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DOSSIER DE PRESSE Sommaire Nos choix ne sont pas innocents… p3 Liste des Lauréats et des Prix SACD p4 Liste des Lauréats et des Prix Scam p4 La SACD et la Scam p5 Le Comité belge de la SACD p6 Le Comité belge de la Scam p7 Antoine Pickels p8 Hélène Cattet et Bruno Forzani p 11 Rémi Pons p 14 Jérôme de Warzée p 18 Chantal Akerman p 19 Jorge León p 21 Loredana Bianconi p 25 Isabelle Stengers p 27 Marie Hooghe p 30 Léonie Bischoff p 32 Marie Wabbes p 35 Jacques Dubois p 37 Contacts et Adresses p 40 Nos choix ne sont pas innocents… Par leurs prix annuels, la SACD et la Scam consacrent chaque année une dizaine d’auteurs et autant de parcours singuliers et d’écritures originales. Cette mise en lumière encourage les jeunes auteurs et rend hommage aux auteurs confirmés. Le 12 décembre 2014, la SACD et la Scam décernent 12 prix annuels dans les différents répertoires qu’elles représentent. Leur particularité ? Ce sont les auteurs eux-mêmes qui au sein des Comités belges recherchent et distinguent les œuvres et les auteurs qu’ils souhaitent primer. Leur objectif ? Distinguer une œuvre, consacrer le parcours d’un auteur, reconnaître une individualité ou un point de vue sur le monde, rendre hommage à des œuvres à l’écriture neuve, aux propos courageux, aux richesses scéniques ou visuelles audacieuses… les motivations des auteurs peuvent être nombreuses mais, toutes, elles mettent en lumière la richesse et la diversité des formes contemporaines de création, de recherche, de pensée. Deux nouveaux prix ont été lancés cette année dans des domaines où la reconnaissance des auteurs est particulièrement cruciale : la traduction littéraire, un registre de travail où le traducteur est souvent dans l’ombre et le domaine de l’essai, un genre difficile qui s’apparente souvent à une forme de résistance. Le 12 décembre 2014, 12 auteurs ou collectifs d’auteurs ont été couronnés par leurs pairs : écrivains, réalisateurs, chercheurs, scénaristes, traducteurs, bédéistes… Ils se sont retrouvés à l’occasion d’une fête sur la thématique Famous in Belgium, clin d’œil (ou conjuration) au relatif anonymat dans lequel ils créent. Retrouvez ici une présentation de la SACD et de la Scam, puis une notice comprenant la biographie et une interview de chaque lauréat, ainsi que nos coordonnées et personnes de contact. Prix décernés par la SACD Prix SACD Spectacle vivant : Antoine Pickels pour Clinique d’un roi Prix SACD Audiovisuel : Hélène Cattet et Bruno Forzani pour L'Étrange Couleur des larmes de ton corps Prix SACD Fiction radio : Rémi Pons pour L’Odeur Prix SACD de l’Humour : Jérôme de Warzée Prix décernés par la Scam Prix Scam de Littérature : Chantal Akerman pour Ma mère rit Prix Scam du documentaire Audiovisuel : Jorge León pour Before we go Prix Scam du documentaire Radio : Loredana Bianconi pour La Résonance de nos hymnes Prix Scam de l’essai : Isabelle Stengers pour Une autre science est possible Prix Scam Texte & Images : Léonie Bishoff pour La Princesse des glaces Prix Scam de la traduction littéraire : Marie Hooghe Prix Scam Littérature / Illustration jeunesse : Marie Wabbes Prix Scam de consécration (essai) : Jacques Dubois La SACD et la Scam La SACD et la Scam sont des sociétés de gestion de droits d’auteurs. En Belgique, elles rassemblent près de 5.000 membres (et plus de 80.000 dans le monde) dont elles protègent, négocient, perçoivent, gèrent et répartissent les droits. La SACD et la Scam sont gérées par et pour les auteurs : chaque année des auteurs sont élus aux Conseils d’Administration à Paris, ainsi qu’aux Comités belges. Ces comité valident, avec l’administration, la politique de la société pour le territoire belge, et sont également compétents pour toutes les matières liées à l’action culturelle. La SACD gère le cinéma, la télévision et la radio (de fiction), le théâtre, la danse, le cirque, les arts de la rue et la musique de scène, tandis que la Scam gère la littérature, l’illustration, le documentaire (cinéma, télé et radio), et le multimédia non fictionnel. La SACD et la Scam s’attachent également à soutenir la création d’œuvres de qualité dans notre pays, ainsi qu’à promouvoir les œuvres de ses auteurs. C’est dans ce cadre que, chaque année, les Comités belges de la SACD et de la Scam décernent une dizaine de prix dans toutes les disciplines de la création, une véritable reconnaissance des pairs pour les lauréats. La remise des Prix a lieu lors de la Fête des Auteurs, une cérémonie festive qui réunit annuellement de nombreux auteurs et professionnels du secteur. Le Comité belge de la SACD est composé de 16 auteurs PRÉSIDENT Luc Jabon audiovisuel VICE-PRÉSIDENTS Isabelle Wéry dramatique, lyrique André Buytaers cinéma, télévision Stéphane Arcas dramatique, lyrique MEMBRES Vanja d’Alcantara cinéma, télévision Martine Doyen cinéma, télévision Inès Rabadan cinéma, télévision Jean-Louis Sbille audiovisuel Miguel Decleire dramatique, lyrique Isabelle Bats dramatique, lyrique Annabelle Perrichon multimédia Brice Cannavo radio Myriam Saduis mise en scène Fré Werbrouck chorégraphie Le Comité belge de la Scam est composé de 12 auteurs : PRÉSIDENT Alok b. Nandi multimédia VICE PRÉSIDENT Jean-Luc Outers littérature MEMBRES Marie-France Collard audiovisuel André Dartevelle audiovisuel Dominique Loreau audiovisuel Ronnie Ramirez audiovisuel Caroline Lamarche littérature Alain Dartevelle littérature Françoise Wuilmart littérature Antoine Tshitungu Kongolo littérature Paola Stevenne radio Antoine Pickels Biographie Antoine Pickels a été ou est encore artiste visuel, performeur, cinéaste expérimental, peintre de décor, éclairagiste, scénographe, metteur en scène, dramaturge, auteur dramatique, essayiste. Il parcourt ainsi des milieux aussi divers que le rock, la littérature, les cercles académiques, le théâtre, la danse, le cinéma, la mode, les arts plastiques. Ses textes ont été publiés aux éditions Groupe Aven, Hayez & Lansman, Cercle d’art, Alternatives théâtrales. Ses pièces La Ressemblance involontaire, Abel/Alexina ou le sexe de l’ange, Personne, Bruxelles, ville d’Afrique, In Nomine, Clinique d’un roi ont été créées en Belgique et en France (Théâtre de la Balsamine, Les Brigittines, Théâtre Varia, Comédie De Caen…), et jouées en France, en Allemagne et en RDC. Compagnon de route de la danse contemporaine en Belgique dès les années 1980, il a souvent collaboré avec des chorégraphes, dont Thierry Smits (avec qui il a cosigné les spectacles chorégraphiques La Grâce du tombeur et Éros Délétère, et l’opéra de chambre Reliefs d’un