Familles d`accueil de PA-PH - Nièvre 2009

Transcription

Familles d`accueil de PA-PH - Nièvre 2009
Accueillir des personnes âgées et/ou handicapées à domicile
Une alternative au quotidien
JOURNAL DE FORMATION
DES ACCUEILLANTS FAMILIAUX
DE LA NIEVRE
octobre 2008 – juin 2009
Témoignages et réflexions
pour l’accueil social familial
Cahier n°2
Une réalisation de la Fédération Nationale des CIVAM
soutenue par la Fondation de France.
FNCIVAM Témoignages et réflexions pour l’accueil familial social de personnes âgées et d’adultes
handicapes en milieu rural
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Sommaire
INTRODUCTION ..................................................................................................... 3
Entre le « tout domicile » et le « tout institution », la famille d’accueil comme espace
d’humanisation ...........................................................................................................6
Les familles d’accueil, humaines jusqu’à la mort ............................................................6
1ère PARTIE LES FORMES DE L'ACCUEIL FAMILIAL NIVERNAIS ........................... 7
1. Être famille d’accueil: modes d‘entrée et attentes ......................................................9
1.1 Les raisons qui ont conduit à l’accueil familial ...................................................9
1.2 Ce que les familles apportent aux personnes accueillies...................................11
1.3 Ce que peuvent exprimer des personnes accueillies.........................................12
2. Un état des lieux de l’accueil familial.......................................................................14
2.1 Relations avec les familles des personnes accueillies et l’environnement social ..14
2.2 Richesses et limites du métier d’accueillant familial .........................................15
2ème PARTIE LA FAMILLE D’ACCUEIL A L’EPREUVE D’UN METIER...................... 17
3. Des conditions difficiles d’exercice de l’accueil familial ..............................................19
3.1 Isolement et situations préoccupantes ...........................................................19
3.2 Une chaîne de responsabilités .......................................................................22
4. Vers un bien-être des accueillis et des accueillants...................................................23
4.1 Du côté des accueillis ...................................................................................24
4.2 Du côté des accueillants : les attentes de la famille .........................................26
3ème PARTIE LA FAMILLE D’ACCUEIL : UN TRANSFORMATEUR SOCIAL ............. 29
5. Une éthique permanente du prendre soin ...............................................................31
5.1 Poser la question des limites d’un accueil familial ............................................31
5.2 La notion de risque revisitée..........................................................................32
5.3 La relation au corps et à l’altérité au quotidien................................................34
6. Une professionnalisation en marche........................................................................37
6.1 Un exercice projectif en relation avec la personne accueillie .............................37
6.2 Des éléments d’évaluation de la formation......................................................38
6.3 Eléments de conclusion de l‘équipe éducative .................................................40
CONCLUSION........................................................................................................ 42
Tous nos remerciements vont
A l’ensemble des participants des journées de formation de la Nièvre,
à Clamecy
à Champvert
à Nevers
Aux responsables du service ‘Fonction d’appui Gérontologie, Dépendance, Handicap et
Inclusion’ du Conseil Général de la Nièvre,
Mme Duchemin
Mme Sanchez
Aux sociologues qui ont co-construit et animé le programme de formation, et ont largement
contribué au document présent,
Jean-Marc Vanhoutte
Jean-Paul Ziegler
Aux administrateurs de la FNCIVAM, qui ont permis et accompagné ce projet,
Aux partenaires techniques et financiers sans lesquels ce projet n’aurait pu aboutir
Fondation de France
CCMSA
Cette formation a été réalisée sous la direction de Lisette Teulières et Sylvie Robert
(FNCIVAM)
et
le journal de formation a été rédigé par Jean-Marc Vanhoutte.
Février 2011
FNCIVAM Témoignages et réflexions pour l’accueil familial social de personnes âgées et d’adultes
handicapes en milieu rural
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PREFACE
La Fédération Nationale des CIVAM, suite aux efforts entrepris au sein du mouvement
pour développer l’accueil social, accompagne des familles rurales, et notamment agricoles,
qui souhaitent mettre en place ces activités et en vivre. La tradition d’accueil du milieu rural
est ancienne, mais elle connaît aujourd’hui un renouveau : de nombreuses collectivités,
institutions, mais aussi des familles, recherchent des solutions de placement afin de faire
face à la pénurie de places ou encore pour offrir des solutions plus adaptées à leurs publics,
à leurs proches.
De notre côté, nous sommes convaincus que la vie quotidienne dans une famille,
notamment rurale, offre à tout moment des possibilités multiples de contacts, d’échanges,
d’apprentissages humains et/ou techniques aux personnes accueillies. C’est donc pour elles
l’occasion de s’épanouir dans un contexte qu’elles n’auraient pas eu l’occasion de découvrir
ou de renouer avec un milieu qu’elles ont pu connaître dans le passé.
Depuis plusieurs années, nous avons voulu proposer des aides méthodologiques pour
faciliter la mise en place de solutions privilégiant le sur-mesure, dans un cadre familial où
l’écoute, l’échange, la convivialité peuvent être d’un grand secours.
Nos travaux, et le document présent, combinent l’expérience acquise par le réseau
CIVAM en la matière avec l’appui d’une équipe de sociologues, de professionnels et/ou de
formateurs du secteur médico-social. Notre finalité commune est d’accompagner les familles
d’accueil dans leur projet, de leur donner l’opportunité d’échanger et d’enrichir leurs
expériences.
Apres avoir conçu un guide déontologique à usage des familles et des réseaux
d’accompagnement, nous avons organisé une formation pilote auprès des accueillants
familiaux agréés par le Conseil Général de la Nièvre. Soulignons ici que tous les participants
n’étaient pas nécessairement des ruraux, contrairement à la plupart des publics concernés
par les actions du réseau CIVAM, et que les données partagées ici sont adressées à tous les
accueillants sans exception. Cette formation a eu pour objectifs de :
❑ Connaître les publics accueillis, leurs spécificités et leurs attentes
❑ Faciliter l’inter connaissance entre les partenaires : rôles et place des accueillants,
rôles et places des structures d’accompagnement
❑ Permettre l’échange de pratiques entre les accueillants, exprimer le vécu, les
difficultés, les joies, afin de rompre l’isolement auquel sont confrontés les accueillants
❑ Partager des outils, renforcer les compétences de base, afin de faciliter l’accueil et les
relations au quotidien avec l’accueilli(e)
Le résultat de ces journées, riches d’écoute, de sincérité, de questionnements, nous a
amenés à concevoir ce document en direction de toux ceux que l’accueil familial de
personnes âgées et/ou handicapées interpelle.
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INTRODUCTION
Entre le « tout domicile » et le « tout institution », la famille
d’accueil comme espace d’humanisation
Les familles n’abandonnent pas leurs aînés ; mais si les moyens venaient à manquer, comment
s’occuperait-on des parents âgés ? Les familles d’accueil proviennent d’une génération où il y
avait encore beaucoup d’enfants. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, et la taille des familles sera
encore davantage réduite dans vingt ou trente ans. La période actuelle est une transition entre
un afflux de personnes âgées et une diminution des actifs. Ce qui complique l’avenir, est d’une
part le manque de travail, et d’autre part un allongement jusqu’à 70 ans du temps d’activité.
Le domicile n’est pas nécessairement le mieux pour la personne âgée ; elle peut se retrouver
bien souvent abandonnée à elle-même, hors des temps de toilette et de repas. En famille
d’accueil, la vie est présente et le travail de l’accueillant est d’accompagner l’accueilli dans sa vie
quotidienne, du bonjour au bonsoir. C’est dans ce contact physique que va passer la
réassurance. L’accueillant n’est pas payé pour ce qu’il donne, mais pour l’intérêt public de cet
acte de solidarité. La famille d’accueil constitue un point humanisé de la société.
Les familles d’accueil, humaines jusqu’à la mort
L’accueillant accompagne la personne de la vie à la mort. Entre les deux, il y a la vie. La
mort est souvent évoquée par les accueillants ; l’une a vécu le décès d’une personne
accueillie chez elle : « j’ai été surprise. Cela m’a fait du bien d’aller à l’enterrement, de parler
avec la famille. C’est important d’accompagner les funérailles, ne serait-ce que pour les
autres pensionnaires qui voient qu’ils ne seront pas jetés comme un vieux linge. » La
question de la fin de vie qui est une grande peur n’y est pas évacuée. Beaucoup de
personnes âgées craignent de mourir à l’hôpital, voire en maison de retraite qui pourtant
n‘est pas un passage obligé de fin de vie. Quand les personnes sentent qu’il n’y a plus de
plaisir possible, se rapprochent-elles de la mort ? Qu’un médecin demande à une personne
mourante de faire attention à son diabète, est un non sens ; il s’agirait plutôt de trouver les
moyens pour que celle-ci puisse accéder à de menus plaisirs. Une vraie morale sociale est à
mettre en place pour partir tranquillement, sans souffrance. Dans cette situation de fin de
vie, la famille d’accueil est une chance pour les personnes accueillies.
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1ère PARTIE
LES FORMES DE L’ACCUEIL
FAMILIAL NIVERNAIS
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handicapes en milieu rural
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1. Être famille d’accueil: modes d‘entrée et attentes
1.1 Les raisons qui ont conduit à l’accueil familial
Si les âges, les structures familiales et les situations professionnelles sont très diversifiés, les
raisons sont également multiples avec des ressorts variés. De nombreuses pistes sont
ouvertes et les principales sont la vie de la famille, son histoire, les relations de travail.
1.11 D'abord la famille
Dans le registre familial, la relation avec ses propres parents a pu être motrice pour effectuer
ce choix :
• En gardant un père atteint de la maladie d’Alzheimer pendant un an et demi, une
accueillante a décidé de devenir famille d’accueil au décès de son parent. Cela lui
permettait de rester chez elle et d’être avec ses enfants.
• Cette autre accueillante après avoir accompagné sa mère, a fait ce choix: le
placement de sa mère en établissement ne lui a pas semblé souhaitable. N’ayant pas
eu d’enfant, être famille d’accueil et partager un peu de chaleur avec les personnes
âgées, lui a semblé une perspective de travail bénéfique.
• Telle autre qui a gardé ses parents jusqu’à leur fin, a connu cette activité par une
amie.
• Cette accueillante qui a gardé pendant trois ans son père, a voulu devenir
accueillante familiale après le décès de celui-ci à 84 ans : « c’est un travail d’amour et
de dialogue. »
•
Une autre a fait ce choix après un malheur familial afin de combler le vide laissé; elle
ressent ce travail comme empli d’humanité.
Devenir accueillant familial peut être également la relève d’un travail déjà exercé par les
parents. Seules les familles des maris ont été concernées.
• Ainsi cet accueillant a poursuivi le travail de sa grand-mère, famille d’accueil pendant
trente ans.
• Cet autre accueille depuis deux ans une personne handicapée qui était auparavant
chez ses parents. Il a repris la suite de sa mère.
• Cette épouse a pris la relève de ses beaux-parents, après leur décès et accueille une
personne handicapée.
• Un accueillant jeune retraité a suivi la voie tracée par son ex épouse.
La recherche d’une activité qui donne la possibilité de rester à la maison avec ses enfants,
constitue une motivation importante.
• Ainsi cette nouvelle accueillante qui n’avait plus de nourrice pour s’occuper de ses
enfants, et qui était trop éloignée de son lieu de travail, a fait le choix de ce type de
travail à domicile.
• Cette autre accueillante qui a sa sœur handicapée partait travailler du matin au soir
et voulait rester au domicile pour être avec ses enfants.
• Une accueillante pensait arrêter son activité pour pouvoir rester à la maison ; sa fille
faisant des études, elle a recherché un complément de ressources en étant famille
d’accueil.
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1.12 Puis l'emploi
Le registre professionnel est également très présent puisque nombre d’accueillants
exerçaient ou étaient à la recherche d’une activité suite à un changement de région, ou de
statut.
• Ainsi, cette accueillante a tenu un hôtel-restaurant qui a été vendu. Elle s’est
retrouvée à plus de 55 ans sans perspective, en semi retraite.
• Telle autre travaillait en usine. L’accueil des deux premières personnes a été difficile
pour elle. Avec une seule personne aujourd’hui, cela se passe bien.
• Une autre accueillante arrivait de la région parisienne et était sans travail. Elle
accueille deux personnes handicapées atteintes de troubles mentaux.
• Une accueillante était représentante. Elle a commencé en ignorant tout de la famille
d’accueil : « j’ai répondu à une petite annonce d‘un hôpital de la région parisienne;
on m’a contacté et ils ont visité mon appartement. Une dame paraplégique est
venue ; elle faisait ses besoins partout. J’ai été dans le bain tout de suite. Elle était
gentille, cela ne m’a pas découragé. »
D'autres ont fait ce choix professionnel en fonction de la sollicitation de proches ou de leur
environnement.
• Cette accueillante a commencé par rendre service à des amis qui ne voulaient pas
placer leur mère en maison de retraite ; restée chez elle, cela l'a décidée à être
accueillante, activité qu'elle exerce depuis une quinzaine d’années.
• La belle-sœur et le frère de cette autre accueillante l’ont motivée à faire ce choix :
« je ne pouvais plus travailler à l’extérieur où je faisais des ménages. L’accueil familial
de personnes âgées me plaît. »
• Enfin, cet entrepreneur accueille avec son épouse deux personnes handicapées de 60
ans qui exercent dans l'établissement qu'il a repris: « l’entreprise m‘a amené à être
famille d’accueil. »
1.13 Une nouvelle conception professionnelle du soin
Quelques accueillants ont exercé comme soignant dans le milieu médico-social. Ils ont fait le
choix de l’accueil social familial.
• Ainsi, cette accueillante a travaillé auparavant dans une Unité de Soins de Longue
Durée où elle a pu connaître et apprécier les personnes âgées.
• Telle autre a exercé pendant seize ans dans un établissement spécialisé dans l’accueil
de personnes trisomiques. Elle a obtenu son diplôme d’Aide médico-pédagogique.
• Trois autres accueillantes travaillaient auparavant dans un centre pour personnes
handicapées ; l’une a décidé de rester à la maison en recevant des enfants, alors que
l’autre accueille deux personnes handicapées.
Cela concerne également des couples :
• Un aide soignant n’a plus envie de travailler en structure d’hébergement pour
personnes âgées : « les conditions de travail sont pires qu’à l’usine, on n’a aucun
rapport avec la personne âgée, on passe trois minutes par toilette. » Il est devenu
avec son épouse accueillant familial.
