la Séchilienne, un risque au régime juridique incertain", R.J.E.,1/1997, p. 5 ; R. HOSTIOU, "A propos de l'expropriation pour cause de risque naturel", A.J.D.I., 10 septembre 1999, 766 ; J. MORAND-DEVILLER, "Renforcement de la protection de l'environnement", A.J.D.A., 20 juin 1995, doct., 439 236 Le manquement à une obligation "de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les (ou le) règlements" est une innovation du nouveau Code pénal, les articles 319 et 320 anciens supposaient une "inobservation des règlements". 237 M.F. STEINLE-FEUERBACH, " La responsabilité pénale des maires en cas de catastrophe (au regard des procès de Bruz et de Barbotan) ou la fausse nouveauté de la loi n° 96-393 du 13 mai 1996", J.C.P., 1997, I, 4O57 238 F. LE GUNEHEC, "Loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non-intentionnels", J.C.P, n° 36, 6 septembre 2000, Aperçu rapide 178 chronologie des décisions rendues. Dans leur rédaction actuelle, les articles 216 et 222-19 s'appliquent à tous les citoyens. Article 221-6 du Code pénal : - "Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, la mort d'autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. En cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende.239" Article 222-19 du Code pénal : - "Le fait de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l'article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. En cas de violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 euros d'amende.240" L'étude de la jurisprudence pénale menée dans le Titre III de la première Partie de ce rapport révèle que la connaissance du risque est un élément d'appréciation pouvant mener à la condamnation. Le suivi jurisprudentiel effectué par le Cerdacc en matière d'homicide et de blessures involontaires nous a permis de tracer le profil des responsables potentiels en cas de catastrophe241, parmi ceux-ci figurent en bonne place les hommes de l'art et les décideurs publics242. Les hommes de l'art : d'entrepreneur, d'architectes, de techniciens Parmi les entrepreneurs condamnés, on trouve par exemple, le constructeur de la tribune de Furiani243, le chef de l'entreprise ayant effectué des travaux sur le toit du Supermarché Casino de Nice244, les réalisateurs du décor de l'Opéra Bastille à Séville 245. 239 Anciennement, respectivement 300 000 et 500 000 francs Anciennement, respectivement 200 000 et 300 000 francs 241 C. LIENHARD et M.F. STEINLE-FEUERBACH, " Typologie des responsabilités et des sanctions, retour d'expériences jurisprudentielles", Séminaire FORM-OSE, "Droit des catastrophes et gestion de crises", NIORT, 14, 15 et 16 octobre 1998. 242 Ainsi, les magistrats du Tribunal correctionnel Rennes ont effectué très clairement le classement des responsables potentiels de l'incendie de la clinique de Bruz. Sous l'intitulé "la recherche des responsabilités" on peut découvrir les quatre catégories suivantes : a) Les exploitants b) Les hommes de l'art c) Les maires d) Les sapeurs pompiers préventionnistes. 243 Furiani, 5 mai 1992, l'effondrement d'une tribune provisoire provoque la chute de 3000 personnes, on dénombre 16 morts et plus de 2300 blessés : Crim., 2 mars 1994, J.C.P., 1994, IV, 1337; Trib. corr. Bastia, 31 mars 1995, Bastia, 13 décembre 1995, Crim., 24 juin 1997, biblio. Cerdacc 244 Supermarché Casino, 26 janvier 1994, des travaux sont effectués dans un immeuble abritant le supermarché, alors qu'une cinquantaine de personnes effectuait ses achats, une partie du faux- plafond est littéralement descendu faisant 9 blessés, Trib. corr. Nice, 27 juin 1996, biblio. Cerdacc 240 179 S'agissant des entrepreneurs, les magistrats soulignent leur expérience professionnelle. Ainsi, lors du procès des Thermes de Barbotan, la Cour d’appel de Toulouse souligne que l’entrepreneur mis en cause “ est un grand professionnel du bâtiment et ne pouvait ignorer l’objet, la nature, les circonstances d’exécutions des travaux d’étanchéité des terrains et le risque qu’entraînait la présence du trou dans celle-ci pour les personnes circulant au niveau inférieur. ” Quant aux architectes, la Cour d’appel de Toulouse, suite à l'incendie des Thermes de Barbotan246, rappelle que "l'article 123-43 du Code de la construction et de l'habitation impose aux constructeurs de contrôler la conformité des installations avec la réglementation applicable en matière de sécurité, leur responsabilité personnelle n'étant pas exonérée de fait des contrôles administratifs prévus parallèlement" et précise que le devoir de conseil doit aller jusqu'à la dissuasion du maître de l'ouvrage : “ l’architecte est maître d'œuvre remplissant les fonctions d’autorité et de coordination sur le chantier, mais aussi tenu d’un devoir de conseil qui ne peut disparaître que si le maître de l’ouvrage est un professionnel ou est notoirement compétent. il lui incombe de renseigner le maître de l’ouvrage sur les risques d’une construction et d’émettre le cas échéant toutes réserves utiles ”. Le tribunal correctionnel de Rennes s'exprime en des termes comparables après l'incendie de la clinique de Bruz. Pour l’avalanche de la Plagne, qui s’était en décembre 1991 engouffrée dans un immeuble résidentiel, le tribunal correctionnel d’Albertville (26 janvier 98) retient que le maître d’ouvrage et l’architecte n’ont procédé à aucun aménagement alors qu’en 1981, lors de la construction de l’immeuble, une avalanche s’était déjà engouffrée dans les mêmes appartements. La Cour d’appel (Chambéry, 13 janvier 1999) et la Cour de cassation (Crim., 5 janvier 2000, pourvoi n° 99-81.817) confirmeront ces condamnations. Les décideurs publics : maires et préfets S'agissant des maires247, il reste constant que les élus locaux en charge de fonctions exécutives248 sont des responsables potentiels249 et cela est particulièrement vrai en cas de 245 Séville, 16 juillet 1992, lors d'une représentation donnée à Séville par l'Opéra de Paris, une partie du décor s'effondre provoquant le décès d'une choriste et en blessant 40 autres :Trib. corr. Paris, 16 décembre 1996, Paris, 6 février 1998, biblio. Cerdacc 246 Thermes de Barbotan, 27 juin 1991 un ouvrier effectuant des travaux d'étanchéité renverse du bitume enflammé sur le toit des thermes, le bitume s'infiltre par dans un orifice et tombe sur une cloison en polystyrène. Les gaz et les fumées qui se dégagent se répandent au-dessus d'un faux plafond et atteignent les locaux. On dénombre 20 morts et 11 blessés : Trib. corr. Toulouse, 19 février 1997, Préventique n° 32, mars-avril 1997, Gaz. Pal., 27-28 juin 1997, 16, note R. RIERA, A.J.D.A., 20 janvier 1998, 72, obs. P. BROSSARD ; Toulouse, 19 février 1997, J.C.P., 1997, I, 4057, note MF. STEINLE-FEUERBACH 247 Nous ne relatons ici que les décisions ayant trait à la sécurité dans les établissements recevant du public et aux risques naturels ; d'autres condamnations de maires ont été prononcées pour homicide et blessures involontaires notamment pour des installations sportives non- conformes 248 Le maire, l'adjoint au maire délégué et le conseiller municipal délégué (art. L. 2122-18 et s. Code général des collectivités territoriales) 249 V. not. J. VIRET “ La responsabilité de l’administration et de ses agents à l’épreuve du droit pénal contemporain ” , loc.cit. 180 catastrophe250. L'opinion publique n'admet plus la fatalité ; dès lors qu'un événement dommageable est médiatisé et qu'il accède au rang de catastrophe 251, elle réclame un bouc émissaire et, selon Jean-Claude Maestre, "dans les communes, il est tout trouvé : c'est le maire, dont le visage est familier, sur lequel pèse l'obligation de pourvoir à la sécurité de ses concitoyens"252. On constate actuellement un engouement pour le pénal en cas de catastrophe. Les victimes sont animées à la fois par le besoin de comprendre et par celui de punir ; l'instruction répond au premier de ces besoins, la condamnation pénale au second. Les élus locaux s'exposent à être poursuivis pour les infractions générales d'imprudence et principalement pour les délits d'homicide ou de blessures involontaires visés par les articles 221-6 et 222-19 du Code pénal dès lors que peuvent leur être reproché un manquement à une obligation de sécurité. Ce sont les pouvoirs de police des maires qui constituent la source de leur responsabilité dès lors qu'ils sont mal exercés. Le maire est investi d'un pouvoir général de police (art. L. 2122-24 et L. 2212-1 et s. du Code général des collectivités territoriales 253). Aux termes de l'article L. 2112-4 du Code général des collectivités254 , en cas de danger grave ou imminent, tels que les accidents naturels le maire prescrit l'exécution des mesures de sûretés exigées par les circonstances et il informe le Représentant de l'Etat dans le département et lui fait connaître les mesures qu'il a prescrites. L'article L. 2212-2-5° du Code général des collectivités territoriales 255 énumère des exemples de catastrophes et fléaux calamiteux que le maire est chargé de prévenir par "des précautions convenables" dans le cadre de ses pouvoirs de police générale. On y trouve non seulement les incendies mais également les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels. Il en de même en matière d'urbanisme notamment pour la délivrance des autorisations relatives à l'occupation des sols et du contrôle du respect de la réglementation locale 256. A cet égard, l'existence d'un PPR et l'information qu'il fournit aux élus locaux accroissent les obligations du maire. S'agissant de la sécurité dans les établissements recevant du public, les condamnations, pour homicides et blessures involontaires, des deux maires successifs de Bruz et de celui de Cazaubon257 ne sont pas sans rappeler celle du maire de Saint-Laurent-du-Pont après 250 M.F. STEINLE-FEUERBACH, " La responsabilité pénale des maires en cas de catastrophe (au regard des procès de Bruz et de Barbotan) ou la fausse nouveauté de la loi n° 96-393 du 13 mai 1996", loc. cit. 251 M.F. STEINLE-FEUERBACH, "Le droit des catastrophes et la règle des trois unités de temps de lieu et d'action", P.A., n° 90, 28 juillet 1995 252 J.C. MAESTRE, "La loi du 18 juillet 1974 relative à la mise en cause pénale des maires et le problème général de la responsabilité des maires", A.J.D.A., 1975, doct., 214. Sur la notion de bouc émissaire, voir not. : "Sociologie des sciences, analyse des risques collectifs et des situations de crise. Point de vue de Bruno LATOUR", C.N.R.S., Séminaire du Programme Risques Collectifs et Situations de Crise, Actes de la 1ère séance, 15 novembre 1994, Ecole des Mines de Paris ; C. DAMIANI, Les Victimes, Violences publiques et crimes privés, Bayard Editions, 1997, p. 21 et s. 253 art. L. 122-22 et L. 131-1 et s. anciens du Code des communes, recodifiés par la loi n° 96-142 du 21 février 1996 254 art. L. 131-7 ancien du Code des communes 255 art. L. 132-2-6° ancien du Code des communes 256 M. CEOARA, “ La responsabilité pénale des élus à raison des délits liés au manque de précautions ”, P.A., n° 20, 15 février 1995, 15 257 Commune sur laquelle sont situés les thermes de Barbotan 181 l'incendie du "Cinq-Sept"258. Celle-ci avait créé la surprise 259 et la consternation de ses pairs car jusque là les élus locaux bénéficiaient d'une quasi-irresponsabilité pour les faits d'imprudence commis à l'occasion de leurs fonctions260. En revanche, les sanctions pénales prononcées dans les affaires de Bruz et de Barbotan peuvent être maintenant qualifiées de classiques ; elles s'inscrivent dans la tendance actuelle qui consiste à poursuivre pénalement les élus pour des infractions non-intentionnelles261. Dans les deux cas, les constructions avaient été édifiées en violation des dispositions réglementaires contenues dans les articles R. 123-1 à R. 123-51 du Code de la Construction et de l'Habitation. Ces infractions auraient pu être constatées lors d'une visite de la commission de sécurité or, dans les deux cas, de telles visites n'avaient pas été sollicitées, les maires avaient donc manqué à leur obligation de sécurité. La connaissance du danger est particulièrement mise en évidence lors du procès de l'incendie des thermes de Barbotan. Le sinistre avait pour origine de nombreux manquements à la réglementation dans plusieurs parties de l'établissement ouvertes au public sans autorisation, le tribunal correctionnel de Toulouse estime que le maire "savait qu'aucune autorisation d'ouverture n'avait été sollicitée, il n'a pas pris les précautions ni les mesures qui, dans le cadre de son pouvoir de police générale, auraient pu éviter le drame et c'est en cela qu'il est fautif", la preuve de la connaissance est facilement établie : "Information officielle, information publicitaire, administrative, familiale ou politique, tout démontre que (le maire) connaissait l'ouverture au public de la zone sinistrée", le tribunal souligne même que les piscines figuraient sur les cartes postales. En ce qui concerne les risques naturels, c'est le risque montagne qui est pour l'instant pénalement sanctionné262. La chambre correctionnelle de la Cour d'appel de Grenoble a, dans un arrêt du 15 août 1992263, confirmé la déclaration de culpabilité pour homicide involontaire 258 Le maire avait été condamné notamment en tant qu'autorité chargée de l'exécution d'un permis de construire délivré par l'autorité préfectorale :Trib. corr. Lyon, 20 novembre 1972, Gaz. Pal., 1973, 1, 3; C.A. Lyon, 13 juillet 1973, Gaz. Pal., 1973, 2, 830; Cass. crim., 14 mars 1974, Gaz. Pal., 1, 417 259 En 1947, l'incendie d'un cinéma de Rueil-Malmaison avait fait 80 morts, aucune poursuite n'avait été engagée contre l'autorité municipale bien qu'il y ait eu des fautes de commises dans le contrôle des E.R.P., voir F. DONTENVILLE, "Sécurité et responsabilité - Feu la caste des intouchables", Savoir, 8 (2), avril-juin 1996, 150 260 L'irresponsabilité de principe posée par l'art. 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 sera supprimée par l'art. 75 de la Constitution du 22 Primaire An VIII ; y succédera toutefois une quasi-irresponsabilité de fait. Selon l'art 75 précité, "les agents du gouvernement autres que les ministres, ne peuvent être poursuivis pour des faits relatifs à leurs fonctions, qu'en vertu d'une décision du Conseil d'Etat"; ce texte s'appliquait aux maires alors agents du gouvernement. Le Conseil d'Etat ne donnait l'autorisation de poursuivre que si l'infraction n'était pas liée au service. Le décret du 19 septembre 1870 supprimant cette autorisation n'eut pas d'influence notable sur la situation des maires puisque les juges répressifs transposaient au pénal la distinction entre fautes de service et fautes personnelles pour ne poursuivre que ces dernières. Sur ces questions, cf. not J. BENOIT, "Responsabilité des élus locaux", Encyclopédie Dalloz, Collectivités locales, fasc. 12151-1 et s. ; M. CEOARA, "La responsabilité pénale des élus à raison des délits liés au manque de précautions", P.A., 15 février 1995, n° 20, 15 261 V. aussi pour la condamnation d'un maire et de l'adjoint-délégué suite à l'incendie d'une maison de retraite ayant fait 4 morts : Trib. corr. Tarascon, 25 avril 2000, biblio. Cerdacc, 262 V. not. F. CAILLE, "Le territoire au risque du droit ? La recomposition juridique et sociale du cadre d'action en matière de sécurité des activités sportives de pleine nature en montagne", Séminaire Plan urbain, Communauté Urbaine de Strasbourg, Territorialité des politiques publiques, Acteurs et procédures, Strasbourg, 29/30 octobre 1999 263 Grenoble, 15 août 1992, J.C.P., 1992, II, 21959, obs. P. SARRAZ-BOURNET 182 prononcée par le tribunal correctionnel à l'encontre d'un maire suite au décès de deux élèves dans une avalanche sur une piste. Le maire a tenté de s'exonérer en arguant du retard de la préfecture de l'Isère dans la réalisation du plan d'intervention et de déclenchement des avalanches, La Cour d'appel rejeta cette argumentation en retenant que le maire a un devoir de prévention matérialisé par la fermeture des pistes. Le tribunal correctionnel d'Albertville, le 7 avril 1997, n'a pas hésité à qualifier de directe la relation entre une faute d'abstention du maire et un accident mortel dû à une avalanche sur une piste de fond à Val d'Isère, ouverte ce jour là au public. Le Ministère public reproche au maire d'avoir omis de prendre la décision de fermer la piste alors que le risque d'avalanche était fort, le danger répertorié à cet endroit et le déclenchement préventif non institué au P.I.P.A. En s'abstenant de fermer la piste, le maire a commis une faute en relation directe avec les blessures et le décès. Pour un autre accident, le même tribunal, le 26 janvier 1998, énoncera que "le maire de la commune qui est le premier responsable de la sécurité sur les pistes de ski et fort de son expérience de moniteur de ski n'était pas le plus mal placé pour apprécier les risques en la matière". S’agissant d’un autre événement naturel, deux adjoints au maire ont vu leur responsabilité pénale engagée après un décès résultant de l'effondrement d'une portion de la voirie routière située en bord de la mer et exposée aux intempéries (Crim. 9 juin 1998, www.jurifrance.com). En ce qui concerne les préfets, il ressort de l'ensemble de la jurisprudence relative aux infractions pour homicides et blessures involontaires que les préfets sont moins exposés aux poursuites que les maires. L'enchevêtrement des compétences du préfet et du maire quant à la sécurité est une source de difficultés car il peut laisser planer le doute quant aux devoirs respectifs de chacun. La question de l'interférence des compétences s'est ainsi posée lors du déroulement des procès de Bruz et de Barbotan. Les magistrats de Rennes ont relevé qu'il "était normal que le pouvoir de police du maire fût exercé à titre principal par lui, autorité de police de droit commun, le Préfet étant amené à prendre des initiatives dans ce domaine en cas de défaillance du maire, et ainsi à se substituer à lui après mise en demeure préalable". Le fait que les préfets de l'époque "ne se sont pas donnés les moyens de vérifier si la mission dévolue aux maires était remplie avec diligence" et n'ont donc pas mis le maire en demeure de saisir la commission de sécurité n'a été qualifié par le tribunal que d' "insouciance secondaire" par rapport au rôle que devait jouer le maire 264. Rappelons toutefois que lors du procès de Furiani, c'est au Directeur du Cabinet du Préfet qu'il appartiendra d'être l'institutionnel condamné. S'agissant des inondations, le rapport de M Eric Dologé 265 faisant suite aux inondations de la Somme, souligne la multiplicité des acteurs chargés de la prévention et de la gestion des inondations, la diversité "voire l'éclatement des responsabilités en matière d'inondation" et suggère qu'une commission d'enquête formule des propositions législatives pour simplifier et clarifier le système. 264 V. P. BROSSARD , obs. sous Trib. corr. Toulouse, 19 février 1997, A.J.D.A., 20 janvier 1998, 72 : "D'une certaine manière, la position protectrice du tribunal vis-à-vis des préfets apparaît dans la lignée de la jurisprudence administrative qui, partant du constat réaliste que l'exercice des activités de contrôle de tutelle sur les collectivités locales est délicat, considère que la responsabilité de l'Etat n'est engagée qu'en cas de faute lourde de l'autorité de contrôle. Si la solution du tribunal ne peut que réjouir le corps préfectoral, elle ne semble cependant pas totalement satisfaisante." 265 Rapport n° 3036, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 mai 2001 183 Il n'existe actuellement, à notre connaissance aucune condamnation pénale de décideur public suite à une inondation, rappelons cependant, suite à aux inondations catastrophiques survenues le 22 septembre 1992 à Vaison-la-Romaine, la mise en examen du chef d'homicides involontaires du préfet du Vaucluse en raison de la délivrance, vingt-sept ans plus tôt, d'autorisations de création d'un camping et d'un lotissement dans une zone qui s'est révélée par la suite inondable. Bien qu'en l'espèce le préfet ait bénéficié d'un non-lieu, rien n'exclut que d'autres poursuites soient engagées et des condamnations prononcées sur le fondement des infractions d'imprudences si des personnes sont blessées ou meurent lors d'inondations. En 1994, Pierre Florin, Président de l'Assemblée plénière des sociétés d'assurance dommages déclarait 266 : "Quand il y aura trois morts sur un permis de construire consenti deux ans auparavant au bord d'une rivière, il faudra inculper le maire (certains délits moins graves sont passibles de poursuites)". A l'occasion d'un colloque organisé à Nice le 1 er avril 1999, Maître Christian Boitel267 soulignait que dans le cadre des "précautions convenables" et des "diligences normales", il pourra être démontré que le coût de l'endigage d'une rivière destiné à protéger, conformément aux dispositions d'un PPR, une population urbaine d'un risque d'inondabilité majeure, est hors de proportion avec les moyens matériels et financiers disponibles mais qu'il "pourra néanmoins toujours être reproché au préfet ou au maire de ne pas avoir pris les dispositions nécessaires pour, à défaut d'expropriation ou de réalisation d'ouvrages, ne pas avoir évacué d'un secteur déterminé une population soumise à un risque naturel majeur268". Ainsi que le relève Sophie Canadas-Blanc269, "si une avalanche ou une crue meurtrière survient alors que le permis de construire est délivré en violation des prescriptions du plan de prévention des risques, la responsabilité du maire peut être engagée." Nous ne pouvons qu'approuver ces propos : le risque inondation constitue potentiellement un risque pénal pour les décideurs publics. Précisons que la jurisprudence rapportée est antérieure à la loi du 10 juillet 2000, laquelle a modifié la rédaction de l'article 121-3 du Code pénal. Désormais le troisième alinéa de l’article 121-3 énonce : - "Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, encas de faute d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait." 266 Entretien avec Pierre PLORIN, "L'assurance Cat-nat", Risques n° 20, octobre-décembre 1994, p. 89 C. BOITEL, "Les catastrophes naturelles : de la responsabilité administrative à la responsabilité pénale", 8ième Colloque national décentralisé de droit public, Nice, 1 er avril 1999, Sécurité civile et risque pénal des collectivités territoriales 268 Rappelons que la procédure d'expropriation pour certains risques naturels est prévue par la loi Barnier 269 S. CANADAS-BLANC, La responsabilité pénale des élus locaux, Thèse Toulouse I, Ed. Johanet, 1999, préface G. ROUJOU de BOUBEE 267 184 Par rapport au texte antérieur on notera, outre la suppression du pluriel pour "le règlement", une précision bienvenue quant à la charge de la preuve, mais l'essentiel de la réforme n'est pas là, mais dans le fait que l'article 121-3 s'est enrichi d'un quatrième alinéa aux termes duquel : - "Dans le cas prévu par l'alinéa qui précède, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer". Afin de protéger les décideurs publics, et plus particulièrement les maires, ce quatrième alinéa introduit une distinction entre l'auteur direct de l'accident, dont la faute simple d'imprudence peut entraîner la condamnation pénale, et l'auteur indirect contre lequel une telle faute ne peut être retenue au pénal (mais peut en revanche être source de responsabilité civile). Il s'agissait de rompre avec la théorie de l'équivalence des causes qui permettait au juge causal de condamner les décideurs pour une faute simple de négligence en remontant la chaîne causale. La nouvelle rédaction de l'article 121-3 du Code pénal définit l'auteur indirect comme la personne qui n'a pas causé directement le dommage mais qui a créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter. La faute simple d'imprudence ne suffit plus à condamner un auteur indirect, désormais, il faut que soit établi : - soit qu'il avait violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement - soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer.270 Par cette formulation, les parlementaires ont finalement adopté une définition assez large de la faute non intentionnelle. La faute caractérisée est assimilée à celle de mise en danger délibérée prévue à l'article 223-1 du Code pénal, elle suppose l'exposition d'autrui - par action ou omission - à un grave danger. Le risque doit être réel c'est à dire présenter un certain degré de probabilité. Le danger éventuel doit être tellement évident que l'agent ne pouvait ignorer les conséquences de sa réalisation. La faute caractérisée doit alors combiner la présence d'un risque majeur et la connaissance par l'agent des conséquences préjudiciables pour autrui. Dès lors qu'il est démontré la connaissance par l'agent du risque pour autrui, la faute devrait être caractérisée271. S’agissant des maires, au regard des deux premières décisions rendues, le quatrième alinéa de l'article 121-3 semblait bien avoir atteint le but que lui avaient fixé les parlementaires du moins en ce qui concerne les décideurs publics 272. Ainsi, le 7 septembre 2000, le tribunal correctionnel de la Rochelle 273 prononçait la relaxe d'un maire poursuivi pour homicide 270 271 V. P. LE BAS, commentaire de l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes, 19 septembre 2000, J.A.C., n° 8, novembre 2000, http://www.iutcolmar.uha.fr/cerdacc/ 272 En matière d'accident du travail la majorité des décisions rendues depuis la loi retient la responsabilité pénale du chef d'entreprise sur le fondement de la première alternative de la faute pénale nouvelle d'imprudence 273 Trib. corr. la Rochelle, 7 septembre 2000, obs. M.F. STEINLE-FEUERBACH, J.A.C., n° 8, novembre 2000, http://www.iutcolmar.uha.fr/cerdacc/ 185 involontaire après le décès d'un adolescent causé par la chute d'une cage de but mobile tout en retenant sa responsabilité civile. La relaxe a été confirmée le 2 février 2001 par la Cour d'appel de Poitiers qui renvoyait au tribunal administratif le prononcé des intérêts civils 274. Le 19 septembre 2000, la Cour d'appel de Rennes infirmait la condamnation pour homicide involontaire prononcée avant la loi par le tribunal correctionnel de Brest, le 2 novembre 1999, pour le décès d'un adolescent ayant effectué une chute mortelle des falaises d'Ouessant 275. Il semble donc que si un accident intervient et qu'il s'avère qu'un lien de causalité puisse être établi avec une faute d'imprudence du maire celui-ci soit considéré comme auteur indirect. Mais, en supposant que selon les vœux du législateur les maires ne soient plus considérés que comme des auteurs indirects, les condamnations restent néanmoins tout à fait possibles. - Pour preuve la condamnation prononcée, le 12 septembre 2001, par le tribunal correctionnel de Millau 276 à l'encontre d’un maire tenu pour partie responsable du décès d’un enfant sur une piste de luge située en face du bâtiment des services techniques de la station. L’enfant est mort déchiqueté par un engin de damage. Le tribunal démontre que le maire a bien commis une faute caractérisée de nature à retenir la culpabilité de l'auteur indirect, notamment en n'ayant pas réglementé la circulation des engins d'entretien des pistes "le maire a failli aux missions de sécurité publique dont il était chargé par la loi, au titre de l'exercice de la police municipale". Quant à la connaissance du risque, condition imposée par la loi du 10 juillet 2000 pour permettre la condamnation de l'auteur indirect, le tribunal constate que le risque était "tout à la fois apparent et habituel", que le maire connaissait la disposition des lieux et l'implantation de la piste de luge, il ne pouvait donc ignorer le danger résultant du passage de la dameuse au milieu de jeunes enfants. La loi du 10 juillet 2000 a certes restreint les possibilités de condamner les auteurs indirects et notamment les décideurs publics, mais il ne s'agit pas, contrairement à ce qui a été dit, d'une loi de déresponsabilisation ou d'auto-amnistie. La responsabilité pénale s'éloigne lorsque l'on parcourt la chaîne causale mais elle demeure, et en matière de risques naturels elle est loin d'être exclue. En effet, la première alternative de la faute nouvelle d'imprudence de l'auteur indirect reprend les termes de la mise en danger d'autrui, or nous venons de voir que cette infraction peut être fondée sur la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité et que les dispositions contenues dans un PPR répondent à la définition de cette obligation particulière. Par conséquent l'existence d'un PPR pourrait bien être un moyen de sanctionner pénalement les décideurs publics dont la négligence a conduit, même indirectement à des atteintes à l'intégrité physique. La seconde alternative est plus large, elle obéît au souci de ne pas réduire de manière excessive le champ de la responsabilité pénale des auteurs indirects car "il s'agirait d'un retour en arrière trop radical par rapport à l'orientation voulue par le législateur, le juge et la société elle-même, qui ne comprendrait pas que certaines inobservations des règles de sécurité et de 274 Poitiers, 2 février 2000, obs. M.F. STEINLE-FEUERBACH, J.A.C., n° 14, mai 2001, http://www.iutcolmar.uha.fr/cerdacc/ 275 Rennes, 19 septembre 2000, obs. P. LE BAS, J.A.C., n° 8, novembre 2000, http://www.iutcolmar.uha.fr/cerdacc/ 276 Trib. corr. Millau, 12 septembre 2001, P.A., n° 47, 6 mars 2002, 13, note M.-.F. STEINLEFEUERBACH 186 prudence particulièrement graves ne puissent faire l'objet de poursuites pénales" 277. Dans son intervention du 5 avril 2000 devant l'Assemblée nationale, Madame Elisabeth Guigou précise que par le biais de cette seconde alternative "les obligations de sécurité qui ne sont pas prévues par un décret ou un arrêté, mais par exemple par une circulaire, comme les obligations de simple bon sens quoi ne sont prévues par aucun texte, pourront toujours, si leur violation constitue une faute d'une exceptionnelle gravité exposant autrui à un danger qu'on ne pouvait ignorer, donner lieu à condamnation". Le Garde des Sceaux ajoute qu'il "s'agit d'un critère objectif, qui suppose la démonstration d'une imprudence consciente. C'est parce que l'intéressé aura été personnellement alerté de l'existence d'un risque déterminé et de la nécessité de prendre certaines précautions que sa responsabilité pénale pourra être engagée… La nouvelle définition du délit non intentionnel s'appliquera en effet dans des domaines sensibles tels… le droit de l'environnement"278. La rédaction finale de la loi remplace la faute "d'une exceptionnelle gravité" par la faute "caractérisée". Le texte amendé renonce à l'exceptionnelle gravité et permet de fonder la faute sur la connaissance d'un risque particulièrement grave. Madame la Ministre, lors de la seconde lecture devant l'Assemblée, précisait que la faute caractérisée "signifie que doit être démontré une imprudence, une négligence ou un manquement à une règle de prudence ou de sécurité qui soit caractérisée ". La notion de faute "caractérisée" est encore en attente d'une définition précise, ce sera l'œuvre de la jurisprudence. Quel que soit le degré de caractérisation qui sera finalement retenu, cette nouvelle qualification de la faute permet très clairement de poursuivre l'élu ou le décideur qui, ayant eu connaissance d'un risque grave, s'abstient de prendre les mesures de sécurité nécessaires 279. La notion de connaissance du risque joue ici un rôle primordial et il est évident que si un risque inondation est connu, le maire de la commune ne peut l'ignorer. Voilà qui ouvre largement la possibilité de poursuivre pénalement un maire dès lors qu'un risque inondation connu, même en l'absence de document de prévention des risques, se réalise suite à une faute caractérisée d'imprudence ou de négligence de l'élu, et que la réalisation du risque a des conséquences sur l'intégrité physique des habitants de la commune. Le raisonnement qui a conduit le tribunal correctionnel de Millau ( 12 septembre 2001) à condamner le maire de la commune pour homicide involontaire est tout à fait transposable au risque inondation. Les personnes physiques ne sont pas les seules à devoir répondre des infractions d'imprudence puisque les personnes morales sont également exposées à de telles poursuites. La responsabilité pénale des personnes morales est une innovation du nouveau Code pénal entré en vigueur le 1 er mars 1994. L'article 121-2 du code pénal dispose dans son alinéa premier que : 277 Rapport de R. DOSIERE fait sur la proposition de loi de Monsieur Pierre FAUCHON tendant à préciser la définition des délits non intentionnels, n°2266, enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 mars 2000 278 ème 2 séance du mercredi 5 avril 2000 279 MF. STEINLE-FEUERBACH et P. LE BAS, "Responsabilité pénale des élus : Rebondissements mais adoption définitive !", J.A.C., n° 6, juillet 2000, http://www.iutcolmar.uha.fr/cerdacc/ 187 - "Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7 et dans les cas prévus par la loi ou le règlement, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants." La loi prévoit notamment qu'elles peuvent être poursuivies pour les délits de mise en danger (article 223-2 du Code pénal) d'homicide et blessures involontaires (articles 221-7 et 222-21 du Code pénal). Pour exemple, nous citerons le jugement du tribunal correctionnel de Narbonne 280 condamnant, suite à la mort par électrocution d'une fillette, à la fois l’O.P.H.L.M. de l’Aude qui en était le propriétaire et la commune de Lézignan-Corbière abonnée à EDF, ainsi que le directeur de l'office et le maire de la commune. Cependant, s'agissant des personnes morales de droit public une importante restriction est apportée par le second alinéa de l'article 121-2 du Code pénal selon lequel : - "Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public". Cette restriction a permis, le 12 décembre 2000, l'annulation en cassation de la condamnation prononcée contre la ville de Grenoble dans l'affaire des noyades du Drac 281. Malgré la proposition du sénateur Pierre Fauchon, la loi du 10 juillet 2000 a maintenu la nécessité de limiter la responsabilité pénale des collectivités territoriales aux activités susceptibles d'être déléguées. Selon le rapport de Monsieur René Dosière, 282 "la commission des lois n'a pas souhaité suivre la démarche engagée par le Sénat tendant à étendre la responsabilité pénale des collectivités locales, en cas de manquement non délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence, à des activités non susceptibles de faire l'objet d'une délégation de service public". Le concept de "convention de délégation de service public" est en attente d'une définition précise du législateur, la doctrine et la jurisprudence administratives ont néanmoins contribué à cerner cette notion laquelle correspond à des activités extrêmement variées 283. L'enjeu est d'importance car, selon la définition retenue, la responsabilité pénale de la collectivité territoriale pourra être engagée plus ou moins facilement. La difficulté fondamentale réside dans le fait qu'il n'existe aucune liste officielle permettant de savoir si une activité est bien en rapport avec une délégation de service public. Au-delà, il semble que ne soit pas délégable, par convention à des personnes privées, une activité mettant en œuvre une prérogative de puissance publique et par conséquent les activités de police. Ainsi, le Conseil d'Etat considère 280 Trib. corr. Narbonne, 12 mars 1999, obs. M.F. STEINLE-FEUERBACH, J.A.C., n° 1, février 2000, http://www.iutcolmar.uha.fr/cerdacc/ 281 M.F. STEINLE-FEUERBACH, "La portée de la loi n° 2000-647 du 10 juillet 2000 : à propos de la catastrophe du Drac (Cass. crim., 12 décembre 2000)", P.A., 5 janvier 2001 282 Rapport précité, p. 24 283 Voir not. F. DESPORTES et F. LE GUNEHEC, "Responsabilité pénale des personnes morales", J. Cl. Pénal, fasc. 121-2 ; C. MONDOU, "Responsabilité pénale des collectivités territoriales", A.J.D.A., 1993, 539 ; Etienne PICARD, "La responsabilité pénale des personnes morales de droit public : fondements et champs d'application", Rev. des Société, 1993, p. 280 ; F. GARTNER, "L'extension de la répression pénale aux personnes publiques", RFD adm 10, janv.