Fiche pédagogique Se battre comme des soldats, mourir comme

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Fiche pédagogique Se battre comme des soldats, mourir comme
Fiche pédagogique
Se battre comme des soldats, mourir comme des enfants
Carte d’identité
Se battre comme des soldats, mourir comme des enfants
Canada, 2012
Documentaire, 83 minutes
Réalisateur : Patrick Reed
Sélection officielle de l’édition 2012 du TIFF (Toronto international film festival).
Synopsis
Le film pose un regard inédit sur les enfants soldats, puisqu’il se place du point de vue de quelqu’un qui
les a eus dans son viseur – et a été dans le leur – : le Général Dallaire qui commanda la force de
maintien de l’ordre de l’ONU au Rwanda en 1994.
L’ancien militaire consacre sa retraite à la lutte contre l’enlèvement et l’enrôlement d’enfants soldats.
Ce documentaire le suit pas à pas dans le voyage qu’il entreprend sur les lignes de front des groupes
armés, notamment en République démocratique du Congo et au Sud-Soudan, à la rencontre des enfants
soldats démobilisés, de leurs victimes, mais aussi des chefs de guerre eux-mêmes et des ONG qui
œuvrent sur le terrain.
Un film qui ne laisse pas de place à l’idéalisme mais soulève les questions essentielles.
Festival Enfances dans le monde. 20, 21 et 22 novembre 2013. www.enfancesdanslemonde.com
Organisé par le Bureau international catholique de l’enfance, www.bice.org,
au cinéma des 7 Parnassiens, 98, boulevard du Montparnasse, 75014 Paris. www.parnassiens.com
I.
Préparer la projection du film
Thématiques abordées
Le droit d’être protégé de la guerre
Le droit d’être protégé contre toute forme de violence
Repères
Chiffres
On estime que 250 000 à 300 000 enfants, filles et garçons, sont enrôlés à ce jour dans plus de 30
conflits dans le monde. (Rapport ONU, 2007)
Le génocide rwandais, évoqué principalement au début du film, a fait au moins 800 000 morts
Tutsis, au printemps 1994.
Eléments de contexte
Biographie : le général canadien Roméo Dallaire commandait la force de maintien de l’ordre de
l’ONU durant les quelques mois du génocide rwandais. Ses demandes de troupes et de moyens
matériels supplémentaires restant sans réponse, il se retrouva condamné par sa hiérarchie à
assister impuissant au génocide des Tutsis. Depuis sa retraite, il engage toutes ses forces pour
éviter l’enrôlement d’enfants soldats.
La République démocratique du Congo, où se rend le général Dallaire au cours du documentaire,
est le théâtre de multiples conflits. Des dizaines de groupes armés se battent, principalement dans
l’est et le nord-est du pays (Kivu), pour réclamer le départ du président ou prendre le pouvoir sur
les territoires qu’ils revendiquent. L’armée de résistance du Seigneur (LRA), citée dans le
documentaire par l’évocation de son chef Kony, est l’un de ces groupes armés.
Grâce aux opérations de démobilisation menées depuis début 2013 par l’ONU, plus de 2 500
enfants soldats de RDC ont rendu les armes.
Ce qu’en disent les textes internationaux
Le droit d’être protégé de la guerre et des conflits est inscrit dans l’article 38 de la convention
relative aux droits de l’enfant adoptée en 1989 à l’ONU :
1) « Les Etats parties s'engagent à respecter et à faire respecter les règles du droit humanitaire
international qui leur sont applicables en cas de conflit armé et dont la protection s'étend aux
enfants.
2) Les Etats parties prennent toutes les mesures possibles dans la pratique pour veiller à ce que
les personnes n'ayant pas atteint l'âge de quinze ans ne participent pas directement aux
hostilités.
3) Les Etats parties s'abstiennent d'enrôler dans leurs forces armées toute personne n'ayant pas
atteint l'âge de quinze ans. Lorsqu'ils incorporent des personnes de plus de quinze ans mais de
moins de dix-huit ans, les Etats parties s'efforcent d'enrôler en priorité les plus âgées.
