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Département d’histoire Faculté des lettres et sciences humaines Université de Sherbrooke LE MASSACRE DE LA SAINT-BARTHÉLEMY, 24 AOÛT 1572 : LA RESPONSABILITÉ DU DRAME par KEVIN LAFOREST travail présenté à RENÉ PAQUIN dans le cadre du cours HST 260 L’Europe et le monde : 1492-1914 Sherbrooke DÉCEMBRE 2009 2 Table des matières INTRODUCTION....................................................................................................................................... 3 1. Les prémices de la Saint-Barthélemy .................................................................................................... 4 2. Le déroulement du drame ...................................................................................................................... 4 2.1 Les « noces vermeilles » ..................................................................................................................... 4 2.2 L’attentat manqué contre Coligny ...................................................................................................... 6 2.3 La nuit du 23 au 24 août ..................................................................................................................... 7 3. Le massacre de la Saint-Barthélemy (Interprétation de Janine Garrisson)...................................... 8 CONCLUSION ......................................................................................................................................... 12 BIBLIOGRAPHIE.................................................................................................................................... 14 3 INTRODUCTION L’épopée des guerres de religion reste un élément qui intrigue et qui suscite tant de passions chez la communauté historienne. Au cours du XVIe siècle, les Français sont entrés dans un monde où chacun se doit de choisir et de défendre sa religion, et ce, au risque de sa vie. C’est ainsi que pendant près de trois décennies, soit de 1559 à 1598, la France connaît l’un des moments les plus sombres de son histoire. Parmi les huit guerres de religion, l’interprétation de la Saint-Barthélemy n’en finit pas de provoquer des débats en ce qui concerne la responsabilité du massacre. Bien qu’il soit très difficile de préciser le nombre impressionnant de publications qui traite de ce sujet, on peut penser que cet événement va continuer de faire couler beaucoup d’encre et qu’il est loin de s’épuiser. Ainsi, on en vient à se poser la question suivante : qui doiton rendre responsable de cet événement? Après des recherches approfondies sur le sujet, on se rend compte qu’il existe une confusion entre trois auteurs principaux, soit Janine Garrisson, Denis Crouzet et Jean-Louis Bourgeon. Parmi ces thèses, celle qui s’est démarquée au cours des années 1980 et 1990, est celle de l’auteure Janine Garrisson, selon laquelle ce serait Catherine de Médicis et ses conseillers qui seraient les véritables responsables du massacre de la SaintBarthélemy (un crime d’État). Le but de ce travail est donc de démontrer si la thèse soutenue par Janine Garrisson est fondée ou pas. Afin de mener à bien cette recherche, nous commencerons par présenter la situation de la France à la veille du massacre de la Saint-Barthélemy. Par la suite, nous ferons une présentation de l’événement qui est au cœur du travail, soit le massacre de la Saint-Barthélemy. Nous expliquerons les événements qui ont conduit au massacre. Pour terminer, nous ferons la présentation de la vision de l’auteure Janine Garrisson concernant la responsabilité du drame. 