-févr. 1994, p. 125 ; J. VIRET, "La responsabilité de l'administration et de ses agents à l'épreuve du droit pénal contemporain", A.J.D.A., 1995, 763 ; F. MEYER, "Réflexions sur la responsabilité pénale des personnes morales de droit public à la lumière des premières applications jurisprudentielles, RFD adm. 15 (5) sept.-oct. 1999 188 que les activités de police générale assurées par les collectivités locales ne peuvent être déléguées284, de même que l'exercice des activités de police spéciale 285. Or, en matière de risques naturels, les représentants des collectivités territoriales agissent dans le cadre de leur pouvoir de police ce qui implique une regrettable immunité des collectivités territoriales dans ce domaine. Relèvent de son autorité de police générale les attributions du maire visées par les articles L. 2212-2-5 et L. 2212-4 du Code général des collectivités territoriales. Ainsi, la Cour d'appel de Chambéry a confirmé le 17 mars 1999 (commune de Val d'Isère, avalanche de la Daille à Val d'Isère du 24 février 1996, Jurisque Avalanche www.anena.org) le jugement du tribunal correctionnel d'Albertville en date du 6 janvier 1997 lequel avait renvoyé des fins de poursuite d'homicide et blessures involontaires la commune de Val d'Isère à laquelle était reprochée d'avoir omis de prendre la décision de fermeture d'une piste de ski de fond par fort risque d'avalanche, en effet - "l'activité visant à prévenir les risques d'avalanche relève du pouvoir de police général du maire, prérogative de puissance publique, insusceptible de délégation… les infractions ne sont pas constituées faute d'élément légal". Il en est de même en matière de risque inondation. C'est dans le cadre de son pouvoir de police que le maire prescrit la remise état d'un terrain qui présente un danger grave et imminent pour la sécurité publique 286. Ne peut pas davantage faire l'objet d'une délégation de service public l'élaboration d'un POS obligeant la commune à tenir compte des risques naturels qui pèsent sur elle 287 et la circulaire du 7 août 1987 prohibe la délégation de l'instruction des autorisations d'urbanisme 288. Il faut donc bien en conclure qu'en l'état actuel de la législation la responsabilité pénale des personnes morales de droit public apparaît "ne pas pouvoir s'accommoder des risques naturels"289. Pourtant, toute condamnation de commune n'est pas exclue. En effet, l'arrêt de la Cour d'appel de Chambéry du 17 mars 1999 relatif à l'avalanche de la Daille à Val d'Isère a été cassé par la Chambre criminelle, le 14 mars 2000 (Bull. crim. n°114) et l'affaire a été renvoyée à la Cour d'appel de Grenoble (28 mars 2001, Jurisque Avalanche www.anena.org) . Selon la Cour de cassation "le pouvoir de police du maire en matière de prévention des avalanches prévu par l'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales n'exclut pas la responsabilité de la commune exploitant son domaine skiable en régie". Pour la Cour de renvoi "l'activité de mise à disposition des usagers d'un espace aménagé pour une activité sportive de plein air constitue une activité de service public à caractère industriel et commercial et en tout cas non comprise dans les activités de direction et de contrôle de la société non susceptible par nature de délégation de service public" et il apparaît que "la poursuite pénale contre la commune de B… est fondée, non sur une faute du maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police, activité réglementaire non délégable (…) mais sur une faute du maire (…) en tant que chef de 284 CE, 28 mai 1958, Amoudruz, Rec., p. 301 CE, 8 mars 1985, Les Amis de la Terre, Rec., p. 73 286 CE, Ass., 24 janvier 1936, Mure, Rec., p. 105 287 CE, 19 juin 1992, Koenig, Rec., table, p. 1375 288 Circulaire Ministère de l'Intérieur relative à la gestion déléguée des services publics locaux, JO 20 décembre 1987, p. 14863 289 P. DEVARENNE, "La responsabilité des personnes morales de droit public en matière de risques naturels", 8ième Colloque national décentralisé de droit public, Nice, 1er avril 1999, Sécurité civile et risque pénal des collectivités territoriales ; c'est à l'intervention de Maître DEVARENNE que nous devons la jurisprudence précitée dans ce paragraphe 285 189 l'exploitation en régie directe du domaine skiable, responsable de la sécurité de celui-ci envers les usagers" . Ainsi, dès lors qu'une inondation coûterait des vies humaines dans le cadre d'activités délégables de la commune cette dernière serait exposée à des poursuites pénales. 190 § 2 : La méconnaissance volontaire du risque, faute de la victime La victime peut avoir connaissance du risque inondation, bien entendu par les documents d'urbanisme, mais également en raison d'événements passés ou de renseignements particuliers dont elle dispose. Si elle choisit néanmoins de s'installer dans une zone en risque, notamment sans prendre les précautions qui s'imposent, ce choix délibéré aura des conséquences lorsqu'elle souhaitera exercer une action en responsabilité après que le risque connu se soit réalisé. L'attitude de la victime pourra alors être prise en compte tant par le juge civil que par le juge administratif. Le juge pénal a à cet égard une position différente. A. En droit civil De manière générale la faute de la victime n'est pas sans influence sur l'étendue de la responsabilité du débiteur quelle que soit la nature, délictuelle ou contractuelle, de celle-ci. Ainsi que l'écrit Patrice Jourdain, c'est surtout pour sanctionner la victime que la faute conserve une place de choix dans notre droit de la responsabilité civile. En effet, la responsabilité civile devenant de plus en plus objective, la notion de faute a par conséquent une place de plus en plus réduite si on se place du côté du responsable alors que le droit positif continue toujours à poser en principe que la faute de la victime doit entraîner une diminution de son indemnisation, la réduction ou la suppression du droit à réparation de la victime fautive fait office de peine privée 290. En principe la faute de la victime n'entraîne qu'une réduction de son indemnité sauf si elle présente le caractère de la force majeure ce qui ne saurait être le cas pour la méconnaissance volontaire du risque. Pourtant nous avons constaté que lorsqu'une personne a volontairement acquis ou fait construire un immeuble dans une zone qu'elle savait à risque, les juges peuvent sanctionner son attitude par l'exonération du débiteur. Ainsi, une commune s'était vue condamner par les juges du fond à indemniser une partie des pertes subies par l'acquéreur d'un terrain figurant sur le plan d'occupation des sols sur zone constructible au motif que la commune, qui connaissait la nature du sous-sol du terrain vendu en raison de précédents glissements ayant affecté les coteaux, avait manqué à son obligation d'information et de conseil lui imposant de signaler à l'acquéreur les risques de nature à grever la chose vendue. La Cour de cassation, en cassant l'arrêt d'appel retient que l'acheteur était originaire de la commune, dont il était membre du conseil municipal, et qu'il avait donc acquis l'immeuble en toute connaissance de cause (Civ. 3ième, 22 janvier 1997 pourvoi n° 95-11.990). La connaissance du risque par l'acquéreur d'un immeuble peut entraîner une diminution de la réparation due par le gardien de la chose ayant endommagé l'immeuble. Ainsi la connaissance du risque par la victime a été invoquée par la commune de Beaulieu-sur-Mer, à l'encontre de l'acquéreur d'un terrain situé en contrebas d'une parcelle appartenant à la commune. Une quinzaine d'année après l'acquisition, des rochers se sont détachés de la falaise et ont causé des dégâts à la propriété. La demande en réparation du propriétaire envers la commune, gardienne de la falaise, est accueillie par la Cour d'appel en 1991 mais seulement pour moitié en raison de l'imprudence de l'acquéreur. Il y a donc eu partage entre le gardien et la victime en raison d'une faute de la victime. Après avoir partiellement obtenu réparation des dommages causés à sa propriété, le demandeur intente une seconde action cette fois fondée 290 P. JOURDAIN, Les principes de la responsabilité civile, 4ème éd., Connaissance du Droit, Dalloz, 1998, p. 20 191 sur la dépréciation du terrain suite à l'éboulement. Il est débouté et la Cour d'appel d'Aix-enProvence, le 24 février 1993, énonce que la dépréciation était exclusivement la conséquence de la situation des lieux, génératrice d'un risque dont l'acheteur pouvait se convaincre lors de son achat. Le demandeur invoque alors l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de 1991 lequel avait reconnu que la commune était responsable à 50%, il obtient gain de cause devant la seconde chambre civile laquelle considère que cette nouvelle demande doit être accueillie (Civ. 2ème, 17 mai 1995, J.C.P., 1995, IV, 1682). La connaissance du risque par l'acquéreur d'un immeuble fait échec à une action en garantie des vices cachés engagée contre le vendeur. Ainsi s'agissant des risques d'éboulement d'une falaise, la garantie des vices cachés est acquise à l'acheteur n'ayant pas eu connu le risque dès lors que la partie haute de la falaise était couverte d'arbres qui rendaient très difficile son examen, la hauteur et la verticalité de la falaise rendant par ailleurs son accès impossible. En revanche, s'agissant de la même falaise la garantie a été refusée à l'acheteur averti d'éboulements antérieurs dont il était fait état dans l'acte de vente : "le vice apparent dont le vendeur n'est pas tenu est celui qu'un homme de diligence moyenne aurait découvert en procédant à des vérifications élémentaires. Dès lors, informé de l'existence des chutes de pierre et du rapport… et de l'étude géologique, il appartenait à M. G., acheteur sérieux, de demander la communication de ces documents dont la lecture lui aurait permis de connaître avec précision l'ampleur des travaux à exécuter" (T.G.I. Nantes, 19 décembre 1995, biblio. Cerdacc). On peut établir un parallèle avec le risque inondation : dès lors que l'acquéreur d'un immeuble est averti de l'existence d'un tel risque il pourrait lui être reproché de n'avoir pas consulté les documents qui lui auraient permis de connaître avec précision la nature du risque et les travaux éventuellement nécessaires pour parer à celui-ci. En réalité, la faute de la victime revêt ici une qualification particulière qui est celle de l'acceptation des risques dont l'effet est fréquemment exonératoire dès lors qu'elle est reconnue. En effet, l'acceptation des risques de dommage est considérée comme un fait justificatif en droit civil privant la victime du droit à réparation dans le cadre de responsabilités objectives291 ; la victime conserve certes la possibilité de prouver une faute de l'auteur du dommage. Dans le cadre des responsabilités pour faute, l'acceptation des risques par la victime ne saurait, en tant que telle, fonder une réduction de l'indemnité, l'acceptation des risques doit être en elle-même constitutive d'une faute292. S'agissant de la responsabilité délictuelle, l'acceptation des risques par la victime trouve essentiellement son application dans le domaine sportif, principalement lorsque les dommages sont causés au cours d'un match ou d'une compétition. La normalité du risque accepté s'apprécie au regard de l'activité pratiquée, celle-ci se vérifie facilement dans le sport de compétition, il suffit au juge de constater que l'adversaire n'a pas commis de faute contre le jeu. L'acceptation des risques par la victime ne saurait toutefois couvrir les fautes lourdes ou intentionnelles de l'auteur du dommage. 291 L'acceptation fautive des risques pourrait entraîner également une exonération partielle de l'auteur du dommage en matière de responsabilité objective. Voir J.P. BRILL, note sous TGI Strasbourg, 14 février 1977, D., 1978, 248 292 F. TERRE, P. SIMMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil, Les Obligations, Dalloz, 7 ème éd., 1999, n° 707 192 En matière de sports de montagne, l'acceptation des risques n'est pas admise, c'est ce que rappelle le tribunal correctionnel d'Albertville (13 janvier 1997, Bonnevie, avalanche du Cugnaï à Val d'Isère, Jurisque Avalanche www.anena.org) : "La faute de la victime est un moyen d'atténuer la responsabilité civile du professionnel de la montagne. Les défendeurs invoquent souvent le fait par lequel la victime, en s'engageant dans une sortie hors-piste connaissait et dès lors acceptait les risques encourus. Mais les juges ont toujours écarté ce principe. Dans le cas de conduite de sortie hors-piste par un professionnel de la montagne, le juge considère qu'il y a perte d'autonomie du client vis-à-vis des décisions du professionnel. La victime, si le juge considère qu'elle n'était pas d'un certain niveau ou compétence, ne peut accepter un risque contre lequel elle se croyait prémuni dès lors qu'elle utilisait les services d'un professionnel averti de la montagne ; non pas que l'avalanche ne puisse se déclencher, mais parce que le guide ou le moniteur se doit de connaître les risques et donc de les éviter". En dehors des activités sportives il revient au juge de vérifier si la victime pouvait légitimement s'attendre à la réalisation d'un dommage en tenant compte de son expérience et de la dangerosité de la situation293. La simple connaissance du risque par une personne non expérimentée n'est pas en elle-même exonératoire, il faut une véritable conscience du risque et l'acceptation de celui-ci. En matière de responsabilité des constructeurs fondée sur l'article 1792 du code civil, l'exonération du constructeur pour l'acceptation délibérée des risques par le maître de l'ouvrage s'est peu à peu imposée en jurisprudence, toutefois des incertitudes subsistent. La responsabilité de plein droit des constructeurs prévue à l'article 1792 du code civil ne peut en principe être mise en échec que par la force majeure, ainsi que nous l'avons vu dans la première partie de cette étude, ou par le fait du maître de l'ouvrage 294. Pour admettre l'exonération du constructeur par le fait du maître de l'ouvrage la jurisprudence exige soit la compétence notoire de celui-ci soit sa participation effective dans les travaux par des actes positifs graves. Ainsi dans un arrêt en date du 7 mars 1990 (Civ. 3 ème, 7 mars 1990, RD. Imm. 12 (3), juil.-sept. 1990, 375, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli) la troisième Chambre civile de la Cour de cassation déboute le maître de l'ouvrage de son action au motif qu'il "avait pris le risque d'assumer personnellement la maîtrise d'œuvre d'une opération dont il connaissait les difficultés" car il avait assuré lui-même la direction du chantier et "bien qu'ayant conscience du défaut d'étanchéité de la terrasse, il a, sans prendre conseil d'un spécialiste, refusé de faire exécuter des travaux qu'avait préconisé le maître d'œuvre". Toutefois, à côté de cette immixtion fautive, existait un courant jurisprudentiel 295 admettant l'exonération du fait d'une acceptation délibérée des risques par le maître d'ouvrage désireux d'effectuer des économies. Cette jurisprudence ne s'appliquait cependant qu'aux seuls maîtres d'ouvrage ayant une réelle compétence. Par trois arrêts rendus en 1989 et 1990, la Cour de cassation semblait avoir mis fin à ce courant jurisprudentiel en n'acceptant l'exonération du 293 D. ANTOINE, note sous Civ 2ième, 15 avril 1999, JCP, 2000, II, 10 317 : lors d'une manade, un taureau a surgi devant un cheval lequel s'est cabré faisant chuter le cavalier et tombant sur lui. La victime ayant assigné en responsabilité le propriétaire du taureau a été déboutée car, habituée de la manade, elle avait accepté par avance le risque normal de voir un taureau effrayer sa monture. 294 Le fait du tiers est très rarement admis, voir Lamy Construction, n° 3279 295 sur l'évolution de cette jurisprudence voir, Ph. MALINVAUD et B. BOUBLI, RD. Imm. (17) (2), avr.-juin 1995, 331 193 constructeur que si l'acceptation des risques constituait une immixtion fautive du maître de l'ouvrage296. Mais, dans des décisions plus récentes, la Cour de cassation a adopté une position plus favorable aux constructeurs en admettant comme cause d'exonération, partielle ou totale, l'acceptation des risques par le maître de l'ouvrage sans que celle-ci constitue une immixtion fautive. Ainsi, un arrêt de la troisième Chambre civile en date du 25 janvier 1995 (J.C.P., 1995, IV, 736, RD. Imm., 17 (2), avr.-juin 1995, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli) est particulièrement intéressant. La Cour relève que : - "le maître de l'ouvrage avait, par un choix délibéré, après avoir été mis en garde par le bureau d'études en des termes particulièrement précis, décidé, en toute connaissance de cause, de limiter la mise hors d'eau du deuxième sous-sol à la cote NGF 165, correspondant presque à celle atteinte lors des crues quinquennales de la rivière, prenant ainsi le risque d'inondation à ce niveau". L'architecte a par conséquent été exonéré de sa responsabilité fondée sur l'article 1792 C.C. La troisième Chambre civile confirme sa position dans un arrêt du 12 février 1997 (RD. Imm., 19 (2), avr.-juin 1997, 241, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli) dans une espèce où le maître de l'ouvrage avait, malgré les mises en garde de la Socotec, accepté la mise en œuvre de résines, procédé nouveau non agréé par le centre scientifique et technique du bâtiment ; l'acceptation des risques a ici conduit à une limitation de la responsabilité du maître d'œuvre. La première Chambre civile a adopté une position similaire dans son arrêt du 21 janvier 1997 (RD. Imm., 19 (2), avr.-juin 1997, 241, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli) : - "les travaux de terrassement non prévus au contrat initial mais préconisés par les architectes en cours de chantier pour protéger les pavillons des eaux de ruissellement n'avaient finalement pas été commandés par le maître d'ouvrage, cette attitude avait justifié les plus expresses réserves de ces architectes, la cour d'appel a ainsi caractérisé le risque pris en connaissance de cause par le maître de l'ouvrage, en a déduit à bon droit qu'elle ne pouvait retenir la responsabilité des ces architectes, ni celle de l'entreprise". Désormais, il est établi en jurisprudence que l'acceptation délibérée des risques est une cause d'exonération distincte de l'immixtion fautive du maître de l'ouvrage notoirement compétent297. Ainsi que le soulignent MM. Malinvaud et Boubli, "on peut aujourd'hui considérer que l'acceptation délibérée des risques est une cause d'exonération qui ne se confond pas avec l'immixtion fautive d'un maître de l'ouvrage notoirement compétent. Peu importe ici que le maître de l'ouvrage ne soit pas notoirement compétent dès l'instant qu'il a pris le risque de manière délibérée et consciente". On notera que chaque fois que la Cour de cassation a admis l'acceptation des risques comme cause d'exonération, le maître de l'ouvrage avait été averti des risques et les avait acceptés de manière délibérée refusant de tenir compte des mises en garde effectuées par les professionnels. 296 Civ. 3ème, 1er février 1989, Gaz. Pal., 1989, 1, 502, note L. VALLERY-RADOT ; Civ. 3ème, 25 octobre 1989, Gaz. Pal., 1990, 1, somm., 7, RD. Imm., 1990, 217 ; Civ. 3 ème, 27 novembre 1990, J.C.P., 1991, IV, 33 , RD. Imm., 1991, 226 297 Dans ce sens : Civ. 3ème, 25 février 1998 et 6 mai 1998, RD. Imm. 20 (3), juill.-septembre 1998, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli 194 En l'absence de mise en garde, la responsabilité du constructeur demeure intacte puisque celui-ci est redevable d'une obligation de conseil. C'est ce qu'a bien précisé un arrêt de la troisième Chambre civile du 8 octobre 1997 (RD. Imm. 20 (1), janv.-mars 1998, 97, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli). Le maître de l'ouvrage, après avoir fait précéder à une étude du sol, avait décidé de supprimer un drainage prévu par l'architecte sans que les constructeurs ne réagissent : "aucune réserve, protestation ou mise en garde n'avait été élevée par les constructeurs et, notamment, par l'architecte lorsque le maître de l'ouvrage avait demandé la suppression des drainages périphériques extérieurs suite à un rapport de sondage n'en prescrivant pas, la cour d'appel avait relevé à bon droit que les locateurs d'ouvrage sont tenus à l'égard du maître de l'ouvrage d'un devoir de conseil qui leur fait obligation de signaler les risques présentés ainsi que de veiller à l'adéquation des procédés de construction à une conception correcte de l'ouvrage". En l'espèce, si le maître de l'ouvrage avait commis une faute d'imprudence, celle-ci n'était pas suffisante pour permettre l'exonération des constructeurs puisque aucune mise en garde n'avait été effectuée. Le maître de l'ouvrage n'avait donc pas délibérément pris de risques puisque aucun professionnel ne l'avait utilement conseillé et qu'il ne pouvait donc avoir réellement conscience du danger. Il est donc établi que l'acceptation des risques doit être consciente et délibérée. Reste la question de savoir si une telle acceptation est suffisante pour exonérer les professionnels n'ayant pas eux-mêmes procédé à la mise en garde ou si elle ne profite qu'à ceux qui ont rempli leur devoir de conseil. Un arrêt de la Cour d'appel de Paris (14 mai 1997, RD. Imm. 19 (4), oct.-déc. 1997, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli) fait de l'acceptation délibérée des risques une cause d'exonération pour tous les constructeurs permettant à l'architecte d'échapper à sa responsabilité dès lors que la mise en garde avait été effectuée par un autre professionnel. Dans cette affaire, le maître d'ouvrage, pour des soucis d'économie, avait renoncé à l'étanchéité prévue malgré une vive réaction du bureau de contrôle. Bien que l'architecte se soit abstenu d'intervenir sur ce point la Cour de Paris considère que "au regard de la complète information qui lui avait été donnée et d'une mise en garde par un bureau de contrôle en des termes très précis, c'est un choix délibéré effectué en toute connaissance de cause tant sur la nature que leurs conséquences et manifestations dommageables prévisibles, que le maître de l'ouvrage a accepté les risques de la construction d'une dalle dépourvue de toute étanchéité recouvrant les parkings et caves. Considérant qu'à raison de cette acceptation délibérée des risques, l'argumentation tirée des fautes commises par l'architecte, pour avoir réalisé dans de telles conditions la dalle litigieuse et n'avoir émis aucune réserve à la réception est dénuée de portée". La Cour d'appel de Paris accorde donc davantage de conséquences à la faute du maître de l'ouvrage qu'à la violation du devoir de conseil de l'architecte. Mais un an plus tard la Cour de cassation a adopté sur ce point la solution inverse (Civ. 3 ème, 22 juillet 1998, RD. Imm. 20 (3), juill.-septembre 1998, obs. Ph. Malinvaud et B. Boubli) et retient la responsabilité de l'architecte pour manquement à son obligation de conseil : - "l'existence de réserve émanant d'un bureau d'études et de l'organisme de contrôle ne suffisaient pas, en l'absence de mises en garde formulées par l'architecte lui-même, à caractériser la faute du maître de l'ouvrage". 195 De manière générale, l'acceptation des risques pour être exonératoire doit être fautive. La simple connaissance du risque par un particulier ne saurait être opposée par un professionnel mais la réponse est moins certaine s'agissant d'un défendeur non professionnel. On peut se poser la question de l'impact de la présence d'un PPR. Il nous semble évident que la seule existence d'un PPR ne saurait permettre à un professionnel, chargé d'une obligation de conseil, de prétendre s'exonérer par une prétendue acceptation des risques de la part d'un particulier. Toutefois, dès lors que le défendeur n'est pas un professionnel, il n'est pas à exclure que l'existence d'un document précisant les risques inondation puisse être invoquée valablement par un vendeur non professionnel ainsi que le laissent présager les deux décisions présentées au début de ce paragraphe, à savoir l'arrêt de la troisième Chambre civile du 22 janvier 1997 (pourvoi n° 95-11.990) et le jugement du tribunal de grande instance de Nantes en date du 19 décembre 1995 (biblio. Cerdacc). Signalons également qu'un professionnel de l'immobilier ne saurait obtenir la nullité pour erreur de l'achat de terrains lotis au motif qu'il ignorait les contraintes de construction résultant du caractère inondable du terrain. En effet, ces contraintes figurant dans le règlement d'urbanisme du lotissement, l'acquéreur en tant que professionnel, doit les connaître et sa faute est par conséquent inexcusable (Pau, 5 février 1997 ; Dijon, 12 septembre 1997, Lamy Droit du contrat, n° 205-15). 196 B. En droit administratif En toute logique, le juge administratif va, lui aussi, prendre en compte la faute commise par la victime et ainsi en tirer diverses conséquences qui prennent éventuellement les traits d’une indemnisation seulement partielle de celle-ci. En effet, il paraît logique que l’on tienne compte, dans l’indemnisation des victimes d’inondation, du fait qu’elles ont délibérément édifié des constructions alors qu’elles savaient qu’il y avait un risque ou qu’elles n’ont pas pris les mesures permettant d’éviter une inondation ou la destruction de leurs biens. En d’autres termes, “ la faute du pétitionnaire viendra toujours atténuer la responsabilité de l’administration ”298. Il est d’ailleurs de jurisprudence constante que les autorisations de construire ne confère pas à leurs bénéficiaires une garantie concernant la résistance du sol (C.E., 13 mars 1989, M. Bousquet et autres, A.J.D.A., 1989, p. 559). Ainsi, il appartient au pétitionnaire de s’assurer, par lui-même, que le terrain sur lequel la construction doit être réalisée n’est pas exposé à un risque naturel connu telles des inondations. Car dans le cas contraire, il sera jugé auteur d’une négligence qui sera de nature à atténuer voire à supprimer la responsabilité de l’autorité administrative. Selon Philippe Ségur, le juge administratif est d’une très grande sévérité par rapport aux victimes, “ dans l’optique du juge, la victime ne peut se prévaloir de ses propres imprudences pour demander réparation du dommage causé à elle par une catastrophe naturelle ”299. Quelques exemples sont sur ce point révélateurs, après avoir précisé que sur l’ensemble des décisions en notre possession, 42 amènent le juge (le Conseil d’Etat en 36 occasions, les Cours administrative d’appel à 6 reprises) à estimer qu’une négligence voire une faute a été commise par la victime des inondations ce qui a une influence non négligeable sur les modalités de l’indemnisation des préjudices qu’elle a subis, alors que dans 12 arrêts, le juge ne se prononce pas sur l’attitude des victimes. On trouve tout d’abord, les arrêts dans lesquels le juge constate une imprudence des victimes ne leur permettant pas d’être indemnisées intégralement (4 sont issus du Conseil d’Etat : - C.E., 10 juillet 1981 ( Commune d’Ermont, n°17733) : “ en n’installant pas sur leur canalisation un dispositif propre à empêcher le reflux des eaux en provenance des égouts dans le sous-sol de leur habitation, contrairement aux prescriptions du règlement sanitaire départemental, les époux…ont commis une imprudence qui, tout en n’ayant pas pour effet d’exonérer la ville d’Ermont de la responsabilité qu’elle a encourue, interdit toutefois de mettre à sa charge la réparation de l’intégralité des dommages causés aux époux… ” ; - C.E., 26 avril 1985, n°36.098 (Département de la Marne contre Fransoret) : “ considérant toutefois que M. Fransoret ne pouvait ignorer que la situation de sa parcelle, située en contrebas du Mancy l’exposait particulièrement aux inondations…que M. Fransoret a commis une imprudence de nature à exonérer partiellement le département… ” ; - C.E., 27 novembre 1987 (Société provençale d’équipement, commune d’Aubagne, Ministre de l’urbanisme et du logement c/ Société provençale d’équipement, n°38.318) : “ la société…ne pouvait ignorer ni les risques naturels d’inondation des lieux qui existaient au moment où elles ont pris la décision de s’installer…ni les risques qui 298 E. LE CORNEC, loc.cit. P. SEGUR, "La catastrophe et le risque naturel. Essai de définition juridique", R.D.P. 1997, p. 1750 299 197 subsistaient après l’achèvement des travaux…qu’elles n’ont pris aucune mesure de précaution tendant notamment à surélever les sols du bâtiment…que l’imprudence ainsi commise est de nature à atténuer la responsabilité des auteurs du dommage ” ; - C.E., 14 décembre 1990 (Société provençale d’équipement, Ministre de l’urbanisme et du logement, n°46.852) : “ le Tribunal administratif a relevé l’imprudence commise par les sociétés…en s’installant dans une zone dont elles ne pouvaient ignorer le caractère inondable sans prendre les précautions imposées par la nature de lieux ” ; Devant la Cour administrative d’appel : - C.A.A. de Paris, 17 mars 1992 (Mme Jarniat-Labbey, n°90PA01002) : “ les requérants ont implanté leur propriété en 1968 en contrebas d’un versant très abrupt alors que…la commune de Saint-Denis avait appelé leur attention sur cette situation ; que la circonstance qu’ils aient alors obtenu un permis de construire délivré au nom de l’Etat ne saurait en toute hypothèse être par elle-même de nature à les exonérer…des conséquences de l’imprudence qu’ils ont commise ” ; - C.A.A. de Paris, 17 mai 1994 (Société d’importation de pharmaciens réunis, n°92PA01030) et C.A.A. de Nancy, 6 août 1996 (Ministre de l’équipement, des transports et du tourisme, n°94NNC01354) : construction sans précautions suffisantes sur un site à risque alors que la victime avait déjà connu de semblables inondations. Le juge se réfère parfois même à une imprudence fautive de la victime (1 arrêt du Conseil d’Etat) : - C.E., 17 novembre 1982 (Communauté urbaine de Lyon, n°17.712) : “ la société…avait demandé le permis de construire…et connaissait ainsi les vices du gros-œuvre qui affaiblissaient la protection du sous-sol contre les dégâts des eaux ; que par suite, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé…que sa responsabilité devait, pour partie, être retenues en raison de l’imprudence fautive qu’elle avait commise en aménageant le sous-sol… ”. Il y a ensuite les décisions dans lesquelles le juge administratif fait état de négligence des victimes (2 arrêts du Conseil d’Etat) : C.E., 29 avril 1983 (Ministre des transports c/Société “ Les maïseries du Nord, n°22.893), “ compte tenu de la négligence de ladite société, qui a omis de se protéger…des inondations… ” ; C.E., 16 novembre 1983 (Ville de Marseille c/Société COPROMAR et autres, n°18.225). Il y a aussi les hypothèses où le juge administratif ne qualifie pas précisément l’attitude de la victime (11 arrêts du Conseil d’Etat), ainsi : - C.E., 9 juin 1982 (Préfet de la Seine-Saint-Denis, n°23.625) : “ la société…a, elle aussi, engagé sa responsabilité en ne prenant pas les précautions nécessaires, alors qu’elle entreposait dans son sous-sol un matériel coûteux et des stocks avariables ” ; - C.E., 6 mai 1983 (Commune de Vitrolles-Société provençale d’équipement c/ Société CODIP, n°7.488) : “ Considérant, toutefois, que lesdits dommages ont été aggravés par la situation particulière des installations de la société…qui se trouvent en contrebas…du remblais de la voie ferrée…et dans l’angle que forment ces deux voies et qui ont été réalisées sans qu’aucune précaution particulière…fût prise pour éviter des inondations que la topographie des lieux rendait prévisibles ; qu’il sera fait une juste appréciation du 198 rôle joué par cette situation dans le préjudice subi par la Société…en laissant à celle-ci un tiers de la responsabilité dudit préjudice ” ; Et un arrêt de Cour administrative d’appel : C.A.A. de Nancy (M. Riter, n°89NC00750) : “ l’implantation de l’habitation…dont le sous-sol est situé en dessous du niveau de la canalisation…est constitutive d’un fait de la victime de nature à décharger partiellement les communes concernées de leur responsabilité ”. On trouve enfin les arrêts dans lesquels le juge fait état d’une faute commise par la victime (29 décisions du Conseil d’Etat) : - C.E., 17 décembre 1982 (Commune de Béthune-Syndicat intercommunal d’assainissement de l’agglomération de Béthune, n°25.223) : “ M. Henocque a, dans les circonstances de l’affaire, commis une faute en entreposant, sans prendre aucune précaution particulière, des objets de valeur et de collection dans le sous-sol… ” ; - C.E., 28 janvier 1987, M. Torgano c/Commune de Chassagne-Montrach ; - C.E., 16 novembre 1988, Ville de Rennes c/Epoux Hervault, 61.589) : “ la maison des Epoux…est située dans une zone classée inondable au POS…qu’en raison des fautes commise par les Epoux…en plaçant des matériels dans des lieux exposés aux inondations, il y a lieu de laisser à leur charge les deux tiers des conséquences dommageables de l’inondation ” ; - C.E., 5 octobre 1990, Ville de Rennes c/Epoux Salmon, n°62.274 ; Des arrêts de Cour administrative d’appel : - C.A.A. de Lyon, 9 juillet 1990 (n°89LY00737) “ les bâtiments en cause comportaient des sous-sols situés à un niveau inférieur à celui du lit du Chardonnet, sans qu’aucune précaution ait été prise pour parer aux conséquences d’un débordement de ce torrent ; que cette circonstance constitue une faute des victimes de nature à atténuer la responsabilité de l’Etat et de la commune ” ; - C.A.A. de Nancy, 14 décembre 1995, District de l’agglomération nancéienne. Certains juges sont même allés jusqu’à reconnaître un partage de responsabilité entre une personne publique et les victimes d’une inondation en raison de la situation des terrains sur lequel il y avait eu construction. Ainsi, la Cour administrative d’appel de Paris indique “ aucune faute ne peut dès lors être reprochée aux victimes des inondations ; que toutefois, en raison de la configuration des terrains et de leur nature, de l’augmentation importante des quantités annuelles de pluies à partir de 1977 et de la remontée de la nappe phréatique, il y a lieu…de laisser une part des conséquences dommageables de ces inondations à la charge des propriétaires ” (30 avril 1992, Syndicat intercommunal pour l’aménagement hydraulique des vallées du Croult et du Petit Rosne, n°90PA00530). Le juge administratif sanctionne également la victime lorsqu’elle a édifié une construction en méconnaissance de textes prévoyant le risque d’inondation. Telle est l’analyse de la Cour administrative d’appel de Bordeaux, en raison de la situation naturellement exposée des parcelles de l’intéressé qui se trouvent dans une zone classée inondable par un décret du 25 septembre 1964, les dommages causés ne peuvent être imputés de façon certaine et directe à la présence de la route départementale (9 juin 1992, 199 Département des Pyrénées orientales c/M Prim ) ; lire aussi T.A. de Montpellier, 18 décembre 1996 (MAIF c/Commune de Saint Jean Pla de Corts) : l’intéressé a construit un garage de plus de 20 mètres carrés sans permis de construire dans une zone inondable classée non constructible, ce qui a contribué à l’aggravation du dommage et constitue une faute de sa part atténuant la responsabilité de la puissance publique. La victime peut aussi ne pas avoir suffisamment pris en compte les documents existants comme le démontre l’arrêt du Conseil d’Etat du 28 février 1986 (Commune du Vernet c/Groupement français d’assurance, assureur de M. Bessières, n°42.258) : - “ l’implantation du terrain de camping municipal de la commune du Vernet dans la zone inondable B délimitée le long du cours de l’Ariège, c’est à dire sur des terrains exposées aux seules crues les plus importantes mais où aucun travail de défense contre les eaux n’est autorisé, sans que des précautions efficaces puissent être prises pour l’évacuation rapide des installations en cas de besoin…il ne résulte pas de l’instruction que le tribunal administratif de Toulouse ait fait une appréciation insuffisante de la part de responsabilité incombant à M Lucien Bessières pour avoir laissé en permanence sa caravane à un tel emplacement sans prendre de précautions alors qu’il ne pouvait ignorer les risques encourus… ”. Ainsi, les exemples jurisprudentiels, par lesquels le juge administratif attribue une part de responsabilité aux victimes des inondations en raison de leur connaissance du risque ou de leur attitude, sont nombreux. Dès lors, chaque partie prenante dans une construction, celle qui l’autorise d’une part et celles qui en bénéficient d’autre part, doivent faire particulièrement attention aux risques naturels telles des inondations et être ainsi très vigilantes. 