1- La lumière - École Nationale Supérieure d`Architecture de Grenoble
Transcription
1- La lumière - École Nationale Supérieure d`Architecture de Grenoble
1- La lumière La lumière est une partie extrêmement étroite du rayonnement électromagnétique dans lequel nous baignons, elle se déplace à une vitesse "c" de 300 000 km/s). Ce rayonnement est caractérisé par sa longueur d'onde λ en mètres (ou sa fréquence f en hertz (λ = c/f))1 . Ce que l'on appelle "lumière" est la partie de ce rayonnement que perçoit l'œil humain, elle est comprise entre 0,38 µ et 0,78 µ (380 nm et 780 nm)2 . En fait, notre œil ne perçoit pas la lumière directement, il ne perçoit que celle qui est émise ou réfléchie par des objets ! (entre ce document et votre œil, il y a de la lumière que vous ne pouvez "voir"). La représentation ci-dessous montre l'étendue du spectre électromagnétique : Longueurs d'onde électromagnétiques en µm (10 -6 m) 10-8 10-6 10-4 Rayons gamma 1 10-2 102 104 108 106 1010 U. V. Infra rouge Rayons cosmiques Radar, radio, TV Rayons X VISIBLE la partie du spectre visible pour un œil humain n'en constitue qu'une toute petite fraction, mais quelle importance elle a pour notre vie quotidienne ! La partie visible du spectre montre qu'à une longueur d'onde correspond une couleur, et les "7 couleurs" de l'arc en ciel définies par Newton3 peuvent être retrouvées facilement Ci-dessous les couleurs avec les limites (λ en nm) conventionnelles (380) violet/indigo (450) bleu (500) vert (570) jaune (590) orange (610) rouge (780) Écran Rouge Source de lumière blanche Prisme en verre Violet Cette perception des couleurs est variable d'un individu à un autre, et la Commission Internationale de l'Eclairage (C.I.E.) a défini des limites précises qui sont exprimées dans la courbe de réponse de l'œil. 1 Les propriétés de la lumière ne peuvent s’expliquer qu »en combinant deux théories : - une théorie corpusculaire qui considère la lumière formée de particules d’énergie (les photons) se déplaçant en ligne droite à la vitesse « c » - une théorie ondulatoire pour laquelle la lumière est formée d’ondes, les vibrations ayant lieu perpendiculairement à la direction de déplacement. Le passage d’une théorie à l’autre est nécessaire pour comprendre le comportement de la lumière, même si ce n’est pas très satisfaisant pour l’intuition. 2 1 µ = 10-6 m et 1nm = 10-9 m 3 Newton n'avait pas le choix, il FALLAIT qu'il en trouve 7 : chiffre sacré de la chrétienté ! Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 1 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble 2 - La vision 2.1 La courbe de réponse statistique moyenne L'œil humain n'est pas sensible de la même façon à toutes ces longueurs d'onde. D'une sensibilité nulle aux deux extrémités du spectre, il passe par un maximum de sensibilité vers 555 nm (dans le jaune/vert). La courbe ci-dessous montre la courbe de réponse d'un œil humain pour un sujet jeune et en bonne santé. Il s'agit d'une courbe moyenne statistique, il ne faut donc pas s'étonner des écarts individuels par rapport à cette courbe. Courbe de réponse moyenne statistique d'un oeil humain (sujet jeune et en bonne santé) sensibilités relatives : valeur 1 à 555 nm 1 0,9 0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 800 770 740 710 680 650 620 590 560 530 500 470 440 410 380 0 longueur d'onde en nanomètres En réalité, il existe deux courbes de réponse, l'une pour des éclairements forts (dite "photopique" et représentée ici), l'autre pour des éclairements faibles ("scotopique") mais qui s'applique pour des valeurs trop faibles pour faire partie d'un document sur l'éclairage (même en éclairage routier, la courbe ci-dessus reste valable).. Si le fonctionnement de l'œil humain est souvent comparé à celui de l'appareil photo, il existe une différence fondamentale, c'est que notre œil n'est rien sans le cerveau qui l'accompagne. De nombreux chercheurs ont montré que l'information lumineuse ne fonctionne pas de façon linéaire : le cerveau interprète en permanence, recale ses informations et ré-interprète. Cette boucle se produisant sans cesse, chaque petit décalage par rapport à nos acquis nous permet d'avancer, et d'accumuler des informations visuelles évolutives. C'est particulièrement vrai en ce moment avec la profusion de nouveautés visuelles mises sur le marché. Parfois lorsque le décalage est trop important, il se produit une rupture, une incompréhension4 , qui nous met mal à l’aise, ou nous interroge. Enfin, de nombreux paradoxes de vision sont connus et exploités par les médias. 4 ces phénomènes sont largement exploités par l’art visuel, la publicité… Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 2 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Donc deux individus à l'œil "normal" dans des conditions "normales" pourront avoir des réactions très différentes selon leur culture, leur histoire, leur état psychologique, et selon bien d'autres paramètres encore. 2.2 L’œil n’est pas un appareil photographique : exemples Revenons sur ce point, en l’illustrant par deux exemples qui nous montreront que c’est bien le cerveau qui corrige ou trompe notre vision. La première page de Libération d’il y a quelques années, montre de façon spectaculaire l’importance du cerveau dans le fonctionnement de l’œil, avez vous remarqué qu’il manque le premier « I » de Italie ? Le vérificateur du journal ne l’a pas remarqué non plus ! Pourtant vous avez bien lu ITALIE. De même, les personnages ci-dessus ont tous la même taille, mais notre éducation à la perspective nous incline à penser le contraire. Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 3 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Lorsqu'on ne travaille que sur l'œil, il est courant de définir trois critères de performance qui varient avec la quantité de lumière5 : - l'acuité visuelle, ou capacité à distinguer deux objets très rapprochés6 (qui varie aussi notablement avec l'âge). Acuité visuelle "a" Variation de l'acuité visuelle avec le niveau d'éclairement 2,5 2 1,5 1 0,5 0 0 50 100 150 200 Niveau d'éclairement en LUX L'acuité varie rapidement jusqu'à 50 lux. Au delà de cette valeur l'acuité varie peu - la vision des contrastes, ou capacité à distinguer une frontière entre deux objets7 contraste négatif Plus le contraste est faible, plus l'éclairement doit être important. Plus le contraste est faible, plus l'éclairement doit être important. contraste positif 5 nous détaillerons plus loin les principaux mécanismes de la vision L'acuité visuelle est l'inverse d'un angle (a = 1/α) avec α = sous lequel l'observateur voit l'objet. C'est elle que l'on note en dizièmes lors de contrôles de la vue. Notez que cette notation va jusqu'à 20, et que la note 10 ne correspond qu'à une vision "moyenne". 7 La définition du contraste, et ses valeurs recommandées ou limites seront données au § 10 6 Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 4 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble - la vitesse de perception, ou capacité à distinguer rapidement deux objets remplissant les deux conditions minimales précédentes. Cas de la lecture Nb de lettres 25 20 15 10 5 0 0 50 100 150 200 Niveau d'éclairement en LUX L'exemple ci-dessus illustre cette vitesse de perception dans le cas de la lecture : le nombre de lettres déchiffrées dans un temps donné croit rapidement jusqu'à 50 lux Remarque : si les courbes ci-dessus montrent une stagnation de la performance à partir de 50 lux, il faut rappeler les conditions des tests qui permettent de les obtenir : les sujets sont en situation de laboratoire, et leur activité est limitée dans le temps (quelques instants). Les résultats ne sont donc pas extrapolables directement à des situations de travail où l'activité prolongée suppose des valeurs d'éclairement plus importantes. Cependant l'allure des courbes reste identique. Ces trois paramètres fondent la plupart des approches de l'éclairage physique. À ces trois paramètres, il convient d'ajouter un coefficient de variation du niveau d'éclairement fonction de l'âge des sujets : Variation du niveau d'éclairement nécessaire avec l'âge : base 1 à 20 ans 14 coefficient de correction 12 10 8 6 4 2 0 5 10 20 30 40 50 60 Age du sujet Remarquez que la performance visuelle est optimale vers 20 ans, elle est plus faible pour les enfants (rapport de 1 à 2) et pour les gens plus agés (rapport 1 à 10). Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 5 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble 3 - La couleur Qu'est-ce que la couleur ? Cette question est au sein d'un très vaste débat, et pour certains auteurs, la couleur n'est qu'une "valeur ajoutée" à la vision (de fait certains animaux8 ne perçoivent le monde extérieur qu'en noir et blanc). Nous ne voyons des surfaces colorées que parce qu'elles sont capables d'émettre (ou de ré-émettre) de façon sélective certaines composantes du spectre visible. Par exemple un tissu n'est vert que parce que les longueurs d'onde vertes sont réfléchies par ce tissu, les autres longueurs d'onde étant absorbées. Verre teinté Source de lumière en rouge blanche Rayon réfléchi vert Surface verte Lumière rouge Source de lumière blanche Un verre teinté ne laisse passer que certaines longueurs d'onde. Plutôt que cette question, posons la suivante : qu'est-ce qu'une lumière blanche ? La réponse sera pour l'instant celle de M. de La Palice : une lumière blanche est une lumière qui n'apparaît pas colorée9 ! Reprenons l'exemple ci-dessus : si la lumière qui éclaire le tissu est blanche, le tissu paraît vert. Mais si la lumière est rouge, le tissu absorbant le rouge (le non-vert), il apparaîtra noir ! Mais attention, les lumières blanches peuvent avoir des dominantes variées, et révéler plus ou moins bien les couleurs des objets qu'elles éclairent. Le tissu vert sera peu mis en valeur par une lampe à incandescence qui a une dominante nettement rouge ! Certaines sources fluorescentes seront bien meilleures pour révéler cette couleur verte. En fait une couleur n'existe pas en soi ! Pour qu'une couleur existe il est nécessaire d'avoir trois éléments : une matière (et ses pigments), une lumière (et son spectre) et un œil (donc un cerveau) ! Chaque changement de l'un de ces trois paramètres pourra faire changer la définition de la couleur : - une feuille jaune sera verte en lumière bleue - un "daltonien"10 confondra les rouges et les verts - une surface "bleue-verte" sera sous le même éclairage tantôt appelée bleue, tantôt appelée verte selon les personnes (œil différent ou apprentissage du nom des couleurs différent lors de la petite enfance ?) et parfois appelée une fois bleue, une fois verte par la même personne selon le moment. 8 et certains hommes atteints d'achromatopsie il en est des lumières comme des lessives : il y en a de plus blanches que blanches ! 