Nécessaire Europe
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Nécessaire Europe
©Iren Stehli Nécessaire Europe … Espace François Mitterrand Ville de Guingamp Du 7 Mai au 3 juin 2009 Exposition organisée en partenariat avec l’Association GwinZegal et le service culturel de la ville de Guingamp. Commissaires de l’exposition : Paul Cottin, Jérôme Sother La ville de Guingamp souhaite chaque année, au mois de mai, fêter l’Europe par un évènement culturel. Cette année elle s’est associée à GwinZegal afin de proposer au public une exposition photographique sur le thème de l’Europe. L’Europe reste pour ses concitoyens une construction abstraite, qui n’existe le plus souvent qu’à la lecture des panneaux indiquant le financement par des fonds européens de telle route ou chantier. L’Europe ne se pense que rarement à travers un imaginaire commun, et pourtant les « communautés politiques » ont besoin pour se construire d’une volonté partagée de penser et concevoir l’espace dans lequel elles se déploient. Confronter dans un même lieu, celui de l’exposition, les œuvres d’artistes suisses, tchèques et français nous permet d’élargir notre vision de l’Europe. Depuis la chute du mur de Berlin, l’Europe ne se construit plus avec les mêmes références que celles des pères fondateurs. L’effondrement de l’ex-empire soviétique a signifié la fin d’une longue période, celle d’un continent marqué par deux guerres mondiales et la coupure géographique, politique et culturelle de son territoire. L’Europe ne peut ignorer son passé mais dans le même temps elle doit se projeter dans un monde où la globalisation bouleverse profondément tous nos repères. La circulation des imaginaires, notamment ceux des artistes, participe à faire émerger par l’ensemble des citoyens d’Europe ce sentiment d’appartenance à un espace, certes complexe et multiple, mais partageant un devenir. Commissariat d’exposition : Paul Cottin, Jérôme Sother www.gwinzegal.com L’exposition bénéficie du soutien du Conseil Général des Côtes d’Armor dans le cadre de l’opération «D’Europe et d’Armor» et de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la culture. GwinZegal bénéficie du soutien de la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Bretagne, la Région Bretagne, le Conseil Général des Côtes d¹Armor, le Pays de Guingamp, la Communauté de Communes de Lanvollon Plouha et la commune de Plouha. Liza Nguyen artiste française, a suivi les cours de la prestigieuse classe de Thomas Ruff à l’Ecole d’Art de Düsseldorf. Ses travaux, en marge de la photographie documentaire classique, ont pour dénominateur commun un intérêt marqué pour des sujets culturels et sociaux de l’histoire contemporaine.La forme, plus proche de l’installation que de l’exposition photographique, la situe dans le champ de l’art contemporain. Sa série Le Manteau Inconnu est constituée de diptyques dans lesquels elle a proposé à des citoyens allemands et français de revêtir un manteau, bleu horizon ou gris-vert, uniformes respectifs des soldats de la première guerre mondiale provenant de musées français et allemands. L’identité des soldats qui les ont porté est inconnue. Les « modèles » photographiés sont en âge d’être « mobilisables » pour une guerre. Cette juxtaposition des deux côtés du Rhin met en évidence la proximité de ces hommes et de ces femmes, proximité renforcée par la similitude des poses et de l’environnement dans lequel ils se meuvent, rend encore plus criante l’absurdité de toute guerre. Les décors urbains qui servent de fond aux portraits et les poses des « modèles » tranchent avec l’imagerie connue de la guerre 14-18. Cet « anachronisme » est une manière de poser la question de la transmission de l’histoire et de la place de la mémoire dans nos sociétés contemporaines. Werner Bischof est né en 1916 à Zurich. Après des études d’art, il exerce le métier de photographe publicitaire. En 1939 la neutralité de son pays lui évite d’être directement impliqué dans la seconde guerre mondiale. Suite à une commande du magazine suisse Du et la publication en 1946 du reportage sur les villes européennes détruites par le conflit, il va connaître la reconnaissance internationale. Pour ce reportage il a sillonné l’Europe et enregistré le constat terrible des villes dévastées et de la population qui tente de revivre au milieu des ruines. D’immeubles, dont on peut deviner la grandeur passée, seules les façades subsistent. Les bombardements alliés ont métamorphosé les grandes villes d’Allemagne en de vastes décors « de carton-pâte ». Primo Levi, né en 1919 à Turin, est un rescapé des camps de concentration. A son retour il ressent l’impérieuse nécessité de transmettre et expliquer à travers les livres l’univers concentrationnaire du camp d’Auschwitz. Si c’est un homme est un témoignage d’une intensité qui aura marqué la littérature du vingtième siècle. Iren Stehli de nationalité tchèque et suisse a vécu alternativement dans les deux pays. Après des études à la FAMU, la célèbre école de cinéma et de photographie de Prague, elle entreprend dans les années 70 un