banquet), Fernando Martin, Pierre Droulers. D’un goût exquis, pièce chorégraphique de Fabrice Ramalingom inspirée de son essai éponyme, a été créé à la Ménagerie de Verre en 2014. Curateur indépendant dès 1980, notamment à la Raffinerie ou au Résidence Palace, il a été coordinateur de la programmation et programmateur théâtre et performance aux Halles de Schaerbeek, directeur de La Bellone, Maison du Spectacle, directeur artistique du festival Trouble, et est conseiller artistique du Cifas. Il collabore régulièrement à des revues, ouvrages collectifs, catalogues d’expositions ou colloques en Europe. Professeur à La Cambre et à l’ESAC, il y enseigne l’histoire et l’actualité des arts de la scène et la performance. Antoine Pickels reçoit le Prix Spectacle vivant de la SACD pour Clinique d’un roi Clinique d’un roi, de et avec Antoine Pickels par David Marlé À propos de… Antoine Pickels, que représente cette œuvre, Clinique d’un roi, dans votre parcours ? Elle s’inscrit dans la continuité de plusieurs pièces consacrées à des positions périphériques, marginales, et représente une somme de thématiques et de différentes pratiques artistiques (de peintre, de scénographe, de comédien) que j’ai abordées. La pièce reprend les derniers instants d’Henri III, mais traite avant tout de l’histoire du théâtre, de la vision de l’homosexualité, et pour cela le texte reprend la parole de plusieurs autres auteurs, parole convoquée, transformée, voire confisquée. Comment s’est opéré le passage du texte à la scène ? Il faut distinguer le texte du spectacle : le texte était écrit pour environ sept acteurs, c’est au final un seul en scène. Cela est dû aux conditions de la production, et au fait que les premières lectures, que j’ai faites seul, touchaient juste. Sans changer le texte, je l’ai relu différemment à cette aune, et le metteur en scène n’a pas nécessairement suivi les recommandations de l’auteur… J’ai en outre travaillé avec six metteurs en scène, qui ont chacun collaboré à une séquence. On distingue leur patte et on retrouve sur le plateau l’hétérogénéité présente dans l’écriture (puisque le texte cite d’autres auteurs), mais les différentes voix sont intégrées dans un système scénique englobant et cohérent. Que représente ce prix pour vous ? Évidemment, cela me fait très plaisir. La reconnaissance des pairs est extrêmement précieuse, et ce prix décerné entre autres par des hommes et de femmes de théâtre revêt une valeur particulière. C’est d’autant plus vrai que je ne suis pas un auteur très prolifique : je monte un spectacle tous les dix ans environ, spectacle qui me vaut une reconnaissance critique et rencontre un certain succès, mais on est vite oublié et quand il s’agit de lancer un nouveau projet c’est très compliqué si on ne crée pas régulièrement. Ce prix est donc à la fois une reconnaissance et une re-connaissance, en ce qu’il me permet de ne pas disparaître entre deux productions, et de rappeler au monde que je fais des spectacles ! Quels sont vos prochains projets ? Il m’a fallu deux ans de travail intensif pour créer Clinique d’un roi, je compte donc bien le jouer encore en 2015. Je suis également en train de jeter les bases d’un prochain projet d’écriture contributive, Les Encombrants, ou Décharge (ce sont là des titres de travail). Il s’agira de travailler sur ce qui nous encombre, ce qu’on accumule – objets ou souvenirs. Ce sera un projet contributif, qui permettra à chacun (coauteurs et public) de se décharger de ses encombrants. Ce sera un projet spectaculaire dont l’écriture englobera ce dont le public va se délester… une sorte de spectacle service. Clinique d’un roi, de et avec Antoine Pickels, par Stephen Sack Hélène Cattet et Bruno Forzani Biographies Hélène Cattet et Bruno Forzani ont commencé à travailler ensemble en 2000. Ils ont co-réalisé et autoproduit plusieurs courts métrages jusqu'en 2006 avant de passer à la réalisation de leur premier long-métrage Amer en 2009 salué par Quentin Tarantino. Après leur participation au film à sketches américain The ABC's of death, ils finalisent leur deuxième long-métrage L'Étrange Couleur des larmes de ton corps, revisitant l'Art Nouveau bruxellois de manière horrifique. Ils préparent actuellement l'adaptation du roman de Jean-Patrick Manchette et Jean-Pierre Bastid, Laissez bronzer les cadavres ! Hélène Cattet et Bruno Forzani reçoivent le Prix Audiovisuel de la SACD pour L’Étrange Couleur des larmes de ton corps Hélène Cattet et Bruno Forzani. D.R. À propos de… Hélène Cattet et Bruno Forzani, comment se passe, le travail en collaboration sur un film comme L’Étrange Couleur des larmes de ton corps ? Ca ne se passe pas toujours bien, mais malgré l'adversité on sait très bien que le fait qu'on soit deux enrichit le film au final et que si on était seul, le résultat n'aurait pas la même ampleur. Après votre premier long métrage Amer, celui-ci donne encore davantage d’empreinte à « votre » patte… Mais : qui d’entre vous avait le giallo dans la peau ? À la base, c'est Bruno qui avait le giallo dans la peau... et le virus s'est propagé chez Hélène très vite ! C'est un genre très riche et jouissif où la mise en scène est la « prima donna » ! Il nous a permis de mélanger nos deux univers et d'être le ciment de notre collaboration. Vous l’avez toujours ? Sur quoi travaillez-vous aujourd’hui ? Oui, on l'a toujours. On a en tête un troisième volet à Amer et L'Étrange Couleur des larmes de ton corps, mais avant ça, on travaille sur l'adaptation du roman néo-noir Laissez bronzer les cadavres ! de Jean-Patrick Manchette et Jean-Pierre Bastid que l'on traitera comme un western à l'italienne moderne. Ça vous fait quoi, de recevoir un prix – et peut-être celui-ci, en particulier ? La SACD nous a accompagnés dans les bons et les mauvais moments de notre parcours et c'est super que ces quatorze années de chemin parcouru à vos côtés soient ponctuées par ce prix! Image extraite de L’Étrange Couleur des larmes de ton corps Affiche de L’Étrange Couleur des larmes de ton corps Rémi Pons Biographie Formé à l’INSAS, dans la section mise en scène, Rémi Pons est aujourd’hui auteur de fiction et de documentaire, pour la radio et le théâtre. Sa démarche s’appuie beaucoup sur le réel, notamment dans tous les domaines qui touchent au travail social. Il réalise d’abord Radeaux dans la montagne, un documentaire sonore sur le travail de Fernand Deligny. Il mène ensuite tout un travail autour des sansabris : L’Odeur (radio) et L’Odeur (théâtre) racontent selon deux points de vue l’enterrement de l’un d’entre eux ; Au pied de l’arbre, son prochain