La probable sortie de dépression Le potentiel novateur
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La probable sortie de dépression Le potentiel novateur
mardi 30 octobre 2012 PAGE 7 SUISSE La probable sortie de dépression JEUX VIDÉO. Le secteur est en constante réorganisation avec l’arrivée de nouvelles technologies. Le point sur le marché suisse. ARNAUD COGNE Alors que la Paris Games Week s’ouvre aujourd’hui dans la capitale française, une mutation profonde du secteur est en train de se produire. Les éditeurs ont toujours plus de difficultés à assurer leur rentabilité. «Il faut savoir que les sociétés qui développent ces jeux ne touchent que 12 dollars par unité vendue», explique Jim Sordet, directeur exécutif de Community Network, plateforme de centralisation des sites d’amateurs de jeux vidéos basée à Neuchâtel. Cette plateforme sert d’intermédiaire entre les joueurs et Electronic Arts (EA). «Nous travaillons actuellement à mettre en place un système identique avec Ubisoft, précise Jim Sordet. Actuellement nous sommes un interlocuteur d’EA dans les pays francophones, et notre but est entre autres d’analyser au mieux pourquoi un jeu aura du succès ou non au sein de la communauté de joueurs.» Aujourd’hui, un jeu qui connait peu de succès peut à lui seul provoquer d’importantes difficultés financières. «C’est le cas de Rock Star Games, dont l’adaptation de Max Payne 3 n’a pas convaincu.» Les poids lourds du secteur, tel qu’EA ou Ubisoft, sont cependant quelque peu protégés par la récurrence de leurs titres phares, comme Fifa. «Les évolutions d’une version à l’autre sont relatives, mais disposent d’une importante communauté et les joueurs continuent d’acquérir massivement ces nouveaux opus, ce qui plait visiblement.» Dès lors, l’accent est mis depuis quelques années à la vente directe sur internet. Il y a quinze ans encore, les jeux vidéo étaient vendus dans des boites de la taille d’une page A4. Aujourd’hui, le format ne permet plus d’avoir les nombreux manuels, devenus inutiles par la présence sur internet des informations nécessaires. «Cette vente directe par internet permettra dans le futur aux consommateurs de bénéficier de prix meilleur marché et aux éditeurs de voir leur résultats s’améliorer. Il n’en ressortira que des jeux de meilleures qualités et mieux développés.» Jim Sordet es- RHEINMETALL AIR: suppression de 80 postes Face à la baisse des budgets nationaux consacrés à la défense dans plusieurs pays européens et au franc fort, l’entreprise Rheinmetall Air Defence va biffer 80 postes à Zurich. Ce chiffre comprend 40 licenciements, le reste des suppressions s’effectuera à travers les départs naturels. Cette solution de compromis a pu être trouvée durant la phase de consultation entre partenaires sociaux, relève lundi le syndicat Employés Suisse. Celui-ci se réjouit qu’un plan social ait pu être mis en place. Employés Suisse souligne en outre que la décision de supprimer des postes n’est pas une surprise au vu de l’évolution du marché. Le syndicat se dit soulagé que les suppressions d’emplois ne soient pas plus nombreuses, ce qui permettra de conserver le savoir-faire. Les 80 suppressions de postes correspondent environ à 10% des effectifs, indique Employés Suisse à l’ats. Le site de Zurich compte un peu plus de 770 collaborateurs, précise pour sa part le groupe allemand Rheinmetall, la société mère de Rheinmetall Air Defence. KONTRON: fermeture de la filiale Luterbach En phase de restructuration, le groupe informatique allemand Kontron ferme son site soleurois de Luterbach. Les 56 salariés et les 5 apprentis de la société Kontron Compact Computers seront licenciés. La mise en oeuvre d’un éventuel plan social fait encore l’objet de discussions. Une solution est également recherchée avec les autorités cantonales pour les apprentis, a annoncé lundi l’entreprise de Luterbach. Celle-ci avait indiqué à fin septembre étudier la question d’une fermeture de son site soleurois, lequel employait encore 100 collaborateurs l’an passé. A l’issue de la