10 il existe plusieurs formes de troubles de la vision colorée, celle appelée "daltonisme" n'est que la plus courante 9 Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 6 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble 4 - Comportement des matériaux 4.1 Les coefficients en lumière blanche Un matériau qui reçoit une puissance (sonore, lumineuse ou thermique) transforme ce flux incident en trois composantes : réfléchie, transmise et absorbée. Le schéma ci-dessous montre les rapports conduisant à la définition des trois coefficients. Puissance incidente P La conservation de l'énergie donne P=A+T+R soit en divisant par P 1 = A/P + T/P + R/P Valeur absorbée A On appelle α = A/P le coefficient d'absorption τ = T/P le coefficient de transmission ρ = R/P le coefficient de réflexion Valeur transmise T Valeur réfléchie R α+τ+ρ=1 Cette équation est toujours valable, mais elle varie avec les longueurs d'onde (les fréquences) Les valeurs α, τ, ρ changent avec chaque longueur d'onde (couleur des objets). Pour permettre une comparaison facile du comportement lumineux des matériaux, il existe des coefficients globaux qui prennent en compte, sous lumière blanche, l'ensemble des longueurs d'onde pondérées de la manière dont l'œil humain les reçoit (courbe de réponse de l'œil). Par exemple, cette feuille de papier a un coefficient de réflexion de 80%, ce qui signifie qu'elle réfléchit 80% du flux incident d'une lumière blanche. Cette réflexion est diffuse (elle s'effectue dans toutes les directions). 4.2 Le comportement en réflexion et en transmission Les matériaux peuvent avoir deux comportement extrêmes en réflexion comme en transmission : régulier ou diffus. Un matériau a un comportement régulier si un rayon qui le frappe continue son chemin (après déviation) sous forme d'un rayon, il a un comportement diffus si ce rayon devient multiple. Les matériaux opaques ont un coefficient de transmission nul. Les matériaux transparents répondent à la loi de Descartes, ceux qui sont translucides répondent à la loi de Lambert. À titre indicatif, et sans préjuger du type de comportement (régulier ou diffus), le tableau ci-dessous donne quelques valeurs de facteurs de réflexion en lumière blanche Matériaux béton clair béton sombre brique plâtre bois sapin vitrage 0,35 0,15 0,2 0,65 0,35 0,08 Peinture Claire Moyenne Sombre blanc 0,8 0,7 jaune 0,7 0,5 0,3 gris 0,5 0,2 0,05 bleu 0,5 0,2 0,1 rouge 0,35 0,2 0,1 Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 7 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Pour les facteurs de transmission : vitrage simple : 0,9 vitrage double : 0,8 vitrages spéciaux : de 0,4 à 0,8 selon le type matériaux plastiques neufs : maximum 0,7... les mêmes après quelque temps : 0,3 Comportement d'un matériau en réflexion i I = I maxcos α r α Loi de DESCARTES angle d'incidence =angle de réflexion Réflexion régulière Loi de LAMBERT quelque soit l'angle d'incidence, la réflexion se fait dans toutes les directions, de façon à ce que l'extrémité des rayons réfléchis soit sur la sphère tangente au point de contact. Réflexion diffuse Comportement d'un matériau quelconque, plus proche de la loi de Lambert que de celle de Descartes Réflexion régulière Réflexion diffuse = = matériau brillant matériau mat Dans le cas d'une réflexion diffuse, la luminance est constante quelque soit la direction ρ/π)x E . d'observation, et l'on a alors l'expression : L = (ρ D'une manière générale, les matériaux classiques de construction répondent plutôt à cette loi de réflexion diffuse. Comportement d'un matériau en transmission α Transmission diffuse (matériau translucide) et semi-diffuse. La transmission directe (régulière) est donnée par les matériaux transparents. Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 8 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble 5 - La photométrie C'est la science de l'éclairage. Elle s'appuie sur la physique de la lumière et sur la physiologie de l'œil. Le schéma ci-dessous permettra de définir les concepts et les unités. Nous définirons plus tard chacun d'eux plus précisément. Le flux est constitué par l'ensemble de la "puissance utile pour l'œil humain" qui sort de la source lumineuse (de la lampe). Son unité est le LUMEN (lm). Le flux des sources est fourni par les fabricants (lecture sur catalogue). Le flux qui sort du luminaire dépend du rendement de celui-ci. Il existe bien entendu un flux relatif aux sources naturelles (soleil, ciel) dont nous n'avons pas à nous soucier. L'intensité lumineuse est le "rayon lumineux" qui sort du luminaire dans une direction donnée (intensité directe vers le bas, indirecte vers le haut). Son unité est la CANDELA (cd). La façon dont se répartissent les rayons lumineux, et la valeur de chacun d'eux dépendent de l a "Courbe photométrique" du luminaire (de sa conception optique). Cette courbe est fournie par l e fabricant du luminaire. Les sources naturelles créent aussi des rayons lumineux d'intensité variable, ils ne seront pas utilisés dans le projet. L'éclairement est la quantité de flux qui arrive sur une surface donnée. Son unité est le LUX (lx). L'éclairement est généralement mesurée sur une surface plane (bureau, mur, chaussée, façade...) au moyen d'un luxmètre. Les éclairements sont fixés en fonction de l'activité qui est exercée dans le local (valeur de base à corriger : âge, fatigue, ...). C'est généralement l'outil réglementaire. La luminance est la partie de la lumière qui arrive dans l'œil. Son unité est la CANDELA par mètre carré (cd/m2) Les luminances primaires sont causées par des sources lumineuses, les luminances secondaires sont causées par des réflexions (sur un bureau...) ou transmission (à travers un vitrage ...). La luminance sert à caractériser des contrastes, donc à quantifier la fatigue et l'éblouissement. Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 9 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble 6 - Les paramètres à prendre en compte Nous nous centrerons essentiellement sur ceux qui ont une incidence directe sur le travail de l'éclairagiste11 . La performance visuelle Caractérise à la fois la vitesse à laquelle notre système visuel fonctionne, et la précision avec laquelle il effectue une tâche donnée. On constate facilement que la performance visuelle augmente avec le niveau d'éclairement jusqu'à un certain niveau (fonction de nombreux autres paramètres : contraste, taille de l'objet, couleur, ...). Le niveau d'éclairement optimum Cette notion est très complexe à définir, elle varie fortement avec la tâche à accomplir, et les valeurs sont reconsidérées en permanence pour tenir compte de l'évolution des techniques, du désir des usagers, du coût des installations... Actuellement cette notion est définie par la Commission Internationale de l'Éclairage (CIE) sous la forme d'un "éclairement moyen à maintenir"12 dont voici quelques valeurs recommandées13 par l'Association Française de l'Éclairage (AFE)14 : Valeurs d'éclairement moyens à maintenir en lux) voie de circulation intérieure hall d'accueil bureaux (travaux généraux) et bibliothèques salle de classe salles de dessin mécanique générale (pièces moyennes) mécanique délicate 125 250 425 325 850 425 1250 Le confort visuel Il fera intervenir des notions de fatigue, de sentiment de sécurité, de distribution des luminances... La notion d'uniformité des luminances (équilibre d'aspect visuel entre les différentes valeurs d'un espace), qui a longtemps été la règle pour les locaux de travail, ou pour l'éclairage urbain, est fortement remise en cause par les réalisations récentes et le désir des usagers. Elle s'impose encore dans certains cas (éclairage routier, tâche très difficile ou à risque ...). Luminance -Luminosité Il faut séparer les deux notions pour éviter par la suite des incompréhensions. La luminance a une définition mathématique et physique claire, elle est mesurable, et peut faire l'objet d'un chiffrage dans un cahier des charges. La luminosité est un outil subjectif, utilisé dans le langage courant, et en psychologie expérimentale. Il s'agit d'une "sensation visuelle selon laquelle une surface semble émettre plus ou moins de lumière". Il s'agit d'un sentiment individuel, qui peut donner des résultats statistiques sur un grand nombre d'observations, elle n'est pas accessible directement à la mesure. Exemple : nous avons sans difficulté la possibilité de dire qu'une surface est foncée et une autre claire, même si la surface foncée est très éclairée, et la surface claire très peu éclairée (la 11 une installation d'éclairage peut cependant être bruyante (ballasts) dégager de la chaleur (lampes à incandescence) poser des problèmes de sécurité (en particulier électrique) ... et des controverses esthétiques ! 12 notion qui fait appel à la qualité de la maintenance que nous verrons plus tard; 13 il ne s'agit donc pas de réglementation, mais ces valeurs se substituent le plus souvent à la réglementation. 14 Cette association édite régulièrement des brochures de recommandations selon les usages de locaux, les dernières concernant les locaux de travail datent de 1993 Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 10 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble luminance étant proportionnelle à l'éclairement, les rapports de luminance peuvent alors être inversés par rapport à la luminosité). L'ambiance lumineuse Plus subjective, cette notion fera apparaître la variabilité de l'éclairage, sa coloration, l'éventuelle convivialité qu'elle entraînera... Les notions d'esthétique n'en seront pas absentes, apportant là un élément personnel très important dans une culture occidentale surtout basée sur un mode de communication et d’apprentissage visuels. Chacun pourra se référer à sa propre expérience pour décrire un espace visuel éclairé, et comparer ses impressions avec celles de ses proches. Les sources lumineuses15 Il existe sur le marché une importante variété de sources lumineuses. Elles se caractérisent essentiellement par : - leur dominante de coloration (température de couleur) - leur capacité à restituer la « vraie » couleur d’un matériau (indice de rendu des couleurs) - leur durée de vie (qui varie selon les cas entre 1000 et 100 000 heures) - leur flux lumineux (de quelques centaines à quelques dizaines de milliers de lumens) - leur puissance électrique (de quelques unités à plusieurs centaines de Watts) Les catalogues des fabricants fournissent tous ces renseignements. Les trois derniers paramètres sont à prendre en compte pour le bilan économique à long terme de l’installation. Les luminaires16 Un luminaire doit remplir plusieurs fonctions : - répartir le flux de façon à moduler l’éclairement selon les besoins - protéger l’utilisateur de la vision directe des sources lumineuses - assurer les protections électriques, contre les chocs, ainsi que la pénétration des poussières ou de l’eau. Selon les usages, en éclairage intérieur, il peut être nécessaire d’avoir recours à des luminaires étanches ou d’une protection électrique élevée (locaux humides). Le rendement des luminaires (rapport entre le flux lumineux sortant et celui des sources qu’il renferme) varie entre 40% et 75%. Ce critère doit également intervenir dans la partie économique du projet. Installation, suivi et entretien17 Une installation d'éclairage est éphémère par nature : elle n'existe que si on la connecte à une source d'énergie (en général électrique), et que si une maintenance est assurée. Ce paramètre est au coeur de tout choix des sources lumineuses (qui durent selon les cas 1 000 h ou 100 000 heures), des hauteurs d'installation (à hauteur d'homme, avec échelle ou camion à nacelle ?), et des luminaires (ouverts, fermés, étanches, anti effraction ...). Un projet qui ne prendrait pas correctement en compte ce paramètre serait voué à l'échec, quelque soit ses qualités par ailleurs. 