200 C. En droit pénal En droit pénal, le principe est que la connaissance du risque encouru par la victime et l'acceptation de ce risque par celle-ci ne constitue pas un fait justificatif. En effet, "l'essence même du droit pénal exclut de pouvoir faire du consentement de la victime une cause de justification de l'infraction : dès lors qu'il s'agit, par définition, de protéger l'intérêt général contre des atteintes portées à des valeurs considérées comme fondamentales, l'opinion de la victime est vouée à être indifférente, qui ne représente que son intérêt personnel. Comment admettre que la victime puisse par son comportement paralyser l'application de la loi pénale, par nature d'ordre public ?"300. Ainsi, à supposer que soient déclenchées des poursuites pour homicide ou blessures involontaires suite à une inondation, le fait que les victimes connaissaient le risque et l'avaient accepté ne saurait constituer une cause d'exonération du prévenu dès lors que l'infraction est caractérisée. En effet, seul les agissements du prévenu seront appréciés par le juge et ceci indépendamment du comportement de la victime. On peut se poser la question de savoir si la faute de la victime est susceptible d'avoir une influence sur le lien de causalité entre la faute d'imprudence du prévenu et le dommage corporel subi par la victime. On pourrait envisager que le lien de causalité soit affecté par l'attitude de la victime mais à la condition que celle-ci soit la cause exclusive du dommage, ce qui bien évidemment supprime le lien de causalité, ou encore qu'elle soit constitutive de force majeure. En se plaçant dans l'hypothèse où un maire est poursuivi pour une infraction d'imprudence dans le cadre de ses fonctions il est fort peu probable que l'acceptation, et encore moins la simple connaissance, des risques par la victime puisse minimiser la faute pénale de l'élu dès lors qu'elle est établie. 300 P. CONTE et P. MAISTRE du CHAMBON, Droit pénal général, 3ème éd., 1998, Armand Colin, n° 277 201 Chapitre 2 : L'absence de création de dispositifs de prévention des risques Que se passe-t-il lorsque aucune mesure tendant à prévenir les risques naturels n’a été édictée et que des inondations se sont produites voire se sont répétées à intervalles plus ou moins réguliers ? Une telle situation n’a rien d’exceptionnel de nos jours même si l’élaboration de Plans de Prévention des Risques naturels prévisibles (consacrés par la loi du 2 février 1995), ayant pour finalité de prévenir les risques notamment par des mesures d’interdiction de construction d’aménagement ou d’exploitation, devrait s’accentuer au fil des années. D’autant que des phénomènes d’inondations plus ou moins répétés obligent ou obligeront les pouvoirs publics, plus précisément les préfets, à tirer toutes les conséquences de ces situations en décidant justement l’élaboration de ces Plans afin de prévenir de nouvelles inondations. Seule la responsabilité de certaines personnes publiques peut être recherchée en raison de carences dans l'édiction des documents de prévention des risques naturels ; le juge civil est dès lors incompétent et il ne saurait intervenir. Deux types d'actions en responsabilité peuvent être envisagés en raison d’une absence d’élaboration de documents à risques : une action en responsabilité administrative contre l’Etat, ce qui n'exclut pas une mise en cause éventuelle de communes (§1er) et éventuellement une action en responsabilité pénale laquelle ne saurait toutefois être dirigée contre l'Etat (§2). §1 : La diversité des personnes publiques potentiellement responsables L'Etat, au premier chef, peut voir sa responsabilité recherchée en raison d'une absence d'élaboration des documents à risques (A). Mais, les communes ne sont pas à l'abri d'une action en réparation en raison de leur retard voire de leur absence de réaction dans la délimitation de zones à risques ou de prise en compte des documents dont le respect s'impose à elles (B). A) La responsabilité de l'Etat pour ses carences dans l'élaboration de documents à risques Comme le souligne Bernard Godbillon301 “ Il convient de se demander qui est responsable en cas de dommage en matière d’urbanisme et d’absence de P.P.R. ou de documents en tenant lieu. Les collectivités locales sont effectivement largement tributaires de l’Etat pour la définition de ces zones de risques naturels, tant il est vrai qu’elles ne disposent pas des moyens et des services techniques leur permettant de définir avec toute la précision souhaitable l’étendue des zones soumises à protection et la nature des sujétions susceptibles d’être imposées aux propriétaires ”. Or, la responsabilité de l’Etat peut être engagée au titre des compétences qu’il détient en vertu de la loi du 13 juillet 1982 puisqu’il a le pouvoir de constater l’état de catastrophe naturelle mais aussi de délimiter les zones à risques. Si aucun risque n’existe au jour de la délivrance de l’autorisation, naturellement, à la suite d’inondations aucune action en responsabilité pour non-délimitation de zones à risque ne pourra aboutir. B. GODBILLON, “ L'autorisation de construire et le risque naturel, Le devoir de vigilance en droit de l'urbanisme ”, A.J.DI., 10 septembre 1999, p. 768 301 202 Le défaut ou le retard dans l’élaboration des documents à risques et donc dans la délimitation des zones inondables, ne peut pas engager la responsabilité sans faute de l'Etat (C.E., 27 juillet 1979, Blanc : un retard est constaté). Dès lors, cette responsabilité sera enclenchée sur le terrain de la faute et plus précisément de la faute simple. Mais, selon Erwan Le Cornec “ Il n’est toutefois pas impossible que cette [solution] s’infléchisse sous l’empire actuel des P.P.R. En effet, la délimitation des anciens périmètres de risques de l’article R.1113 était beaucoup plus facile et légère que celle qui, désormais, consiste à approuver un P.P.R. Le juge pourrait se montrer moins exigeant quant à l’admission de la faute ”302. En vertu de l’article 40-1 de la loi du 22 juillet 1987 modifiée par la loi du 2 février 1995, “ L’Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations ”303. Au regard de la législation existante avant l’intervention de la loi Barnier, le juge administratif avait indiqué que le préfet était l’auteur d’une faute dès lors qu’il n’avait pas employé la procédure permettant de délimiter les zones à risque au titre de l’article R 111-3 du Code de l’urbanisme. - C.E., 22 février 1989, n°82298, Ministère de l’équipement c/Epoux Faure Margerit, Blanc et Chaldival, "aux dates où ont été instruites les demandes de permis de construire le préfet… n’avait pas mis en œuvre la procédure de délimitation des zones exposées aux risques naturels ; qu’il ressort de l’instruction que ce secteur ne pouvait être regardé à l’époque comme exempt de risques d’inondation et que, les propriétés en cause étaient susceptibles d’être atteintes par des eaux courantes aussi bien que par des eaux mortes ; l’abstention du préfet, qui a eu pour effet de ne pas mettre l’administration en mesure d’apprécier la réalité du risque d’inondation lorsqu’ont été délivrés en 1972 les permis de construire, a constitué une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat" ; - C.A.A. de Bordeaux, 8 février 1996, n°95BX00049, Dame Miquel, " à la date à laquelle la demande de permis de construire présentée…a été instruite, le préfet des PyrénéesOrientales n’avait pas mis en œuvre la procédure de délimitation des zones exposées aux risques d’inondation, notamment dans la Commune de Fourques, alors qu’il ne pouvait ignorer le caractère capricieux du Réart révélé par les inondations provoquées par ses crues de 1898, 1940, 1965, 1971 et 1982. Qu’ainsi l’abstention du préfet a constitué une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat dans la survenance des dommages litigieux ". Ainsi, jusqu'à l'abrogation de l'article R. 111-3 du Code de l'urbanisme par le décret n°951089 du 5 octobre 1995, cette disposition réglementaire permettait la mise en œuvre d'action en responsabilité pour carences dans la délimitation de zones à risques. Dès lors, "un retard, une lenteur ou une inertie imputables à l'Etat…dans la délimitation des zones à risques…étaient bien constitutifs de fautes, dans la mesure où ils ne mettent pas l'autorité chargée de délivrer les permis de construire en mesure d'apprécier l'importance et la réalité du risque éventuel, lorsque était sollicité un permis de construire dans la zone concernée" 304. Selon Jean- Pierre Desmouveaux, "Les carences de l'Etat dans l'élaboration des plans de prévention des risques naturels majeurs ne devraient pas donner lieu à une jurisprudence sensiblement différente de celle à laquelle avait donné lieu l'article R 111-3 du Code de l'urbanisme"305. 302 loc. cit, p. 6 art. L. 562-1 du Code de l’Environnement 304 "Responsabilité en matière d'environnement", Juris classeur, environnement, fascicule 1078, p. 17. 305 Idem. 303 203 Depuis l’entrée en vigueur de la loi de 1995, le juge administratif réalise, sur le zonage des PPR, un contrôle restreint 306. Ainsi, - C.A.A. de Nantes, M. Etienne Millet, 29 décembre 2000, n°98NT02099 : "ni les conclusions de ces études, qui se bornent, d'une part, à admette que ce secteur est actuellement stabilisé et que son exploitation en terrain de camping ne pose pas de problème et, d'autre part, à qualifier le tracé des limites de la zone litigieuse d'approximatif et discutable, ni la circonstance que le tracé correspondrait à peu près à une courbe de niveau, ne sont, à elles seules, de nature à établir que ce tracé est entaché d'une inexactitude matérielle ou d'une erreur manifeste d'appréciation". On peut imaginer que le juge administratif estimera constitutive d’une faute l’abstention du préfet n’ayant pas entrepris l’élaboration d’un P.P.R. et que la mise en place tardive d’un P.P.R. ouvre droit à réparation à l’égard des victimes d’une catastrophe naturelle. Au-delà, comme l'écrit Norbert Caldéraro, "Considérée comme une servitude d'utilité publique, la servitude instituée par un plan de prévention des risques naturels ne peut donner lieu à indemnisation que si le propriétaire supporte une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi et le respect des principes généraux de prévention et d'action préventive"307. Le caractère relativement récent des PPR explique qu’il y ait peu de jurisprudences les concernant, en tout cas au niveau des Cours administratives d’appel et du Conseil d’Etat. Ainsi, à notre connaissance, ce dernier n’a pas, jusqu’à présent, été amené à connaître d’un contentieux lié aux PPR. En revanche, la Cour administrative d’appel de Marseille a dû statuer sur ce thème. Elle a ainsi jugé : - “ que le préfet ne saurait se prévaloir de la méconnaissance par le permis de construire délivré le 23 octobre 1995 d’un PPR en cours d’élaboration, définissant la zone d’implantation du terrain appartenant à la SCI comme zone exposée à des risques de mouvement de terrain de grande ampleur ” (C.A.A. de Marseille, 16 juin 1998, SCI La Crestarelle, n°97MA01070). Puis dans une autre affaire, elle indique : - “ l’implantation du bâtiment…que M. Barran projetait de construire et par lequel il a déposé le 1er avril 1996 une demande de permis de construire…était prévue…dans une zone exposée à un risque important d’inondation…que la commune ne justifie pas que son maire aurait imposé des prescriptions susceptibles d’atténuer dans des proportions suffisantes le risque auquel l’établissement…serait ainsi exposé ; que par suite, le maire…en délivrant le permis de construire litigieux, a entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation au regard des exigences de l’article R.111-2 du Code de l’urbanisme ” (C.A.A. de Marseille, Commune de Corte, 29 mai 1999, n° MA00858). Ainsi, il s’agit dans le premier cas d’une affaire liée à l’opposabilité d’un PPR en cours d’élaboration. Dès lors, jusqu’à présent, le juge administratif n’a pas été amené à se prononcer sur l’absence d’un PPR délimitant une zone à risques alors, qu'une inondation s'est, depuis, produite. Le Tribunal administratif de Nice, au regard des principes de précaution et de prévention des risques naturels a précisé que G. PELLISSIER, “ Le contrôle juridictionnel du contenu d’un P.P.R. ”, Conclusions sur TA Lille, 23 avril 2001, P.A., n° 174, 31 août 2001, 6 307 "Le juge administratif et les risques naturels", R.F.D.A. 2001, p. 895 et s., p. 899. 306 204 - " le préfet doit édicter sans délai et sans attendre la réalisation de travaux publics de prévention et de sauvegarde de la compétence des collectivités territoriales, un plan de prévention des risques naturels pour assurer un niveau élevé de sécurité publique" (TA de Nice, 7 avril 2000, Groupement agricole d'exploitation en commun de La Levade et autres, n°99-1285)308. B) La responsabilité éventuelle des communes pour un retard, une inertie dans la délimitation de zones de risques ou du fait de l’absence de prise en compte de documents s'imposant à elles tels des PPR Les communes ont des compétences en matière d’aménagement du sol mais aussi dans le domaine de la police administrative en application de ce que prévoit le Code général des collectivités territoriales309 . Or, de ce dernier point de vue, l’absence d’intervention par le biais de mesures de police tendant à prévenir des risques naturels peut permettre d’engager la responsabilité de la commune inactive dès lors qu’un préjudice, un comportement fautif et un lien de causalité existent. Au surplus, “ on peut se demander si le fait de ne pas prévoir de règles limitant ou interdisant certaines occupations ou utilisations du sol dans les POS ou les documents en tenant lieu ne devrait pas entraîner de la même façon que pour l’Etat la responsabilité administrative des communes…On peut en effet envisager assez nettement le cas où un conseil municipal aurait omis de définir une inconstructibilité dans une zone exposée à des risques naturels ou bien encore édicté des règles insuffisantes pour prévenir ces risques. On ne voit pas pourquoi l’Etat serait seul responsable de ses carences dans l’élaboration de documents réglementaires spécifiques (au premier titre desquels les PPR) alors…que les documents de droit commun sont d’abord ceux que les communes élaborent désormais (les POS ou les documents en tenant lieu)… ”310. Or, différents documents édictés en matière de droit de l'urbanisme, en principe par des communes, peuvent concerner le risque inondation et la prévention de celui-ci parmi lesquels : les schémas de cohérence territoriale (remplaçant les schémas directeurs en application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain du 13 décembre 2000), les plans locaux d'urbanisme (se substituant aux POS conformément à cette même loi), les plans d'aménagement de zone. Ainsi, comme l'écrit Béatrice Hagège, "Bien que la répartition des compétences soit complexe et relève pour une large part du domaine de l'Etat, notre droit créé toute une série de techniques qui permettent de faire des documents d'urbanisme décentralisés des outils de protection et de prévention efficaces contre les risques"311. En ce qui concerne en premier lieu les Schémas directeurs, devenus schémas de cohérence territoriale, l’ancien article L.122-1 du Code de l’urbanisme énonce : - “ Les schémas directeurs fixent les orientations fondamentales de l’aménagement des territoires intéressés…Ils prennent en considération l’existence de risques naturels prévisibles ”. 308 Idem. Article 2212-2 5° : La police municipale a notamment pour but “ de prévenir, par des précautions convenables et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux…tels que…les inondations ”. 310 E. LE CORNEC, op. cit., p. 7 311 "L'encadrement juridique du concept de prévention des risques naturels majeurs, la finalité préventive de la réglementation", Droit de l'environnement, avril 2000, p. 77 et s., p. 79. 309 205 Son contenu est repris par le nouvel article L122-1 qui confirme que les schémas de cohérence territoriale définissent les objectifs à atteindre dans les matières qui concourent à un meilleur aménagement et fonctionnement de l’agglomération telle la prévention des risques. Le nouveau dispositif les concernant s’applique depuis le 1 er janvier 2002. Au-delà, l’ancien article L.122-27 du Code de l’urbanisme indiquait que les POS et les ZAC notamment devaient être compatibles avec les schémas directeurs alors que ceux-ci n’étaient pas opposables directement aux autorisations d’occupation des sols. La loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain maintient cette obligation de compatibilité pour les Plans locaux d’urbanisme notamment mais l’étend aux programmes locaux de l’habitat et aux autorisations d’exploitation commerciale. (article L 122-1 dernier alinéa). Dès lors, l'exigence de compatibilité implique une absence de contrariété majeure de ces documents par rapport aux schémas de cohérence territoriale et aux schémas de secteur. C'est le juge administratif saisi qui sanctionnera une telle contrariété en déclarant l'acte contesté illégal, ce qui ouvrira la possibilité d'une indemnisation de cette illégalité fautive. L'"obligation de compatibilité exclut toute contradiction véritable entre le plan local d'urbanisme et les orientations du schéma, ce qui limite la marge de manœuvre des communes, tant au niveau du zonage proposé qu'à celui de la délivrance des autorisations de construire lorsque des risques majeurs sont soulignés par le schéma"312. Le Tribunal administratif de Nice en 1996 a jugé illégal un schéma directeur parce qu’il ne tenait pas compte du risque inondation : - “ divers secteurs de l’agglomération…sont situés dans des zones soumises à des risques naturels d’inondation ; qu’en ne faisant apparaître aucun espace à protéger en raison de l’existence de risques naturels d’inondation prévisibles et en classant d’ores et déjà la plupart desdits secteurs en zone d’urbanisation structurée où est autorisé l’habitat collectif sous la seule réserve que les aménagements envisagés devaient prendre en compte les incidences des crues centennales, alors que les études nécessaires pour préciser l’incidence des risques et ouvrages de nature à y pallier n’étaient pas réalisés, le schéma directeur est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation ” ( TA. de Nice, 6 mars 1996, n°94533, Comité de sauvegarde du Port Vauban et autres). Ainsi, le juge administratif peut invalider un schéma directeur qui ne contient pas d’éléments suffisants permettant de prévenir une inondation, en exerçant sur son contenu un contrôle restreint. La constatation d'une illégalité rend, dès lors, possible une action en responsabilité contre l'auteur de l'acte. En deuxième lieu, l’élaboration de plans d’aménagement de zones concertés qui tiennent lieu de POS dans les périmètres des ZAC doit conduire à prendre en compte le risque inondation sous peine d’une illégalité prononcée par le juge administratif : - TA. de Paris, 30 juin 1994, Association de sauvegarde du cadre de vie perreuxien : “ il ressort des pièces du dossier que l’article ZV1 du règlement de PAZ, qui constitue un document d’urbanisme…autorise la construction de bâtiments d’intérêt public ou d’accueil recevant le public…dans la zone inondable A du plan des servitudes de la ZAC ; que le même règlement prévoit dans la zone B inondable dudit plan la construction de bureaux et logements comportant des parkings souterrains ; que, pour réduire le risque d’inondations, il est prévu un remblaiement desdites zones interdit par le POS précédemment en vigueur, qu’en n’assortissant aucune sujétion sérieuse les dispositions qu’il institue, le PAZ de la ZAC interdépartementale du canal méconnaît les dispositions précitées de l’article L.121-10 ”. 312 "L'encadrement juridique du concept de prévention des risques naturels majeurs, la finalité préventive de la réglementation", Droit de l'environnement, op. cit., p. 81. 206 Le juge administratif retient un contrôle restreint sur la décision de création d'une zone d'aménagement concerté et la délimitation de cette zone, ce qui ouvre droit à réparation dans l'hypothèse d'une illégalité. La loi sur la solidarité et le renouvellement urbain en 2000 attribue le soin de fixer les règles d'occupation du sol à l'intérieur des ZAC aux seuls plans locaux d'urbanisme. Pour ce qui est des Plans Locaux d’Urbanisme, en troisième lieu, l’ancien article L.123-1 du Code de l’urbanisme précisait “ Les Plans d’occupation des Sols doivent à cette fin, en prenant en compte la préservation de la qualité des paysages et la maîtrise de leur évolution : délimiter des zones urbaines ou à urbaniser prenant notamment en compte…l’existence de risques naturels prévisibles ”. Cette disposition permettait d'intenter une action en responsabilité contre la commune qui n'avait pas pris en compte les risques naturels dans les documents de planification qu'elles avaient édictés notamment. Or, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain ne reprend pas in extenso la formule de l'ancien article L. 123-1. En effet, le nouvel article L. 123-1 se contente de renvoyer à l'article L. 121-1 qui précise que : - "Les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales déterminent les conditions permettant d'assurer…la prévention des risques naturels prévisibles…". Au-delà, la présence d'un POS imposait, jusqu'à la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain, aux autorités en charge de sa rédaction de respecter les projets d'intérêt général mais aussi les plans de prévention des risques (L. 123-1 du Code de l'urbanisme) car le non-respect de cette obligation rendait le plan d'occupation des sols illégal. Cela pouvait aboutir à des délivrances de permis de construire irrégulières. Or la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain supprime l’obligation, existant jusque là, du respect par les Plans Locaux d’Urbanisme des dispositions des Projets d’Intérêt Général et des servitudes d’urbanisme parmi lesquelles on trouve les PPR. Comme l’écrivent MM. Jacquot et Lebreton313,“ la suppression du respect des servitudes d’utilité publique suscite quelques réserves. Certes ces servitudes conservent leurs effets propres sur les autorisations d’urbanisme, comme le permis de construire…et le plan local d’urbanisme demeure tenu dans donner information…Mais s’il va sans dire que la commune a tout intérêt à veiller à l’adéquation de son plan local d’urbanisme avec ces servitudes, n’aurait-il pas été préférable de continuer à prescrire cette adéquation, pour éviter des contradictions toujours possibles…d’autant que certaines de ces servitudes ont été conçues pour être intégrées par le plan (c’est le cas par exemple de celles qui, comme les plan de prévention des risques naturels prévisibles, comportent un véritable zonage ”). En tout état de cause, comme les plans de prévention des risques notamment sont des servitudes d’utilité publique, ils s’imposent aux autorisations d’utilisation des sols qui doivent, dès lors, les respecter, et si tel n'est pas le cas, elles pourront être déférées au juge administratif afin qu’il les déclare illégales, ce qui ouvrira alors droit à une indemnisation puisqu’en principe toute illégalité est fautive et permet ainsi une réparation du préjudice qu’elle cause. 313 JACQUOT et LEBRETON, La refonte de la planification urbaine, A.J.D.A., 2001, p.27 et s., p. 36 207 §2 : L'absence de création de dispositifs, une responsabilité pénale potentielle ? Nous n'avons actuellement pas connaissance d'action pénale engagée contre le représentant d'une collectivité publique suite à sa carence dans l'élaboration des documents à risques. Ainsi que le souligne Abdelkhaled Berradanen, "l'obligation de prévention des catastrophes et risques naturels paraît indéterminée. En effet, si son existence est certaine, sa consistance demeure cependant incertaine"314. Faute d'incrimination, l'élaboration d'un PPR n'est pas une obligation déterminée dont le non-respect constitue en elle-même une infraction pénale. Ne reste plus que l'hypothèse d'éventuelles poursuites pour homicide ou blessures involontaires lorsqu'une inondation mortelle a lieu alors que le permis de construire a été délivré en l'absence de délimitation des zones à risques par l'Etat, un partage de responsabilité pourrait alors être opéré entre le maire et le préfet 315 et il semble bien que les poursuites puissent être davantage dirigées à l'encontre des préfets que des maires. En effet, dans les textes le maire apparaît dépossédé de prérogatives essentielles en matière de police au profit du préfet même si la responsabilité du maire n'est pas exclue pour autant. Car on peut se demander avec le doyen Jean Viret ce qui reste des pouvoirs de police du maire lorsque le territoire d'une commune est inclus dans le périmètre d'un PPR 316. Dans l'hypothèse où une catastrophe de grande ampleur mettrait en évidence la carence du préfet dans la création de dispositifs de prévention, les sinistrés pourraient être tentés de recourir à la justice pénale. 314 A. BERRAMDANE, "L'obligation de prévention des catastrophes et risques naturels", loc. cit. V. S. CANADAS-BLANC, La responsabilité pénale des Elus locaux, Thèse Toulouse I, Ed. Johanet, 1999, préface G. ROUJOU de BOUBEE 316 J. VIRET, "La refonte des plans de prévention des risques naturels", Droit de l'environnement, février 1996, n° 35, 17 315 208 CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE Bien que la prévention soit expressément visée par la loi du 13 juillet 1982 relative à l’indemnisation des effets des catastrophes naturelles c’est essentiellement l’aspect “ indemnisation ” qui a prévalu. Les PPR créés par la loi Barnier du 2 février 1995 ainsi que la modulation des franchises introduite par les arrêtés du 5 septembre 2000 visent à mettre davantage l’accent sur la prévention. Ces dernières mesures ont déjà provoqué des réactions et il est permis d’espérer que le couplage “ indemnisation-prévention ” fonctionnera mieux à l’avenir. Les maires se montrent très sensibles au risque inondation et particulièrement demandeurs d’information. De nombreuses communes ont modifié les règles d’urbanisme en classant les zones à risques en zones non constructibles et ont procédé à des travaux qui s’inscrivent dans une démarche préventive. Afin d’éviter que leurs administrés se voient appliquer une franchise majorée, des maires souhaitent l’élaboration d’un PPR mais se heurtent parfois à l’inertie de l’Etat. Outre le rôle du législateur, des pouvoirs publics et des assureurs en matière de prévention, il convient de ne pas négliger l’influence du juge. Ainsi, la méconnaissance volontaire des risques et dispositifs de prévention est source de responsabilité civile, administrative et pénale. La décision de justice qui sanctionne l’absence de prise en considération du risque inondation a une vertu pédagogique et participe dès lors à l’essor de la prévention. Il en est notamment ainsi de l’arrêt rendu le 31 janvier 2001 par la chambre criminelle de la Cour de cassation confirmant la condamnation pour mise en danger d’autrui d’un prévenu ayant méconnu l’interdiction qui lui avait été faite d’exercer ses activités sur des terres classées en zone de risque grave d’inondation. La méconnaissance du risque, notamment le fait de construire ou d'aménager un terrain dans une zone interdite par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, est pénalement sanctionnée. Il faut pourtant déplorer que les personnes morales ne puissent être poursuivies faute de texte spécifique. La responsabilité des personnes morales ne pourra donc être retenue que pour des infractions d’imprudence avec une importante exclusion pour les collectivités territoriales. La méconnaissance volontaire du risque est également constitutive d’une faute de la victime dont le juge civil et le juge administratif tiendront compte pour réduire ou exclure son droit à réparation. Se pose en dernier lieu la question des responsabilités encourues par les personnes publiques en raison de leur carence dans l’élaboration des documents de prévention des risques naturels. Ici, le juge civil est incompétent, le champ d’action du juge pénal limité. C’est donc essentiellement au juge administratif qu’il appartient de sanctionner l’abstention fautive du décideur public. 209 CONCLUSION GENERALE Si la grande inondation, manifestation du châtiment de Dieu envers les hommes par le déluge dura 40 jours, la recherche initiée par le Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement, confiée au CERDACC et consacrée à l’interaction en matière d’inondation, des notions de responsabilités et de force majeure, se sera finalement inscrit dans un échéancier plus confortable. Il faut dire que le champ à couvrir, et à découvrir au sens propre, s’est révélé à l’usage pour l’équipe de recherche, vaste, profond et multiforme. Ces constats n’étaient certes pas imprévisibles, et il eut été paradoxal, vu la thématique retenue, qu’il en soit autrement et néanmoins cet aspect mérite d’être souligné car le résultat qui est ainsi livré se révèle finalement particulièrement riche comme le lecteur ne manquera sans doute pas de s’en apercevoir. Il est désormais possible d’avoir une vue quasi exhaustive de l’appréhension par la justice civile, pénale et administrative, de la notion de force majeure en situation d’inondation. La notion de force majeure elle-même n’étant en l’état retenue que de façon faible ou marginale. De même, la très forte participation des décideurs publics locaux au retour d’informations au travers du questionnaire d’enquête, est à la fois la marque indéniable d’une préoccupation mais aussi un signe fort et encourageant par rapport à l’utilité de la démarche. Il sera sans doute utile de s’en souvenir pour prolonger le présent rapport par des propositions opérationnelles in concreto permettant de s’appliquer au plus près du terrain. Enfin, ici comme ailleurs, c’est bien la diversité des outils d’intervention, qu’il s’agisse de la pédagogie des décisions judiciaires à vocation exemplaire, pour peu qu’elles soient diffusées au-delà des cercles des initiés, des ajustements des outils législatifs, combinés avec les retours d’expérience, qui peut espérer permettre d’aller vers plus de prévention du risque inondation. Reste à souhaiter que ce rapport soit utilisé comme une source vive et non pas précieusement remisé pour lui permettre de mûrir… 210 ANNEXES Code de l'Environnement Article L. 562-1 relatif à l'élaboration des PPR I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones et indique les objectifs du plan. II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° ; 3° De définir les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences, ainsi que celles qui peuvent incomber aux particuliers ; 4° De définir, dans les zones mentionnées au 1° et au 2°, les mesures relatives à l'aménagement, l'utilisation ou l'exploitation des constructions, des ouvrages, des espaces mis en culture ou plantés existants à la date de l'approbation du plan qui doivent être prises par les propriétaires, exploitants ou utilisateurs. III. - La réalisation des mesures prévues aux 3° et 4° du II peut être rendue obligatoire en fonction de la nature et de l'intensité du risque dans un délai de cinq ans, pouvant être réduit en cas d'urgence. A défaut de mise en conformité dans le délai prescrit, le préfet peut, après mise en demeure non suivie d'effet, ordonner la réalisation de ces mesures aux frais du propriétaire, de l'exploitant ou de l'utilisateur. IV. - Les mesures de prévention prévues aux 3° et 4° du II, concernant les terrains boisés, lorsqu'elles imposent des règles de gestion et d'exploitation forestière ou la réalisation de travaux de prévention concernant les espaces boisés mis à la charge des propriétaires et exploitants forestiers, publics ou privés, sont prises conformément aux dispositions du titre II du livre III et du livre IV du code forestier. V. - Les travaux de prévention imposés en application du 4° du II à des biens construits ou aménagés conformément aux dispositions du code de l'urbanisme avant l'approbation du plan et mis à la charge des propriétaires, exploitants ou utilisateurs ne peuvent porter que sur des aménagements limités. 