documentaire radiophonique, va raconter le travail accompli par le Collectif des Morts de la Rue de Bruxelles. Rémi Pons reçoit le Prix SACD de Fiction radio Rémi Pons. D.R. À propos de… Rémi Pons, on peut dire que votre rapport à la création est toujours empreint d’une grande sensibilité au réel, social en particulier. Comment vous colletez-vous au réel dans votre travail – et, en particulier, pour L’Odeur ? C'est drôle ce mot, « se colleter » : je suis allé voir du côté du dictionnaire pour savoir de quoi il retournait. Et il s'agit bien de prendre quelque chose par le collet, par le cou, autrement dit. Ici en l'occurrence il s'agirait du réel, du social. Qu'il faudrait de prendre par le cou et de secouer très fort, en voyant bien ce qui tombe. Et précisément, ici, ce qui tombe autour de moi, depuis quelques années, ce sont des laissés pour compte, un peu brinquebalant, bien vivants, et je n'y peux pas grand-chose, je suis là, avec mon corps en entier, au milieu de la foule. Je l'ai déjà dit, ailleurs, je travaille beaucoup à cela : ramasser des cailloux. De ceux qui racontent. L'Odeur, c'est d'abord ça. Un tas d'histoires, entendues, vues. Un gros paquet de sans-abris en pagaille livrés par un ami travailleur social. Se colleter. C'est aussi cette position, que j'adopte, faute de mieux : raconter, à mon tour, de l'histoire. De la fiction. En sachant que de la fiction, il y en a dans le réel, que c'est un tissage d'éléments qu'il s'agit d'opérer. Qu'il n'y a pas forcément besoin de s'interposer. Juste ça, guider le fil. Que de ce bazar d'éléments, il sorte un récit. Pour L'Odeur, un enterrement, une vie à retracer. J'aime le récit. Cela dit, le mouvement n'est pas univoque. Je ne suis pas seul à me colleter avec le réel. Lui aussi me secoue bien comme il faut. Pour L'Odeur, en particulier, je voulais que ce col à col soit audible. J'avoue que ça m'a foutu un peu la trouille par moment (et toujours aujourd'hui), d'aller y voir de plus près, dans le réel, d'engager un mouvement peut-être irréversible. Mais j'y suis allé quand même. On y est allé. Je crois que c'est un mouvement important : on est sorti, on est allé enregistrer dehors. Les comédiens se sont mis le cul dans la neige pour beugler des trucs sur le port de Bruxelles un dimanche de janvier. Et nous, on l'a écouté en sautant sur place. Pour autant, je ne crois pas que ça soit plus vrai comme ça. Non, c'est bien ça, un engagement dans la matière, qui vient résonner dans l'œuvre, par après. Ce choix là, et le choix d'enregistrer nos ambiances et sons seuls en condition documentaire, sans rebruitages, c'est cela, je crois le début d'un colletage avec le réel. Est-ce que L’Odeur représente un moment particulier dans votre parcours d’auteur ? Oui, il s'agit bien d'un moment particulier. L'Odeur, c'est une écriture qui dure depuis plus de dix ans maintenant, et qui est en train de finir de se concrétiser aujourd'hui dans une version théâtrale, (où on est allé rechercher des éléments du réel). C'est le début d'une position, comme je viens de le dire. Une position que j'aimerais préciser pour la suite : aller me colleter au réel dans des durées plus ou moins longues, laisser advenir de l'histoire et de la parole. Et laisser s'entrechoquer ce langage là, qui vient du documentaire, avec la fiction qui peut en advenir. Et puis ça a été aussi comme une porte ouverte : parce que quand tu te mets à te colleter au réel, alors parfois, lui te sollicite, et voilà, je suis embarqué depuis presque deux ans dans le Collectif des morts de la rue, avec qui je suis en train de faire un documentaire radio. Qu’est-ce que cela représente, recevoir un prix, pour vous ? Et celui-ci en particulier, peut-être ? C'est particulier. C'est la première fois. À vrai dire, je suis content, parce que raconter des trucs via la radio, déjà, c'est tout un univers, assez marginal, il faut le dire. Et en plus, faire de la fiction, dans les conditions où on le fait, avec ce souci du réel, ça je ne l'entends pas beaucoup. Donc voilà, j'imagine que je suis content de ça, cette forme de reconnaissance pour un travail que je fais dans un coin du monde. Et puis il y a ceux-là, les éclopés qui m'accompagnent. J'espère qu'à travers tout ça, c'est une façon de parler d'eux autrement qu'en les accablant des mille maux sociaux qu'ils sont bien loin de porter. Sur quoi travaillez-vous aujourd’hui ? Aujourd'hui, je travaille à la suite de L'Odeur, dans une version théâtrale qui met en avant de manière plus explicite le travail mené par des travailleurs sociaux auprès des sans-abris. On a déjà présenté une étape de ce travail à la Vénerie en octobre. On en prépare une autre en janvier à Liège, avec le soutien d'Arsenic 2. Et puis en radio, je suis en plein montage de ma prochaine émission, un documentaire consacré au Collectif des morts de la rue de Bruxelles, qui regroupe sans-abris, travailleurs sociaux et bénévoles autour de cette question : comment enterrer des personnes ayant vécu en rue de la manière la plus digne possible. Et enfin, mon collègue Baptiste Janon m'a embarqué sur un film documentaire sur des ouvriers qui pêchent au bord d'une grosse centrale nucléaire. Je n'y connais rien au cinéma. Mais on y va gaiment. Illustration de Sophie Cocheteux Depraeter pour L'Odeur Jérôme de Warzée Biographie Comédien, humoriste, chroniqueur, Jérôme de Warzée a un parcours atypique : de la scène à la radio, il est l’un de ces auteurs qui ont « explosé » en jouant de sa plume et de son physique (The Chauve must go on). Il s’est implanté dans le paysage audiovisuel en conservant sa lucidité et son mordant. Jérôme de Warzée monte son premier spectacle, La Bombe textuelle en 2005 et décroche 17 prix en festivals d’humour ! Rapidement, il devient un invité récurrent de plusieurs émissions télévisées sur la RTBF (Revu et Corrigé, Méfiez-vous des idées reçues, Sans chichis, la tribune, Le meilleur de l’humour, Signé Taloche). Son troisième spectacle, Hautes tensions, a fait le plein dans toutes les salles possibles de Belgique (150 dates en deux ans, soldout pratiquement partout…). En 2014-2015, il poursuivra sa présence quotidienne à la RTBF avec Un cactus dans le waterzooi et le dimanche dans l’émission Les enfants de chœur. En plus de l’écriture de tous ces textes, qu’il pratique avec beaucoup d’exigence, Jérôme de Warzée écrit aussi pour d’autres humoristes comme Virginie Hocq, les frères Taloche ou Fabian le Castel. Et dernièrement, sa carrière s’est encore enrichie d’une nouvelle dimension : il accompagne désormais de jeunes humoristes. Grâce à la structure