• L’épouse de cet accueillant est auxiliaire de vie depuis vingt ans. Il accueille une
personne de 65 ans.
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Des personnes ayant soit effectué des études d’infirmières, soit attirées par ces professions,
sont devenus accueillants familiaux.
• Ainsi, cette accueillante qui aurait voulu être infirmière psychiatrique, retrouve depuis
maintenant une quinzaine d’années son choix initial, avec la réception à domicile de
personnes handicapées.
• Cette autre accueillante nouvellement agréée, accueille un jeune avec une situation
psychotique lourde : « je ne m’identifie pas à un monde professionnel qui ne
s’adresserait pas à un être humain dans cette situation avec générosité. »
1.2 Ce que les familles apportent aux personnes accueillies
Les mots des accueillants familiaux ont été privilégiés : un photo-langage a permis de
connaître leurs représentations tout en bâtissant une confiance nécessaire pour aller plus
loin.
1.21 Rompre une solitude par le partage d’une vie familiale
Tout se partage dans la famille, le bien comme le mal. L’arrivée des personnes accueillies est
un moment important: « quand elles arrivent, elles ne savent pas comment cela va se
passer ; c’est angoissant pour elles.» Que ces personnes puissent trouver la paix dans cet
accueil semble essentiel.
Un accueillant évoque l’isolement de la personne accueillie avant son arrivée: « elle était à
l’hôpital, avait un caractère aigri. Elle a choisi d’être en famille d’accueil et a trouvé un lieu
où elle se sent bien. Elle a conscience qu’on veut son bien. »
Une autre accueillante évoque son jeune accueilli autiste : « j’étais partie pour chercher une
gamine blonde aux yeux bleus, j’ai trouvé un gamin sous une table derrière une couverture
qui me regardait avec un regard vide et qui me perçait. » Aujourd’hui, la situation a changé :
« il n’a plus ses couvertures, son regard est heureux. »
La famille d’accueil permet la quiétude, le calme et la sérénité. S’il y a des larmes, du stress
et de l’angoisse dans l’appréhension de cet accueil, l‘amour permet de les partager. La
présence de générations multiples aide à concevoir l’accueil de personnes âgées sous le
mode de l’ouverture. La personne accueillie n’est pas écartée des tâches et des
préoccupations de la maison: « les personnes accueillies ont leur vécu et elles n’aiment pas
trop parler du passé qui peut être douloureux. » Si elles gardent un morceau de douleur,
elles sont à l’aise dans la famille et disponibles aux sollicitations : « on peut arriver à faire
bouger un visage, à les faire sortir et participer. On partage tout, tout en ayant notre vie. »
De l’importance est accordée au temps du repas qui est un moment privilégié, pour le
dialogue, l’échange et établir une certaine confiance. Le repas symbolise une maison
conviviale où la personne accueillie fait partie d‘une grande famille.
La recherche d’une vie familiale fait partie de l’échange entre accueillants et accueillis. Pour
un accueillant qui n’a pas eu de parents, avoir des parents est un bonheur. Cette autre
accueillante qui n’a pas eu d’enfant à qui donner de l’amour, de la compréhension et de
l’écoute, tente toujours d’apporter le meilleur d’elle-même dans la relation. Pour cet
accueillant catholique, aider les autres est le lien naturel qui l’a amené à être famille
d’accueil. Mais il peut aussi se faire dépasser par cet esprit d’entraide : lorsque le lien s’est
distendu avec la personne accueillie, l’accueil peut alors devenir difficile.
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1.22 S’apprivoiser mutuellement
L’accueil de l’autre, personne âgée ou handicapée, est évoqué par la douceur d’une main
tendue. Une femme accueillie est arrivée enfermée et triste : « on parle avec elle, il faut la
prendre doucement ; elle ne doit pas avoir peur, elle va rester avec nous. Elle est bien avec
mes deux enfants et je suis contente pour elle.» Une personne handicapée peut être très
coquette et la famille d’accueil fait en sorte que l’accueillie reste coquette pour qu’elle se
sente bien. Toutes les relations ne passent pas par la seule communication verbale : ainsi,
une personne accueillie qui ne parle pas, aime les animaux et s’en occupe : « cela lui donne
de l’importance et elle aime se rendre utile. Cela lui permet de se trouver comme adulte,
malgré son handicap mental. »
Cette relation d’accueil est source de bonheur : « les trois pensionnaires que j’accueille sont
la vie. Il y a de la bonne humeur, c’est un rayon de soleil dans la maison quand ils se lèvent
le matin. » La passion vécue dans le métier, reste tout aussi présente dans l’accueil pour cet
artisan : « c’est pareil avec la personne qu’on accueille; le fait de vivre avec passion crée un
élan qui l‘entraîne dans le sillage. »
1.23 Un quotidien et un parcours de vie ensemble
Le partage du temps de vie peut prendre diverses formes : il peut se cristalliser sur la
nourriture : « les personnes accueillies mangent énormément, on n’arrive pas à les remplir, il
n’y a pas de limite, pas d’arrêt. On passe les ¾ de notre temps en cuisine. » Comme il peut
donner lieu à un ménagement des composantes de la maisonnée : « dans notre vie de
famille, on est huit en permanence. On partage beaucoup de choses avec les deux
personnes accueillies. Pour chaque personne, il faut un juste milieu et des occupations pour
que cela soit au mieux pour tout le monde. »
Le besoin de liberté, d’évasion, se partage aussi avec l’accueilli ; le besoin de recul est
cependant nécessaire à ce travail qui peut parfois prendre des formes difficiles. C‘est un
chemin au long cours parcouru à deux : « quand on est dans la panade, il faut avoir
beaucoup de force et de courage pour soulever une personne très lourde à porter ;
heureusement que j’ai en face une amie que je tiens à garder le plus longtemps. »
Mais toute relation humaine a une fin. Cette crainte peut être ressentie par l’accueilli : « il a
peur quand il reçoit un courrier : lui annoncerait-on qu’il doit partir de chez moi ? ». Cette
autre accueillante se sent concernée par la mort, et appréhende le jour où cela arrivera en
ce qui concerne la personne qu’elle accueille.
1.3 Ce que peuvent exprimer des personnes accueillies
Par leur vécu avec les personnes qu’elles accueillent, les familles ont pu, en essayant de se
placer de leur côté, parler de leur ressenti.
1.31 Une expression toujours fragile à appréhender
Les valeurs importantes que dispense la famille restent l’amour et le bonheur déjà évoquées.
Ces expressions sont rarement acquises et peuvent prendre les formes les plus inattendues.
En voyant sur une photo un visage qui pleure, cette accueillante sait que son jeune accueilli
est content quand il se manifeste ainsi : « le jour où j’ai vu ce visage ainsi, après avoir
mangé de la purée, des grimaces de douleur son apparues. Ce n‘était pas de la douleur, il
était rassasié et exprimait son plaisir. » Cela a été un bonheur pour l’accueillante face à cet
enfant qui ne parle pas et qui exprime ce qui lui arrive de dedans : « pour accepter ce
dedans, il fallait que je joue pour qu’il mange. »
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L’homme âgé accueilli par cette autre famille, a vécu en campagne où il est resté vingt ans
seul chez lui : « il ne dira jamais qu’une relation lui a fait plaisir et du bien, même s’il le sait
au fond de lui. » Comment entrer en relation avec l’autre, l’apprivoiser quand on ignore tout
de sa vie et que débute un nouveau parcours ? La personne accueillie est seule et peut être
sur ses gardes : « comment essayer d’ouvrir cette personne ? Comment casser ce mur ? On
lit l’angoisse de la femme face à la famille d’accueil et elle se demande qu’est-ce qu’on va lui
faire ici ? »
Toutes les personnes accueillies ont des registres différents de sensibilité et d’expression. Le
plaisir de telle personne accueillie est de sortir : « connu comme le « loup blanc » dans
toutes les fermes, il est de toutes les fêtes et de toutes les noces. » Telle autre est
davantage sensible à la dimension artistique. Si la maison de l’accueillant est devenue aussi
la leur, « qu’il faut être prêt à ouvrir cette porte pour accueillir », il s’agit aussi de respecter
le train de vie des personnes accueillies et aussi de s’interroger sur cette alternative à la
maison de retraite où celles-ci ont la possibilité de pouvoir être vues autrement que comme
personnes âgées, dépendantes ou handicapées. Un accueillant tout en évoquant la difficulté
pour un pensionnaire de donner son avis, constate que : « même s’il y a des différences
entre nous, ils se sentent bien dans notre famille. »
1.32 De la disponibilité et de la relation
La personne accueillie a besoin d’affection et de tendresse pour vivre. Le parallèle avec les
enfants est manifeste: « les accueillis ont besoin qu’on s’occupe d’eux. Ils font des choses
avec moi, on fait ensemble et cela permet de faire des exercices avec les mains. On offre ce
qu’on réalise aux voisins, à l‘école. » Ces relations constituent une richesse : « on leur a fait
découvrir une autre vie qu’elles ne connaissaient pas ; c’est une éducation. On devient une
référence, un modèle. » Mais cela se réalise dans le temps: « petit à petit, et à travers notre
accueil, cette personne très renfermée au départ s’est regardée, livre son intériorité. Elle est
intégrée, en sécurité, avec son bien-être et un confort moral, mais reste décalée, et quelque
part elle-même. »
Une accueillante évoque le changement d’attitude de la personne qu’elle accueille grâce à la
confiance établie avec le temps: « elle a pris une certaine autonomie et a rajeuni. » Pour cette
autre : « la personne accueillie était à son arrivée au plus bas, et elle a monté la côte. Elle
nous a testé au départ jusqu’à ce qu’elle ait confiance; notre rôle est de tirer ces personnes
vers le haut, même si on fait face quelquefois à des échecs. Le peu qu’ils font est énorme ; on
perçoit alors leur épanouissement. »
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2. Un état des lieux de l’accueil familial
2.1 Relations avec les familles des personnes accueillies et
l’environnement social
2.11 Le don et la réciprocité : l’échange et ses limites
L’accueil familial est un métier d’échange où chacun reçoit, et où on ne peut donner que si
soi-même on a reçu. Cette dose d’équilibre dans le don est nécessaire pour être famille
d’accueil et ce don ne s’acquiert pas seulement dans un cercle étroit, les relations avec les
enfants et les parents. A certaines occasions des relations relèvent de la complexité de la
vie : « ce quelqu’un à qui vous ouvrez votre maison, ce quelqu’un d’autre peut être un
risque, mais ce quelqu’un apporte quelque chose d’essentiel pour l‘accueillant, l’acte de
donner et l’acte de recevoir. La réception peut être au centuple dans cet échange. Quand
l’alchimie réussit, que cela fonctionne, c‘est du bonheur : dans cet échange, il n’y a pas que
la personne qui accueille qui va donner, la personne accueillie va également donner. »
Pour une accueillante: « on ne peut pas accueillir une personne âgée sans avoir le sentiment
de partager quelque chose. Si ce sentiment n’existe pas, on ne peut pas entrer dans ce
métier. » Il faut être humble pour exercer ce travail : « la notion de vocation n’est pas
satisfaisante ; on accueille autant que l’on est accueilli. »
Une accueillante parle de l’écoute et du respect de la personne accueillie, mais ne place pas
son action sur le plan affectif : « je sais que je risque de faire bondir en disant cela, mais on
se doit de rester très professionnel. » Conception effectivement contestée: « je ne peux pas
recevoir, sans avoir un brin d’amour ; je ne veux pas être technicienne, je veux être famille
d’accueil. » On peut être cependant technicien et avoir de l’humanité. Tout dépend de ce qui
est mis derrière le mot amour : « aimer la personne dont je m’occupe peut vouloir dire être
attentif à ce qu’elle est. » C’est le droit de chaque être humain d’être singulier : « tout le jeu
pour l’accueillant réside dans les fonctions d’aide ; savoir ce que la personne accueillie
souhaite et essayer de satisfaire en sachant que tout ne peut être satisfait. »
Les accueillants donnent aux personnes qu’ils reçoivent ce dont eux-mêmes ont également
besoin ; c’est un mécanisme humain classique. L’accueillant ne peut tout ouvrir à l’accueilli ;
il y a des limites et l’accueillant ne peut décider seul. Cet échange qui permet des plaisirs
participe du don. Donner trop, tue aussi : la personne accueillie âgée et/ou handicapée ne
pourra jamais conquérir une part d’autonomie si tout est fait pour elle. Il y a un équilibre à
trouver également dans ce domaine.
La question des limites se pose pour cette autre accueillante : « on donne de l’amour, avec
aussi ses failles ; des personnes accueillies se permettent des choses qu’on ne peut parfois
empêcher. On essaye de dédramatiser, mais on doit donner des limites. »
2.12 Des familles distinctes qui ont chacune toute leur place
Avoir appelé cette forme d’accueil, accueil familial peut introduire une hiérarchie entre les
familles : il y aurait la bonne famille (celle qui accueille) et la mauvaise (celle qui n’accueille
pas son parent). Face au handicap, à la dépendance, la famille de la personne accueillie peut
être tellement démunie en réponse qu’elle est soulagée quand elle trouve une solution. C’est
précisément au moment où commence un travail relationnel avec la structure d’accueil, qu’il
n’y a plus d’interlocuteur auprès des services sociaux. Pour certaines familles, il peut s’agir
de placer au plus vite le parent. Pour d’autres, la culpabilité prend le pas.
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Une accueillante qui a exercé en institution se rappelle le soulagement des familles quand la
personne est acceptée dans un établissement. Il y a un complément à trouver entre familles
d’accueil et structures.
Une accueillante évoque comment elle appelle ses trois pensionnaires : « oui, mon chéri ;
viens ma puce… comme si c’étaient mes enfants ! » Toutefois, quand on a des enfants et
des petits-enfants, il faut prêter attention et ne pas mélanger les appellations. Les filles
« coquines » d’une accueillante arrivent bien à se situer dans ces relations.