15 pour plus de détails voir annexe 1 et § 8 pour plus de détails voir annexe 2 17 pour plus de détails voir annexe 3 16 Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 11 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble 7 - La lumière naturelle L'éclairage par la lumière du jour se fait à travers des prises de jour dont la fonction dépasse très largement le rôle de dispositif optique permettant la pénétration lumineuse. Paramètres qualitatifs : La vue Notre connaissance visuelle du monde extérieur passe par une baie vitrée transparente et latérale à hauteur de vision. Ce dispositif sert de transition, et permet une appropriation particulière de son espace proche : plantes, séchage du linge, disposition du mobilier... De nombreuses études ont permis de mieux cerner les qualités demandées au panorama perçu à travers une fenêtre, elles font toutes ressortir trois éléments importants : - une référence géographique qui permet la localisation de son espace de travail (ou de résidence) dans l'environnement local - une référence temporelle et météorologique, permettant de suivre l'évolution de la journée, des saisons, et du climat - un contact avec l'activité extérieure (mouvements de population, de véhicules sur une durée suffisante...) On constate sur la représentation ci-dessous que le panorama visuel est limité avec des fenêtres “ classiques ”, et dès que l’on se trouve en recul dans le local, à la vision des bâtiments d’en face. L’observateur perd la vision du ciel (météorologique) et celle du sol (vie urbaine). Plus précisément on peut remarquer que lorsque les dominantes urbaines et rurales s'équilibrent la satisfaction visuelle est accrue, et, lorsque l'espace visuel est très ouvert, une réduction de la taille des prises de jour devient possible. Le critère visuel est le plus souvent à double sens : si une baie vitrée ouvre sur l'extérieur, elle ouvre aussi l'intérieur à la vision externe. L'intimité d'un local peut dans ce cas être perturbée, et l'ouverture masquée par ses occupants. On obtient alors un effet contraire à celui qui était recherché. Les aspects psychophysiologiques L'exclusion de la lumière du jour et de la pénétration des rayons solaires dans un bâtiment développent chez les occupants un sentiment de frustration et d'oppression générateur de tensions et de conflits18 . Il est parfois nécessaire de recourir à ces pratiques (locaux de haute sécurité par exemple), mais le plus souvent il ne s'agit que d'intentions plus ou moins explicites : intimité ou discrétion, augmentation des surfaces destinées à l'affichage ou au rangement, local central sacrifié au profit des locaux périphériques, sur-isolement acoustique... qui sont déconseillées surtout pour des occupations de longue durée, et pour des locaux de petite dimension. 18 on parle alors de local "aveugle" Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 12 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Nous avons vu au paragraphe précèdent que la prise de jour avait un caractère social, temporel et géographique. Il s'y ajoute la stimulation qu'entraîne une variabilité importante des niveaux d'éclairements (parfois plusieurs centaines de lux par minutes) et de la coloration de la lumière et de notre environnement19 . Notre œil accepte très bien ces variations s'il sait qu'elles proviennent d'une prise de jour (des variations bien plus faibles en éclairage électrique sont mal ressenties). Deux techniques sont souvent employées : - la prise de jour latéral, qui, par l'orientation qu'elle induit, privilégie les zones d'ombre et de pénombre, et introduit une variation quantitative avec le recul - la prise de jour en plafond qui uniformise l'éclairement dans le local, et s'apparente plus de ce fait à l'éclairage électrique (noter que l'éclairage par sheds est orienté, le shed n'étant souvent qu'une baie latérale mise en hauteur !). Les sensations les plus souvent décrites sont exprimées dans le tableau ci-dessous20 Le facteur de lumière du jour est le rapport constant qui existe entre l’éclairement en un point intérieur du local et l’éclairement horizontal extérieur (site dégagé). Les zones pour lesquelles le facteur de lumière du jour est inférieur à 0,5% sont à considérer comme des lieux où l’éclairage électrique est quasi-permanent. Enfin, la lumière naturelle est un facteur d'équilibre psychophysiologique important (penser aux expériences d'isolement total au fond de gouffres, aux cosmonautes, ...). Des troubles liés à sa raréfaction apparaissent en hiver pour les personnes âgées, pour les expéditions hivernales aux pôles21 ... ils sont en partie compensés par des expositions journalières d'une heure ou deux à des niveaux d'éclairement élevés (environ 5 000 lux). 19 d'une manière statistique : lumière du nord ressentie froide et uniforme, lumière du sud chaude et variable; les lumières provenant de l'est et de l'ouest étant respectivement vertes et rouges 20 extrait de SNU 418 905 : Recommandations pour l'éclairage naturel et artificiel des locaux scolaires. Association Suisse des électriciens - 1981 21 appelés SAD (seasonal affective disorders) par Rosenthal, qui a prouvé qu'ils pouvaient être traitées par une exposition à des niveaux lumineux élevés Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 13 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble 8 - La lumière électrique Il existe une grande différence entre notre réaction aux variations de l’éclairement naturel (souvent dans des rapports de 1 à 10 sans que nous en soyons affectés) et à la stabilité que nous exigeons de l’éclairage électrique. D’autre part, nous acceptons de travailler avec un niveau d’éclairement très faible (ou très élevé) en éclairage naturel, alors que notre fourchette de tolérance pour l’éclairage électrique est réduite (penser au niveau d’éclairement pour lequel nous nous décidons à allumer le soir). Ces remarques préalables permettent de rappeler que l’éclairagisme n’est pas de la physique, même si la suite de ce chapitre sera surtout physique. Rayonnement du corps noir Les physiciens ont imaginé un corps ayant un comportement particulier : il absorbe toute l'énergie qui lui est envoyée (α = 1 pour toutes les longueurs d'onde), c'est également lui qui émet le plus d'énergie sous forme de rayonnement. Un tel corps n'existe pas, mais pour les expériences que nous allons décrire nous pouvons nous en faire une représentation "correcte" en imaginant un morceau d'acier. Nous allons décrire l'allure du rayonnement de notre morceau d'acier avec l'élévation de température. Au début, à la température ambiante (≈ 300°K)22 il émet un rayonnement non visible (maximum à 10 microns). Au fur et à mesure de l'élévation de température, le maximum de l'émission se déplace vers les longueurs d'onde plus courtes, et il se produit une lueur (rouge sombre) lorsque le spectre d'émission atteint la valeur 700 nm23 . En continuant à chauffer nous obtenons un rouge clair, puis un orangé, un jaune, enfin un blanc de plus en plus lumineux24 . Ce blanc est considéré correct vers 2 700°K, car à ce stade, il contient suffisamment de longueurs d'onde très courtes (bleues - violettes) par rapport aux plus longues (rouges). C'est la température de fonctionnement du filament d'une lampe à incandescence "classique" (constituée de Tungstène qui ne fond qu'à 3 700°K). Si nous continuons à chauffer, nous atteignons 2 900 à 3 000°K, qui est la température du même filament dans les lampes à incandescence halogène. Dans ce cas, l'équilibre entre les extrêmes est encore meilleur, et on a tendance à dire (à juste titre) que la lampe à halogène est "plus blanche" que celle à incandescence. Continuons à chauffer (sans nous préoccuper de la fusion éventuelle du matériau). Nous voici à 5 000°K, le maximum est à 0,58µ dans le jaune, c'est la température de la couche extérieure du soleil. Puis à 6 000°K, le maximum est à 0,48µ dans le bleu, la courbe s'apparente à l'émission du ciel bleu. 22 le degré Kelvin n'est que le degré Celcius auquel on ajoute 273°. Il est systématiquement utilisé en physique, et caractérise une température dite "absolue" (à 0°K, il n'y a plus de mouvement atomique). 23 Les pyromètres optiques sont basés sur cette propriété de correspondance entre couleur et température : rouge sombre vers 1000°K – rouge vif vers 1200°K – rouge cerise vres 1500°K – orange vers 1600°K – enfin blanc vers 1800°K, et nous sommes alors proches de la fusion de l’acier. 24 à ce stade notre morceau d'acier a fondu, mais pas le corps noir ! Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 14 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Courbes d'émission du corps noir 8000°K Intensités relatives 60 50 40 6000°K 30 20 5000°K 10 3000°K 2 1,9 1,8 1,7 1,6 1,5 1,4 1,3 1,2 1,1 1 0,9 0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0 0 Allure des courbes d’émission du corps noir en fonction de la température Le terme "s'apparente" ci-dessus montre que nous avons une courbe identique à l'émission du ciel bleu, mais que celui-ci n'est évidemment pas porté à 6 000°K (se trouver à l'ombre en été nous le rappelle). Toutes les sources ci-dessus ont une lumière "blanche", pourtant leur composition spectrale varie, et si une lampe à incandescence émet son maximum dans le rouge, le ciel émet son maximum dans le bleu, mais toutes deux nous semblent "blanches". Chacune a donc une couleur dominante qui lui donne des qualités (ou des défauts) selon l'usage que l'on en fait. Pour qualifier rapidement la "couleur" d'une source (l'allure de son spectre d'émission) les éclairagistes ont pris l'habitude de lui donner la valeur de la température du corps noir dont la courbe serait la plus proche. On appelle cette dénomination : Température de couleur (en °K). Température de couleur (T°K) Rappelons d'abord un préalable : nous n'éclairons qu'avec des sources de lumière "blanche" (nous ne créons que rarement des "discothèques") et lorsque nous employons le terme de "lumière à dominante rouge" ou "lumière à coloration rouge", il faut bien entendre : lumière dans laquelle la dominante rouge est prédominante, mais qui semble blanche aux utilisateurs. Dans ces conditions, on appelle "Température de couleur" d'une source lumineuse, la température à laquelle il faudrait porter le corps noir pour qu'il ait le même aspect coloré que la source que l'on considère. Cette température n'est en général pas celle de fonctionnement de la source (sauf pour des sources à incandescence). Elle peut varier entre 2 500°K et 10 000°K. Les tubes fluorescents varient entre 2 700 et 6 500 °K, le rayonnement naturel de 3 000 °K (coucher de soleil), 6 000°K vers midi, ou par ciel couvert, et de 8 000 à 20 000°K pour un ciel bleu profond. Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 15 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Attention au vocabulaire ! Pour l'éclairagiste une source qui a une température de couleur de 3 000°K est une source froide, cette source "froide" a une dominante de couleur rouge (voir ci-dessus), et une source à dominante rouge est qualifiée par les plasticiens et les néophytes comme une source à coloration "chaude" ! Température de couleur chaude (5000 à 6000 °K) Couleur froide (bleutée) Température de couleur froide (2700 à 3500 °K) Couleur chaude (rougeâtre) Indice de rendu des couleurs (IRC ou Ra) Deux sources ayant la même température de couleur, n'ont pas la même composition spectrale, ni celle du corps noir qui sert de référence. Si ces diverses sources éclairent la même surface colorée, son aspect ne sera pas forcément identique. Pour exprimer ces différences, les éclairagistes ont introduit la notion d'Indice de Rendu des Couleurs (IRC25 ) qui permet d'apprécier l'écart qui va exister entre l'aspect coloré d'une surface sous un éclairage donné, et celui qui serait donné par le corps noir à la même température de couleur. Cet indice varie entre 0 et 100, mais il n'a de sens qu'entre 50 et 100. Plus les aspects sont identiques, plus on se rapproche du chiffre 100. Le schéma ci-dessous donne des indications sur les performances de l'IRC ____________________________________________________________________________ 0/ 50/ 70/ 80/ 85/ 95/ _______________________VALEURS D'IRC _____________________ sans signification/ médiocre/ mauvais/ moyen/ bon/ excellent/ E urbain ou industriel E urbain ou industriel E intérieur (couleur peu fiable) E intérieur (cas le plus courant) E intérieur (couleur parfaite) 100/ Exemples : Un catalogue de fabricant nous donne 3 références de sources fluorescentes à 4 000°K ayant respectivement les valeurs suivantes d'IRC : 65/85/93. La première (IRC = 65) ne pourra être utilisée que pour des situations n'ayant pas de prescription particulière pour la reconnaissance des couleurs (atelier, stockage, ... et encore à condition que ce critère de discrimination des couleurs ne soit pas déterminant, comme par exemple un atelier de carrosserie). La seconde (IRC = 85) sera utilisée dans tous les cas où une distinction "correcte" des couleurs est nécessaire (bureaux, locaux scolaires... à l'exception des locaux de dessin d'art). Enfin la troisième (IRC = 93) sera réservée à des locaux nécessitant une très bonne discrimination colorimétrique (les exceptions des cas ci-dessus par exemple). Chacune de ces sources n'ayant évidemment pas le même coût d'achat ni les mêmes conditions d'utilisation. On admet que la lampe à incandescence et la lumière du jour ont un IRC égal à 100 (valeur de référence). 25 Ra pour les anglo-saxons Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 16 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Choix des sources lumineuses Il n'y a pas de relation logique entre T°K et IRC, vous pouvez trouver sur le marché de l'éclairage toutes les combinaisons possibles entre ces deux paramètres (en particulier avec des sources fluorescentes). pour l'IRC : le choix est lié à l'usage qui en sera fait dans le local d'installation, avec l'échelle donnée ci-dessus, et une logique d'économie. pour la température de couleur : 1 - un premier élément de choix pourra être la tonalité des parois du local : si le local est plutôt bleuté, une température de couleur de 3 000°K (rouge) affadira le bleu des parois, même si l'IRC est proche de 100. Dans ce cas il vaudrait mieux choisir la T°K la plus élevée (bleue) compatible avec la contrainte suivante 2 - des essais répétés sur de nombreux cobayes-utilisateurs ont montré qu'il existait des préférences de "coloration" (de T°K) en fonction du niveau d'éclairement, lors de l'utilisation de tubes fluorescents. Les résultats se présentent sous la forme du diagramme ci-dessous dû à Kruithoff : On voit, par exemple, sur ce diagramme que pour un éclairement proche de 400 lux, la plage de T°K utilisable se situe entre 2 900 et 5 000 °K. Nous pourrions choisir une T°K de 4 500°K (5 000°K étant à la limite de zone ne sera pas retenu)26 . 26 dans ce diagramme, nous retrouvons le fait que notre œil est habitué depuis des milliers d'années à une lumière à faible T°K sous faible éclairement (le feu, la bougie...) et à forte T°K sous fort éclairement (lumière du jour). La lumière électrique n'a que 120 ans, et la perception que les humains en ont est en perpétuelle évolution. Quelle sera l'allure d'un tel diagramme dans 100 ans ? Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 17 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble 9 - Les principaux mécanismes de la vision L'œil est facile à décrire, même si son fonctionnement est plus complexe qu'il n'y paraît. Il se présente comme un globe mobile dans une orbite. L'œil n'est rien sans le cerveau qui l'accompagne, donc tout ce qui suit ne décrit que les fonctions mécaniques de l'œil humain : sa physiologie Le cristallin est une lentille convergente (une loupe) à distance focale variable. Cette variation (appelée accommodation) lui permet au moyen des muscles de commande de former en permanence l'image de l'objet observé sur l a zone sensible : la rétine. Le pouvoir d'accommodation varie avec l'âge, la presbytie (qui intervient entre 40 et 45 ans) traduit une baisse de ce pouvoir. Il est important de ne pas solliciter inutilement le cristallin, en disposant par exemple le texte à saisir et l'écran de l'ordinateur à une même distance de vision (utilisation de supports inclinés). Dans la majorité des cas, une défaillance de réglage du cristallin peut facilement être compensée par le port de lunettes (myopie, hypermétropie). Une trop forte déformation de la cornée dans une direction donnée se corrige aussi (astigmatisme). Pour s'adapter à la lumière incidente, l'iris possède en son centre une ouverture : la pupille (qui joue un rôle de diaphragme) dont la surface peut varier dans un rapport de 1 à 20. Ce mécanisme porte le nom d'adaptation. Comme pour l e diaphragme d'un appareil photographique, une pupille très fermée permet d'obtenir une grande profondeur de champ. Une pupille largement ouverte risque de créer plus facilement de la gène sur la zone périphérique de la rétine par vision parasite de sources qui ne sont pas directement dans l'axe de vision. Le mouvement répété de l a pupille se traduit par une fatigue visuelle, il convient donc d'éviter les situations favorisant ces mouvements, l'œil passe constamment d'une zone visuelle à une autre. Donc éviter, par exemple, de regarder la télévision dans le noir, ou de travailler avec uniquement l a lampe de bureau éclairée (zone de l'écran ou du bureau très claire et pourtour sombre). La rétine est constituée de cellules sensibles de deux types : les cônes et les bâtonnets. Les cônes (nombreux autour de l'axe optique) réagissent aux forts éclairements, sont sensibles aux couleurs et permettent une vision des détails. Les bâtonnets (nombreux loin de l'axe optique) réagissent aux faibles éclairements, au noir et blanc, et permettent une vision globale. Notre propos étant de créer de l'éclairement à niveau suffisamment nous ne considérerons que les cônes, et admettrons qu'il n'y a qu'un type de réaction de l'œil à l a 27 lumière .On parle alors de vision photopique. Il existe trois sortes de cônes, qui sont capables de distinguer de façon plus précise les trois couleurs : rouge, vert, bleu. Une déficience d'un type de cône entraîne une vision des couleurs déformée. 27 la nuit, nous ne percevons plus les couleurs (la nuit tous les chats sont gris !), mais ceci se produit à des niveaux d'éclairement qui ne nous concerneront que rarement en situation de projet. Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 18 J.J. Delétré – Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Aspects psycho-physiologiques La lumière a un impact biologique marqué par des variations de la spasmophilie ou de la fixation du calcium (vitamine D). Des études montrent que les dépressions hivernales peuvent être traitées par photothérapie à 5 000 lux, deux heures le matin avec une lumière type lumière du jour. Nous restons sensible à la variation de l'éclairage solaire et l'angoisse de la chute du jour est bien connue chez les insomniaques. On connaît aussi les peurs des enfants devant l'obscurité. Dans les locaux sans fenêtre, on a parfois créé une modulation de l'éclairage artificiel reproduisant le cycle solaire de la journée pour que les hommes se situent dans le temps. La physiologie de la perception des formes conditionne la majorité des processus intellectuels et a une grande importance dans le développement non seulement mental de l'enfant, mais aussi dans le développement de sa personnalité. Tous les degrés de la vision binoculaire sont atteints à 1 an, mais ce n'est que vers 5 ans qu'ils deviennent automatiques et irréversibles. En vision centrale (vision photopique), l'enfant est plus sensible au papillotement que l'adulte. A trois ans l'enfant doit savoir reconnaître les couleurs. C'est généralement la sensibilité au bleu qui est la plus tardive, ayant pour conséquence un fonctionnement réduit de l'iris. Pour ce qui est de la couleur, il existe d'importantes variations culturelles. Par exemple : la plupart des sources utilisées en Scandinavie sont plutôt à dominante rouge (T°K faible) alors que celles qui sont utilisées en Europe du sud sont plutôt à dominante bleue (T°K élevée), et le rouge n'est pas, comme on a tendance à le croire trop facilement, une référence de danger universelle ! Les performances visuelles le champ visuel On distingue le champ de perception distincte (vision précise) qui mesure environ 1°, le champ central (environ 30°) et le champ périphérique qui englobe toute la zone vue plus ou moins nettement par un observateur (proche de 2π sr). la vitesse de perception Elle varie très vite avec l'éclairement, puis se stabilise. Le schéma ci-dessous montre l'évolution de la vitesse de lecture en fonction de l'éclairement. acuité visuelle Généralement mesurée par la lecture de lettres sur un tableau rétro-éclairé vu à une distance de 6 mètres. L'acuité moyenne est de 10, mais des acuités de 13 sont courantes, et certains sujets atteignent 18. L'acuité visuelle varie avec l'âge, elle n'atteint son maximum de performance que vers 20 ans, puis décroît à partir de 40/45 ans. Les enfants n'ont donc pas une acuité maximale contrairement à l'idée commune (les enfants n'ont pas de "bons yeux" !). Chez certains sujets, l'acuité plafonne vers 3 à 4, ils sont amblyopes, et leur activité demande un surcroît d'éclairement. Mais ces tests sont réalisés dans des conditions précises d'éclairement, l'acuité maximale étant atteinte pour 1 500 lx environ. Dans la pratique on définit la luminance d'adaptation qui dans ce cas est proche de 300 cd/m2. Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 19 J.J. Delétré –Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble La courbe ci-dessous montre comment varie l'acuité visuelle en faible luminance Acuité visuelle en dizièmes Variation de l'acuité visuelle avec la luminance 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 0 0,3 1 Luminance 2 3 d'adaptation(cd/m2) On constate sur ce schéma que pour une personne ayant une vue "normale", son acuité visuelle tombe à 3/10 pour 0,3 cd/m2, et à 7,5/10 pour 2 cd/m2. Or ces deux valeurs correspondent respectivement à une conduite de nuit soit avec les feux de route seuls (phares), soit sur une chaussée normalement éclairée (entrée ou sortie de ville). On comprend mieux à la lecture de ce graphique les risques liés à ce type de conduite, et l'intérêt d'un éclairage routier. la vision des contrastes Ce point sera repris lors de la définition du contraste dans le chapitre suivant. papillotement et effet stroboscopique Il existe de nombreuses études sur le sujet qui montrent de larges différences de résultats selon le protocole de test. On peut cependant retenir qu’une fluctuation de l'ordre de 10 Hz crée des dérèglements chez de nombreux sujets (phénomène souvent constaté chez des automobilistes conduisant le long d'une rue bordée d'arbres). Au delà de 80 Hz, il n'y a généralement plus de sensation de papillotement. Mais il ne s'agit encore une fois que d'une valeur statistique, et il reste un faible pourcentage de la population qui perçoit ce papillotement jusqu'à des valeurs bien supérieures. Pour ces sujets, un éclairage par lampes fluorescentes sur le réseau électrique à 50 Hz (d'où une fréquence de papillotement de 100 Hz) pose un réel problème d'inconfort. L'alimentation en haute fréquence (plusieurs kHz) résous ce problème. L'effet stroboscopique (qui consiste, par exemple, à percevoir une machine tournante comme si elle était à l'arrêt) peu se produire également avec des sources sur 50 Hz. On élimine ce risque en couplant des sources déphasées dans un même luminaire (montage duo ou trio). effet de l'âge sur les performances visuelles On constate facilement un effet de l'âge sur les performances visuelles, mais il est difficile de fournir des valeurs, car, bien souvent lors de tests, les sujets âgés compensent leurs perte de performance par d'autres biais (expérience concernant la tâche à exécuter par exemple). D'une manière générale il est demandé d'augmenter le niveau d'éclairement pour compenser cette perte de performance. Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 20 J.J. Delétré –Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble 10 - Compléments et remarques 1) Les raisonnements et les calculs Ceux que nous pouvons réaliser en photométrie ont une particularité : nous disposons d'outils qui appartiennent à de la "pseudo-physique" ! (de la physique mélangée à de la physiologie statistique : la courbe de sensibilité moyenne de l'œil humain). Nous pourrons donc à effectuer de nombreux calculs éventuellement très savants, mais nous ne serons plus en physique ! Nos résultats ne seront valides que dans la limite de la validité de notre courbe de sensibilité moyenne de l'œil humain. Tout résultat mis en défaut par l'expérience (insatisfaction usagère par exemple) n'est souvent que l'expression d'une divergence de l'œil de la personne insatisfaite par rapport à la courbe "moyenne". Le praticien peu attentif à cette remarque fondamentale croirait en toute bonne foi avoir réussi un éclairage "sans reproche" sous prétexte qu'il a appliqué scrupuleusement les consignes de calcul.28 2) L'éclairement est fonction de trois paramètres : - l'intensité lumineuse qui arrive dans une direction donnée, plus elle est importante, plus le point est éclairé - l'inverse du carré de la distance (d'où une décroissance rapide de l'éclairement avec la distance) pour une source lumineuse ponctuelle - l'inclinaison de la surface éclairée (cos α). Ordres de grandeur : Pleine lune, ciel sans nuage 0,2 lx bougie de ménage à 1m 1 lx Route, rue bien éclairée 20 à 30 lx Aube, crépuscule 50 lx bureau normalement éclairé 400 lx Éclairement horizontal extérieur - par ciel très couvert 5000 lx - dans une rue étroite par beau temps 10 à 20 000 lx - maximum mesurable sur terre 100 000 lx Seuil différentiel en éclairement Le seuil différentiel exprime la différence minimale qu’il doit exister entre deux éclairements pour que notre œil perçoive une différence. Cette notion est difficile à exprimer simplement, les valeurs ci-dessous doivent être considérées comme des rapports simples et commodes pour les projets. Seuil différentiel à long terme (la durée de sensation varie selon les individus) : E1/E2 = 1,2 (valeur pour des éclairements autour de 400 lx). Ce qui signifie que dans une salle qui doit être éclairée avec une valeur moyenne de 400 lux, les valeurs extrêmes peuvent varier entre 360 et 440 lux ( ± 10% = 20% au total) pour que peu de personnes ne s'en aperçoivent. On comprend alors que les consignes pour réaliser un éclairement moyen fixent une uniformité de 0,829 . Seuil différentiel à très court terme (vision de la différence quasi immédiate pour toute personne) : E1/E2= 2 soit une variation de l'éclairement dans un rapport de 1 à 2. 28 les cas d'insatisfaction usagère alors que le projet est correct du point de vue théorique sont nombreux, l'œil humain individuel révèle une grande dispersion par rapport à la moyenne ! 29 l'uniformité est le rapport : Emini/Emoyen (dans une salle ou sur une route) Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 21 J.J. Delétré –Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Comparaison d'éclairements Il est très difficile de comparer deux éclairement entre eux. Cela ne peut être réalisé qu'à deux conditions rarement réunies (sauf au laboratoire) : - les deux éclairements doivent être vus simultanément - les deux éclairements doivent avoir la même composition spectrale. Ces conditions ne sont pas remplies, par exemple, lorsque vous regardez dehors un jour très couvert (et que vous avez éprouvé le besoin d'éclairer votre bureau). Vous aurez tendance à trouver votre bureau plus éclairé que l'extérieur (influence de l'éclairement proche) alors que de façon quasi-systématique c'est dehors qu'il y a le plus de lumière (parfois dans un rapport 10 en faveur de l'extérieur : 400 lux dedans, 4 000 lux ou plus dehors). 3) La luminance Par contre si elle n'ont pas la même couleur (en fait, le même facteur de réflexion), notre jugement sera faussé. À facteurs de réflexion identiques, nous pouvons aussi comparer : une page et le mur d'un local, dans ce cas : - surface - distance - angle de vision sont différents la notion d'éclairement ne suffit plus, la notion de luminance s'impose. Si les deux pages de ce livre sont éclairées différemment, et si elles ont la même couleur (puisqu'elles sont constituées du même matériau), il est facile de dire que la plus éclairée est celle qui reçoit le plus de d'intensité, donc celle qui a la plus grande luminance. La luminance c'est la partie de l'éclairement qui parvient à l'œil - soit d'une source lumineuse : le risque est alors celui de l'éblouissement - soit de l'ensemble des éléments éclairés qui nous entourent, on parle alors d'équilibre des luminances de l'environnement, ou de contraste entre deux zones Dans tous les cas, il est conseillé de ne pas dépasser : - L < 2000 cd/m2 pour des sources de surface réduite (luminaires) - L < 500 cd/m2 pour des surfaces plus importantes (plafond murs) - pour les baies vitrées, ces valeurs sont souvent largement dépassées, il s'agit alors de prévoir des protections fixes ou mobiles pour ramener cette luminance à une valeur acceptable. 3.1 Le contraste Il y a deux expressions possibles du contraste : - celui qui sert au spécialiste de la vision Il caractérise la vision d'un objet sur un fond. On l'exprime sous la forme : C = (Lo - Lf)/Lf Avec : Lf = Luminance du fond Lo = Luminance de l'objet Exemple : un objet est vu si C > 0,01 (1%) c'est ce que l'on appelle le seuil différentiel en luminance On parle alors de contraste positif (objet plus clair que le fond) qui varie de 0 à ∞ contraste négatif (objet plus sombre que le fond) qui varie de -1 à 0 - celui qui sert à l'éclairagiste : Données de base pour l’éclairage des bureaux – janvier 2001 - page 22 J.J. Delétré –Laboratoire CRESSON - École d'Architecture de Grenoble Le déséquilibre constaté ci-dessus dans l'expression des contrastes conduit souvent à ne prendre en compte que le rapport simple entre les luminances : C = L1/L2 On compare alors facilement deux zones du champ visuel. Le résultat est souvent fourni sous la forme 1/X. Ci dessous un exemple de mesure de luminance dans un espace de travail (d'après : BAU DOC Bulletin n° 3 - mars 1993) Contrastes constatés : écran/document : 1/3 à 1/5 - écran/stores : 1/14 - écran/luminaires : 1/44 - écran/ciel : 1/167 C'est le contraste qui est important pour l'œil, donc pour l'impression de luminance. Pourtant, souvent encore les projets, ou les vérifications, s'arrêtent à l'éclairement (pour des raisons de coût d'appareillage et de durée de mesure). Dans le cas des locaux de travail, les consignes européennes vont dans le sens d'une obligation de prise en compte de la luminance. Les différentes valeurs de contraste tolérées sont indicatives, pour une tâche de travail, on peut retenir : - dans la zone centrale du poste de travail (l'ergorama) qui est concentrée sur une zone d'environ 1°, le contraste doit être au maximum de 2 (au pire de 10) - dans la zone périphérique (le panorama) ce contraste doit souvent ne pas dépasser 10 (au pire de 50) 3.2 Éblouissement L'éblouissement consiste en une sensation visuelle désagréable qui se produit lorsque l'équilibre des luminances dans notre champ visuel est trop déséquilibré. Cette notion fait appel à des techniques de détection et à des formulations parfois complexes, elle varie fortement avec l'âge : stable de 20 à 35 ans, elle varie du simple au double entre 35 et 70 ans. Pour simplifier, nous dirons qu'il y a deux sortes d'éblouissement : - l'éblouissement perturbateur qui entraîne une perte momentanée de la vision, et qui se produit lorsque la luminance atteint ou dépasse des valeurs extrêmes (vision du soleil sans protection, vue sur une partie de paysage très claire et très ensoleillée ...) ou que le contraste devient trop important (phares de voiture de nuit, vue sur l'extérieur depuis le fond d'une pièce sombre ...). Cet éblouissement qui fait référence à une "douleur" visuelle doit être systématiquement combattu lors de la réalisation d'un projet d'éclairage. Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 23 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble Il existe une situation particulière appelée "luminance de voile" qui se produit lorsque la brillance de l'objet observé crée une réduction de contrastes empêchant l'observation correcte (lecture sur papier glacé, vision sur écran d'ordinateur, reflet dans une vitre ...). Les écrans d'ordinateur à contraste négatif (lettres sombres sur fond clair) sont moins sensibles à ce problème que ceux à contraste positif. Il est souvent possible d'orienter différemment la tâche visuelle par rapport aux sources lumineuses pour éviter ce problème : La position de gauche montre une réflexion parasite. La position de droite évite les ombres et les reflets gênants. - l'éblouissement inconfortable qui entraîne une diminution de la performance visuelle sans atteindre la notion de douleur. Cet éblouissement est exprimable par le contraste (dans la plupart des cas). Le schéma ci-dessous donne les valeurs limites habituelles : Dans le cadre de l'ergonomie visuelle, les critères sont définis selon le schéma ci-dessous (le point au sommet du cône représente l'œil de l'observateur): limites du contraste de luminance entre la tâche visuelle (ergorama) et les sources parasites, selon leur positions dans le champ visuel (panorama). Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 24 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble 3.3 Les luminaires Lorsqu'ils sont situés dans le champ de vision, ils constituent un cas particulier d'éblouissement. Il a été étudié par différents auteurs, et actuellement les abaques de Bodmann et Söllner sont à la base de la définition des luminaires de basse et très basse luminance pour l'éclairage intérieur. Ils s'appuient sur une échelle de cotation allant de l'éblouissement inexistant (côté 0) à intolérable (côté 6), sur la nature de la tâche à effectuer, et sur le niveau d'éclairement nécessaire. La gène créée par un luminaire peut être instantanée ou à long terme. La vision sans protection du filament d'une lampe à incandescence crée une douleur instantanée, la vision de phares automobiles de nuit crée un contraste excessif, lié surtout au fait que la pupille est grande ouverte. Ci-dessous un exemple d'éblouissement inconfortable, la valeur mesurée de 22 000 cd/m2 est bien audessus de la limite acceptable (courbe) pour le luminaire n° 1. Cet exemple est tiré de mesures dans une salle de classe. D'après cours de DEA de M Fontoynont Pour permettre le choix de luminaires adaptés, les fabricants donnent les courbes de luminance de leurs luminaires en fonction de l'angle d'observation. Ces abaques (de Söllner) ne constituent que la méthode la plus communément adoptée à ce jour. D'autres techniques existent dont la dernière (UGR30 ) nécessite un traitement informatique par photographie (prise en compte de l'angle solide et de la position des sources dans l'espace). 30 Unified Glare Ratio : qui devient l'outil européen de travail sur les luminances Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 25 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble 4 Notions d'ergonomie visuelle 4.1 Définition L'ergonomie c'est : l'organisation méthodique du travail associée à l'aménagement de l'équipement en fonction des possibilités de l'homme31 . Il est utile de préciser que l'ergonomie est un tout, et qu'une approche qui ne prend en compte que la composante visuelle est incomplète. Il est commun de trouver des interactions avec des paramètres de posture, d'acoustique, de thermique... Nous renvoyons chacun à d'autres formations ou aux conseils d'un ergonome. Pour l'approche visuelle, disons tout de suite que l'éclairage idéal n'existe pas, il est toujours le résultat d'un compromis entre des données : techniques, culturelles (esthétiques... ), individuelles, relationnelles, historiques, économiques... Chacun d'entre nous diffère par sa façon de regarder le monde, il est donc important de prévoir un environnement lumineux variable dans l'espace et dans le temps. Cela dit, il est souhaitable en plus, que chacun puisse avoir le contrôle de cette variabilité. Le seul outil pertinent pour étudier le confort d'un local est la luminance. Elle seule permet de mesurer les catégories d'éblouissement, c'est à dire la mauvaise répartition des luminances. Malheureusement pour des raisons de rapidité, de matériel, et de coût, c'est souvent l'éclairement seul qui est pris en compte. 4.2 Les approches pluridisciplinaires32 Les approches in-situ des phénomènes d'ambiance (thermiques, acoustiques, lumineux... voire olfactifs et tactiles) montrent rapidement les limites de la monodisciplinarité. En effet, le même son ou la même lumière peuvent être ressentis de façon très différente, voire opposée, selon les sujets, les groupes sociaux, ou les moments. Par exemple : - un fragment sonore que vous aimez, selon qu'il est passé sur votre propre chaîne HI-FI à un moment qui vous convient, ou sur celle du voisin (donc à niveau bien plus faible) à un moment inopportun, conduira à deux comportements radicalement différents - un rayon de soleil pénétrant dans votre bureau peut selon le moment vous réjouir ou vous gêner fortement. Même si les conditions de température et d'éblouissement sont identiques, votre humeur ou votre activité induiront fortement cette réaction. Il s'agit donc de convoquer différentes disciplines pour comprendre la complexité de ces réactions. Différents travaux ont montré que trois approches complémentaires peuvent permettre une bonne compréhension des ambiances architecturales et urbaines : - une approche environnementale, qui privilégie les aspects physiques et physiologiques, et qui constitue l'essentiel du document que vous avez entre les mains, et met en avant le côté fonctionnel des rapports de l'homme au contexte. - une approche médiale (traitant du milieu) qui privilégie les aspects psychologiques et sociaux, et qui met en avant le côté fusionnel des rapports de l'homme au contexte. - une approche paysagère, qui privilégie les aspects sensibles, esthétiques et spatiaux, et qui met en avant le côté perceptif des rapports de l'homme au contexte. Cette nouvelle grille d'analyse se présente donc sous la forme d'un triangle au sommet duquel nous pouvons positionner nos trois approches, et on voit bien sur ce 31 Larousse 1998 - Nota : avant 1970, la 2 ème partie était libellée ainsi : - étude des conditions d'adaptation de l'homme à son travail (les notions évoluent !) 32 le texte qui suit s’appuie sur les travaux développés par le laboratoire CRESSON à l’école d’architecture de Grenoble, en particulier pour ces trois approches sur les travaux de P. AMPHOUX. Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 26 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble schéma qu'une intervention dans un seul des trois domaines n'a de sens que si c'est bien ce domaine qui concentre l'essentiel des problèmes rencontrés. La représentation ci-dessous donne une vue d'ensemble des ces trois domaines d'intervention ENVIRONNEMENT VISUEL Connu Physique/Physiologique Qualité visuelle MILIEU VISUEL Vécu Psychologie/Sociologie Confort visuel Éclairement sur la tâche visuelle Vitesse et précision Clarté Sécurité objective Bien-être/Convivialité Agrément/fatigue Sentiment de sécurité PAYSAGE VISUEL Sensible Création/Esthétique Beauté visuelle Équilibre des luminances et des couleurs Variabilité Impression d'espace, d'intimité On situe assez facilement sur cette figure les erreurs qui peuvent être commises : augmenter le niveau d'éclairement quand c'est sur la variabilité qu'il faudrait agir ou les actions à entreprendre: éclairer les murs pour donner une impression d'espace S'il faut bien convenir que ces approches varient d'un individu à l'autre et parfois en fonction du moment (par exemple l'effet de la mode : le "boum" des lampes indirectes à halogènes dans les années 1980, puis dans les années 1990, celui des halogènes miniatures basse tension...) elles permettent au moins de ne pas considérer l'éclairage comme une approche unique, et de se poser à chaque fois des questions dans ces trois domaines. La démarche pluridisciplinaire est toujours nécessaire pour traiter de notions aussi complexes que celles de confort ou d'ambiance, et des outils de ce type peuvent constituer des garde-fous pratiques, même si ils ne sont pas applicables à tous les cas. Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 27 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble 4.3 Bref aperçu de l'évolution historique des techniques d'éclairage L'histoire de l'éclairage électrique, bien que fort récente (la lampe à incandescence d'Edison date de 1879) peut aussi compléter notre vision du problème. Les sources actuelles et leur utilisation Depuis la crise de l'énergie, de nouvelles sources (ou plutôt des améliorations de sources anciennes) sont apparues, et chacun dispose d'une large palette pour éclairer l'espace. Le développement de sources intenses de petite dimension (incandescence - halogène, halogénures métalliques, sodium haute pression blanche) a relancé l'éclairage indirect très en vogue jusque dans les années trente. Cette technique qui évite les ombres et les reflets est très répandue pour l'éclairage des écrans d'ordinateurs. Elle commence à être utilisée même en situation industrielle, l'intérêt étant une maintenance facilitée par une hauteur moindre des sources (nettoyage plus facile donc plus courant, remplacement moins coûteux... donc coût d'installation et de maintenance réduits). Son principal handicap réside dans une plus grande difficulté de projet, les données sur la réflexion des matériaux des parois ne sont pas toujours simples ni faciles à obtenir. L'halogène suscite un engouement dans le grand public et les commerces, cette passion est justifiée33 , du moins dans la mesure où cela ne conduit pas aux surchauffes que l'on peut rencontrer dans certaines boutiques basses de plafond (le réflecteur dichroïque34 n'étant pas suffisamment efficace dans ce cas). De nombreux commerces s'orientent de plus en plus vers les nouvelles sources sodium blanches, plus performantes et à durée de vie bien plus longue. Inversement la fluorescence est toujours injustement boudée en France. La diversité des teintes et des indices de rendus de couleurs devrait briser la connotation "industrielle" de ces sources. En plus leur rendement 4 à 5 fois supérieur à l'incandescence classique, et leur durée de vie 8 à 10 fois plus longue, sont des facteurs économiques majeurs lors d'un bilan global (il est vrai que le faible coût du kWh en France est probablement pour beaucoup dans cette différence avec les autres pays industrialisés). Ces sources existent depuis quelques années sous forme de fluorescence compacte, pouvant remplacer en de nombreuses circonstances l'incandescence. De nombreux pays en voie de développement ne s'y sont pas trompés, et les utilisent plus largement, puisqu'elles allient faible consommation et peu d'apport sous forme de chauffage. Enfin des lampes fluorescentes alimentées en haute fréquence (10 à 20 000 Hz) permettent une augmentation de l'efficacité lumineuse (de 20 à 30%), une gradation de la lumière, et éliminent totalement l'effet de "papillotement" qui reste gênant pour certaines personnes. Leur coût très légèrement supérieur aux lampes fluorescentes classiques devrait baisser avec une généralisation de leur utilisation. 