4) Conformément à l'obligation qui leur incombe en vertu du droit humanitaire international de
protéger la population civile en cas de conflit armé, les Etats parties prennent toutes les
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mesures possibles dans la pratique pour que les enfants qui sont touchés par un conflit armé
bénéficient d'une protection et de soins. »
1)
2)
Le droit d’être protégé contre toute forme de violence est inscrit dans l’article 19 de la convention
relative aux droits de l’enfant :
« Les Etats parties prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives
appropriées pour protéger l'enfant contre toute forme de violence, d'atteinte ou de brutalités
physiques ou mentales, d'abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d'exploitation, y
compris la violence sexuelle, pendant qu'il est sous la garde de ses parents ou de l'un d'eux, de son
ou ses représentants légaux ou de toute autre personne à qui il est confié.
Ces mesures de protection doivent comprendre, selon qu'il conviendra, des procédures efficaces
pour l'établissement de programmes sociaux visant à fournir l'appui nécessaire à l'enfant et à ceux
à qui il est confié, ainsi que pour d'autres formes de prévention, et aux fins d'identification, de
rapport, de renvoi, d'enquête, de traitement et de suivi pour les cas de mauvais traitements de
l'enfant décrits ci-dessus, et comprendre également, selon qu'il conviendra, des procédures
d'intervention judiciaire. »
Un protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés est entré en
vigueur en 2002. Il modifie la convention relative aux droits de l’enfant et relève notamment de 15
à 18 ans l’âge minimum d’enrôlement dans des groupes armés.
Se battre dans un conflit armé est assimilé à l’une des pires formes de travail des enfants définies
par l’Organisation internationale du travail (accord 182 de l’OIT).
Objectifs de l’ONU : La représentante spéciale du secrétaire général de l’ONU pour le sort des
enfants en temps de conflit armé a lancé en août 2013 une initiative mondiale : mettre fin, d’ici
2016, au recrutement et à l’utilisation d’enfants par les forces armées gouvernementales
impliquées dans un conflit. Une fois cet objectif atteint, les Etats membres de l’ONU pourront se
concentrer sur les moyens d’empêcher le recrutement et l’utilisation d’enfants par des groupes
armés non étatiques.
Enjeux
Quelques pistes pour appréhender la complexité de la situation :
En zone de conflit, la place la plus sûre pour des enfants est souvent celle du côté du fusil.
Dans certaines régions, mettre fin à la guerre suppose d’anéantir les groupes armés qui
entretiennent le conflit. Placer ces groupes armés hors d’état de nuire signifierait se résoudre à
tuer des soldats, dont beaucoup d’enfants soldats.
Lorsque les moyens de subsistances manquent, a fortiori lorsque c’est le cas depuis des mois
voire des années, le groupe armé local apparaît salvateur : nourriture, logement, salaire éventuel.
Prendre les armes offre la perspective de venger sa famille lorsque des parents proches ont été
tués par des groupes armés.
Devenir enfant soldat permet de développer une certaine fierté de savoir tirer, donne confiance
en soi lorsque l’enfant soldat se voit confier des responsabilités, notamment de commandement.
La formation militaire est parfois la seule voie possible pour accéder à un minimum d’éducation.
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L’absence d’encadrement au sein de la famille, ou l’éducation déficiente donnée par les parents
constituent également des facteurs de risque d’enrôlement dans des groupes armés.
Certaines cultures glorifient les guerriers, combattants et martyrs.
Ressources à exploiter
Site internet du film.
Site du bureau du représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour les enfants et
les conflits armés.
Dossier de la croix rouge belge sur la thématique des enfants-soldats, à destination des enseignants
du secondaire.
Site français de l’ONG Child soldiers international.
Rapport 2012-2013 de la représentante spécial du secrétaire général de l’ONU pour le sort des
enfants en temps de conflit armé.
PIGNOT, Manon. L’enfant soldat, XIXe-XXIe siècle. Armand Colin, 2012.
CHAPLEAU, Philippe. Enfants-soldats, victimes ou criminels de guerre ? Editions du Rocher, 2007.
Comprendre le phénomène des enfants soldats, outil pédagogique de l’UNICEF.
Les droits de l’enfant racontés aux enfants, ouvrage collectif du BICE, Paris, 2005.
II.
Vérifier la bonne compréhension du film
L’enseignant pourra interroger ses élèves en utilisant les questions ci-dessous.
Digérer le film
1) Quelles images d’enfants soldats vous ont le plus marqués ? Pourquoi ?