La famille de l’accueilli a une influence positive dans l’évolution de la personne accueillie,
mais peut aussi être un frein, en lien avec l’histoire de vie familiale. Quant à la famille
d’accueil, des relations différenciées peuvent se nouer entre la personne accueillie et les
enfants ou les autres membres de la famille, qu’il importe toutefois de réguler. La présence
du voisinage est également importante ; elle fait partie de l’intégration et permet d’ouvrir le
monde extérieur aux personnes accueillies. La personne qui arrive peut avoir tendance à
s’enfermer : « il faut lui laisser le temps pour l’intégration, sentir le moment où cela va
suffisamment bien pour la prendre par la main, faire un tour de jardin, rouvrir la caverne. »
L’intégration est une nécessité vitale pour pouvoir vivre dans un milieu, avec des retours en
arrière toujours possibles, ce qui n’empêche pas de pouvoir mieux repartir.
2.13 Un tiers garant de l’accueil familial
Toutefois, la famille d’accueil a ses limites et ne peut pas tout pour la personne qui vient chez
elle. Il peut y avoir un moment où l‘accueillant ne peut plus. Ce moment peut être un risque
pour la personne accueillie : « cette situation ne peut être considérée comme un échec ; c’est
un acte de courage de la part de l’accueillant de dire qu’elle ne peut plus. » Dans cet échange
où on donne et on reçoit, le tiers est important: « les manques reçus dans sa vie ne peuvent
être inscrits dans la relation d’accueil. Sans le rôle d’un tiers, l’accueillant peut se mettre en
danger et mettre en danger la personne accueillie. » Les personnes accueillies dépendent des
familles ; elles sont « pieds et poings liés » entre leurs mains à la différence de l’institution, où
le personnel reste toujours sous le regard d’un tiers. Dans la famille d’accueil, il n’y a aucun
autre regard. Cette toute puissance manifeste n’est pas reconnue par la loi ; beaucoup de
choses peuvent advenir dans cet espace. D’où la nécessité pour les familles d’accueil d’un accès
à la formation, de la constitution de groupe de paroles et d’un contrôle.
2.2 Richesses et limites du métier d’accueillant familial
L’accueil familial oblige à un travail d‘ensemble avec la constitution d’une équipe
pluridisciplinaire. Dans la Nièvre, il y a davantage d’accueil de personnes handicapées que de
personnes âgées ; il incombe à l’accueillant familial de contribuer à leur donner le désir de
vivre. Pour se rendre compte de la complexité et de la prégnance de cette activité, il suffirait
de « passer une journée dans une famille d’accueil pour vérifier si cette activité n’est pas un
métier. Beaucoup ne passeraient pas cette épreuve. »
2.21 S’organiser collectivement pour exister et durer
Il semble que les propos des familles d’accueil ne soient pas toujours considérés par les
institutions de tutelle qui ne les traitent pas toujours comme des partenaires à part entière, à
l’inverse du médecin généraliste, très peu présent auprès des personnes âgées et
handicapées accueillies, mais toujours écouté. Une parole collective est en train d’émerger à
partir de ces pratiques : en cas de difficulté, vers qui la famille d’accueil peut-elle se
tourner ?
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15
Pour une des accueillantes, les services mettent la barre très haut : « parler est dangereux
car pour le Conseil général, la souffrance des familles d’accueil est anormale et pourraient
signifier qu’elles ne soient pas à la hauteur. Les familles se sentent tout le temps jugées et
regrettent l’absence d’un psychologue. » Toutefois, elles se parlent par téléphone : « ce
boulot est difficile et ce n’est pas parce qu’on parle de nos difficultés qu’on est pour autant
incapable. Des fois, j’en pleure. » Les familles d’accueil commencent à comprendre qu’elles
ont une place importante dans l’accueil par leur connaissance des personnes âgées et des
adultes handicapés ; elles représentent une force qui commence à s’organiser à travers la
forme associative, laquelle a vocation à être force de proposition.
Quand il y a placement d’urgence, si l’agrément est pour trois personnes, les familles
peuvent s’organiser comme elles le veulent et le contrôle s’assouplit à cette occasion. Sur un
autre plan, des échanges commencent à avoir lieu entre résidents de maison de retraite et
quelques familles d’accueil qui pensent avoir un rôle à jouer dans ce registre. Dans tous les
cas, ni les familles d’accueil, ni les enfants des personnes accueillies ne doivent être
abandonnées. Mais les institutions ne sont pas toujours bien préparées pour créer un lien
entre les services sociaux, les familles d’accueil et les familles naturelles. Cela fait peu de
temps que les familles d’accueil ont obtenu un statut un peu moins précaire avec un droit
aux congés payés. Elles n’on pas encore de droit au chômage quand une personne accueillie
disparaît.
2.22 Un répit aussi pour les familles d’accueil
Les familles d‘accueil voient leurs accueillis vieillir en même temps qu’elles-mêmes. Se pose
alors la question démographique avec les conséquences de la retraite des accueillants sur les
accueillis qui peuvent entraîner une rupture dans la prise en charge. Dans ce contexte, les
accueillants familiaux ont pu expliquer leurs difficultés : les demandes ont été entendues par
le Conseil général qui doit mobiliser de nouvelles familles. Des aménagements ont pu être
apportés pour les congés qui sont inscrits dans les contrats. Avec ce type d’aménagement,
des solutions ont pu être trouvées. Le bien-être qui en a résulté pour la famille d’accueil a
des conséquences bénéfiques pour la personne accueillie. Lorsque des aménagements
n’existent pas et qu’il n’y a pas de famille naturelle, les personnes accueillies vont
temporairement en maison de retraite. L’accueil temporaire peut être une solution pour les
personnes qui peuvent se déplacer. Des jeunes familles seraient intéressées par cette
formule. Certains lits dans des établissements d’hébergement pour personnes âgées sont
prévus pour ces situations par le Conseil général. Leur durée n’excède pas 90 jours. Mais
certaines personnes accueillies ne peuvent, ni ne veulent bouger. Le besoin de partir, de
décompresser est bénéfique pour les familles d’accueil, ne serait-ce que huit jours. C’est une
condition pour faire que des plus jeunes exercent cette activité et puissent ainsi renouveler
la population vieillissante des accueillants familiaux.
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2ème PARTIE
LA FAMILLE D’ACCUEIL
A L’EPREUVE D’UN METIER
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3. Des conditions difficiles d’exercice de l’accueil familial
3.1 Isolement et situations préoccupantes
3.11 Des professionnels non informés
Les familles d’accueil recevant des enfants semblent mieux traitées que celles recevant des
personnes âgées et des personnes handicapées. Les instances collaborent moins avec ces
dernières alors qu’elles font face à des situations plus complexes.
Les placements se font souvent sans que la famille soit informée d’éventuels problèmes, tels
l’alcool, la schizophrénie, etc., qui peuvent mettre en danger la famille d’accueil. Une famille
a mal vécu l’accueil d’une personne qui à trois heures du matin voulait partir en train.
L’organisme tutélaire estimait qu’il n’avait pas à communiquer à la famille d’accueil des
éléments du dossier ; la première visite avec l’assistante sociale aurait pu au départ donner
des éléments de savoir. Dire aux familles qui vont accueillir une personne handicapée, un
enfant ou un adulte, qui elle est et comment la famille peut s’y prendre, n’entraîne pas le
rejet de cette personne. Il importe de ne pas stigmatiser la personne à recevoir par des
paroles et des mots susceptibles d’empêcher la confiance, moteur de la future relation.
Une accueillante a découvert au bout de huit mois, suite à l‘hospitalisation de l’homme
qu’elle accueille, que ses poumons étaient « troués » et que selon le médecin, celui-ci devait
effectuer un sevrage tabagique. Il a alors été très agressif et a repris la cigarette.
L’accueillante attentive à la santé physique de son accueilli, se pose la question de son rôle:
« il devient agressif, c’est la bagarre entre nous ; sur le plan moral, je suis la méchante.
Face à ce combat psychologique, que faire ? » Cette question sur le traitement médicosocial de la vieillesse, touche la liberté individuelle. La responsabilité morale est alors
confrontée à deux principes contradictoires: le plaisir de fumer face à la destruction de la
personne.
Une prescription par écrit, mentionnant les actions à réaliser, protégerait-elle l’accueillante ?
Mais ce dispositif ne fait pas partie de sa vie quotidienne où l’obligation de faire des choix est
permanente. Face à la conservation de la liberté individuelle, l’accueillante pourrait parler à
l’accueilli de son propre choix si elle était confrontée au même risque : « je ne peux pas
prendre la décision pour vous, mais je sais ce que moi je ferais si j’étais confrontée à cela. »
Pour l’accueillante, la tabagie ne concerne pas seulement la santé de l‘accueilli : « mon fils
asthmatique qui était en phase de guérison est redevenu malade. On vit maintenant en
raison de cela, séparé de l‘accueilli car il ne fume pas que dehors. » La famille d’accueil n’a
pas été avertie dans le questionnaire qu’elle a reçu de l’état de santé de l‘accueilli. C’est le
même problème pour d’autres conduites addictives, comme l‘alcool.
3.12 Alcoolisme et autre trouble
Une famille accueille depuis 6 mois un homme de 52 ans en sevrage qui nécessite une
surveillance constante. Quand il est arrivé, il ne marchait pas. Il n’avait jamais travaillé ;
aujourd’hui il passe la tondeuse, s’occupe des ânes. L’accueillante n’avait pas été prévenue
par les travailleurs sociaux de son état de santé: « l’aspect médical, les tutrices ne veulent
pas s’en occuper, seulement l’aspect administratif. » L’alcool lui a tellement manqué qu’il a
demandé à partir. Sa tutrice n’a pas temporisé assez pour le faire rester six mois de plus et
faire que ses progrès se capitalisent. Son cheminement a été positif et il a été bien intégré
dans la famille d’accueil qui estime que la tutrice en allant dans le sens de sa dépendance à
l’alcool, a manqué d’une dimension psychologique.
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Le second accueilli est une femme de 43 ans qui souffre d’une sclérose en plaques et qui a
découvert progressivement cette maladie: « je l’ai récupérée à l’hôpital avec mes propres
vêtements, où elle était soignée pour une infection urinaire. On a découvert la maladie avec
mon médecin traitant. Elle ne marche pas, est très renfermée, traumatisée, dépressive,
ayant subi de la maltraitance conjugale. Il a fallu trois mois pour établir un dialogue, c’est
énorme ! » L’accueillante a évité qu’elle se replie trop dans sa chambre et qu’elle s’y réfugie
en permanence. Le soir était infernal : « je devais l’apaiser pour qu’elle puisse dormir. »
3.13 Des familles d’accueil mises à mal
L’attachement de la famille pour l’accueilli n’est pas pris en considération. Ainsi, cet accueilli
a été placé en hôpital psychiatrique il y a un an et demi car le service qui le suit
médicalement était surchargé : la famille d’accueil n’a pas été consultée: « ils n’ont aucun
respect pour la famille d’accueil et ça fait vingt ans que ça dure ; il est devenu un légume, et
n’a plus la notion du temps. On me dit que c’est normal, que c’est dû à la maladie et à l’âge.
Je ne suis au courant de rien … Je ne peux rien prévoir, on m’appelle au dernier moment
pour le prendre en week-end. »
Cette dame âgée accueillie, très bien en apparence, a été opérée d’une rupture d’anévrisme
à l’origine de son placement. Cette dame ne veut rien faire, sauf lire le journal et refuse de
sortir de la maison. Le médecin vient la voir. Elle se croit un peu chez elle : « je ne la
contrarie pas trop ; elle monte très vite sur ses chevaux. Lors de sa toilette, elle s’oppose et
j’ai du mal à lui faire plier le bras. J’ai pris en quelque sorte la place de la belle-fille et je suis
seule pour gérer. Elle dit qu’elle ne m’aime pas. » Elle regrette d’avoir quitté son chez elle et
se comporte ainsi, selon son fils, depuis qu’elle est placée.
Cette famille accueille un homme proche de 60 ans, avec lequel elle a des soucis concernant
la toilette. Il est psychotique et l’accueillante n’a pas d’informations : « on ne vous dit pas
grand-chose, on glane des informations au fil des années. Son père m’avait dit qu’il avait fait
une convulsion. On a découvert qu’il souffre d’une atrophie du cervelet. Il y a une
dégradation depuis deux, trois ans. » Il était indépendant, faisait tout le temps quelque
chose, n’était jamais à la maison ; maintenant, son état est difficile pour l’accueillante : « il
faut deux heures pour arriver à ce qu’il se déshabille. »
Cette dame accueillie a un faible pour le mari de l’accueillante: « pour tout, si mon mari est
là, tout se fait. Si je suis seule, je n’en viens pas à bout. J’en ai pris mon parti maintenant.
Quand elle a un problème, c’est moi qu’elle appelle. Elle a repéré les rôles… » Le couple en
parle ensemble, avec l’assistante sociale. Quand elle est arrivée, beaucoup de choses ont été
cachées à la famille d’accueil : « puis on nous a lâché : si on vous l’a amenée c’est quelle
avait des problèmes ! »
3.14 L’incontinence dans trois familles d’accueil
Ce jeune homme très indépendant est devenu totalement incontinent, que ce soit la nuit ou
en journée. Le centre et l’assistante sociale, n’ont pas vu ce handicap : « personne ne sent.
Pourtant quand l’accueilli part, c’est une puanteur. Il a tout le temps la diarrhée, au salon,
dans les toilettes. » Cette situation est devenue trop lourde pour une famille d’accueil.
Cette autre accueillante a vécu cette situation devenue régulière aujourd’hui : « au début, il
n’y avait pas trop d’accidents. Maintenant, je ne peux plus, je ne résiste pas, je vomis. C’est
toute la famille qui intervient. Cela dégoûte. » Pouvoir partager ces expériences communes,
au demeurant lourdes et difficilement supportables, a soulagé les accueillantes qui se
sentent moins isolées face à ce problème.
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Cette autre personne accueillie se balade la nuit ; elle attend que le mari aille se coucher et
soit dans son premier sommeil pour déplacer des meubles et bien souvent déféquer. Cet
événement interroge une des conditions de notre humanité. Les couches du petit bébé sont
normales et le pot constitue une monnaie d’échange avec la quête d’amour de la mère et le
plaisir. A un certain âge, les sphincters se relâchent et il n’y a plus les freins de l’éducation
et du mental pour contrôler l’acte. La situation n’est pas celle d’un enfant, même si elle est
semblable à celle d’origine ; dans cette régression, on ne peut rien : « comment alors
prendre soin, rester gentil ? » Une accueillante qui a fait face aux mêmes problèmes, a fait
appel au secteur gériatrique de l’hôpital local : « j’ai ramassé, enlevé, puis il n’y a eu plus
rien, elle a arrêté. » Pour d’autres, rien n’y a fait : « on est devant une énigme. C’est
quelquefois une bataille où il faut être rusé. Et on arrive aux éléments centraux de cet
accueil, fréquents en maison de retraite, qui touchent nos limites et qui nous demandent
d’être blindés. »
Plusieurs situations d’incontinence posent problème et ne trouvent pas vraiment de solution.