211 TABLEAU DE JURISPRUDENCE EN DROIT CIVIL Risques naturels et Force majeure -Arrêté cat’nat Motiv Motivation -Force dernière décision majeure (dernière décision) Chambéry, Bonneville, Glissement de Victimes/ / Commune gardienne du 24 novembre11 janvier 1978 terrain ayant Commune de oui, mais terrain, responsabilité 1980 emporté un Passy partage sur 1384 al. 1 mais sanatorium, 71 de causalité "s'exonère à concurrence morts de moitié, par l'existence de circonstances météorologiques exceptionnelles" Paris, Vent Propriétaire / Le site de Gravelin 6 mars 1981 133, 3 km/h immeuble/ Non classé dans la région II Gardien grue correspond à des vitesses abattue sur normales de vent par l'immeuble mauvais temps de 121,7km/h et à des vitesses extrêmes de 160 km/h. La vitesse de 133,3 km/h correspond à une tempête non exceptionnelle". Responsabilité sur 1384 al. 1 ème Civ. 2 Mer, présence Propriétaire/ / Terrain appartenant à la 21 janvier d’eaux Commune Oui commune 1981 souterraines propriétaire prévisible mais rejet Infiltration fonds voisin irrésistible des eaux exonération commune propriétaire sur 1384 al. 1 Civ. 3ème Angers, Inondation Propriétaire/ / La particularité du 3 juin 1982 2 juillet Architecte Non réseau urbain ne cassation 1979 constitue pas une cause d’exonération Responsabilité de l’architecte ème Civ. 2 Nîmes, Pluies Propriétaire / "attendu que l'arrêt 6 janvier 31 avril exceptionnelle marchandises Oui relève que la hauteur des 1982 1980 s endommagées pluies ininterrompues rejet Crues / constatée à la date et Dommages Propriétaire dans les lieux rapprochés causés par des matériaux du dommage, retient que C. Cassation C. Appel T.G.I Evénement Parties au Récurrence procès 212 matériaux charriés par charriés par la les eaux crue et provenant d'un fonds voisin Paris, 8 janvier 1981 Paris, 22 janvier 1981 Lyon, l'intensité maximum de la crue du ruisseau, qui, généralement réduit à un filet d'eau, s'était transformé en un torrent furieux, avait provoqué le ravinement et les éboulements des rives, et précise, que dans la région des magasins, des caves et des campings avaient été inondés… ; qu'il énonce que l'effet des pluies, d'une abondance anormale, avait été aggravé par la soudaineté et la violence des orages… la Cour d'appel a pu déduire … que les troubles atmosphériques, qui étaient à l'origine de la crue ayant causé le dommage, avaient revêtu un caractère de violence exceptionnelle constitutif de force majeure" Inondation Propriétaire/ / "Les infiltrations Région Constructeur Non, souterraines des eaux ne notoirement Pas pouvant constituer un humide, mare imprévisible phénomène à proximité imprévisible… obligation pour le spécialiste de la construction de procéder à des études particulières" Constructeur entièrement responsable Violent orage, Installateur/ / Obligation de résultat de malfaçons fabricant Non l'installateur de mettre en place un réseau permettant une évacuation normale des eaux pluviales même par orage violent. Action en garantie contre le fournisseur fondée Eboulement Propriétaires / Le glissement "même s'il 213 Com., 13 novembre 1984 rejet 30 juin 1981 de terrain immeuble/ Glissement de Commune de 50.000 m3 de Nantua terrain ayant propriétaire dévalé une du terrain pente à plus ayant glissé de 180km/h Oui, prévisible mais irrésistible n'était pas entièrement imprévisible scientifiquement en raison de la configuration des lieux, constitue néanmoins un événement de force majeure… En effet, il s'agit d'un phénomène naturel et irrésistible, le propriétaire des lieux n'ayant ni les moyens de l'empêcher de se produire, ni ceux d'en prévenir les effets" Exonération propriétaire sur 1384 al. 1 locataire/ / "Le bailleur a bailleur Non l'obligation de faire jouir paisiblement le preneur de la chose loué… il doit être déclaré responsable du préjudice subi par le locataire. L'insuffisance du réseau public d'égouts ne peut constituer un cas de force majeure" Responsabilité du bailleur propriétaire / Exonération de /constructeurs Oui, l’entrepreneur et maître imprévisible, d’œuvre pour cas fortuit irrésistible, mais condamnés pour extérieur violation devoir de conseil Rennes, 4 nov. 1981 Inondation Angers, 7 juin 1982 Inondation Paris, 8 septembre 1982 Vents Propriétaire/ / atteignant la vendeur Oui vitesse de 151 km/h. Serres détruites. Des vents de 90 à 100 sont rarement observés dans la région. "La cour d'appel s'est déterminée moins en raison de l'exceptionnelle violence des éléments dont elle retient seulement qu'elle pouvait être équivalent à la force majeure, qu'en fonction de l'accord intervenu entre les parties et notamment des risques pris par M. H. pour des raisons d'économie…" 214 Paris, 3 déc. 1982 Civ. 3ème, 18 avril 1984 rejet Versailles, Versailles, 30 19 octobre novembre 1982 1982 confirme Civ. 3ème, 28 septembre 1983 rejet Paris (Com.) 11 mai 1983 Fortes pluies, syndicat des caractère copropriétaire exceptionnel s/ des pluies, entrepreneur preuve + rapportée par architecte la direction de la météorologie nationale, chutes de pluies violentes ne se produisant qu'une fois tous les 15 ou 20 ans Neige et Constructeur/ pluie, propriétaire infiltration toiture / Oui / Non, faute du constru cteur Chute de propriétaire/ / neige constructeurs Non, pas exceptionnelle imprévisible, pas de rôle causal Tour Maine Montparnasse, impossibilité pour les locateurs d'ouvrage de prévoir ces précipitations et des collecteurs assez robustes pour de telles pressions Exonération locateurs d’ouvrages, responsabilité de l’architecte "La neige poudreuse passe par les interstices sans que le vent atteigne des vitesses de tempête", faute du constructeur, responsabilité La possibilité de telles perturbations n'est pas imprévisible dans la région. Insuffisance de la charpente. La prétendue force majeure n'était qu'un révélateur de l'insuffisance des travaux, un seul autre hangar avait également souffert de la neige et il était du même constructeur… Responsabilité architecte et entrepreneur Tempête sur Assureur / "Le caractère subit du le port de Sète dommage du Non, déclenchement allégué : vent et propriétaire imprévisibili des forces de la nature pluies des té non n'est pas établi, la Cour Documents marchandises établie d'appel ne pouvant sur services endommagées ce point, se contenter de météo :vents / transporteur l'appréciation pointes de 30, insuffisamment motivée 26 et 28 m/s de l'expert… en les 3 jours définitive, il apparaît que concernés, la gravité des 215 mais pointes comparables d'autres jours Idem pour moyenne des vents et état de la mer Civ. 3ème, 16 janvier 1985 rejet Toulouse, 11 juillet 1983 Civ. 3ème, Poitiers, 13 mai 1986 7 décembre rejet 1983 Civ. 3ème, 4 février 1986 rejet Civ. 3ème 17 décembre 1985 cassation partielle Paris, 14 mars 1984 Paris, 19 avril 1984 Paris, 22 juin 1984 circonstances dont il est excipé, due au cumul des vents, de la mer et des eaux de pluies, ne présentait pas les caractères de la force majeure" Responsabilité du transporteur Vent de Propriétaire/ / Faute de conception à 125/128 km/h. constructeur Non, pas l'origine du sinistre. destruction et sousexceptionnel "d'autre part, les toiture d'un traitant circonstances hangar. atmosphériques n'étaient D'après le pas exceptionnelles le D.T.U.V. la jour du sinistre, la puissance vitesse des vents étant extrême du demeurée inférieure à la vent dans la vitesse extrême prévue région est 137 dans la région" km/h Sécheresse Sous-traitant/ / "Les désordres Glissement de constructeur + Non, provenaient de terrain, propriétaire prévisible fondations inadaptées", dommage responsabilité construction, constructeur et sousargile grise traitant non signalée par soustraitant Inondations Copropriétaire / Absence d’étude du sol, Résurgences s/ Non responsabilité. des prévisibles Architecte architectes Glissement de Constructeur/ Non "Le glissement de terrain terrain propriétaire Non, était parfaitement prévisible prévisible pour un professionnel, sur une terrasse de la vallée de la Marne connue pour l'instabilité du sol", responsabilité constructeur Remontée de SOCOTEC+ / Responsabilité de la nappe constructeurs Non, Socotec sur 1382 pour phréatique, + sousprévisible avoir produit sur un modifications traitants + point essentiel de l'étude sensibles en architecte des erreurs graves, montant ou en /assureur responsabilité descendant maître constructeur et sousdepuis 1850, d'ouvrage traitant sur 1147 et 1792, 216 après baisse de 23 m à 12 m NGF de 1960 à 1969 remontée à 22m en 1972 infiltrations sous-sol parking en 1978 Com. , Aix-enOuragan, Assureur / 12 mai 1987 Provence, Abordage. dommage imprévisible cassation 29 juin 1984 Vent 160 +armateur mais il faut km/h, le vent navire rechercher avait soufflé coulé/armateu irrésistibilité d'ouest et non r navire du nord ce qui abordeur est tout à fait exceptionnel à Marseille pour un vent de cette violence ClermontSécheresse Propriétaire/ Non Ferrand, Constructeur Non, 9 août 1984 prévisible Com., 17 février 1987 rejet Aix-enProvence, 6 septembre 1984 Douai, 12 sept. 1984 Tempête Assureurs de d'une la cargaison/ exceptionnelle transporteur violence, avarie navire, perte d'huile de tournesol et contamination cargaison par eau de mer Orage Constructeur/ exceptionnel Entrepreneur qualifié de (action en force majeure garantie) par le service météorologiqu e Inondation / Oui / Non responsabilité architecte "En statuant ainsi après avoir retenu que le coup de vent était imprévisible et sans préciser si le capitaine aurait pu en maîtriser les effets, la C.A. n'a pas caractérisé la faute du capitaine…" Phénomène qui se reproduit Responsabilité constructeur "Les pertes d'huile provoquées par la détérioration des citernes du navire résultant de la tempête avaient été causées par celle-ci", absence de faute du transporteur "Un orage exceptionnel, reconnu comme cas de force majeure par le service météorologique régional, ne peut exonérer un entrepreneur de sa responsabilité envers le maître de l'ouvrage que s'il constitue la cause exclusive du dommage. Tel n'est pas le cas 217 Paris, 3 oct. 1984 Com., Rouen, 9 novembre 17 janvier 1987 1985 rejet Paris, 22 janvier 1985 Inondation Maître de En dessous de l'ouvrage/ la Locataires précipitation décennale de la région pour 24 h Pas invoqu é Non Vent n'ayant Entreprise/ pas atteint 110 Locataire km/h chapiteau Destruction chapiteau / Non Inondation, remontée de la nappe phréatique Pas invoqu é Non Syndic de copropriété/ Vendeur + constructeurs lorsqu'il est démontré qu'une inondation résulte en grande partie des fautes commises par le locateur d'ouvrage dans l'exécution du système d'évacuation des eaux. Pas cause exclusive du dommage, responsabilité entrepreneur Le trouble de jouissance résulte de la conjonction de circonstances météorologiques défavorables avec des vices de la chose louée, mauvaise implantation des habitations, terrain trop peu surélevé, sous dimensionnement du collecteur d'eaux pluviales, vice de conception dans le système hydrographique du lotissement, insuffisance de pente du collecteur d'eaux usées compte tenu de l'environnement, encombrement et mauvais calibrage du fossé d'évacuation des eaux pluviales… Responsabilité maître de l’ouvrage ; recours possible contre la PM de droit public concepteur La vitesse du vent n'avait pas excédé 110 km/h, la cour d'appel n'avait pas à s'expliquer sur le défaut des montages. Vice de conception des garages souterrains qui n'ont pas été prévus pour être étanches ou résister 218 Paris, 15 février 1985 Paris, 7 mai 1985 Civ. 3ème, 24 février 1988 rejet Chambéry, 25 juin 1985 Paris, 3 juillet 1985 dont le niveau + assureurs est lié à celui de la Seine Cote du fleuve ayant atteint et dépassé 16 fois celle existant au moment de l’inondation Vents : Propriétaire 28m/s (vitesse immeuble dépassant endommagé/ celle de 24,5 Gardien de m/s admise branche par les d'arbre services météo comme constitutive de tempête Orage, rupture Assureur de immeuble/ canalisation architecte + Inondation Constructeur Avalanche, destruction chalets. Avalanches antérieures : 1922, 1931, 1960, 1962, 1966 (mais endroit non classé "zone d'avalanche") Orage Inondation à la pression hydrique ascendante Responsabilité architectes et entrepreneurs / "Il est notoire que la non, pas région concernée n'est imprévisible pas à l'abri des vents soufflants en rafales", responsabilité du gardien de la branche sur 1384 al.1 Non Non Promoteur/ Acquéreurs Non Non, prévisible Syndicat des copropriétaire s/ Constructeurs Pas invoqu é Non L'orage n'était pas la cause directe et immédiate de la rupture de la canalisation Responsabilité architecte et constructeur "Les chalets avaient été édifiés dans l'axe d'un couloir d'avalanche, sans que la délivrance d'un permis de construire puisse avoir d'incidence sur les responsabilités encourues". Vice caché. Vice de conception, pas de caniveaux suffisants, manquement de l'architecte à son obligation d'émettre des observations sur les plans des bureaux d'études, manquement du contrôleur à son obligation d'émettre des réserves Responsabilité bureau 219 Metz, 4 oct. 1985 Bordeaux, 30 octobre 1985 Paris, 8 novembre 1985 Civ. 1ère 19 juillet 1988 cassation Rennes, 19 novembre 1985 Civ. 3ème, Paris, 14 octobre 10 octobre 1987 1985 cassation partielle Amiens, 10 juin 1991 d’études, du contrôleur technique, de l’architecte, entrepreneurs Crue lente et Clients d’une Pas Système de pompage progressive de Banque/ invoqu défectueux, "une la rivière Banquier é banque, qui a manqué à Inondation Non, ni son devoir de diligence des coffres imprévisible, relatif aux biens déposés d’une banque ni irrésistible dans un coffre-fort loué Caractère par les clients, est cyclique des responsable des crues dommages causés par une inondation qui n'était ni imprévisible, ni irrésistible" Responsabilité banquier Inondation Propriétaires/ Pas Les désordres étaient dus Ruisseau à Assureur du invoqu à une crue et pas à un crues rapides Constructeur é vice caché, assureur pas longeant le Oui redevable lotissement Inondation Propriétaire Pas Inondation du fonds Orage violent fonds voisin / invoqu voisin entraînant Glissement du Gardien é l'ensablement de la cour sous-sol Oui, et des établissements, imprévisible l'inondation est et imputable à un violent irrésistible orage entraînant le soussol du terrain du maître de l'ouvrage , pas responsabilité maître de l’ouvrage gardien Neige, Propriétaire Non "L'effondrement ne effondrement pintadeaux/ Non, pas résultait pas d'un du toit d’un Eleveur extérieur phénomène extérieur à poulailler l'activité des époux G., ce qui excluait la cause extérieure", responsabilité contractuelle de l’éleveur Inondation Copropriétaire Non Défaut d’entretien d’une Orage / Non, pas canalisation exceptionnel syndic de imprévisible Responsabilité syndic de ayant copropriété ni copropriété (la Cour de provoqué un irrésistible cassation reprochait à la refoulement Cour d'appel de n'avoir de l'eau des pas répondu aux 220 (cour de renvoi) Civ. 2ème, 7 octobre 1987 Rejet égouts de sorte que le tampon hermétique qui se trouvait sur la canalisation a cédé Orages, crues Propriétaire d'un étang usine/ Usine voisine propriétaire endommagée. étang 66 mm et 26 mm de précipitation le 8 et 10 juillet 1981 soit le double de la normale. Tempête Propriétaire/ =cyclone propriétaire affectant 33 arbres communes déracinés Limoges, 11 février 1986 Civ. 3ème Orléans, 29 juin 1988 19 février rejet 1986 Poitiers, Poitiers Inondation 4 juin 1986 15 mars 1985 Crues Civ. 1ère, 5 juillet 1988 rejet Aix-enProvence, 9 septembre 1986 Civ. 3ème, Nîmes, 2 mars 1988 29 (2 arrêts) septembre rejet 1986 Dijon, Dijon, Propriétaire d’une caravane/ Propriétaire du camping Neige polluée. EDF/ Interruption horticulteurs de courant alimentant le chauffage de serres. Orage, 130 SAFER du mm d'eau Languedocdans la nuit Roussillon/ propriétaires terres agricoles rétrocédées par la SAFER Inondation Propriétaire/ conclusions du syndic quant à l'existence d'un cas de force majeure, la Cour de renvoi confirme l'absence de force majeure) Non Non, pas imprévisible, ni irrésistible "Il n'est pas démontré que ces précipitations fussent absolument exceptionnelles" et "les dispositions pour parer aux conséquences des orages n'avaient pas été prises" Non Oui Véritable cyclone Imprévisible et irrésistible "le sinistre avait pour cause un véritable cyclone affectant 33 communes, déracinant des centaines de chênes parfois très âgés" Le propriétaire du camping avait été averti du risque d’inondation par la mairie, absence de précaution donc Responsabilité propriétaire camping Responsabilité EDF Pas invoqu é Non, Prévisible / Non, pas imprévisible et exceptionnel Oui, calamités agricoles Non, pas imprévisible , ni irrésistible Non "La chute de 130 mm d'eau en une nuit ne présente pas dans une région méditerranéenne un caractère exceptionnel", responsabilité SAFER sur 1148 C.C. Le constructeur qui n'a 221 Civ. 2ème, 10 mars 1988 rejet 15 octobre 31 janvier 1986 1985 confirme Remontée Constructeurs Non nappe phréatique Inondation immeuble situé à côté d'un ruisseau Aix-enProvence, 10 octobre 1986 Pluies Entreprise Oui torrentielles, ayant réduit la Oui crue largeur du lit du torrent par des matériaux/entr eprise inondée Civ. 3ème Paris, Paris, Inondation, 15 juin 1988 30 octobre 12 juin 1985 remontée de Cassation 1986 la nappe phréatique Bordeaux, 16 déc. 1986 confirme Propriétaire/ Pas Constructeur invoqu é Oui pour CA, non pour C.Cass. Bordeaux, Inondation Locataire/ 18 oct. 1984 Orage d'une Bailleur violence exceptionnelle Oui Oui pas mis en œuvre les solutions adaptées à la construction d'un immeuble situé à côté d'une nappe phréatique est responsable des dommages Responsabilité constructeur et lotisseur "Le niveau de l'eau et la force du torrent ont été tels qu'à deux km en amont de la passerelle un mur de protection avait été emporté et que le flot avait charrié divers matériaux qui ont contribué à faire barrage…les précipitations ont dépassé très largement les prévisions et la violence du vent a été irrésistible…l'origine véritable des dommages se trouve… dans l'action violente du torrent et dans l'intensité anormale des pluies…" Exonération sur 1384 C.C. C.A. : remontée due à des facteurs humains économiques sociaux, FM, exonération entrepreneur C. Cass : l’entrepreneur aurait dû se renseigner sur les possibilités de fluctuation du niveau de la nappe phréatique sur une période suffisamment longue "Etant exclus le vice de l'immeuble, la faute du propriétaire, et le caractère de catastrophe naturelle étant reconnu aux circonstances atmosphériques à 222 Civ. 3ème Metz, 31 mai 1989 4 février 2 arrêts 1987 rejet Com., 13 décembre 1988 rejet Bordeaux 24 février 1987 Civ. 2ème, 8 février 1989, rejet Fort-deFrance, 7 mai 1987 Crue, inondation lotissement réalisé à une très faible distance du cours de la Moselle; Seuil d'inondation des cotes du bord de berge de la Moselle : 162,25 NGF à 163,55, crues normales de 163,50, lotissement à 163 NGF Trib. Com. Crue de la Bordeaux, Garonne, 21 sept. 1984 inondation entrepôt Inondation préalable d’autres quartiers, 44 communes sinistrées entrepôt situé au bas d’une colline Cyclone, 2 barges ancrées dans le port furent Constructeur Pas invoqué lotissement/ Non, Propriétaires prévisible Dépositaire entrepôt/ Assureur propriétaire marchandise Propriétaire barges/ propriétaire installations l'origine du trouble de jouissance, c'est à bon droit que le premier juge a constaté que le bailleur était exonéré de toute responsabilité" Exonération bailleur "Caractère prévisible de l'inondation du lotissement par les crues fréquentes de la Moselle", responsabilité constructeur et résolution des ventes / "En raison de leur Non, emplacement et de Pas l'absence imprévisible, d'aménagements pas internes, les hangars où irrésistible, avait été entreposée la pas marchandise étaient, insurmontable indépendamment de la conjonction exceptionnelle de plusieurs éléments naturels… exposés au risque d'inondation… des mesures de protection appropriées eussent permis d'éviter le sinistre", responsabilité dépositaire sur 1927, 1928, 1933 C.C. Non Responsabilité Non, pas propriétaire barges sur irrésistible 1384 al. 1 C.C. 223 Paris 9 juillet 1987 Civ. 3ème Chambéry, 8 mars 1989 30 juillet rejet 1987 Com., 14 novembre Aix-enProvence, 16 projetées, dégâts à des installations. Cyclone d'une violence rarement rencontrée plus d'une fois par siècle, mais seules les queues ont provoqué de graves désordres, vent de 90km/h avec des pointes à 130 Inondation, tiers riverains/ Oui brusque assureur Non, montée des propriétaire prévisible eaux de la branchages Pas rivière, irrésistible obstruction d'une buse d'écoulement par des bois morts et des branchages Survenance normale de crues à cette époque de l’année Glissement de Entrepreneur/ Oui terrain du à propriétaires Non, pas des pluies voisins exceptionnel après aménagement d'une voie d'accès à une propriété, dommages aux propriétés voisines Vent, 30 Propriétaire nœuds, navire navire + endommagean assureur/ / Non, prévisible La qualification de catastrophe naturelle par un arrêté préfectoral est sans incidence sur le litige, la survenance de pluies importantes avec crues à cette époque de l'année et dans cette région étant normale. Pas exonération du propriétaire des branchages ayant obstrué une buse d’écoulement Les précipitations n'avaient rien d'exceptionnel, le glissement de terrain tenait principalement à l'accumulation des eaux pluviales du fait de l'omission d'un drainage sur l'ouvrage exécuté par l'entreprise. Responsabilité entrepreneur, sur 1382 C.C. "Dès 11 heures 10, le vent atteignait une vitesse de 30 nœuds, 224 1989 rejet septembre 1987 t appontement propriétaire appontement Civ. 3ème, Riom, 7 juin 1989 22 octobre cassation 1987 Effondrement Propriétaire Non mine mine/ Oui exploitants champignonnières bailleurs Civ. 1ère, Montpellier, 4 octobre 16 mars 1989, rejet 1988 Neige, entreprise privée de courant Exploitant/ED Non F Oui Civ. 3ème, 29 novembre 1989 rejet Pluies, Inondation appartement Locataire + assureur/ propriétaire Bordeaux, 26 mai 1988 Montpellier Montpellier Inondation Locataires/ 22 juin 1988 25 mars 1987 immeuble, Bailleur intempéries, circulaire du maire le Non Oui Pas invoqué Oui tandis que le navire avait pénétré dans le chenal à 11 heures 13… le commandant avait engagé son navire dans le chenal en pleine connaissance des conditions météorologiques". Responsabilité sur 1384 al. 1 C.C. La CA en retenant la responsabilité du propriétaire et en refusant la force majeure "tout en constatant que l'effondrement affectant la mine… était dû à un phénomène naturel de vieillissement par désagrégation de la voûte" a violé l'article 1719 C.C. "L'interruption de courant avait eu pour origine des phénomènes atmosphériques dont le caractère exceptionnel avait déchargé EDF de son obligation de résultat" "L'inondation n'était pas imputable à un fait du propriétaire mais était le résultat d'une accumulation de phénomènes atmosphériques exceptionnels et imprévisibles eu égard à la configuration des lieux" Exonération propriétaire sur 1719 et 1721 C.C. L'inondation ayant affecté l'immeuble loué est due à des intempéries généralisées à tout le quartier. "Eu égard à 225 lendemain annonçant que les prévisions météorologiqu es restaient mauvaises Nîmes, 7 juillet 1988 Civ. 2ème 26 avril 1990, cassation partielle Orléans, 21 septembre 1988 Paris, 23 septembre 1988 Aix, Mende, Pluies Clients/ Oui 22 mars 1985 exceptionnelle Dépositaire Oui s Dégâts à mobilier déposé Fortes pluies, Propriétaire / crue d'un étang / Non, pas étang, propriétaires imprévisible, inondation de fonds servants ni irrésistible propriétés dont appartenant à commune de la ville de Briare Briare et à d'autres propriétaires Nanterre, Orage, débit Locataire/ 15 avril 1986 de l'eau pas bailleur supérieur à celui provoqué par des fortes précipitations habituelles en cette saison Gel, froid Propriétaire l'importance et à la généralité de cette inondation celle-ci doit être qualifiée de force majeure" Pas responsabilité du bailleur Evénement imprévisible et irrésistible Pas responsabilité dépositaire Défaut d'entretien, "la crue de l'étang n'avait pas revêtu un caractère imprévisible et irrésistible". Responsabilité propriétaire étang sur 1384 al.1C.C.; la commune de Briare n’a pas manqué à ses obligations de police municipale Classement "ne constitue pas un cas du quartier en de force majeure zone sinistrée exonératoire le caractère pas démontré anormalement violent Non des eaux pluviales, alors que la preuve n'est pas rapportée que le quartier de l'immeuble ait été classé en zone sinistrée ou encore que le débit de l'eau lié à l'orage ait été en l'espèce supérieur à celui provoqué les fortes précipitation habituelles en cette saison ; en revanche l'installation, d'un autocommutateur de téléphone dans une cave à proximité de canalisations et près du sol constitue une imprudence" Partage de responsabilité entre bailleur et preneur Non Le chauffeur ne pouvait 226 19 octobre 1988 intense à la marchandises Non, pas ignorer les circonstances mi-janvier, transportées / imprévisible atmosphériques, le froid avaries Transporteur intense sévissait depuis marchandises une semaine, responsabilité transporteur Paris, 4 nov. Inondation Propriétaire Pas invoqué Faute du propriétaire du 1988 Cataclysme fonds Oui fonds servant "il doit local d’une dominant/ donc être condamné à rare intensité propriétaire réparer les conséquences fonds servant dommageables des inondations survenues sur le fonds dominant, à l'exception toutefois de celle provoquée par un cataclysme local d'une rare intensité" Pas responsabilité propriétaire fonds servant Civ. 1ère, Paris, Paris, 25 juin Fortes pluies, Copropriétaire Non Responsabilité syndic 22 mai 1991 30 1985 précipitations / syndic Non, pas pour mauvais entretien rejet novembre continues et imprévisible gouttière 1988 faible intensité, il y a chaque année de telles pluies, gouttière non entretenue Paris, Bobigny, Pluies clients/assure Oui "L'état de catastrophe 7 déc. 1988 18 février exceptionnelle ur Oui naturelle, constaté par 1987 s dépositaire arrêté interministériel est (gardeconstitutif d'un cas meubles) fortuit ou de force majeure qui exonère l'assuré, exerçant le métier de garde-meuble, de la responsabilité des dommages causés aux meubles déposés par ses clients" Pas responsabilité dépositaire, garantie non due par l'assureur Com., Rouen, Vent, Assureurs / "Si la direction du vent à 16 octobre 13 abordage navire Non, pas l'ouest la nuit de 1990 décembre Vent violent endommagé/ imprévisible l'abordage était plus cassation 1988 annoncé, Armateur du exceptionnelle que celle partielle direction navire nord-sud, ces 227 ouest plus abordeur exceptionnelle que nord-sud à Marseille mais un tel phénomène s'est déjà produit Civ. 3ème, 4 janvier 1991 Rejet Besançon, 3 février 1989 Civ. 3ème, 21 novembre 1990 rejet Rouen, 27 février 1989 Amiens, 11 sept. 1989 infirme Crue du Constructeur/ Doubs en mai Propriétaire 1983, inondation usine, permis de construire délivré sous réserve que les constructions soient au-delà de la cote 267, 40 NGF, usine construite entre 266, 73 et 266,79 (Reinondation en 1990, voir Cass. civ. 3ème 4 novembre 1993) Vent, Charpentier/ effondrement propriétaire maison en travaux Boulognesur-Mer, 5 juin 1981 Inondation Locataires/ Pluies Bailleur exceptionnelle s Oui Non, pas irrésistible phénomènes atmosphériques ne pouvaient être qualifiés de cyclone ou d'ouragan tel qu'ils n'auraient pu être prévu ou évité… bulletin météo ayant annoncé un vent par rafale" Responsabilité sur art. 3 et 4 de la loi du 7 juillet 1967 relative aux événements de mer "L'entrepreneur ne pouvait ignorer la cote 267,40 figurant sur plusieurs documents de 1980 concernant le niveau de la zone inondable classée par le service de l'équipement…il ne pouvait se soustraire à son obligation de construire un immeuble totalement hors d'eau", responsabilité constructeur / "La force du vent au Non, pas cours de la nuit… n'avait imprévisible été ni exceptionnelle ni imprévisible" + insuffisance des étais, responsabilité charpentier Non "La société bailleresse Oui, doit être exonérée de la imprévisible responsabilité encourue sur le fondement des articles 1719 et 1721 C.C. à la suite d'inondations ayant 228 Paris, 13 décembre 1989 Civ. 3ème, 26 novembre 1991 rejet Douai, 9 février 1990 Paris, 28 février 1990 endommagé les lieux loués, dès lors qu'il est établi que ces dommages sont dus à une pluviométrie exceptionnelle et que des telles précipitations étaient imprévisibles puisque la DDE, qui avait prêté son concours à la construction du pont, avait avisé le constructeur que les dispositions prévues pour le franchissement de la rivière ne soulevaient pas d'objection de sa part" Exonération du bailleur Vent à Propriétaire / "La violence 135km/h arbres + Oui exceptionnelle du vent assureur ne réduit en rien le RC/propriétair caractère imprévisible et e immeuble irrésistible de la voisin tempête… Encore faut-il que cet arbre ait opposé à la tempête une résistance normale et vitale, à la mesure de son âge et de sa hauteur. Cette preuve est rapportée…" Exonération du gardien de l'arbre sur 1384 al. 1 Pluies Maître / L'entrepreneur "aurait dû violentes en d'ouvrage Non, effectuer les travaux de 1981 et 1983, déclaré prévisibles façon à ne pas provoquer inondation responsable/ de danger pour le fonds propriété, Entrepreneur voisin, en cas de pluies canalisation ayant posé la d'une exceptionnelle voisin posée canalisation violence, prévisibles trop bas dans la région", responsabilité entrepreneur Orage, Client/ société Non Même si le contrat brouillage de de Non, pas énumère dans les cas de caméras de gardiennage imprévisible force majeure les orages, surveillance car pas la survenance d'un orage violence n'est pas en soi, un exceptionnell phénomène imprévisible 229 e Nîmes (Com.) 8 mars 1990 Nancy, 20 mars 1990 Civ. 3ème, Nîmes, 28 oct. 1992 3 avril 1990 rejet Orages Exploitant / violents et d'une Oui neige collante usine/EDF (arrêt usine pour cause de coupure d'électricité) Nancy, Inondation, HLM/ 19 mai 1988 Surcharge de Locataire réseau d’égouts Non Non Neige, chute Maître / exceptionnelle d’ouvrage Oui s /entrepreneur et architecte; seul entrepreneur condamné en appel Pourvoi : entrepreneur et ne pourrait constituer un cas de force majeure que s'il présentait un caractère de violence exceptionnelle dûment établi. Responsabilité société de gardiennage "Doivent être rangées dans la catégorie des cas de force majeure les interruptions de fourniture de courant dues à la présence de corps étrangers sur la ligne, à de très violents orages et à la surcharge des lignes par suite de fortes chutes de neige collante" Exonération d'EDF pour ces interruptions "La société… est tenue d'indemniser l'occupant des travaux de réfection de son pavillon, après la survenance d'une inondation provenant d'une surcharge du réseau d'égouts, même si ce sinistre n'est pas la conséquence d'un vice caché et provient de la décision du district, acquéreur du réseau d'égouts, de brancher sur celui-ci un lotissement voisin. Responsabilité du bailleur Pas impéritie de l'architecte mais existence d'un événement imprévisible en fonction du temps et du lieu, irrésistible et extérieur Exonération architecte 230 Rouen, 18 avril 1990 +maître d’ouvrage / Architecte Vent ayant Propriétaire Non soufflé avec voiture Non, pas grande force endommagée/ irrésistible Propriétaire peupliers Paris, Evry ( réf.), Orage Propriétaires/ Oui 30 mai 1990 8 juillet 1989 Prévisibles en Entrepreneur Non, été prévisible Paris, Paris, Inondations Acheteur Non 6 juin 1990 23 sept. 1987 Fréquentes d’immeuble/ Non, Montée nappe Vendeur + phréatique Architecte Civ. 2ème, 5 février Bordeaux, 28 juin 1990 Effondrement Parents d'une carrière mineur / Non, "Si le vent a joué un rôle dans ce sinistre, ce rôle n'est pas la cause unique de l'accident car des arbres élagués et entretenus n'auraient pas subi les mêmes dégâts" Responsabilité sur 1384 al. 1 C.C. Travaux de réfection toiture défectueux, la reconnaissance ministérielle de l'existence d'une catastrophe naturelle est sans incidence. L'entrepreneur ne peut nullement invoquer le caractère exceptionnel du vent et l'abondance des précipitations pour s'exonérer de sa responsabilité du fait que ces événements en été étaient prévisibles. Responsabilité entrepreneur "L'architecte maître d'œuvre investi d'une mission complète qui a manqué à ses obligations de conception et de conseil et qui ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un événement imprévisible et irrésistible à l'origine des malfaçons doit réparation des désordres relevant de la garantie décennale et résultant de sa carence fautive" Défaut de renseignement de la part de l’architecte, responsabilité La Cour d'appel avait relevé que le propriétaire 231 1992 cassation Rennes, 11 septembre 1990 T.G.I. Rennes, 11 juillet 1988 Des tué/propriétair prévisible effondrements e carrière s'étaient déjà produits dans le même secteur Orages Locataire / Non violents bailleur Non, Mais pas prévisible exceptionnels dans la région Civ. 2ème, 5 février 1992 