4 1. Les prémices de la Saint-Barthélemy En 1559, le roi Henri II décéda tragiquement lors d’un tournoi. À partir de ce moment, la France entra dans une longue période de guerres civiles qui amenèrent des tensions au sein des communautés religieuses, principalement entre les catholiques et les protestants. Toutes ces tensions apportèrent des années de grande instabilité politique, économique, etc. Ainsi, entre 1562 et 1572, trois guerres civiles se succédèrent en France. La première guerre de religion se déroula au cours des années 1562-1563. Le 19 mars 1563, l’édit de pacification d’Ambroise mit fin à cette première guerre civile. « Cet édit restreint considérablement les libertés de culte accordées par celui de Janvier, mais il marque le retour à la tolérance civile 1 . » Cependant, malgré la période de paix qui suivit jusqu’en 1567, la crainte provoquée par un mouvement des troupes espagnoles amène la seconde guerre (1567-1568). Au cours de la troisième guerre civile (1568-1570), le Prince de Condé fut assassiné sauvagement à la fin de la guerre à Jarnac. À partir de ce moment, l’amiral Gaspard de Coligny devint l’un des hommes de pouvoir entourant le roi. La fin de la troisième guerre civile se produisit grâce à l’édit de Saint-Germain, qui alla, à tout jamais, changer le visage de la France. 2. Le déroulement du drame 2.1 Les « noces vermeilles » Le 8 août 1570, l’édit de pacification de Saint-Germain-en-Laye mit un terme à trois années de guerre civile entre les catholiques et les protestants en France. Cependant, cette paix fut mal acceptée par les deux communautés religieuses. Afin d’atténuer les colères, Catherine de Médicis accepta de laisser revenir les protestants à la Cour de Charles IX, dont son plus grand 1 Arlette Jouanna. La France du XVIe siècle : 1483‐1598. Paris, Presses universitaires de France, 2006, p. 405. 5 ennemi, Gaspard de Coligny. « Effrayée par la guerre qui s’annonce, ulcérée de l’ascendant exercé par Coligny sur Charles IX qui l’appelle “mon père”, craignant d’être écartée du pouvoir par son fils, la reine mère décide de se débarrasser de l’amiral 2 . » Au cours de la troisième guerre civile, elle tenta de se défaire de lui, mais la tentative d’assassinat échoua. Maintenant, une nouvelle occasion s’offrit à elle, soit le mariage de sa fille Marguerite avec le prince Henri de Navarre. « Pour les huguenots comme pour Charles IX, […] ce mariage symboliserait la réconciliation des Français, représenterait l’acte gracieux provoquant la détente qui permettrait […] la remise de la dernière place de sûreté occupée par les huguenots : La Rochelle 3 . » Cette union fut négociée entre Catherine de Médicis et Jeanne d’Albret, reine de Navarre. Malheureusement, Jeanne décéda le 9 juin juste avant, ce qui eut comme conséquence de retarder le mariage. Initialement prévu au mois de mai 1572, il fut célébré au mois d’août. La cérémonie ne respecta pas les formes du mariage catholique, puisque l’union entre Marguerite de Valois et Henri de Navarre fut célébrée malgré l’absence de la dispense pontificale, puisqu’elle ne parviendra à Paris qu’après les noces. Ne le sachant pas, Catherine et Charles mentirent au cardinal de Bourbon en lui faisant croire qu’ils possédaient la dispense 4 . « La bénédiction nuptiale est donnée dehors, devant la Cathédrale Notre-Dame, sur une estrade dressée sur le parvis. Ni le nouvel époux ni ses amis huguenots n’assistent ensuite à la messe : ils se sont retirés à l’évêché et ne reviennent qu’à la fin de cette célébration papiste 5 . » Trois jours de fêtes somptueuses suivirent le mariage, au cours desquelles Coligny tenta par tous les moyens de convaincre le roi d’envahir la Flandre, une possession espagnole. Malheureusement, il ne put prévoir ce qui alla lui arriver. 2 Michel Pernot. Les guerres de religion en France, 1559‐1598. Paris, S.E.D.E.S., 1987, p. 78. Pierre Champion. Charles IX, la France et le contrôle de l’Espagne. Tome 2, Paris, Grasset, 1939, p. 60. 4 Janine Garrisson. 1572, la Saint‐Barthélemy. Bruxelles, Complexe, 1987, p. 72. 5 Jouanna, op. cit., p. 468. 