travail photographique constitué de séries sur la société tchèque qu’elle développe sur le long terme. Dans sa série, Les vitrines de Prague, 1978-1996, Irène Stehli scrute à travers des prises de vues frontales des vitrines de Prague l’évolution politique, culturelle de la société communiste de la Tchéchoslovaquie de l’époque. On peut y lire un portrait en creux de ce pays sur ces deux décennies, et y déceler les moindres évolutions : le va-et-vient des hommes d’état, le goût pour l’absurde typiquement tchèque, la chute du régime communiste, la privatisation des magasins dans les années 90. La misère et la « poésie » souvent involontaire des installations des vitrines des années 70, absurdes ou empruntes d’humour noir, s’amenuisent progressivement pour faire place à un style aguicheur, presque agressif, stéréotype du capitalisme nouveau qui s’empare du pays. Stéphane Duroy travaille dans un premier temps comme photographe d’agence de presse. Très rapidement il s’interroge sur le sens d’un travail qui ne traite que de l’actualité immédiate. Il s’oriente progressivement vers une photographie qui prend en compte d’autres aspect des sociétés et notamment leur histoire sur le plus long terme. Cette évolution prend corps dans sa série sur les mineurs gallois avant l’arrivée au pouvoir de Margaret Thatcher. Il travaillera par la suite pendant de longues années sur l’ex République Démocratique Allemande, sur Berlin et sur les deux conflits mondiaux qui ont marqué dans « sa chair » l’Europe. Le livre est aujourd’hui l’espace privilégié de son travail. « l’Europe du Silence » reste pour de nombreux photographes un livre important. L’image présentée dans cette exposition la chute du mur de Berlin est extraite de cet ouvrage. Dans IKEA, Katerina Drzkova place ses modèles dans les cuisines, salles de bain et chambres qui jalonnent le parcours obligé de tout client qui fréquente les célèbres magasins de meubles. Ces intérieurs, qui se répètent dans le monde entier, sont là pour donner au client potentiel le sentiment que cet univers si «bien agencé» est déjà une vision du possible de ce qu’il peut espérer reproduire chez lui. La frontière entre l’univers factice du magasin et la réalité des aménagements de nos maisons et appartements ne tient plus à grand chose. Dans l’univers de Katerina Drzkova, l’illusion est presque parfaite, si ce n’est la présence des étiquettes de prix et quelques détails incongrus. Ces «clones» de cuisines, de salons, de chambres à coucher reproduits à des milliers d’exemplaires chez des particuliers, posent la question de notre rapport à nos lieux de vie, à notre capacité à les « habiter » et de la place encore disponible pour nos imaginaires. Ce travail est une sorte de conte sur la mondialisation en cours dans nos manières de consommer. Le naufrage, la deuxième installation de Liza Nguyen présentée dans l’exposition traite du drame de l’immigration qui se joue aux portes de l’Europe, ici dans le Sud de l’Espagne sur les plages de Tenerife. Étrange décor où se côtoient involontairement le flot des touristes et les immigrants clandestins venus de l’Afrique voisine à la recherche d’un improbable Eldorado. Les portraits des adolescents en côte de travail rouge, verte, bleue pourraient de prime abord donner le sentiment de photographies de prisonniers. Ce sont en réalité des apprentis : rouge pour les maçons, vert pour les plombiers, bleu pour les électriciens. Les autorités locales, ne pouvant les renvoyer chez eux - ils sont mineurs - leurs imposent une formation professionnelle. On les a rangés dans des cases, identifiés par un code couleur, mais à y regarder de plus près, à regarder ce qui dépasse de l’uniforme on découvre dans leur posture, leur regard, la tenue des épaules, les mains, de vrais portraits d’individus, tous différents, tous avec un destin et des envies bien à eux, une identité, quelque chose d’indicible qu’on ne peut recouvrir de bleu ou de rouge. La deuxième partie de l’installation est constituée de photographies d’objets glanés sur les plages ou confisqués par la police dès l’arrivée des migrants et des objets relatifs au traitement qu’ils doivent subir à leur arrivée : menottes, effets personnels retirés puis détruits. Liza Nguyen récupère la plupart des objets dans les poubelles du centre de rétention des mineurs. Le caisson lumineux n’est pas sans rappeler l’esthétique publicitaire de ces zones de transit entre les duty free et les douanes, une zone floue entre partance et arrivée. Au final elle nous interroge sur notre responsabilité dans ce drame qui se joue sur le territoire de l’Europe. L’exposition bénéficie du soutien du Conseil Général des Côtes d’Armor dans le cadre de l’opération «D’Europe et d’Armor» et de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la culture. GwinZegal bénéficie du soutien de la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Bretagne, la Région Bretagne, le Conseil Général des Côtes d¹Armor, le Pays de Guingamp, la Communauté de Communes de Lanvollon Plouha et la commune de Plouha. www.gwinzegal.com