cassation partielle Paris, 4 octobre 1990 Neige, accumulation sur toiture, personne blessée par chute bloc de glace Civ. 2ème, 6 juillet 1994 rejet Grenoble, 17 décembre 1990 Glissement de Propriétaires Non terrain fonds Non dominant/ propriétaires victimes Amiens, 14 février 1991 Tempête Blessée + Non sécurité Non, faute sociale/ syndicat des copropriétaire s Propriétaire/ / Entrepreneur Non n'avait aucun moyen d'empêcher l'accès de la carrière. Cassation : risque prévisible, pas FM, responsabilité sur 1384 al. 1 C.C. "Il est constant que des orages, même assez violents, ne sont pas exceptionnels dans la région de Rennes et ne sauraient donc constituer un cas de force majeure" Responsabilité bailleur "Le toit de l'immeuble, très penché, était démuni de tout système de protection, la neige s'était accumulée depuis une dizaine de jours, le syndicat n'avait pris aucune mesure de protection adéquate; la Cour d'appel n'était pas tenue de justifier si les chutes de neige excédaient la normale". Responsabilité syndicat sur 1382 C.C. Origine glissement dans instabilité naturelle du terrain aggravée par un drainage insuffisant; mais faute de la victime (travaux), exonération partielle L'entrepreneur qui n'a pas apporté un soin tout particulier à la fixation des plaques de fibrociment, matériau très sensible aux chocs et aux trépidations, doit indemniser le maître de l'ouvrage des dommages subis du fait de la destruction de son bâtiment par la tempête ; la simple action du vent ne constituant pas une 232 Aix-enProvence, 20 mars 1991 confirme Civ. 3ème, 1er décembre 1993 rejet Rennes, 16 mai 1991 Civ. 1ère, 7 février 1995 rejet Versailles, 24 mai 1991 Civ.2ème, 17 mars 1993 rejet Aix-enProvence, 19 mars 1991 Tarascon, Orage 12 déc. 1989 Inondation Clients/ Oui Restaurateur Oui (organisation d’un mariage) Tempête Constructeur/ exceptionnelle propriétaire + , bâtiment assureur détruit Vents à 187 km/h Autres excellents immeubles détruits Pluies, Propriétaire + inondation assureur/ immeuble locataire + assureur Chute de rocher, effritement falaise / Non, pas extériorité, faute Oui Non, pas cause déterminant e Propriétaire Non commune de Non Beaulieu-surMer propriétaire cause étrangère exonératoire pour l'entrepreneur" Responsabilité entrepreneur "Constitue un cas de force majeure de nature à libérer de ses obligations l'organisateur d'une réception, le violent orage qui a gravement détruit ses installations moins d'un mois avant la réception et qui a donné lieu à la constatation de l'état de catastrophe naturelle par arrêté" Exonération restaurateur Défaut de scellement entre la maçonnerie et la coque à ossature de bois. Faute de l'entrepreneur. Obstruction de la canalisation des eaux de pluies, les trop-pleins prévus par la norme NPF 30-201, art. 6-36 de janvier 1948 n'ont pas été mis en place "les dommages, qui auraient pu être évités si l'installation avait été correctement réalisée, n'avaient pas eu pour cause déterminante l'intensité anormale des pluies" "L'effritement d'une falaise calcaire sous l'effet de l'érosion n'est pas un événement imprévisible et des purges artificielles 233 Civ. 3ème, 24 mars 1993 rejet Pau, 16 janvier 1991 confirme Civ. 1ère, 15 juillet 1993 rejet Pau, 4 juillet 1991 Civ. 3ème, Besançon, 4 novembre 30 octobre 1993 1991 rejet Tarbes, 4 oct. 1989 auraient pu être réalisées" Responsabilité commune sur 1384 al.1C.C. Chute de Propriétaire/ Oui "La parcelle étant située neige Commune Non, sur un sol argileux, Glissement de d’Ossun Très anciennement exploité terrain Vendeur et prévisible comme carrière puis lotisseur remblayé, le glissement de terrain était très prévisible, la cour d'appel, qui ne pouvait tirer de la simple constatation administrative de catastrophe naturelle, cause, donnée à un événement, la conséquence nécessaire que cet événement avait dans les rapports contractuels des parties, le caractère de force majeure, a légalement justifié sa décision" responsabilité de la commune comme vendeur et lotisseur Chute de Propriétaires/ Oui "En l'état dans lequel le neige Commune Non, terrain a été vendu par la Glissement de d’Ossun Terrain commune, celle-ci terrain vendeur + son impropre à n'ignorait pas qu'il était (mêmes faits assureur la impropre à la que Civ. 3 24 construction construction en raison mars 1993) des risques graves de déstabilisation en soussols et des glissements dont les circonstances atmosphériques n'ont fait que provoquer la réalisation", responsabilité commune sur 1645 C.C. Crue du Constructeur/ Oui Le constructeur "avait Doubs propriétaire Non, pas l'obligation de construire en1990, usine inondée irrésistible un immeuble totalement inondation (litige sur le hors de l'eau, le sinistre usine, permis fait que les ne se serait pas produit si de construire provisions l'implantation avait été délivré sous versées pour correcte" 234 Civ.1ère, 23 février 1994 rejet Civ. 2ème, 5 janvier 1994 rejet Montpellier, 27 nov. 1991 Basse-Terre, 20 janvier 1992 réserve que la première les inondation constructions n'aient pas soient au-delà servi à faire de la cote 267, des travaux) 40 NGF, usine construite entre 266, 73 et 266,79 (- inondation déjà en 1983, voir Cass. civ. 3ème, 4 janvier 1991) Inondation Copropriétaire Oui / Non Exploitant Faute lourde Responsabilité exploitant parking qui n’a pas fermé les regards Tempête Propriétaire / Phénomène imprévisible tropicale, conteneurs Oui, dont la soudaineté a voilier au projetés et imprévisible empêché toute mouillage en ayant éventré et intervention. rade à Saint- un irrésistible Exonération sur 1384 al. Barthélemy navire/proprié 1 C.C. du propriétaire heurta un taire navire des conteneurs conteneur et endommagé fut endommagé Trajectoire inhabituelle, formation rapide à une heure tardive, anomalie dans la chronologie des cyclones établie depuis plus d'un siècle; La lente évolution de la situation ne laissait pas présager une formation aussi rapide d'une dépression tropicale 235 Com., Nouméa, 17 mai 19 février 1994, rejet 1992 Civ. 3ème, Rennes, 11 mai 1994 30 avril rejet 1992 infirme Civ. 3ème, 30 mars 1994 rejet Lyon, 14 mai 1992 Civ. 1ère, Poitiers, Cyclone, abordage Navire mal amarré, abordage Alerte cyclonique avait été donnée Assureur propriétaire navire abordeur / Propriétaire navire naufragé / Non, prévisible Quimper, Tempête en Propriétaire/ / 26 mars 1991 Bretagne constructeur Oui (1987) La vitesse du vent dans la région avait dépassé des valeurs extrêmes Neige, 35 Entrepreneur Non kg/m2 de + assureur/ Non, faute neige Propriétaire effondrement serre préfabriquée ; Règlements en vigueur dans la région : 78kg/m2 la serre avait été calculée pour 25kg/m2 Tempête, vent Entreprise de / Le cyclone annoncé l'alerte n°1 ayant été donnée- ne peut être considéré comme un événement imprévisible et exceptionnel exonératoire de responsabilité, même si la force des vents a dépassé les prévisions météorologiques, alors que si de nombreux navires ont été endommagés, tous n'ont pas rompu leurs amarres. Insuffisance d'amarrage établie, "la Cour d'appel a souverainement apprécié les éléments de fait du litige" Responsabilité propriétaire du navire mal amarré "L'effondrement de la structure n'était pas dû à la déficience du contreventement… le bâtiment litigieux avait depuis sa construction subi sans dommage de nombreuses tempêtes, la cause du sinistre avait été un ouragan d'une violence exceptionnelle" , exonération constructeur La chute de neige qui est à l'origine du sinistre ne présente aucun caractère exceptionnel Responsabilité entrepreneur Faute et inobservation 236 10 janvier 1995 rejet 3 juin 1992 Civ. 3ème, 12 avril 1995 rejet Papeete, 18 juin 1992 Nîmes, 22 septembre 1992 Civ. 1ère, 22 novembre 1994 rejet Montpellier, 24 septembre 1992 de 126 km/h, drague écrasant un ponton, intempéries depuis une semaine Cyclone, envol toiture dragage/ propriétaire ponton Non, prévisibles du règlement à l'origine du sinistre. Responsabilité entreprise de dragage sur 1147 C.C. Locataires/ bailleur / Oui "La ruine de l'immeuble était due à l'action conjuguée de l'eau et du vent lors du passage du cyclone… Les locataires ne prouvaient pas un mauvais entretien de l'immeuble" Action Oui subrogatoire Oui assureur multirisque habitation / constructeur + assureur dommage ouvrage et responsabilité décennale Tempête à la Propriétaire / Palavas, vent navire Oui à 122 km/h, locataire du ber ber/ commune appartenant à bailleur du ber la commune cassé, dommage à un navire sur le ber “ Les dispositions légales cat-nat sont exclusives de toute recherche de responsabilité ”. En l’espèce il y avait concours causal d’une faute du constructeur et de la cause étrangère. La force majeure a exclu la responsabilité fautive "La cause de l'accident résidait dans la tempête qui avait sévi à Palavasles-Flots et aux environs dans la matinée du 10 octobre 1987, des vents qui atteignaient 122 kilomètres à l'heure, et correspondaient à la force douze sur l'échelle de Beaufort, ayant été enregistrés au moment de la chute du navire. La cour d'appel, qui a ainsi caractérisé l'existence d'événements extérieurs imprévisibles et irrésistibles, constitutifs de la force majeure, de nature à exonérer le bailleur de son obligation, a légalement justifié sa décision", Pluies, inondation 237 Civ. 3ième, 22 nov. 1994 rejet Agen, 15 déc. 1992 Civ. 3ème 25 janvier 1995 cassation Lyon, 27 janvier 1993 exonération de la commune bailleur Sécheresse Propriétaire/ Oui "le fait que l'autorité déjà produite constructeur Non, gouvernementale ait 4 ans avant la Pas reconnu le caractère de construction imprévisible catastrophe naturelle ne < 14 ans , ni saurait constituer un cas irrésistible de force majeure que si la sécheresse invoquée revêtait un caractère imprévisible et irrésistible, ce qui n'était pas le cas la sécheresse de 1989-1990 n'étant pas sans équivalent connu et une sécheresse exceptionnelle s'étant déjà produite en 1976, quatre ans avant la construction", responsabilité constructeur Inondation, Propriétaire/ Non Responsabilité du crues et pluies Vendeur Non, faute vendeur qui, pour des raisons d’économies, a limité la mise hors d’eau à une cote atteinte lors des crues quinquennales malgré la mise en garde des architectes Grenoble, 28 janvier 1997 Cour de renvoi Paris, Paris, 2 oct. Inondations 5 mars 1993 1985 crues confirme périodiques Agen, 23 mars 1993 infirme Cahors, Orages 28 avril 1992 violents Infiltration toiture Copropriétaire Pas invoqué / Non constructeur Responsabilité constructeur Locataire/ bailleur "Les infiltrations de pluies consécutives à l'orage (constituant une catastrophe naturelle) dont il n'est pas contesté qu'elles proviennent de la toiture ne sauraient présenter les caractères qui caractérisent la force majeure. Le preneur ayant avisé le propriétaire des défectuosités de la toiture six mois avant l'orage" Oui Non 238 Défaut d’entretien gouttières, responsabilité bailleur ème Civ. 3 , Bordeaux, Fortes pluies Commune Oui La commune n'a pas mis 8 novembre 19 mai 1993 Inondations vendeur/ Non, en œuvre les 1995 acheteur prévisibles aménagements cassation préconisés. Vice caché Civ. 3, Angers, Saumur, 23 Fortes pluies Commune Oui Effondrement terrasse 14 février 23 juin juin 1993 Glissement de propriétaire/ Non, Responsabilité. 1996 1993, terrain propriétaire Pas propriétaire, 1384 al. cassation confirme immeuble imprévisible 1C.C.(commune , pas demandeur, les juges du irrésistible fonds avaient retenu la force majeure) "L'arrêt retient que l'éboulement de la terrasse résulte de la conjonction de fortes pluies assimilées à l'état de catastrophe naturelle par un arrêté ministériel, de la situation vulnérable des lieux en pente et de la nature du terrain... La CA n'a pas caractérisé la force majeure imprévisible et irrésistible" Toulouse, Sécheresse Propriétaire/ Non Les conditions de la 13 constructeur Non, force majeure ne sont septembre prévisible pas réunies "lorsque le 1993 fait provient d'une situation antérieure qui se prolonge pendant plusieurs années telles que, comme dans l'espèce, la dessiccation d'un sol argileux sous l'effet de la sécheresse" Civ. 3ème, Saintes, Sécheresse Propriétaire + Pas invoqué "L'encastrement d'une 30 janvier 10 janvier exceptionnelle assureur/ Non partie des fondations 1996 1994 , précédent en constructeur + avait été effectué à une cassation 1976, sous-traitant + profondeur insuffisante fissuration assureur et avait aggravé les désordres", responsabilité constructeur et soustraitant Besançon, T.I. Dole, Neige, Assureur Oui Enneigement 25 janvier 30 avril 1992 Enneigement dommage + Oui exceptionnel dans la 239 1994 confirme Reims, 17 mars 1994 infirme Metz, 21 avril 1994 infirme extrêmement Propriétaire/ rapide dépositaire exceptionnel dans la région Reims, 21 juillet 1992 Inondation, pluies violentes propriétaire fonds inférieur/ propriétaire fonds supérieur Sarreguemine Inondations propriétaire , Répétées inondé/gardie 30 mai 1990 Caractère non n exceptionnel mine de de la charbon pluviosité, existence d’antécédents Périgueux Sécheresse 5 juillet 1994 Civ. 3ème, Aix-en7 mai 1996, Provence, cassation 2 mai 1994 Pas invoqué Non Oui Non, Ni imprévisible ni irrésistible Propriétaire / Oui constructeur Non, Prévisible Tempête, Propriétaire / caractère ponton/ Non, pas relativement constructeur caractérisée exceptionnel, temps de retour supérieur à 10 ans, destruction région du bas, ces conditions climatiques rendaient manifestement trop dangereuse toute intervention. Exonération dépositaire Absence d’installation d’avaloirs des rigoles, responsabilité propriétaire fonds supérieur Classement de la région en zone sinistrée non caractéristique de la force majeure. "Sans les affaissements miniers ayant provoqué un effondrement du cours de la rivière, les eaux n'auraient pas débordé et inondé la propriété de la victime. La pluviosité n'étant pas imprévisible, il n'y a pas d'exonération due à la force majeure" Responsabilité gardien mine de charbon "Les élus locaux, par faveur pour les administrés sollicitent fréquemment la prise d'arrêté de déclaration de catastrophe naturelle dans des situations de gravité fort variable nécessitant, dans un procès civil, une analyse des données factuelles" Responsabilité constructeur La Cour d'appel n'a pas recherché si la tempête constituait pour le constructeur un événement imprévisible et irrésistible 240 Civ. 3ème, 17 juillet 1996 (3 arrêts) cassation ponton sur la mer dans les premières heures de la tempête Colmar, Mulhouse, Inondation, propriétaire/ Oui 24 juin 1994 17 novembre crues de l'Ill constructeur + Non, confirme 1989 et remontée assureur du Pas exceptionnelle constructeur imprévisible nappe , phréatique, Pas 1982, 83 irrésistible précédentes crues en 1954-55 Versailles, 4 nov. 1994 Sécheresse propriétaire/ Pas invoqué déjà produite constructeur Non quelques années avant la construction Versailles, Nanterre, Inondation Propriétaire/ Pas invoqué 18 30 avril 1993 vendeur Non novembre 1994 confirme Versailles, Sécheresse Propriétaire/ Pas invoqué 25 Exceptionnell constructeur Non novembre e, 2 années 1994 consécutives " Attendu que pour débouter les acquéreurs de leurs demandes, l'arrêt retient que si l'Ill a connu en 1955 des crues exceptionnelles, elles n'ont pas fait l'objet d'enregistrements de niveau, que celles de 1982 et 1983 ont donné lieu à des arrêtés constatant l'état de catastrophe naturelle des lieux, et que les dommages proviennent donc d'une cause étrangère. Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'imprévisibilité et l'irrésistibilité des inondations, de nature à exonérer le constructeur de sa présomption de responsabilité, a violé l'article 1792" Responsabilité constructeur La sécheresse doit entrer dans les prévisions de la construction, Responsabilité constructeur Inondation évitable par diligences appropriées, responsabilité vendeur pour retard de livraison "La sécheresse exceptionnelle de deux années consécutives est insuffisante à expliquer les désordres des fissures dont les premières 241 Besançon, 15 février 1995 confirme Chambéry, 22 février 1995 infirme Rouen, 20 avril 1995 Civ. 3ème, 29 avril 1997 rejet Nîmes, 27 avril 1995 Besançon, 9 février 1993 Vent et orage de grêle pas de violence dépassant la normale ; probabilité annuelle Inondation Crues propriétaire immeuble/ propriétaire arbre Non Non, prévisible propriétaire terrain/ propriétaire terrain autre rive Oui Oui Vent, 101km/h Dans une région proche de la mer ; chute enseigne Pluies diluviennes, inondation terres en Propriétaire/ / constructeur Non Propriétaire et Oui, locataire Non, fonds voisin/ mauvais Propriétaire entretien manifestations remontent à des années antérieures au cours desquelles il n'y a eu aucune sécheresse" Responsabilité constructeur "Il a été précisé par la météorologie nationale que des phénomènes de ce type pouvaient se produire tous les ans" Responsabilité propriétaire d’un arbre, 1384 al. 1 C.C. "Il n’est pas démontré que le défendeur n’a pas exécuté son obligation d'entretenir le ruisseau, ni que les arbres lui appartenant sont venus obstruer le lit du ruisseau, et alors surtout que les pluies à l'origine de la crue ont bien présenté un caractère exceptionnel puisque l'autorité administrative a déclaré la commune sinistrée au titre des catastrophes naturelles. La crue a donc bien présenté les caractères de la force majeure par son imprévisibilité et son irrésistibilité Exonération du propriétaire de l'autre rive Responsabilité constructeur sur 1792 C.C. "La carence de Mme S. dans l'exécution de son obligation était antérieure aux pluies 242 1987, mauvais fonds inondé entretien d'une digue diluviennes des 11, 12 et 13 février 1987… elle avait accentué les affaiblissements et ruptures de la digue aux cours des années, donnant ainsi plus d'ampleur aux inondations de 1987 et excluant que celles-ci puissent être retenues comme un cas de force majeure" Responsabilité solidaire propriétaire et locataire Pau, Pau, Sécheresse propriétaire/ Oui “ L’arrêté de cat-nat ne 3 mai 1995 15 juin 1993 constructeur Oui peut pas à lui seul confirme caractériser un cas de FM, mais dès lors que le sol ne présentait pas de vice et que les fondations ont été réalisées dans les règles de l’art, la sécheresse constitue bien une cause étrangère ”, exonération constructeur Civ. 3ème Bordeaux, Sécheresse Assureur Oui “ Les travaux de reprise 28 janvier 23 mai 1995 constructeur Non, pas n'avaient pas abouti à la 1998 /propriétaires imprévisible stabilisation de rejet l'ensemble de l'ouvrage… La sécheresse bien qu’ayant fait l’objet d’une constatation administrative de catastrophe naturelle n’était pas imprévisible ” Civ. 3ème Besançon, Inondation action Oui Construction sous le 4 juin 1997 31 mai 1995 Niveau des récursoire Non, niveau rejet plus hautes assureur Pas Erreur de crues 267, 40 dommage imprévisible l’Administration dans la NGF. Crues habitation/ , pas délivrance du permis de de 1983 et constructeur irrésistible construire inopérante. 1990 : Responsabilité 1983, plus constructeur fortes pluies "Selon le service de la enregistrées navigation de Lyon, le depuis un niveau des plus hautes siècle et demi crues de la rivière 1990 : crue du s'établissait à la cote 243 siècle Civ. 2ème 18 mars 1998 rejet St-Denis-dela-Réunion, 6 oct. 1995 Cyclone, vent propriétaire/ / à 216 km/h société de Non, pendant le travaux Prévisible passage du publics cyclone Firinga, des rafales de vent plus violent avaient été enregistrées moins de dix ans avant et 267, 40 NGF, et que, si le bâtiment avait été implanté à cette altitude, les eaux de crue n'auraient pas envahi l'usine, la Cour d'appel… qui a exactement relevé que le classement des crues en catastrophes naturelles par l'autorité administrative n'emportait pas qu'elles aient les caractères de la force majeure, et qui a souverainement retenu que les crues de 1983 et 1990 n'étaient pas imprévisibles, en a déduit, à bon droit, que la société G.A., qui était tenue de la garantie décennale de l'article 1792 C.C., et qui, quelles que soient les erreurs de l'Administration dans la délivrance du permis de construire, avait l'obligation de rechercher la cote altimétrique de protection contre les inondations, ne démontrait pas l'existence d'une cause étrangère exonératoire de responsabilité" Ecroulement d’une grue, manque de précaution, Responsabilité gardien "la procédure administrative d'alerte graduée était destinée à permettre de prendre les dispositions qui s'imposaient en face de la menace cyclonique qui n'avait pas été évaluée d'une manière 244 moins de dix ans après les événements en cause ère Civ.1 , Paris, Sécheresse, 23 juin 1998 18 octobre dommage cassation 1995 immeuble, partielle absence précautions du constructeur Aix-enDraguignan, Pluies, Provence, 13 mai 1992 écroulement 7 nov. 1995 d'un mur confirme Paris, 10 nov. 1995 confirme Paris, 15 février 1994 Pluies violentes erronée par les services météorologiques" Assureur Oui construction/ Non, cause propriétaire et déterminant assureur e pas dommage démontrée Garantie due par l'assureur du constructeur et non par l'assureur dommage propriétaire/ Oui constructeur Non, Imprévisible , mais pas irrésistible "Attendu que la reconnaissance par l'autorité administrative de catastrophe naturelle aux pluies survenues sur la commune… ne saurait constituer un cas de force majeure que si les pluies invoquées revêtaient un caractère imprévisible et irrésistible. Si les pluies, certes imprévisibles, ont pu aggraver considérablement la poussée sur le mur qui n'a pas résisté, le constructeur doit être condamné si le mur était sous-dimensionné et s'il présentait une semelle insuffisante pour un mur en béton armé et une section trop mince…attendu qu'ainsi le caractère irrésistible des pluies n'est pas démontré", responsabilité constructeur “ L’existence d’un arrêté de cat-nat pour des pluies qui se sont produites le même jour ne caractérise pas, en lui-même, la force majeure ” dimension insuffisante des chenaux, copropriétaire Oui s/syndicat des Non copropriétaire s gardien des parties communes 245 Civ. 3ème Riom, 8 avril 1998 15 février rejet 1996 Risque Propriétaire/ Non d’inondation Constructeur Non Evacuation lors d'une crue du Rhône Civ. 1ère, 7 juillet 1998 rejet Poitiers, Bressure, 5 mars 1996 17 octobre confirme 1994 Sécheresse, Assureur Oui période dommage du Oui anormalement propriétaire/ longue (1 an assureur du et demi), constructeur + désordre dans assureur immeuble Com., 7 juillet 1998 Basse-Terre, 18 mars 1996 Forte tempête, Transporteurs / paquets de + assureur/ Non, pas mer dans propriétaire fortune de responsabilité syndicat copropriétaire Immeuble à niveau inondable (pas encore de dommage) , "la cour d'appel en a déduit à bon droit, que la mauvaise implantation de l'immeuble constituait un vice caché et que la garantie décennale du constructeur était engagée" Responsabilité du constructeur "Une sécheresse provoquant des mouvements de terrain dus à la sensibilité sur sol argileux, avait sévi dans le département des Deux-Sèvres, entre le mois de mai 1989 et le mois de décembre 1990, un arrêté interministériel du 12 août 1991 ayant constaté "l'état de catastrophe naturelle… cette sécheresse exceptionnelle par sa durée dans ce département et dont les effets s'étaient manifestés progressivement au fur et à mesure du déficit en pluviométrie, était la cause des désordres affectant le pavillon… aucune précaution, notamment quant au choix des semelles de l'immeuble, n'aurait pu suffire à éviter les graves dommages". Garantie due par l'assureur dommage "Les transporteurs avaient commis une faute en ne plaçant pas 246 cassation partielle conteneur sur marchandise mer navire, marchandise détruite en mer Civ. 2ème, Reims, 13 mai 1998 3 juillet rejet 1996 Vent, rafale Propriétaire de 60-70 arbre/ km/h, plateau victimes par ardennais ricochet exposé ouest nord-ouest, chute d'arbre, décès automobiliste Crue d'un Locataire/ ruisseau Bailleur Civ. 3ème, 31 mars 1998 rejet Aix-enProvence, 28 mars 1996 les conteneurs litigieux en cale et … sans cette faute les dommages ne se seraient pas produits malgré la tempête", responsabilité transporteur / "La preuve n'était pas Non, pas rapportée que le vent ait imprévisible été exceptionnel à cette , ni période de l'année dans irrésistible le secteur considéré" responsabilité propriétaire de l'arbre sur 1384 al.1 C.C. Pas invoqué Oui Nîmes, Alès, Inondation, la acquéreur Pas invoqué 6 juin 1996 14 déc. 1994 pluviométrie d’un bâtiment Non confirme des années à usage 1987 et 1988 industriel / était commune prévisible et constructeur n’a pas atteint les précipitations exceptionnelle s des années 1950, 58, 63 et 76 Montpellier, Perpignan, Neige sur le 18 juin 1996 11 janv. 1994 toit infirme 110 kg/m2 propriétaire/ Oui constructeur Oui Inondation due à une crue, bien loué non affecté de vice, aucune faute du bailleur "les inondations… étaient dues, non à l'impossibilité d'écoulement des eaux pluviales, mais à la crue d'un ruisseau dans lequel ces eaux se déversaient" Pas responsabilité du bailleur "la Cour confirmera… la décision du tribunal en ce qu'il a retenu la responsabilité de la Commune sur la base des articles 1792 et suivants en reprenant intégralement la motivation du Tribunal qui a justement écarté la force majeure pour la Commune de Sant Christol les Alès pour s'exonérer de sa responsabilité" Responsabilité de la commune en tant que constructeur "Les abondantes chutes de neige de janvier 1991 ont été classées 247 excède les prévisions en la matière catastrophes naturelles. La présence sur le toit au moment de l'effondrement d'une surcharge de 110 kilos par mètre carré de neige ayant entraîné l'effondrement de la toiture, excédant les prévisions des normes en matière de surcharge, constituait un événement imprévisible et inévitable, et ce même si l'ouvrage présentait un défaut d'assemblage" Exonération constructeur Paris, Evry, Sécheresse propriétaire/ Oui "Cependant, même si un 4 sept. 1996 4 janv. 1993 déjà il y a 9 constructeur Non, arrêté déclarant que pour confirme ans prévisible, la localité dont il s'agit la surmontable sécheresse constitue une catastrophe naturelle, cette décision administrative, prise à des fins d'indemnisation des victimes, n'a pas pour effet de déterminer si l'événement qu'elle vise revêt les caractères juridiques de la force majeure. En l'espèce la sécheresse n'était pas imprévisible puisqu'une sécheresse de même ampleur s'était déjà produite en 1976 ; elle n'était pas davantage insurmontable dans ses effets puisqu'il suffisait, pour éviter les désordres, de prolonger les puits de fondation jusqu'au bon sol à 2m50 de profondeur" Responsabilité constructeur Toulouse, Sécheresse propriétaire/ Oui "Il est de jurisprudence 10 “ phénomène constructeur Non, constante que la septembre bien connu Ni sécheresse, même ayant 1996 dans le sud imprévisible donné lieu à un arrêté de 248 ouest ” Orléans, Orléans, 2 oct. 1996 15 février confirme 1994 Ni irrésistible Sécheresse propriétaire/ Oui “ devenue propriétaire Non, depuis peuplier prévisible plusieurs année facteur structurel et non conjoncturel ” catastrophe naturelle, n'est pas un cas de force majeure exonérant le constructeur de sa responsabilité. En effet, la cause étrangère, synonyme de force majeure, s'entend d'un événement imprévisible, revêtant une violence ou une intensité exceptionnelle ; ces conditions ne sont pas réunies lorsque le fait générateur du dommage provient de la dessiccation du sol sous l'effet de la sécheresse, phénomène bien connu dans le sud ouest. Le fait que la commune ait fait l'objet d'un arrêté de catastrophe naturelle n'implique ni l'imprévisibilité ni l'irrésistibilité de la force majeure… ainsi… le dommage est constitutif à un vice des fondations, peu adaptées à la nature du terrain" Responsabilité constructeur "Il ne suffit pas qu'un événement ait fait l'objet d'un arrêté de catastrophe naturelle, comme c'est le cas de la sécheresse en cause, pour en déduire qu'il revêt nécessairement les caractéristiques de la force majeure", "le peuplier planté sur une propriété voisine de celle où est situé le pavillon affecté de fissures a joué un rôle déterminant dans l'apparition de ces désordres du fait qu'il est 249 Civ. 3ème, 8 juillet 1998 rejet Civ. 3ème, 17 novembre 1998 rejet Limoges, 28 octobre 1996 Pluies, Architecte / ampleurs propriétaire exceptionnelle voisin s, décembre 1994 mois le plus pluvieux depuis au moins un siècle, année la plus pluvieuse depuis 1910, infiltrations, effondrement d'un mur séparatif, travaux effectués par un architecte sur une des propriétés Orléans, Orléans, Inondation propriétaire 30 oct. 1996 22 sept. 1995 documents confirme détruits/ dépositaire Aix-enProvence, 12 novembre 1996 Ecoulement Bailleur/ eaux de locataire ruissellement, Effondrement d'un talus un grand consommateur d'eau " Rôle causal d’un peuplier, de la victime, partage de responsabilité entre propriétaire, architecte, victime Non "Si les infiltrations d'eau Non, ni de pluie, ayant participé imprévisible à l'effondrement du mur, , ni avaient été abondantes, irrésistible elles ne pouvaient cependant être considérées comme un événement imprévisible et irrésistible, de telles précipitations ayant déjà eu lieu antérieurement". Faute de l'architecte, responsabilité sur 1382 C.C. Oui Oui Non Non, prévisible "Dès lors que l'inexécution de l'obligation du débiteur consistant en la restitution de documents en sa possession provient d'une cause étrangère au débiteur constitutive de force majeure, lesdits documents ayant été en effet détruits dans une inondation des locaux du débiteur classée catastrophe naturelle…"Exonération dépositaire "L'éboulement était lié à l'instabilité du talus, due à la nature du terrain, aggravé par l'érosion, et résultait de l'absence de 250 Civ. 3ème, 14 avril 1999 rejet mesure de protection, la cour d'appel qui en a déduit que l'effondrement ne revêtant pas un caractère imprévisible, ne pouvait être qualifié de cas fortuit ou force majeure, a légalement justifié sa décision, responsabilité propriétaire Montpellier, Perpignan, Pluies, propriétaire/ Oui "le fait que l'autorité 3 déc. 1996 9 sept. 1993 infiltrations vendeur + Non, pas administrative ait 2 années entrepreneur imprévisible reconnu le caractère de consécutives, , pas catastrophe naturelle aux propres au irrésistible grandes pluies d'octobre climat 86 et octobre 87 ne méditerranéen saurait constituer un cas de force majeure que si les pluies revêtaient un caractère imprévisible et irrésistible, ce qui n'est pas le cas puisque les mêmes pluies se sont reproduites à la même époque deux années de suite et qu'elles sont le propre des climats méditerranéens" Responsabilité vendeur (vice caché) et entrepreneur Paris, Paris, orage, propriétaire Oui 1ère instance : 4 déc. 1996 26 janv. 1994 inondation locaux Oui Moyen :“ Si confirme suite à rupture inondés/ responsabilité il y avait, galerie entreprise ce serait celle de la d’égout public effectuant des collectivité publique qui “ précipitation travaux dans laisse utiliser des égouts s égalées les égouts hors d’âge et en piètre uniquement 2 état ” “ la constatation de fois en 50 l’état de cat-nat ans...orage le constitue, en outre, la plus violent reconnaissance implicite enregistré par par les pouvoirs publics l'observatoire du caractère de force de Montsouris majeure ” en 100 ans ” Appel : “ Tout autre ouvrage que le collecteur public n’a joué qu’un rôle passif. Qu’ainsi il 251 Orléans, 17 déc. 1996 confirme Civ. 1ère, 26 janvier 1999 cassation partielle Lyon, 19 décembre 1996 Tours, 2 déc. 1993 Sécheresse, Phénomène identique quelques années auparavant Propriétaire/ Oui, vendeur Non, Prévisible Pluies d'une Propriétaire + Oui intensité assureur/ Oui exceptionnelle constructeur + ; inondation assureur locaux existe une deuxième cause étrangère exonératoire de la responsabilité des intimés ” Cass. : "il s'était produit un phénomène atmosphérique d'une si rare violence qu'il ne pouvait raisonnablement entrer dans les prévisions des entreprises travaillant dans la zone, cela avait été au moins implicitement reconnu par les pouvoirs publics qui avaient déclaré l'état de catastrophe naturelle". Exonération sur 1382 C.C. "La constatation de catastrophe naturelle par le pouvoir exécutif du fait d'une sécheresse de trois années consécutives … ne suffit pas à elle seule à constituer le cas de force majeure" Responsabilité du vendeur (1792 C.C.) Attendu que, la cour d'appel "a retenu, au vu des conclusions de ce rapport (expertises) que seuls les travaux d'assèchement étaient en relation de causalité avec les inondations provoquées par les pluies exceptionnelles du 14 février 1990, dès lors que les bâtiments n'auraient pu, même s'ils n'avaient pas été affectés de vices de construction, s'avérer étanches en présence des eaux d'inondation, en raison 252 Toulouse, 3 février 1997 infirme Toulouse, Inondation Assureur Oui 25 avril 1995 Orage propriétaire/ Non violence Assureur exceptionnelle entrepreneur Rupture de canalisation de l'importance et de la pression de ces eaux stagnantes ; qu'elle en a déduit que le préjudice résultant de la nécessité de faire procéder aux travaux d'assèchement avait pour cause déterminante l'intensité anormale des pluies du 14 février 1990, et devait donc être considéré comme l'effet de la catastrophe naturelle, de sorte que, pour ce préjudice, les constructeurs se trouvaient exonérés, pour cas de force majeure, de la présomption de responsabilité décennale ; qu'ainsi sans commettre de déni de justice ni violer l'article L. 125-1 du Code des assurances, la cour d'appel a, de ce chef, légalement justifié sa décision…par motifs adoptés, la cour d'appel ayant retenu que … ce préjudice avait pour cause déterminante l'état de catastrophe naturelle reconnu par l'arrêté interministériel, elle a relevé que, pour ce préjudice, les constructeurs se trouvaient exonérés, pour cas de force majeure" Exonération constructeur Les experts n’ont pas évoqué l’éventualité d’un coup de bélier provoqué par un afflux d’eau brutal, "La simple constatation de catastrophe naturelle 253 donnée aux précipitations ne leur confère pas, dans les rapports contractuels des parties, le caractère de force majeure" Responsabilité constructeur ème Civ. 3 , Versailles, Pluies, Bailleur + Non "La bailleresse ne 16 juin 1999 7 février inondation, assureur/ Non, ni rapportait pas la preuve rejet 1997 obturation locataire imprévisible que les pluies, ayant canalisation ni provoqué les inondations d'effluents du irrésistible des 23 juillet et 6 fonds du décembre 