(caustique !) de la commission d`enquête et l`interview
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(caustique !) de la commission d`enquête et l`interview
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Bénéfice net à Washington TRANSPORT AÉRIEN AIR LIB ou L’AVIATION L’affaire Air Lib est incroyable. L’Assemblée nationale, quelques jours après la retentissante faillite d’Air Lib, a créé une commission parlementaire d’enquête présidée par le député Patrick Ollier(UMP, Hauts-de-Seine) et dont le rapporteur a été le député Charles de Courson (UDF Marne). Le rapport est sorti en juin dernier. Il est accablant pour la gestion d’Air Lib et pose tant de questions que, pour la première fois dans l’histoire de la République, l’Assemblée nationale a saisi le Procureur de Paris. Bénéfice net a lu pour vous les presque 1000 pages de ce rapport incroyable qui met en scène un syndicaliste des pilotes d’Air France qui voulait devenir patron ( et s’est, à ce titre octroyé un revenu de plus d’1, 2 million, plus 87 473 euros de notes de frais en 16 mois ), un gouvernement qui octroie une aide directe de 30 millions d’euros sans réellement étudier le dossier, des honoraires exorbitants versés à certains cabinets, certains syndicalistes d’Air Lib qui connaissaient un système de travail au noir concernant 3 à 400 personnes, des millions d’euros à l’étranger dont on ne sait pas ce qu’ils sont devenus, une perte d’argent public de 130 millions d’euros. La commission parlementaire d’enquête oici quelques passages du rapport sur lesquels feraient bien de méditer les moralisateurs habituels. V La Direction d’Air Lib refuse d’informer le Comité d’Entreprise (mais celui s’en accommode)… Pour vous donner une idée de l’atmosphère surréaliste qui régnait dans cette “entreprise”, voici quelques échanges exquis entre la Commission et M. et Mme Termignon, délégués syndicaux du SNPC (Syndicat national des Personnels Navigants Commerciaux). Sofia Termignon déclare d’emblée : “depuis le début de la reprise d’Air Liberté-AOM par J.C Corbet, en tant que membres du Comité d’entreprise (…) nous n’avons jamais obtenu d’éléments clairs sur la situation financière d’Air Lib”. On apprend, au cours de cette audition des époux Termignon, que le comité d’entreprise a enfin exercé son droit d’alerte (le 29 avril 2002), contre l’avis de la CFDT, alors minoritaire, et qui avait soutenu chaudement Corbet dans sa reprise. Puis il a fallu qu’Air Lib soit condamnée sous astreinte, le 9 juillet 2002 à communiquer à l’expert-comptable mandaté par le C.E les documents nécessaires. Mais l’expert comptable n’a jamais pu obtenir de la Direction d’Air Lib la documentation indispensable à sa mission. Pire, le 25 juin 2002, une nouvelle majorité s’installe (CFDT) au CE, démet le pauvre expert et ne cherche plus à obtenir d’expertise sur la situation de l’entreprise, ce que confirme Mme Termignon à la Commission : “Dans les plus brefs délais, il fallait trouver un autre expert prenant la suite. Finalement, il est arrivé tout ce qui fut rapporté par la presse au sujet d’Air Lib. Les préoccupa34 tions furent telles de part et d’autre que nous ne sommes pas revenus sur le droit d’alerte, ni sur la nomination d’un autre expert”. Le personnel navigant d’Air Lib se partageait le produit de la vente des sandwichs avec l’aval de sa direction Toujours les mêmes personnes, devant la Commission. M. le Président : “…Pouvezvous nous confirmer les propos de vos collègues de la CFTC, selon lesquels il existait des pratiques assez étranges : le personnel navigant était autorisé à vendre des boissons, des sandwichs, achetés par la compagnie, le personnel navigant commercial se partageant le fruit de la vente pour améliorer sa rémunération. Avez-vous constaté ces faits ?” M. Termignon : chez Air Lib, les choses se sont toujours faites rapidement et à contresens (…). La problématique des ventes a été évoquée deux jours avant son lancement. C’est là que la direction a décidé que l’on commencerait ainsi et que l’on verrait par la suite (…). C’est un chantier qui n’a pas été entrepris. TRANSPORT AÉRIEN CIVILE POUR LES NULS M. le Rapporteur : concrètement (…) que faisiez vous de la recette ? Mme Termignon : Elle était partagée entre tous les membres de l’équipage, hors les pilotes M. le Rapporteur : En qualité de représentant du personnel, n’avezvous pas fait remarquer qu’il s’agissait de travail au noir…? Et que l’on courait à la catastrophe ? Mme