procédure de consultation, il est apparu qu’aucune des solutions évoquées n’était réalisable ou ne pouvait contribuer à une amélioration durable de la situation économique de l’entreprise. Fondée en 1992 sous la raison sociale Digital Logic, la société soleuroise avait été reprise en 2009 par Kontron, un fabricant de petits ordinateurs pour l’industrie basé à Eching, dans la région munichoise. TRIDONIC: importante restructuration Nouveau coup dur pour l’emploi dans le canton de Glaris. Une semaine après l’annonce de la suppression de 80 postes sur le site d’Electrolux à Schwanden, Tridonic, une entreprise active dans les techniques d’éclairage, va licencier pour la fin du mois 30 de ses 219 employés à Ennenda. Les collaborateurs concernés recevront une prime de départ, alors que les négociations sur un plan social sont en cours, a indiqué lundi Tridonic, confirmant une information publiée dans l’édition glaronnaise du journal dominical «Südostschweiz am Sonntag». La filiale du groupe autrichien Zumtobel explique la mesure par le changement technologique. En raison du remplacement des produits conventionnels par la nouvelle technologie des diodes électroluminescente (LED), Tridonic a vu son chiffre d’affaires se réduire fortement. L’entreprise, qui produit des composants et des systèmes de commandes pour l’éclairage, doit désormais réduire ses coûts et réorienter sa production, notamment sur les petites séries et les produits spéciaux.Etabli à Dorbirn, dans la région voisine de la Suisse du Vorarlberg, le groupe Zumtobel emploie au total quelque 7500 collaborateurs. Au cours de son exercice 2011/12, l’entreprise cotée à la Bourse de Vienne a dégagé un chiffre d’affaires de 1,28 milliard d’euros (1,55 milliard de francs) et un bénéfice net de 16 millions d’euros. time à cinq ans la durée durant laquelle il sera encore possible de trouver des jeux en magasins. «Ce n’est pas un hasard si le groupe PPR a récemment décidé de se séparer de la Fnac: le livre est toujours plus menacé avec l’apparition du Kindle d’Amazon et la tendance pour les jeux vidéos s’oriente vers la vente via internet.» Une tendance que confirme le vice-président de la Swiss Interactive Entertainment Association, Nicolas Akladios: «Il est évident que le nombre de jeux disponibles en magasin va fortement diminuer, mais il ne disparaitra pas totalement. A l’image des DVD, dont la fin était prévue avec la télévision à la demande, il y aura toujours des passionnés qui apprécieront le fait d’avoir des jeux alignés sur leurs étagères.» Autre acteur devenu important, les smartphones. Les utilisateurs passent environ 5% de leur temps de jeu total sur leur téléphone, estime Nicolas Akladios. Mais ce développement a permis l’arrivée de nouveaux développeurs de jeu, et encourage de nombreuses person- nes à opter pour davantage de confort en faisant l’acquisition d’une console de salon. Le profil type du joueur a également évolué. Le temps du «hardcore gamer» enfermé dans sa cave à jouer 24h/24 semble révolu. La tendance est maintenant au joueur occasionnel et la gent féminine est de plus en plus représentée. «Des jeux comme les Sims ont maintenant une forte connotation féminine, alors que ce n’était pas le but recherché à son lancement, explique Jim Sordet. Cette tendance se confirme également au sujet des jeux plus «masculins», tels que Battlefield. Il n’existe plus réellement de barrière entre hommes et femmes concernant les jeux vidéos.» Au niveau des chiffres, le marché suisse se situe dans la moyenne européenne. Les résultats 2011 présenté en juin montraient un avantage certain pour les consoles vis-à-vis des PC. «Ces chiffres ne prenaient pas en compte les ventes sur internet, et l’impact du piratage, très fréquent pour les jeux PC», précise Nicolas Akladios. La légère récession amorcée en 2011 s’explique par la durée de vie des consoles, toujours plus importante. Pour preuve, Nintendo présentera le 30 novembre prochain la Wii U, dernière évolution du fabricant japonais. La première version datait