d’accompagnement qu’il a créée avec Renaud Chantrie, il met le pied à l’étrier de jeunes talents comme Martin Charlier ou Sofia Syko dont les noms ne sont déjà plus inconnus. Jérôme de Warzée reçoit le Prix Spectacle Vivant – Humour de la SACD Jérôme de Warzée. D.R. Chantal Akerman Biographie La réalisatrice belge Chantal Akerman est connue pour ses films innovants, souvent comparés à ceux de Jean-Luc Godard ou Rainer Werner Fassbinder. C’est en 1968, à l’âge de 18 ans, qu’elle inaugure son œuvre cinématographique par un pamphlet burlesque sur le quotidien dans une cuisine intitulé Saute ma ville. Elle s’installe à New York au début des années 1970, où elle travaille en marge de l’industrie du cinéma et devient l’une des figures majeures de l’avant-garde cinématographique. En 1975, elle réalise l’un de ses films les plus influents, Jeanne Dielman, 23 Quai de Commerce, 1080 Bruxelles. Elle a signé à ce jour plus d’une quarantaine de films, dont une série de documentaires qu’elle réalise au cours des années 2000. À partir de 1995, Chantal Akerman commence également à développer des installations vidéo qu’elle présente dans des galeries et musées du monde entier. Elle est l’auteur de quatre ouvrages dont le plus récent, Ma mère rit, est paru aux éditions Mercure de France en 2013. Chantal Akerman reçoit le Prix Littéraire de la Scam pour Ma mère rit. Chantal Akerman. D.R. Jean-Luc Outers Membre du Comité belge de la Scam À propos de Chantal Akerman On connaît la longue carrière cinématographique de Chantal Akerman mais curieusement, ce n’est pas un film que nous récompensons aujourd’hui mais un livre : Ma mère rit. Personnellement, j’ai toujours trouvé que les films de Chantal étaient du côté de la littérature, pas seulement parce qu’elle s’y est frottée à de grands écrivains (Isaac Bashevis Singer, Proust ou Conrad) mais surtout parce que l’on retrouve dans chacun d’eux une écriture, une langue, une voix. Et c’est cette voix qui m’a touché dans l’émouvant récit Ma mère rit. J’avais l’impression de l’entendre en off. La voix de Chantal adulte et la voix de Chantal petite fille. Plus que le portrait d’une mère, il s’agit d’un autoportrait qui donne un éclairage nouveau sur l’œuvre cinématographique de Chantal car on y retrouve les thèmes de ses films : la répétition, l’enfermement, le père, la mère (News from home), la famille, l’amour impossible, le rapport à l’autre parfois violent, les villes (Paris, Bruxelles, New York), la peur de chavirer, l’errance d’appartements en appartement qui me fait penser à ce que dit Deleuze des nomades : « Ils sont nomades à force de ne pas bouger… Voyager sur place c’est le nom de toutes les intensités. » Tout cela est écrit dans une langue dépouillée, humble, une langue qui parle de nous à chacun de nous. Dans ce livre (étrangement), il n’est pas question de cinéma mais de ces choses si étranges, si compliquées et si carrément insolubles qui s’appellent tout simplement l’amour et la vie. Image extraite de Jeanne Dielman, 23 Quai de Commerce, 1080 Bruxelles, de Chantal Akerman (1975) Jorge León Biographie Jorge León étudie le cinéma à l’INSAS, à Bruxelles. Très tôt, son intérêt se porte sur le cinéma documentaire en tant que réalisateur et directeur de la photographie. Sa pratique croise celle de nombreux artistes de la scène (Olga de Soto, Xavier Lukomski, Meg Stuart, Benoît Lachambre, Simone Aughterlony…) donnant lieu à de multiples collaborations artistiques. Ses productions en tant que réalisateur incluent De Sable et de Ciment (2003), Vous êtes Ici (2006), Between Two Chairs (2007). Ses films plus récents 10 Min. (2009), Vous êtes servis (2010), Before We Go (2014) sont largement diffusés dans les festivals internationaux et ont été couronnés de prix à diverses occasions. Parallèlement à la présentation de Vous êtes servis en ouverture du kunstenfestivaldesarts 2010 à Bruxelles, il signe sa première mise en scène de théâtre en collaboration avec Simone Aughterlony : Deserve. Cette collaboration se poursuit avec la création de Uni * Form qui sera présenté en première à Zürich au Theater Spektakel en août 2015. Le scénario de son prochain film Mitra-Events Unfolding a été primé au FIDLab 2014 et est actuellement en phase de développement. Jorge León reçoit le Prix Scam du Documentaire Audiovisuel pour Before we go Jorge León par Marc Bouteiller À propos de… Before we go est la dernière réalisation de Jorge León. Véritable expérience filmée de la rencontre entre des personnes en fin de vie, atteintes de maladies incurables et des artistes chorégraphes, sur la scène et dans les ateliers de l’Opéra de la Monnaie. Ce projet est né d’un atelier de création avec des résidents d'un centre de soins palliatifs. Un livre est actuellement en cours de finition ; des portraits photographiques de chacun des patients mis en scène dans ce qu'ils auraient aimé être si c'était à refaire…. Jorge León, que représente pour vous ce Prix de la Scam ? C’est une forme de reconnaissance de mon travail au sein d’une communauté spécifique, celle des auteurs, et cela me touche. Malgré la solitude à laquelle chaque auteur est confronté, quelque chose du collectif se joue toujours dans l’expérience de cinéma. Avec Before we go j’ai travaillé avec des créateurs, des artistes chorégraphes que je connaissais pour avoir collaboré avec eux lors d’autres projets, je parle de Meg Stuart, de Benoît Lachambre et de Simone Aughterlony ainsi que des musiciens George Van Dam, Walter Hus et Alex Verster et l’acteur Thomas Wodianka. Des rencontres déterminantes qui ont balisé mon parcours. Beaucoup sont devenus des amis. J’ai eu le privilège de les réunir dans ce film. Leur confiance et un respect mutuel ont permis que Before we go voie le jour. Et quel rapport entretenaient-ils avec les trois personnes que l’on voit dans le film ? Face à des personnes en fin de vie, à leur ultime désir, Meg, Benoît et Simone n’ont pas hésité à se mettre à nu, un dépouillement qui les a exposés jusque dans leur propre fragilité. Ce film s’est construit sur des rencontres intimes, des rencontres intenses…. Lydia, Noël et Michel, ces êtres en fin de vie nous parlent à leur façon de cet élan libérateur, de cet instant intense que l’on peut ressentir lorsque l’on est conscience de son propre départ. La vie et la mort se rapprochent, se concrétisent à travers des gestes d’attention, d’amour. Là aussi, face à la radicalité de notre solitude vis à vis de la mort, je tenais à ce que cette question soit travaillée collectivement. Ce Prix valide également un esprit de recherche dans la pratique documentaire. Je