Termignon : Si, si. M. le Rapporteur : la direction n’a t-elle pas réagi ? Mme Termignon : Le sujet a été débattu dans le cadre de deux comités d’entreprise avec une solution : on attendait une solution de Bercy” re, mais sachez tout de même que chaque personne concernée percevait au noir entre 4000 et 6000 francs par mois ; 300 ou 400 personnes touchant entre 4 et 6000 francs par mois pendant huit ou neuf mois, voyez combien ça peut faire !” Quel morceau d’anthologie ! Sacrés délégués syndicaux, sacrés salariés acceptant, puisque la soupe était bonne, de transgresser les soi-disant sacro-saintes règles du droit du travail en ces temps où on hésite pas à saisir pour un oui, pour un non, (et sans risques), les Conseils de prud’hommes ou l’Inspection du travail. Mais au Corbet devant la commission d’enquête Une reprise d’entreprise qui laisse pantois On est en en juin 2001, en pleine période électorale pour la présidentielle. Le 15 juin 2001 Air Liberté dépose le bilan, Swissair et Taitbout Antibes BV (filiale de Marine Wendel) ayant jeté l’éponge (voir historique plus loin). 4245 emplois sont menacés directement. Le gouvernement de l’époque va tout faire pour maintenir l’entreprise artificiellement, à coup de millions d’euros, jusqu’aux élections. Le tribunal de commerce de Créteil ordonne un redressement judiciaire qui aboutira à la reprise d’AOM-Air Liberté par JeanCharles Corbet, ancien dirigeant du Syndicat (majoritaire) des pilotes d’Air France et président du Fonds commun de placement “Concorde”, qui gère les actions des pilotes d’Air France suite à l’accord passé après la grève “de la Coupe du Monde” donnant des actions de la compagnie aux pilotes en échange d’un accord salarial. A cette époque, M. Corbet est encore pilote chez Air France. D’une manière assez étonnante, il emporte le morceau pour quelques francs symboliques avec comme tout argument, présentés devant le Tribunal de commerce, un paquet d’intentions et de promesses : L’affaire avait été révélée à la Commission par le délégué syndical CFTC et ancien responsable du personnel navigant commercial : “Cela peut faire souri- fait, qu’a fait l’Inspection du travail des transports compétente dans ce dossier qui concernait des centaines de salariés travaillant au noir pendant des mois, qu’a fait l’Urssaf ? 35 - la contribution de l’ancien actionnaire Swissair (qui tombera en faillite après le 11 septembre) d’1,8 milliard de F (ramené par la suite à 1,3 milliard). - L’apport en fonds propres de 100 millions de francs par “des investisseurs” - L’apport de 150 millions de F par l’actionnariat salarié. Sur cette base, des investisseurs devaient être trouvés ensuite pour accroître les fonds propres. En fait, pratiquement rien de tout ça n’a été réalisé. - Swissair a effectivement donné 1 milliard sur le 1.250 milliard dû (il reste 250 millions à payer, mais Swissair étant en faillite, des actions en justice ont été engagées contre les “héritiers” de Swissair : Swiss. - En revanche, les 100 millions se sont résumés à “une lettre d’évidence de fonds” de 80 millions de F apportée par un cabinet financier “Aurel Leven”, engagée par CIBC World Market, une banque d’affaire canadienne missionnée par le nouveau patron d’Air Liberté. Cette lettre aurait dû permettre à Holco, (la société holding créée par Corbet et appartenant à lui seul) de réunir des investisseurs. Il ne s’en est jamais servi. Mieux, il a dû payer une indemnité contractuelle d’au moins 10 millions de Francs pour cause de non utilisation des fonds. - L’actionnariat salarié (150 Millions) n’a jamais été réalisé. - Aucun investisseur n’a été trouvé. Peu importe, visiblement, pour M. Corbet, qui affirme avoir eu le soutien d’Air France (ce qui fut démenti par le Président d’Air France devant la commission) TRANSPORT AÉRIEN dans la préparation du dossier de reprise, et va pouvoir compter sur l’appui du gouvernement Jospin qui va lui donner de l’argent public (par un prêt d’Etat) et le dispenser de payer redevances aéroportuaires et charges sociales, et s’arranger sur la TVA. En attendant d’organiser une gestion opaque par filiales à l’étranger interposées, et pour démarrer, c’est la fête ! Premier acte de gestion de J.C Corbet : un “Golden Hello” de 5, 6 millions de F pour sa pomme puis des millions d’euros de primes et d’honoraires On ne perd pas de temps. Au cours du seul mois d’août 2001, selon le rapport parlementaire, ce sont 9.6 millions d’euros qui ont été versés en