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LES AVIS DU CONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL DU LIMOUSIN Décentralisation et Pouvoir réglementaire RAPPORTEUR : M. Stéphane MONCHAMBERT CHARGE D’ETUDES : M. François LAURENT Rapport n°2014 – 07 adopté lors de la séance plénière du 4 Novembre 2014 Décentralisation et Pouvoir réglementaire RAPPORTEUR : M. Stéphane MONCHAMBERT CHARGE D’ETUDES : M. François LAURENT DECENTRLALISATION ET POUVOIR REGLEMETAIRE RAPPORT N ° 2014 - 07 « DECENTRALISATION ET POUVOIR REGLEMENTAIRE » ADOPTE A LA MAJORITE DES VOIX LORS DE LA SEANCE PLENIERE DU 4 NOVEMBRE 2014 66 VOTANTS 46 POUR Collège 1 : « Entreprises et activités professionnelles non salariées » M.M.BRUNAUD, LIMOUSIN, NESTI, Mme BEAUBELIQUE (CCIR du Limousin) M.PERIE (MEDEF) M.BRANDY (Fédérations régionales du Bâtiment et des Travaux publics) M.COINAUD (CGPME) M.LAVENT, Mme NEXON (Chambre régionale de Métiers) Mmes BENALI, HORY (Pôles de compétitivité) M.ROCHE, Mme GENDRAUD (Unions professionnelles artisanales régionales) MM.COSTE, GOUPY (Chambre régionale d’Agriculture) M.CORNELISSEN (FRSEA)) M.BENOITON (Centre régional des jeunes agriculteurs) M.JACOPE (Confédération paysanne du limousin) M.MONTCHAMBERT, Mme PREVOST (UNAPL) M.SARRE (Centre régional de la propriété forestière du limousin et Boislim) Collège 2 : « Organisations syndicales de salariés » MM.GUILLEMOT, NEMPON, LEYRAT, Mme BOUZET (Union régionale CFDT) M.GAY (Union régionale CFE-CGC) M.POUYAUD (Union nationale des syndicats autonomes) Collège 3 : « Organismes et associations participant à la vie collective de la région » Mme ALLARD (Union régionale des associations familiales) M.GRAND (CARSAT) M.VIROLE (Centre régional d’études et d’actions pour les handicaps et inadaptations en limousin) M.GLANTENAY (Secours catholique et populaire, Emmaüs) 4 MM. POIRSON, Mme SABOURDY (Chambre régionale d’économie sociale/ Mutualité) M.ROBERT (Union fédérale des consommateurs) M.CAPY (Centre régional Information jeunesse) M.TERRIER (Centre hospitalier universitaire) M.GROLEAU (Fédération régionale des chasseurs) M.GECKO (Ecoles d’ingénieurs) M.VAREILLE (Enseignement supérieur et recherche) M.TERREFOND (Comité régional olympique et sportif) M.BRUZAT (Conseil régional des jeunes) M.PRIOLET (Union régionale des fédérations de pêche et de protection du milieu aquatique Auvergne-Limousin) M.CHEZALVIEL (Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles) Mme RAYNAUD (Personnalité qualifiée dans le domaine de l’environnement et du développement durable) Collège 4 : « Personnalités qualifiées » M.BORDE, Mmes BARAT, DESTEVE 6 ABSTENTIONS Collège 2 : « Organisations syndicales de salariés » Mme BARBAUD – VAURY (FSU) Collège 3 : « Organismes et associations participant à la vie collective de la région » M. LECLERE (Chambre régionale d’économie solidaire) M.LERESTEUX (UFOLIM) Mme LE MORVAN – PERROT (Secteur de la culture) Mme MAZERM (Limousin nature environnement) M.LE SAUX (Association limousine climat énergie) 14 CONTRE Collège 1 : « Entreprises et activités professionnelles non salariées » M.MOUZAT (Mouvement de défense des exploitations familiales) Collège 2 : « Organisations syndicales de salariés » MM.BRIGOULET, CROZAT, GORCE, ROMAIN, SOURY, Mmes , DUTILLET, LEGRAND, SALAVIALE (Comite régional CGT) MM.LEFRERE, JANOT, MERPILLAT, ROZIER, Mme CAQUOT (Union régionale CGT-FO) 5 LEXIQUE DES TERMES JURIDIQUES - Arrêté : Décision exécutoire à portée générale ou individuelle émanant d’un ou plusieurs ministres ou d’autres autorités administratives ; - Décentralisation : Système d’administration consistant à permettre à une collectivité de s’administrer elle même sous le contrôle de l’Etat, en la dotant de la personnalité juridique, d’autorités propres et de ressources financières ; - Déconcentration : Système qui consiste pour l’Etat à confier des pouvoirs de décision à des autorités qui parlent en son nom, dans différentes circonscriptions (Ex : préfet) - Décret : Décision exécutoire à portée générale signée soit par le Président de la République, soit par le Premier ministre ; - Etat unitaire : Etat comportant un centre unique d’impulsion politique auquel la population est uniformément soumise sur tout le territoire, les circonscriptions territoriales ne jouissant d’aucune autonomie politique ; - Etat régional : Il s’agit d’une forme d’Etat qui se caractérise par la reconnaissance d’une réelle autonomie politique et institutionnelle au profit des entités régionales. Toutefois, à la différence de l’Etat fédéral, le pouvoir de l’Etat reste unitaire par certains de ses aspects même si une compétence normative est reconnue aux entités régionales, par exemple le pouvoir de voter la loi dans le cadre de la région (Italie, Espagne) ; - Etat fédéral : Etat composé de plusieurs collectivités politiques (Etats fédérés) auxquelles il se superpose. La constitution fédérale répartit les compétences entre l’Etat fédéral et les Etats membres ; - Loi organique : Loi votée par le Parlement pour préciser ou compléter les dispositions de la Constitution. 6 SOMMAIRE AVIS : Première partie..........................................................................................................11 Introduction ..........................................................................................................................13 CHAPITRE I : La décentralisation et le pouvoir normatif des collectivités territoriales ..........15 I - La décentralisation, un processus qui s’accélère depuis 30 ans ...................................15 1 / De la centralisation à la décentralisation ...................................................................15 A - Le tournant de 1982 ..............................................................................................15 B - L’acte II de la décentralisation ...............................................................................16 C - L’acte III de la décentralisation..............................................................................17 D - La décentralisation au cœur de l’action publique...................................................17 II - L’affirmation du pouvoir réglementaire local avec la décentralisation ...........................18 1 / Le pouvoir réglementaire national .............................................................................18 A - Les détenteurs du pouvoir réglementaire ..............................................................18 B - L’incidence du droit de l’Union européenne sur le droit interne des Etats membres de l’Union européenne................................................................................................19 2 / Le pouvoir réglementaire local ..................................................................................20 A - La reconnaissance du pouvoir réglementaire local................................................20 B - Un pouvoir réglementaire local résiduel et subordonné ........................................21 C - Une autonomie souhaitée par les collectivités territoriales ....................................22 3 / Les marges de manœuvre accrues du pouvoir réglementaire local reconnues par la Constitution....................................................................................................................22 A - L’expérimentation « Transfert de compétences » » ...............................................23 B - L’expérimentation normative .................................................................................24 4/ Les collectivités à statut particulier et les modalités étendues d’exercice du pouvoir réglementaire local.........................................................................................................25 A - La Corse ...............................................................................................................25 B - L’outre - mer..........................................................................................................26 5/ L’acte III de la décentralisation : le pouvoir réglementaire d’adaptation des régions...27 A - Le renforcement des responsabilités régionales....................................................27 B - La réelle portée de ce pouvoir d’adaptation accordée aux régions ? ....................28 a) La différenciation par rapport à l’expérimentation normative.............................29 b) L’exemple emblématique de la Corse ..............................................................30 c) L’absence d’une réelle volonté de réforme pour un pouvoir normatif autonome des collectivités territoriales..................................................................................30 CHAPITRE II : Le pouvoir normatif et les régions d’Europe..................................................30 1 / Le modèle fédéral et les Etats régionaux ..................................................................31 A - Les Etats fédéraux ................................................................................................31 B - Les Etats régionaux...............................................................................................31 2 / Les principales formes d’organisation territoriale des pays de l’Union européenne ..32 3 / L’évolution de l’organisation territoriale en Europe ....................................................33 AVIS : Deuxième partie ........................................................................................................35 CHAPITRE I : Les enjeux du pouvoir normatif local..............................................................37 I - L’immobilisme institutionnel face au pouvoir d’adaptation local .....................................37 1 / L’absence de réelles avancées depuis 2003.............................................................38 a) L’attitude du Conseil constitutionnel .................................................................38 b) La continuité institutionnelle par le projet de loi actuel......................................38 2 / La logique d’un Etat unitaire avec une organisation décentralisée ............................39 II - Les opportunités pour la mise en place du pouvoir normatif local................................39 A - Le pouvoir d’adaptation des régions face à un environnement institutionnel en mutation......................................................................................................................40 a) L’absence de clause générale de compétences dans le projet de loi ...............40 b) La nouvelle carte des régions...........................................................................40 7 c) Des collectivités territoriales régionales plus fortes...........................................42 B - Le pouvoir d’adaptation des régions et le pouvoir normatif national......................42 III - Les difficultés pour l’exercice du pouvoir normatif local ...............................................43 1 / Le principe de l’indivisibilité de la République............................................................43 2 / Les sources de difficultés liées à la réforme territoriale .............................................44 A - Des centres de décision éloignés du citoyen.........................................................44 B - Risque de fracture entre la métropole et les territoires périphériques ....................45 C - L’organisation territoriale de l’Etat, et les conséquences pour l’échelon départemental.............................................................................................................47 D - Les ressources financières....................................................................................47 CHAPITRE II : Les champs d’adaptation réglementaire possibles........................................49 I - L’évolution du rôle de l’Etat ...........................................................................................49 II - Les domaines d’adaptation réglementaire des régions.................................................50 A - Les compétences de droit commun.......................................................................50 B - Les champs des nouvelles compétences ..............................................................57 Conclusion ...........................................................................................................................58 ANNEXES ............................................................................................................................59 ********** 8 L’avis du CESER Les enjeux du pouvoir normatif local Le pouvoir réglementaire Des collectivités territoriales SYNTHESE : « DECENTRALISATION ET POUVOIR REGLEMENTAIRE » Depuis 1982, une politique de décentralisation qui s’amplifie par un transfert continu et important de compétences ; Une affirmation du pouvoir réglementaire local qui se dessine avec les actes successifs de décentralisation ; Un pouvoir réglementaire territorial consacré par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République : Cependant un pouvoir réglementaire local résiduel et subordonné à la loi et au règlement national ; Des marges de manœuvres accrues du pouvoir réglementaire local reconnues par la Constitution : Une autonomie normative étendue pour les collectivités territoriales, mais des résultats décevants ; L’acte III de la décentralisation et le pouvoir réglementaire d’adaptation des régions : Des compétences renforcées mais un pouvoir réglementaire local qui s’inscrit dans la continuité d’une logique institutionnelle d’un Etat unitaire. Un pouvoir normatif local face à un environnement institutionnel en pleine évolution ; Les opportunités pour la mise en place d’un pouvoir normatif local : La disparition du principe de clause générale de compétence ; La mise en place de schémas prescriptifs ; Les difficultés pour l’exercice du pouvoir normatif local : Les principes constitutionnels ; Les conséquences potentielles de la réforme territoriale : éloignement géographique des centres de décision, risque de fracture territoriale infrarégionale, concurrence interrégionale,… Les incidences du projet de loi sur les domaines de compétences de la Région : Une consolidation du pouvoir réglementaire en matière de développement économique par l’élaboration d’un schéma prescriptif ; Mais, une autonomie réglementaire circonscrite par le droit européen ; L’affirmation de la Région dans la mise en œuvre de la politique touristique ; Un rendez vous manqué en matière de formation professionnelle, par l’absence d’un schéma prescriptif ; Un rôle majeur dans l’aménagement du territoire, à coté de l’Etat qui doit conserver et jouer un rôle moteur ; De nouvelles compétences ; voierie, transports scolaires,… Interrogations sur les moyens budgétaires afférents ; Un environnement institutionnel dans un cadre territorial recomposé : Qui ne doit pas être générateur d’absence de proximité sociale et d’affaiblissement de cohésion territoriale ; Qui doit œuvrer pour la pérennisation de politiques qualitatives déjà engagées (gratuité des manuels scolaires, emplois associatifs,…) ; Qui doit assurer un équilibre entre le fait métropolitain et les territoires en zones éloignées. 