3 6 2.2 L’attentat manqué contre Coligny C’est au matin du vendredi 22 août 1572 que le rêve de Charles IX et de Catherine de Médicis, soit celui d’amener les catholiques et les huguenots à faire la paix, se brisa à tout jamais. Pendant trois jours, installé dans un petit logement, l’assassin observa tous les faits et gestes de Coligny. De son logement, il prit en note les heures de passage de l’amiral, afin d’être en mesure de connaître ses habitudes, mais également pour pouvoir le différencier de ses compagnons quand le moment sera venu. Le 22 août, Gaspard de Coligny quitta le Louvre après avoir assisté à un conseil présidé par le duc d’Anjou. Cependant, juste avant de partir, Coligny rencontra le roi qui revint de la messe. Ainsi, ils parlèrent tout en se dirigeant vers le jeu de paume. Finalement, un peu après onze heures, l’assassin vit arriver sur la rue des Poulies l’amiral, entouré de douze à quinze gentilshommes protestants. Alors qu’il lisait une lettre en marchant, il fit un mouvement imprévu. Malgré ce geste inattendu, Coligny reçut une balle dans l’avant-bras gauche et une autre qui lui arracha un doigt de la main droite. « Du tueur maladroit (l’amiral est seulement blessé!), l’on connaît le nom : Maurevert. De la maison où il s’embusque pour attendre le passage de l’amiral, l’on connaît le propriétaire : un familier des Guise 6 . » Il est donc possible que ceux-ci furent les responsables de l’attentat. Par contre, il est probable que Catherine de Médicis ait également joué un rôle dans tout cela, puisqu’elle ne manifesta aucune émotion au moment où elle apprit la nouvelle. Étant certain qu’il venait de réussir ce pour quoi on l’avait engagé, Maurevert prit la fuite par une porte se trouvant à l’arrière. Pendant ce temps, Coligny se releva et désigna l’endroit d’où venaient d’être tirés les coups de feu. Plusieurs hommes se précipitèrent vers cet endroit. Cependant, il était déjà trop tard. Maurevert avait pris la fuite, laissant ainsi l’arme qu’il avait 6 Janine Garrisson, « Le massacre de la Saint‐Barthélemy ». Histoire, no 126 (oct. 1989), p. 52. 7 utilisée sur place. Pour sa part, Coligny demanda qu’on prévienne le roi qui était en train de faire une partie de paume. Lorsqu’il apprit la nouvelle, Charles IX jeta sa raquette au loin et dit : « Quoi, toujours de nouveaux troubles! N’aurai-je donc jamais de repos? 7 » À la suite de cet événement, Coligny fut rapidement transporté chez lui par ses proches. Ainsi, tout le conseil du roi se retrouva au chevet de l’amiral. Furieux, les gentilshommes huguenots proférèrent des menaces à la Cour et demandèrent de faire la lumière sur ce qui était arrivé, si Charles IX et Catherine de Médicis ne veulent pas qu’ils se fassent justice eux-mêmes. Charles IX demanda donc une enquête afin de trouver les responsables. Le roi a prescrit une enquête. Il va savoir. Les Guise dénonceront, à coup sûr, les véritables auteurs du complot. Le 23 août, le conseil décide de massacrer tous les chefs huguenots. La décision prise, Catherine se charge de convaincre le roi : il y a, dit-elle, péril pour sa vie. Les protestants veulent le tuer et prendre le pouvoir. Il faut les prévenir. Charles IX, une fois de plus, se laisse convaincre 8 . 2.3 La nuit du 23 au 24 août Cette tentative d’assassinat à l’endroit de Coligny marqua donc le début du massacre de la Saint-Barthélemy. Dans la nuit du 23 au 24 août 1572, afin de sauver la monarchie, Catherine de Médicis réussit à convaincre Charles IX que le mieux pour eux fut de faire assassiner l’amiral de Coligny et quelques chefs huguenots, rassemblés à Paris pour le mariage d’un des leurs, à l’exception des princes de sang, soit Condé et Navarre (le jeune marié). Pour sa part : Henri de Guise a été contacté pour tuer lui-même l’amiral. […] Le duc accepte, paraît devant l’hôtel de la rue de Béthizy le 24 août avant l’aube. Des mercenaires suisses se chargent de la besogne. Guise a recommandé aux soldats de lancer le corps par la fenêtre. Guise se penche sur le visage de l’amiral pour le reconnaître… 9 7 Henri Noguères. La Saint‐Barthélemy, 24 août 1572. Paris, Laffont, 1959, p. 74. Pierre Miquel. Les guerres de religion. Paris, Fayard, 1980, p. 284. 