prime et honoraires. Toujours selon le rapport, du 1er août 2001 au 31 décembre 2002, les dirigeants d’Holco (la société de Corbet, créée pour reprendre Air Lib), leurs avocats et leurs banques conseils ont touché près de 29.55 millions d’euros (somme que le rapport rapproche du montant du prêt (non remboursé) de l’Etat à Air Lib en janvier 2002 : 30.5 millions). Les rémunérations des dirigeants : 2.685 millions d’euros en 16 mois Pendant cette période, l’ancien syndicaliste d’Air France, devenu (enfin ! Ah ! c’est bon !) patron, se sera servi 1 337 127 euros brut (soit 8 770 978 F) dont la fameuse prime d’arrivée “Une gestion opaque, déficitaire et socialement conflictuelle”. (“GOLDEN HELLO”) de 855 904 euros (5 614 362 F), soit 1 234 269 euros nets (8 096 273 F) auxquels se sont ajoutés 87 473 euros (573 785 F) de notes de frais (étant précisé que Corbet s’est servi la golden hello alors qu’il était encore en congé sabbatique à Air France…). C’est ainsi que qualifie le rapport l’action de J.C Corbet à la tête d’Air Lib. En arrivant dans l’entreprise, JC Corbet crée une holding, “Holco”, détenue à 99.99% par lui-même. Puis il crée un certain nombre de filiales, en France et à l’étranger (9 selon le rapport). “Aujourd’hui, il faut trouver des montages dynamiques pour permettre la création d’une vraie entreprise avec plusieurs pôles d’activité, en les cloisonnant pour éviter qu’un problème d’une entité affecte les autres. C’est une option de gestion que nous revendiquons”, déclare à cet effet JC Corbet devant le comité d’entreprise le 29 avril 2002. Le directeur général d’Holco, François Bachelet (ancien patron d’Air France Cargo, en retraite, recruté par Corbet) faisait, lui, pâle figure avec une “golden hello” de 380 122 euros (2 493 436 F) et un revenu total pour six mois de 491 989 euros brut, auxquels il faut ajouter 38 113 euros d’indemnité de licenciement). Les honoraires des conseils : 17.776 millions d’euros Les principaux conseils ont touché : - la banque d’affaire CIBC World Markets (Londres) 8.334 millions d’euros - le cabinet Léonzi (avocat de Holco) 5.121 millions d’euros. Parmi les filiales étrangères, quelques une ont posé de réels problèmes de compréhension à la Commission d’enquête. Holco Lux : où sont les cinq millions ? Parmi elles, Holco Lux, créée au Luxembourg le 28 décembre 2001. Elle est dotée d’ 1 million d’euros de capital et de 4 millions en compte-courant Le rapport nous apprend que la commission n’a pas pu savoir ce qu’est devenu l’argent de Holco Lux : “M. Corbet n’a pas souhaité répondre (…) lors de son audition, se réfugiant derrière le secret des affaires”. Lisez : Le rapport met en cause l’importance de ces sommes, qu’elles soient celles des dirigeants que celles des conseils, non par leur montant en soi, mais “dans le cas d’Air Lib ces avantages (aux dirigeants) ont été versés alors que le redressement de l’entreprise n’était pas acquis- et pour cause !”. Idem pour les conseils : “de tels dépenses, alors que la société Air Lib a été reprise à la barre d’un tribunal de commerce sont difficilement justifiables…”. M. J.C Corbet : Pour ce qui concerne Holco Lux, c’est un peu la même démarche : c’est 36 une structure de participation. Elle était prévue pour permettre à terme la filialisation des structures de formation pour les personnels navigants d’Air lib. M. le Rapporteur : Vous dites qu’elle était destinée, mais qu’est ce qu’elle a fait ? Quelle utilisation avez-vous fait de la filiale Holco Lux après l’avoir dotée de cinq millions d’euros ? M. J.C Corbet : C’est que qu’elle a commencé à faire, monsieur le Rapporteur. M. le Rapporteur : Pouvez-vous être plus précis ? M. J.C Corbet : Non M. le Rapporteur : Pourquoi ? M. J.C Corbet : Je vous l’écrirai M. le Rapporteur : Pourquoi l’avez-vous doté de cinq millions d’euros ? M. J.C Corbet : Et pourquoi pas ? M. le Rapporteur : La question est : pourquoi un ? Pourquoi pas deux ou dix ? M. J.C Corbet : Parce que cinq ! C’est un arbitrage de gestion qui ne se discute pas, monsieur de Courson. Je suis étonné de votre question. Vous êtes quelqu’un qui a l’habitude des structures financières, du monde des affaires. Cette question, je ne la comprends pas. M. le Rapporteur : C’est la première fois qu’un témoin répond ainsi à la question qu’on lui pose. Pourquoi avoir doté une filiale à hauteur de cinq millions dans un but qui, d’après ce que vous avez indiqué, n’a pas été réalisé puisque votre idée initiale