de 2006. Il en va de même pour les Xbox de Microsoft et PlayStation de Sony, dont les nouvelles consoles sont attendues pour 2013, soit une période d’attente de six ans. «Nous approchons de la fin d’un cycle, et les deux mois à venir seront évidemment les plus importants en terme de ventes, prévient Nicolas Akladios. Les indicateurs dont nous disposons sont plutôt positifs pour 2012, même s’il faudra attendre le mois de janvier pour avoir une idée plus précise.» LE LÉGER RECUL AMORCÉ EN 2011 S’EXPLIQUE PAR LA DURÉE DE VIE TOUJOURS PLUS IMPORTANTE DES CONSOLES. Le potentiel novateur Le succès de l’open innovation en Suisse reflète la volonté de repousser les limites. HENRI SCHWAMM* Dans les années quatre-vingt déjà, Bill Joy, cofondateur de Sun Microsystems, constatait qu’il y avait toujours plus de têtes bien faites à l’extérieur de son entreprise qu’à l’intérieur. Et que par conséquent les entreprises pouvaient profiter du savoir déjà existant en dehors de leur propre organisation. Lorsqu’en 2003, Henry Chesbrough, professeur à l’Université de Californie, Berkley, publia son livre Open Innovation: The New Imperative for Creating and Profiting from Technology, il ne s’attendait pas à ce que peu de temps après plus de 9000 publications académiques auraient repris et développé son concept. Son idée initiale était pourtant simple et reposait sur deux observations: premièrement, les idées restent trop souvent enfermées dans l’entreprise comme dans un silo et ne sont pas commercialisées de façon optimale; deuxièmement, dans les organisations, on cherche souvent les solutions aux problèmes qui se posent seulement à l’intérieur de leurs propres limites et on ignore les débuts de réponse, les technologies et le savoir existant en dehors de l’organisation. La solution consiste pour les entreprises à laisser passer les idées dans les deux sens - à l’entrée et à la sortie. Ce qui implique que les collaborateurs revoient leur façon de penser et que le management encourage cette nouvelle ouverture d’esprit. Aucune entreprise au monde ne peut prétendre employer la majorité de toutes les têtes bien faites dans un domaine dé- terminé. Bien que ce soit l’évidence, plusieurs enquêtes montrent que dans de nombreuses entreprises, les responsables n’en sont pas conscients. À l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPF), Georg von Krogh, Sebastian Spaeth et Spyridon Arvanitis s’intéressent au concept d’open innovation et cherchent à savoir comment les entreprises suisses l’appliquent. C’est-à-dire utilisent des moyens concrets à cette fin: accords de licence, spin-offs, joint ventures, technology scouting (détection de technologies). Beaucoup de ces pratiques sont connues depuis longtemps. Ce qui est nouveau, c’est l’attention plus soute- voir extérieur ou de générer du savoir en commun. Les entreprises innovantes, celles qui créent de nouveaux produits, utilisent déjà relativement bien le savoir extérieur. Sur 14 sources possibles de savoir extérieur, les entreprises innovantes suisses en ont utilisé en moyenne 10. La nature précise des accords passés diffère beaucoup d’une entreprise à l’autre. D’une manière générale, il semble acquis que les Suisses ne tiennent pas à réinventer la roue et ont volontiers recours à du savoir extérieur existant. On constate aussi que les obstacles à l’innovation (manque de moyens financiers, réglementations éta- LES ENTREPRISES SUISSES UTILISANT DU SAVOIR EXTÉRIEUR SONT EN RÈGLE GÉNÉRALE PLUS INNOVANTES QUE LES AUTRES. nue accordée à l’utilité du savoir extérieur et à la nécessité d’en persuader l’organisation dans son ensemble. Ce sont aussi les facteurs qui permettent l’exploitation optimale de ce savoir extérieur, à savoir l’infrastructure technologique efficace et abordable (financièrement), les architectures technologiques modulaires, les bases de données accessibles librement. L’objectif poursuivi étant la commercialisation la plus rapide possible des innovations ainsi repérées. Comment se situent les entreprises suisses dans ce contexte? Le Konjunkturforschungsstelle (KOF) de l’EPF dispose de plus de 5000 réponses d’entreprises interrogées entre 2006 et 2008. 