sens dans mon travail de cinéaste que je ne cherche plus à courir dernière le réel pour l’attraper, je cherche davantage à faire en sorte que des mondes se rencontrent par le biais du cinéma – des réalités qui, sans l’acte cinématographique, ne coexisteraient peut-être jamais. Une fois ces liens créés, je tente de rester présent à ce qu’ils produisent de neuf, d’inouï. Je deviens une sorte de témoin curieux de cette expérience de vie qui se déploie sous mes yeux et qui devient le film. Quel message voudriez-vous transmettre à travers ce Prix ? Aujourd’hui, plus que jamais, je sens à quel point les conditions de production ont des répercussions sur la forme des films. Les réalisateurs sont parfois amenés à formater leur propre système de pensée créatrice pour arriver à leurs fins… J’essaie de me protéger de ce schéma, ce qui finit par devenir un acte de résistance compte tenu du contexte actuel, je l’assume pleinement. Pour Before we go je tenais à une certaine écriture, à un certain type d’image qui impliquent un mode de production plus lourd en terme d’équipe de tournage. Nous avons dû nous battre pour maintenir cette exigence et je ne le regrette pas une seconde. Cette dimension chorale du travail, même si elle exige beaucoup d’énergie, m’a beaucoup appris. Donc oui, créer c’est aussi résister … Que comptez-vous faire à présent ? D’une part je tente d’accompagner le film en festivals, je serai donc à NewYork en janvier où Before we go est programmé à la Cinémathèque. Je travaille également avec Simone Aughterlony à la mise en scène d’une pièce de théâtre dont les répétitions débuteront en avril pour une première présentation publique à Zürich en août 2015 dans le cadre du Theater Spektakel. Ce projet devait être documentaire à la base, un film que j’envisageais de tourner dans le milieu de la police en Belgique mais ils exigeaient le « final cut »… Nous aborderons donc les choses autrement, en questionnant certaines réalités sur un plateau de théâtre, avec des acteurs… Je viens d’obtenir l’aide au développement pour un projet de film que j’avais présenté cet été au FIDlab à Marseille, un projet inspiré d’une correspondance bouleversante, des échanges d’emails entre Jacques-Alain Miller, psychanalyste français, gendre de Jacques Lacan et Mitra Kadivar, psychiatre et psychanalyste iranienne résidant à Téhéran. M. Kadivar écrit à J-A Miller dans l’espoir d’obtenir de l’aide car elle apprend qu’elle va être emmenée contre son gré en institution psychiatrique. Ces échanges seront la source d’inspiration pour l’écriture d’un livret d’opéra et le film accompagnera cette transformation des mots en chants… Image extraite de Before we go, de Jorge León Loredana Bianconi Biographie Critique de cinéma, coscénariste, réalisatrice à la RAI 3, Loredana Bianconi est née en 1954 à Haine Saint-Paul. Après une Licence en Art, Communication et Spectacle passée à l'Université de Bologne, elle réalise une trilogie qui a pour sujet l'immigration italienne en Belgique. Do you remember revolution, un portrait de trois femmes italiennes jadis emprisonnées pour leur lutte politique, a été sélectionné au festival Cinéma du réel. Loin de toute théorisation dogmatique, Loredana Bianconi est avant tout une cinéaste de l’échange et du lien, qui fait son travail d’investigation sur le terrain. Elle recueille le témoignage de ces personnes que l’Histoire a fait se déplacer, et les laisse enfin s’exprimer. Elle donne souvent la parole à ceux qui ont été si longtemps tenus à l’écart du reste du monde. Pour elle, le cinéma est une arme pacifique, mais son militantisme passe par le sensible. Elle filme toujours ses personnages avec pudeur et dignité. C’est une cinéaste de l’empathie, avec un véritable regard critique sur la société qui nous entoure et dans laquelle nous sommes bien forcés de nous battre. Dans son dernier travail La Résonance de nos hymnes, elle poursuit son travail d’investigation et va plus loin, elle questionne notre sentiment d’appartenance à la nation au travers de son plus fort symbole : l’hymne. Loredana Bianconi reçoit le Prix Scam du Documentaire radio pour La Résonance de nos hymnes Loredana Bianconi. D.R. À propos de… Loredana Bianconi, que représente ce Prix de la Scam dans votre parcours ? Tout d’abord, c’est une grande surprise ! Même si c’est la deuxième fois que je reçois un Prix de la société des auteurs (rire !) - En 1998, mon film Do you remember revolution a reçu le Prix Audiovisuel de la Scam. C’est certainement une reconnaissance de mes pairs, et cela fait toujours beaucoup de bien car je doute beaucoup de moi-même en général. Dans La Résonance de nos hymnes j’ai expérimenté le fait d’écrire à la première personne, de m’inscrire dans le projet, c’était une approche toute nouvelle ! Je suis plutôt timide, je n’aime pas le narcissisme, mais recevoir ce prix signifie que je dois poursuivre. C’est donc un énorme encouragement, qui me donne la force d’explorer davantage ce vers quoi je me suis engagée. D’autre part, un prix radiophonique ce n’est pas courant ! Il faut saluer la Scam qui distribue des Prix dans des domaines peu mis en valeur généralement. De par le passé, j’ai fait partie du Comité belge de la SACD, je sais ce que cela signifie. La création radiophonique est une forme trop peu exploitée, pourtant avec La Résonance de nos hymnes elle s’est imposée tout naturellement dès le début car elle permettait de pouvoir développer tout un imaginaire. Quel projet développez-vous actuellement ? Je travaille sur un projet de film documentaire. Le film s’appellera Outremer et racontera l'épopée de ces ex-soldats italiens à l’époque de la grande expansion colonialiste de Mussolini. Une histoire dans l’Histoire encore trop peu connue de nos jours. Ce film sera très personnel, car parmi ces colons qui partirent en Afrique, il y a deux de mes oncles ! Je dispose d’ailleurs de centaines de photos personnelles à ce sujet… Ils sont partis dans les colonies de « l'Empire Fasciste d'Afrique » - l’Erythrée et l’Ethiopie - dans les années 1930 et retournèrent en Italie dans les années 1940 à 1960. Leurs voix, leurs témoignages et des images d'archives, composeront le film, et j'irai moimême filmer en Afrique sur leurs traces… Isabelle Stengers Biographie Professeure à l'Université de Bruxelles, où elle enseigne la philosophie des sciences, Isabelle Stengers a une double formation scientifique et philosophique. Après des études de chimie, elle se dirige vers la philosophie mais gardera la science comme objet d’étude central. Ses travaux ont d’abord porté sur le problème