9 Ibid., 8 8 À l’aube du 24 août, Charles IX ordonna que l’on arrête les massacres, mais ce qu’il n’avait pas prévu, ce fut la réaction de la population parisienne. Dès son réveil, la population découvrit le massacre. Elle se mit à pourchasser les protestants dans toute la ville. Ce massacre continua jusqu’au 29 août et fit entre 2 000 et 4 000 victimes protestantes, touchant tous les groupes d’âge (femmes, enfants, vieillards). En réalité, le massacre s’étendit à plus d’une vingtaine de villes en dehors de Paris entre le 25 août et le 3 octobre, et ce, malgré l’ordre du roi de faire arrêter ces tueries. Au cours de la journée du 26 août, Charles IX se rendit au Parlement. Devant les magistrats, Charles IX reconnaît dans une Déclaration publiée quelques jours après « que ce qui est ainsi advenu a été par son exprès commandement… pour obvier et prévenir l’exécution d’une malheureuse et détestable conspiration fait par ledit amiral… et sesdits adhérents et complices… » 10 Ainsi, Charles IX prit toute la responsabilité du massacre. Mais, est-ce que cela est réellement la vérité? Nous allons tenter de le démontrer dans la prochaine partie du travail. 3. Le massacre de la Saint-Barthélemy (Interprétation de Janine Garrisson) Depuis plus de quatre siècles, une grande majorité d’historiens catholiques et protestants tentèrent de percer le mystère du massacre de la Saint-Barthélemy. Malheureusement, les sources qu’ils utilisèrent ne furent pas toujours fiables 11 . Il fallut donc attendre jusqu’à la seconde moitié du XXe siècle pour qu’apparaissent de nouvelles interprétations sur le drame. Ainsi, la SaintBarthélemy suscita chez les historiens nombre de controverses et d’interprétations, principalement en ce qui concerne la responsabilité du massacre. À la suite de plusieurs lectures sur le sujet, on se rend compte que les explications sur la responsabilité du massacre divergent 10 Janine Garrisson. Guerre civile et compromis, 1559‐1598. Paris, du Seuil, 1991, p. 176. Marc Venard. « Arrêtez le massacre ». Revue d’histoire moderne et contemporaine, no 39 (oct.‐déc. 1992), p. 645. 11 9 selon les historiens. En réalité, il existe trois thèses distinctes. Pour Jean-Louis Bourgeon, la Saint-Barthélemy est un mensonge d’État, inspirée par l’Espagne de Philippe II. D’après Denis Crouzet, il s’agit d’un « crime d’amour » volontaire de la part de Charles IX afin de ramener la paix dans son royaume. Finalement, selon Janine Garrisson, historienne protestante, il s’agit d’un crime politique qui responsabilise Catherine de Médicis et ses conseillers. Ainsi, comme nous l’avons mentionné au départ, nous tenterons de démontrer si la thèse émise par Janine Garrisson est véridique ou non en la comparant avec d’autres interprétations. Bien que l’historienne Nicola Mary Sutherland écrivit, en 1973, son livre intitulé The Massacre of St-Bartholomew and the European Conflict, 1559-1572, il convient de prendre en considération certains éléments amenés par celle-ci et qui viennent contredire l’interprétation que Janine Garrisson et plusieurs autres historiens font du massacre de la Saint-Barthélemy. Pour Garrisson, il ne fait aucun doute que l’attentat contre Coligny fut commandé par Catherine de Médicis, par crainte d’être écartée du pouvoir par le roi. La reine a peur que Coligny entraîne Charles IX dans une politique d’intervention aux Pays-Bas, ce qui aurait comme conséquence la guerre avec le roi d’Espagne. Pour sa part, Sutherland ne croit pas à cette théorie de « la jalousie maternelle 12 . » Elle dénonce « l’imbécile théorie de la jalousie maternelle » (p. 322), dont on crédite Catherine de Médicis pour expliquer son intention de supprimer l’Amiral. Il est totalement faux que Coligny ait été en passe de devenir le principal conseiller et le Mentor du jeune roi (rôle qu’il n’a jamais pu jouer, ne serait-ce que pour de strictes raisons d’impossibilité matérielle). Elle prouve que Catherine et Coligny, réalistes, savaient avoir besoin réciproquement l’un de l’autre; que leur alliance, devenue nécessaire face à l’Espagne, était logique et sincère 13 . 12 Venard. op. cit., p. 650. Jean‐Louis Bourgeon. « Pour une histoire, enfin, [du massacre] de la Saint‐Barthélemy ». Revue historique, no 571 (juill.