Les Émotions et réactions après une perte.

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Les Émotions et réactions après une perte.
Les Émotions et réactions après une perte.
Une première réaction dont on se surprend, suite à une perte importante,
c’est l’impression de sortir d’un temps intemporel. Les personnes ont
parfois l’impression de devenir fou, et me demandent: “Suis-je normale? Est-ce que je suis normal(e) de me sentir perdu(e) dans toutes les réactions
que je ressens?” Ils sont gênés de leurs émotions. Ils se sentent honteux, ils
ont l’impression d’être maladroits et ils pensent qu’ils devraient se montrer
forts et être capable de contrôler leurs émotions.
LE DEUIL N’EST PAS QUE PEINE ET DÉPRESSION. C’EST UN ENSEMBLE
D’ÉMOTIONS,
de l’angoisse à l’agressivité, passant par la culpabilité, la
confusion, le soulagement et bien d’autres encore. Cela ne touche pas
uniquement la sphère des émotions, mais également l’ensemble des
systèmes de vie: le travail, la relation aux autres, l’image de soi, . . .
CONFUSION ET DÉSORIENTATION:
C’est vraisemblablement un des aspects le plus menaçant, poussant
la personne à s’isoler : le sentiment de confusion et de désorientation.
Cela arrive fréquemment lorsque la réalité de la perte est perçue
pleinement. Une personne décrivait ce sentiment de la façon suivante : «Je
me sentais comme un voyageur, isolé, sans personne avec moi, et, pire
encore, sans destination. Je ne pouvais ni trouver quelqu’un, ni me retrouver
moi-même ». On se sent agité, énervé, impatient, troublé. Comme si on se
trouvait emporté dans le courant d’une rivière tumultueuse, cherchant en
vain à s’agripper. Les idées sont incohérentes et les émotions intenses sont
bouleversantes.
Cette confusion apparaît dans la façon d’accomplir des tâches
quotidiennes. On les commence sans les finir, on oublie les rendez-vous,
l’efficacité au travail est réduite, on n’arrive pas à prendre des initiatives
structurées ou encore on se sent plus fatigué.
Il se peut qu’on ait le sentiment de rechercher sans trêve la
personne décédée. Les souvenirs et le désir de la revoir reviennent sans
cesse, au point parfois de déformer nos perceptions. Les images nous
hantent parfois, allant jusqu’à l’impression d’entendre la personne disparue,
et ce n’est pas dans nos rêves. L’impression de confusion ne survient pas
subitement, c’est plutôt comme une vague qui monte, puis disparaît. On a
le besoin, soit d’en parler, soit de rester seul.
C’est utile de pouvoir parler de cette confusion à quelqu’un qui ne
juge pas et ne donne pas trop vite de conseils. Durant cette période, il faut
veiller à ne pas prendre de décisions majeures, comme la vente de la maison,
ou un changement de travail important. Une mauvaise décision entraînerait
une perte encore plus grande. Reporter alors les décisions, avancer lentement
et se montrer patient avec soi-même : voilà ce qui est le plus indiqué.
Si nous avons l’occasion de cheminer avec quelqu’un qui vit un
deuil et semble désorienté, de grâce, écoutons patiemment et attentivement,
malgré les répétitions. Cela peut aider à remettre de l’ordre dans les idées de
la personne qui nous parle de son deuil.
Il est à propos, également de lui conseiller de reporter les décisions,
d’avancer lentement et de se montrer patient avec lui ou elle-même, de ne
pas prendre de décisions graves, sinon après avoir demandé conseil auprès
de personnes expérimentées en la matière.
DÉPRESSION ET DÉSESPOIR.
La dépression et le désespoir sont les émotions auxquelles on s’attend
le plus quand on parle de perte.
On se sent souvent abandonné par le décédé, même si on sait
pertinemment bien qu’il n’a pas choisi de mourir ( sauf en cas de suicide ou
lorsque quelqu’un a demandé consciemment qu’on l’aide à hâter sa mort ).
Or, ce sentiment d’abandon lors du deuil peut raviver d’anciennes
expériences d’abandon. On peut essayer de refouler ces émotions par toutes
sortes de raisonnements. Il vaut mieux les laisser émerger.
J’ajouterais, en pensant aux personnes qui partagent sur le deuil : « Ce
sont de véritables montagnes russes », que les endeuillés vivent quant aux
réactions émotives qu’elles subissent. Il y a des jours où tout va assez bien
et sans qu’on sache au juste pourquoi, c’est le chagrin, l’ennui, la jalousie ou
encore la culpabilité qui viennent troubler notre tranquillité.
Tout ceci est compréhensible et normal lors d’une perte importante.
Et pourtant, on continue de se faire la leçon, on se sent amoindri de ne pas
pouvoir réagir mieux. Ce tourbillon peut nous entraîner de plus en plus bas.
Pour l’entourage, la famille, les amis, les collègues, ceci n’est pas
facile. Il faut qu’ils veillent à ne pas conseiller, encore moins critiquer.
Dans le deuil, on a besoin d’attention pour ce qu’on éprouve. Ce qui aide,
c’est quelqu’un qui fait comprendre que la tristesse a le droit d’exister et
d’être exprimée.
L’endeuillé a besoin d’avoir l’autorisation de fonctionner à un niveau
plus bas que de coutume, tant émotionnellement que physiquement ou
socialement.
C’est ce qui termine l’article de ce jour. Dans mon prochain rendezvous, nous nous poserons la question : « Est-il possible de ressentir de la
colère dans la traversée d’un deuil? De quoi peut-on se sentir coupable dans
le déroulement d’un deuil?