de la physique confrontée au problème de l'irréversibilité, (La nouvelle alliance, avec I. Prigogine, 1979, et Entre le temps et l'éternité, 1988), puis sur la question des sciences modernes (L'Invention des sciences modernes, 1993, et Histoire de la chimie, 1993, écrit avec B. Bensaude-Vincent), mais aussi, en 2001, un scénario, La Guerre des sciences aura-t-elle lieu ?, qui relève de la scientifiction. Ses recherches ont également porté sur la diversité des sciences, sur leurs rapports conflictuels, sur leur rôle social, économique et politique. Une réflexion qui s'est élargie, avec la notion de pratique et d'écologie des pratiques, à l'ensemble des activités collectives productrices de savoirs. Son dernier essai Une autre science est possible ! publié en 2013 a été salué par le Comité belge de la Scam qui lui remet son premier Prix de l’Essai. Isabelle Stengers reçoit le Prix Scam de l’essai pour Une autre science est possible ! Isabelle Stengers. D.R. À propos de… Isabelle Stengers, que représente pour vous ce Prix de l’essai de la SCAM dont vous êtes la première lauréate ? Je suis très touchée que des auteurs, des créateurs, soucieux de l’importance de la création, aient choisi l’essai comme catégorie à mettre en valeur. L’essai est un registre qui n’est pas très clair, qui est souvent exclu de la catégorie du sérieux scientifique. La vocation de l’essai n’est pas de démontrer, il s’agit de tenter de « produire » quelque chose de manière transparente. Dans un essai, l’auteur, tout en mobilisant tout le savoir dont il est capable va chercher à transformer le problème auquel il se confronte mais aussi à transformer le lecteur à qui il s’adresse. J’aime beaucoup l’idée selon laquelle le mot « essai » serait lié avec l’ancien français « espermenter » dans lequel on trouve également la racine du mot « espoir ». Pour moi, les arguments d’un essai prennent la forme d’un appel à penser, dans une dynamique d’espoir. Le comité de la Scam a choisi de particulièrement mettre en lumière votre dernier ouvrage Une autre science est possible pour saluer votre engagement politique. Que représente cet ouvrage dans votre parcours ? C’est le seul livre dans lequel je m’adresse à ceux qui appartiennent, comme moi, à une institution académique. J’ai voulu dire ce qui ne va pas dans le devenir de cette institution, dans sa capacité de penser et de produire. Cette réflexion j’ai voulu la mener sur le mode de la résistance et non pas de la nostalgie. Traduire la nostalgie est une démarche facile. Ce que je cherche c’est justement de résister à la nostalgie en faisant le choix de tenter de transformer non seulement notre rapport au problème mais aussi notre rapport à l’extérieur, au public, et plus particulièrement au public non académique. Et c’est possible ! L’espoir, de nouveau ? Oui l’espoir. Mais pas l’espoir entendu souvent comme une vertu « somnifère » qui proclame que « ça finira par s’arranger ». Un espoir lucide qui dit le pire sur un mode où une issue est possible. Feuillet 116v de Galilée. D.R. Marie Hooghe Biographie Née en 1947, Marie Hooghe est licenciée-agrégée en philosophie et lettres (UCL). Lauréate du Prix Triennal d’État pour la Traduction (1989), du Prix de traduction Amédée-Pichot (2003), du Prix Auguste Michot (Allfb, 2011) et du Prix du Meilleur Livre étranger (2013). Elle a principalement traduit des auteurs flamands et hollandais, notamment Erwin Mortier, Anne Provoost, Lieve Joris, Bob van Laerhoven, Chris De Stoop, Kristien Hemmerechts, Diane Broeckhoven, Oscar van den Boogaard, Jef Geeraerts, Gerard Reve, Louis Paul Boon, Ivo Michiels, Monika Van Paemel, Hugo Claus, Tim Krabbé, Marcel Möring, Margriet de Moor, Adriaan Van Dis. Marie Hooghe reçoit le Prix Scam de la traduction littéraire Marie Hooghe. D.R. À propos de… Marie Hooghe est la lauréate du prix Scam 2014 pour ses traductions littéraires et plus particulièrement les ouvrages de Louis-Paul Boon, La Route de la chapelle Jef Geeraerts, Gangrène, Je ne suis qu’un nègre, Black Vénus, et Erwin Mortier, Sommeil des Dieux, Psaumes balbutiés. Livre d'heures de ma mère. Comment choisissez-vous les auteurs que vous traduisez ? Ce jour là, une éditrice française m’envoie un petit mail et un bouquin d’Erwin Mortier. J’étais en vacances, j’ai demandé à mon amie Martine Wijckaert de passer chercher le livre dans ma boîte et de me le ramener fissa pour que je le lise. C’était le premier, Marcel, chez Fayard. Il y a eu la trilogie de l’enfance, semi autobiographique, puis Sommeil des Dieux et les Psaumes balbutiés. C’est un auteur que j’adore. Je suis en train de traduire son dernier ouvrage, magnifique, qui a été présenté en mars à la Monnaie par Peter de Caluwe. Je viens de terminer de lui une pièce de théâtre, Passions humaines, qui va être créée en collaboration avec le Théâtre National en version bilingue et sur titrage alterné néerlandais - français. Tom Lanoye et Erwin Mortier sont les deux grandes pointures en Flandre. Alain van Crugten traduit Tom Lanoye et je traduis Erwin Mortier, en fonction de nos affinités. Cela me passionne d’avoir des affinités littéraires avec les auteurs que je traduis. J’ai traduit dix livres de Jef Geeraerts. Le premier, on me l’a proposé, j’ai accroché, j’ai rencontré l’auteur, nous nous sommes bien entendus, les éditions Fayard étaient enchantées. Il faut toujours prendre un treuil pour convaincre un éditeur de se lancer dans un auteur inconnu, mais aujourd’hui, si l’éditeur le lâche plusieurs autres sont aux aguets. De Jef Geeraerts j’ai traduit aussi bien des thrillers que d’autres ouvrages. Il y a eu Gangrène qui fut très controversé, interdit à sa sortie. Ses livres sont des plaidoyers virulents contre la colonisation, des diarrhées verbales, souvent plus de quatre pages sans point. C’est une blessure dont il arrache tout le pue pour éviter la gangrène. Aujourd’hui à la foire du livre d’Anvers il y a des files incroyables pour obtenir une dédicace. La traduction, c’est un compagnonnage de quatre, cinq ou six mois avec quelqu’un qu’on décrypte, qu’on déshabille, qu’on met à nu et dont on sent toutes les fibres. Les gens ne s’en rendent pas compte. Un jour quelqu’un ma demandé : « vous traduisez des livres, mais vous les lisez ? » Je l’ai regardée et j’ai répondu « mais non madame, je ne les lis pas, à quoi bon ? ». Léonie Bischoff Biographie Léonie Bischoff est née en 1981 à Genève. Enfant, elle passe beaucoup de temps à lire et dessiner, puis se destine à l'adolescence à passer une Maturité Artistique (équivalent des Humanités ). Elle vient vivre à Bruxelles pour suivre