Beaucoup refusent les solutions de facilité que peuvent représenter les couches
(dépendance). Mais ce problème conduit à isoler la famille d’accueil vis-à-vis de son milieu
amical et familial: « Quand il est là, je m’arrange pour être seule avec mon conjoint ».
3.15 Des situations de crise
Cette femme âgée de plus de 80 ans souffre des maladies d’Alzheimer et de Parkinson. Elle
est sur un fauteuil roulant. Elle se met souvent en colère car elle a du mal à trouver ses
mots. L’accueillante se pose la question de la garder ou de la placer en institution car elle
devient agressive vis-à-vis de ses enfants et a trouvé le moyen d’ouvrir la sécurité de son lit.
Son mari vient la voir tous les jours. Elle veut rester, dit qu’elle se laissera mourir si elle va
en institution. Quelle sera la limite qui fera que la décision d’arrêter sera prise ? Pour
l’accueillante, ce sera lorsqu’il y aura « encore plus de méchanceté, surtout dans les paroles.
Quand je pleurerai, que je serai trop fatiguée. » Elle a eu l’occasion de parler de l’éventualité
de la rupture du contrat. Mais pour une autre accueillante, « le jour où l’accident se produit,
c’est trop tard ! » La relation avec son accueillie reste forte : « moi je l’aime beaucoup,
comme ma grand-mère que je n’ai jamais connue ; je veux qu’elle vive un peu plus
longtemps, je ne veux pas la donner tout de suite. Mais déjà mon fils ne lui dit plus
bonjour. » Jusqu’où la famille d’accueil peut-elle aller ? Le fils de l’accueillante sent que sa
mère est mal et que la personne accueillie y est pour quelque chose.
Si la personne accueillie entre en institution, après avoir dit qu’elle va se laisser mourir,
comment l’accueillante fait face à cette émotion? « On ne peut pas lutter à armes égales
contre la fin de vie, la mort. C’est peut-être aussi le droit d’un être humain de se laisser
mourir quand il n’a plus de goût à la vie. La maladie d’Alzheimer détruit le cerveau, mais on
ne sait pas ce que la personne entend, comprend… Quelle est la vie d’une personne dans cet
état ? Son agressivité est compréhensible. Mais vous vous n’êtes pas obligée de supporter
ça. » Comment alors éviter l’acharnement thérapeutique ? « On peut s’acharner (sondes, …)
mais on va alors contre la volonté de la personne. On peut laisser faire la nature en
soulageant ses douleurs, en l’hydratant, en aidant sa respiration de façon non brutale. La loi
Leonetti autorise le médecin à accroître la dose de morphine, même si la conséquence est la
mort. » Dans cette situation, il s’ajoute aussi un problème économique. Pour le mari, toutes
ces questions font parties du travail de son épouse, accueillante familiale. La famille d’accueil
doit anticiper pour ne pas se retrouver sans rien. Comment prendre les devants pour placer
la personne accueillie sans perdre de revenu ?
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Cette autre accueillante a passé trois semaines à se faire taper dessus avant Noël par la
dame qu’elle reçoit, proche de 70 ans: « elle me mordait, me donnait des coups de pied, me
giflait dès que je disais quelque chose. » Elle a été hospitalisée à la Charité et a été reprise
par la famille d’accueil avec un traitement accru. Elle est dans la famille d’accueil depuis sept
ans. Six mois après son arrivée, la situation s’est gâtée : « je l’ai disputée. Le médecin lui a
fait la morale. » L’accueillante a été la chercher en maison de retraite mais on ne lui a pas
dit qu’elle était méchante : « on m’a recommandé de ne pas laisser traîner les ciseaux. C’est
tout. » Elle n’a pas de maladie mentale. En dehors des crises, elle est plaisante et cela se
passe très bien.
Cette femme accueillie n’est plus très bien depuis quelques mois ; elle vomit, a perdu quinze
kilos ; elle a une tumeur déjà ancienne et a été hospitalisée dans un hôpital régional. Elle a
un traitement et n’est plus comme avant depuis qu’elle est revenue: « elle a maintenant des
couches, reste sur le canapé dans la maison. Elle a honte de se trouver un peu diminuée. »
Elle est bien le jour, mais ses nuits sont difficiles. L’accueillante ne la laisse plus toute seule
de peur qu’elle tombe : « je discute avec elle, je l’amène au jardin, je l’occupe avec moi. »
Elle était avant dans une autre famille d’accueil où elle ne se sentait pas bien : « elle est bien
chez moi ; je sais qu’elle ne vivra pas très longtemps et je la garderai jusqu‘à la fin. »
Ce qui manque aux familles d’accueil, ce sont des informations générales : « pourquoi n’a-ton pas le droit de savoir ? C’est cela qui nous fait peur. » Beaucoup de familles d’accueil de
la Nièvre reçoivent des malades mentaux. L’accueil thérapeutique est un autre métier.
Quand cette autre accueillante a commencé cette activité, elle ne disposait d’aucune
information : « à domicile, je me suis beaucoup documentée en psychologie et en
psychiatrie. J’ai eu beaucoup de difficulté pour faire la rupture quand ça ne va plus et mettre
des barrières. J’ai étudié en ce qui concerne les jeunes. C’est une vocation d’essayer de tirer
des éléments qui nous aident à comprendre des situations difficiles. Il faudrait du coup
encore plus de formation. Je n’hésite pas à appeler les psys en direct en cas de souci. Il faut
faire du rentre dedans. Ce n’est pas aux familles de gérer toutes les situations. Elles doivent
impérativement disposer de la liste des téléphones pour pouvoir faire intervenir les
spécialistes en cas de besoin. »
3.2 Une chaîne de responsabilités
A travers ces situations, toute la complexité du métier d’accueillant familial apparaît. La
venue de l’accueilli n’est pas toujours préparée et l’information donnée est limitée, voire
inexistante. Comment alors réussir à établir une bonne relation avec l‘accueilli si l’accueillante
risque d’être accablée ? Ainsi, qu’en est-il du :
• devoir de préparation et d’information des services auprès des familles d’accueil, sans
pour autant enfermer la personne accueillie dans un rôle / un statut (ex alcoolique) ?
• Comment accompagner l’alcoolisme ? « on ne ferme pas les placards à clés, on ne
veut pas non plus modifier sa propre vie, ça ne ferait que stresser davantage. S’il
s’agit de donner les cachets, cela se fait discrètement, afin de ne pas faire perdre la
face à l’accueilli ».
•
Les relations avec la tutelle peuvent poser question : comment établir un dialogue et
un partenariat qui puissent bénéficier à l’accueilli, lorsque les relations sont rares ?
L’engagement de l’accueillant semble compensé par une plus-value où l‘intérêt est une image
positive de soi, un amour et un affectif qui ne se payent pas. La société compte-t-elle sur cet
engagement pour compenser la précarité économique de la famille d’accueil ?
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Le droit au repos est indispensable, car l’univers du quotidien tourne autour du rapport entre les
accueillis et l’accueillant : comment alors organiser le ressourcement de l‘accueillant ? Combien
de temps un être humain peut-il durer quand il donne toute son énergie pour le bien d’accueillis
qui ne sont pas ses enfants ? Le paradoxe est que le droit du travailleur défendu par le monde
du travail fait fi de ces droits. Dans la durée, c’est la question de la santé des accueillants qui
est en cause. Quand au bout de vingt cinq ans de pratique, l’accueillant explose, la
responsabilité ne doit elle pas être recherchée également auprès des institutions qui ont
autorisé ce mode de fonctionnement ? L’instigateur, et pas seulement celui qui pose l’acte,
reste répréhensible : c’est une chaîne de responsabilité. Des accueillants ont pu se trouver dans
le registre de la « patate chaude » où un service sanitaire ou médico-social se défausserait
d’une situation difficile.
Atelier de théâtre forum
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4. Vers un bien-être des accueillis et des accueillants
4.1 Du côté des accueillis
Beaucoup de familles d’accueil ont pu vivre à un moment des situations lourdes qui affectent
tous les membres du foyer et son environnement. Leur isolement, face à la complexité des
situations traversées, est alors durement ressenti. D’autres relations se manifestent qui
permettent à ces familles de poursuivre leur accueil.
4.11 Des accueillis épanouis
Cet accueillant agriculteur, a trois ans d’écart avec l’accueilli qui a été élevé par sa grandmère aujourd’hui âgé de plus de 80 ans: « il est très attentif à ce que ma grand-mère n’ait
pas froid et lui porte du bois ». L’accueilli accompagne l’éleveur, effectue de petites tâches.
Cette famille accueille une femme de près de 50 ans qui s’identifie à l’accueillante: « tout ce
que je fais, elle le refait. Quand j’ai mal à la tête, elle a mal également. » L’autre dame
accueillie participe à tout. L’accueillante peut les emmener partout et elles sont épanouies.
Ce qui est dur pour l’accueillante est d’avoir ses accueillies « tout le temps avec soi ».
Certaines situations n’ont pas été faciles à vivre : « la dame que j’ai depuis deux mois bavait
et marchait avec une canne à son arrivée. Mais elle a très bien été suivie médicalement, et
elle prend moins de médicaments ; maintenant elle danse.»
Pour cette accueillante agricultrice, cela se passe très bien avec l’homme qu’elle accueille qui
a 56 ans et est dans sa famille depuis trois ans, après avoir passé des décennies à la Charité.
Il a été retiré d’une autre famille d’accueil où il semble avoir été maltraité. Il comprend très
bien mais il ne parle pas. Il est parti en sports d’hiver avec la famille d’accueil : « au début
du séjour, cela n’a pas été simple puis il s’est comporté comme nous. » Il faut toujours
utiliser les mêmes paroles : « quand c’est nouveau, il faut répéter… Si on le laisse dans son
coin, il ne bouge pas. »
4.12 Des éléments à mettre en place pour le bien être de l’accueilli
Il importe d’abord de préparer sa propre famille à la situation de handicap, mais également
la famille élargie qui participe aussi au bien-être de l‘accueilli. Tout n’est cependant pas
facile.
Une accueillante accueille une seconde personne arrivée il y a deux ans et qui lui rend la vie
difficile : « elle se plaint à sa tutrice qu’elle ne peut pas rester chez moi, car on lui vole son
argent. J’ai acheté un cahier où je consigne toutes les dépenses. Elle a ensuite dit à
l’infirmière qu’on lui donnait des yaourts périmés. » L’accueillante craint que cette situation
ne remette en cause son agrément. Comment une famille d’accueil peut elle réagir face à ce
type de comportement ? L’intégrité des accueillantes peut être remise en cause. Dans ce
registre, former également les travailleurs sociaux et les tutelles pour faire face à ce type de
situation serait utile.
Une accueillante évoque la situation d’une personne qui s’alimente trop : « elle viderait le
frigo tous les jours ; elle ne s’arrêterait pas, elle avale. Elle était auparavant dans un hôpital.
Elle s’inquiète de ne faire que maigrir ces derniers temps. Elle fait plein de choses, elle
bouge, fait des courses. » Comment savoir si ce qui est donné correspond aux besoins de la
personne ? Si l’accueillant ne donne pas trop ? Ce problème inverse de celui du « gavage »,
interroge l’accueillante, seule pour y faire face.
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Une accueillante pose la question de savoir comment donner envie à une personne qui n’a
envie de rien ? L’état maniaco-dépressif n’est pas du ressort de l’accueillant : « une personne
qui se réfugie dans le noir, ce que je dois la soûler à lui proposer toujours quelque chose. J’ai
vu sur internet que les médicaments qu’elle prend, sont destinés à l’état maniacodépressif. »
Ce métier est complexe car il peut concerner l’accueil de personnes qui ont pu traverser des
situations difficiles ; les accueillants vont tenter de faire que cela aille mieux pour leurs
accueillis. Certains réagiront positivement, pour d’autres rien ne se passera. Mais même
ainsi, leur situation sera meilleure qu’en hôpital psychiatrique. Le devoir professionnel des
accueillants est de temps en temps, de stimuler les personnes accueillies. Il est quelquefois
hors de leur ressort de rattraper ce que certains êtres humains n’ont pas eu ; répondre aux
besoins primaires est déjà important.
4.13 Comment aider les accueillis à maintenir leur autonomie?
Que la personne accueillie garde un lien avec l‘extérieur est important pour la vitalité de la
personne accueillie. Ainsi, les animaux aident les personnes âgées à communiquer ; la
participation aux repas permet des repères dans la journée ; la relation avec les enfants
même s’ils empêchent quelquefois de regarder les « feux de l’amour » relie. Les journaux, la
télé, contribuent à maintenir le contact avec l’extérieur et la discussion apporte du soutien
moral. Tout cela permet aux accueillis de se retrouver en sécurité dans un foyer, car ils ont
les mêmes besoins affectifs que les accueillants, lesquels passent notamment par le parler et
le toucher. Évaluer la demande de la personne accueillie, arriver à lui faire exprimer ce
qu’elle veut, afin qu’elle puisse avoir le goût des choses, est complexe.
Le maintien des liens familiaux est à préserver, même si quelquefois ce n’est pas facile. Aider
certains accueillis pour répondre à leurs besoins corporels n’est pas toujours agréable pour les
accueillants ; mais recevoir cette aide est encore plus difficile pour les personnes accueillies. Ils
peuvent se sentir diminués et cela fait partie de leur isolement. Dans la mesure du possible,
leur autonomie est préservée ; ce n’est plus toujours possible à un certain moment.
La question de l’argent n’est pas toujours simple à traiter. Le niveau de handicap fait la
distinction et certains ne savent pas ce qu’est l‘argent de poche. Si quelques uns ne font pas la
différence entre les billets en euros, ils savent que c’est de l‘argent: ils se rendent compte qu’ils
ont le pouvoir de décider ce qui est bon pour eux et à ce titre, en leur expliquant, c’est une
autre forme d’aide pour les accueillis. L’accueillant devient un peu médiateur avec la réalité :
« quand on passe en caisse, chaque accueilli paye. C’est un acte d’autonomie. C‘est la tutrice
qui donne l’argent, pas moi. » On touche de ce fait à la construction de la liberté de la
personne.