1988, étaient propriétaire exceptionnelles, imprévisibles et irrésistibles de sorte qu'elles ne revêtaient pas le caractère de force majeure" responsabilité bailleur sur 1721 C.C. Aix en Nice, Violent orage tiers/ Non Remblai non protégé Provence, 14 sept. 1992 torrent maître de Non Responsabilité maître de 13 février boueux l’ouvrage l’ouvrage (trouble 1997 (entrepreneur anormal du voisinage) et confirme appelé en entrepreneur garantie) Civ. 3ème, Toulouse, Sécheresse, Architectes Oui "Il n'était pas établi que 9 décembre 17 février désordres sous-traitants Non, ni la sécheresse qui, au 1998 1997 dans / assureur imprévisible demeurant, n'est pas un rejet immeuble propriétaire + , ni état imprévisible et assureur irrésistible irrésistible constituait, en constructeur l'espèce, la cause étrangère exonératoire…les fautes respectives des soustraitants avaient concouru à la réalisation de l'entier dommage". Responsabilité architectes in solidum avec constructeur et entrepreneurs ème Civ. 2 , Aix-enDégâts des Copropriétaire Non "L'existence d’un 1er avril Provence, eaux, s/ Non, règlement prévoyant 1999 10 avril engorgement syndicat de prévisible l’installation d’un cassation 1997 égouts copropriété tampon étanche, fut-il facultatif pour le syndicat, rendait 254 Civ. 2ème, 1er avril 1999 rejet prévisibles les inondations dues à un engorgement des égouts de la ville" , responsabilité syndicat copropriétaires Riom, Violents Propriétaire Oui Défaut d'entretien du 15 mai 1997 orages, crue étang/ Non, ni propriétaire de l'étang "si d'un étang, Commune irrésistible, les pluies diluviennes détérioration propriétaire ni qui se sont abattues le 24 chemin imprévisible septembre 1986 sur la communal commune… ont motivé Crues un arrêté interministériel susceptibles de classement en de se produire catastrophe naturelle, tous les 4 ans elles n'ont pas revêtu un caractère irrésistible et imprévisible de nature à exonérer M. P., dès lors que, selon le service de météorologie, elles étaient susceptibles de se reproduire tous les 4 ans". Responsabilité propriétaire sur 1382 C.C. Toulouse, Albi, Orages Propriétaire Non Défaut d’entretien d’un 1ère Ch. 7 nov. 1994 violents, fonds Non pont Civ., pluies, inférieur/ Détournement d’un 20 mai 1997 Coulées de Commune ruisseau, responsabilité infirme boue propriétaire commune propriétaire d’un pont 2/3 pour aggravation du préjudice Angers, Segre, Inondation locataire/ Non "Le bailleur n'ignorait 17 juin 1997 12 avril 1996 zone bailleur invoqué pas que son bien se confirme inondable Non trouvait en zone inondable", manque de précaution, responsabilité du bailleur Montpellier, Millau, Pluies, Propriétaire/ Oui mais Protection toitures er 9 juillet 1 août 1995 violents syndicat de pour insuffisante, 1997 orages copropriété inondation responsabilité syndicat infirme et non pour copropriété pluies et orages. Non, ni imprévisible , ni irrésistible 255 " L’existence d’un arrêté de cat-nat pris en raison d’un phénomène de sécheresse n’est pas en soi la preuve de ce que ce phénomène a pour l’entrepreneur, présumé responsable..., les caractères d’imprévisibilité, d’irrésistibilité et d’extériorité qui lui permettaient d’être exonéré " ième Civ. 3 , Rennes, Inondation Locataire/ Oui "La Cour d'appel ne 19 janvier 14 Locaux bailleurs Non pouvait tirer de la simple 2000 septembre commerciaux constatation 1995 donnés à bail administrative de et à une catastrophe naturelle la 18 altimétrie conséquence nécessaire septembre insuffisante que cet événement avait 1997 entre les parties le caractère de force majeure" Civ. 3ème, Paris, Créteil, Sécheresse, Assureur Oui " L’existence d’un arrêté er 1 22 oct. 1997 29 nov. 1994 fissure dommage Non, pas cat-nat suppose que les décembre Infirme ouvrage du insurmontable dommages soient 1999 constructeur Vice du sol seulement dus à rejet (recours l’intensité anormale d’un subrogatoire)/ agent naturel, alors que Assureur la force majeure requiert, multirisque outre l’extériorité, habitation l’imprévisibilité et propriétaire l’irrésistibilité de l’événement ", responsabilité constructeur, assureur débouté du recours subrogatoire Com., Aix-enVent de force Assureur / Conditions météo ni 7 décembre Provence, 7 et 8 transporteur/ Pas fortune de anormales ni 1999 30 octobre Beaufort ce assureur mer, pas inhabituelles et n'avaient rejet 1997 qui cargaison/ imprévisible pu surprendre le correspond à capitaine. une mer forte Responsabilité à grosse avec transporteur un vent de 40 à 75 km/h. Naufrage, perte de Toulouse, Albi, Sécheresse Propriétaire/ 8 sept. 1997 28 nov. 1995 Phénomène Entrepreneur confirme connu dans la région, argiles gonflantes Oui Non, ni irrésistible, ni extérieur 256 Paris, 12 nov. 1997 Infirme cargaison Paris, Orage, vent 31 mai 1996 Arrachage toiture Nîmes, Nîmes, Sécheresse 5 mars 1998 25 sept. 1995 confirme Nîmes, 23 mars 1998 confirme Civ. 3ème, Douai, 8 mars 2000 23 mars rejet 1998 Carpentras, 25 juillet 1996 assureur dommages du propriétaire/ assureur du constructeur propriétaire/ constructeur Inondation propriétaire/ Effondrement propriétaire d’un mur voisin Sécheresse Propriétaire/ constructeur Oui Fixation insuffisante Non, bacs de couverture, Ni responsabilité imprévisible, constructeur ni insurmontable Oui Reconnaissance par Non, arrêté ministériel d'un Ni état de catastrophe imprévisible, naturelle est non ni constitutive à elle seule insurmontable d'une cause étrangère Absence de précaution, Responsabilité constructeur Oui "L'état de catastrophe Non, naturelle constaté par Absence de arrêté ministériel du 1é causalité octobre 1992 pour le département du Vaucluse et notamment pour la commune de Villedieu pour les inondations et coulées de boue du 21 au 22 septembre 1992, n'est pas en soi constitutif d'un cas de force majeure exonérant le propriétaire du mur effondré qui ne prétend ni même ne démontre que les inondations et coulées de boue ont précisément touché son fonds et ont constitué pour lui un événement imprévisible et insurmontable" Responsabilité propriétaire (1382 C.C.) Oui “ Si les fondations Non avaient été encastrées à une profondeur suffisante, la maison n’aurait pas été soumise comme elle l’a été aux variations de la teneur d’eau ”, 257 responsabilité constructeur Paris, Paris, Sécheresse propriétaires/ Oui L'expert n'a pas retenu 7 mai 1998 23 juin 1995 constructeur Non l'état de catastrophe confirme naturelle comme étant à l'origine des désordres ; "qu'au contraire, il a énoncé qu'aucune précaution n'a été prise par l'entrepreneur pour installer les canalisations sur la tourbe baignant dans une nappe d'eau, et que les mouvements des canalisations étaient donc inévitables et raison de l'instabilité du sol et de l'effet hydrostatique… attendu que, dès lors, la sécheresse exceptionnelle qui a sévi de mai 1989 à décembre 1990 sur la commune ne peut constituer, en l'espèce, un cas de force majeure exonératoire de responsabilité dans la mesure où elle n'apparaît pas comme la cause déterminante des dommages qui sont imputables à un défaut sérieux d'étude du sol, à l'absence de mesures adéquates et à des violations des règles de l'art." Responsabilité constructeur Toulouse, Montauban, Sécheresse assureur Oui "Même si le phénomène 11 mai 27 mars 1997 Longue dommages du Non, pas a été d'une ampleur 1998, période, pas propriétaire + imprévisible exceptionnelle, justifiant confirme imprévisibilité propriétaire/ le classement de la zone Idem aux assureur du en état de catastrophe sécheresses constructeur + naturelle, on ne saurait normales. constructeur soutenir qu'il s'agit d'un Déjà en 1976 phénomène et 1980, imprévisible…le fait pavillon même d’alléguer une 258 construit en 1985 Paris, Melun, 20 mai 1998 5 septembre confirme 1995 et 23 juillet 1995 Sécheresse Déjà produite 5 ans avant, Tassements constructions période aussi longue de phénomènes climatiques inhabituels prive de portée l’imprévisibilité alléguée" Association des propriétaires / lotisseur, vendeur, société de travaux de voirie Oui Non, Ni imprévisible, Ni irrésistible Argile verte très gonflante" La sécheresse invoquée par l'assureur dommages ouvrage ne constituait pas un cas de force majeure, les désordres relevés trouvant leur cause dans un défaut de précaution du constructeur qui n'avait pas procédé à une étude sérieuse du sol" Bordeaux, Angoulême, Inondation Propriétaire Oui "Dans ces conditions et 26 mai 1998 13 mars 1996 Fortes victime/propri Non, pas malgré le placement de infirme précipitations étaire de la cause la région sinistrée en Rupture d’une digue déterminante zone de catastrophe digue naturelle, la force privative majeure cause exonératoire de responsabilité doit être rejetée pour le dommage causé par la rupture de la digue d'un étang ayant inondé les terrains contigus et ce en raison d'une attestation de la mairie qui certifie non seulement que les parcelles inondées ne l'avaient pas été par les seules précipitations, mais qu'en tout état de cause il n'est pas démontré que les eaux gonflées par la pluie auraient exercé une pression irrésistible revêtant le caractère de la force majeure…" Ouvrage précaire, responsabilité sur 1384 al. 1 C.C. Toulouse, Toulouse, Sécheresse Assureur Oui "La sécheresse dans le 11 août 14 février Pas dommage Non midi toulousain pour 259 1998 infirme 1997 imprévisible propriétaire/ dans le midi constructeur et son assureur Toulouse, 29 septembre 1998 Toulouse, Vent 20 mai 1997 112 km/h dégradation volet Locataire / bailleur / Oui revêtir parfois le caractère de catastrophe naturelle n'est pas pour autant imprévisible s'agissant de prévenir les conséquences qu'elle peut avoir sur la bonne tenue des sols d'assises des fondations d'un ouvrage" manque de précaution responsabilité constructeur; "l’assureur qui ne doit sa garantie dans le cadre de l'assurance catastrophe naturelle que pour les dommages ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel, n'est pas tenu de garantir l'assuré suite aux désordres subis par les immeubles appartenant à ce dernier que s'il est certain que la sécheresse – qui a fait l'objet de deux arrêtés de catastrophe naturelle – a contribué à la déstabilisation de l'ouvrage, il est tout aussi certain que ce phénomène naturel n'est pas la cause déterminante des désordres qui auraient pu être évités si les mesures habituellement nécessaires pour les prévenir avaient été prises" Assureur dommage ne devant pas sa garantie, responsabilité constructeur "C'est à juste titre que le tribunal a considéré que cette tempête, dont le caractère exceptionnel 260 Orléans, 5 octobre 1998 Civ. 3ième, 19 juillet 2000 Montpellier, 6 octobre 1998 Orléans, Sécheresse Propriétaire/ Oui 25 juin 1996 2 années Propriétaire Oui consécutives thuya Chute de Locataires/ Oui neige syndicat de Non Effondrement copropriétaire du toit est révélé par les statistiques de météo France portant sur une durée de 30 ans présentait les caractères de la force majeure et exonérait le locataire de toute responsabilité" "Dès lors que la cause première des désordres … est la sécheresse qui sévit dans la région deux étés de suite, dont l'intensité et la gravité amenèrent le pouvoir exécutif d'en qualifier les conséquences de "catastrophe naturelle" pour permettre l'indemnisation des victimes au sens des articles L. 125-1 et suivants du code des assurances, il s'ensuit que cette sécheresse constitue pour le propriétaire voisin de la victime dont le thuya a aggravé la sécheresse du sol un événement imprévisible et irrésistible et donc un cas de force majeure. Il est constaté au surplus que par le passé d'autres sécheresses s'étaient produites sans que la présence du thuya litigieux planté antérieurement … ait eu quelques effets sur la construction voisine" Exonération du propriétaire du thuya sur 1384 al. 1 C.C. "Des quantités plus élevées avaient été relevées lors des décennies précédentes…le sinistre, 261 Agen, Agen, Vent à 130 14 octobre 25 juin 1996 km/h 1998 Com., Pau, 10 12 juin 2001 novembre rejet 1998 Paris, 18 mars 1999 Vent à 133 km/h Trib. com. Paris, 24 septembre 1996 Paris, Trib. com. 8 septembre Paris, 10 1999 mars 1997 Civ. 3ème, Douai, 7 27 juin 2001 février 2000 Assureur Non décennale/pro Non priétaire Propriétaires / de navire Oui Tempête, Assureur Naufrage d’un (Lloyd’s) navire Prévisions météo annonçant très forte tempête Tempête, Dislocation d’une cargaison d’orange Non Non Client/transpo Non rteur Non Sécheresse, Propriétaires Oui fissures dans + assureur Non nonobstant l'existence d'un arrêté de catastrophe naturelle n'était pas assimilable à la force majeure" “ L’effondrement du hangar lié à un défaut de scellement de la charpente entraîne la mise en jeu de la responsabilité de l’entrepreneur. Cette responsabilité ne trouve pas de cause d’exonération dans l’existence d’un vent violent soufflant à 130 km/h ” Les conditions d’amarrage du bateau étaient suffisantes Fautes :avoir pris la mer malgré la météo et ne pas avoir cherché d’abri quand la météo a annoncé un péril imminent, “ Ces fautes excluent que le naufrage puisse être imputé à un événement de force majeure ou à un cas fortuit en raison de la prévisibilité de l’accident excluant ellemême l’exclusivité de la force majeure dès lors que des palliatifs existaient ” “ Le mauvais temps où la tempête sont prévisibles en maritime y compris en Méditerranée au mois de mars et ne peuvent exonérer le transporteur que s’il s’agit d’une violence exceptionnelle impossible à surmonter ” "La sécheresse ne pouvait être considérée 262 rejet un lotissement cat'nat/ constructeurs ni imprévisible puisqu'une sécheresse exceptionnelle s'était déjà produite… ni irrésistible en ses conséquences car des mesures pouvaient être prises…" 263 TABLEAU DE JURISPRUDENCE EN DROIT ADMINITRATIF Inondations et Force majeure TA Nancy, 10 mai 1976 CAA CE Parties Evénement 29 fév.1980 sect.cont. 3 et 5 sssect. N°3.875 District urbain de Nancy/ Société des "établissement s Jules Weiller" et cie Lloyd's de Londres Pluies: inondations= débordement des égouts 4 juill.1980 Commune de Laissey/ SNCF Eboulement d'un rocher d'un terrain communal: réseau ferré endommagé Cause: infiltrations d'eau dues à de fortes chutes de pluie Min.des transports/M. Lecieux Fortes pluies orageuses le 18-19/07/72: sect. cont. 1 et 10 sssect. Versailles 19 juillet 1972 4 juill.1980 N°13.968 -Arrêté cat’nat -Force majeure (FM) / Dispositif Motivation -ville de Nancy FM: non responsable (malgré leur des intensité, pas conséquences de caractère directement de violence imputables à imprévisible: l'insuffisance cf. des ouvrages inondations de d'assainisse1971) ment -Annulation du jugement du TA Nancy, la ville doit réparer la moitié du préjudice -pas de faute de la société / -contravention de grande FM: non voirie de la commune -origine: infiltrations d'eau -pas de faute de la SNCF assimilable à la FM -requête de la commune rejetée: responsabilité établie / -pas de preuve apportée de FM: non l'entretien 264 Caen 7 février 1978 Montpellier 8 mai 1979 accident du (manque normal de cet poids lourd de imprévisibilité ouvrage M.L. ) public (or persistance d'une importante flaque de boue sur la RN 322) -responsabilité de l'Etat, non atténuée par une faute de la victime (vitesse normale) 9 Ville de Pluies: / -qualité de juill.1980 l'Aigle/ inondations tiers du sect.cont. M.Massouline provoquées FM: non (pas requérant 1 et 4 sspar de caractère -mur édifié sect. l'écoulement de violence selon les n°11.908 insuffisant des imprévisible) règles de l'art eaux de pluie: et entretien effondrement normal du mur édifié -TA Caen a eu (4.07.75) tort de limiter la condamnation de la ville à la moitié du préjudice 2 oct.1981 Commune de Précipitations / -dommages sect.du Pouzilhac/ (14.03.74): imputables cont. M.Gayle inondations FM: non aux travaux de 3 et 5 ssparcelles (débordement réaménasect. cultivées de l'étang gement et de N°18.894 endommagées récurrent; recalibrage du malgré réseau des ampleur et fossés durée collecteurs exceptionnelle d'où de cette augmentation inondation) du volume et de la vitesse des eaux -responsabilité de la commune pour un tiers des 265 Marseille 7 avril 1978 23 janvier 1981 sect.cont. 3 et 5 sssect. N°13.370 Société des autoroutes du sud de la France/ M.Donadieu Versailles 21 mars 1979 10 juillet 1981 sect.du cont. 3 et 5 sssect. N°17.733 Commune d'Ermont/ Epoux Roger Rouen 13 mars 1977 7 octobre 1981 sect.du cont. 3 et 5 sssect. N°7.763 Consorts Delamare/ Etat conséquences dommageable s Pluies d'orage / -volume d'eau (13-14.07+1accru par le 2-3.10.73): FM: non débordement submersion (malgré du canal+ des cultures violence écoulement de M.D., exceptionnelle des eaux plus exploitées en ) difficile du bordure de fait de l'autoroute l'existence de l'autoroute -dommages subis imputables à l'existence de l’ouvrage public condamnation de la société, concessionnaire de l'ouvrage Pluies / -dommages (26.06.74): imputables au inondation du FM: non (pas mauvais sous-sol de la de violence aménagement demeure des imprévisible) des époux collecteurs (pas d'écoulement normal en cas de forte pluie): époux=tiers -imprudence des époux -ville responsable à 50% des dommages Pluies / -présence orageuses d'une tranchée (27.08.73): FM: non (pas ouverte pour inondation de de violence les PTT: a la cave de leur imprévisible) permis immeuble l'infiltration des eaux de pluie; 266 Paris 6 février 1980 9 juin 1982 sect.du cont. 10 et 5 sssect. N°23.625 Préfet de la Seine-SaintDenis/ société la Seigneurie Inondations: locaux de la société inondés / Lyon 1er mars 1989 17 nov.1982 sect.du cont. 2 et 6 sssect. N°17.712 Communauté urbaine de Lyon/ société "Brasserie de l'Europe" Orage / (11.08.73): inondation du FM:non sous-sol de l'immeuble FM: non -Etat responsable du préjudice (annulation TA Rouen 13.03.77) -inondation imputable à l'insuffisance du réseau départemental d'évacuation des eaux de pluie -responsabilité aux 2/3 du département, malgré la prise en compte d'une périodicité décennale de retour de tels orages -négligence de la société: part de responsabilité de la société: 1/3 -dommage pour partie imputable aux défectuosités de la voirie desservant l'immeuble et insuffisance de la capacité du réseau -mise en jeu de la responsabilité de la communauté (convention entre la société d'équipement 267 Montpellier 14 janvier 1981 17 déc.1982 sect.du cont. 1 et 4 sssect. N°25.223, n°23.278 Commune de BéthuneSyndicat intercommuna l d'assainisseme nt de l'agglomératio n de Béthune/ M.Henocque Inondations: sous-sol de la maison de M.H. (75-7677) / 7 janv.1983 sect.du cont. 6 et 2 sssect. N°32.526 Cie générale des eaux/ société Adan Pluies (18.10.77+ 10.10.79): inondations du magasin de la société / FM: non FM: non (malgré l'importance des pluies) et la communauté) -responsabilité engagée de la communauté en tant que maître des ouvrages d'assainis sement et de voirie communale -imprudence fautive de la société (mauvais aménagement) : responsabilité partagée -dommages dus aux défectuosités dans la voirie et le réseau d'égouts -responsabilité de la commune, propriétaire des ouvrages, et du syndicat qui assure l'entretien: 50% -fautes de M.H. (imprudence) atténuant leur responsabilité -dommage causé par l'engorgement des bouches d'égout -responsabilité de la Cie même en l'absence de faute, et 268 Montpellier 20 mars 1980 21 janv.1983 sect.du cont. 2 et 6 sssect. N°24.400 Commune de Villeneuveles-Avignon/ M.Guigui Nice 23 mai 1979 28 janv.1983 sect.du cont. 5 et 3 sssect. N°20.177 SEM Esterel côte d'Azur/ SA de matériel industriel (SOMI) Lyon 8 mars 1979 11 mars 1983 sect.du cont. Communauté urbaine de Lyon/ société "Papeterie malgré les dispositions du contrat Pluies / -dommage dû orageuses au (14.09.75+ FM: non ruissellement 08-09.76): (malgré leur des eaux d'une inondation à 2 intensité voie reprises de la exceptionnelle communale maison de ) -pas M.G. d'atténuation de la responsabilité entière de la commune en raison de la faute d'un promoteur du lotissement voisin Pluies: / -importante inondations masse d'eau (13-14.10.74): FM:non, retenue en graves malgré amont de dommages l'intensité des l'autoroute a aux pluies emporté installations pas de l'obstacle de SOMI caractère formé dans d'événements une buse imprévisibles d'évacuation et irrésistibles -lien de causalité entre le mauvais fonctionneme nt de l’ouvrage public et le dommage -responsabilité de la société concessionnai re (SEM) visà-vis des tiers: confirmation du jugement du TA Nice Inondations: / bâtiment à condamnation usage FM: non, de la industriel de malgré Communauté, 269 Lille 4 décembre 1979 1 et 4 sssect. N°17.752 F.Dumas" 29 avril 1983 sect.du cont. 2 et 6 sssect. N°22.893 Min.des transports/ société "Les Maïseries du Nord" la société (01- l'intensité propriétaire 05.75): à 3 exceptionnelle du réseau reprises des pluies d'assainissement -pas de faute à la charge de la société( étant donné l'absence de toute inondation antérieure au mois de janv.1975) Pluies d'une / -L'Etat n'a pas abondance l'obligation exceptionnelle FM: non, d'assurer les : inondations malgré leur propriétés de propriétés abondance riveraines des riveraines exceptionnelle cours d'eau (3.08.71) contre l'action naturelle des eaux, cela incombe aux propriétaires -dommages non causés par l'écluse, mais aggravés par le déversement d'eaux du réseau d'assainisseme nt de l'agglomératio n -pas de responsabilité de l'Etat, mais mise en cause de celle de la Communauté urbaine de Lille (système d'évacuation des eaux défectueux, défaut d'entretien) : 270 Marseille 24 février 1977 6 mai 1983 sect.du cont. 5et3 sssect. n°7.488,n° 7.568 Commune de Vitrollessociété provençale d’équipement/ société CODIP Pluies: inondations (11.10.72): dommages causés aux installations de la société / FM: non, (malgré leur importance); pluies d’une importance comparable à la même époque l’année suivante 50% -atténuation de la responsabilité due à la négligence (inondations prévisibles) et mauvais état de son propre réseau -cause principale: insuffisance de l’unique exutoire -responsabilité incombe à la commune, maître de l’ouvrage (réseau d’évacuation) -responsabilité solidaire de la société d’équipement du département des Bouchesdu-Rhône (2/3): manquement aux règles de l’art lors de la construction (concessionnaire des travaux) -atténuation de la responsabilité par une faute de la CODIP (imprudence dans l’aménagemen t alors que les inondations étaient 271 Lyon 2 juillet 1981 3 juin 1983 sect.du cont. 6 et 2 sssect. n°36.151, n°36.152 SA Denoyer et Faurite et société immobilière GrangeMorin/ société d’aménage ment du district de Villefranchesur-Saône (SAMDIV) Violent orage: / débordement d’un cours FM: non d’eau et inondation du bâtiment de la SA; Endommagement de moteurs et circuits électriques de machines d’imprimerie (8/07/77) prévisibles): 1/3 à la charge de la CODIP -pas de responsabilité ni de l’Etat, ni de la société des eaux de Marseille (pas de défaut d’entretien) -rapports juridiques liant la SAMDIV et la SCI “ GrangeMorin ” de droit privé: compétence de l’ordre judiciaire -risque permanent d’inondation (situation +configuratio n du terrain): il appartenait à la SAMDIV de prendre les mesures de précaution (mission d’aménagement des réseaux publics) -pas de faute de la société D.et F. lors de la construction: fondée à demander réparation à la société d’aménagement (annul.jugt TA Lyon 272 er Caen 21 juillet 1981 1 juill.1983 sect.du cont. 6 et 2 sssect. n°37.353 Marseille 20 mars 1979 16 novembre 1983 sect.du cont. 2 et 6 sssect. n°18.225 2.07.81) Ville de Pluies / -pas Falaise/ M.et orageuses d’exonération Mme (5.06.78): FM: non, de la ville en Thouroude sortie de son malgré alléguant que lit d’un l’importance ruisseau n’est ruisseau: et l’intensité que inondation de des pluies partiellement la propriété de (manque le sa propriété, M et Mme T. caractère de ni en violence soutenant que imprévisible) d’autres propriétaires se seraient opposés à la réalisation de travaux de nature à éviter une inondation -Montée des eaux soudaine: époux n’ont pas pu prévenir: ville entièrement responsable des préjudices (requ. de la ville rejetée) Ville de Pluies (2/ -cause 1ère de Marseille/ 3.10.73): l’inondation: société envahissement FM: non, mise en COPROMAR du sous-sol du malgré charge des et autres supermarché l’intensité canalisations par les eaux exceptionnelle communales de (manque le situées dans le ruissellement caractère de voisinage du violence fait de imprévisible) l’insuffisance de la section du ruisseau dans lequel elles débouchent -ville responsable (élément du réseau 273 Nice 12 mai 1981 30 novembre 1983 sect.du cont. 6 et 2 sssect. N°35.852 Marseille 18 décembre 1980 18 janv.1984 sect.du cont. 5 et 3 sssect. n°32.103, 32.483 communal): 50% -atténuation de la responsabilité du fait de la négligence de la société à prendre les mesures appropriées pour limiter le ruissellement (alors que: phénomène récurrent):50 % Ville de Pluies: / -inondations Toulon/ inondations dues à société Mer et des bureaux et FM: non, l’ouverture du Soleil locaux servant malgré leur tampon du d’entrepôt de importance et collecteur des marchandises leur intensité eaux pluviales à la société (pas de -responsabilité 16-17.01.78) caractère de de la ville violence engagée en imprévisible) raison du mauvais fonctionneme nt de l’ouvrage public (société=tiers) -pas d’atténuation de la responsabilité Société Pluies: / -cause du provençale inondations dommage: d’équipement, (2.10.73): FM: non, insuffisance commune de dommages malgré leur de l’unique Vitrolles/ causés aux importance exutoire société installations (pluies d’une -responsabilité CODIP de la société importance solidaire comparable à envers la la même société de la époque et au commune même endroit (maître de l ’année l’ouvrage) et précédente) de la société 274 Marseille 12 mai 1981 2 mars 1984 sect.du cont. 2 et 6 sssect. n°35.524, n°35.874 Syndicat Pluies (2intercommuna 3.10.73): l de inondations l’Huveaune, ville de Marseille/ société Micasar d’équipement du département (manquement aux règles de l’art dans la construction, en qualité de concessionnaire): 2/3 -aggravation des dommages par la négligence de la CODIP (inondations prévisibles): 1/3 à la charge de la société / -Etat et communes FM: non, n’ont pas malgré leur l’obligation importance d’assurer la exceptionnelle protection des propriétés voisines des cours d’eau contre l’action naturelle des eaux, cela incombe en principe aux propriétaires (sauf faute ou défaut d’entretien) -dommages imputables à l’implantation de l’usine exposée aux eaux de ruissellement et aux crues) -dommages aggravés en raison du mauvais état du cours de la 275 rivière et berges, et de la section insuffisante et du mauvais état d’entretien des ponts, et des travaux du syndicat -pas d’exonération de l’Etat, tenu à ses missions de police (curage des eaux): Préfet s’est abstenu de prendre les dispositions nécessaires en cas de crue 13 juin 1984 sect.du cont. 5 et 3 sssect. n°19.839, n°20.217 M.Garelli, Assoc.syndi cale de la rive droite du Var/ Office public départemental d’HLM des AlpesMaritimes Pluies abondantes (19.11.70): pertes de récoltes de M.G. / FM: non -débordement du canal imputable au déversement en grandes quantités d’eaux de ruissellement, de boues et de limons du canal d’évacuation issus du chantier de l’OPHLM -responsabilité solidaire de l’office public (maître de l’ouvrage), de la direction départemental e de l’équipement (maître d’oeuvre), et des 276 Marseille 2 février 1982 27 juillet 1984 sect.du cont. 2 et 6sssect. n°41.777, N°42.089 entreprises Spada et Nicoletti Syndicat Pluies: crues / -dommages intercommuna de l’Huveaune imputables à l de (27-28.12.72 FM: non, la situation l’Huveaune, et 2-3.10.73): malgré leur des bâtiments Ville de dommages importance de la société Marseille/ SA causés aux exceptionnelle (aucune Comptoir des établissements mesure de nouveautés “ Comptoir ” protection, mondiales alors que précédent de la crue de 12.72) -aggravation par le mauvais état du lit du cours d’eau et des berges, par la présence des installations de la société requ., du barrage et des ponts, appartenant à la ville de Marseille, par les travaux effectués en amont pour le synd.intercom -munal de l’Huveaune -pas d’exonération de l’Etat tenu d’assurer sa mission de police (curage des eaux): prise d’arrêtés préfectoraux mais abstention de prendre les mesures nécessaires au 277 24 oct.1984 sect.du cont. 6 et 2 sssect. n°38.753, n°48.628 Lyon 11 décembre 1980 14 déc.1984 sect.du cont. 6 et 2 sssect. n°31.195 respect de la réglementatio n: conséquences dommageable s de l’encombrement dues à l’Etat -synd. intercommunal responsable en tant que maître d’ouvrage des travaux de recalibrage Ville de Pluies (05.77): / -dommages Toulouse/ Inondations sont des Sociétés SOA, dues à la FM:non dommages de société surcharge (manque le travaux Déromédi et d’égouts: caractère publics qui société civile dommages exceptionnel) engagent la foncière La causés à la responsabilité Daurade SOA de la ville, sans moyen d’exonération Communauté Pluies: crue / -cours d’eau urbaine de du ruisseau Le non domanial; Lyon/ Société Ravin FM: non, aucun OBBO (11.08.73): malgré leur aménagement dommages au importance ne permet de dépôt de exceptionnelle le considérer mobilier et comme un matériel de la élément du société réseau d’assainissement communal -effets de l’inondation aggravés par le déversement dans le ruisseau d’eaux usées collectées par les égouts: dommage 278 17 oct.1984 sect.du cont. 10 et 6 sssect. n°12.910 Syndicat des vidanges de mas-Blanc et syndicat des vidanges de St-Etienne du Grès/ Epoux Gros Nice, 20 octobre 1981 22 mars 1985 sect.du cont. 6 et 2 sssect. n°38.875 M.Guiran/ Etat Châlonssur-Marne 26 mai 1981 26 avril 1985 sect.du cont. 6 et 2 ssect. n°36.098 Département de la Marne/ M.Fransoret d’ouvrage public: 50% à la charge de la communauté urbaine de Lyon Pluies / -inondations torrentielles ont pour cause (2-3.10.73): FM: non le mauvais inondations de état 2 parcelles des d’entretien époux G. par des 2 cours suite du d’eau: fautes débordement des 2 ou du syndicats refoulement -atténuation des eaux du de la canal responsabilité du Synd.de Mas-Blanc pour l’une des parcelles: 50% car faute des époux Précipitations -Déclaration violentes (2- par le Préfet ruissellements 3.02.74): du Var du en provenance inondations quartier de travaux par les eaux concerné réalisés par boueuses des comme zone l’administratio installations sinistrée n militaire piscicoles de -FM: non (ce (déboisement M.G. n’est pas un sans dispositif événement pour recueillir assimilable à les eaux un cas de FM) pluviales): responsabilité de l’Etat (annulation TA Nice 20.10.81) Violents / -dommages orages dus au (06.79): FM: non (pas fonctionneme inondations à de caractère nt défectueux 3 reprises par exceptionnel) d’un ouvrage les eaux d’un public ruisseau de la départemental parcelle de : M.F.: responsabilité 279 destruction partielle des plants de vigne Poitiers 18 février 1981 pour 1/3 du département -imprudence de M.F. (parcelle exposée aux inondations): 2/3 à sa charge 10 mai Entreprise Crue de la / -absence de 1985 Roginski/ Charente FM: aucune sect.du Ville de (5.12.76): FM: non, responsabilité cont. Saintes, SEM inondations malgré son à la charge du 6 et 2 ss- d’aménagedu chantier importance maître de sect. ment de la d’un parc de l’ouvrage n°33.460 région de stationnement pour la Royan et de la réparation des Saintonge dommages du chantier -il résulte du cahier des prescriptions spéciales que l’entreprise avait accepté les risques de dommages imputables aux crues: -aucune responsabilité retenue à la charge du maître de l’ouvrage pour la réparation des dommages subis par le chantier 6 déc.1985 M.Rampal, Inondations / -responsabilité sect.du M.et Me (17.01.78): du cont. Assante, crue de FM: non, concession2 ss-sect. M.Epp/ l’Huveaune: malgré naire : n°48.327, syndicat dommages l’importance dommage à un N°48.328, intercommuna exceptionnelle tiers(et non de n°48.329 l de des pluies la collectivité l’Huveaune, concédante= Etat Etat) -pas de 280 Nice 1er juin 1983 Paris 18 janvier 1983 26 juill.1985 sect.du cont. 6 ss-sect. n°46.186 Commune de St-Paul de Vence/ M.Corniglion 10 janv.1986 sect.du cont. 3 et 5 sssect. n°53.649, n°53.650, n°53.651, N°53.652, n°53.653 M.Coste et autres/ Ville de Toulon, Etat 17 janv.1986 sect.du cont. 10 et 4 sssect. n°48.941, Synd.intercom munal d’assainissem ent du Rû de Marivel, société “ Intérieurs Fortes pluies (02.77): glissement de terrain causé par les infiltrations d’eau venues de la route communale et de l’exutoire du lavoir municipal Inondations dues aux pluies:(1718.01.78+ 01.08.78): débordement d’un ruisseau canalisé et d’un collecteur d’eaux pluviales: dommages dans les appartements ou locaux commerciaux des requérants / Orage (08.7.75): inondations des locaux des sociétés / FM: non / FM: non FM: non, malgré l’importance et l’intensité des pluies responsabilité des sociétés Escota et Scetauroute: absence de lien de causalité entre dommage et travaux -pas de responsabilité du syndicat -responsabilité de la commune: 1/4 du dommage -3/4 à la charge du requérant (implantation de la villa) -dommage résulte de travaux d’aménagement: responsabilité de la ville de Toulon, maître de l’ouvrage (tiers) -responsabilité solidaire de l’Etat, maître d’oeuvre étude du projet et direction des travaux) -inondations provoquées par l’insuffisance du système de captation des eaux de 281 n°49.390, N°49.953 Limoges 22 mars 1983 92 ” et autres/ Min.de l’urbanisme et du logement orageuses ruissellement à l’emplacement de la zone sinistrée et au débordement des canalisations d’égouts -dommages imputables à un vice de conception de l’ouvrage et non à son mauvais fonctionneme nt: pas de responsabilité ni de la commune, ni du synd.interdépa r-temental. -responsabilité du synd. Intercommuna l du Rû de Marivel engagée (maître de l’ouvrage) -pas de responsabilité de l’Etat 31 Communauté Précipitations / -responsabilité janv.1986 urbaine de (08.80): de la sect.du Dunkerque/ retenue des FM: non, communauté cont. M.Lami eaux: (importance et urbaine 6 ss-sect. inondations périodicité ne (insuffisance n°55.421 des terrains de suffisent pas à d’aménageme M.L. la qualifier) nt et d’entretien du ponceau) 31 janv. Syndicat Période de / -terrains de 1986 intercommuna pluviosité (76, Me M. sect.du l pour 77, 78): FM: non riverains de cont. l'aménagemen submersion de malgré le l'un des cours 1 ss-sect. t du bassin de la peupleraie, caractère d'eau, objet de N°50.827, la Théols et propriété de exceptionnel travaux par le 282 50.900, 61.904, 61.919 50.828, 50.899, 61.905, 61.918 autres/ Me Magdalena et autres Me M. de ces pluviosités 28 fév.1986 sect.du cont. 2et 6sssect. N°42.258 Commune du Vernet/ Groupement français d'assurances, assureur de M.Bessières Crues importantes de l'Ariège: inondation du camping municipal (19.05.77): dommage à une caravane / FM: non, malgré la brutale remontée des eaux le 19.05 après une relative décrue synd. (Me M.