les cours de l'Institut St-Luc et est diplômée en section Bande dessinée en 2005. Après avoir vécu quelques année à Paris, où elle travaille comme libraire et commence à publier des histoire courtes dans des collectifs, elle revient à Bruxelles et fait partie des fondateurs de l'Atelier Mille (avec Flore Baltazar, Thomas Gilbert, Jérémie Royer, Nicolas Pitz et Hieu Nguyen), situé à St-Gilles. Bibliographie : Phantasmes, éd. Manolosanctis 2009 13m28, éd Manolosanctis 2010 Princesse Suplex, éd Manolosanctis 2010 Hoodoo Darlin’, éd Casterman 2013 La Princesse des Glaces, éd Casterman 2014 Léonie Bischoff reçoit le Prix Scam Texte & Image pour La Princesse des glaces Léonie Bischoff. D.R. Alain Dartevelle Membre du Comité belge de la Scam À propos de Léonie Bischoff Léonie Bischoff séduit et convainc d’emblée par sa capacité d’adaptation à des registres radicalement dissemblables, tout en y insufflant sa personnalité propre. Ainsi, dès son premier album, Voodoo darling, elle met à profit une incursion dans le monde des esprits pour démantibuler l’agencement des planches à l’image des visions submergeant la jeune Adèle, sans pourtant que la lisibilité en souffre. Mais à côté des débordements fantastiques, cette jeune créatrice n’est pas moins à l’aise avec les ambiances froides et distantes du polar à la scandinave qu’est La Princesse des glaces, où la caractérisation des protagonistes et les variations du découpage sont autant de sésames pour clarifier une enquête complexe, ponctuée de flash-backs et de diverticules amoureux. Avec, dans l’un et l’autre cas, une audace souveraine dans l’utilisation de couleurs, à la fois vives et profondes : des jaunes d’or exubérants et des violets intenses bien représentatifs du tempérament de Léonie Bischoff. À propos de… La Princesse des glaces, bande dessinée adaptée du roman de Camilla Läckberg est l’album pour lequel vous recevez le prix de la Scam textes et images pour vos illustrations. Léonie Bischoff, cet album paru chez Casterman représente-t-il quelque chose de particulier pour vous ? Oui c’est particulier, parce qu’à la base il y a les chiffres de ventes du roman qui sont impressionnants. Le fait d’avoir adapté un roman qui s’est énormément vendu m’apporte une autre visibilité, mon nom étant inconnu dans le milieu de l’édition. Les lecteurs qui achètent le font par un coup de cœur sur la couverture parce qu’il l’ont vu d’abord en librairie. Camilla Läckberg a des fans qui vont acheter tous ses romans, et qui même s’ils entendent parler d’un produit dérivé sont intéressés. Si je fais de bonnes ventes ça me permet de mieux négocier mes projets personnels, et de pouvoir un peu mieux en vivre. Pour moi ça tourne, mais ça tourne de justesse. C’est la première fois que je n’ai plus un job à côté. J’aimerais pouvoir faire les albums un peu moins vite. J’ai un an pour voir venir parce que j’ai signé pour une trilogie, mais d’habitude c’est un projet à la fois, on ne sait jamais ce qu’on fera après, et il faut compter plus ou moins un an par projet. J’aimerais pouvoir prendre un temps de maturation, en amont, pour préparer les albums et éviter quand j’arrive à la fin de trouver les premières pages moins réussies parce que je n’avais pas encore complètement compris comment bougeait tel personnage… Camilla Läckberg a un droit de regard dont elle se sert très peu. Je crois qu’elle est traduite en 18 langues, douze millions de copies dans le monde… c’est une star. Je l’ai croisée au festival du polar de Lyon. Elle a dit qu’elle avait trouvé le livre très beau et très suédois, mais je n’ai pas réussi à avoir une vraie rencontre avec elle. Il y a toujours cette sorte de mépris de la littérature pour la BD et dans les festivals de polars, c’est flagrant. Les auteurs de BD sont toujours mis de côté, avec les saucissons, parce que nous ne sommes pas de la littérature, alors que les auteurs de polars eux-mêmes ont longtemps été considérés comme un sous genre. C’est très curieux. Marie Wabbes Biographie Marie Wabbes a étudié l’illustration et la gravure à La Cambre. Elle collabore pendant quinze ans au journal Le Soir (1953-1968). Elle écrit et dessine dans le supplément jeunesse du quotidien et illustre des reportages. Pendant l´expo 58 elle réalise des reportages dessinés. Elle dessine des jouets et des tissus d´ameublement destinés aux enfants. En 1960, elle épouse l´architecte d´intérieur Jules Wabbes dont elle a quatre enfants qu´ils élèvent à la campagne dans une grande maison, entourés d´animaux. Elle illustre en 1965 Olivier le Page, premier d´une série de neuf titres retraçant la vie des enfants d´un autre temps. Les albums sont publiés en français à l´École des Loisirs à Paris. Elle illustre les histoires de La vache Caroline de Jean le Paillot, publiées à l´École des Loisirs à Paris. Elle voyage en Angleterre et aux États Unis où ses albums sont publiés. Elle collabore à diverses revues et dessine des affiches. En 1986, elle expose à la galerie Pierre Vanderborgt à Bruxelles quarante-deux portraits de vieux ours en peluche. D´autres expositions suivront à Paris, Londres et New York. Elle écrit et illustre des albums pour enfants publiés chez Flammarion, Gallimard jeunesse et La Martinière à Paris. Elle travaille en Grande Bretagne pour Walker Books et met sur pied des stages de formation au métier d´illustrateur pour des jeunes artistes africains. Elle fonde la section francophone de l´IBBY. En 2006, elle a reçu le premier Grand Prix de la Communauté française pour son apport à la littérature de jeunesse et l'ensemble de son œuvre. À la fin 2008, le nombre des albums pour enfants qu'elle a publiés s'élève à plus de 180. Marie Wabbes reçoit le Prix Scam Littérature / Illustration jeunesse Marie Wabbes. D.R. À propos de… J'ai toujours adoré les livres, enfant je lisais tout ce qui me tombait sous la main. Je voulais écrire des histoires, les raconter comme je racontais des histoires à mes petits frères et sœurs. J’avais aussi envie de dessiner, Babar puis Tintin, Quick et Flupke étaient mes héros. Nos parents nous emmenaient visiter les musées, j'aimais Goya par-dessus tout ! J'ai suivi les cours d'illustration à La Cambre, un monde de créativité s'ouvrait pour moi. Les ours en peluche sont entrés dans ma vie par accident ! Après la mort de mon mari, pour faire bouillir la marmite, je faisais des portraits d'enfants. Souvent, les enfants prenaient la pose avec un jouet, une poupée, un ours chéri. Les parents payaient le portrait de l'enfant et je leur donnais le portrait de l'ours. À mon grand amusement, les deux dessins étaient