4.14 Transformer le regard de l’extérieur sur le handicap et la maladie
Dans la famille d’accueil, la personne handicapée est un être humain à part entière ; cette
conception n’est pas toujours acceptée par l’extérieur. Une accueillante qui a travaillé quinze
ans en centre pour personnes handicapées témoigne: « si dans un restaurant des gens sont
attablés, ils finissent vite leurs assiettes et s’en vont ; quand le handicap est lourd, cela ne
passe pas. » Des familles d’accueil sont choquées lorsque, en déplacement à l’extérieur, des
gens font des détours. Si l’accompagnant a une bonne considération de la personne
handicapée, l’attachement naît.
Les personnes handicapées ressentent parfaitement si on les accepte ou si on ne manifeste
aucun intérêt pour elles. Même avec un handicap très lourd, la communication reste aussi forte.
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C’est toute la question de la reconnaissance du droit des handicapés dans notre société qui est
posée. Ce serait un grand pas vers la tolérance si l’autre était perçu comme pas différent de soi,
ni en plus, ni en moins. Une accueillante parle du regard des autres et précise qu’elle est
rejetée de partout : « on n’est plus invité nulle part, les amis peuvent se compter sur la main ;
on n’a plus d’amis, plus de famille. Un oncle qui venait manger chez nous et chez qui on s’était
rendu avec notre accueilli handicapé nous en a fait le reproche.» A l’inverser, une personne
handicapée accueillie par une famille est bien acceptée dans le village et a des contacts avec les
voisins. Cet accueil enrichit la vie locale.
Une accueillante évoque la situation d’une femme atteinte de la maladie d’Alzheimer, devenue
agressive. Elle n’a pas pu la garder en raison de ses enfants et celle-ci a dû partir en hôpital
spécialisé. Le toucher n’est pas suffisant pour entre en relation avec une personne atteinte de la
maladie d’Alzheimer. Si on la laisse dans son coin, elle s’enfonce dans sa coquille. Différents
champs peuvent être mobilisés tels le visuel, le tactile, l’odorat : « même un aveugle peut me
sentir. » Si on s’approche de trop près de la plupart des personnes, beaucoup ne peuvent plus
parler ; ce qui prime alors est le champ du regard de l’autre. C’est au regard de la personne
qu’on s’adresse ; on essaye de le capter. Mais a-t-on le droit, quand quelqu’un est dans son
univers, de pénétrer celui-ci ? Doit-on le laisser tranquille ? Dans le travail de l’accueillant, il y a
de temps en temps à « titiller » la personne ; sinon, elle peut couper ses liens avec le monde
vivant. Pour parler, le cerveau tourne ; si la personne ne bouge plus, son cerveau arrête son
mouvement et elle se renferme. Tout le travail de la famille d’accueil ou de l’auxiliaire de vie est
d’aider quelqu’un à vivre. Il faut alors de temps en temps stimuler, insuffler de la vie, du désir,
et dans le même temps, respecter son quant à soi, l’univers de la personne. Il est du devoir de
l‘accueillant de stimuler ponctuellement la personne, même si cela la conduit à dire « je ne veux
pas » ; c’est le signe qu’il y a du vivant et qu’une réaction a été suscitée. Cela reste une
situation complexe.
4.2 Du côté des accueillants : les attentes de la famille
La famille d’accueil permet de vivre pratiquement une vie normale, familiale, sans être dans
un établissement spécialisé. Il y a eu beaucoup de témoignages autour de la toilette.
Certains accueillis font face à des troubles plus ou moins importants. Bien des familles tirent
leurs pratiques de l’expérience acquises avec leurs enfants et se débrouillent ainsi. Mais il
n’est pas toujours possible de parler de ses soucis avec l’éducateur, l’assistante sociale, le
tuteur, ...
Un des sens de ce métier est de maintenir les capacités de la personne accueillie en lui
permettant une vie sociale ; dans ce contrat, la famille d’accueil s’impose d’éviter la mise à
l‘écart de la personne accueillie en l’intégrant à sa vie familiale. C’est comme si elle
s’acharnait à lui garder un minimum d’activité, de vie sociale. Une accueillante ajoute : « on
se fixe des objectifs, mais on a placé la barre trop haut. On improvise souvent. » La
régression de la personne est alors vécue comme un échec.
4.21 Un impératif : accompagner pour sauvegarder la famille d’accueil
Il est fréquent que la personne soit amenée par une institution sans souci d’information de la
famille. La famille n’a pas l’occasion de parler de ses problèmes dans son entourage ; elle
peut quelquefois bénéficier du soutien de son médecin, voire d’une infirmière dans le réseau
de ses connaissances. Une accueillante précise : « on n’a pas les compétences, ni la
formation ; on n’a pas le recul nécessaire ; une amie infirmière psychiatrique m’a dit que la
personne que j’accueillais, n’avait plus sa place dans ma famille, qu’en poursuivant, je
démolissais mon cadre de vie. »
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La famille d’accueil a des compétences ; ce qui lui manque est l’absence d’accompagnement
qui se distingue des formes de contrôle. Etant des professionnels, les familles d’accueil
devraient obtenir un certain nombre d’éléments de connaissance. Ce n’est pas trahir le
secret professionnel que de dire ce qui se produit, ce qui est attendu. Cela permettrait de
« mettre la barre au bon niveau ». Cela éviterait des frustrations, des « échecs ». Selon les
stades de la vie, la personne aura besoin d’être prise en charge différemment et la famille
d’accueil n’est pas nécessairement responsable des stades par lesquels passe la personne
accueillie. Le premier devoir de la famille d’accueil est de se sauvegarder : « la personne
handicapée que vous accueillez chez vous n’a pas les mêmes antécédents, la même histoire
familiale que vous. Ce n’est pas parce que vous êtes rémunéré que vous devez être esclave
de votre bon cœur. Les ruptures dans le parcours de santé des personnes accueillies ne sont
pas nécessairement de la responsabilité de la famille d’accueil.» Si la famille d’accueil ne se
préoccupe pas de ses limites, quand elle ne peut plus répéter les relations du quotidien,
qu’elle ne supporte plus, le risque de maltraitance devient possible. D’où la nécessité pour
les familles d’accueil d’être régulièrement accompagnées et toujours remplacées, car leurs
vacances sont un droit.
4.22 Des aménagements à mettre en place
Il n’existe pas de groupe de parole. Un besoin s’en ressent ; le groupe de parole, prévu par
la loi, n’est pas un espace de contrôle ; il doit favoriser l’écoute et la réflexion. L’apport du
groupe de parole doit être bénéfique pour les accueillants. Le groupe de parole ne peut se
mettre en place qu’avec une personne formée et liée au secret professionnel.
Aménager du temps pour les accueillants est primordial, de même qu’un espace pour la famille.
Préserver l’intimité de la famille est important. La famille a ses propres enfants à prendre en
compte, lesquels peuvent être jaloux des relations avec les accueillis : « au lieu d’être deux
au salon, on se retrouve quatre ou cinq. Il est important de préserver sa propre intimité. »
Ces relations sont loin d’être toujours faciles.
Avec autant de familles d’accueil sur le département, une structure ne pourrait-elle pas être
créée pour prendre en charge ponctuellement les personnes âgées accueillies ? Ou alors mettre
en place un accueillant tournant dans les familles lors des remplacements ? Il reste la solution
de l‘accueil temporaire. Le besoin de souffler des familles accueillantes doit être accepté par
toutes les parties, ne serait-ce qu’un après-midi, ou deux jours, sans atteindre huit jours.
Quand une personne part, l’accueillant ne dispose pas du chômage. Ainsi, pour des femmes
seules avec deux accueillis, si l’un décède, ou même en cas d’hospitalisation prolongée,
l’accueillante peut être en grande difficulté. Le premier mois est laissé. Du jour au lendemain,
l’accueillante peut se retrouver sans rien.
Un certain nombre de questions pourraient être listées sur le plan du travail:
• un accueillant familial est-il déjà passé en prud’hommes ?
• Que stipule le contrat de travail ?
• Y a-t-il des horaires fixes ?
• Comment s’organisent les cotisations et droits à la retraite ?
• Le statut d’employé subordonné apparaît-il dans les bulletins de salaire ?
Cet ensemble de questions où se manifeste la précarité économique de ce type de travail,
relève de l’espace des prérogatives des travailleurs.
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4.23 Comment transformer une situation de travail précaire en métier ?
Avec un métier, correspond un réel contrat de travail. Comment des jeunes vont-ils pouvoir
prendre le relais, continuer cette activité riche, avec les conditions de travail que la
génération actuelle a acceptées ? Il faut d’abord aider les jeunes accueillants en essayant de
leur donner la confiance. Avoir été mère a aidé la pratique de bien des accueillantes. Mais
être mobilisé 365 jours par an ne fait pas partie des conditions d’exercice d’un métier
aujourd’hui, même si l’accueillante reste chez elle et semble libre de son temps.
Le problème peut être le temps de la retraite qui marque le passage où le cycle de vie se
manifeste ; le fait de passer la main peut provoquer un déchirement, après un chemin de vie
parcouru où l’accueillant a été bienveillant et attentif dans son activité. La mise en place
d’une profession d’accueillant se réalisera compte tenu du manque d’établissements pour
personnes âgées avec le « tout domicile » développé. L’accueil familial constitue une
alternative réelle : la construction d’un métier devient de ce fait incontournable.
Qu’est-ce qu’il faudrait mettre en place pour accueillir une personne âgée, pour que cette
personne se sente bien ? Le prix à payer pour devenir humain est l’éducation : « en
grandissant, on apprend à différer, à ne pas avoir tout, tout de suite ; on apprend à
relativiser. » Un des rôles de la famille d’accueil, son contrat moral, est de donner à a
personne accueillie, quel que soit son état, le maximum de ce qu’elle a droit. L’accueillant
n’est pas obligé de donner plus, mais ce qu’il peut faire. Cela peut être le point de départ
d’une discussion. Le minimum auquel est obligé l’accueillant est le gîte, le couvert et
l’hygiène. Il doit également assurer la sécurité de l’accueilli. Il y a un minimum relationnel qui
n’est pas de l’amour, qui se limite à ce que l’accueillant peut donner.
La famille d’accueil se situe à contre-pied de cette tendance professionnalisante du minimum
relationnel, dans ce métier tourné vers l’autre. L’accueillant en investissant un supplément
d’âme dans ce qu’il fait, a d’autant besoin de réflexion, de formation, de groupes de parole
pour ne pas être amené à trop donner : « aimer n’est pas remplir l’autre ; cela peut
l’étouffer. » Si l’accueil familial est une alternative à un autre système, pour constituer une
profession, il devient nécessaire pour l’accueillant d’apprendre à avoir une vie privée, de ne
pas avoir tout à donner.
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3ème PARTIE
LA FAMILLE D’ACCUEIL :
UN TRANSFORMATEUR SOCIAL
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5. Une éthique permanente du prendre soin
5.1 Poser la question des limites d’un accueil familial
5.11 Un espace d’expression pour repérer ses limites et sauvegarder l’accueil
Un point essentiel concerne le caractère admirable de vouloir du bien à l‘autre et les limites
que cela peut engendrer : « on veut profondément améliorer le sort des personnes qu’on
nous confie. On en veut beaucoup quand la personne, quel que soit l’âge, nous ‘trahit’. »
D’où la nécessité de tiers dans la relation. S’il y a de l’amour dispensé aux personnes
accueillies, le premier amour pour les familles est de sauvegarder leur santé, mentale,
psychique et celle de leur famille, car elles ne peuvent détruire leur entourage.
Dans le travail d’accueil, la famille est profondément seule. Les structures
d’accompagnement, tel le Conseil général ou le service de tutelles, sont peu présentes dans
ce type de confrontations avec le quotidien. Un système d’accompagnement et un espace de
prise de parole sont à promouvoir et à mettre en œuvre par les autorités qui encadrent
l’activité pour que les familles d’accueil ne soient pas condamnées à la solitude. Dans toutes
ces situations exposées, la proximité avec la maladie mentale est grande et oblige d’autant la
collectivité à l’accompagnement, en aidant à mettre en place un lieu propre aux familles où
elles puissent s’exprimer.
Quelle éthique dans les pratiques des familles d’accueil ? La loi de janvier 2002 rénovant
l’action sociale et médico-sociale, est centrée sur la personne; les actions sont individualisées
et posent les limites. Pouvoir s’arrêter quelque temps pour ne pas se détruire relève d’un
positionnement éthique. Un positionnement éthique se réalise par essais erreurs, en tentant
de trouver la solution la meilleure. Si la pratique d’accueillant familial n’avait pas de limite, on
serait dans la toute puissance ; cette pratique apprend l’humilité et la modestie. Elle
témoigne de l’humanisme fortement présent dans ce groupe d’accueillants, et de la place
faite à l’humain dans la présente formation.
Le premier devoir de l’accueillant est de se maintenir en forme : si ce n’est plus possible pour
l’accueillant, les limites de la famille sont déjà présentes. L’éducateur, le tuteur, le travailleur
social devrait préparer tout doucement un départ de l’accueilli: « dans le cas contraire, la
famille va se bousiller, et bousiller l’autre. » Tant que la famille d’accueil n’a pas pu parler,
dévider un fil face à un vide qui ne peut être rempli et souvent à l’origine du fait de devenir
famille d‘accueil, un comportement répétitif peut s’installer lorsque l’accueilli le faire revivre.
Cela peut être évité lorsqu’un tiers intervient et change le système qui s’est installé. Dans ces
relations complexes, la famille d’accueil est obligée d’apprendre par elle-même : « or c’est
aussi compliqué que de construire un moteur d’avion, et personne ne lui apprend.»
5.12 Les deux missions du travailleur social dans la relation d’accueil
Quelles sont les missions d’un travailleur social mandaté pour s’occuper d’une personne ? Il a
deux missions essentielles: prendre soin de son protégé en trouvant une solution qui soit la
moins difficile possible dans une vie constituée souvent de ruptures et de régression. La
répétition des échecs peut être une constante, pour faire monter une marche. De temps en
temps peut se produire un miracle, lorsqu’une rencontre aboutit: « c’est dans ce cas sauvé
pour tout le monde ; c’est bien pour l’accueillant et pour l‘accueilli. » Le bien-être de
l’accueilli et de l’accueillant constitue la seconde mission.