était la formation des pilotes ? Quand je vous pose la question “Pourquoi cinq millions ? Pourquoi pas un million, pourquoi pas vingt millions ?”, Vous me dites que c’est une réponse de gestion qui n’appartient qu’à TRANSPORT AÉRIEN vous-même et que vous n’avez pas à répondre à la commission. Cette réponse est étrange. M. J.C Corbet : Ce n’est pas ce que je vous dis. Je vous dit : c’est cinq. Je ne sais pas pourquoi c’e n’est pas un ou six ou vingt. D’abord la capitalisation était de un million. M. le Rapporteur : Un plus quatre ! M. J.C Corbet : Un plus quatre de fonds propres qui sont sur un compte courant Holco Lux. Mais vous savez qu’entre la société d’en haut et la société d’en bas, rien n’est irréversible. Donc c’était cinq millions de cette manière : capitalisation de 1 million, compte courant de quatre millions. M. le Rapporteur : Qu’avez-vous fait de ces cinq millions dans la filiale ? Vous étiez le président d’Holco Lux ! M. J.C Corbet : Oui M. le Rapporteur : Vous savez donc ce qui s’est passé en tant que président d’Holco Lux ? Qu’avez-vous fait des cinq millions ? M. J.C Corbet : Je vous rappelle que nous sommes dans un cadre public et que j’ai à respecter le cadre confidentiel des affaires. Je vous répondrai par écrit. M. le Rapporteur : Vous étiez l’unique actionnaire, monsieur Corbet, de Holco Lux ? M. J.C Corbet : Non, Holco était l’unique actionnaire, pas JeanCharles Corbet. M. le Rapporteur : Mais vous êtes l’unique actionnaire de la maison mère ? M. J.C Corbet : Je suis l’unique actionnaire de la société Holco. Holco était l’unique actionnaire d’Holco Lux.” Et le rapport parlementaire de s’interroger, en mentionnant le jugement du tribunal de commerce de Créteil (qui précisait l’obligation d’affecter le milliard de Swissair aux seules activités d’Air Liberté) : “les cinq millions versés à Holco Lux et prélevés sur les fonds Swissair respectent-ils les conditions imposées par le tribunal ? Il est permis d’en douter.” qui sont totales”. Ca serait intéressant de savoir si les communes concernées ici, à Roissy, le savent…Et à combien se chiffre pour elle le manque à gagner que peut produire un tel système en terme de taxe professionnelle… Mais ce n’est pas le problème qui retient l’attention de la Commission d’enquête sur le cas de Mermoz. Le problème est de deux ordres : 1) les 12. 196 millions versés à Mermoz sont, d’après Marc Rochet (ancien PDG d’Air Liberté), auditionné, “excessifs dans un rapport minimum de 1 à 2, voire de 1 à 3”. 2) en fait, l’argent a servi, pour un montant de 9.14 millions d’euros à payer d’avance (ce qui est inhabituel) un cabinet d’avocats Pleger et Blach pour “financer le contentieux à l’encontre de Swissair et à aller les chercher jusqu’au bout de la terre” selon l’expression reprise par Maître Léonzi, l’avocat d’Air Lib chargé de coordonner le dossier de la dette Swissair. Autre problème découvert par la commission, le paiement de ces 9.14 millions apparaît dans la comptabilité d’Holco le 31 mars 2002, à la clôture de l’exercice. D’après les renseignements fournis au Rapporteur, cette somme aurait été payée avant cette date et régularisée a posteriori…En tout cas cette somme n’a pas servi à la maintenance des avions. Mermoz en Irlande Autre filiale, créée le 29 octobre 2001 en Irlande cette fois, a qui a été transféré la propriété d’une partie de la flotte d’Air Lib. Mermoz a été capitalisée à hauteur de 12.196 millions d’euros afin de faire face aux charges de maintenance des avions (on apprend d’ailleurs que c’est une pratique courante des compagnies de transférer leur avions dans des pays à fiscalité plus douce. Y compris Air France. Le président Spinetta a expliqué à la commission que “(Air France) le fait aussi, sur autorisation de la direction générale des impôts qui en est informé. (…)° Certes nous avons quelques avions logés dans des structures en Irlande ou ailleurs, mais dans des conditions de transparence et de connaissance de la tutelle L’histoire de Mermoz a donné lieu à une nouvelle mise sur le grill de J.C Corbet : M. le Rapporteur : Pouvez-vous nous confirmer que vous avez bien versé ces 9.1 millions d’euros ? Pourriez-vous nous expliquer comment vous pouvez verser à un cabinet d’avocats situé 37 en Suisse, 9.1 millions d’euros en réglant par avance les honoraires sans aucune clause d’intéressement. C’est-à-dire que si le cabinet ne réussit à recouvrer que zéro, ils auront toujours ces 9.1 millions, et s’ils réussissent