encadrés et mis à l'honneur. Ça m'a donné l'idée de faire une exposition de portraits de vieux ours en peluche. J'ai exposé à Bruxelles, Paris, Londres et New York avec toujours le même succès. J'ai eu beaucoup de plaisir à participer au choix des lauréats du Prix jeunesse de la Scam, mais jamais je n'ai pensé qu'il me serait un jour attribué ! Cela me donne une forme de reconnaissance alors que la profession est sinistrée, qui me rend très heureuse. J'ai toujours des projets et je pense que cette distinction m'aidera à les mener à bien. Jacques Dubois Biographie Jacques Dubois, aujourd’hui prof émérite, a été attaché sa vie durant à l’Université de Liège, où il enseignait les auteurs français modernes et la sociologie de la littérature. Il fut souvent invité à faire des cours dans des villes et universités étrangères et occupa une chaire Francqui à l’U.C.L. et à l’Université d’Anvers. Trois moments marquants de son parcours : sa participation aux travaux du groupe µ avec la publication de Rhétorique Générale, ouvrage majeur du groupe traduit en une douzaine de langues ; ses analyses de « critique amoureuse » dans Pour Albertine (Seuil), Stendhal, une sociologie romanesque (La Découverte), Figures du désir (Les Impressions Nouvelles) ; son édition avec B. Denis de romans de Simenon dans trois volumes de la Bibliothèque de la Pléiade (2003 et 2009). J. Dubois a dirigé la collection Points-Lettres aux éditions du Seuil : il a été président de la Commission de Sélection de films et de la Commission des Lettres de la Communauté Wallonie-Bruxelles ; il a dirigé la rédaction du journal La Wallonie de 1990 à 1993. Aujourd’hui, il collabore régulièrement au Bookclub du quotidien Mediapart (Paris) et préside l’Association Liégeoise pour la Promotion de l’Art Contemporain (ALPAC). Jacques Dubois reçoit le Prix Scam de consécration (essai) Jacques Dubois. D.R. Jean-Luc Outers Membre du Comité belge de la SCAM À propos de Jacques Dubois Parmi les essais publiés par Jacques Dubois, j’épinglerais : Le Roman policier ou la modernité (Armand Collin), Pour Albertine. Proust et le sens du social (Seuil ), Les Romanciers du réel (Points, Seuil), Stendhal. Une sociologie romanesque (La Découverte), Figures du désir. Pour une critique amoureuse (Impressions nouvelles). Il a édité avec Benoît Denis trois volumes de romans de Simenon dans La Pléiade. Proust, Stendhal, Zola, Balzac, Simenon… Il s’est attaqué à des monuments de la littérature française des 19ème et 20ème siècles. Jacques Dubois est un essayiste dont la langue n’a rien d’universitaire. On lit ses essais comme des romans tant son approche est singulière et, de livre en livre, il tente replacer la subjectivité du lecteur au centre du dispositif littéraire. Cette approche trouve son point culminant dans ce qu’il appelle la critique amoureuse : « le lecteur de romans que je suis est un rêveur chez lequel la fiction agit comme stimulant ou comme excitant… Lecteur actif mais aussi imaginatif, je découvre avec joie que le récit gagne à ne pas être réduit à sa lettre… Cette lecture active est lecture de désir, réplique elle-même du désir de création qui porte la fiction ». Au cœur de ce désir, il y a les personnages dont s’éprend le lecteur, et donc essentiellement des femmes (de jeunes femmes) : l’Albertine de Proust, la Valérie de Balzac, l’Augustine de Stendhal, l’Anna de Simenon et plus près de nous la Marie de Jean-Philippe Toussaint et même la Christine de Christine Angot (Jacques Dubois ne recule devant rien)… En ce sens, il fait œuvre d’essayiste, tout le contraire du compilateur ou du pédagogue. À propos de… Qui a influencé Jacques Dubois dans son parcours d’étude et puis d’écriture scientifique, jusqu’à la critique-fiction – des scientifiques sans doute, Bourdieu en premier ? Mais aussi des auteurs ? Deux grandes figures ont marqué mon parcours et influencé mon mode d’écriture : Roland Barthes dans les années 1960-1970 et Pierre Bourdieu dans les années 1980-1990. Je n’ai jamais approché le premier mais l’ai beaucoup lu. J’ai fréquenté régulièrement le second, le rencontrant à Paris et le recevant plusieurs fois à Liège. Bourdieu, qui avait par ailleurs beaucoup d’adversaires, était d’une grande générosité ; il m’a transmis une méthode de pensée et de travail. Du côté des écrivains, Proust est absolument mon auteur de référence et de prédilection. Il illumine mon travail et m’apprend à mieux écrire. J’ai aussi un faible pour les romans de Christine Angot. En tant que sociologue de la littérature, en tant qu’homme de l’écrit, en tant qu’auteur… quelle signification donnez-vous à ce prix – ou à ce prix-là, aujourd’hui ? Tout comme l’artiste, l’homme de science a besoin de la reconnaissance renouvelée de ce qu’il fait. Comme je suis un peu savant et un peu artiste (par l’écriture), j’apprécie cette reconnaissance quand elle vient et quelle que soit sa forme. Et pourtant l’expérience et la sociologie m’ont appris à relativiser la portée des honneurs. Si le prix que m’accorde la Scam aujourd’hui me plaît beaucoup, c’est qu’il m’est tombé du ciel : je ne m’attendais pas à le recevoir. J’aime aussi que ce prix me rapproche d’écrivains et de cinéastes, deux « espèces sociales » dont je me sens proche. Sur quel(s) projet(s) travaillez-vous aujourd’hui (et demain ?) Je viens de commencer un nouveau livre et il sera — encore ! — inspiré de Proust et de sa Recherche du temps perdu. Je le voudrais comme une réécriture joyeuse du roman proustien mais en 200 pages non en 3000. Adresses et contacts Maison des Auteurs Rue du Prince Royal 87 1050 Bruxelles T +32 (0)2 551 03 42 F +32 (0)2 551 03 71 www.maisondesauteurs.be Anne Vanweddingen et Célyne van Corven, Service d’Action culturelle : [email protected] Retrouvez aussi nos différents profils sur Facebook et Twitter ! Frédéric Young commente l’actualité légale et politique du droit d’auteur. Anne et Célyne (SacdScam) relaient les activités de l’Action culturelle, qu’elles vous font suivre en direct quand c’est possible. Elles annoncent les prix décernés par la SACD et la Scam et postent l’actualité des bourses et des boursiers. Marie-Lorraine Weiss - @MarieloWEISS partage l’actualité du Service des auteurs. Elle met également en ligne les appels à projets que nous transmettent nos partenaires, relaie les nouvelles adhésions à la SACD et à la Scam et signale les prix reçus par nos auteurs « hors les murs » PILEn - @PILEnum compile l’actualité de l’édition numérique, de son marché, de ses tendances. Ils étaient précurseurs, Maud-et Thomas de BELA - @Bela_portail, toujours en ligne !