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L’expérience de la « patate chaude » (vécue par de nombreuses familles à qui certaines
institutions confient des personnes difficiles à traiter sans information), conduit à une
descente supplémentaire pour l‘accueilli et une souffrance inutile pour la famille d’accueil :
« petit à petit, la famille va se démolir, ne plus croire en ce qu’elle fait. Dans ce
cheminement, à tous les virages, une maltraitance devient possible. L’accueillant n’a pas
choisi ce boulot pour vivre l’échec. Il devient impossible alors de ne pas en vouloir à celui qui
vous empêche la pratique de votre métier. » D’où l’importance qu’a la qualité de
l’accompagnement et des relations des professionnels travailleurs sociaux envers les familles
d’accueil.
Ces questions, en abordant des dimensions de contenu dans les manques des personnes
accueillies, pointent des initiations à la limite de la présente formation. La reconnaissance
des limites se retrouve également pour l’accueillant familial : « quand vous vous mettez des
limites, vous pouvez continuer d’accueillir, et vous êtes utile et efficace. Quand des
personnes sont appelées vers leur fin de vie, la seule chose possible à faire est de les
accompagner comme être humain quel que soit leur handicap. Mais cela reste un travail
colossal. » Face à cette situation, la responsabilité des institutions encadrantes est immense
car elles ne peuvent se défausser sur les familles d’accueil, de ces situations difficiles: « un
placement en famille d’accueil doit provenir d’une décisions mesurée par chacun ; si
l’institution qui place n’a pas la certitude que cela soit possible, elle se débarrasse du cas
difficile. On retrouve la patate chaude, position qui n’est ni admissible, ni tenable. »
5.13 Vers un projet coopératif d’accueil personnalisé
Une accueillante a rappelé un principe essentiel de la loi de janvier 2002 à mettre en œuvre :
le projet individualisé : elle a évalué avec les informations qui lui étaient données, ce qu’elle
pouvait imaginer mettre en place afin de conduire la personne vers davantage d’autonomie.
Cette famille a eu trois personnes accueillies. Dans un cas, la personne accueillie avait
tendance à rester allongée ; le projet construit permettait à celle-ci de continuer à se lever et
ne pas rester grabataire. Pour chaque personne, l’accueillante a établi un projet : « je
préservais ainsi l’autonomie de la personne handicapée, en faisant qu’elle ait la possibilité
d’être debout et de marcher. » Elle a eu à faire face à une situation difficile avec une femme
atteinte de schizophrénie : « cela a été dur au début, car elle faisait pipi au lit, et laissait des
traces fécales partout. J’ai aidé à ce qu’elle devienne quelqu’un. Aujourd’hui, elle se
débrouille toute seule, met le couvert, fait le ménage, a des contacts avec l’extérieur. »
L’accueillie s’entend bien avec sa fille âgée de quatre ans, qui l’aide à conserver ses acquis.
Avec la loi, un tel projet sera demandé à chacun. Pour se réaliser, il y a un travail de
coordination entre les éducateurs, les assistants sociaux afin de vérifier ensemble le
fonctionnement du projet, le discuter et l’évaluer. Pour maintenir cette étincelle de vie, de
désir et faire en sorte que la personne accueillie aille mieux, une décision de monter un
projet provient de la coopération des aidants et des soignants ; cette coopération n’est pas
médicale, mais est du ressort du « prendre soin ».
5.2 La notion de risque revisitée
5.21 Quand l’agressivité est interprétée comme un signe
Sur la notion de risque, un film portant sur une démarche innovatrice au Québec dans un
établissement (Carpe Diem) recevant des malades atteints de la maladie d’Alzheimer, a servi
de support. Ce film a été bien reçu par les participants et a suscité une certaine émotion
dans les échanges.
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Nicole Poirier, la directrice de Carpe Diem, parle de la nécessité pour connaître chaque
personne dans sa réalité et savoir ce dont elle a besoin, d’aller à sa rencontre. Carpe Diem
signifie « mettre à profit le jour présent, saisir le jour. » Cela peut se traduire par avoir du
plaisir chaque jour. Aussi, à Carpe Diem, les résidents sont associés aux tâches
quotidiennes.
Deux situations d’agressivité sont présentées, face à des professionnels. L’une en France, où
un dialogue s’établit entre une résidente et des agents jeunes femmes qui font face à ses
insultes : une autre à Carpe Diem où le dialogue est entre résidents et où la professionnelle
est amenée à recevoir et traduire en relation et émotion, un geste plus brutal : elle rassure
une autre résidente qui ne peut plus s’exprimer par des mots et qui assiste à un échange
verbal vif entre une résidente agressive et une autre à table. Un autre regard compréhensif
est porté sur une conduite agressive : pour Nicole Poirier, quand un résident est agressif,
c’est qu’il se défend, et ce comportement est estimé positif. Le but de l’équipe n’est pas
d’éteindre son agressivité, mais de la voir comme un message. La seule forme négative est
lorsque ce comportement vise à détruire l‘autre. Dans la maladie d’Alzheimer, il ne s’agit
jamais pour le malade de détruire l‘autre, mais de défendre son intégrité. A Carpe Diem, le
personnel doit être suffisamment souple pour accepter une telle polyvalence : beaucoup de
professionnels ne seraient plus capables de revenir aux anciennes méthodes.
La question de l‘agressivité a interrogé les accueillants. L’usage des médicaments en France
est une manière de la faire disparaître : « certains résidents sont drogués pour qu’ils ne
bougent pas. Quelquefois la personne est placée parce que la famille ne peut plus faire
face. » Deux types d’agressivité sont distingués : l’une est due à la maladie, l’autre ressort
de l’inconscient. Les accueillants font face à l’agressivité : « parfois, on laisse passer,
d’autres fois, on marque les limites. » Un accueilli a poussé une grosse colère et dix minutes
après avait tout oublié. Il est important de toujours bien expliquer aux personnes les raisons
du recours à un médicament, car elles sont le plus souvent en capacité de comprendre.
5.22 Le respect de l’autre par la confiance
Dans les exercices que Nicole Poirier propose à une équipe de soignants dans une maison de
retraite française, elle prend la place d’une résidente atteinte de la maladie d’Alzheimer. Le
contact visuel est bien établi par l’infirmière : comme son champ de vision est rétréci, il
convient de s’approcher de la personne par l’avant après l’avoir contournée. La personne est
présente et n’a pas disparu derrière la maladie. La société actuelle porte un regard défaitiste
sur les personnes touchées par la maladie, surtout lorsque l’attention se porte sur les
pertes ; ce regard influence les décideurs. Aussi, pour continuer de développer les
potentialités de la personne, Nicole Poirier propose un exercice visant à produire de la
confiance : l’un guide l’autre, qui a les yeux fermés et lui fait passer des obstacles.
L’épouse d’un accueillant qui est auxiliaire de vie, est sensible, comme dans le film, à l’usage
du « on » (« alors, ‘on’ a bien dormi ? » par ex.) : « elle se bagarre avec le on qui fait
changer de comportement et dilue la personnalité du résident. » La prise de risque mesurée
est une façon de garder l’autonomie du résident. Un parallèle est fait avec l’interdiction (en
maison de retraite, foyer d’accueil…) d’accéder à la cuisine, considérée comme dangereuse,
alors que c’est un espace de vie chaleureux. Beaucoup regrettent que les maisons de retraite
ne soient pas inspirées par le modèle de Carpe Diem.
La philosophie de Carpe Diem est fondée sur la capacité d’entrer en relation avec le résident
et sur le respect de son être. L’accès des résidents reste libre en cuisine et la vie n’est jamais
sacrifiée aux règles. Ainsi le grand escalier central qui mène aux chambres à l’étage, fait
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l’objet d’une évaluation préalable des capacités du résident : la personne reconnaît ellemême les risques.
A Carpe Diem, il y a des risques, mais ils sont partagés par le Conseil d’administration, la
directrice, toute l’équipe et les familles : « cela permet d’oser, ce sont de beaux risques,
calculés. En changeant nos pratiques, cela permet aux résidents de finir dans la dignité, de
rester un être humain à part entière. » Avec cette philosophie, l’équipe découvre le caractère
authentique des résidents : « ils nous disent comment ils ont besoin d’être accompagnés ; ils
ne sont pas dans le paraître, mentir ne fait pas partie de leur mode de communication. Ils
sont toujours dans la relation ; ils vont t’aimer parce que tu as la capacité de les respecter.
Cela me renouvelle chaque jour. »
5.3 La relation au corps et à l’altérité au quotidien
Sans les familles d’accueil, les personnes accueillies n’auraient plus de progrès à faire : leur
chance est d’être dans le dispositif d’accueil familial; c’est la nature même de la famille
d‘accueil.
5.31 Des qualités professionnelles inhérentes à l’accueil familial
En France, les foyers logements devaient favoriser l’autonomie des résidents : c’est rarement
le cas, car le risque est évacué du travail, au profit du confort et de la sécurité de la
personne. Ainsi, un parent âgé qui vivait dans son appartement où il avait tous ses repères
est entré en établissement pour des besoins de sécurité sous la pression de son entourage :
pour lui, « on m’a envoyé mourir en maison de retraite. » La comparaison des
établissements français d’hébergement de personnes âgées en longue durée, apparaît
difficile avec Carpe Diem au Québec. On y prend là le temps de parler, d’évoquer la douleur,
la jalousie, de conserver la singularité de chaque personne. Sans cette attitude, on maintient
les personnes dans leur situation de handicap.
Des différences distinguent les accueillants familiaux de l’équipe de soignants : d’abord, ils
sont mobilisé 24 heures sur 24. Ensuite, ils ont une autre relation avec l’accueilli. Mettre une
personne en fauteuil peut être lourd de conséquence. Il faut continuer à faire marcher le
corps, tout comme pour l’esprit, continuer d’échanger, de garder des responsabilités, d’être
utile dans la société. Les accueillants familiaux aident à ce que leurs accueillis reprennent de
la confiance, car ils se sentent aimés et sont considérés comme des personnes qui vont bien,
qui ne sont pas traités comme des malades.
5.32 Des progrès devenus possibles dans la famille d’accueil
Les relations au corps sont simples : prendre les mains, se mettre à la hauteur des yeux de
la personne ou en dessous pour qu’elle puisse vous reconnaître. Les accueillants familiaux
sont livrés à eux-mêmes et pour toute situation, doivent trouver comment faire par essais
erreurs. Ainsi, une femme accueillie assise pendant des heures, qui n’a envie de rien,
comment faire par exemple pour qu’elle lise ? « Je ne sais pas comment m’y prendre, il
faudrait que je lui crée sa propre envie ; après quatre mois de tentative, je baisse les bras ».
Pour le secteur psychiatrique qui effectue le suivi, l’accueillante ne peut pas laisser dans son
état la personne accueillie, ni lui imposer une activité. Ainsi, cette personne accueillie a
toujours été comme cela, elle n’a jamais rien fait. Il faut également constamment répéter :
« mais comment faire quand les personnes apparaissent comme des blocs inertes, comment
continuer à travailler seule dans ces conditions ? » Quand cela ne marche pas, ce qui arrive
dans certaines situations, l’accueillante se sent coupable de l’échec.
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L’agressivité de l’accueilli est difficilement ressentie par l’accueillante : « c’est insupportable ;
on se pose des questions sur ce qui s’est passé, sur les années passées en institution. »
Les accueillants peuvent s’épuiser dans certaines situations, surtout quand ils font face à des
explosions. Cet accueil devient alors compliqué. Une accueillante précise : « je ne laisse pas
mes accueillis tout faire car je les considère comme des êtres humains; je leur explique,
quelquefois avec des discussions de ¾ d’heure ; un jour ou l’autre, j’obtiens des résultats.
Ce n’est pas toujours facile de faire face à l’agressivité d’un accueilli: « quand il dit trop de
gros mots, je lui dis qu’il me saoule, que je vais le dire à son éducateur. D’autres fois, je ne
retiens pas cette solution, je m’efforce de le calmer. Il faut alors rigoler, pas aggraver. »
Ne plus savoir quoi faire quand un accueilli n’a plus envie de vivre, interroge l’accueillante à
qui on pourrait reprocher de ne pas bien faire son métier. Avec l’ouverture de la famille à un
autre, il peut y avoir un risque de perturbation du système familial. Le travailleur social
ignore cette situation car il n’est pas tout le temps avec les personnes qu’il accompagne et sa
famille reste à l’extérieur.
5.33 Des relations essentielles pour chacun, mais toujours fragiles
Dans les multiples facettes que l’accueilli montre à l’accueillant, il ne s’agit pas alors de
risque pour le métier, mais de ce qui est essentiel pour l’accueilli. Dans les témoignages des
accueillantes, on découvre que des accueillis vont s’améliorer et que d’autres vont droit dans
le mur ; une des accueillantes s’étonne de constater que ses collègues tiennent la route,
alors qu’elles sont très seules : « c’est cela qui m’a peinée ; je vous sens seules. J’ai
beaucoup de professionnels autour de moi, je ne suis pas seule, je bouge quand j’ai un
problème, j’interpelle le pédopsychiatre, je frappe aux portes. »
La personne que cette accueillante reçoit est autiste et ne peut être touchée. Il a ses propres
moments de tendresse : « si ce n’est pas le bon moment, il va me repousser ; c’est lui qui
fait, et si je suis occupée à ce moment là, je lâche tout. » Cela peut être frustrant, d’autant
que : « des fois, il ne veut pas me voir, il m’insulte. ». Une des deux personnes accueillies
par cette autre femme ne peut pas se coucher sans venir le soir l’embrasser ; la seconde la
repousse, alors qu’elle embrasse trois fois son mari le matin : « chaque fois que j’avance
vers elle, elle recule. Il semble que c’est comme si je rentrais dans une partie d‘elle, là où je
ne devrais pas aller. J’y vais sur la pointe des pieds. J’espère que cela va bien aller avec la
nouvelle accueillie. La relation n’est pas encore établie. »
Cette accueillante a vu les progrès de la personne qu’elle accueille et constate aujourd’hui
que celle-ci ne s’intéresse plus à rien : « elle a pété les plombs ; cela s’écroule après toutes
ces années passées. » Dans toutes ces représentations et perceptions du métier
d’accueillant, la quête de la reconnaissance est essentielle et permet à l’autre qui est accueilli
d’exister par le regard. Ainsi, un enfant qui a passé vingt ans sans que personne ne l‘ait
aperçu, découvre qu’il existe, qu’il est intéressant pour quelqu’un. Peut-on grandir sans ce
regard ? Avec cette absence de regard, la personne s’enferme alors dans toutes sortes de
prisons et l’âge ne compte plus dans son évolution. Face à cette béance, il est crucial dans le
métier exercé par les familles d’accueil que celles-ci soient accompagnées par les organismes
qui ont la responsabilité de cette activité. Devant un désarroi, ne rien faire peut quelquefois
être la meilleure action à faire : « quand la moutarde monte au nez de la personne accueillie,
on peut la laisser monter ; elle sait qu’elle existe ; mais ces relations ne se construisent pas
avec la tête. » D’autant que dans cette relation d’accueil, la personne accueillie peut aussi
contribuer à établir un équilibre dans la vie de l’accueillante.