9 AVIS : Première partie Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Introduction Par 1courrier du 18 mars 2014, le Conseil Economique, Social et Environnemental Régional a été saisi par le Président du Conseil Régional du Limousin, à propos du pouvoir d’adaptation normatif pour les collectivités territoriales régionales. Ce pouvoir d’adaptation est prévu par l’article premier d’un des deux projets de loi, adoptés en Conseil des ministres, le 18 juin 2014 : - Le 2premier relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral ; - Le deuxième portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République, et notamment sur le renforcement des compétences et responsabilités des Conseils régionaux. Cette faculté d’adaptation normative est, pour les collectivités territoriales, la possibilité d’exercer la capacité de modifier et d’adapter les dispositions législatives ou réglementaires nationales, afin de mieux prendre en compte certaines spécificités ou contextes locaux, pour une meilleure efficacité de l’action publique territoriale. A ce titre, la Région Limousin a saisi le CESER Limousin, à propos de l’aspect novateur de la disposition de ce projet de loi, qui semble aller bien au-delà des différentes initiatives proposées jusqu’alors par l’Etat, notamment, par l’acte II de la décentralisation voté en 2003. La question sur les opportunités liées à ce pouvoir normatif local d’adaptation dont pourrait bénéficier la Région Limousin est posée. Néanmoins, ce nouveau contexte juridique de pouvoir adapter une règle nationale à un contexte local n’est-il pas source, aussi, de difficultés institutionnelles qui pourraient rompre les principes d’unité de l’Etat et d’égalité des citoyens devant la loi de la République ? Enfin, la problématique du périmètre de ce champ d’adaptation est aussi engagée. Quels sont les domaines d’intervention à privilégier ? Doit-on se fixer, par exemple, sur les champs habituels d’intervention des politiques régionales dans le cadre de leurs compétences (Economie, Formation, Aménagement du territoire,…), et/ou s’engager sur d’autres champs tels que l’organisation ou le fonctionnement de ces mêmes collectivités ? 1 Saisine du 18 mars 2014 du Président du Conseil régional du Limousin : annexe III Cf. « La place du Limousin dans la nouvelle organisation territoriale », Rapporteur : M. Jean Pierre LIMOUSIN, présenté à la séance plénière du 10 octobre 2014 2 13 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Les interrogations soulevées par le Conseil Régional du Limousin abordent le domaine du pouvoir réglementaire des collectivités territoriales, question juridique de droit public particulièrement technique et complexe. A ce titre, la première partie du présent avis présentera les caractéristiques du pouvoir réglementaire « national » et à travers les actes successifs de la décentralisation, l’évolution institutionnelle du pouvoir réglementaire des collectivités territoriales, consacrée notamment par la révision constitutionnelle du 28 mars 2003. L’acte II de la décentralisation va permettre aux collectivités territoriales, par le biais d’expérimentations, d’avoir la capacité d’exercer un pouvoir d’adaptation des normes nationales. Qui plus est, l’Etat a organisé des régimes dérogatoires pour des collectivités à statut particulier et pour celles de l’outre-mer. Nous verrons les observations et remarques que l’on peut tirer de ces initiatives institutionnelles auprès des collectivités décentralisées. Ensuite, nous appréhenderons le contenu du projet de loi actuel, qui sera en discussion devant le Parlement, à l’automne 2014, pour apprécier si ce texte apporte un environnement institutionnel réellement novateur aux collectivités territoriales, concernant ce pouvoir local d’adaptation. Enfin, nous appréhenderons les principales formes d’organisation territoriale au sein des Etats de l’Union européenne. La deuxième partie portera sur les enjeux de ce pouvoir normatif local, notamment dans un environnement institutionnel en forte évolution par le futur regroupement des collectivités régionales lié au projet de la réforme territoriale. Nous étudierons les opportunités potentielles pour l’exercice d’un tel pouvoir, mais aussi les difficultés suscitées par cette profonde réorganisation territoriale qui peut affecter l’intervention réglementaire des collectivités. Enfin, nous étudierons les différents champs possibles pour cette intervention réglementaire, notamment, dans le cadre des domaines de compétences de la région. Le CESER formulera ses observations sur les différentes modifications ou évolutions législatives apportées par le projet de loi, concernant ce champ d’intervention règlementaire régional. ******** 14 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » CHAPITRE I : La décentralisation et le pouvoir normatif des collectivités territoriales I - La décentralisation, un processus qui s’accélère depuis 30 ans 1 / De la centralisation à la décentralisation L’organisation administrative centralisée de l’Etat français est mise en œuvre par la Révolution de 1789 qui va imposer les bases d’un nouvel édifice social et géographique. A la confusion administrative des provinces de l’ancien royaume de France va se substituer une organisation territoriale uniforme avec des circonscriptions identiques dans tout le pays : départements, cantons, communes. Le Consulat et l’Empire parachèvent cette organisation administrative. Cependant, le XIXème siècle pose les premiers principes d’un Etat décentralisé (1loi de 1871 à propos des départements, loi de 1884 sur les communes) et le XXème siècle va apporter un réel essor à cette politique de décentralisation par les différents actes de décentralisation. Cependant, bien que décentralisé, la France est un Etat unitaire caractérisé par l’unicité de son organisation politique et administrative avec un Parlement et un gouvernement qui votent et gèrent les affaires de la République. A - Le tournant de 1982 L’année 1982, sous la présidence de François Mitterrand, marque le tournant politique en faveur de la décentralisation, par la loi « Deferre» du 2 mars 1982 à propos des « Droits et Libertés des Communes, des Départements, des Régions ». Cette loi complétée par d’autres textes législatifs introduit d’importantes modifications dans l’organisation territoriale du pays, dont les plus notables sont : l’élection du président du Conseil général, la Chambre régionale des comptes dont l’une des missions est d’assister le préfet en matière de contrôle budgétaire, ainsi que la promotion de la Région en collectivité territoriale, dotée d’un conseil élu au suffrage universel. De 1982 à 1986, 25 lois complétées par environ 200 décrets se succèdent. C’est ce qu’on a appelé « l’acte I de la décentralisation ». La loi d’orientation relative à l’administration territoriale de la République du 6 février 1992 relance la décentralisation en développant la coopération intercommunale, prolongée par la loi «Pasqua» du 4 février 1995 sur l’aménagement et le développement du territoire, modifiée elle-même par la loi «2Voynet » du 25 juin 1999 créant les 1 Loi du 10 août 1871 qui donne au département le statut de collectivité territoriale, avec un conseil élu, le pouvoir exécutif relève cependant de l’Etat. Loi du 5 avril 1884 qui permet l’élection au suffrage universel du Conseil municipal qui désigne le maire 2 LOADDT : Loi d’Orientation relative à l’Aménagement et au Développement Durable du Territoire 15 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » conseils de développement et les schémas régionaux d’aménagement et de développement durable du territoire (SRADDT). Enfin la loi « Chevènement» du 12 juillet 1999 participe au renforcement de la coopération intercommunale. B - L’acte II de la décentralisation Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre de Jacques Chirac, lance « l’acte II de la décentralisation » consacré par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République. Cette révision constitutionnelle actualise le cadre juridique de la loi fondamentale en modifiant profondément le titre XII de la 1Constitution consacré aux collectivités territoriales. Le principe de l’organisation décentralisée de la République est ainsi posé par l’article premier de la Constitution qui édicte « la France est une république indivisible, laïque, démocratique et sociale…. son organisation est décentralisée… ». L’article 72 de la Constitution consacre cette notion de décentralisation par la disposition suivante, « Les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions… » et fait mention de la région, en tant que collectivité territoriale, avec la commune et le département. La loi du 13 août 2004 relative aux Libertés et Responsabilités locales offre de nouveaux champs de compétences aux collectivités territoriales dans les domaines concernant le développement économique, le tourisme, la formation professionnelle, le transport, la gestion des aérodromes, le logement social, l’action sociale, l’éducation et la culture… La loi organise également le transfert de personnels de l’Etat vers les collectivités, notamment les agents techniciens et ouvriers de service (TOS) employés dans les collèges et les lycées, ainsi que les agents de l’équipement. De manière un peu paradoxale, cette réforme, qui se fixait à l’origine un objectif de renforcement des compétences régionales, débouchera surtout, à la faveur des discussions parlementaires, sur le renforcement du rôle et des compétences dévolues aux départements, en particulier dans le domaine social. Cette politique de la décentralisation se poursuit avec les réformes engagées sous le quinquennat du Président Nicolas Sarkozy, mais celles-ci marquent une certaine rupture par rapport à la stratégie des deux premiers actes de la décentralisation. Alors que ces derniers s’étaient avant tout focalisés sur les transferts de compétences de l’Etat vers les collectivités territoriales, l’objectif revendiqué par le nouveau pouvoir politique est de rechercher une simplification du paysage institutionnel local, un renforcement de la démocratie locale et une adaptation des structures à la diversité des territoires. Par ailleurs, les réformes du quinquennat intègrent la contrainte forte qui pèse sur les finances publiques dans le contexte de la crise financière et économique qui s’ouvre à partir de 2008. Les collectivités territoriales françaises entrent dans une ère nouvelle depuis les lois de décentralisation de 1982, celle de la régulation institutionnelle et financière, dans un environnement budgétaire de plus en plus contraint. 