à récupérer une dizaine de millions, vous aurez payé autant pour recouvrer. Pourquoi avez-vous signé ce contrat ? Pouvez-vous donner à la commission ce contrat que nous vous avons demandé et que nous n’avons pas encore reçu. J.C Corbet : D’abord, ce que vous venez de dire est erroné : ce n’est pas un cabinet suisse. M. le Rapporteur : Vous l’avez versé en Suisse, d’après ce que l’on nous a indiqué. J.C Corbet : Vous voyez qu’on vous dit des choses inexactes. M. le Rapporteur : Nous sommes là justement pour que vous nous expliquiez. J.C Corbet : Je vous réponds que nous sommes dans une procédure contre les Suisses, procédure extrêmement complexe. Il n’est absolument pas question que je dévoile publiquement ma stratégie. Ces éléments dont vous parlez sont aujourd’hui chez un expert judiciaire qui va les transmettre au tribunal de commerce de Paris. Dès lors que son rapport sera fait, je vous invite à le lui demander. M. le Rapporteur : Ce n’est pas le débat, monsieur le Président. J.C Corbet : Mais c’est ma réponse. M. le Rapporteur : Le débat est que j’ai trouvé cette somme dans votre comptabilité. Et donc, je vous pose la question : votre filiale Mermoz à payé 9.1 millions. A qui ? Il ya quand même un versement ! Je l’ai TRANSPORT AÉRIEN trouvé. On m’a indiqué que cela a été vers é à un cabinet appelé Pleger et Blach. Pouvez-vous me dire ce qu’est ce cabinet et quel est le fondement du versement de 9.1 millions d’euros ? Nous sommes au début 2002, au moment où vous avez demandé 30.5 millions à l’Etat et vous espérez en avoir plus, via le GIE fiscal, à peu près aussi 30 millions. Pouvez-vous nous expliquer cela ? J.C Corbet : Je vous répondrai par écrit. De manière très schématique, c’est une assurance-vie complète qui permet que, aujourd’hui, nous puissions continuer à poursuivre les Suisses partout dans le monde. Nous avons aujourd’hui des procédures contre le Suisses en Pologne, en Belgique, en Italie, en France, au Luxembourg. C’est une provision qui nous permet d’avoir la certitude que, quoi qu’il arrive, nous irons jusqu’au bout de la procédure. M. le Rapporteur : Vous faites payer cette somme par la filiale. Pourquoi cette somme a-t-elle été payée par la filiale ? J.C Corbet : Non, je ne peux pas vous l’expliquer. M. le Rapporteur : Pourquoi n’est-ce pas la holding qui l’a payée ? J.C Corbet : Je ne peux pas vous l’expliquer, je vous l’expliquerai par écrit. (…) M. Le Rapporteur : Dernière question : quel est ce cabinet ? J.C Corbet : Je vous l’indiquerai par écrit. M. le Rapporteur : Parce que vous ne le savez pas ? J.C Corbet : Bien sûr que si (…). Aujourd’hui, cela fait partie d’une enquête judiciaire à qui nous avons indiqué tout cela. Je vous l’indiquerai et je vous donnerai éventuellement le rapport. La commission note que “contrairement à ces engagements, à la date d’adoption du présent rapport, M. Corbet n’a communiqué aucun des documents promis à la commission”. démissionné en décembre 2001 et cessé ses fonctions le 31 décembre 2001, mais la comptabilité d’Holco fait apparaître son licenciement le 15 février 2002. La réaction de M. Corbet a été radicale. Afin que l’entreprise ne puisse pas déposer le bilan, la structure juridique de l’entreprise a été modifiée : le directoire a été supprimé et Air Lib est devenue une société anonyme avec un conseil d’administration”. (p. 80). Dès octobre 2001, le dépôt de bilan était prévisible. Mais Corbet continue. François Bachelet, dirigeant d’Air France Cargo à la retraite, était devenu, (moyennant une golden hello de 2.5 millions de F) président du directoire de la SAS Holco. “Vers le 15 octobre (2001) j’ai estimé que l’affaire n’était plus viable. Je l’ai écrit au cabinet du ministre en lui disant qu’il me paraissait invraisemblable que l’on puisse trouver des fonds propres supplémentaires pour faire face à la carence de Swissair et que, dans le contexte (…) le business plan sans financement était irréaliste. Je suggérais, de façon non étudiée, l’arrêt de l’activité. On avait encore de la trésorerie, donc, on ne pouvait déposer le bilan, mais on pouvait très bien décider d’arrêter l’activité et d’abonder un plan social avec le reste de la trésorerie pour distribuer au personnel ce qui aurait été sauvé du désastre de Swissair”. Plus loin, dans le rapport, on lit ces choses délicieuses : M. Bachelet a déclaré avoir Des “gestionnaires” vraiment nuls qui confondent recettes et bénéfices. Le dirigeant d’Air Lib faisait vraiment