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5.34 Une question dont on parle rarement : la sexualité des personnes accueillies,
notamment handicapées
Les familles peuvent se retrouver dans la même situation que celle vécue avec leurs enfants.
La sexualité est une question compliquée à aborder. Ainsi, une accueillante héberge une
femme et un homme ; la femme se déshabille tout le temps, ouvre la porte de la salle de
bain et l’homme est peu intéressé par ses avances. L’accueillante a consulté à ce sujet le
médecin et le psychologue. Le médecin a prescrit des médicaments pour calmer la pulsion.
S’il y a une part biologique, avec un appareil génital masculin et féminin fait pour
fonctionner, la condition de l’être humain se réalise aussi avec le plaisir. Chaque société a
développé une organisation sociale, tel le mariage, avec des règles encadrant la sexualité.
Chez la personne handicapée, l’appareil génital a une grande importance et la pulsion peut
monter fréquemment. La famille d’accueil est coincée quand cela se présente et est très peu
aidée pour faire face à cette situation. On est encore très loin de la reconnaissance sexuelle
des personnes handicapées, telle qu’elle est mise en place à travers des associations
spécialisées dans certains pays européens du nord.
Une accueillante témoigne que si elle ne s’oppose pas à la sexualité des personnes qu’elle
accueille, elle souhaite que ce ne soit pas chez elle. Comment accompagner les familles et
les personnes accueillies dans le traitement de cette question rarement évoquée en
formation ? Il s’agit pourtant d’un droit humain et on est obligé d’y prêter attention. Il serait
bon de disposer d’une séance de formation avec un spécialiste, car cette question doit être
regardée froidement : « on nous a éduqué avec une certaine morale en matière de sexualité
et avec la meilleure bonne volonté, chacun peut être amené à faire du mal à son insu. »
Diffusion … et débats !
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handicapes en milieu rural
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6. Une professionnalisation en marche
6.1 Un exercice projectif en relation avec la personne accueillie
6.11 Les ressorts de l’accueil familial
Beaucoup d’accueillants aiment la vie au quotidien avec leurs accueillis, être avec eux, les
voir sourire le matin en se levant. Ils aiment également bien rigoler avec eux. Quelques uns
apprécient qu’ils soient propres. Il y a une profonde acceptation de l’accueilli, une volonté de
se sentir bien avec la personne dont l’accueillant s’occupe, et une réelle empathie : « j’aime
qu’ils m’aident, quand ils peuvent venir aux courses, que ce soit vivant. Je donne et je
reçois. Si je me comporte comme une sombre brute, que je ne donne pas, ce n’est pas
étonnant que je ne reçoive rien. Le regard, c’est la porte du cerveau, une intelligence pour
une rencontre. » D’autres ont parlé de la fête, tels les anniversaires, de voir les accueillants
rire, danser, faire du bruit, écouter de la musique, parler de chanteurs ; c’est en fait
retrouver une famille, revivre, être heureux, s’intéresser à une discussion, et manger, sans
oublier : « un bisou de temps en temps. ». Le versant toilette qui met en jeu le corps de
l’autre peut être quelquefois apprécié, mais il est le plus souvent dans le registre moins
agréable, voire du rappel à l’ordre. Il peut donner lieu à un travail supplémentaire objet de
rémunération, surtout si une ordonnance médicale mentionne que la personne ne se lave
pas seule. D’une manière générale, le métier d’accueillant familial aide une personne en
incapacité de vivre seule, à mieux vivre.
Les accueillants ont aussi le droit de saturer, d’en « avoir ras-le-bol », d’avoir franchi un seuil
au-delà duquel ils ne peuvent plus aller, d’avoir cassé un moteur. Beaucoup n’aiment pas
voir leurs accueillis « pas dans leur assiette », ne plus avoir envie de se lever, en se
plaignant, sans dire un mot, être malades, faire « comme si on n’existait pas ». Le
changement d’état de l’accueilli fait souffrir l’accueillant. Un accueilli effectue ainsi un arrêt
sur image : « il m’aide, et tout d’un coup, il stoppe son activité ; cette interruption peut
durer dix minutes, même si je crie. Il n’a jamais été comme cela. Il ne fait plus rien et ne
voit pas le temps passer. Il était un peu agité avant, mais ce comportement a démarré avec
son traitement. » L’accueillante éprouve des difficultés pour le remobiliser, faire qu’il ait du
plaisir, qu’il retrouve des envies avec le jardin notamment. Cette situation est difficile pour
l’accueillante qui se fatigue à toujours appeler la personne qu’elle accueille à la vie et qui ne
sachant plus comment faire, s’épuise et est amenée à se remettre en cause sur le plan
professionnel.
6.12 La question de la liberté et du respect de l’autre
Quant aux aspects négatifs, beaucoup d’accueillants n’aiment pas voir les personnes qu’elles
accueillent tristes (cela se voit sur leurs visages), pleurer quand elles évoquent leurs familles,
racontent leur passé : « quand elle part en vacances chez sa sœur, elle pleure une semaine
avant. » La vie quotidienne peut être objet de désagréments, sur le plan relationnel, lorsque
les personnes accueillies ne répondent pas quand on leur parle, surtout avec la télévision,
quand elles crient (notamment quand c’est plus fort que l’accueillante), lorsqu’elles sont
vulgaires, et même : « quand il se lève avant moi ; j’aime bien être habillée et seule pour
prendre mon café le matin. » La question de l’hygiène reste toujours difficile quand elle se
pose. Et plus grave, quand la personne accueillie est objet de moquerie : « je suis triste et
malade quand on se moque de son handicap, parce qu’il parle fort et il bégaye, ou qu’on le
sous-estime. »
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handicapes en milieu rural
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En conclusion, cet exercice a permis de montrer que les accueillants aimaient que leurs
accueillis soient vivants, et qu’ils étaient affolés quand ceux-ci allaient dans un mur. Le
manque d’hygiène, qu’il ne faut pas confondre avec la malpropreté qui peut être connotée
par une morale, est difficilement ressenti par les accueillants. L’élégance, la bonne
représentation, est le signe d’une pulsion de vie, de désir, satisfaisant pour les accueillants. A
l’inverse, le repli sur soi, quand l’accueilli tout doucement se renferme, interroge
l’accueillant : même si l’accueillant s’occupe très bien de l’accueilli, il peut y avoir un
syndrome de glissement quand la personne est très âgée. On peut la voir partir doucement
et cela peut ensuite aller très vite quand elle a décidé de baisser les bras. Cette interrogation
montre que la famille d’accueil est toujours du côté du vivant, dans le respect de l‘autre.
6.13 Quelles conditions préalables mettre en œuvre pour accueillir ?
Il y a toujours un premier mois d’essai. La première rencontre se fait souvent lorsqu’il y a
des enfants, avec la fille ou le fils de la personne accueillie : « on discute, cela permet de
voir ses habitudes, on lui fait visiter la maison. Au bout de quinze jours, on voit que cela va
être bon. » Mais il faut penser aussi aux autres accueillis, lorsqu’il y en a, qui vont devoir
partager avec le nouveau venu. L’identification à l’accueillant peut être forte pour certains.
Des situations d’accueil se sont mal passées. Un accueillant est allé voir son futur accueilli ;
mais ce n’est qu’au bout de six mois que celui-ci s’est révélé et qu’il y a eu confrontation.
Lors de la première rencontre, l’accueillant devrait savoir si l’accueil va être possible. Mais il
n’est souvent pas seul : « le travailleur social qui accompagne le futur accueilli, devrait
ressentir, en observant ses réactions, ses silences, la succession de multiples détails, s’il
pourra s’intégrer dans son nouveau milieu de vie. Nous aussi accueillants devrions aussi être
capables de repérer cela. »
Comment faire pour que l‘accueilli conserve ses repères, puisse rester dans son
environnement quand il y a perte de certaines de ses capacités cognitives, qu’un début de
désorientation se manifeste ? Ne pas tout faire à la place de l’accueilli est important :
« j’essaye toujours de combiner avec l’initiative de l’accueilli ; je commence une opération, il
en fait une autre. Je mets en œuvre des milliers de petites recettes pour avancer. Ainsi, avec
une personne qui voit mal, elle sait que les affaires sont à tel endroit. »
La relation avec l’accueillant est essentielle : « quel que soit le handicap, les accueillis
doivent et peuvent être rassurés. Si on les casse, en marquant fortement qu’ils sont chez
l’accueillant, on va à l’échec. Il faut être à l‘écoute, exprimer de la tendresse sans pour
autant tout accepter ; il y a des limites. » Un accueillant a établi une liste des actes
importants de la maison qui est discutée avec l‘accueilli. Certains accueillis ne peuvent avoir
un sens des règles.
6.2 Des éléments d’évaluation de la formation
6.21 Les aspects appréciés
Se retrouver entre accueillants, en abordant différents sujets où l’on découvre avec l‘apport
de chacun que les idées sont différentes, a été important. Grâce à la confiance, il n’y a pas
de gêne, ce qui a permis cette expression. En rencontrant d’autres familles d’accueil,
certaines ont su qu’elles étaient voisines. L’ambiance qui a régné entre les accueillants, les
contacts avec les formateurs, ont facilité les échanges sur les pratiques.
Faire la connaissance d’autres familles d‘accueil, se retrouver ensemble pour partager des
expériences et des points de vue, écouter le quotidien et les difficultés de chacun, tout cela a
permis de penser l’échange comme un plus pour les accueillants.
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handicapes en milieu rural
38
Les sujets abordés ont été jugés riches ; cela a permis aux accueillants de savoir qu’ils ne
sont pas seuls, de vérifier que régnait une bonne entente parmi eux. Certains gestes et
« autres dits » ont été particulièrement appréciés ; quelques uns ont trouvé bien d’être
prévenus suffisamment tôt des séances ; d’autres se sont sentis « décoincés ».
Les accueillants ont apprécié, en dehors de la convivialité qui a régné dans le groupe, de se
retrouver tous ensemble, alors que les familles ne se connaissaient pas : « on est tout le
temps dans notre travail, et on se débrouille toujours toutes seules. C’est bien de se
retrouver dans cette formation.» Et cela devrait se produire plus souvent : « d’autant qu’on
ne connaît pas tout. »
6.22 Les aspects moins appréciés, voire qui ont posé problème
Après des années de fonctionnement, voire des décennies, les familles d’accueil ont dû se
créer elles-mêmes les outils pour faire face aux difficultés de leur activité. Elles n’ont pas
attendu ce stage « obligatoire » qui arrive à un moment où certaines d’entre elles vont
prendre leur retraite, pour faire évoluer les conditions d’exercice de leur métier. La question
de leurs frais non pris en charge a aussi été importante car pendant leur absence il a fallu se
déplacer et trouver ou payer quelqu’un. Se libérer une journée conduit à une perte de
salaire : il y a la distance et le remplacement, d’autant que certains accueillis n’aiment pas
voir partir l‘accueillante la journée entière. Si quelques uns ont reproché à cette formation
d’être toujours dans les problèmes du quotidien, et de n’avoir rien appris de plus, d’autres on
craint à certains moments d’avoir abordé des sujets qui pourraient leur être reprochés.
Quasiment tous les accueillants ont appris sur le tas et ils reconnaissent qu’ils ne savent pas
tout : si on ne peut plus rien apprendre à certains, d’autres ont reçu.
6.23 Ce qui a pu paraître nouveau
Pour les accueillants de personnes handicapées (la majorité), rencontrer des accueillants de
personnes âgées a permis d’avoir une approche différente et de diversifier ses propres
conceptions, utiles pour le quotidien. Par exemple avec la notion d’acharnement.
L’utilisation du photo-langage a permis d’évacuer certaines difficultés, de moins se retenir et
de se mettre en situation. Le moment de théâtre avec les sketches montés ont surpris, de
même que les gestes de premiers secours, qui auraient pu être complétés par la présence
d’une infirmière. Quelques uns ont été surpris de savoir que des accueillants pouvaient
traverser des situations plus difficiles que les leurs. Les services de tutelle semblent
indifférents aux difficultés que traversent les accueillants et rarement présents quand ceux-ci
ont besoin d’eux.
La curiosité, la possibilité de poursuivre les échanges initiés, de se retrouver ensemble, de
bénéficier de l‘expérience des autres, ont été des moteurs puissants, même si la présence au
stage était obligée (« conseillée ») pour le maintien de l’agrément. La découverte d’éléments
de connaissance, par exemple avec des textes de loi peu faciles à lire et à comprendre qui
ont été bien expliqués, et les échanges dans le groupe, ont été appréciés.
Certains accueillants ont perçu avec les témoignages une grande différence entre l’accueil de
personnes âgées et de personnes handicapées ; ils s’orienteraient davantage vers les
personnes âgées. Tous restent très motivés, malgré les aléas de la vie et les habitudes
prises : si certains parlent ouvertement de prendre leur retraite, « des accueillis sont
également prêts à les suivre dans cette perspective. »
FNCIVAM Témoignages et réflexions pour l’accueil familial social de personnes âgées et d’adultes
handicapes en milieu rural
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6.24 Quels effets pour l’avenir de l’accueil familial
Cette formation a renforcé et conforté l‘intérêt pour exercer cette activité. Certains n’ont pas
trouvé toutes les solutions pratiques recherchées pour le quotidien, voire rien appris de
nouveau.
S’il y a des contraintes dans l’exercice même du métier, « on apprécie ce qu’on est, d’être
apparemment normal et d’aimer l‘autre tel qu’il est. » Pour quelques uns, rester le plus
longtemps possible avec l‘accueilli est un souhait. Ils espèrent que cela crée une continuité
qui puisse servir au bien-être de la personne accueillie, qui peut-être n’avait plus d‘espoir.