1 Extraits de la Constitution : annexe IV 16 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » C - L’acte III de la décentralisation L’acte IIII de la décentralisation, sous la présidence de François Hollande, poursuit ce processus de transfert de compétences, à travers trois projets de lois relatifs à la « Modernisation de l’Action Publique territoriale et sur les Métropoles » (MAPTAM), à la « Délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral », et à la « Nouvelle organisation territoriale de la République ». La loi du 27 janvier 2014 sur la modernisation de l’action publique et sur les métropoles a pour objet, d’une part, de clarifier les compétences des collectivités territoriales en créant des conférences territoriales de l’action publique. D’autre part, la loi confirme le statut des métropoles créées par la loi du 16 décembre 2010 (Paris, Lille, Strasbourg, Lyon, Grenoble, Nice, AixMarseille-Provence, Montpellier, Toulouse, Bordeaux, Nantes, Rennes, Brest, Rouen), afin de permettre aux agglomérations de plus de 400 000 habitants d’exercer pleinement leur rôle en matière de développement économique, d’innovation, de transition énergétique et de politique de la ville. Les métropoles de Paris, Lyon et Marseille bénéficieront d’un statut particulier. Les deux autres projets de loi sur la délimitation des régions et sur la nouvelle organisation territoriale sont actuellement en cours de discussion parlementaire et font pour chacun d’entre eux l’objet d’une saisine de la part du Président du Conseil régional du Limousin. D – La décentralisation au cœur de l’action publique Au terme de cette présentation très synthétique des étapes successives de la décentralisation, on perçoit clairement que ce processus de la décentralisation n’a cessé d’être en mouvement et intègre, au fil des décennies, les nouveaux enjeux et défis qui s’imposent à notre pays. Les enjeux actuels, posés par l’acte III de la décentralisation, sont de vouloir moderniser en profondeur l’organisation territoriale de l’Etat. Celle ci devant passer par une clarification de l’organisation administrative institutionnelle afin que tout citoyen puisse identifier les responsabilités de chacun des acteurs de la puissance publique représentés par l’Etat et les collectivités territoriales. Cette modernisation doit aussi entreprendre une simplification des relations entre l’Etat et les collectivités afin d’apporter une meilleure cohérence et efficience à l’action publique, notamment dans un contexte de finances publiques très difficile. A ce titre, l’Etat doit être le garant des grands équilibres territoriaux et de l’égalité entre les citoyens, associé à des collectivités territoriales régionales aux compétences renforcées et à une intercommunalité plus puissante afin d’exercer pleinement l’exercice de ses compétences de proximité. Cette évolution institutionnelle devant prendre en compte la suppression annoncée des Conseils généraux à l’horizon 2020… 17 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » II - L’affirmation du pouvoir réglementaire local avec la décentralisation 1 / Le pouvoir réglementaire national A- Les détenteurs du pouvoir réglementaire Le pouvoir réglementaire relève de la capacité d’édicter des règlements, c'est-à-dire des décisions exécutoires de portée générale ou individuelle, à caractère obligatoire. Ce pouvoir réglementaire est confié au Premier ministre par l’article 121 de la Constitution du 4 octobre 1958 qui stipule « le Premier ministre dirige l’action du gouvernement,… il exerce le pouvoir réglementaire ». Le Président de la République exerce lui aussi ce pouvoir réglementaire selon les dispositions de l’article 13 de la Constitution, qui l’autorise à signer les ordonnances et décrets pris en conseil des ministres. Le Premier ministre exerce cette prérogative réglementaire dans des domaines qui ne relèvent pas du champ d’intervention de la loi, selon les termes de l’article 37 de la Constitution « les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire ». A ce titre, le chef du gouvernement ainsi que le Président de la République peuvent prendre des règlements généraux dans les domaines qui ne relèvent pas de la loi et pour toute l’étendue du territoire national. Par ailleurs, le chef du gouvernement exerce aussi ce pouvoir réglementaire pour assurer l’application des textes législatifs votés par le Parlement, on parle alors de décrets d’application pris pour l’exercice de la loi. C’est l’article 34 de la Constitution qui délimite les domaines qui relèvent de l’intervention du législateur, énumérés ci après : 1 Les droits civiques et les garanties fondamentales pour l’exercice des libertés publiques ; La nationalité, l’état et la capacité des personnes ; La détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ; L’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature ; Le régime électoral des assemblées parlementaires, des assemblées locales ; La création de catégorie d’établissements publics ; Les nationalisations d’entreprises et les transferts de propriété d’entreprises du secteur public au secteur privé ; L’organisation générale de la Défense nationale ; La libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences de leurs ressources ; De l’enseignement ; De la préservation de l’environnement ; Du régime de la propriété des droits réels et des obligations civiles et commerciales ; Du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale ; Article 21 de la Constitution et suivants : annexe IV 18 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » - - Les lois de Finances qui déterminent les ressources et les charges de l’Etat dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ; Les lois de financement de la sécurité sociale qui déterminent les conditions générales de son équilibre financier, compte tenu de leurs prévisions de recettes, qui fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ; Des lois de programmation qui déterminent les objectifs de l’action de l’Etat ; Les orientations pluriannuelles des finances publiques qui sont définies par des lois de programmation. Elles s’inscrivent dans l’objectif d’équilibre des comptes des administrations publiques. Dans cette hypothèse, il revient au Premier ministre de préciser les modalités d’application de la loi par des décrets d’application. Le contenu des modalités d’application de ces décrets pris pour l’exécution des lois sont nécessairement en conformité avec la portée générale du texte législatif. Le Président de la République et le Premier ministre ne sont pas les seuls détenteurs de ce pouvoir réglementaire. L’exercice de ce pouvoir est partagé par d’autres autorités administratives telles que les ministres, les préfets, des directeurs établissements publics mais à la condition expresse qu’un texte prévoit l’exercice de cette compétence. B- L’incidence du droit de l’Union européenne sur le droit interne des Etats membres de l’Union européenne Si le Président de la République et le Premier ministre ont un pouvoir de droit commun pour l’exercice du domaine réglementaire, celui-ci est, néanmoins, assujetti aux normes édictées par l’Europe et doit être en conformité avec le droit européen. Il en est de même pour le domaine législatif. Le droit de l’Union européenne a la primauté sur la législation nationale des 1pays membres de l’Union européenne. On distingue le droit de l’union européenne originaire, composé des traités et le droit dérivé comprenant des actes pris par les institutions européennes qui sont ; le Conseil européen, le Conseil des ministres de l’Union européenne, la Commission européenne, le Parlement européen, et la Cour de justice. Les normes européennes édictées par les institutions communautaires sont au nombre de quatre : - Le règlement : le règlement européen est un acte normatif pris par les institutions communautaires, il a une portée générale, il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout Etat membre ; - La directive : la directive est un instrument juridique adopté, par exemple par la Commission européenne, qui a pour but d’harmoniser les législations des Etats membres. Elle laisse à ces 1 Les 28 pays membres de l’Union européenne sont indiqués au chapitre II , dans le tableau présentant les principales formes d’organisation territoriale des pays de l’Union européenne 19 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » derniers, toute latitude pour atteindre les objectifs qu’elle fixe. Cependant, elle précise le délai dans lequel le ou les Etats membres concernés devront les transposer dans leur législation interne. L’absence de transposition de ces directives est passible de sanctions financières auprès des Etats membres ; - La décision : la décision est un acte juridique pris par le Conseil de l’union européenne ou de la Commission européenne, obligatoire dans toutes ses dispositions et applicable directement sans transposition dans le droit interne des pays membres. Elle se différencie du règlement par le fait qu’elle n’est pas un texte à portée générale. Lorsqu’elles désignent des destinataires, les décisions ne sont obligatoires que pour ceux-ci. Ces destinataires peuvent être des particuliers, des personnes morales (entreprises,…) ou des États membres ; - L'avis ou la recommandation : Les avis et les recommandations sont des actes non obligatoires à la différence des règlements, des directives et des décisions. Les avis expriment une opinion d’une institution ou d’un organe de l’Union européenne ou une intention politique. Les recommandations sont des actes émis par la Commission européenne ou le Conseil de l’Union européenne. Ils constituent une incitation pour les États membres à adopter un comportement particulier. Par exemple, dans le domaine de la politique économique et monétaire, la Commission peut recommander certaines mesures à un État membre qui connaît des difficultés dans sa balance de paiements. 2 / Le pouvoir réglementaire local Les collectivités territoriales disposent-elles aussi du pouvoir réglementaire ? Est-il au même niveau que le pouvoir réglementaire étatique ? Ces questions se trouvent naturellement posées dans le cadre de la politique de la décentralisation, avec d’autant plus d’acuité que ces collectivités se voient transférer des champs de compétences de plus en plus importants, par les différents actes de décentralisation depuis 1982. A - La reconnaissance du pouvoir réglementaire local Les collectivités territoriales, elles aussi, disposent bien du pouvoir réglementaire car c’est une condition essentielle et nécessaire pour l’exercice de leurs compétences. En effet, exercer les compétences dévolues par la loi, nécessite pour les collectivités de fixer des règles générales pour la mise en œuvre opérationnelle des politiques régionales dans leurs champs de compétences. Cette reconnaissance, ayant fait l’objet de nombreuses controverses doctrinales, a été consacrée par la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République, en inscrivant au troisième alinéa de l’article 172 de la loi fondamentale que « dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s’administrent librement par des conseils élus et disposent d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences…». 1 Article 72 de la Constitution : annexe IV 20 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Cette disposition constitutionnelle, héritée de la jurisprudence très stricte du 1Conseil constitutionnel, édicte que les collectivités territoriales peuvent fixer des règles pour l’exercice de leurs compétences, mais uniquement dans les cas et conditions fixés par le législateur. Les collectivités territoriales disposent bien de l’exercice du pouvoir réglementaire pour fixer et déterminer des règles, mais uniquement dans les domaines de compétences qui leur sont dévolus par la loi. B - Un pouvoir réglementaire local résiduel et subordonné Cependant, ce pouvoir réglementaire émanant des collectivités décentralisées n’est pas de même « nature » que celui que détient le Premier ministre de l’article 21 de la Constitution. Si la notion de pouvoir réglementaire local est expressément reconnue par la réforme constitutionnelle de 2003, il n’en demeure pas moins que ce pouvoir réglementaire des collectivités locales demeure résiduel et subordonné. Il demeure résiduel, car la fixation des modalités d’exercice des compétences des collectivités territoriales relève exclusivement du pouvoir législatif et du pouvoir réglementaire national. Il est par ailleurs subordonné dans la mesure où ce pouvoir réglementaire local doit s’exercer dans le respect des dispositions législatives et textes réglementaires nationaux en vigueur. Les mesures réglementaires d’application des lois relèvent en premier lieu, de la compétence du pouvoir réglementaire national, et à titre subsidiaire, de la décision des autorités locales. Lorsqu’un décret d’application est nécessaire à l’exécution d’une loi, le pouvoir réglementaire local ne peut s’exercer tant que le décret n’a pas été pris par le Premier ministre. Et en cas d’absence de mesure réglementaire nationale d’application d’une loi, la collectivité ne peut exercer son pouvoir réglementaire que lorsque le décret d’application n’était pas prévu expressément par cette loi. Si la réforme constitutionnelle du 28 mars 2003 peut être considérée comme une première étape dans la reconnaissance d’un pouvoir réglementaire local, celui-ci n’en reste pas moins un pouvoir normatif assujetti aux normes législatives et réglementaires nationales procurant aux collectivités territoriales une autonomie encadrée d’intervention réglementaire. A titre d’exemple, on peut citer la situation, avant la mise en place de la loi du 227 février 2002, où le législateur avait accordé aux régions la compétence pour accorder des aides directes aux entreprises, mais c’est l’Etat qui fixait, par décret, le régime de celles-ci : assiette, taux d’intervention,… Ce cadre extrêmement rigide avait constitué un bon exemple de mesures contre – productives, car chaque région présentait une situation économique et des résultats différents nécessitant une politique d’aide différente. La loi de 2002, a introduit cette souplesse qui a permis aux régions d’adopter un règlement d’aides spécifique adapté au contexte économique régional. 1 2 Décision du Conseil constitutionnel n°2001-454DC d u 17 janvier 2002 sur la loi relative à la Corse Loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la dé mocratie de proximité 21 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » C - Une autonomie souhaitée par les collectivités territoriales On le voit, le périmètre d’intervention de l’exercice réglementaire pour les collectivités territoriales est soumis aux contraintes législatives er réglementaires qui laissent peu de place pour asseoir et exercer une « autonomie réglementaire ». A cet effet, l’Association des Régions de France (ARF), dans son communiqué du 120 avril 2011 « Des régions plus fortes pour une France plus efficace » avait exprimé le souhait de reconnaître aux collectivités régionales un véritable pouvoir normatif, sous forme d’une capacité réglementaire déléguée. A ce titre, nous allons voir que ce « carcan réglementaire » va connaître par la réforme constitutionnelle de 2003, des mesures d’assouplissement et d’élargissement du périmètre réglementaire par la mise en place de mesures « d’expérimentations » au profit des collectivités territoriales. Ce nouveau droit de l’expérimentation devait être le fer de lance d’une nouvelle dynamique territoriale en faveur des collectivités décentralisées. Cependant, cette réforme par ces mesures nouvelles, et la pratique institutionnelle qui va en être faite va-t-elle tenir toutes ses promesses, pour un pouvoir réglementaire local rénové? 