23% d’entre elles ont passé des accords de coopération avec des clients, fournisseurs, universités ou entreprises (partenaires ou concurrentes) dans le but d’accéder à du sa- tiques préjudiciables à la recherche) obligent les entreprises à élargir leur horizon de quête de partenaires. Les entreprises suisses utilisant du savoir extérieur sont en règle générale plus innovantes que les autres. Pour autant, leur tâche n’est pas simple. Il leur faut être capables d’identifier avec précision les domaines où le savoir extérieur peut se révéler utile. Et où il est économiquement pertinent: détecter ce savoir extérieur prend du temps mais peut aussi en faire gagner et réduire les coûts ; une analyse coût-bénéfice s’impose. Enfin, les entreprises à la recherche de savoir extérieur doivent opérer le bon choix parmi les sources de savoir disponibles (universités, clients, fournisseurs, concurrents ou partenaires). * Université de Genève PHILANTHROPIE: Maison des fondations à Genève Lundi prochain 5 novembre sera inauguré la Maison des Fondations en présence de nombreux invités. Créée par la Fondation genevoise Louis-Jeantet, en collaboration avec SwissFoundations à Zurich, l’association des fondations donatrices suisses, la Maison des Fondations a pour objectif de devenir un lieu privilégié de rencontres et de manifestions pour accueillir les initiatives du mécénat romand. David Hiler, Conseiller d’Etat de la République et canton de Genève, chargé du Département des finances, Gerry Salole, chief executive du Centre Européen des Fondations, et Karin Jestin, secrétaire générale de la Fondation Lombard Odier et membre du Comité directeur de Swissfoundations, participeront à une Table ronde sur l’avenir du mécénat – chances et les défis de la Suisse comme Terre de fondations. En parallèle à l’événement sera publié un Tiré à part de la revue Schweizer Monat sur la question «Pour ses fondations, la Suisse a-t-elle besoin d’une stratégie?» ENTREPRISES: le secteur cleantech craint pour son avenir Le gotha suisse et européen des énergies propres s’est retrouvé hier à Genève. Selon une enquête du Future Cleantech Forum, 64% des sociétés suisses et européennes dans le domaine des cleantech craignent pour leur avenir en raison de problèmes liés aux conditions-cadres et aux subventions. Sous la houlette de son directeur André Schneider, ancien directeur général du Forum économique de Davos (WEF), le Future Cleantech Forum s’est ouvert à Palexpo pour trois jours de débats sur l’avenir des cleantech. Plus de 80 orateurs suisses et internationaux vont traiter des stratégies pour le déploiement des énergies renouvelables. Des experts tels que Raphael Domjan, fondateur de Planet Solar, Markus Wråke, responsable «Energy Technology Perspectives» à l’Agence Internationale de l’Energie, Terry Tamminen, conseiller stratégique de la Fondation R-20 créée par l’ancien Gouverneur de Californie Arnold Schwarzenegger, Are Borgesen, directeur de Tidal Sails en Norvège, ou encore Philip Moss, fondateur de Mana Ventures vont notamment intervenir d’ici à mercredi. JO 2022: mauvais signal des partis politiques A l’exception du PBD, aucun des partis politiques suisses n’est prêt à accorder un chèque en blanc d’un milliard de francs aux Jeux Olympiques d’hiver 2022 aux Grisons. Ce montant doit couvrir un éventuel déficit de la manifestation. Mais les partis veulent en savoir plus. Le signal ne peut être plus mauvais. Certes, le Parlement ne devrait se prononcer qu’à l’été 2013 sur ce crédit d’un milliard, auquel il faut ajouter 30 millions pour financer la contribution de la Confédération à la candidature grisonne. Mais le Grand Conseil grison, en décembre prochain, et les citoyens du canton et de St-Moritz en mars 2013, ne manqueront pas de tenir compte dans leur vote des chances que ce crédit soit accepté au Parlement. Sans lui, le projet n’est en effet pas viable.