=usager) -Pluviosité exceptionnelle a allongé la période de crue des cours d'eau: inondation régulière de la propriété -en raison des travaux, terrains submergés endehors de la période des crues -dommages dus pour partie à la situation naturelle des lieux, mais fortement aggravés par les travaux : 70% à la charge du synd. -implantation du terrain de camping dans un terrain "inondable B" -terrains exposés aux crues mais aucun travail de défense autorisé sans précaution efficace -part de responsabilité de M.B. (imprudence): 1/3 -pas de responsabilité 283 Basse-Terre 27 janvier 1983 28 fév.1986 sect.du cont. 2 et 6sssect. N°42.241 42.252 42.260 11 avril 1986 sect.du cont. 4 ss-sect. N°50.560 Commune du Vernet/ M.Carrère et autres (3 espèces) Idem Idem M.Eulalie/ Etat et commune des Abymes Précipitations / exceptionnelle s: Inondations FM: non répétitives de la propriété de M.E. 5 mai 1986 sect.du cont. 6et 2sssect. N°61.151 District de l'agglomératio n nancéienne/ M.Bardon et autres Orages violents: affaissement de la terrasse de la maison de M.B. / FM: non de l'Etat (service de l'annonce des crues): absence de lien de causalité Idem -conclusions dirigées contre l'Etat rejetées car n'est pas propriétaire des terrains, ni maître d'œuvre des travaux -pas d'élément suffisant pour établir si dommages aggravés par l'insuffisance des travaux d'assainissement de la commune: nécessité d'une autre expertise -dommages imputables aux T.P. de pose d'un égout collecteur -faute du district dont elle ne peut s'exonérer en invoquant 284 Nice 2 février 1982 8 oct.1986 M.Mayca/ sect.du Ville de Nice cont. 5 et 3 sssect. N°40.752 Pluies (20/ 21.09.79): obstruction FM: non des bouches égouts: destruction du mur de clôture de la propriété de M.M. Montpellier 4 juillet 1983 3 déc.1986 Ville de sect.du Béziers/ cont. M.Joullie 10 et3 sssect. N°53.929 Inondations / (22-23.08.76+ 26-27.10.79) FM: non de la propriété de M.J. faute de l'entreprise -vice de conception: exonération du district pour 1/5 responsabilité de l'entreprise de travaux publics (même en l'absence de faute) -ville responsable en qualité de maître de l'ouvrage -ville et entreprise condamnées solidairement à réparer le préjudice -inondations imputables pour 40% au mauvais entretien par la ville de la rigole d'Ariège -inondations imputables pour 60% à l'insuffisance du débit admissible par le double siphon dont l'un appartient à l'Etat (30%) -disposition exonérant l'administratio n de la responsabilité décennale 285 Bordeaux 20 décembre 1984 5 déc.1986 sect.du cont. 6 ss-sect. N°66.288 SA établissement ROBIN/ Communauté urbaine de Bordeaux Dijon 26 juin 1984 28 janvier 1987 sect.du cont. 3 ss-sect. N°62.327 M.Torgano/ commune de ChassagneMontrachet -Mais L.316-2 C.des com.: application des règles de la responsabilité décennale -à la charge de l'Etat:60% des condamnation s solidaires (ville de B. doit garantir l'Etat à 40%) Pluies très / -conjonction intenses (13exceptionnelle 14.12.81): FM: oui d'une débordement pluviosité de la Garonne: d'une extrême inondation du intensité, magasin de la d'une crue SA importante de la Garonne te d'une marée particulièrement forte, assimilée à un cas de FM -pas d'aggravation du fait d'une déficience des réseaux publics d'évacuation -requête de la SA rejetée Inondations / -responsabilité (29.05.81) de la dans le sous- FM: non, commune sol de la malgré engagée à maison de l'importance raison de M.T. et l'intensité dommages exceptionnelle liés à des pluies l'existence (manque le d'un O.P. caractère de (M.T.=tiers) violence -atténuation imprévisible) de la responsabilité 286 Marseille 19 juin 1981 27 novembre 1987 sect.du cont. N°38.318, n°38.360, n°38.399 Société provençale d'équipement, commune d'Aubagne, Min.de l'urbanisme et du logement/ société provençale d'équipement Inondations / (pluies: 25.02+03.03.7 FM: non 4) des installations de la société communale par la faute de M.T. (imprudence alors que maison particulièrement exposée à des risques d'inondations) : 2/3 à la charge de la commune -inondations imputables à la conception du réseau d'évacuation des eaux, et au fonctionneme nt du système d'évacuation des eaux, d'où condamnation solidaire et conjointe de la sté prov.d'équipe ment et des services de l'Etat, du BETEREM et de la commune d'Aubagne -inondations en partie imputables aux agissements de tiers sans incidence sur la responsabilité -imprudence de la société (risques naturels d'inondation connus): 2/5 à 287 Rennes 21 juin 1984, 12 juillet 1984 3 fév.1988 sect.du cont. 6 ss-sect. N°61.936, 61.939, 61.945, 62.480, 62.482, 62.483, 62.485, 62.486, 62.495, 62.509, 62.520, 62.521 62.525, 62.526 Département d'Ille et Vilaine/ M. Bervas et autres (14 espèces) Précipitations importantes (13.05.81): débordement des eaux du canal: dommages dans la maison de M.B. / Toulouse 28 novembre 1983 26 fév.1988 sect.du cont. 3 et 5 sssect. n°56.649 n°56.723 Commune de Saint-Jory, commune de Lespinasse/ Mlle Sanchez Fortes pluies (18.08.80): inondations par les eaux venant de la voie publique / Toulouse 28 novembre 1983 26 fév.1988 sect.du cont. 3et 5 sssect . n°56.715, n°56.722 26 fév.1988 sect.du cont. 3 et 5 sssect. N°59.452 Commune de St-Jory, commune de Lespinasse/ M.Cessy Idem Idem Communauté urbaine de Bordeaux/ Société Zoé Fourrures Orages (31.05.82+ 21.07.82): inondations du magasin / Bordeaux 22 mars 1984 FM: non FM: non, en dépit de la violence des pluies FM: non la charge des victimes -débordement =résultat de précipitations importantes conjuguées à une saturation des sols et faible ensoleillement -dommages résultent du fonctionneme nt de l’ouvrage public : entière responsabilité du département -responsabilité des 2 communes (auxquelles appartient le dispositif d'évacuation des eaux de ruissellement) -pas de mise en jeu de la responsabilité de l'Etat Idem 50% à la charge des communes -dommages dus à l'insuffisance du système d'évacuation des eaux pluviales dont 288 le fonctionneme nt incombe à la Communauté urbaine Rennes, 21 juin 1984, 12 juillet 1984, 23 octobre 1986 20 avril 1988 sect.du cont. 6 ss-sect. N°61.934, 61.940, 61.941, 62.476 à 62.479, 62. 502 62.508, 83.975 Département d'Ille et Vilaine/ société Pinto et autres (15 espèces) Précipitations importantes: inondations (13.05.81): débordement des eaux du canal d'Ille et Rance : dommages matériels / Rennes 21 juin 1984, 12 juillet 1984 18 mai 1988 sect.du cont. 6 ss-sect. N°61.938, 62.474 Département d'Ille et Vilaine/ M.Christin Inondations / suite à des précipitations FM: non abondantes(13 .05.81): débordement des eaux du Canal d'Ille et Rance: dommages causés aux biens entreposés dans les locaux de M.Moisan et FM: non débordement= conséquence des précipitations importantes, saturation des sols et faible ensoleillement de la saison -dommages résultent du fonctionneme nt de l’ouvrage public : entière responsabilité du Département (concessionnaire pour l'Etat pour le fonctionneme nt et l'exploitation du canal) débordement= conséquence de fortes pluies, saturation des sols et faible ensoleillement de la saison -dommages résultent du fonctionneme nt de l’ouvrage public : entière 289 appartenant à M.C. Bordeaux 27 juin 1984 18 mai 1988 sect.du cont. 3 ss-sect. N°71.987 Communauté urbaine de Bordeaux/ M.Crassat Conseil du contentieux administrati f de la Nouvelle Calédonie et dépendance s 4 novembre 1983 25 mars 1988 sect.du cont. 10 et 8 sssect. N°56.809, n°67.196, n°67.357 Territoire de la NouvelleCalédonie et dépendances/ M.Jollivel et Ludeau responsabilité du département concessionnaire pour l'Etat pour le fonctionneme nt et exploitation du canal Violent orage / -responsabilité (31.12.82): de la montée des FM: non, Communauté eaux malgré leur urbaine envers pluviales: importance et M.C., usager voiture de leur intensité de la voie M.C. exceptionnelle publique gravement s -atténuation endommagée de la responsabilité : imprudence de la victime (1/3) Pluies / -aucune faute (13.02.81): du Territoire inondation du FM: non, de la N.C. en terrain de malgré leur autorisant la MM.J.et L. extrême construction: violence il revenait aux (manque le victimes de caractère prendre les imprévisible mesures dans une telle nécessaires région) dans un terrain considéré comme inondable en cas de fortes pluies -dommage dû de manière indivisible à la conception inadaptée et l'entretien défectueux du radier (D.P.) et à l'insuffisance 290 Bordeaux 13 décembre 1984 22 juin 1988 sect.du cont. 6 ss-sect. N°66.865 Département d'Ille et Vilaine/ société d'intérêts collectifs agricoles d'habitat rural Intempéries / (08.07+05.08. 81 et 24-25FM: non 26.09.81): inondations: dommages au sous-sol du bâtiment de la société 11 juill.1988 sect.du cont. 3 et 5 sssect. N°65.376, Communauté urbaine de Bordeaux, ville de B./ M.et Me Perron Orages: / inondations de leur magasin à FM: non 2 reprises (31.05.82 et 21.07.82) de débouchés (D.P.): responsabilité du Territoire engagée (victimes=tier s) -origines naturelles des dommages: 25 % de responsabilité du Territoire, 25% à la commune (condamnatio n solidaire), et 50% aux victimes -inondations imputables aux insuffisances du réseau public d'évacuation des eaux pluviales -commune et département solidairement responsables des dommages -aggravation par l'insuffisance du réseau privé d'évacuation aménagé par la sté: 1/3 du préjudice -dommage a pour cause l'insuffisance du système d'évacuation des eaux pluviales et 291 n°66.090 27 juill.1988 sect.du cont. 6 et 2 sssect. N°50.977 9 nov.1988 sect.du cont. 6 et 2sssect. aggravation par l'obstruction des grilles des égouts (entretien=vill e) d'où responsabilité de la Communauté et de la ville -atténuation de la responsabilité en raison des fautes des victimes (manque de précaution):50 % Cie Chutes de / -dommages marseillaise pluie provoqués par de violentes: FM: oui, car le Madagascar/ cyclone violence et débordement Etat Hyacinthe intensité des eaux: en (17-28.01.80): exceptionnelle raison de la inondation des s et violence des locaux de la imprévisibles eaux, Cie débordement inévitable (sortie de son cours naturel) -pas d'aggravation du dommage du fait d'un défaut d'entretien ou de la présence d'un ouvrage public -requête de la Cie rejetée Entreprise Chute de / -Lien de Peduzzi/synd. fortes causalité entre mixte pour la quantités FM: non travaux création et la d'eau de pluie ( 37mm de publics et gestion de accumulées pluie en 12 dommage: zones indus./ depuis heures) responsabilité 292 N°69.616, Epoux n°69.657 Jacquot et autres Paris 29 mai 1985 23 déc.1988 sect.du cont. 10et 1 ss-sect. N°70.88 3 Orléans 25 septembre 1981 10 mai 1989 sect.du cont. 5 et 3 sssect. N°38.61 1 38.778, 39.490 19 mai plusieurs semaines dans un fossé utilisé pour la collecte des eaux d'un chantier: inondation des maisons des époux J. Ville de Orage Sèvres/ (21.07.82): synd.intercom inondations munal des locaux de d'assainissel'agence ment (…), banque populaire (BPROP) solidaire du syndicat (maître de l'ouvrage), de l'entreprise P. (exécution) et de l'Etat (maître d'œuvre) / -dommages aggravés par FM: oui, l'insuffisance violence et de certains intensité éléments du exceptionnelle dispositif s et d'évacuation imprévisibles des eaux -dimension nement trop faible des collecteurs (synd.interco m.): responsabilité du syndicat intercommuna l Commune de St-Amand Montrond, départ.du Cher, Min de l'agri. Précipitations / exceptionnelle s (27.05.77): FM: oui: inondations abondance et durée exceptionnelle s de la concentration pluviométriqu e (période de plus de 20j.de pluies particulièrement abondante) Commune Pluies très / -origine naturelle des dommages -aggravation par l'existence de 2 buses placées dans le canal (obstacle à l'écoulement normal): commune et Etat, maîtres des ouvrages responsables -charge solidaire de l'Etat, départ. et commune: 50% -pluies ont 293 1989 sect.du cont. 1 ss-sect. N°71.30 8 Paris 14 mars 1984 7 juin 1989 sect.du cont. 3 et 10 ss-sect. N°60.06 5 Grenoble 29 mai 1985 12 juin 1989 sect.du cont. 6 et 2sssect. N°71.29 1 Orléans 27 juin 1986 21 juil.1989 d'Etting/M. Bena abondantes (15.10.81): inondation du sous-sol et garage provoqué la FM: non, saturation et le pluies débordement exceptionnelle du collecteur s pour la d'eaux: région (74inondation 5mm en 24h), imputable à la mais pas de présence de caractère l'ouvrage imprévisible public : responsabilité de la commune engagée pour la totalité -pas de faute de la victime Synd.interdé Pluies / -explosion part. pour orageuses(06. d’un l'assainisse06.82): dégâts FM: non collecteur ment de causés par les d'eau pluviale l'agglo.parisie inondations mis sous nne/ synd de pression du copropr. fait de la saturation du réseau public d'égouts -responsabilité du synd. Interdépartemental Min.de Pluies / -dommage dû l'urbanisme, orageuses( 20au système du logement 21.09.82): FM: non insuffisant et des inondations (manque le d'écoulement transports/M dans les caractère des eaux M.Seignobos propriétés des imprévisible) pluviales de la et Caisse rég. MM.S.etM. RN7: Des Mutuelles responsabilité agri. Drômede l'Etat Ardèche (fonctionnement défectueux d'ouvrage public) -aucune faute à la charge des victimes Commune de Précipitations / -responsabilité Marigny-les- violentes de la 294 sect.du cont. N°82.79 5 Usages/ MeGanaye (06.81-01.83): inondations de la maison de Me G. FM: non, malgré la violence des précipitations Limoges 9 juillet 1985 11 oct.1989 sect.du cont. 1ss-sect. N°72.29 6 Synd.intercom munal pour l'aménagt du bassin de la Théols/Me Bena Fortes pluies (hiver 77-78): inondations provoquées par la rivière laThéols / Montpellier, 9 mars 1981 20 oct.1989 sect.du cont. Ville de Béziers/ M.Roucairol et M.Roux Inondations / (22-23.08.76) FM: non, FM: non, malgré leur caractère exceptionnel commune engagée: travaux d'élargissemen t et de renforcement de la voie communale+ absence de caniveau permettant l'évacuation -imprudence de Me G.: risques de situer une partie de la maison à moins de 20cm du niveau de la route: 50% à sa charge -synd. a rétabli le cours normal de la rivière afin de régulariser le débit des eaux: eaux ont contourné le dispositif: effet d'assèchement , cause des dommages deMeB -vices de conception sont l'unique cause de l'assèchement: synd entièrement responsable -Inondations imputables pour 40% au mauvais 295 1 ss-sect. N°77.12 0 20 déc.1989 n°89LY0117 Lyon 29 mars 1990 M. Boulon/Com mune de Villars de Lans Société Torfald Klaveness Cie/Port autonome de Marseille Chûte de neige / FM : non (manque le caractère exceptionnel) Rafale de vent / FM : non entretien par la ville de la rigole, pour 50% à l'insuffisance du débit admissible par le double siphon, et pour 25% au vice de conception -application des règles de la responsabilité décennale -parts mises à la charge de la ville de B. et de l'Etat des condamnation s solidaires prononcées par le TA de Montpellier à l'encontre de la ville, de l'Etat et de la société des autoroutes de France fixées respectivemen t à 40% et 50% Aucune faute reprochée à la commune maître de l'ouvrage -Pas de faute grave de l'Administrati on assimilable en cas de FM -Pas de vétusté particulière de l'ouvrage 296 Ville de Granville/ Société Chappe Et autres (9 espèces) Accroissemen / t du débit des eaux du fleuve FM: non le Bosq: inondations: endommagement des locaux de la société 04 avril 1990 sect.du cont. 6 et 2 sssect. N°84.95 6 Commune de Cholet/ M.Miquel Orages: Inondation (10.08.83) 25 mai 1990 sect.du cont. 6 et 2sssect. N°87.03 9 Commune de Pluies Rebais/Epoux violentes Bove (25.06.83): inondations répétées dans sous-sol Nantes (1) 23 mai 1990 Versailles, 6 février 1987 / FM: non, pas de violence imprévisible / FM: non (nullement imprévisible) Condamnation au rembourseme nt des frais de remise en état de l'ouvrage détérioré -Dommage ne résulte pas d'une situation naturelle, mais des caractéristique s de l'ouvrage -Pas de faute de la victime (tiers) Responsabilité de la ville de Granville engagée -Dommages imputables à l'existence et au fonctionneme nt de l'ouvrage public communal (réseau d'évacuation) -commune entièrement responsable du dommage -débordement de la canalisation d'eaux usées (ouvrage public)utilisée comme déversoir d'orage de la voie pub.: lien de causalité établi entre dommage et 297 Pau, 3 novembre 1981 25 mai 1990 sect.du cont. 2 et 6 sssect. N°39.46 0, n°39.497 M.Abadie et autres Pluies (0708.07.77): inondations Rennes 12 juillet 1984 5 oct.1990 sect.du cont. 6 ss-sect. N°62.574 Ville de Rennes/ Epoux Salmon Crue de l'Ille dommages causés à l'habitation des époux (05.81) ouvrage public -responsabilité entière de la commune / -principe: la responsabilité FM: oui, de l'Etat ne violence et peut être intensité engagée que exceptionnelle pour autant s et que les imprévisibles conséquences dommageable s aient été aggravées par un ouvrage public de l'Etat -pas de responsabilité de l'Etat: service de lutte contre les inondations (police municipale)ne peuvent qu'engager la responsabilité des communes, idem pour le service d'annonce des crues; idem pour les travaux de recalibrage / -cote d'alerte constatée: FM: non faute lourde des services de lutte contre l'inondation dans l'exercice de sa mission de prévention : responsabilité 298 Rennes 12 juillet 1984 Rennes, 6 mars 1986 Idem Idem Idem Idem Idem 5 oct.1990 sect.du cont. 6 ss-sect. N°62.57 5 5 oct.1990 sect.du cont. 6 ss-sect. N°78.27 8 Idem N°78.27 9 Idem N°78.28 0 Idem N°78.28 1 Idem N°78.28 2 Idem N°78.28 Ville de Rennes/ Me Tardivel Idem Idem de la ville -crue de l'Ille=consé quence des précipitations, de la saturation des sols et du faible ensoleillement -pas d'aggravation du fait du fonctionneme nt d'un ouvrage public -faute des victimes: zone classée inondable: 2/3 à leur charge Idem Ville de Rennes/ Me Blouin Idem Idem Idem /M.Maillot Idem Idem Pas de faute de la victime /Epoux Guillemois Idem Idem 2/3 à leur charge /Epoux Roumet Idem Idem Pas de faute des victimes /Epoux Rabouin Idem Idem 2/3 à la charge des victimes /M.Mace Idem Idem Idem 299 3 5 oct.1990 sect.du cont. N°62.51 8 78.391 78.392 78.475 78.293 78.493 78.494 Rennes, 12 juillet 1984 Rennes, 13 mai 1981 Grenoble 27 mars 1987 15 oct.1990 sect.du cont. 6 et 2 sssect. N°62.50 5 Lyon (1) 9 juillet 1990 Département d'Ille et Vilaine/ Me Connuel Et autres (7 espèces) Débordement / des eaux du canal d'Ille et FM: non Rance: dommage à la caravane de Me C. Département d'Ille et Vilaine/ société Eternit Industries Débordement du canal d'Ille et Rance, conséquence des précipitations importantes: Inondations (13.05.81): dommages à l'usine de la société Crues du Charbonnet: inondations d'immeubles (08-10.81) Commune de Bourg-StMaurice/ victimes des inondations du Charbonnet / FM: non / FM: non (car crues relativement fréquentes) -débordement dû aux précipitations, saturation des sols et faible ensoleillement -dommages résultent du mauvais fonctionneme nt de l’ouvrage public : entière responsabilité du département -conjonction des précipitations, saturation des sols et faible ensoleillement -responsabilité du départ. Entière -Dommages dus en grande partie au caractère des ouvrages: d'où responsabilité de la commune en tant que maître de l'ouvrage -responsable en tant que responsable de l'urbanisme (permis de construire) -Faute des victimes de nature à 300 Inondations Oui rupture d 'une canalisation: FM: non glissement de terrain détériore un immeuble privé Lyon (2) 7 novembre 1990 Marseille, 16 juin 1983 Bastia 1er décembre 1989 14 déc.1990 sect.du cont. 5 et 3 sssect. N°55.48 8, n°55.507 Société prov.d'équipe ment, commune d'Aubagne/so ciété CENPA Pluies (01.78): / installations de la société FM: non inondées Min.de Pluies: Oui l'équip./M.Cin inondations: quini dommage à un FM: non garagiste Lyon (3) 22 janvier 1991 23 janv.1991 sect.du cont 6 et 10 ss-sect. N°48.49 8 Commune de Vitrolles/SA du Motel de Vitrolles Précipitations (2-3.10.73): débordement du canal: inondations du sous-sol de l'hôtel / FM: non, malgré 196mm en 24h atténuer la responsabilité de l'Etat et la commune: 50% commune, 40% Etat, 10% victime. -situation météorologique inhabituelle -exonération partielle de la responsabilité (50%) de la commune -inondation imputable à la conception même du réseau et à son fonctionneme nt: commune responsable -aucune faute de la société (système de pompage) -Dommage causé par des travaux publics : responsabilité de l'Etat envers un garagiste, tiers par rapport à ces travaux publics -dommages causés par le fonctionneme nt d'ouvrages de l'Etat et du département, et par un ouvrage de la commune -faute des 301 Nantes 11avril 1991 Nantes 11avril 1991 Orléans 26 janvier 1988 Nantes (2) 6 juin 1991 N°89NT0027 5 Paris 16 mai 1988 Paris(1) 19 septembre 1991 Société Civile Professionnell e Bore et Xavier/Min. de l'Equipement du Logement de l'AT et du Transport Min. d'Etat, Min. de l'Equipement du Logement des Transports et de la Mer/ SARL CattiroloLepage Min.de l'Agri. Et de la forêt/Me Guillou, adm.judiciaire de la SA des Transformateu rs Union Venues d'eau : / existence d'une nappe FM : non phréatique (manque le caractère exceptionnel) Commune de LivryGaragan/ M.Grumelard Pluies (orage Oui le 31.08.83): inondation du FM: non sous-sol Venues d'eau victimes (dispositifs insuffisants de protection et d'évacuation des eaux): 2/3 à la charge des victimes -1/3 à la charge de l'Etat, département et commune Pas de situation de FM exonératoire / FM : non Précipitations / exceptionnelle s (+ de 20 FM: oui jours) : débordement d’un canal inondations Conséquences dommageable s des inondations aggravées par l'existence d'une buse: relation de cause à effet entre l'ouvrage et les dommages causés par les inondations à la société -sinistre dû à une insuffisance de gabarit et 302 N°89PA0054 1 Nancy 1er juillet 1988 Paris 15 décembre 1987 Nancy (2) 9 juillet 1991 N°89NC0075 0 et M.Bouvier M.Riter/ Communes de Bayon et Virecourt Pluies (78 et 79); Montée en pression des eaux dans la canalisation des eaux d'une avenue: pression résultait d'un supplément du débit d'eau provenant d'un déversoir d'orage / Ville de Paris Fuites de canalisation: inondations (25.02+03.06. 83) dégradation des lignes de communicatio n tél. Précipitations (13.01.88): passage du cyclone "Anne": terrains endommagés / Pluies (02.08.82): désordres / Paris (1) 1er octobre 1991 N°89PA0063 7 Nouméa Paris 9 novembre 22 octobre 1989 1991 N°89PA0258 9, n°89PA02898 Ville de Noumea/ Epoux Rolland Nantes 16 juin 1988 Nantes (2) 14 novembre Commune d'Ecouflant/ Union des FM: non, malgré l'importance des pluies FM: non (pas assez gravité) / FM: non, malgré leur violence (caractère prévisible dans une telle région) FM: non une mauvaise conception de l'égout communal -aucune faute de la victime -ville de L-G responsable -Lien de causalité entre dommage et ouvrage public (canalisations) -responsabilité conjointe et solidaire des communes -atténuation du fait de la faute de la victime (imprudence): 2/3 à la charge de M.R. -dommages dus aux fuites des canalisations d'eau de la ville -requête de la ville rejetée -inondations (rivière en crue), mais aggravation par l'existence de l'ouvrage public de la ville -origine naturelle des dégâts: 30% à la charge de la ville -pas de vices de construction 303 1991 N°89NT0093 5 Caen 17 octobre 1989 Versailles 3 juillet 1987 Nantes (2) 28 novembre 1991 N°89NT0155 2 89NT01555 89NT01556 Paris (1) 31 décembre 1991 N°89PA0124 7 89PA01248 89PA01249 89PA01251 89PAD01265 89PAD01513 89PA01514 Basse-Terre Paris (2) 3 mai 1989, 3 mars 1992 20 novembre 1990 assurances de Paris et société d'équipement du départ. De Maine-etLoire Commune de Thaon/ M.Varagnat et la MACIF Et autres dans les maisons des victimes Synd.intercom munal d'assainisseme nt de la région de Villeneuve-StGeorges et commune de Brunoy/ M.Fourio et autres (7 espèces) Commune des Abymes/socié té Sedan Crues de l'Yerres (7880): inondations Inondation (12.07.82): sous-sol de la maison de M.V. Inondations (17.10 et 23.11.87): débordement d'un canal d'évacuation d'eaux pluviales appartenant à la commune des Abymes aggravant -responsabilité de la commune / -responsabilité de la FM: non, commune du malgré fait de l'importance l'ouvrage et l'intensité public exceptionnelle (insuffisance des pluies du réseau (manque le communal caractère d'évacuation imprévisible) des eaux pluviales) -pas de faute de la victime / Responsabilité FM: non des 2 collectivités publiques -Exonération partielle du fait de la négligence du requérant / FM: non -Société Sedan, qualité de tiers par rapport à l’ouvrage public -aucune faute, ni imprudence à la charge de la victime -précipitations ne constituent pas un événement de FM de nature à exonérer la commune de 304 Montpellier 15 février 1992 Estors Antoine/ Entreprise Lefevre Violentes pluies orageuses Nancy Nancy (2) 6 novembre 26 mars 1992 1990 Commune de Chavelot/ M.Ferry Fortes / précipitations: dommage à la FM: non propriété de M.Ferry Versailles 20 mars 1990 Synd.intercom Inondations munal pour répétées l'aménagt hydraulique des vallées du Croult et du petit Rosne/ MM.F.de Préaumont, Piederrière et Vaessen Paris (2) 30 avril 1992 / FM: non / FM: non sa responsabilité -Défaut d'entretien de l’ouvrage public -Société entrepreneur des travaux responsable à 50% du dommage -Lien de causalité entre désordres et fonctionneme nt de l'égout communal -Commune de Chavelot, entièrement responsable des dégâts causés à la propriété de M.F. -Inondations imputables à l'Etat des ouvrages hydrauliques de ces 2 collectivités publiques -d'où responsabilité du syndicat et celle du département se trouvent solidairement engagées à l'égard de MM.P., F. de P.et V -aucune faute des victimes mais partage des conséquences 305 Montpellier 15 mai 1992 Poitier 4 février 1987 Copropriété Inondation de / Pujol-Font/SA la cave d'un cie Générale immeuble FM: non des eaux Bordeaux (2) 27 mai 1992 Entreprise Inondations: Oui René destruction de Potet/commun buses FM: non e de St-Rémysur-Creuse Montpellier Bordeaux (1) 5 avril 1990 9 juin 1992 Départ.des Pyrénées Orientales/ M.Prim Pluies / (13.10.86): inondations de FM: non parcelles Lille 26 décembre Société Spie Batignolles/S NCF et Etat Précipitations: / crue de la Sobre: FM: non Nancy (1) 9 juillet 1992 dommageable s à la charge des propriétaires :partage de responsabilité Responsabilité de la Cie des eaux: lien de causalité entre le dommage et l'ouvrage public -ouvrage public communal pas en mesure de canaliser les eaux de pluie lors du violent orage du 25.06.83 (ouvrage public sousdimensionné) -Orage n'est pas la cause de la destruction de l'ouvrage, ne peut exonérer le constructeur de sa responsabilité : entr. Potet responsables Situation des parcelles exposée dans une zone classée inondable -pas de lien certain et direct avec les dommages -La carence imputée à l'Etat au motif 306 1989 Dijon 24 février 1987 inondations 16 octobre 1992 sect.du cont. 6 et 2sssect. N°87.285 N°87.390 Société franç. de transports Gondrand Frères, Min.de l'équip., du logement, de l'AT et des transports Pluies intenses (20.09.82): inondations des entrepôts de la société Cotrafi (10cm d'eau) / FM: non, malgré la très grande intensité des pluies qu'il se serait abstenu fautivement de créer un service d'annonces des crues n'est pas susceptible d'engager sa responsabilité à l'égard des victimes des inondations: responsabilité de l'Etat engagée à cet égard -Carence du Préfet (curage des eaux): faute lourde -Part de responsabilité de la SNCF (présence d'un pont) -responsabilité solidaire de la commune (maître de l’ouvrage), de l'Etat (maître d'œuvre) -dommage dû aussi à la situation défavorable de l'entrepôt, inadaptation du réseau privé d'évacuation, et défaut d'entretien du fossé d'écoulement: trois quarts à la charge de la société 307 Nancy 11 mars 1990 Nantes (2) 5 novembre 1992 Ville de Nantes Lyon (3) 2 février 1993 Commune de Inondations Bellerive sur allier/M.Boye r Oui Société d'énergie électrique de Charmes/Etat / Nancy (1) 9 mars 1993 Lyon (2) 26 mai 1993 Commune de Chateauneuf du Pape/SARL DI Biaggi Frères Effondrement / des berges d'une rivière FM: non en ville: dommage à un immeuble OPHLM Berges submergées en 1983 par la Moselle: inondations entraînant des pertes commerciales Inondation d'un chantier du fait de l'obstruction des bouches d'évacuation FM: non FM: non / FM: non Responsabilité de la ville, maître de l'ouvrage -aucun comportement fautif de l'Etat ou du Port Autonome -responsabilité de l'Etat ne peut être recherchée pour non participation à la protection des berges de la rivière contre l'action naturelle des eaux -Lien de causalité établi entre dommage et l’ouvrage public -responsabilité de la commune engagée -Digue artificielle est un ouvrage public -Requête de la société rejetée Responsabilité de la collectivité. à l'égard d'une entreprise (tiers) -Défaut d'entretien régulier 308 Rennes 20 novembre 1991 Nantes (2) 27 mai 1993 16 octobre Meriadec/ Cie Inondations 1995 des eaux et de suite à des 7 et 10 ss- l'ozone pluies d'orage sect. N°150.319 Cour de renvoi : Nantes (2) 30 décembre 1996 N°95NT0150 4 Toulouse 11 août 1992 Bordeaux (1) 2 novembre 1993 Commune de Mons/Epoux Carboni / FM: oui pour la 1ère C.A.A Mais appréciation insuffisante pour le C.E. Non pour la Cour de renvoi Orage: torrent / de boue: insuffisance FM: non du réseau communal des eaux pluviales CE : “ En se bornant à faire référence aux résultats de l'instruction et en s'abstenant de préciser les faits sur lesquels a porté son appréciation, la Cour administrative d'appel ne met pas le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la qualification juridique qu'elle a donnée à ces faits Cour de renvoi : -communauté urbaine exonérée -Cie des eaux et de l’ozone entièrement responsable : insuffisance du réseau d’évacuation des eaux -Cause directe des dommages dans le mauvais fonctionneme nt d'un ouvrage public appartenant à la commune -Pas de FM, rien qui 309 19 janv. 1994 sect.du cont. 6 et 2 sssect. N°78.635 Lyon (2) 24 mars 1994 Nantes (2) 24 mars 1994 atténue la responsabilité de la commune de Mons à l'égard des victimes Commune de Violentes / -Epoux P. Chateaudun/ précipitations tiers par époux Perroux (10.08.83): FM: non, pas rapport à débordement de caractère ouvrage du système imprévisible public d'évacuation du -responsabilité des eaux débordement de la pluviales des réseaux commune entraînant un (précipitations engagée à glissement de d'intensité l'égard des terrain, d'où comparable époux décès de dans le passé) -pas de faute parents des des époux qui époux P. et atténuerait la destruction de responsabilité leur maison de la commune SNCF/Consor Violentes / -Existence ts Berthon précipitations: d'un ouvrage inondations: FM: non public : effondrement responsabilité du mur de de la SNCF soutènement engagée en de la propriété principe sans des Berthon faute (lien établi) -faute des victimes de nature à atténuer la responsabilité de la SNCF: 1/4 du préjudice M.Guilbaud et Débordement / société des eaux d'un Responsabilité Mutuelles ruisseau FM: oui du rég.d'assuranc département es/Etat de Loire(département) Atlantique, propriétaire de l'ouvrage public engagée 310 Lyon (2) 19 avril 1994 Montpellier 13 mai 1994 Départ.de la Fortes pluies: Hauteeffondrement Corse/M.Hoiri d'un mur e Oui Cie d'assurances" Le continent" SA/commune de Poulx Oui Pluies fortes: effondrement d'un mur FM: non FM: non même sans faute (fonctionnement) envers M.G. -pas d'exonération du fait du tiers -Exonération du fait d'un événement de force majeure : 1/2 à la charge du départ. -Conjonction de plusieurs facteurs: pluies+ déclivité forte de la voie vers les terres+ insuffisance du dispositif de collecte et d'évacuation des eaux pluviales: lien de causalité établi -déclaration de l'état de cat.nat. ne suffit pas à établir le caractère de force majeure exonératoire de la responsabilité de la puissance publique fonctionneme nt défectueux de l’ouvrage public : voirie communale - cat.nat. non 311 Paris (1) 17 mai 1994 Nancy (1) 19 mai 1994 Montpellier constitutive d'une force majeure Société Inondation du / -conséquences d'importation lotissement de dommageable de la société FM: non s de pharmaciens l'inondation réunis/ aggravées par commune de la présence St-Denis de la d'un pont Réunion -responsabilité de la commune de St-Denis engagée du fait de l'ouvrage public dont elle est propriétaire -Mais imprudence de la société= faute de nature à atténuer la responsabilité de la commune Commune de Pluies très / Lachy/ violentes: Conséquences consorts propriété des FM: oui, du dommage Kryda époux K. pluies d'une aggravées par envahie par violence l'insuffisance les eaux exceptionnelle du système provenant d'évacuation d'un égout des eaux communal pluviales dont le fonctionneme nt incombait à la commune de Lachy -pas de faute des victimes -responsabilité de la commune: 50% Bonnefoi/ Inondations / -inondations 312 25 mai 1994 Montpellier 8 juillet 1994 commune par les eaux d'Ales et de son jardin chambre du commerce et de l'industrie d'Alés et Préfet du Gard FM: non Nantes (2) 9 juin 1994 Commune de Violentes / Chateaudun/ précipitations: Me Delaporte insuffisance FM: non du système d'évacuation des eaux pluviales: débordement et glissement de terrain: décès de M.Delaporte Lyon (4) 15 juin 1994 Départ.de la Haute-Corse/ commune de Bastia/ SA société corse Inondations: dommages à la société Oui Sire/ Etat (préfet de l’Aude) Inondations: dommage causé à la maison / FM: non FM: non dues aux eaux en provenance d'une piste d'essai+ mauvais fonctionneme nt du système d'évacuation des eaux pluviales de la commune -responsabilité solidaire des maîtres de ces 2 ouvrages envers les tiers M.D.=situatio n de tiers par rapport à l’ouvrage public : responsabilité de la commune engagée -pas d'événement de force majeure exonératoire -aucune faute des victimes -Dommages subis par la société imputables en grande partie à la commune(75 %) et au départ.