‐sept. 1989), p. 86. 13 10 Selon d’autres historiens, Catherine souhaita plutôt ramener la paix dans le royaume, principalement entre les catholiques et les protestants, ce qu’elle fit avec le mariage de sa fille, soit Marguerite de Valois, avec le prince Henri de Navarre. Dans son livre intitulé Les guerriers de Dieu : la violence au temps des troubles de religion (vers 1525 – vers 1610), Denis Crouzet suppose une interrogation intéressante. Il se questionne sur la véracité de l’attentat manqué contre Coligny. Il amène le lecteur à se demander si la tentative d’assassinat avait réellement pour but de tuer Coligny ou simplement de le blesser. « Ne visait-il pas seulement à faire remonter brutalement et massivement en surface, dans le vase clos de Paris, toutes les données conflictuelles que le mariage royal avait pour sens de gommer, dont celle, capitale, de la menace révolutionnaire huguenote 14 . » À la suite de la tentative d’attentat manqué à l’endroit de Coligny, comme nous l’avons déjà mentionné, les huguenots qui furent présents pour le mariage entre Henri de Navarre et Marguerite de Valois, menacèrent le roi et demandèrent qu’on enquête sur cette tentative d’assassinat, sinon ils allaient se faire justice eux-mêmes. Charles IX mena une enquête et promit que les coupables seraient châtiés. Selon l’interprétation de Janine Garrisson, Catherine de Médicis, avec l’aide de son conseiller Albert de Gondi, comte de Retz, prit la décision qu’il valait mieux se débarrasser des chefs huguenots, et ce, pour le bien du royaume. Est-il vrai d’affirmer que Catherine de Médicis ait réussi à convaincre son fils de les éliminer? Janine Garrisson est convaincue que oui, tout comme Sutherland. 14 Denis Crouzet. Les guerriers de Dieu : la violence au temps des troubles de religion (vers 1525 – vers 1610). Tome 2, Seyssel (France), Champ Vallon, 1990, p. 29. 11 It would however, be difficult to avoid the conclusion that the Cour – not to be more specific – together with a group of leading councillors, adopted the catholic policy of elimination as an emergency measure in fear and desperation during the night of 2324 August 15 . Ainsi, selon ces deux historiennes, les responsables du massacre des nobles protestants furent la famille royale et le Conseil. Marc Venard, professeur d’histoire moderne à Paris X, ajouta que ce qui a fait pencher la balance afin que Charles IX accepte d’éliminer les chefs protestants est probablement dû au fait qu’il puisse désormais « dominer ses peuples selon son bon plaisir 16 . » Agissant en tant que roi de France, Charles IX prit toute la responsabilité du massacre. C’est ce que démontre Jean-Louis Bourgeon, tout comme Janine Garrisson qui est du même avis. […] en désespoir de cause, et pour ne pas perdre toute crédibilité, pour ne pas avoir à avouer à la face du monde que son autorité était bafouée jusque dans sa capitale, le roi s’est résigné, au soir du 27, à endosser officiellement la responsabilité de l’exécution des chefs huguenots 17 . Cependant, bien qu’il soit revenu sur certaines de ses affirmations, Bourgeon continue de croire que « ni Charles IX ni Catherine de Médicis ne sont à l’origine du massacre, pas plus que de l’attentat contre Coligny deux jours auparavant 18 », ce qui va à l’encontre de la vision de Janine Garrisson, qui responsabilise Catherine et ses conseillers pour les événements survenus. 15 Nicola Mary Sutherland. The massacre of St Bartholomew and the European conflict, 1559‐1572. London, Macmillan, 1973, p. 338. 16 Venard. op. cit., p. 653. 17 Bourgeon. op. cit., p. 140‐141. 18 Janine Garrisson. « Le massacre de la Saint‐Barthélemy, [le 23 août 1572] qui est responsable? ». Histoire, no 126 (oct. 1989), p. 54. 