Cette activité est un enrichissement moral et produit de l‘épanouissement ; il faut donner le
meilleur de soi-même pour pouvoir donner et recevoir.
Les échanges en cours de formation, agréables, sont jugés positifs et ont fait du bien aux
accueillants. Il serait toutefois souhaitable que cette formation ait lieu en début d’activité
pour aider à améliorer les relations avec les accueillis. Des compléments avec des
interventions d’infirmiers, de médecins et même de familles pourraient être utiles aux
accueillants. Une formation continue mensuelle serait intéressante. Une vraie formation
devrait s’imposer avant d’obtenir l’agrément.
La reconnaissance sociale du métier d’accueillant familial est loin d’être acquise. Beaucoup
ignorent l’existence des familles d’accueil : « la gynécologue m’a demandé qui j’étais pour
vouloir accompagner la personne que j’accueillais. Elle pensait que les familles d‘accueil
n’existaient que pour les enfants. » C’est surtout au niveau des droits salariaux que la
question est cruciale : « on n’est pas considéré comme un métier, la question des congés
payés reste encore peu claire et il n’y a pas de droit aux Assedic. Si un mois est payé
intégralement en cas de rupture, encore faut-il que cette clause soit écrite dans le contrat. »
Les salaires restent néanmoins bas et ouvrent peu de droit pour la retraite car seulement 32
heures 50 sont comptabilisées mensuellement, soit un maximum de 100 heures pour trois
personnes accueillies.1
Une idée nouvelle s’est exprimée : créer une nouvelle association de familles d’accueil afin
de faire davantage bouger les choses : « il s’agit d’aider à revoir le statut de l’accueillant
familial, revoir aussi de façon plus fluide la question des congés et des remplacements
pendant les vacances, de poser la question du chômage auquel l‘accueillant n’a pas droit. »
Pour cela, la rencontre de tous les groupes d’accueillants au moins une fois par an serait
souhaitable afin de partager les expériences, de motiver les familles à améliorer leurs
pratiques et faire en sorte que d’autres puissent prendre la relève.
6.3 Eléments de conclusion de l‘équipe éducative
Le métier d’accueillant familial, s’il est en devenir, a déjà une longue histoire. L’expérience
professionnelle des accueillants, leurs connaissances des enjeux du quotidien acquises tant
par les jours et les heures accumulés, donnent lieu à une richesse de savoirs. Ces savoirs se
partagent entre savoirs intellectuels et savoirs d’expérience déjà acquis par les accueillants:
l’avenir est à la conjugaison de ces deux types de savoirs. Sans les familles d’accueil, bien
des personnes seraient enfermées, certaines parfois attachées, dans les institutions. Ce sont
rarement les institutions qui ont fait changer les conceptions, mais des éléments extérieurs.
Quand de surcroît, certaines équipes, œuvrant en institution, se délivrent de situations
lourdes sur les familles d’accueil, sans les accompagner, ni les valoriser, cette forme d’usage
de ce métier devient impensable et insupportable.
1
La parution des décrets de la loi Dalo en août 2010 a toutefois apporté des améliorations au statut d’accueillant
familial (voir : http://www.uniopss.asso.fr/section/unio_detail.html?publicationId=p741282038636756)
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C’est un métier extraordinaire où le fait de donner et de recevoir permet de tenir le coup. La
joie de vivre, fortement présente, est enrichissante quand elle est partagée. Ce métier reste
plus difficile qu’il ne paraît et légitime les conditions de retraite : « à la retraite, je ne mettrai
pas mon client à la porte, mais le jour où il partira, je le laisserai partir. » En conclusion, il
est important pour les accueillants d’être davantage reconnus et écoutés, ce qui n’est pas la
règle aujourd’hui. C’est un métier à part entière qu’il faut faire évoluer, surtout si, face aux
difficultés actuelles, il doit être poursuivi par de futurs jeunes accueillants.
L’équipe a fonctionné avec les accueillants en s’adressant d’abord à des accueillants qui ne
sont pas des débutants, mais des professionnels. Ce stage n’a pas été conçu pour être un
stage de démarrage dans le métier, mais a recherché tous les moyens de favoriser les
rencontres et les échanges entre professionnels. Les pratiques de l‘équipe ont également été
enrichies. Ainsi, les accueillants en faisant le même métier, dans des endroits différents,
représentent une force dont la société a besoin. Au-delà de la question financière, l’accueil
d’une personne handicapée, autiste par exemple, ou âgée est une chance pour celle-ci. Des
enquêtes ont montré qu’elles s’en sortent mieux que si elles étaient restées en institution.
Certaines auront « le bonheur de mourir dans les bras de personnes qu’elles aiment ». Ce
métier dur, est important pour la société et le regroupement des accueillants peut leur
permettre de trouver les moyens de se faire reconnaître et de valoriser leurs pratiques.
Atelier de photolangage
FNCIVAM Témoignages et réflexions pour l’accueil familial social de personnes âgées et d’adultes
handicapes en milieu rural
41
CONCLUSION
Trois points sont à retenir. D’abord, ce travail d’accueillant familial est compliqué et nécessite
un savoir d’expert : « cela nous touche, car on n’en sort pas indifférent ; le monde n’est plus
comme on le voyait, après avoir connu ces hommes et ces femmes qui nous bouffent de
l‘intérieur et qu’on aime bien. » D’où l’impossibilité pour la société à travers ses institutions,
de se débarrasser de situations de personnes difficiles en les confiant aux familles d’accueil,
qui ensuite restent trop longtemps livrées à elles-mêmes.
Un second point plus positif pour notre société, est qu’une prise de conscience progressive
se fait jour : tous les membres d‘une société ont des droits, même les « plus mal fichus ».
C’est un processus de civilisation.
Enfin, accueillir une personne handicapée ou une personne âgée dans une famille ne
mobilise pas simplement l’aidant et l’accueilli. Cette action agit sur toute la famille qui va
ainsi être modifiée. Le devoir de l’accueillant est d’être attentif à lui-même et aux siens pour
que chacun ne soit pas trop détérioré par la présence de cette personne à laquelle
l’accueillant veut du bien.
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handicapes en milieu rural
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Annexes
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PROGRAMME DES JOURNEES DE FORMATION
Journée n°1 : ÊTRE FAMILLE D’ACCUEIL AUJOURD’HUI
HORAIRES
9h00
9h30
CONTENUS
Accueil des participants
Introduction à la formation :
- pourquoi ce stage , comment est-il conçu
- pourquoi les Civam comme intervenants
- les outils prévus : journal d’atelier, lettre d’info
Tour de table de présentation rapide
OUTILS / AUTRES
Etiquette nom
(prévoir
de
remettre un doc
de
présentation
des Civam)
(nom, prénom, lieu, accueil depuis quand, PA-PH, combien)
10h00
Photolangage pour ouvrir la session :
« Choisissez une photo et, à travers elle, parlez-nous de l’accueil tel que
vous le pratiquez »
« Choisissez une 2ème photo expliquant comment les personnes que vous
accueillez chez vous peuvent vivre, se représenter l’accueil que vous leur
offrez »
Photos
Paper board
Marqueurs
Déroulement :
11h00
11h05
11h15
12h25
12h30
13h30
13h45
15h15
15h30
16h30
5’ de choix des photos
55’ d’expression des participants (sans donner d’avis, seulement des
relances + noter au tableau ce qui est dit)
Petite synthèse : points convergents, groupes d’idées, …
Pause 10’
Apport sociologique
- historique de la famille d’accueil et évolutions, regard spécifique sur la
Nièvre
- ressources et limites de la famille d’accueil, la notion d’hospitalité
5’ de reprise individuelle :
questions, incompréhension, mots clés, notions à retenir, pour la reprise
de l’AM
Repas tiré des sacs
Reprise, questions sur les points du matin
Intervention :
Ce que dit la loi
- aspects règlementaires de l’accueil
- conséquences pratiques (congés, salaires, engagements, durées, …)
- le rôle du CG : contrôle mais aussi suivi
Questions / Réponses
Pause
Intervention et échanges
Intro sur les mutations (familles d’accueil, contexte, besoins d’hier et
d’aujourd’hui…)
1) Les relations avec les familles naturelles
(culpabilités des aidants naturels, relations à instaurer, outils…)
2) La mise en réseau des accueillants avec d’autres acteurs (CLIC, CG,
Adapei, …) et les possibilités de diversifier ses accueils
L’exemple de Semailles
3) Les relations avec les institutions
Questionner les participants sur leurs interlocuteurs. Qui est qui ? Qui fait
quoi ?
Fin de la 1ère journée de formation
Remise du classeur qui sera complété au fur et à mesure (fiches
techniques, journal d’atelier, documentation, …)
Grille
Fiches
récapitulatives à
produire d’après
le guide
Fiches « Qui est
qui / qui fait
quoi »
Classeur
intercalaires
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handicapes en milieu rural
45
+
Journée n°2 : VIVRE SA VIEILLESSE, UNE AFFAIRE QUI CONCERNE CHACUN
HORAIRES
9h00
9h30
10h00
10h10
11h15
12h15
12h30
13h30
13h45
14h00
14h30
15h00
CONTENUS
Accueil des participants et démarrage
Avis sur le journal d’atelier reçu 2 à 3 semaines avant la session
« météo » : chacun dit ce qui s’est passé pour lui/elle depuis la dernière
fois, en lien avec l’accueil familial
Introduction à la journée :
- les évolutions démographiques / quelques données statistiques
- qu’entend-on par « grand âge » ?
- contexte, changements familiaux et nouvelles conditions de vie
des séniors
Pause 10’
Intervention : du tout domicile à la médicalisation
Intervention : les psychotropes, la médicalisation pour résoudre les
problèmes sociaux
Grille de questionnement individuelle sur les interventions
Repas tiré des sacs ou traiteur ESAT
Retour / questions
Diffusion du film CCMSA (témoignage accueillante)
(ou film Alma France)
OUTILS / AUTRES
(Remettre
l’étiquette nom)
Film
+ vidéoprojecteur
+ ordinateur
Ateliers suite au film :
N°1 : Quelle place pour les enfants, le couple quand on est famille
d’accueil ?
N°2 : Quelle place pour la/les personnes âgées accueillies ?
N°3 : Quelles sont les spécificités de l’accueil familial ?
Introduction au temps d’échanges / mise en perspective
Les spécificités de l’accueil familial comme autre mode d’hébergement
pour les PA
(entrée en institution > 84 ans, en quoi l’accueil familial est une
alternative, les nouveaux métiers en lien avec les territoires, …)
Temps d’échanges sur les aspects pratiques de la vie en commun Intro par témoin / accueillant praticien
Comment chacun peut-il trouver sa place : choix et conduites
alimentaires, sorties et déplacements, vie culturelle et spirituelle, tenue
vestimentaire, relations intimes, libre disposition des biens et de l’argent…
Les choix de la vie quotidienne et leurs impacts sur l’autonomie des PA,
leur bien-être et l’équilibre des familles d’accueil.
16h20
Synthèse et fin de la 2ème journée
Remise du guide « Mettre en place l’accueil de PA/PH en milieu rural »
Prévoir les guides
à remettre
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handicapes en milieu rural
46
Journée n°3 : LA SITUATION DE HANDICAP ET DE DEPENDANCE
HORAIRES
9h00
9h30
10h00
11h00
11h10
11h30
12h20
12h30
13h30
14h00
14h30
16h20
CONTENUS
Accueil des participants et démarrage
Avis sur le journal d’atelier reçu 2 à 3 semaines avant la session
« météo »
Questionnement introductif :
A quel(s) type(s) de handicap ou de dépendance avez-vous été confrontés
jusque-là ?
Intervention :
La population handicapée en France
- l’accueil de PH est plus ancré que celui des PA
- évolution des droits des handicapés
- évolution des considérations vis-à-vis des handicapés (> 60 ans =
PA + que PH)
- les vacances des PH et conséquences
Pause 10’
Intervention :
Place des handicapés dans l’accueil familial
Témoignage d’expériences
Cas des malades d’Alzheimer
Questions d’éthique, notions de bientraitance / maltraitance
Point / Grille de questionnement individuelle sur les interventions
Repas tiré des sacs ou traiteur ESAT
Retour / questions
Intervention :
Comment sont considérés les handicapés aujourd’hui ?
Qu’est-ce que ça apporte à une PH d’être accueillie dans une famille ?
Et qu’est-ce que ça apporte à la famille d’accueil ?
Comment prendre soin d’un corps fragile
… quand on n’est pas la famille naturelle ?
Synthèse et fin de la 3ème journée
OUTILS / AUTRES
(Remettre
l’étiquette nom)
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handicapes en milieu rural
47
Journée n°4 : GESTES DE PREMIERS SECOURS
HORAIRES
9h00
9h30
12h30
13h30
16h15
CONTENUS
Accueil des participants et démarrage
Avis sur le journal d’atelier reçu 2 à 3 semaines avant la session
« météo »
OUTILS / AUTRES
(Remettre
l’étiquette nom)
Initiation aux 1ers secours
Repas tiré des sacs ou traiteur ESAT
Initiation aux 1ers secours
Bilan de la journée avec les participants
Journée n°5 : VIVRE ET FAIRE VIVRE UNE RELATION D’ACCUEIL
HORAIRES
9h00
9h30
10h50
11h00
11h45
12h20
12h30
13h30
14h00
CONTENUS
Accueil des participants et démarrage
Avis sur le journal d’atelier reçu 2 à 3 semaines avant la session
« météo »
Intervention (aide-soignante)
- la relation d’accueil, l’approche du corps
- comment prendre soin de la PA / PH ?
Pause 10’
Suite de l’intervention : les aides techniques à disposition / les
aménagements possibles
16h30
Intervention : aspects anthropologiques / relations d’accueil
Point / Grille de questionnement individuelle sur les interventions
Repas tiré des sacs ou traiteur ESAT
Retour / questions
Intervention :
Le risque facteur de vie
Le risque d’épuisement des familles d’accueil / témoignage d’expériences
Temps d’échanges :
Pérenniser le métier en le faisant évoluer en permanence
La mise en réseau pour trouver des solutions collectives
Evaluation des 5 journées de formation par les participants
17h00
Fin de la 5ème et dernière journée de formation
15h00
OUTILS / AUTRES
Aides techniques
à apporter selon
besoins
Prévoir les grilles
d’évaluation
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