3 / Les marges de manœuvre accrues du pouvoir réglementaire local reconnues par la Constitution Une première réponse est apportée par la loi fondamentale par ses articles 237-1 et 72 alinéa 4, issus de la loi constitutionnelle du 28 mars 2003. Cette réforme constitutionnelle va apporter une innovation en matière de pouvoir réglementaire local, par la mise en place du droit à l’expérimentation de transfert de compétences. Ce droit nouveau va se traduire, d’une part, par le transfert de compétences de l’Etat aux collectivités territoriales, et d’autre part, permettre à ces mêmes collectivités territoriales de déroger, pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences. Ce droit à l’expérimentation va permettre aux collectivités territoriales d’élargir le champ d’intervention de leurs domaines réglementaires, selon deux situations distinctes : - Les collectivités territoriales auront la capacité d’intervenir dans les matières législatives et réglementaires jusqu’alors réservées à l’Etat. Il s’agit ici de transfert de compétences de l’Etat au profit des collectivités décentralisées qui pourront exercer leur pouvoir réglementaire dans le cadre des nouvelles compétences déléguées. La loi teste, à titre expérimental, l’exercice de nouvelles compétences transférées aux collectivités territoriales, la finalité étant de déterminer l’échelon territorial le plus pertinent. - Les collectivités territoriales auront la possibilité, sous certaines conditions, de déroger aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences, on parle alors « d’expérimentation normative » 1 2 Association des Régions de France : dossier de presse du 20 avril 2011, page 6 Articles 37-1 et 72 alinéa 4 de la Constitution : annexe IV 22 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Nous allons voir plus précisément les conditions et les modalités d’exercice de cette nouvelle faculté offerte aux collectivités territoriales pour exercer un pouvoir réglementaire plus étendu ou mieux adapté aux réalités régionales et apprécier si ces « expérimentations » vont réellement apporter une plus grande autonomie réglementaire aux collectivités territoriales. A - L’expérimentation « Transfert de compétences » En premier lieu l’article 37-1 de la Constitution, aux termes duquel « la loi et le règlement peuvent comporter, pour un objet et une durée limités, des dispositions à caractère expérimental », concerne des expérimentations conduites par le législateur ou par le pouvoir réglementaire national. Ainsi, sur le fondement des dispositions de cet article, le législateur permet, à titre expérimental, le transfert des compétences de l’Etat aux collectivités territoriales. A titre d’exemple, on peut citer le 1transfert de la gestion de certains fonds structurels européens. A ce titre, le 2Conseil constitutionnel a précisé les limites de ces expérimentations en jugeant que l’article 37-1 de la Constitution « permet au Parlement d’autoriser, dans la perspective de leur éventuelle généralisation, des expérimentations dérogeant, pour un objet et une durée limités, au principe d’égalité devant la loi ; toutefois le législateur doit en définir de façon suffisamment précise l’objet et les conditions et de ne pas méconnaître les autres exigences de valeur constitutionnelle ». Ainsi, dans le respect strict des limites constitutionnelles précitées, l’expérimentation est offerte de plein droit à toute collectivité territoriale dans les conditions prévues par la loi. Cependant, l’article 37-1 n’est que la reconnaissance constitutionnelle de pratiques anciennes « d’expérimentations-transfert » des prérogatives législatives de l’Etat au profit des collectivités territoriales. Ce texte ajoute simplement une valeur institutionnelle à la pratique de l’expérimentation, mais n’apporte aucun réel changement par rapport aux pratiques antérieures. Ce premier exemple d’expérimentation amène quelques remarques : - C’est l’Etat seul qui a l’initiative de la conduite de ce type d’expérimentation par le biais de la loi ou du pouvoir réglementaire national. Le texte constitutionnel ne fait que consacrer une situation qui existait déjà depuis quelques décennies (cf. Loi Debré du 31 décembre 1959, à propos de contrats simplifiés dans l’enseignement privé) ; - La généralisation de ces expérimentations, au plan national, dépend de la seule volonté de l’Etat ; - Dans le cadre de l’intervention des collectivités dans les domaines transférés par l’Etat, les mesures réglementaires de ces collectivités restent soumises à la loi et au règlement national, sans possibilité d’y déroger. En définitive, l’apport objectif de cette réforme est de donner un fondement constitutionnel à une pratique ancienne de politique d’expérimentations organisée par l’Etat. Cette situation relève plus d’une constitutionnalisation d’une procédure maintes fois utilisée par l’Etat, qu’une réelle 1 2 Article 44 de la loi n°2004-809 du 13 août 2004 rel ative aux Libertés et Responsabilités locales Conseil constitutionnel : décision n° 2004-53DC du 12 août 2004 23 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » avancée pour les collectivités territoriales qui devaient, selon l’ambition affichée de cette réforme constitutionnelle, « 1être des lieux d’invention et d’initiative » B - L’expérimentation normative Cette deuxième procédure de l’expérimentation normative prévue par l’article 272 alinéa 4 de la Constitution, à l’inverse de la première démarche de « l’expérimentation-transfert », a vocation à être mise en œuvre à l’initiative des collectivités territoriales. Cet article dispose que « … les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque la loi ou le règlement l’a prévu, déroger, à titre expérimental, pour un objet et pour une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences ». Cette possibilité constitutionnelle qui offre cette opportunité, de déroger au pouvoir législatif et réglementaire, aux collectivités territoriales est toutefois encadrée par une 3loi organique qui détermine des conditions très strictes pour la mise en œuvre de cette expérimentation. Les principales dispositions de la loi organique du 1ier aout 2003 comprennent les conditions suivantes : - C’est la loi qui autorise les collectivités à pouvoir initier ce type d’expérimentation. L’objet de l’expérimentation ainsi que sa durée qui ne peut excéder cinq ans sont fixés aussi par le législateur. Enfin, la loi détermine les collectivités, en fonction de leurs caractéristiques, qui pourront bénéficier de la disposition de l’article 72 alinéa 4 de la Constitution ; - Les collectivités qui remplissent les conditions doivent adresser un avis de délibération au ministre chargé des collectivités locales. Le gouvernement vérifie alors que les conditions légales sont remplies, notamment que cette demande s’inscrit dans le champ de l’application défini par la loi. A cet effet, un décret fixe la liste des collectivités territoriales autorisées à déroger à la loi ; - Avant l’expiration de la durée fixée pour l’expérimentation, la loi impose une évaluation à laquelle la collectivité territoriale est associée. Sur le fond, le contenu de cette évaluation portera sur plusieurs domaines, tels que le coût et la qualité des services rendus aux usagers ainsi que les incidences financières et/ou fiscales liées à cette expérimentation ; - Enfin, chaque année le gouvernement transmet au Parlement un rapport retraçant l’ensemble des propositions d’expérimentation et des suites qui leur sont réservées : - La loi peut modifier les conditions de la prolongation ou de la modification de l’expérimentation pour une durée qui ne peut excéder trois ans ; - L’expérimentation peut être maintenue et généralisée ; - Il peut être décidé de l’abandon de l’expérimentation. 1 Les implications juridiques de la constitutionnalisation du droit à l’expérimentation : S.Charentay, Université Paris XII 2 Article 72 alinéa 4 de la Constitution : annexe IV 3 ier Loi organique n° 2003-704 du 1 aout 2003 : annexe V 24 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » La simple lecture des conditions d’exercice de l’expérimentation normative peut amener un certain scepticisme sur une volonté forte de l’Etat à permettre aux collectivités locales d’exercer un droit nouveau selon la procédure de l’expérimentation normative. Les conditions particulièrement drastiques de la mise en œuvre de cette expérimentation consacrent plutôt une procédure dissuasive étouffant toute initiative pour les collectivités territoriales de se lancer dans l’aventure expérimentale de l’article 72 alinéa 4 de la Constitution. A ce titre, seules deux lois ont ouvert des expérimentations à des collectivités selon la procédure de l’article 72 alinéa 4 : la loi du 5 mars 2007 instituant le 1droit au logement opposable et le texte législatif relatif au 2revenu de solidarité active en proposant notamment un accompagnement financier des départements expérimentateurs. 4/ Les collectivités à statut particulier et les modalités étendues d’exercice du pouvoir réglementaire local A - La Corse La Corse, en raison de son caractère insulaire, bénéficie d’un régime spécifique par la loi du 22 janvier 2002. La Corse comprend un conseil exécutif de neuf membres qui est responsable politiquement devant l’Assemblée de Corse. A ce titre, la responsabilité du Président de l’Assemblée de Corse peut être engagée par une motion de défiance constructive par cette assemblée. La Corse dispose d’un pouvoir normatif dérogatoire par rapport à la situation des autres collectivités territoriales, qui lui permet d’intervenir dans le domaine de la loi et celui du règlement : 3 - Ainsi la loi du 22 janvier 2002 organise une procédure de consultation systématique de l’Assemblée de Corse sur les projets et propositions de lois ou de décrets comportant des dispositions spécifiques à la Corse. L’assemblée a alors un mois pour rendre un avis sur ces textes réglementaires ou législatifs, qui sont ensuite adressés au gouvernement et aux Présidents des deux chambres parlementaires. Cependant la suite réservée aux propositions de l’Assemblée de Corse ne relève que de la seule décision de l’Etat. - L’assemblée de Corse peut de sa propre initiative ou du conseil exécutif, présenter des propositions tendant à modifier ou adapter des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ou en cours d’élaboration concernant les compétences, l’organisation, et le fonctionnement de l’ensemble des collectivités territoriales de Corse, ainsi que les textes concernant le développement économique, social et culturel de l’ile. Ces propositions sont ensuite adressées au Premier ministre qui décide de la suite à réserver à ces initiatives locales. 1 Loi n° 2007-290 du 5 mars 2007, loi instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale 2 Article 142 de la loi de finances de 2007 qui a confié aux départements volontaires pour l’expérimentation, la charge de financer la nouvelle prime de retour à l’emploi 3 Loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse : annexe VI 25 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » - Enfin, la collectivité peut demander à être habilitée par le législateur à fixer des règles adaptées aux spécificités de l’ile, sauf lorsqu’est en cause l’exercice d’une liberté individuelle ou d’un droit fondamental. On le voit, ces différentes dispositions dérogatoires pour la Corse auraient pu susciter ou créer l’émergence d’un pouvoir normatif local qui aurait mieux pris en compte certaines spécificités ou caractéristiques sociales, économiques ou culturelles. Cependant, la pratique institutionnelle de cette loi reste particulièrement décevante. Chaque demande d’adaptation de la législation a été repoussée, et le 1texte initial de la loi du 22 janvier 2002 qui voulait renforcer fortement le pouvoir normatif de la collectivité territoriale de Corse a été censuré par une décision du 17 janvier 2002 du Conseil constitutionnel. Cette décision a prohibé fermement l’adaptation de la loi par une assemblée territoriale, au motif que celle-ci ne peut constitutionnellement se substituer au pouvoir législatif. Une fois encore, la pratique institutionnelle a fait table rase d’un texte novateur qui octroyait à une collectivité territoriale un réel pouvoir normatif local. B - 2L’outre - mer L’outre-mer française, depuis 2003, est divisée en plusieurs catégories administratives qui se répartissent entre des Départements d’outre-mer (DOM), les Collectivités d’outre-mer(COM), les terres à statut particulier (Terres australes et antarctiques françaises : TAAF) ainsi que la Nouvelle Calédonie. La Constitution reconnait un statut particulier lié aux spécificités, caractéristiques et contraintes de ces collectivités, notamment par la rédaction des articles 72-3 à 74 dans le titre XII consacré aux collectivités territoriales. Il y a cinq départements d’outre-mer : la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Réunion, Mayotte, dont les quatre premiers ont aussi le statut de régions d’outre-mer, ainsi dénommées DROM. Ces DROM comptent un Préfet, un Conseil général et un Conseil régional. Ces collectivités comprennent des assemblées territoriales (Conseils général et régional) réunissant les conseillers départementaux et régionaux. L’article 73 de la Constitution stipule que les départements et régions d’outre-mer peuvent décider, dans leurs domaines de compétences, d’adapter les lois et des règlements en raison des caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités. Cependant, cette capacité d’adaptation normative est sous condition d’une habilitation donnée par une loi ou un règlement. Qui plus est, ces collectivités peuvent être habilitées par la loi à fixer elles mêmes les règles applicables sur leur territoire dans un certain nombre de domaines pouvant relever de la loi ou du règlement. Ces collectivités disposent donc de cette capacité à exercer ce pouvoir d’adaptation et d’édiction