n’importe quoi. La mise en place d’Air Lib Express a été un non sens économique de base. Pour faire du “low-cost”, un étudiant (même mauvais) en économie penserait tout de suite à réduire les coûts. Un témoignage du délégué syndical UNAC (Union des navigants de l’aviation civile), M. Lafosse-Martin, devant la commission d’enquête est élo- quent. “Quant au moyen courrier, nous avons attendu cinq mois avant d’instaurer le low-cost ; les avions se sont alors remplis. Remplir un avion n’est pas un problème, gagner de l’argent est plus difficile ; or vous ne pouvez pas gagner de l’argent en lançant des prix d’appel à 29 euros. L’heure de vol d’un MD83 étant 40 000 francs, avec de tels tarifs, il faut remplir l’avion à 100% pour faire des bénéfices. Par ailleurs, si vous prenez les exemples de ce qui se fait de mieux en low-cost en Europe, à savoir par des compagnies comme Easy Jet ou Ryanair, vous constatez que les ratios de personnel sont de l’ordre de quatre navigants pour un personnel au sol, via la sous-traitance notamment. Nous, nous étions à un rapport de un pour un. On ne peut pas faire du low-cost avec un tel ratio” Sans commentaires… Et sans parler de l’ouverture de la ligne Paris Tripoli, où là, il n’y avait même pas de recette : “il était impossible de se procurer des billets à Tripoli car aucune agence de la compagnie n’était sur place. (…) Les vols étaient vides”… Cumul DGAC ADP Trésor Public URSSA 17 février 2003 29 429 316 28 104 488 6 222 000 25 668 Source : CIRI Etat des dettes publiques d’Air Lib au 38 TRANSPORT AÉRIEN Le gouvernement Jospin a “donné” 30.5 millions d’euros sans regarder… On va vous la faire courte : Lionel Jospin, alors Premier Ministre, voulait être Président de la République. Air Lib risque la faillite, c’est sûr et le grand défenseur de l’Emploi (façon : “non aux licenciements !”…) ne veut pas prendre de risques politiques. Alors il va donner de l’argent des contribuables (le nôtre) à Air Lib. Les dirigeants d’Air Lib savent qu’ils ne pourront trouver d’investisseurs (ils perdent en moyenne 12 millions d’euros par mois, couvers par les fonds Swissair) et il n’y a plus d’argent. Alors ils vont demander des fonds publics par l’intermédiaire du CIRI, un organisme d’Etat, chargé d’instruire des dossiers d’aide à la restructuration. En fait, la décision politique est déjà prise, sur l’insistance de J-C Gayssot (ministre des transports) et malgré les “réserves expresses” (en fait l’opposition) de Laurent Fabius (ministre des finances). L’affaire est traitée rondement. Malgré le fait que Holco et ses filiales étrangères avaient à ce moment 20 millions d’euros de disponibilités que Corbet n’a pas voulu mobiliser (au prétexte, affirme til devant la commission, que ça aurait été du soutien abusif), malgré le fait que le dossier ait été traité sans la préparation habituelle et malgré les avis plutôt défavorables des fonctionnaires du CIRI, un prêt de 30 on lui demande des comptes (j’ai assisté à la première audition de Corbet), des responsables syndicaux qui, sciemment, couvrent du travail au noir et des entraves manifestes au comité d’entreprise, des salariés tout contents d’aller à la soupe et qui ne voient pas (ou ne veulent pas voir) qu’ils scient la branche sur laquelle ils sont assis. millions d’euros (par le Fond de développement économique et social) est accordé en deux tranches (le 28 février 2002) à la va vite. Or ce fonds d’Etat n’avait plus de sous. Qu’à cela ne tienne, on va annuler des crédits du ministère de Gayssot destinés à “l’amélioration de l’habitat”, au “Développement des infrastructures” et au “développement du tourisme”…Incroyable ! Le nouveau gouvernement, issu des élections du printemps 2002, mis devant le fait accompli, a dû reconduire ce prêt. Mais ce “soutien”, aussi important qu’il soit, n’aura été qu’une goutte d’eau dans l’océan des pertes d’Air Lib. Juillet 1987 : Naissance d’Air Liberté Septembre 1990 : naissance d’AOM Minerve (issue du rapprochement de Minerve et d’Air Outre Mer) Janvier 97 : British Airways rachète Air Liberté, (alors en redressement judiciaire) et organise un rapprochement avec TAT. Depuis le 1er avril 97, Air Liberté exploite le fonds de commerce de TAT EA en location gérance Taitbout Antibes BV, filiale de Marine Wendel (dirigée par Ernest Antoine Sellières, Président du Medef), et Swissair vont progressivement racheter Air Liberté et AOM Minerve : • 25 aout 99 : la maison mère de AOM Minerve (AOM