33 le principal progrès vient des sources TBT (très basse tension) qui par leur miniaturisation ont permis une meilleure photométrie des luminaires, et une plus large liberté dans leur création. 34 réflecteur sélectif constitué d'une mosaïque de petits miroirs capables de réfléchir la partie visible de la lumière vers l'avant, tout en laissant passer la partie infra-rouge (chaleur) vers l'arrière ... ce dispositif n'a de sens que si l'on évacue cette chaleur arrière ! Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 28 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble L'éclairage fonctionnel C'est celui qui fait l'objet des projets d'éclairage au sens technique du terme. "Les techniques d'éclairage sont un ensemble de méthodes permettant d'assurer, en qualité et en quantité, une distribution de lumière adaptée à l'usage désiré" 35 Les cas d'espaces clos ont fait l'objet d'études, de méthodes de calcul, et de recommandations depuis de nombreuses années (pour mémoire l'AFE36 en est en 1993 à sa 11e édition revue et corrigée de valeurs recommandées d'éclairement des locaux de travail). Actuellement l'AFE préconise par exemple 425 lux comme éclairement moyen à maintenir37 pour un éclairage de bureau (travaux généraux)... qu'en était-il précédemment ? - en 1951 : 200 lux étaient préconisés par R.Laurent38 - en 1961 : entre 400 et 800 lux............. par les services de Philips39 - en 1965 : 300 lux .................................. par Dourgnon et Déribéré40 - en 1971 : 400 lux .................................. par l'AFE (recommandations) - en 1977 : 500 lux .................................. par l'AFE (recommandations) - et enfin en 1993 : 425 lux .................. par l'AFE (recommandations dont la base de calcul à changé, et qui correspond en fait aux 500 lux précédents). En fait, en 1971, les valeurs d'éclairement réellement réalisées dans des immeubles de bureau (bureaux paysagés) étaient plus proches de 800 lux que des 400 lux préconisés, et P. Lemaigre-Voreaux41 pouvait conclure dans un article de la Revue Française de l'Électricité (EDF) de 1972 : "L'évolution des niveaux d'éclairement en éclairage artificiel pourrait conduire en France au slogan publicitaire : 2000 lux en l'an 2000 " ! A la même époque, et toujours pour un travail de bureau, l'écart d'éclairement réellement réalisé entre les différents pays industrialisés était énorme42 (les chiffres cidessous sont des valeurs moyennes relevées in-situ) : Allemagne 750 lux Australie 650 lux Autriche 625 lux Canada 3000 lux Danemark 600 lux Etats Unis 3000 lux France 650 lux Grande Bretagne 750 lux Japon 750 lux Pays Bas 625 lux Pologne 400 lux On voit là encore le décalage entre les richesses nationales, les cultures, la pression des grands fabricants... où se situe la valeur "idéale" ? La réponse à cette question n'est pas apportée par l'année 1973 (et le premier choc pétrolier), qui marque une date charnière dans la course au "toujours plus"43 . 35 VANDEPLANQUE P. : L'éclairage : notions de base, projets d'installation - Paris - Technique et Documentation - 1981 - 170p 36 AFE : Association Française de l'Eclairage : 52 Bd Malesherbes - 75008 Paris - C'est une association de type "société savante" regroupant la majorité des chercheurs, constructeurs, projeteurs et installateurs en éclairage. Elle travaille en liaison avec la CIE (Commission Internationale de l'Eclairage). Ses recommandations sont en général reprises par les législations ou les cahiers des charges. 37 limite inférieure de l'éclairement moyen, au moment où les opérations d'entretien doivent être obligatoirement effectuées, pour garantir la pérennité des performances visuelles des utilisateurs. Ce nouveau concept est lié à une homogénéisation internationale des valeurs. 38 LAURENT R. : L'éclairage électrique moderne - Paris - Dunod - 1950 39 FAVIE J.W., DAMEN C.P., HIETBRINK G., QUAEDFLIEG N.J. : Eclairage - Eindhoven Bibliothèque Technique Philips - 1961 - 196p 40 LEBLANC M.,DOURGNON J., DERIBERE M.: L'éclairage et l'installation électrique dans le bâtiment - Paris - Eyrolles - 1965 41 physicien, animateur de l'AFE durant de nombreuses années 42 Résultat d'une enquête de la CIE menée en 1970 par le comité technique 4.1 Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 29 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble Enfin, il n'est pas possible de terminer ce tour d'horizon sans pointer quelques autres valeurs recommandées plus anciennes : - en 1913, la CIE (Commission Internationale de l'Eclairage) est crée, elle préconise alors d'atteindre 19 lux pour un travail de mécanique 44 , - en 1924, cette même CIE préconise un niveau d'éclairement de 50 lux pour le même travail de mécanique fine. Actuellement le même travail est recommandé avec un éclairement minimum de 1500 lux ! S'il fallait convaincre que ces valeurs ne sont pas que physiologiques ! 43 même si les nouvelles sources permettent actuellement d'atteindre un niveau d'éclairement équivalent pour un consommation moindre (les valeurs actuellement mises en œuvre et mesurées in-situ sont proches des recommandations). 44 Rappelons au passage que 1 lux est l'éclairement fourni par une bougie à 1 mètre de distance, que c'est sur cette base que s'est construite la photométrie à ses débuts, et que bien sûr en 1913 il était remarquable de fournir l'équivalent de 19 bougies à un mécanicien ! Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 30 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble 11 - Les éléments du projet d'éclairage intérieur 1 - Dans le cas d'un local de travail (éclairement uniforme) C'est généralement dans ce cas que le "projet type" qui est décrit dans les ouvrages s'applique. Il fait référence à un local parallélépipédique, mais il est toujours possible de traiter des locaux différents par approximation. Les principaux points à prendre en compte sont les suivants : - les sources lumineuses : par soucis évident d'économie les sources incandescentes ne sont quasiment jamais utilisées - les luminaires : le premier critère est celui du "non éblouissement" sous des angles horizontaux faibles (la luminance de la source doit rester dans des limites fixées par des abaques : abaques de Söllner, résultant de mesures effectuées sur un grand nombre de sujets) le second critère est celui de l'ouverture du luminaire (angle d'ouverture) donné dans les catalogues par une lettre majuscule variant de A à J (A pour un luminaire très fermé, J pour le plus ouvert). Plus le luminaire sera fermé (lettre proche de A), plus il faudra les rapprocher pour avoir une valeur relativement constante de l'éclairement. Dans ce cas on imagine facilement que la réflexion des murs aura peu d'importance (pas ou peu de flux réfléchi). le troisième critère est son rendement photométrique (en général compris entre 40 et 80 %). Ce critère conditionne son coût d'usage. et bien sûr des critères esthétiques et économiques... - l'éclairement à réaliser dans le local est donné par des tables régulièrement mises à jour par l'AFE (association Française de l'Éclairage) en fonction de l'usage du local. Ces valeurs sont à corriger en fonction de différents paramètres, par exemple : âge des utilisateurs, local aveugle, ...45 - cet éclairement est à corriger aussi en fonction de l'entretien du local. en effet, les sources vieillissent, et perdent du flux, les luminaires et les murs se salissent... un coefficient de "dépréciation" (variable entre 1,1 et 2) tient compte de toutes ces pertes. Remarquer d'affecter un coefficient de dépréciation de 1,5 revient à majorer de 50% la puissance installée au départ46 . - le dernier point, le moins important dans l'ordre d'influence est donné par le facteur de réflexion des parois, qu'il ne faut pas confondre avec leur couleur (à couleur différente peut correspondre un même facteur de réflexion, et vice-versa). On a vu au-dessus que ce point aura d'autant plus d'importance que les luminaires seront ouverts, il sera également plus important que le local aura une faible surface au sol par rapport à la surface des murs. 2 - Dans les autres cas Seules les techniques de calcul point par point, et des expérimentations peuvent donner des résultats dans ces cas. L'expérience du projeteur ou de l'architecte et la comparaison à des situations semblables sont des atouts appréciables. 45 Voir dans les annexes l'usage de la norme X35 103 : principes d'ergonomie visuelle appliqués à l'éclairage des lieux de travail 46 Voir dans les annexes la partie maintenance Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 31 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble 12 - Le cas du travail sur poste informatique Les différents contrastes des écrans, induisent des comportements visuels différents, et ne nécessitent pas exactement le même environnement lumineux : - fond sombre et caractères clairs (contraste positif), dans ce cas, le fond d'écran doit être malgré tout suffisamment clair pour éviter la vision scotopique (déplacement de la courbe de réponse de l'œil). - fond clair et caractères sombres (contraste négatif) souvent plus confortables. Pour ce qui est de l'environnement lumineux, il faut bien entendu éviter les réflexions parasites (plus visibles sur un écran sombre) ou les contrastes importants : - il ne faut donc pas situer un poste de travail face ou dos à une baie vitrée non protégée (store ou autre système) - le choix des luminaires est important : luminaires à basse ou très basse luminance. Il sera d'autant plus nécessaire de soigner l'implantation que la luminance des luminaires sera élevée. Dans de nombreux cas, un éclairage individuel de complément réglable en position et en puissance est souhaitable. Pour éviter les contrastes trop intenses, cet éclairage ne doit jamais être utilisé seul, et son éclairement ne doit pas dépasser 5 fois l'éclairement général47 . Les schémas ci-dessous résument les principales consignes classiques. Contrastes maximums à ne pas dépasser entre l'écran, la feuille de lecture, le plan de travail et les fonds proches et éloignés (Remarquez que la feuille est sur un support permettant de la situer à la même distance de l'œil que l'écran) Représentation des zones qui peuvent être source de reflets sur un écran. Dans la plupart des cas, le changement de position de l'écran ne sera pas suffisant pour éviter ces reflets, il faut alors intervenir aussi sur les sources de lumière. 