de règles locales, sous réserve d’une habilitation donnée par le Parlement. Dans 1 Le texte initial a été déposé le 22 février 2001 devant le Parlement et a fait l’objet d’une saisine devant le Conseil constitutionnel qui a rendu sa décision le 17 janvier 2002 (n°2001 - 454DC du 17 janvier 2002) et qui a déclaré contraire à la Constitution l’alinéa IV de l’article L.4424 – 2 du code général des collectivités territoriales. (Cf. annexe VI). Le texte modifié a été promulgué le 22 janvier 2002 2 Le régime des collectivités d’outre-mer est régi, notamment, par les articles 72-3,73 et 74 de la Constitution : annexe IV 26 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » l’hypothèse où le législateur donne cette autorisation, l’assemblée territoriale a un délai de deux ans pour exercer ce pouvoir normatif étendu. Les collectivités d’outre-mer sont une création de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003. Ces collectivités d’outre mer sont : Saint Pierre et Miquelon, Wallis et Futuna, la Polynésie française, Saint Barthélémy et Saint Martin. Ces collectivités sont régies par l’article 74 de la Constitution qui met en exergue le principe de « spécialité législative ». Ce principe relève d’un statut spécifique organisé par une loi organique qui leur donne la possibilité d’intervenir dans des domaines législatifs ou réglementaires qui auront été déterminés par cette loi organique. La pratique institutionnelle montre que ces facultés dérogatoires normatives sont souvent utilisées par les départements et collectivités d’outre-mer, à l’inverse de ce qui se passe pour les collectivités métropolitaines. Cependant, selon une jurisprudence constante de la part du Conseil constitutionnel, les normes décidées par ces collectivités ont toujours un caractère réglementaire, même si celles-ci interviennent dans le domaine de la loi. On retrouve toujours cette constante institutionnelle qui fait qu’une collectivité territoriale ne peut être l’auteure de la loi, cette faculté relève exclusivement du Parlement, symbole de la représentation nationale, caractéristique de la notion unitaire de l’Etat français. 5/ L’acte III de la décentralisation : le pouvoir réglementaire d’adaptation des régions A - Le renforcement des responsabilités régionales L’acte III souhaite valoriser la région, en tant que collectivité territoriale. A ce titre deux projets de loi sont à l’étude, l’un sur la redéfinition des cartes des régions qui a fait l’objet d’une 1 première lecture parlementaire à l’été 2014, l’autre portant sur une nouvelle organisation territoriale par un renforcement et une spécialisation des compétences dévolues aux collectivités régionales. Il est rappelé que ce deuxième projet de loi ne sera présenté au Parlement, qu’à l’automne 2014, et que les observations et préconisations du présent avis portent sur des propositions de textes dont la rédaction pourrait faire l’objet d’amendements lors de la prochaine session parlementaire. Le texte sur la nouvelle organisation territoriale veut mettre en exergue la responsabilité stratégique des collectivités territoriales régionales. A la clause de compétence générale qui permettait aux régions et aussi aux départements d’intervenir en dehors de leurs missions principales, souvent de manière concurrente et redondante, se substitueront désormais des domaines de compétences précis dévolus par la loi. Cette spécialisation des champs de compétences expressément prévus par la loi portera notamment, pour les régions, sur le développement économique, l’innovation, l’aménagement et le développement durable du territoire, la formation,… De nouvelles compétences seront 1 La première lecture pour ce projet de loi, portant sur le regroupement des régions propose, notamment, la création d’une nouvelle région : Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes 27 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » transférées aux régions qui auront en charge la responsabilité des transports non urbains routiers, l’organisation et le fonctionnement des transports scolaires, ainsi que la gestion de la voierie relevant des départements. Afin que les régions soient véritablement à même de remplir leurs missions institutionnelles, elles auront en charge l’élaboration de schémas qui seront prescriptifs pour une réelle effectivité des politiques régionales décidées et engagées. Par ailleurs, ce nouvel environnement institutionnel comprend l’émergence de quatorze métropoles, le renforcement du rôle de l’intercommunalité, ainsi que la disparition annoncée des conseils généraux à partir de 2020. Qui plus est, ce 1projet de loi affirme clairement la reconnaissance du pouvoir réglementaire aux régions dans le cadre de leurs compétences et donne surtout la possibilité à ces collectivités de formuler des propositions d’évolution des lois ou règlements en vigueur ou en cours d’élaboration concernant les compétences, l’organisation et le fonctionnement de l’ensemble des régions. Ce projet de loi relance donc la problématique d’un pouvoir normatif étendu qui serait octroyé aux régions. Cependant, ce texte apporte-il une réelle avancée institutionnelle novatrice, demandée depuis de nombreuses années, notamment par l’Association des Régions de France ? B - La réelle portée de ce pouvoir d’adaptation accordée aux régions ? Le projet de loi par son article premier modifie la rédaction initiale de l’article L2.4221-1 du code général des collectivités par l’ajout de trois alinéas ainsi libellés : « Le pouvoir réglementaire de la région s'exerce dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues par la loi. » Une première observation montre que la rédaction de cet alinéa n’apporte aucune nouveauté par rapport au périmètre du pouvoir réglementaire des régions. La rédaction de ce texte supplémentaire se situe dans la stricte continuité institutionnelle du pouvoir normatif dévolu aux régions. Les collectivités régionales sont bien titulaires du pouvoir réglementaire, mais dans le cadre des compétences expressément confiées par la loi. 1 ier Article 1 2 du projet de loi portant sur la nouvelle organisation du territoire de la république : annexe VII Article L.4221-1 du code général des collectivités : « Le Conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région. Il statue sur tous les objets sur lesquels il est appelé à délibérer par les lois et règlements et sur tous les objets d'intérêt régional dont il est saisi. Il a compétence pour promouvoir le développement économique, social, sanitaire, culturel et scientifique de la région et l'aménagement de son territoire, ainsi que pour assurer la préservation de son identité et la promotion des langues régionales, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et des attributions des départements et des communes. Il peut engager des actions complémentaires de celles de l'Etat, des autres collectivités territoriales et des établissements publics situés dans la région, dans les domaines et les conditions fixés par les lois déterminant la répartition des compétences entre l'Etat, les communes, les départements et les régions. » 28 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Ce pouvoir réglementaire local reste bien soumis aux dispositions législatives régissant l’exercice des compétences dévolues aux régions et aux éventuels décrets pris pour l’application des textes législatifs. Le caractère novateur de ce texte n’apparait seulement que dans le cadre du principe de la suppression de la clause de compétence générale qui fait place aujourd’hui, au principe de spécialité des compétences territoriales régionales. Par contre, les deuxième et troisième alinéas semblent apporter un environnement novateur par rapport aux différentes dispositions antérieures liées au pouvoir normatif étendu des collectivités territoriales. « Un conseil régional ou, par délibérations concordantes, plusieurs conseils régionaux peuvent présenter des propositions tendant à modifier ou à adapter des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ou en cours d'élaboration concernant les compétences, l'organisation et le fonctionnement de l'ensemble des régions. » « Les propositions adoptées par les conseils régionaux en application de l'alinéa précédent sont transmises par les présidents de conseil régional au Premier ministre et au représentant de l'État dans les régions concernées. » Le contenu de ces alinéas est à rapprocher des dispositions de l’expérimentation normative ainsi que la loi du 22 janvier 2002 portant sur l’organisation et les compétences de la collectivité territoriale de Corse. a) La différenciation par rapport à l’expérimentation normative L’article 72 alinéa 4 de la Constitution permet aux collectivités territoriales de déroger à titre expérimental aux dispositions législatives et/ou réglementaires qui régissent l’exercice de leurs compétences. Nous avons pu observer que si la loi constitutionnelle de 2003 a bien créé une véritable procédure d’expérimentation normative au profit des collectivités territoriales, les conditions d’application étaient particulièrement strictes, dans les différentes et nombreuses étapes de cette mise en œuvre expérimentale. Au contraire, la rédaction des deux alinéas du projet de loi n’évoque aucun formalisme contraignant. Il suffit simplement qu’un (seul) Conseil régional fasse adopter par son assemblée délibérante une proposition tendant à modifier ou à adapter les dispositions législatives ou réglementaires qui régissent les compétences, l’organisation ou le fonctionnement de l’institution régionale, et que celle ci soit adressée ensuite à l’Etat. Cependant, l’alinéa suivant n’évoque aucune procédure administrative concernant les réponses que pourrait réserver l’Etat à ces initiatives, ni en terme de délai, ni en terme de motivations qui opposeraient un refus aux initiatives d’exercice de ce pouvoir d’adaptation régional. Il y a là une sorte de parallélisme procédural, qui offre aux régions une très forte capacité d’initiative pour l’exercice d’un pouvoir régional d’adaptation, contrebalancé par une totale liberté d’appréciation de l’Etat sur les suites à réserver aux différentes propositions. 29 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Le silence de la loi n’est-il pas révélateur sur la portée hypothétique de ce texte par rapport au pouvoir d’adaptation local des régions, l’absence d’un réel formalisme pour un domaine institutionnel aussi sensible n’est-il pas lié à une absence de réelle volonté de la part de l’Etat d’accepter l’exercice du pouvoir d’initiative par les régions ? b) L’exemple emblématique de la Corse Une lecture tout aussi attentive des articles 1L.4424-2.-I et III stipule que « …l’Assemblée de Corse peut présenter des propositions tendant à modifier ou à adapter des dispositions réglementaires en vigueur ou en cours d’élaboration concernant les compétences, l’organisation, et le fonctionnement de l’ensemble des collectivités territoriales de Corse... ; … l’Assemblée de Corse peut présenter des propositions tendant à modifier ou à adapter des dispositions législatives en vigueur ou en cours d’élaboration concernant les compétences, l’organisation, et le fonctionnement de l’ensemble des collectivités territoriales de Corse… ». On ne peut que remarquer le mimétisme rédactionnel entre le contenu des articles sur la Corse et ceux du projet de loi. Nous avons 2vu que la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse qui avait pour but d’organiser un régime dérogatoire pour les pouvoirs réglementaire et législatif de cette collectivité s’est soldée par un résultat particulièrement décevant où chaque demande 3 d’adaptation de la loi avait été repoussée. c) L’absence d’une réelle volonté de réforme pour un pouvoir normatif autonome des collectivités territoriales Quelle va être la portée juridique actuelle de ce projet de loi sur le pouvoir réglementaire d’adaptation des régions ? Seule la pratique institutionnelle d’ici quelques années nous donnera une réponse précise. Cependant la première partie de cet avis montre bien que l’Etat, même ayant mis en œuvre dans le cadre de la décentralisation, des transferts importants de compétences aux collectivités territoriales, reste dans une logique d’état propriétaire de ses prérogatives de puissance publique, qui offre peu d’autonomie aux collectivités territoriales. A ce titre, l’Etat ne veut pas partager réellement le pouvoir normatif avec les collectivités territoriales, au nom du principe de l’unité de l’Etat, même si son organisation est décentralisée. CHAPITRE II: Le pouvoir normatif et les régions d’Europe La notion de collectivité territoriale au plan européen recouvre une certaine diversité de situations. En effet, les collectivités territoriales européennes peuvent différer sensiblement pour leur organisation, leurs compétences, ainsi que pour leurs ressources financières. Ces dernières 1 Loi du 22 janvier 2002 : annexe VI Cf. Paragraphe 4 : les collectivités à statut particulier et les modalités étendues d’exercice du pouvoir réglementaire local 3 Cf. Le pouvoir normatif local : enjeux et débats, « Géraldine Chavrier » 2 30 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » années ont été marquées par un 1mouvement généralisé de renforcement de l’autonomie locale au travers de réformes constitutionnelles. L’Union européenne, de façon générale a approuvé ces initiatives institutionnelles d’autonomie auprès des collectivités territoriales. Si le droit comparé met en lumière l’absence de modèle véritablement unique d’organisation territoriale en Europe, la distinction classique entre Etats fédéraux et Etats unitaires ne permet plus de prendre en compte la diversification institutionnelle croissante au sein de l’Union européenne, qui se traduit, notamment, par l’existence d’Etats régionalisés comme l’Italie ou l’Espagne. Cependant, la forme unitaire de l’organisation territoriale d’un Etat, comme la France, représente un nombre non négligeable d’Etats au sein des pays de l’union européenne. Ce chapitre va s’attacher à présenter de façon synthétique les autres formes d’organisation administrative et territoriale qui sont représentées par certains Etats de l’Union européenne. 