(25%) -Etat condamné à réparer le préjudice du fait de la délivrance du permis de 313 Nancy (1) 13 juillet 1994 SARL Nord Inondations Transmission/ des locaux communauté urbaine de Lille / Lyon (4) 28 septembre 1994 Commune de Bastia/Me Tamagna Pluies: dommages subis par la propriété de Me T. Oui Bordeaux (2) 3 avril 1995 Consorts Boyer et autres/ Etat, commune de Pézenas et départ.de l’Hérault Pluies Oui FM: non FM : non FM: non construire dans une zone inondable de la commune: faute du préfet -imprudence des victimes de nature à atténuer la responsabilité de l’Etat Resonsablilité de la communauté urbaine (objet: demande de provision) -responsabilité de la commune de Bastia: mur à l’origine des désordres s’incorpore aux dépendances du DP dont l’entretien normal incombait à la commune -Commune de P.ni propriétaire, ni chargée de l’entretien des ouvrages: pas de responsabilité -Etat responsable des dommages dont la cause incombe au fossé d’évacuation des eaux pluviales (entretien) 314 Bordeaux (2) 3 avril 1995 Bordeaux (1) 6 mai 1995 Nancy (1) 26 juin 1995 Nantes (2) 22 novembre 1995 Commune de la Tour-surOrb/ M.Cavaillé Débordement des eaux de pluies Oui Synd.intercom munal des eaux et assainissemen t de la région MonferranSavesCologne/M.Pe rdiguier Communauté urbaine de Strasbourg Inondations en 1988 des parcelles appartenant à M.P. / Violents orages: inondation de la cave d'un tiers Oui Commune de Crestot Inondation: affaissement d’une maison Oui FM: non FM: non FM: non FM: non -Dommages ont le caractère de dommages de travaux publics -lien de causalité ouvrage public/domma ges -aucune faute de la victime -responsabilité entière de la commune de la Tour-surOrb -commune pas fondée à appeler le départ. de l’Hérault en garantie -75% des dommages sont imputables au barrage -refoulement de l'égout public -1/3 à la charge de la victime (imprudence) -caractère défectueux de la voie communale+ mauvais fonctionneme nt d’un puits absorbant -responsabilité conjointe et 315 Nancy (1) 14 décembre 1995 District de l’agglomératio n nancéenne/SA RL Pedersoli Bordeaux (1) 4 avril 1996 Commune de Marguerittes Bordeaux (1) 30 mai 1996 Assoc.synd.au torisée du Canal d’Elne Bordeaux (2) 14 juin 1996 Départ.du Gard/M.Rouq uet solidaire de la commune et du SIVOM, maître de l’ouvrage du puits Débordement Oui -responsabilité d’un ruisseau du district à souterrain: FM: non l’égard de la inondation des (périodicité de société locaux 20 à 30 ans de -faute de la occupés par la l’orage) société société (stocker du matériel de valeur dans un sous-sol exposé aux risques d’inondations) : atténuation du 1/4 de la responsabilité du district Précipitations / -responsabilité importantes: de la débordement FM: non commune du réseau de -pas de collecte des rembourseme eaux pluviales nt à la victime d’une de ses travaux commune et inondation d’immeuble Fortes pluies: / -lien de rupture de la causalité digue: FM: non établi: destruction de responsabilité cultures de maraîchères l’assoc.synd. Inondation de / -aucune faute la maison de de M.R.; lien M.R.: origine FM: non de causalité dans les établi travaux de -responsabilité rechargement des de la route dommages départ.: incombe dommages de entièrement TP au département 316 Bordeaux (2) 24 juin 1996 Nancy (1) 6 août 1996 Paris (1) 12 septembre 1996 du Gard SA Lyonnaise Pluies très / -inondations des eaux/ abondantes: imputables au M.Daverat inondation de FM: non: fonctionneme l’appartement 77,7mm de nt du réseau de M.D. pluies en 24h public dont 66,5 en communal 2h: d’écoulement phénomène des eaux de exceptionnel pluie dont pour la région, l’exploitation mais pas de est confiée caractère (affermage) à imprévisible la société Lyonnaise des eaux -responsabilité engagée du fait des dommages subis par M.D. Min.de Inondations / Responsabilité l’équipt, des ont causé des des dégâts transports et dégâts à des FM: non causés à des du tourisme constructions constructions privées privées par des inondations dues à l’aménagemen t d’ouvrages publics -atténuation d’1/4 car imprudence des victimes Assoc.synd.au Fortes pluies Oui -maître de torisée des (31.05.92): l’ouvrage propr.du inondations FM: non, responsable domaine de répétées du malgré la des Grandchamp/ jardin et du violence et dommages Consorts pavillon de l’intensité des causés par les Bocquié M.B. depuis pluies ouvrages 71 (manque le publics caractère de -réseau violence unitaire imprévisible: d’évacuation survenance des eaux tous les 10 pluviales et 317 ans) Lyon (2) 17 octobre 1996 N°95LY0194 9 District de Bastia/ société ”Les Pépinières de Furiani ” Montpellier 18 décembre 1996 Pluies orageuses (21.07.94): inondation de parcelles due au comblement d’un canal de drainage destiné à recueillir les eaux de ruissellement MAIF/ Fortes pluies: commune de débordement St-Jean Pla de d’une rivière: Corts parcelle emportée / Commune d’Argenteuil Oui FM:non, malgré l’importance et l’intensité exceptionnelle des pluies (manque le caractère de violence imprévisible) Oui FM: non usées insuffisant -aucune faute des victimes: permis de construire régulier, pas de risque particulier -Assoc.synd. reconnue entièrement responsable des dommages subis par M.B. -District de Bastia doit verser 500.000Frs. -faute de la victime: construction d’un garage sans permis de construire dans une zone classée inondable 16 octobre 1996 Paris (4) 29 avril 1997 N°94PA0144 5 GrenobleGrenoble 2 juin 1994 Lyon (2) 13 mai 1997 Inondation des locaux d’une chaufferie par flot de ruissellement extérieur Balusson, Catastrophe Mutuelle du du Grand Mans et autres Bornand: crue FM: non (absence de caractère exceptionnel) / FM: non Responsabilité sans faute -faute du préfet de nature à 318 d’un torrent Le Borne le 14 juillet 1987 inondation d’un terrain de camping entraînant la mort de 23 campeurs Lyon (2) 13 mai 1997 N°94LY0092 3, N°94LY0120 4 Etat et Idem commune du Grand Bornand/ M.Pluchard et Me Brandily / FM: non (précédents au siècle dernier+ 08.07.36): quelle que soit la violence de la crue à l’origine de la catastrophe, événement pas imprévisible engager la responsabilité de l’Etat à l’égard des victimes de la crue -les dispositions du D.07.02.59 et du D.09.02.68 ne dispensaient pas le maire d’exercer ses pouvoirs de police (prévention des fléaux): le maire, en retardant la prise de décision, a méconnu ses obligations -Terrain inondable et dépourvu de toute protection: préfet a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune à l’égard des victimes (sécu.pub.) -maire a manqué à sa mission de veiller à la sécurité publique + prévention contre les fléaux calamiteux 319 2 Lyon 26 juin 1997 St-Denis de la Réunion 11 juin 1997 n°74.95 Sté Proud et Cie Cigna/Etat Mlle HenTing, la MAIF/ Conseil général de la Réunion, Préfet de la Réunion (DDE), tels que les inondations; malgré la pluviosité intense, maire n’a pris aucune disposition pour prévenir les risques que connaissent les campeurs => Etat et commune solidairement responsables des dommages Pluies / Responsabilité provoquant de la des FM : oui Commune St inondations : (exceptionnell Julien en St dommages e et Alban car le aux bâtiments imprévisible) pont et produits de appartient à la la Sté Proud commune : dommages aggravés Pas de faute de l'Etat : mesures nécessaires par le Préfet Département de l'Ardèche mis hors de cause Pas lieu de statuer sur la responsabilité Débordement de la ravine des Cabris: inondation / FM: non -responsabilité des collectivités publiques peut être engagée quand les dommages subis ont été provoqués ou 320 commune du tampon Lyon (1) 18 décembre 1997 n°94LY00889 Lyon (2ème Chambre) 18 septembre 1997 aggravés soit par l’existence ou le mauvais état d’entretien d’ouvrage public, soit par une faute commise par l’autorité administrative -pont sur la rivière pas susceptible de faire face à des crues importantes issues de dépression -vice de l’ouvrage est la cause directe des dommages subis par la propriété et les biens de Mlle H.T. -responsabilité entière du département de la Réunion Commune du Pluies (14/ -coulées de Rayol Candel- 15.01.88): boue sur-Mer/ dommages de FM: non, provenant de M.Bonnefous Me B. malgré l’effondremen l’importance t des remblais et l’intensité -responsabilité exceptionnelle de la (pas de commune: caractère de lien établi violence entre ouvrage imprévisible) public et dommage District de Fortes pluies Oui District non Bastian, Cie (28-29/10/95): FM : non responsable Générale des inondations : (manque le car délégation Eaux/M. plantations caractère à CGE Barratier maraîchères imprévisible) (contrat de M. B. d'affermage) 321 impropres à la vente Lille (5) 25 septembre 1998 n°96-3873 Bordeaux 13 octobre 1997 Min. Equipement, Transport et Tourisme/M. Charpentier Lyon 18 décembre 1997 Commune du Rayol Canadel sur Mer/M. Bonnefous GAEC Jacquemart/ commune de Fontaine Notre Dame et autres Chutes de pluies : glissement de terrain : effondrement d'une portion de la route nationale affecte l'accès à son commerce saisonnier Fortes précipitations : 14-15/01/88 : coulées de boues : propriété de M. B. endommagée / FM : non / FM : non Pluies / d’orage: champ FM: non d’endives cultivé par le GAEC partiellement inondé en août 92 par les eaux provenant d’un réseau d’assainissement, propriété du synd.intercom Responsabilité de la CGE : lien de causalité établi entre dommage et existence de l'ouvrage Pas de force majeure des phénomènes des chutes de pluies -Intensité exceptionnelle des coulées de boues mais pas de violence imprévisible -Lien de causalité établie Responsabilité de la commune -Inondation due à la mise ne charge du réseau d’assainissement: -Etat hors de cause -commune hors de cause -responsabilité de l’assoc. foncière de remembremen t: défaut d’entretien d’une buse 322 munal Lille Nancy (3) 20 juin 1994 3 décembre 1998 N°94NC0165 6 Synd.intercom munal pour l'assainissement agri. Du Bas Pays de Importantes / inondations des terres FM: non provoquées par les travaux située dans un fossé -dommage subi par la GAEC: conséquence d’un débordement des égouts du réseau du synd.d’assaini ssement: pas de lien de causalité direct entre défaut d'entretien de la buse et dommage subi par le GAEC -responsabilité de la société SADE: en tant que fermier de l'ouvrage public : responsabilité à l'égard des tiers même en l'absence de faute de sa part des dommages résultant du fonctionneme nt de cet ouvrage dés lors que ces dommages ne résultent pas d'un événement de force majeure ou d'une faute de la victime -cause: important et brutal afflux d'eau provoqué par 323 Bastia 16 février 1995 Lyon (1) 22 décembre 1998 N°95LY0093 0 Béthune/ M.Monvoisin d'aménagement de la rigole de Beuvry Min.de l'A.T., de l'équipement et des transports/ M.Acquaviva Fortes pluies / (27-30.11.87): inondation de FM: non l'établissement de restauration de M.A. les travaux de curage effectués sur la partie amont de la rigole +interruption des travaux d'aménagement de la partie aval de la même rigole: exécution des travaux publics de nature à engager la responsabilité du synd. Intercommuna l Buses n'ont pas permis un écoulement correct des eaux: cause directe de l'inondation -Lien de causalité entre le sinistre et l'ouvrage (victime=tiers ) -faute d'un tiers sans influence sur la responsabilité encourue par l'Etat en qualité de maître de l'ouvrage de la RN: défaut de fonctionneme nt de l'ouvrage -responsabilité de l'Etat 324 Lyon (1) 28 juillet 1999 Commune de Montanay/ société Eltra, MM.Muradia n et Setem et société Gerland routes Saint-Denis de la Réunion 15 avril 1992 Paris (1) 16 octobre M.et Me 11 mars 1993 1996 Roux/ Etat et commune de Cour de St-Denis de la renvoi : Réunion Paris (3B) 4 novembre 1999 N°96PA0431 3 Saint-Denis de la Réunion 15 avril 1992 Paris (1) 16 octobre 11 mars 1993 1996 N°148970 Cour de renvoi : Paris (3B) 4 novembre 1999 N°96PA0431 4 Pluies d'une intensité exceptionnelle : affaissement du talus et effondrement du mur: endommagem ent de la voie, bordures, trottoirs… Pluies ayant accompagné le cyclone Firinga (29.01.89) Société Idem FIDECO Réunion/ Etat et commune de la Réunion engagée vis-àvis de l'Etat / -Pluies ont révélé FM: non malfaçons: ouvrages impropres à destination -responsabilité solidaire des constructeurs sur les art.1792 et 2270 C.civ. (erreurs de conception +défaut de surveillance+ mauvaise exécution) / Responsabilité conjointe et FM: oui pour solidaire de les deux CAA l'Etat et de la violence et commune de intensité St-Pierre à exceptionnelle l'occasion de s et ces imprévisibles, inondations y compris au regard de leur occurrence dans la période annuelle de l'activité cyclonique qui s'étend à la Réunion de janvier à mars Idem -pas de lien de causalité entre le pont de chemin de fer (départ.) et le dommage -pas de rôle aggravant du radier ni par le chantier 325 Besançon 13 avril 1995 Nancy (3) 2 décembre 1999 N°95NC0103 2 Syndicat intercommuna l d’assainisseMent des agglomération s riveraines de La Vallière Pluies importantes Débordement du réseau d’évacuation des eaux pluviales Non FM : non Limoges 21 mars 1996 Bordeaux (2) 14 février 2000 N°96BX0078 6 Commune de Bourganeuf Non FM : non Pas imprévisible Marseille Lyon (2) 3 novembre 16 mars 2000 1995 N°96LY0028 1 Commune d’Aubignan Département du Vaucluse Remontées d’eau en provenance de l’égout communal à la suite d’un violent orage Inondation Marseille Lyon (1) 12 mai 1995 21 mars 2000 N°95LY0144 3 N°95LY0144 4 Association syndicale d’assainissement et d’irrigation par le canal du Real Fortes pluies Débordement du canal Inondation Oui FM : non Non FM : non -requête de la société Fideco rejetée aucun élément ne permet de considérer que les chutes de pluies exceptionnelle -ment importantes présentaient le caractère d’un phénomène de force majeure. Confirme condamnation du syndicat à indemniser partiellement une société des dommages subis par ses locaux commerciaux Responsabilité de la commune Absence de collecteur des eaux pluviales le long du chemin. Confirme condamnation commune et département L’arrêté de catastrophe naturelle n’a pas pour effet de caractériser une situation de force majeure 326 Marseille Marseille (2) 13 juin 1997 27 juin 2000 N°97MA0216 4 N°97MA0501 1 N°97MA0222 7 N°98MA0035 0 Association syndicale autorisée Canal de la Plaine Nice 15 septembre 1995 Lyon (1) 6 novembre 2000 N°95LY0168 4 Département des Alpes Maritimes Paris 15 avril 1992 Paris (4A) 6 février 2001 N°96PA0224 7 Société Orage violent BEFS-TEC Inondation ENGENIERE Non FM : non Melun 30 avril 1998 Paris (3A) 23 mai 2001 N°98PA0244 7 N°98PA0244 8 Commune de Villejuif Fortes pluies Inondation d’un sous-sol M.Moutana Fortes pluies Non FM : non Périodes de retour comprises entre 20 et 50 ans Non Saint-Denis Bordeaux (2) Pluies violentes Inondation résultant du débordement du canal d’irrigation et du refluement des eaux du siphon d’un fossé d’irrigation Pluies Débordement du canal des Iscles Inondations propriétés Non FM : non Pas imprévisibles Confirme responsabilité ASA du Canal de la Plaine Non FM : non “ la crue et le débordement du canal des Iscles tant en 1987 qu’en 1990 et 1992 ont été provoqués par des pluies qui, bien qu’ayant présenté une importance exceptionnelle , n’ont pas le caractère d’un événement de force majeure ” Confirme condamnation à réparer les dommages L’orage ne constitue pas un cas de force majeure susceptible d’exonérer les constructeurs Insuffisance de la section des canalisations Confirme indemnisation de la MAIF Les travaux 327 de la Réunion 10 décembre 1997 11 juin 2001 N°98BX0055 3 Inondation FM : non Saint-Denis Bordeaux (3) de la 12 juin 2001 Réunion N°BX02312 9 juillet 1997 Commune de saint Denis Inondation des locaux de la mutalité de la Réunion par les eux du canal d’endiguemen t Non FM : non Pas imprévisible ni irrésistible Lyon 22 octobre 1997 Lyon (1) 12 juin 2001 N°98LY0006 3 Commune de FerneyVoltaire SIVOM de l’Est Gessien/ M. Pontrucher Non FM : non Plusieurs inondations comparables quelques années auparavant Toulouse 30 septembre 1997 Bordeaux (1) 14 juin 2001 N°97BX0215 7 M. Moncamp Fortes pluies Propriété de M. P. envahie par des eaux de ruissellement provenant de la voie publique Inondation Débordement des eaux du fossé-mère et du bassin de rétention des eaux fluviales d’un lotissement Oui FM : non publics ont perturbé le système naturel d’évacuation des eaux et sont à l’origine de l’inondation Le débordement du canal est dû à des au dépôt de blocs rocheux Responsabilité du fait de l’ouvrage public Remboursement à la MAIF assureur de la mutuelle de la Réunion Défaut d’imprévisibil ité Confirme responsabilité de la commune “ les précipitations de fréquence décennales, à l’origine des inondations, si elles ont conduit à la déclaration de l’état de catastrophe naturelle, n’ont pas présenté une violence telle qu’elles 328 Marseille Marseille (3) 3 avril 1998 25 juin 2001 N°98MA0048 1 Syndicat du canal de Carpentras Orage, rupture Non des gardes FM : non canal Marseille (3) 29 février 2000 N°94-5759 N°96-3380 M. Bourbon/ Département des Bouchesdu-Rhône et autres Pluies d’une Non extrême FM : oui violence et de fréquence de retour centennale auraient revêtu un caractère de force majeure ” Confirme condamnation de la commune qui a autorisé l’implantation du lotissement à 1/3 L’origine de l’inondation résulte du mauvais entretien de la fiole du canal laquelle n’avait pas été curée avant l’orage Confirme condamnation à indemnisation Caractère de force majeure entrant pour 1/3 dans la réalisation des dommages, dommages aggravés par un ouvrage public, responsabilité de la commune pour 2/3 329 TABLEAU DE JURISPRUDENCE EN DROIT PENAL Risques naturels et Force majeure C. Cassation C. Appel Trib. corr. Evénement Récurrence Trib.Corr. Tarbes, 20 janvier 1978 Crim., 18 déc. 1978 rejet Crim., 4 janvier 1984 rejet Avalanches sur pistes du domaine skiable, 7 morts et 8 blessés Prévenus - Arrêté cat’nat - Force majeure (dernière décision) Directeur de / la station Le prévenu était en mesure d’appréhender qu’il y avait un risque d’avalanche Motivation dernière décision Il convient de procéder à l’examen d’éléments tels que les conditions nivométéo du moment, l’antériorité du phénomène. Condamnation du Directeur de la station, responsabilité civile de la commune Rouen, Verglas Conducteur / Première plaque 15 mai pour Oui, rencontrée après 100 1978 blessures imprévisible km, relaxe involontaires conducteur Chambéry, Trib.Corr. Avalanche du Moniteur / Avalanche inscrite au 28 janvier Albertville, 28 décembre Prévisible PIDA 1982 5 octobre 1980, décès Bulletin météo 1981 de 3 élèves de annonçant les risques 16 ans d’avalanche affiché Condamnation Fort-deCyclone, Employeur / Destruction de la France, licenciement Oui plantation par le 16 sans respect cyclone, événement décembre des formalités irrésistible, 1982 autorisations administratives non nécessaires. Relaxe employeur. Trib.Corr Avalanche le Moniteur / “ Le prévenu Albertville, 12 février Non, (moniteur) n’ignorait 7 janvier 1983 prévisible pas l’existence de 1985 Décès de cette avalanche qui 4 skieurs s’est déjà déclenchée hors-piste plusieurs fois dans cette combe, ce qui explique qu’elle figure sur la carte de 330 Trib. Corr. Albertville, 3 mars 1986 Chambéry, 22 janvier 1986 Avalanche, skieurs emportés Crim., 11 mars 1986 Crim., 15 mars 1988 cassation Avalanche le 11 février 1985 Ski hors piste : 1 mort et un blessé Avalanche (chalet de l’UCPA) 39 morts, 40 blessés Caen, ch. Corr. 9 février 1987 Nîmes, 14 mai 1987 Trib.Corr. Alençon, 23 avril 1986 Pluies violentes, chaussée inondée Sécheresse, pollution cours d'eau l’institut géographique national ” Condamnation du moniteur Professeur / En sa qualité de de ski Bulletin professionnel nivorémunéré le prévenu météo. très n’a pas apprécié avec pessimiste suffisamment de rigueur la probabilité de réalisation du risque Moniteur / “ Il importe de Non, prendre en prévisible considération le fait constant que depuis le 24 décembre 1984, treize avalanches avaient déjà causé la mort de quatorze skieurs ” Maire pour / “ En l’état des homicide et Imprévisible conditions météo, il blessures était impossible de involontaires prévoir qu’une avalanche d’une telle ampleur partirait de la Grande Gorge, franchirait l’Isère et pourrait atteindre le chalet ” Relaxe du chef d’homicides et blessures involontaires Automobilist / Relaxe automobiliste e Oui du chef d’homicide involontaire Chef d’entreprise / Possible "Pour tenter d'échapper aux poursuites le prévenu avait soutenu que ses installations d'épuration fonctionnaient normalement et que la concentration des substances, 331 Trib. Corr. Chambéry, 15 février 1991 Avalanche du 15 février 1987 Sur piste fermée pour cause de déclenchemen t artificiel Groupe de militaire en randonnée, 4 blessé, 1 mort Grenoble, Trib. Corr. Avalanche sur ch. Corr., 5 Grenoble, piste, 2 morts août 1992 14 Météo : Confirme novembre risques 1991 marqués, vent de 80 à 100 km/h Crim, 8 octobre 1996 cassation partielle Douai, 29 novembre 1994 Vent à 148 km/h puis rafale pendant 2 minutes à 166 km/h, chute de grue de chantier, ouvrier blessé Militaires encadrant le groupe ou organisant le stage / Prévisible, présence de panneaux Maire / (première - prévisible condamnatio n d’un maire de station de montagne) / Pas établie par les premiers juges inoffensives en période ordinaire, mais devenue nuisibles par excès, était imputable à la réduction considérable du débit de la rivière, consécutive à la sécheresse qui sévissait alors…" La CA, en écartant le fait justificatif de la force majeure a méconnu les principes de l'art. 64 du Code pénal L’adjudant ne pouvait pas ignorer que les conditions météo avaient changé, le capitaine n’avait porté les consignes à la connaissance de l’adjudant. Risques très marqués de déclenchement par surcharge de plaques Absence de dispositif permettant un déclenchement artificiel des plaques Le maire aurait dû ordonner la fermeture de la piste D’où condamnation pour homicide involontaire "Attendu que , pour relaxer le prévenu et débouter la partie civile de ses demandes, l'arrêt attaqué énonce que le facteur déterminant de la chute de la grue 332 Crim, 12 novembre 1997 rejet Reims, 12 septembre 1996 Sécheresse, pollution cours d'eau Chef d’entreprise / Non Trib. Corr. Albertville, 13 janvier 1997 Avalanche provoquée par rupture de corniche, 3 morts, 1 blessé Météo : risques 4/5 - Guide ayant emmené le groupe -3 professionnels ayant déclenché l’avalanche / - prévisible Trib. Corr. Albertville, 13 janvier 1998 Avalanche, Moniteur Val d’Isère, 1 mort, 1 blessé Météo : risque / prévisible a été la force exceptionnelle du vent, le rôle causal de l'insuffisance de l'ancrage de l'engin n'étant pas établi… en statuant ainsi, sans rechercher si la tempête, cause de l'accident, présentait pour le prévenu le caractère de la force majeure, et si , en l'absence d'une telle exonération, une faute d'imprudence" ne pouvait être retenue, les juges ont privé leur décision de base légale. La cour d’appel a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit de pollution de cours d’eau. Culpabilité du prévenu et indemnité à verser à la Fédération des associations de pêche - relaxe du guide - condamnation pour homicide et blessures involontaires des 3 professionnels “ Ces 3 professionnels expérimentés avaient connaissance des conditions nivologiques défavorables... Ils ont pris néanmoins le risque de casser une corniche ” D’où condamnation Bulletin météo : “ C’est surtout le risque de déclenchement 333 3/5 Crim., 9 novembre 1999 Grenoble (ch. corr.), 25 février 1998 Nancy, 26 mars 1998 Trib. Corr. Grenoble, 15 mai 1997 Avalanche sur piste, 1 mort Météo : risques 3 à 4/5 - Directeur de pistes - Chef de secteur - Pisteurs - Société d’aménagement touristique de l’Alpes d’Huez Trib. Corr. Avalanche sur -Maire Albertville, piste de fond - Chef de 7 avril de la Daille à piste 1997 Val d’Isère (23 février 1996), 1 mort, 1 blessé Météo : risque 4/5 / prévisible Trib. Corr. Nancy, 7 juillet 1997 / prévisible Effondrement d’une grue sur un lycée, 6 morts parmi les élèves et 13 blessés -chef de chantier -conducteur des travaux -chef d’agence -directeur des travaux -grutier / Prévisible provoqué qui reste le plus préoccupant. En effet, la simple surcharge dû à un skieur isolé peut suffire à provoquer une rupture de plaques. ” Or la distance de sécurité entre les membres du groupe n’était pas respectée (9 personnes sur 250 m) + manque d’efficacité des secours. Condamnation pour homicide et blessures involontaires Décision d’ouvrir la piste noire sans tentative préalable de purge de la plaque - relaxe des pisteurs Condamnation pour homicide involontaire: - directeur de piste - chef de section - SATA Non fermeture de piste malgré le risque annoncé “ sur tous les massifs, étant précisé que ces avalanches pouvaient localement prendre de l’ampleur.. ” Condamnation pour homicide et blessures involontaires “ Aucun élément du dossier ne permet d’établir que le vent ait présenté un caractère soudain et imprévisible ”, Condamnations pour homicide et blessures involontaires 334 Trib. Corr. Albertville, 26 janvier 1998 Crim. 5 janvier 2000 rejet Chambéry (ch.corr.), 13 janvier 1999 Trib. Corr. Albertville, 26 janvier 1998 Trib. Corr. Chambery, 22 novembre 1999 Trib. Corr. Gap, 13 janvier 2000 Avalanche, - Maire hors piste, 1 - Chef de mort piste Météo : risque 4/5 Répertoriée carte Cemagref / prévisible - absence de déclenchement des plaques neigeuses - absence de signalisation interdisant le horspiste D’où condamnation pour homicide involontaire Avalanche, 14 personnes / “ Une avalanche était immeuble à mises en Prévisibilité survenue en janvier La Plagne, 1 examen 1981, qui avait déjà mort 8 prévenus envahi le rez de 7 avalanches d’homicide chaussée du même sur le site en involontaire immeuble 10 ans : dès lors qu’une dont une qui - maître avalanche s’est déjà s’est d’ouvrage produite en un lieu engouffrée - architecte déterminé, elle ne dans le même - membres peut plus être appartement de la considérée comme 10 ans avant commission imprévisible ” de sécurité - mise en place de tripartite protections contre l’avalanche non conformes aux règles de l’art D’où condamnation pour homicide involontaire du maître d’ouvrage, de l’architecte Avalanche du 2 officiers / Les informations en 5 septembre Détection possession du 1996 (type plaque à lieutenant et plaque à vent délicate l’observation du vent), manteau neigeux Militaires, auraient dû l’alerter, ascension condamnation d’un 4 morts et 7 des prévenus blessés Randonnée en Guide de / Relaxe des prévenus raquette d’une haute -la zone où sauf guide de haute classe.Détach montagne l’avalanche montagne condamné ement d’une Directeur du s’est pour imprudence plaque à vent, centre déclenchée 11 morts et 17 UCPA n’était pas blessés Guide de connue, de moyenne mémoire 335 montagne Professeur Trib. Corr. Bernay, 4 septembre 2000 Carambolage par temps de brouillard le 27 septembre 1997 au niveau de Bourg Achard, 12 morts et 94 blessés d’homme comme avalancheus e -bulletin météo : risque 4 25 / “ Dans la mesure où automobilis- Non, pas les conditions tes imprévisible météorologiques très mauvaises sont connues de tous… sont clairement signalées par les services de la SAPN… la cause d’irresponsabilité pénale tirée de la force majeure ne peut être retenue puisque le phénomène météorologique n’est plus imprévisible ”, 2 relaxes et 23 condamnations pour homicide et blessures involontaires 336 BIBLIOGRAPHIE I. 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FLEURY tendant à la création d'une commission d'enquête sur les causes des inondations répétitives et sur les moyens propres à faire face aux aléas climatiques (n°3031), enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 9 mai 2001 DUPUIS (J.L.), PERCHE (J.), Jurisprudence relative à la prévention des risques naturels majeurs, Ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement, Direction de la prévention des pollutions et des risques, janvier 1998 GALLEY (R.), Rapport de la commission d’enquête sur les causes des inondations répétitives ou exceptionnelles et sur les conséquences des intempéries afin d’établir les responsabilités, d’évaluer les coûts ainsi que la pertinence des outils de prévention, d’alerte et d’indemnisation (n° 3386), déposé le 14 novembre 2001 à l’Assemblée GARRY (G.), Le risque d’inondation en France. 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Les caractères de la force majeure B. Les effets de la force majeure sur la responsabilité civile §2 : Evolution des caractères constitutifs de la force majeure et divergence au sein de la Cour de cassation A. Evolution des caractères conditionnant l'existence de la force majeure B. La divergence entre les Chambres de la Cour de cassation quant aux caractères essentiels de la force majeure C. L'incidence de la faute du débiteur sur la notion de force majeure §3 : Le lien existant entre la force majeure et l'arrêté de catastrophe naturelle Chapitre 2 : La typologie des éléments de la force majeure exonératoire de responsabilité §1 : L'appréciation factuelle de la force majeure A. L'appréciation globale de la force majeure B. L'appréciation des éléments de la force majeure 1°) Les critères de l'extériorité 2°) Les critères de l'imprévisibilité a) Critères temporels b) Critères géographiques c) Autres éléments 3°) Les critères de l'irrésistibilité §2 : L'incidence d'une faute du défendeur sur la force majeure §3 : L'incidence de la présence d'un arrêté constatant l'état de catastrophe naturelle A. La rare admission de la force majeure par la seule présence d'un arrêté B. Le refus de l'assimilation C. L'arrêté peut être un élément d'appréciation Titre II : Inondations : responsabilité et force majeure en droit public Chapitre 1 : La notion juridique de force majeure à travers la doctrine et la jurisprudence du Conseil d'Etat et des Cours administratives d’appel §1 : Le déclin de la force majeure et l'imprécision des caractères permettant de l'identifier §2 : Le caractère exonératoire partiel ou total de la force majeure §3 : Le partage de responsabilité entre la personne publique et les victimes en cas d'absence de reconnaissance de la force majeure 1 7 8 10 24 24 25 27 28 28 31 33 35 37 39 40 41 41 43 43 49 54 57 63 66 68 70 73 77 80 80 86 89 344 Chapitre 2 : La typologie des éléments de la force majeure exonératoire de responsabilité §1 : L'appréciation factuelle de la force majeure A. Le manque réel d'explications données par le juge administratif sur l'inexistence d'un événement de force majeure B. L'existence de décisions jurisprudentielles explicitant pourtant quelque peu les caractéristiques de la force majeure 1°) Les critères de l'imprévisibilité a) Critères temporels b) Critères géographiques 2°) La notion d'irrésistibilité 3°) Le caractère exceptionnel de l'événement climatique §2 : La présence d'un arrêté de catastrophe naturelle sans effet décisif sur la reconnaissance de la force majeure Titre III : Inondations : responsabilité et force majeure en droit pénal Chapitre 1 : La notion juridique de force majeure à travers la doctrine et la jurisprudence de la Chambre criminelle de la Cour de cassation Chapitre 2 : La typologie des éléments de la force majeure exonératoire de responsabilité 1°) L'imprévisibilité a) Critères temporels b) Critères géographiques 2°) L'irrésistibilité 3°) L’existence d’une faute Conclusion de la première partie Deuxième partie : Les dispositifs légaux et réglementaires : entre déresponsabilisation et recherche de responsabilités Titre I : La loi n° 82-600 du 13 juillet 1982 relative à l'indemnisation des victimes de catastrophes naturelles Chapitre 1 : La loi du 13 juillet 1982 : entre indemnisation et prévention §1 : L'arrêté de constatation de l'état de catastrophe naturelle, déclencheur de l'indemnisation §2 : La loi de 1982 et la prévention Chapitre 2 : Les assureurs face aux risques naturels §1 : Le contentieux de l’indemnisation des sinistres A. La contestation de l'arrêté B. La contestation du lien de causalité entre l'événement naturel et le dommage C. Les actions subrogatoires 1°) Les actions subrogatoires devant le juge civil 2°) Les actions subrogatoires devant le juge administratif D. L'enrichissement sans cause §2 : Les réflexions des assureurs face aux risques naturels Chapitre 3 : Les communes face au risque inondation: une enquête sur la sensibilité au risque “ Inondation ” des élus locaux §1 : Analyse statistique A. L’enquête B. Résultats statistiques 1°) L’effet d’expérience et la perte de mémoire 91 91 91 92 94 94 96 99 101 103 105 108 112 112 113 114 117 118 123 125 126 130 130 138 148 148 148 148 152 153 154 154 158 170 170 171 174 174 345 a) Le retour d’expérience b) L’adaptation des règles d’urbanisme 2°) La commune face au risque inondation et ses relations avec l’Etat a) Le PPR comme un outil préventif b) Les difficultés soulevées par les maires §2 : Analyse économétrique des résultats de l’enquête sur les inondations A. Le PPR comme un dispositif ex post B. Le PPR en cours d’élaboration Conclusion de l’enquête Questionnaire adressé aux communes Titre II : Les incidences juridiques de l'absence de prise en considération du risque inondation Chapitre 1 : La méconnaissance des dispositifs et des risques existants §1 : La méconnaissance volontaire du risque, source de responsabilité A. La méconnaissance volontaire du risque, source de responsabilité civile B. La méconnaissance volontaire du risque, source de responsabilité administrative C. La méconnaissance volontaire du risque, source de responsabilité pénale 1°) La mise en œuvre de la responsabilité pénale pour non-respect des règles d'urbanisme 2°) Les infractions d'imprudence a) Le délit de mise en danger d’autrui b) Les délits d’homicide et blessures involontaires §2 : La méconnaissance volontaire du risque, faute de la victime A. En droit civil B. En droit administratif C. En droit pénal Chapitre 2 : L'absence de création de dispositifs de prévention des risques §1: La diversité des personnes publiques potentiellement responsables A) La responsabilité de l'Etat pour ses carences dans l’élaboration de documents de risques B) La responsabilité éventuelle des communes pour un retard, une inertie dans la délimitation de zones de risques ou du fait de l’absence de prise en compte de documents s’imposant à elles tels des PPR §2 : L'absence de création de dispositifs, une responsabilité pénale potentielle ? Conclusion de la seconde partie 175 177 178 178 179 184 185 189 193 195 196 197 197 197 204 210 210 216 216 224 239 239 247 252 253 253 254 257 262 263 Conclusion générale Annexes Code de l’Environnement : Article L. 562-1 Tableau de jurisprudence en droit civil Tableau de jurisprudence en droit administratif Tableau de jurisprudence en droit pénal 265 266 267 307 358 Bibliographie 364 346