47 Attention, dans la pratique, l'éclairement apporté par une lampe d'appoint est toujours très élevé (souvent plus de 1000 lux) et le déséquilibre de luminances lié à cette source devient vite très fatiguant, surtout si elle est utilisée seule : zone de travail très éclairée, reste du local sombre. Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 32 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble ANNEXE 1 - CRITÈRES DE CHOIX DES SOURCES LUMINEUSES 1 - Le Flux lumineux et l'efficacité lumineuse : L'expression de l'efficacité lumineuse (rapport du flux de la source à sa puissance : exprimé en lm/W) montre bien les différences de coût que peut induire le choix d'une famille de source par rapport à une autre. 2 - Température de couleur (T°K) et indice de rendu des couleurs (IRC). T°K : de 2 700 °K à 8 000 °K selon les sources IRC : de 0 à 100 Les deux valeurs sont indépendantes, mais n'ont de signification qu'ensemble (un rendu ce couleur dépend de la dominante de la teinte). 3 - Durée de vie moyenne Il s'agit pour les lampes à incandescence d'une durée normalisée : 1000 h, et pour les incandescence à halogène : 2000 h. De nombreuses lampes du second type durent en réalité plus longtemps. Pour toutes les autres lampes, leur durée de vie varie avec le nombre d'allumage/extinction, les valeurs données tiennent en général compte de 2 cycles de ce type par jour. Le tableau de la page suivante résume ces caractéristiques. Il existe trois grandes familles de sources lumineuses 1 – Les sources qui éclairent parce qu’un élément est porté à haute température (incandescence). C’est la famille la mieux connue du grand public, elle s’est enrichie depuis une vingtaine d’années des sources à halogènes, plus blanches et d’une durée de vie plus longue. 2 – Les sources à excitation électronique dans les gaz, dites sources « à décharge ». Les gaz commerciaux utilisés pour l’éclairage sont essentiellement le mercure et le sodium. Les pressions de gaz dans l’ampoule sont basses ou élevées (basse et haute pression). Les sources à sodium sont plutôt jaunâtres, et leur appellation commerciale comporte toujours le terme sodium. Les sources à mercure sont plutôt verdâtres, et elles comprennent une famille particulière : les sources fluorescentes, qui sont excitées dans l’ultraviolet, et dont le rayonnement devient visible par action photochimique du revêtement intérieur de la source. Les fluo-compactes constituent l’élément de substitution aux sources incandescentes. Les lampes à induction ont la particularité de ne pas avoir d’électrodes (qui constitue la partie d’usure des autres sources). 3 – Les sources à excitation électronique dans un solide (électroluminescence) dont les représentants principaux sont actuellement les LED (Light-Emitting Diodes). Peu commercialisées pour l’instant, elles sont probablement promises à un bel avenir du fait de leur durée de vie (plus de 100 000 heures). Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 33 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble ANNEXE 2 - CRITÈRES DE CHOIX DES LUMINAIRES Le choix d'un luminaire (du point de vue photométrique, en oubliant les questions de coût et d'esthétique) se ramène à la connaissance de sa courbe photométrique et de sa luminance en fonction de l'angle d'observation. 1 - la courbe photométrique : répartir le flux Elle représente la façon dont le flux sort du luminaire (courbe de répartition des intensités lumineuses). Selon les usages, on préfèrera une courbe pointue (très directionnelle) ou très aplatie (peu directionnelle). De nombreux luminaires ont actuellement des courbes en "aile de chauve-souris" qui permettent d'équilibrer l'éclairement à plus grande distance, et possèdent l'appellation "très basse luminance" garantissant l'éblouissement. large ouverture faible ouverture aile de chauve-souris lèche-mur La façon dont le flux sort des luminaires permet de nommer le type de luminaire. Cidessous les appellations courantes : APPELLATION COURANTE DES LUMINAIRES EN FONCTION DE LA RÉPARTITION DU FLUX INFÉRIEUR Intensif Extensif 100% 100% Semi direct 90%> Fi > 60% Mixte Diffus 50% Semi indirect Indirect 40%> Fi > 10% 0% 2 - La luminance en fonction de l'angle d'observation : cacher la source Le schéma ci-dessous montre que les luminaires les plus éloignés sont ceux qui risquent le plus de se trouver dans le champ visuel d'un usager. γ1 γ2 Plan de l'oeil Ceci est d'autant plus vrai que le local est plus profond. Les constructeurs proposent diverses solutions pour cacher la source de la vue directe, la plus simple consiste à définir un angle de défilement γd inférieur à une valeur donnée (proche en général de 70°). Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 34 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble Lampe compacte Luminaire ouvert γd Luminaire à paralume γd γd Les fabricants fournissent pour les luminaires les plus performants les courbes de luminance en fonction de l'angle d'observation, et tracent ces courbes sur des réseaux de luminance-limite en fonction de la tâche à accomplir et du degré de qualité exigé. La lecture et l’interprétation de ces courbes ne fait pas partie d’une initiation rapide à l’éclairage des locaux. 3 – Les critères de choix non photométriques 3.1 – protection électrique Il existe 3 classes selon le principe mis en oeuvre Classe 1 Isolation avec mise à la terre des parties métaliques Classe 2 Classe 3 Double Isolation Alimentation en très basse tension 12 V 3.2 - protection contre les influences extérieures Il s’agit des corps solides (doigt, objet, ou poussière) et de l’eau Degré 0 1 2 3 4 5 6 1 er chiffre introduction de corps solides 2 ème chiffre introduction de l'eau non protégé eau verticale verticale à 15° eau en pluie projections jets d'eau paquets de mer plus de 50 mm plus de 12 mm plus de 2,5 mm plus de 1 mm poussière poussière sous pression 7 8 immersion immersion prolongée 3.3 - protection contre les chocs Degré de protection contre les chocs 1 5 7 9 Energie de chocs (en Joules) 0,225 J 2 J 6 J 20 j Qui correspond à une chute d’une 150 g 500 g 1,5 kg 5 kg Masse d’une hauteur de : de 15 cm de 40 cm de 40 cm de 40 cm Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 35 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble ANNEXE 3 - LE SUIVI D'UNE INSTALLATION 1 - Perte de flux des sources Toutes les sources perdent du flux durant leur fonctionnement, le schéma ci-dessous montre le cas de tubes fluorescents : 100 90 dernière génération amélioré 80 70 60 50 40 standard 30 20 15000 12500 10000 7500 5000 2500 10 0 0 Flux lumineux relatif (en %) Perte de flux de différents types de tubes fluorescents durée de fonctionnement (en heures) Il est facile de voir sur ce diagramme qu'au bout de 3 ans de fonctionnement (7500 heures)une installation peut avoir perdu : 6% ; 20% ou 27% selon le type de tubes fluorescents choisis. Entre les extrêmes il y a un rapport de flux résiduel de 94/73 = 1,28 ! soit 28% de tubes en moins à installer pour un résultat identique (si il y a un changement de tubes tous les trois ans). 2 - Entretien Variation de l'éclairement d'un local avec la durée d'utilisation Perte de flux Éclairement 100% 80% Valeur maintenue à 3 ans 60% 40% 2500 h 1 an 5000 h 2 ans 7500 h 3 ans 10 000h 4 ans 12500 h 5 ans Durée d'utilisation de l'installation On voit que le premier entretien qui a lieu au bout d'un an (nettoyage des sources et des luminaires) remonte l'éclairement de 70 à 90%, et qu'un nettoyage plus complet au bout de 3 ans permet de retrouver la perte de flux des tubes. Les résultats ci-dessus sont explicites, mais si l'on ne change pas les tubes au bout de 3 ans, la valeur minimale va vite décroître et passer sous les 60%. Or avec 60% de flux maintenu à 3 ans, il faut installer : E/0,6 = 1,6E ! soit un éclairement de départ majoré de 60% : pour un bureau cela signifie passer de 425 à 680 lux le jour de la réception des travaux ! Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 36 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble ANNEXE 4 - LA RÉGLEMENTATION • Décret 83-721 (2 août 83) fixant les minima d'éclairement réglementaires (circulaire du 11 avril 84) Les valeurs données dans ce règlement supposent que le travailleur est à son poste de travail, en position de travail. Les valeurs minimales sont les suivantes : Voies de circulation intérieure Escalier et entrepôt Locaux de travail, vestiaires, sanitaires Locaux aveugles affectés à un travail permanent 40 60 120 200 L'éclairage peut être obtenu au moyen d'éclairage et localisé Selon le type de tâches on peut retenir les valeurs minimales suivantes (en lux): mécanique moyenne, travail de bureau 200 bureau de dessin, mécanographie 300 mécanique fine, comparaison de couleurs 400 électronique, contrôles 600 Tâche très difficile 800 De plus, sauf impossibilité prouvée, ou incompatibilité avec les tâches à accomplir, l'éclairage naturel et la vue sur l'extérieur sont obligatoires. Le schéma ci-dessous résume les contraintes légales de ce point de vue : Sbv 3m Sp 1m • Sbv > Sp/4 avec Sp = surface de la plus grande paroi donnant sur l'extérieur. Pour Sbv on ne compte que la surface au dessous de 3m et au dessus de 1 m Recommandations de l'AFE : éclairage intérieur des lieux de travail (oct 93) Dans le cas de ces recommandations, le local est vide, les mesures se font sur le poste de travail non occupé, et les valeurs fournies sont des valeurs moyennes à maintenir (fonction de la maintenance). Elles sont souvent prises comme référence dans le cahier des charges du bâtiment. • Décret 91-451 (14 mai 91) sur la prévention des risques liés au travail sur écrans de visualisation (qui dépasse largement le cadre du simple éclairage) • Norme NFX 35-121 : travail devant écran de visualisation et clavier. Aménagement du local et du poste de travail (Juin 87) Norme NFX 35-103 : principes d'ergonomie visuelle applicables à l'éclairage des lieux de t r a v a i l (oct 90) • Cette dernière norme montre qu'il est nécessaire de modifier une valeur d'éclairement donnée selon la tâche à effectuer, le local et les usagers. Données de base pour l’éclairage des bureaux –25/11/03- page 37 J.J. Delétré - École d'Architecture de Grenoble