1 / Le modèle fédéral et les Etats régionaux A – Les Etats fédéraux Le fédéralisme est en vigueur en Allemagne, en Autriche et en Belgique. Si on prend l’exemple d’un pays comme l’Allemagne, son organisation politique territoriale comprend l’état fédéral et les états fédérés. Les états fédérés ou « Länder » ont une Constitution, un Parlement qui légifère, un gouvernement qui met en œuvre les politiques publiques. C’est la constitution fédérale qui répartit les compétences entre l’état fédéral et les états fédérés. Certains domaines appartiennent de droit au champ fédéral, d’autres sont en concurrence entre l’état fédéral et l’état fédéré. Les états fédérés disposent du pouvoir législatif et réglementaire. B – Les Etats régionaux Sans adopter pour autant le modèle du système fédéral, des Etats comme l’Italie ou l’Espagne ont accordé à leurs régions, des champs de compétences réglementaires, un pouvoir législatif et une autonomie financière qui les rapprochent des Etats fédérés. - L’Espagne comprend des communautés autonomes, ces communautés autonomes ont été créées à partir d’initiatives des territoires avec l’élaboration de statuts qui fixent et déterminent les conditions d’exercice des compétences du Parlement et du gouvernement. C’est la constitution espagnole qui détermine le partage des domaines de compétences exercées par l’état et les communautés autonomes. L’Espagne compte actuellement 17 communautés autonomes. - L’Italie comprend 20 régions qui se sont véritablement organisées en 1977. Ces régions comprennent une assemblée régionale, avec un exécutif dont le président est élu au suffrage universel direct. Il y a des compétences exclusives au profit de l’Etat et celles qui sont partagées 1 Cf. Etats régionalisés : Espagne, Italie 31 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » entre l’Etat et les régions. Dans cette hypothèse, l’Etat fixe les principes généraux qui sont appliqués localement par les régions. Dans les matières ne relevant pas expressément de la compétence de l’Etat, les régions exercent le pouvoir réglementaire et peuvent voter des lois. 2 / Les principales formes d’organisation territoriale des pays de l’Union européenne Le tableau, ci après, présente pour l’ensemble des 28 pays membres de l’Union européenne, les différentes formes d’organisation territoriale. Ce panorama montre l’absence de modèle unique d’organisation administrative et territoriale, même si le système unitaire territorial est représenté par un nombre non négligeable d’Etats. Cette situation est, notamment, liée à l’arrivée progressive des pays de l’est, marqués par une organisation administrative centralisée héritée de l’histoire de l’après seconde guerre mondiale. Les principales formes d’organisation territoriale des 28 pays de l’Union européenne Etats unitaires : 22 Etats fédéraux : 3 - France - Irlande - Bulgarie - Danemark - Chypre - Croatie - Grèce - Pays-Bas - Portugal - Suède - Luxembourg - Finlande - Pologne - République tchèque - Malte - Roumanie - Slovaquie - Hongrie - Lettonie - Lituanie - Estonie - Slovénie - Allemagne - Autriche - Belgique Etats régionaux : 2 - Espagne - Italie Un Etat avec une organisation territoriale particulière: le Royaume-Uni qui comprend l’Angleterre, le Pays de Galles, l’Ecosse et l’Irlande est organisée selon les lois de dévolution de 1998. Ces lois donnent aux trois « régions » (Pays de Galles, Ecosse et Irlande) une autonomie forte, notamment, par la capacité de voter des lois. L’Angleterre est plutôt sur une forme d’organisation territoriale déconcentrée. Cette situation place le Royaume-Uni entre l’Etat régional et l’Etat unitaire. 32 Royaume-Uni : Angleterre, Pays de Galles, Ecosse, Irlande du nord Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » 3 / L’évolution de l’organisation territoriale en Europe L’administration locale en Europe est marquée par une diversité des structures territoriales, héritée d’évolutions historiques et de traditions étatiques. Cependant, il semble possible de caractériser les grandes tendances de l’organisation locale des Etats de l’Union européenne : - La classification traditionnelle selon deux modèles qui sont l’Etat unitaire et le système fédéral est, aujourd’hui, dépassée et doit prendre en compte l’apparition d’Etats régionalisés, caractérisés par une volonté de l’Etat central d’accorder aux collectivités territorialisées une autonomie institutionnelle (administrative, juridique, financière,..). Cette évolution qui devrait se développer est sans doute marquée par une volonté de prendre en compte certains particularismes identitaires ou régionalistes (catalogne, pays basque,…). - La préoccupation commune pour les Etats de l’Union européenne, depuis de nombreuses années, de s’engager sur une réorganisation de la carte de l’administration territoriale. La France s’est naturellement engagée sur cette voie de réforme, cependant on peut regretter que les projets en cours n’aient pas fait l’objet de concertation avec l’ensemble des acteurs locaux. 1Le projet de loi actuel concernant la carte des régions semble être une assez bonne illustration de l’absence de concertation. - L’émergence du fait métropolitain pour l’ensemble des pays européens. Cette évolution se traduit, notamment, dans les pays unitaires par l’établissement d’un statut particulier de villemétropole qui comprend les compétences communales, intercommunales et départementales. Cependant, leur création a pour conséquence de remettre en cause le niveau « départemental » dans le périmètre urbain de ces nouvelles entités administratives, et de concurrencer les collectivités régionales. 1 Cf. « La place du Limousin dans la nouvelle organisation territoriale », Rapporteur : M. Jean Pierre LIMOUSIN 33 AVIS : Deuxième partie Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » CHAPITRE I : Les enjeux du pouvoir normatif local Cet avis a pour unique ambition d’être un élément de réflexion par rapport au débat, qui a été ouvert par la politique de la décentralisation, sur les enjeux du pouvoir réglementaire local. Les collectivités territoriales peuvent-elles, elles mêmes, édicter les règles régissant l’exercice de leurs compétences, ou celles-ci doivent-elles être fixées par l’Etat avec une précision telle que ces collectivités ne disposent plus que d’une simple liberté de gestion ? Cette deuxième situation est souvent dénoncée par les élus locaux qui estiment que la décentralisation ne sera véritablement efficace qu’à la condition qu’ils puissent s’adapter aux circonstances locales. L’Association des Régions de France, depuis plusieurs années, réclame un pouvoir réglementaire à l’image de certaines régions européennes. L’acte III de la décentralisation renforce fortement les champs de compétences des collectivités territoriales régionales, mais renforcera-t-il l’exercice d’un pouvoir réglementaire d’adaptation local ? Ce pouvoir d’adaptation est-il une réelle opportunité pour les régions ou peut-il générer une source de difficultés auprès des collectivités et de leurs administrés ? Enfin, quels champs de compétences doivent être concernés par ce pouvoir réglementaire régional ? Cette deuxième partie, dans le cadre de la saisine régionale, vise à répondre à ces différentes interrogations. En premier lieu, par une synthèse de la problématique du pouvoir réglementaire local, analysée dans la première partie du présent avis. Ensuite, seront abordées les différentes opportunités ou difficultés que peuvent engendrer l’exercice de ce pouvoir local d’adaptation. Enfin, le CESER se prononcera sur les champs d’adaptation potentiels pour lesquels ce pouvoir réglementaire pourrait s’exercer. I - L’immobilisme institutionnel face au pouvoir d’adaptation local Les différents actes de la décentralisation ont marqué les différentes étapes de ce pouvoir réglementaire ; l’acte I a élargi l’autonomie des collectivités territoriales, l’acte II a consacré la pouvoir réglementaire territorial. Enfin l’acte III amplifie le mouvement de transfert de compétences aux régions, et leur offre la possibilité de proposition d’un pouvoir réglementaire local d’adaptation. Cependant, les différents actes de la décentralisation n’ont pas permis les avancées, espérées par de nombreux acteurs locaux, sur l’autonomie réglementaire des collectivités territoriales. 37 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » 1 / L’absence de réelles avancées depuis 2003 La consécration constitutionnelle du 28 mars 2003 de la reconnaissance du pouvoir réglementaire des collectivités territoriales ne modifiera en rien son caractère résiduel et subordonné. Ce pouvoir réglementaire est assujetti au pouvoir normatif national. A titre d’exemple, lors des travaux parlementaires relatifs à cette loi constitutionnelle concernant l’organisation décentralisée de la république, il avait été déposé un 1amendement qui permettait à la loi de confier au pouvoir règlementaire local la possibilité de fixer les mesures d’application des dispositions législatives, à l’exclusion du pouvoir réglementaire du Premier ministre. Cet amendement qui aurait permis une certaine autonomie pour les collectivités territoriales par la capacité à adapter les modalités d’application des lois nationales au contexte local, a été retiré à l’initiative du gouvernement de l’époque. On retrouve toujours cette crainte de l’Etat de se voir débordé par les collectivités territoriales en leur octroyant plus d’autonomie normative. Depuis 2003, cet environnement juridique n’a pas vraiment évolué, et les expérimentations, instituées par la loi constitutionnelle de 2003 n’ ont pas changé fondamentalement l’attitude de l’Etat ou du législateur face au pouvoir réglementaire local. a) L’attitude du Conseil constitutionnel Cette prééminence préservée du pouvoir réglementaire national est aussi consacrée par la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui, par ses décisions sans revirement à ce jour, consacre la primauté du pouvoir normatif national. En effet, la plus haute juridiction considère que « le2 pouvoir réglementaire dont dispose une collectivité territoriale… ne peut s’exercer en dehors des compétences qui lui sont confiées par la loi ». La jurisprudence du Conseil constitutionnel se place dans une interprétation stricte de la Constitution et ne donne aucune marge supplémentaire d’autonomie aux collectivités territoriales. b) La continuité institutionnelle par le projet de loi actuel Ce projet de loi donne bien aux régions un réel pouvoir de proposition pour adapter des textes législatifs ou réglementaires, sans être entravé par des règles drastiques qui étoufferaient toute velléité d’initiative régionale. Il est indéniable que cette absence de formalisme lourd est une vraie nouveauté par rapport aux différentes situations décrites dans la première partie du rapport. Cependant, la seconde phase laisse planer un scepticisme certain sur les suites juridiques que voudra bien accorder l’Etat à ces propositions d’adaptations normatives. Nous avons pu observer que le texte ne prévoit aucune obligation de réponse face à ces propositions… On se retrouve devant la sempiternelle situation où c’est l’Etat et seulement l’Etat qui décidera de l’opportunité des propositions d’adaptation des textes normatifs initiées par les régions. Il est 1 2 Amendement proposé par M. René GARREC Décision du 17 janvier 2002 sur la loi relative à la Corse 38 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » possible que cette situation provoque pour les régions une certaine déception et lassitude à engager des initiatives, si ces dernières tombent continuellement dans l’oubli. 