Participations), détenue jusque là par le CDR (consortium de réalisation : structure de “défaisance” chargée de porter les avatars du Crédit Lyonnais) est vendue à Taitbout Antibes BV (50,38%) et à SAirlines, filiale de Swissair (49.5%). Pas de commentaires sur l’éloquent tableau ci dessous. Plus les milliers de chômeurs… Voilà ce qui arrive quand les donneurs de leçons s’amusent, avec les deniers publics, à jouer aux chefs d’entreprise. Il y a dans ce dossier, tout ce qu’on n’aime pas, ici, à Bénéfice.net. Le mauvais rôle de l’Etat (des politiques de l’époque, en l’occurrence) qui se mêle, pour des raisons bassement électorales de soutenir abusivement une entreprise d’évidence mort-née, un ancien “syndicaliste” qui s’improvise dirigeant d’entreprise et qui, les mains dans le caca devant la commission d’enquête, continue à faire l’arrogant quand ASSEDIC/ GARP/ORGANIC Total Hors pénalité Total Avec pénalité 8 230 4 254 143 93 678 177 99 877 804 Eric VEILLON Historique 100 millions d’euros de charges publiques impayées, dont 28 millions dus à ADP! AF Air Lib, c’est à mettre sur le compte des démagogues qui crient “non aux licenciements”. Rappelez-vous les Danone, Michelin et autres Vilvorde… Facile de dire “non aux licenciements, non aux restructurations”... Vous les avez entendu, vous, après le désastre d’Air Lib ? • 4 mai 2000 : Taitbout Antibes BV rachète Participations Aéronautiques, la maison mère d’Air Liberté, puis organise le rapprochement des trois compagnies (AOM Minerve, Air Liberté et TAT) par la recapitalisation d’AOM Participation de 1,9 milliard de F en décembre 2000. • 1er janvier 2001 : le fonds de commerce de d’Air Liberté est exploité en location gérance par AOM. • 15 juin 2001 : Dépôt de bilan d’AOM Air Liberté suite au refus des actionnaires de renflouer l’entreprise. • 19 juin 2001 : mise en redressement judiciaire. • 27 juillet 01 : Reprise d’AOM Air Liberté par Jean-Charles Corbet qui crée “Air Lib” •13 février 03 : dépôt de bilan d’Air Lib • 17 Février 03 : liquidation judiciaire d’Air Lib • 8 mars 03 : création d’une commission d’enquête parlementaire • 18 : juin 03 : Parution du rapport de la commission d’enquête qui montre que 130 millions d’euros d’argent public ont été dépensés en pure perte et, pour la première fois dans l’histoire parlementaire, transmission du rapport au Parquet. u moment de sa liquidation (en euros) 39 TRANSPORT AÉRIEN Charles de Courson, député, rapport ADP : “Il faut amélio Air Lib : “la justic Charles de Courson, est député (UDF) de la Marne. Il s’intéresse fortement au transport aérien : il est secrétaire de la commission des finances et rapporteur spécial du budget du transport aérien. Il a été rapporteur du projet de loi sur les entreprises de transport aérien dans lequel il n’a pas employé la “langue de bois” puisqu’il y est écrit que l’Etat n’a rien à faire dans le capital d’Air France et que le transport aérien n’est pas un service public… On l’a vu faire preuve d’une grande pugnacité à l’occasion de la commission d’enquête parlementaire sur “Air Lib” (voir ci-après) dont il a été le rapporteur (on dirait presque le “procureur”…). Son style nous plait bien et cette interview, recueillie dans son bureau à l’Assemblée, est une bonne occasion pour nos lecteurs d’avoir un avis éclairé sur certains problèmes qui les intéressent. giron de l’Etat. Ca peut paraître étonnant ! On peut se demander pourquoi les autorités régionales d’Ile-de-France ne réclament pas la gestion de leurs aéroports, comme ça se fait partout ailleurs… BN : A propos de Roissy CDG et du débat sur les nuisances, le trafic et le troisième aéroport. Les capacités de CDG sont encore plus importantes depuis l’ouverture du terminal 2E. Parallèlement, le nombre des constructions d’habitation augmente sans arrêt. Les maires qui vilipendent les nuisances sont les mêmes qui protestent lorsque le Plan d’Exposition au Bruit limite lesdites constructions. Et le troisième aéroport est souvent présenté comme la panacée, alors que la Cour des comptes, en toute logique, recommande d’amortir les investissements réalisés à Roissy et que, de toute façon, la construction d’un autre aéroport prendra 10, 15 ans. Ne pensez-vous pas que ce débat est un peu… “autiste”? Charles de Courson, député, est un spécialiste du transport aérien Bénéfice.net : Dans votre rapport sur le budget 2003 du transport aérien, vous écrivez, à propos d’ADP, que les services de ceux-ci “peuvent être rationalisés