12 CONCLUSION En conclusion, entre 1562 et 1572, la France est aux prises avec des tensions entre deux communautés, soit les catholiques et les protestants. À partir de ce moment, la France sombre dans une série de guerres civiles d’ordre religieux. La première guerre civile prit fin le 19 mars 1563, grâce à l’édit de pacification d’Amboise, qui permit de reconnaître la liberté de conscience et autorisa le culte dans certains lieux. Cependant, à la suite d’une paix de quatre ans, la France fut à nouveau plongée dans une seconde guerre, puis une troisième, au cours de laquelle le roi de Condé fut sauvagement assassiné. Avec l’édit de Saint-Germain-en-Laye, le visage de la France changea considérablement. Afin de ramener la paix entre les catholiques et les protestants, Catherine de Médicis planifia le mariage de sa fille Marguerite de Valois avec un prince protestant, Henri de Navarre, futur Henri IV. Malheureusement, quelques jours seulement après le mariage, l’amiral de Coligny fut blessé lors d’un attentat planifié contre lui. Par la suite, plusieurs chefs huguenots, y compris Coligny, furent assassinés. De nombreux historiens, tels Janine Garrisson, accusent Catherine de Médicis d’être la principale responsable de ces deux événements. Bien que cet événement soit toujours analysé de nos jours par de nombreux historiens, il en reste que ces derniers n’en viennent pas à un consensus universel. Ainsi, le massacre de la Saint-Barthélemy est toujours un sujet qui est controversé par les historiens. Le problème, c’est que ces derniers manquent d’éléments concrets afin de faire la lumière sur cet événement, puisque les sources ne sont pas assez nombreuses et qu’elles sont parfois suspectes. C’est pour cette raison que l’interprétation de nombreux historiens diverge en ce qui a trait à la responsabilité du drame. Par exemple, il existe une confusion entre celle de Denis Crouzet, JeanLouis Bourgeon et Janine Garrisson. Ainsi, à la lumière de nombreuses lectures et de comparaisons, il n’est pas possible d’affirmer ou d’infirmer si l’interprétation de Garrisson, en ce 13 qui a trait à la responsabilité du massacre de la Saint-Barthélemy, est fondée ou non. De plus, cette historienne protestante a modifié son interprétation dans ses plus récentes publications, ce qui rend son propos plus difficile à comprendre. Ainsi, encore aujourd’hui, les historiens s’interrogent sur la responsabilité de Catherine de Médicis dans le massacre de la SaintBarthélemy. Est-elle impliquée dans le drame qui se déroula dans la nuit du 23 au 24 août 1572? Pour le moment, nous n’avons aucune certitude, mais les prochaines années pourraient être pleines de surprises. 14 BIBLIOGRAPHIE BOURGEON, Jean-Louis. « Pour une histoire, enfin, [du massacre] de la Saint-Barthélemy ». Revue historique, no 571 (juill.-sept. 1989), p. 83-142. CHAMPION, Pierre. Charles IX, la France et le contrôle de l’Espagne. Tome 2, Paris, Éditions Grasset, 1939, 426 p. CROUZET, Denis. Les guerriers de Dieu : la violence au temps des troubles de religion (vers 1525 – vers 1610). Tome 2, Seyssel (France), Éditions Champ Vallon, 1990, coll. « Époques », 738 p. GARRISSON, Janine. 1572, la Saint-Barthélemy. Bruxelles, Éditions Complexe, 1987, coll. « La Mémoire des siècles », 205, 219 p. GARRISSON, Janine. « Le massacre de la Saint-Barthélemy, [le 23 août 1572] qui est responsable? ». Histoire, no 126 (oct. 1989), p. 50-55. GARRISSON, Janine. Guerre civile et compromis, 1559-1598. Paris, Éditions du Seuil, 1991, coll. « Nouvelle histoire de la France moderne », 2, 257 p. JOUANNA, Arlette. La France du XVIe siècle : 1483-1598. Paris, Éditions Presses universitaires de France, 2006, coll. « Quadrige », 690 p. MIQUEL, Michel, Les guerres de religion. Paris, Éditions Fayard, 1980, 596 p. NOGUÈRES, Henri. La Saint-Barthélemy, 24 août 1572. Paris, Éditions Laffont, 1959, coll. « Ce jour-là », 294 p. PERNOT, Michel. Les guerres de religion en France, 1559-1598. Paris, Éditions S.E.D.E.S., 1987, coll. « Regards sur l’histoire, Histoire moderne », 61, 420 p. SUTHERLAND, Nicola Mary. The massacre of St Bartholomew and the European conflict, 1559-1572. London, Éditions Macmillan, 1973, 373 p. VENARD, Marc. « Arrêtez le massacre ». Revue d’histoire moderne et contemporaine, no 39 (oct.-déc. 1992), p. 645-661.