2 / La logique d’un Etat unitaire avec une organisation décentralisée Depuis plus de trente ans, la France s’est engagée dans un mouvement de décentralisation résolu qui a été marqué par les actes successifs de la décentralisation. Les transferts de plus en plus importants au profit des collectivités territoriales auraient pu engendrer une réflexion institutionnelle pour octroyer plus d’autonomie pour ces mêmes collectivités, notamment dans le domaine normatif. Qui plus est, l’exemple des collectivités d’outre-mer a montré l’exercice d’un pouvoir normatif local ; cependant ces initiatives ultra - marines n’ont jamais été accordées aux collectivités métropolitaines ! La France est un Etat unitaire caractérisé par l’unicité de son organisation politique et juridique, même si celle-ci est décentralisée. Actuellement, cette logique d’Etat unitaire perdure et ne semble pas s’orienter vers un transfert de prérogatives publiques aux collectivités décentralisées, qui modifierait alors fortement la structuration administrative, politique et territoriale de notre pays. II – Les opportunités pour la mise en place du pouvoir normatif local A la lecture d’un rapport d’1information du Sénat, en 2009, sur les premières orientations relatives à l’avenir de l’organisation décentralisée de la République, les auteurs de ce rapport montraient l’extrême diversité des régions françaises, par leurs différences géographiques ou démographiques et aussi par leurs diversités territoriales composées de territoires ruraux, de réseaux importants de villes moyennes et d’agglomérations, marquée souvent par la prééminence d’une métropole régionale. Selon ce rapport, cette hétérogénéité doit être considérée comme un atout, source de dynamiques locales et de solidarités territoriales, qu’il convient de soutenir. Toutefois, la réussite d’un territoire ne dépend pas seulement de son périmètre géographique ou des compétences attribuées par la loi, mais également de sa cohésion, culturelle, sociale, de la présence d’équipements de qualité (infrastructures, réseaux, offre de formation, santé,…) en lien avec des stratégies territoriales de développement économique. C’est à la lueur de ces différents constats que ce pouvoir d’adaptation règlementaire pourra être l’une des clés pour les collectivités régionales, d’une action publique territoriale plus efficace auprès des citoyens, par une meilleure prise en compte des spécificités locales. La décentralisation ne doit pas être considérée comme un élément de fragmentation de l’Etat, mais au contraire comme un vecteur d’équilibre permettant de maintenir l’unité et la cohésion de l’Etat, en assurant l’égalité par la prise en compte des différences liées aux spécificités et particularismes locaux. Cette proximité institutionnelle permet au citoyen de se 1 Rapport d’information du Sénat 2008-2009 : premières orientations sur l’avenir de l’organisation décentralisée de la République, M. Yves Krattinger (rapport d’étape) 39 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » rapprocher du pouvoir de décision et de participer de façon plus active à la gestion publique locale, favorisant ainsi un exercice plus démocratique de la décentralisation auprès des administrés. L’acte III de la décentralisation opère un changement important dans l’organisation administrative de l’Etat : fusion des régions, renforcement de leurs compétences, création de métropoles, montée en puissance de l’intercommunalité, interrogation sur le devenir des Conseils généraux,… ; cette mutation institutionnelle peut créer un périmètre d’actions réglementaires dont pourraient se saisir les collectivités régionales. A cet effet, la disparition de la clause générale de compétences, la nouvelle carte des régions et le transfert de nouvelles compétences au profit de la collectivité régionale façonneraient un environnement favorable pour susciter des initiatives pour l’exercice de ce pouvoir réglementaire d’adaptation. A - Le pouvoir d’adaptation des régions face à un environnement institutionnel en mutation a) L’absence de clause générale de compétences dans le projet de loi A la clause de compétence générale qui permettait jusqu’à présent aux régions, mais aussi aux autres collectivités d’intervenir en dehors de leurs champs de compétences de droit commun, souvent de façon redondante et parfois concurrente, va se substituer le principe d’attribution de compétences expressément déterminées par la loi. Cette spécialisation de l’exercice des compétences, par exemple en matière de développement économique, prolongée par la capacité d’élaborer des schémas 1d’orientations prescriptifs, renforcent fortement le pouvoir réglementaire « classique » des régions. En effet, le caractère prescriptif de ces schémas implique une conformité des actions des autres collectivités (métropoles, communes,…) par rapport aux orientations prises dans le cadre de ces documents de planification. La région est donc la collectivité territoriale qui détient de plein droit la responsabilité de la compétence du développement économique, et devient l’acteur institutionnel majeur en terme de soutien et de développement à l’économie régionale. Cette situation eût été différente, si nous étions restés dans l’enchevêtrement habituel de partage de compétences qui provoque fréquemment une situation de concurrence entre collectivités et génère une faible lisibilité de l’action publique locale auprès des administrés et acteurs économiques. Ce nouvel environnement législatif offre aux Conseils régionaux les leviers institutionnels nécessaires pour organiser des politiques sectorielles les plus efficaces possibles au profit des territoires urbains et ruraux. Cette capacité ne pourra être que renforcée, si la collectivité régionale dispose d’un pouvoir d’adaptation pour modifier certaines règles nationales, afin de mieux prendre en compte des spécificités ou particularismes locaux. b) La nouvelle carte des régions 1 Projet de loi portant sur la nouvelle organisation territoriale : Schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation (Article 2) ; Schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire (Article 6) : annexe VII 40 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Le projet de loi sur la délimitation des régions redessine la carte des régions, par la création de treize collectivités régionales en lieu et place des vingt deux anciennes régions, selon les derniers travaux parlementaires du mois de juillet 2014, en première lecture. A cet effet, le Limousin devrait être l’une des trois composantes du futur Conseil régional Aquitaine-LimousinPoitou-Charentes. La configuration de cette nouvelle région, de par ses principales caractéristiques socio-économiques, montre une étendue géographique, une diversité territoriale, des caractéristiques économiques, sans aucune mesure avec la photographie du contexte socio économique de la région Limousin. Le 1tableau, ci après, dresse de façon très synthétique quelques éléments chiffrés qui constatent cette profonde modification statistique. Région Aquitaine-Limousin Poitou - Charentes Région Limousin Part en % de la Région Limousin Superficie (Km2) 84 060 16 942 20.15% Population (2011) 5 773 078 741 072 12.84% 146 18 12,33% Dépenses et Recettes (M€, 2012) 2500 458 18,32% Agents employés par la collectivité 8 200 1 500 18,29% PIB (Mds€,2012) Ces quelques chiffres montrent le bouleversement qui va être opéré par cette nouvelle organisation territoriale qui va faire de cette future région, l’une des plus peuplées et plus vastes de France, comprenant une métropole, des agglomérations, un réseau de villes moyennes, prolongées par des territoires ruraux importants. Cette nouvelle configuration territoriale va être source d’enjeux majeurs que devra relever la future entité territoriale, ne serait-ce que par la mise en place d’une organisation administrative coordonnée pour la gestion opérationnelle de ses politiques d’intervention, sur l’ensemble du territoire régional ! L’équilibre des territoires doit être une des orientations stratégiques de cette nouvelle région entre la sphère d’activité économique de la métropole bordelaise et les territoires en forte périphérie. Si les zones urbaines et rurales du Sud Ouest bénéficient déjà de cette 2zone d’influence, il reste à construire et à organiser une politique territoriale forte favorisant les dynamiques locales et solidarités territoriales avec les zones géographiques du nord-est de la nouvelle région. La nécessaire constitution de ce pôle d’équilibre territorial passera également par un renforcement des liens entre les principales villes de Poitou - Charentes et du Limousin. Afin de coordonner et de développer des dynamiques locales ainsi que des solidarités territoriales, la nouvelle région devra engager et mettre en œuvre une politique volontariste d’aménagement du territoire afin d’éviter les fractures potentielles entre les territoires urbains et ruraux composant ce grand espace régional. Cette politique comprendra la prise en compte de 1 Dans le cadre de la constitution des 13 futures régions, la région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes occupe la première place pour la superficie, et la troisième place pour la population 2 Cf. : Carte des pôles et réseaux urbains régionaux, page 46 41 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » spécificités locales ou particularismes territoriaux pour lesquels l’exercice du pouvoir d’adaptation serait une solution pour une action publique territoriale au plus prés des réalités locales. Bien évidemment, cette stratégie de coordination et de complémentarité d’actions doit concerner aussi les politiques sectorielles de droit commun : développement économique, formation, infrastructures,… c) Des collectivités territoriales régionales plus fortes Le projet de loi portant sur la nouvelle organisation territoriale a une ambition affichée de renforcer et de développer l’efficacité de l’action publique des collectivités territoriales régionales. Le regroupement de celles-ci associé à un périmètre élargi d’interventions publiques, façonnent des entités territoriales puissantes, à l’instar de leurs homologues européennes. Ces collectivités avec un champ territorial désormais élargi, dotées de compétences spécifiques de plus en plus importantes doivent trouver dans leur organisation institutionnelle un pouvoir et un périmètre juridique qui soient comparables à ceux des autres régions européennes. Nous avons vu que les régions italiennes ou espagnoles bénéficiaient d’un pouvoir normatif, dans le cadre d’un Etat régional. La capacité pour les régions françaises de pouvoir mettre en œuvre ce pouvoir d’adaptation, dans un premier temps, renforcerait leurs capacité et réactivité d’intervention en fonction du contexte économique, territorial ou social de ces grands ensembles géographiques régionaux. Cependant, la conquête de cette autonomie réglementaire, on l’a vu, est un chemin difficile à gravir pour les collectivités territoriales, dans le cadre d’un Etat unitaire, même décentralisé. B- Le pouvoir d’adaptation des régions et le pouvoir normatif national Le législateur a fait, maintes fois, l’objet de critiques sur sa capacité à édicter des lois, au contenu si détaillé, qu’elles en deviennent difficilement applicables et/ou source d’inégalités pour certaines collectivités qui n’ont aucune latitude réglementaire pour pouvoir modifier un texte peu ou pas adapté à un contexte local. Certains auteurs parlent de « loi trop bavarde » qui empêche tout pouvoir d’initiative aux collectivités territoriales. A titre d’exemple, avant la loi du 27 février 2002 relative à la proximité de la démocratie, c’est l’Etat qui fixait par décret les conditions d’octroi pour les régions, à propos du régime d’aides aux entreprises. Ces conditions étaient identiques sur tout le territoire national, ne tenant absolument pas compte de la diversité des contextes économiques régionaux, et donnant ainsi une efficience toute relative à ce dispositif d’aides. En l’espèce, à partir de 2002, l’Etat a bien pris en compte cette « rigidité » législative et a instillé une certaine autonomie auprès des 1Conseils régionaux pour qu’ils déterminent le régime juridique des aides aux entreprises. 1 Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié par la loi du 27 février 2002 : 1° L'article L. 1511-2 est ainsi rédigé : « Art. L. 1511-2. - Les aides directes revêtent la forme de subventions, de bonifications d'intérêt ou de prêts et avances remboursables, à taux nul ou à des conditions plus favorables que celles du taux moyen des obligations. Elles sont attribuées par la région et leur régime est déterminé par délibération du conseil régional ». 42 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Cette situation ne nous place pas sur le champ du pouvoir d’adaptation, car l’initiative ne relève pas des collectivités mais bien de l’Etat, qui a donné par la loi une certaine latitude réglementaire aux régions qui ont adapté leurs règlements au contexte économique régional. Le législateur pourrait engager une réflexion sur cette « logorrhée législative » qui devrait faire place à des textes à l’écriture plus générale, qui ne doit pas chercher à régir par le menu détail toutes les situations existantes … ou potentielles, bloquant ainsi tout pouvoir d’initiative pour les collectivités territoriales. A ce titre, le rapport 1d’information du Sénat sur les premières orientations sur l’avenir de l’organisation décentralisée de la République proposait de définir un « nouveau type de loi, la loicadre territoriale, qui fixerait des objectifs fondamentaux et déterminerait le contenu du pouvoir réglementaire local ». A ce jour, nous sommes loin de la généralisation d’une telle liberté réglementaire donnée aux collectivités territoriales. III – Les difficultés pour l’exercice du pouvoir normatif local L’exercice du pouvoir normatif par les collectivités territoriales relève de plusieurs difficultés, liées d’une part, au respect des principes constitutionnels, d’autre part aux conséquences territoriales de la réforme, initiée par le projet de loi actuel. 1 / Le principe de l’indivisibilité de la République L’article premier de la Constitution dispose que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion… ». Ce caractère d’indivisibilité ou d’unité est traditionnellement associé aux trois éléments constitutifs de l’Etat français: le territoire, le peuple, et la souveraineté. La souveraineté implique une source unique du pouvoir normatif initial consacré par le Parlement et le Gouvernement par l’édiction du pouvoir réglementaire national. A ce titre, la question est posée sur la capacité d’autonomie réglementaire des collectivités territoriales. Peuvent-elles édicter des actes réglementaires, en dehors de leurs champs de compétences dévolues par la loi, donc bénéficier d’un pouvoir réglementaire initial et autonome, et porter ainsi atteinte au principe de l’unité de la République ? La réponse est apportée par la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel qui s’oppose à ce que le législateur confère aux collectivités territoriales un statut d’autonomie réglementaire. La décentralisation ne saurait conduire à accorder aux collectivités territoriales métropolitaines un pouvoir normatif autonome, sans habilitation préalable du législateur. Le principe d’indivisibilité de la souveraineté nationale est bien consacré au nom de la logique unitaire de l’Etat français. Il ne peut exister une source de droit « additionnelle » qui imposerait des obligations ou créerait des droits nouveaux à l’égard des citoyens pour une partie du territoire national, cette situation porterait aussi atteinte au principe constitutionnel d’égalité. 