dans le sens d’une plus grande efficacité et d’un moindre coût pour les clients et les usagers”. Pouvezvous être plus précis sur ce point ? Et ne pensez-vous pas qu’ADP pourrait être avantageusement privatisé ? Charles de Courson : Les compagnies utilisatrices de Roissy et d’Orly trouvent que les prestations sont bonnes mais plus chères que celles des plateformes concurrentes. Un des problèmes récurrents est la sûreté, notamment des bagages et du fret. Il y a beaucoup de vols. C’est lié à la sous-traitance, qui induit des problèmes de personnel, de formation. Il faut améliorer la compétitivité d’ADP. La logique veut qu’ADP puisse passer des accords, y compris capitalistiques. Une loi va transformer l’établissement public en société, comme ça a été le cas pour Air France. Puis, conformément à la lettre adressée par le gouvernement au nouveau Président d’ADP, Aéroports de Paris devra ouvrir son capital pour créer des réseaux de plateformes aéroportuaires Il faut aussi mentionner la question de la décentralisation : dans le projet de loi sur celle-ci, les aéroports parisiens restent dans le 42 CDC : Le niveau de saturation de Roissy n’est pas technique mais environnemental ; les contraintes environnementales iront en se renforçant dans les années qui viennent. Une éventuelle nouvelle plateforme (le problème est réglé désormais) ne résoudrait aucun des problèmes des riverains de Roissy dans les quinze années qui viennent. C’est l’Etat qui a construit CDG, mais il n’a pas prévu de limiter l’urbanisation autour. D’une manière générale, il faut renforcer les règles d’urbanisme pour interdire les constructions à proximité des plates formes aéroportuaires. Je suis pour l’élargissement du Plan d’exposition au bruit. De même, je suis favorable, pour les cas extrêmes, et sous certaines conditions (d’antériorité notamment) à ce que l’Etat rachète les habitations les plus touchées. C’est ce que nous avons fait à Vatry… BN : Vous avez, dans votre rapport sur le projet de loi (adopté) sur les entreprises du transport aérien, évoqué la privatisation d’Air France comme naturelle et écrit TRANSPORT AÉRIEN teur du budget du transport aérien : rer la compétitivité” e fait son devoir” que son statut public actuel était “anachronique”. Air France va bien, malgré la crise actuelle. L’Etat lui avait, lors de sa grande crise (qui n’était due qu’à une impréparation de la compagnie à la libéralisation), accordé 20 milliards de Francs de subvention, (acceptés de justesse par Bruxelles). On n’en parle plus. Ne serait-il pas juste, pour les contribuables que nous sommes, qu’Air France commence, même progressivement, à rembourser l’Etat ? CDC : Avec le statut d’Air France, nous étions le dernier Etat socialiste d’Europe. ! La loi est votée et le rapprochement conditions peu claires, le travail (officiel…) au noir des employés, on a du mal à y croire. Pouvezvous nous dire où en sont les suites (s’il y en a), sur les plans judiciaire, administratif et même politique, puisque, à lire les explications de vote de la gauche, on peut être amené à penser que celle-ci couvre tous ces agissements ? réussi avec KLM consacre enfin sa privatisation. Le remboursement a commencé par la cession d’une partie du capital d’Air France. La compagnie se porte plutôt bien, a bien réagit à la crise. Dans ces conditions, ne vous inquiétez pas : l’Etat retombera grosso modo sur ses pieds… BN : Nous avons lu entièrement votre rapport sur Air Lib qui se dévore comme un roman noir. On est ressorti de cette lecture ...abasourdit. Du “golden hello” de M. Corbet, aux conditions d’attribution du prêt FDES, en passant par les dettes envers d’ADP, les honoraires divers payés dans des CDC : La transmission au Parquet de Paris permet à la justice de faire son devoir L’enquête judiciaire sur Air Lib suit son cours. Il existe 4 à 5 “voies d’eau”… Par ailleurs, la Gauche n’a pas couvert les agissements de Monsieur Corbet et de son équipe. 43 Le vote hostile du Parti communiste est un moyen de défendre l’action de M. Gayssot, Ministre de l’époque. Celui-ci, c’est clair, était le “cheval de Troie” du PC pour le second tour de la présidentielle…Il n’a pas eu à s’en servir… Quant au parti socialiste, il faut voir dans son refus de prendre part au vote, pour partie, le contexte d’opposition globale lié au débat sur les retraites et, pour partie, la crainte d’une remise en cause de l’action de Lionel Jospin, Premier Ministre. Propos recueillis par E. Veillon