2) Dans ce documentaire, quelles images d’enfants évoquent la banalité du port des armes et de la
violence ?
3) Au début du documentaire, le général Dallaire participe à un plateau télévisé. Une journaliste
estime que « ces enfants ont perdu leur innocence à l’âge de 3 ans. Ils ne sont pas innocents. »
Partagez-vous son point de vue ? Pourquoi ?
4) Le film est ponctué de courts dessins animés (environ une minute chacun). Ces intermèdes
véhiculent des messages tels que le chaos, le non-sens et l’emprisonnement. Pourquoi peut-on
relier ces animations à la situation des enfants soldats ?
5) Pourquoi l’enfant soldat est-il, comme dans un cauchemar, prisonnier des événements sans
pouvoir intervenir ?
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Cerner les enjeux
Faire remplir aux élèves le tableau suivant. L’enseignant leur donne les intitulés des deux colonnes ainsi
que la ligne d’exemple. Le texte grisé correspond aux réponses que les élèves doivent trouver euxmêmes à partir de ce qu’ils ont vu dans le film.
Contextes d’enrôlement d’enfants-soldats
Situations vécues par les enfants
adolescents avant leur enrôlement
ou Motivation pour prendre les armes et
s’engager dans un groupe armé
Exemple : Assassinat d’un ou plusieurs membres Désir de vengeance.
de la famille.
Sentiment d’insécurité lorsque des groupes armés Avoir les armes nécessaires pour se défendre. Ne
sèment la terreur.
plus se sentir vulnérable ou impuissant face aux
événements.
NB : A relier à la scène au cours de laquelle des
villageois organisent une ronde de surveillance
autour du village, avec de simples arcs pour tout
moyen de défense.
Faim, soif, besoin d’un toit.
Sécurité alimentaire, vie en communauté.
Vulnérabilité.
Sentiment de fierté de savoir tirer, de commander
d’autres soldats.
Enlèvement par des rebelles.
Impossibilité de retrouver sa famille. Le seul
moyen de survivre, c’est de rester dans le giron du
groupe armé.
…
…
…
…
1) On pourra proposer aux élèves de listez les avantages du recrutement d’enfants plutôt que d’adultes
dans un groupe armé. Le texte grisé correspond aux réponses à trouver par les élèves.
L’enfant a moins peur que les adultes.
Il obéit plus facilement sans poser de question, et exécute des tâches qu’un adulte ne ferait pas pour
des raisons éthiques.
Il se laisse plus facilement influencer.
Il coûte peu cher : nourriture + salaire éventuel.
L’enfant est petit et agile : espion idéal.
Conscience morale moins importante, aborde les combats comme un jeu.
…
2) Pourquoi les enfants soldats se sentent-ils vulnérables lorsqu’ils quittent les armes ?
3) A la fin du documentaire, le général Dallaire estime que « l’enfant soldat, qui a été enlevé, est une
victime sur tous les plans. » Partagez-vous son point de vue ? Pourquoi ?
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III.
Poursuivre la réflexion et ouvrir le débat
L’enseignant pourra interroger ses élèves en utilisant les questions ci-dessous.
1) Le général Dallaire : « Je me trouve devant un enfant soldat et le dilemme se pose. Est-ce que j’ouvre
le feu s’il me tire dessus ? »
Certains conflits armés utilisent majoritairement des enfants pour les combats. Résoudre ces conflits
suppose d’anéantir les groupes armés qui les créent ou les entretiennent… au risque de tuer des
milliers d’enfants soldats. Le général Dallaire estime qu’il faudra des dizaines d’années pour mettre fin
à ces pratiques. Pourquoi est-il si pessimiste ?
2) Les armées nationales ou groupes de rebelles sont rarement punis lorsqu’ils recrutent des enfants
soldats. Quelles instances internationales peuvent punir ces crimes ? Qu’est-ce que le plaidoyer ?
Pourquoi les actions de plaidoyer sont-elles indispensables pour que les efforts sur le terrain portent
du fruit ?
3) L’ONU a lancé en 2013 un vaste plan de démobilisation d’enfants soldats. En République
démocratique du Congo, 2 500 enfants soldats ont récemment rendu les armes. Qui organise cette
campagne de démobilisation ? Comment est-elle mise en œuvre sur le terrain ? Effectuez des
recherches.
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