1 Rapport d’information du Sénat 2008-2009 : premières orientations sur l’avenir de l’organisation décentralisée de la République, M. Yves Krattinger (rapport d’étape), page 39 43 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » 2 / Les sources de difficultés liées à la réforme territoriale A - Des centres de décision éloignés du citoyen La nouvelle architecture décentralisée organise une nouvelle carte territoriale afin de remplir les objectifs de « plus d’efficacité, plus de rapidité, plus de proximité et plus de démocratie », selon les propos énoncés par le Président de la République lors des assises de la Démocratie Territoriale, le 5 octobre 2012. Cependant, on peut s’interroger sur la réalisation de ces différents objectifs par l’ampleur du contenu de cette réforme qui conjugue à la fois le regroupement des régions, le renforcement de l’intercommunalité et le développement de métropoles. L’acte III de la décentralisation donne à ces métropoles un champ impressionnant de compétences issues des communes, du département, de la région et de l’Etat. L’article L. 5217-1I du code général des collectivités définit la métropole comme telle : « La métropole est un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant plusieurs communes d’un seul tenant et sans enclave au sein d’un espace de solidarité pour élaborer et conduire ensemble un projet d’aménagement et de développement économique, écologique, éducatif, culturel et social de leur territoire afin d’en améliorer la cohésion et la compétitivité et de concourir à un développement durable et solidaire du territoire régional. Elle valorise les fonctions économiques métropolitaines, ses réseaux de transport et ses ressources universitaires, de recherche et d’innovation, dans un esprit de coopération régionale et interrégionale et avec le souci d’un développement territorial équilibré.» La métropole exerce de plein droit les compétences des communes, membres de l’intercommunalité. Mais ce périmètre peut être élargi par voie conventionnelle, par l’exercice de domaines de compétences gérés jusqu’alors par le département, la région ou l’Etat. La logique de cette réforme territoriale est d’engager une concentration des centres stratégiques sur un territoire urbain, celui de la métropole. Ce périmètre métropolitain regroupera l’ensemble des principales structures technocratiques décisionnaires (métropole, Conseil régional, administrations déconcentrées de l’Etat, sièges sociaux,…). Cette situation participe d’une nouvelle géographie économique qui allie désormais, concentration de pouvoirs (administratifs, économiques, politiques, technologiques,…) sur un périmètre urbain réduit et développement géographique et démographique. La politique de décentralisation engagée, il y a près de trente ans, avait pour but de rapprocher, le pouvoir politique du citoyen en organisant des transferts de compétences de l’Etat à des collectivités décentralisées, administrées par un conseil élu. Le fait régional, aujourd’hui, est accepté par les citoyens. Cette situation est due à la maturité institutionnelle que se sont façonnées les collectivités régionales par une gestion efficiente de politiques d’intervention de proximité, au cours des actes successifs de décentralisation. 44 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Cependant, la situation à venir semble opérer une dynamique inverse qui risque donner de moins en moins de lisibilité à l’action publique territoriale par l’éloignement géographique des centres de décisions par rapport aux administrés résidant sur ce vaste ensemble territorial recomposé. A ce titre, les vertus du pouvoir d’adaptation risquent d’être mises à mal, entre la prise en compte des réalités locales ou particularismes territoriaux et l’absence de proximité des centres décisionnaires pour l’appréhension de ces différences territoriales. B - Risque de fracture entre la métropole et les territoires périphériques L’acte III de la décentralisation, par la loi du 27 janvier 2014, a créé les métropoles qui concernent les intercommunalités pour des territoires de plus de 400 000 habitants. Le phénomène de métropolisation qui est une des conséquences de la mondialisation est marqué par deux caractéristiques. L’une concerne une situation de concentration de la population en milieu urbain, l’autre est caractérisée, notamment, par la centralisation des centres de décisions politiques et administratifs. Ces espaces métropolitains relèvent d’un dynamisme important, alors que le 1PIB national a progressé de 1.1% par an de 2000 à 2010, celui des métropoles a montré une croissance de 1.6% par an sur cette période. Il en résulte une sphère économique qui comprend, d’une part, la métropole et les territoires sous son influence directe (urbains ou ruraux) qui bénéficient d’un environnement économique favorable et d’autre part, les territoires les moins « métropolisés » au développement économique faible ou atone. A ce titre, c’est l’articulation de la métropole et de la région qui devrait constituer l’élément central d’un périmètre vertueux de croissance sur l’ensemble du territoire régional. Le Conseil régional doit donc piloter des politiques sectorielles pour impulser un développement à l’échelle du périmètre régional afin d’assurer la croissance de tous les territoires, auxquels la métropole doit contribuer. Cependant, la création de la future région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes risque d’impliquer un « déclassement » des anciennes capitales régionales, source potentielle de fractures infrarégionales, et d’un amoindrissement de la sphère d’attractivité de ces deux agglomérations sur les territoires périphériques. Ce phénomène de métropolisation ne risque-t- il pas de créer de façon mécanique ce type de situation caractérisée par un affaiblissement et/ou une rupture de cohésion territoriale ? 1 France stratégie : Réforme régionale, un enjeu pour la croissance ; Benoît LAJUDIE 45 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Qui plus est, la faible croissance économique depuis plusieurs années risque de créer un phénomène supplémentaire inverse à celui qui est affiché, par une situation potentielle de repli ou d’autoprotection de la métropole qui aura pour conséquence de créer ou de développer des fractures territoriales, notamment, avec les zones rurales les plus en périphérie. 46 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Dans cette hypothèse, Il n’est pas certain que la région, dans un environnement budgétaire fortement contraint, ait la capacité de conduire des politiques publiques de soutien et d’équilibre entre les territoires sur l’ensemble géographique régional. Cette situation risque d’engendrer ainsi un « repli normatif », ou des dispositions d’adaptation ne pourront pas concerner les zones les plus éloignées en raison des contraintes budgétaires. Cette réforme risque de développer un durcissement général des inégalités territoriales dans ces nouveaux périmètres régionaux et aussi entre les futures collectivités territoriales. C - L’organisation territoriale de l’Etat, et les conséquences pour l’échelon départemental Le projet de loi ne parle pas de carte administrative territoriale de l’Etat, cependant le gouvernement a indiqué qu’un schéma de réorganisation sera mis en place et que la réforme de l’Etat sera menée « de 1façon complémentaire et dans le même calendrier que celui de la réforme territoriale ». A l’échelon régional, l’Etat se concentrera sur un positionnement stratégique, et l’échelle géographique du département verra se conforter «2 l’intervention de l’Etat dans son rôle de proximité vis-à-vis de l’usager et continuera à veiller à la cohésion sociale et territoriale en offrant un accès rapide à tous les services (maisons de service public, maisons de l’Etat) ». On peut observer que l’Etat consolide son action à l’échelon départemental, alors que la réforme territoriale programme la disparition des Conseils généraux. A ce titre, il est révélateur de voir que l’Etat veut combler par ses propres interventions, le vide institutionnel lié à la disparition des Conseils départementaux, organisant ainsi un phénomène de (re)centralisation, au niveau infrarégional. Qui plus est, la question reste toujours posée du devenir du champ de l’action sociale, compétence à titre principal de la collectivité départementale. A ce jour, le flou institutionnel demeure sur les héritiers de ce champ de compétences, qui pourraient être les métropoles de droit commun, l’intercommunalité, ou l’existence d’un Conseil général aux compétences simplifiées sur des territoires ruraux. Il est certain que cette absence de lisibilité institutionnelle sur l’organisation territoriale de l’Etat ne va pas susciter un climat favorable pour mettre en exergue un pouvoir réglementaire d’adaptation par les régions. Cette situation va créer plutôt un « attentisme réglementaire » de la part des collectivités régionales, tant que la cartographie administrative de l’Etat ne sera pas aboutie. D - Les ressources financières Le pouvoir d’adaptation réglementaire doit permettre pour les collectivités régionales l’exercice d’une action publique territoriale plus efficace auprès des citoyens, par une meilleure prise en compte des spécificités locales. Ce régime normatif dérogatoire nécessite des ressources financières plus importantes pour mettre en œuvre cette politique publique adaptée, 1 2 Communiqué du conseil des ministres du 2 juillet 2014 Extraits du Conseil des ministres : Thierry MANDON, Secrétaire d’Etat à la réforme de l’Etat et à la simplification 47 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » et ce, quels que soient les domaines d’intervention : économie, formation, aménagement et développement du territoire. Si l’on regarde te tableau, ci après, concernant l’évolution des budgets des Conseils régionaux de l’Aquitaine, du Limousin et de Poitou-Charentes, on s’aperçoit d’une certaine stabilité des différentes masses budgétaires régionales, qui risque de se heurter dans un proche avenir, à un environnement financier drastique de la part de l’Etat, pour les dotations budgétaires allouées aux régions. Ce contexte budgétaire contraint risque de limiter les différentes initiatives liées à ce pouvoir réglementaire d’adaptation, dont le coût financier sera jugé incompatible avec un périmètre budgétaire contraint. 2011 2012 2013 Aquitaine 1318 1352 1365 Limousin 439 458 468 Poitou-Charentes 687 690 690 (1)Dépenses et recettes totales (1) En millions d’Euros (Direction générale des collectivités locales) Enfin, la négociation relative aux Contrats de Plan Etat - Région s’exerce, actuellement, entre l’Etat et les exécutifs régionaux sur les 1domaines d’interventions et le montant financier de ces contrats. Cependant la question reste posée sur le périmètre de ces contrats de plans. Comment l’Etat va appréhender cette nouvelle configuration administrative ? Par une renégociation globale des trois Contrats de Plan ou par l’addition des différentes interventions négociées dans chacune des anciennes régions ? Cette situation risque de perturber fortement l’action publique conjointe de l’Etat et de la future région et va probablement entraîner des retards importants dans la programmation opérationnelle des investissements liés aux cinq volets thématiques prioritaires. L’environnement incertain de cette contractualisation institutionnelle ne va non plus susciter beaucoup d’initiatives pour l’exercice d’un pouvoir réglementaire d’adaptation. On le voit, l’environnement de la réforme territoriale pourrait jouer fortement sur l’exercice éventuel du pouvoir réglementaire d’adaptation, notamment par : - L’éloignement géographique des centres de décision par rapport aux administrés ; - Les fractures potentielles infrarégionales entre la métropole et des zones périphériques ; - Une carte administrative de l’Etat réorganisée dans le sens d’une recentralisation ; 1 Les domaines d’intervention du Contrat de Plan sont : l’Enseignement supérieur, recherche, innovation ; innovation, filières d’avenir, usine du futur ; mobilité multimodale ; couverture du territoire par le très haut débit et développement des usages du numérique ; transition écologique et énergétique. « Contribution à l’élaboration du Contrat de Plan Etat-Région » (2014-03), Rapporteurs : Mme NEXON, MM. CORNELISSEN, LERESTEUX, MERPILLAT, VAREILLE 48 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » - Un environnement budgétaire contraint qui laisse peu de marges de manœuvre à la collectivité territoriale ; - Une accentuation potentielle de concurrence et d’inégalité entre les treize futures régions pour lesquelles doit être organisé un système de péréquation afin de corriger les inégalités de ressources financières pour assurer ainsi une solidarité financière entre l’ensemble des grands ensembles régionaux. CHAPITRE II : Les champs d’adaptation réglementaire possibles I - L’évolution du rôle de l’Etat Depuis 30 ans la mise en œuvre des lois organisant la décentralisation a fortement impacté les champs de compétences respectifs de l’Etat et des collectivités territoriales. Parallèlement, les restructurations conduites dans l’ensemble des administrations publiques d’Etat ont aussi affecté leurs missions ainsi que leurs organisations territoriales. Par cette situation, la lisibilité de l’action publique est devenue de plus en plus diffuse pour les citoyens, les acteurs économiques et aussi pour les élus. La question se trouve donc posée sur de nouvelles articulations entre les différentes institutions publiques, et le nouveau rôle que doit jouer l’Etat au sein de cet environnement institutionnel en pleine évolution, accentué par les propositions de transferts substantiels de compétences liées au projet de réforme de l’acte III de la décentralisation. La puissance publique de l’Etat, intervient naturellement sur le champ de ses prérogatives ou fonctions régaliennes. A cet effet, l’Etat assure la sécurité des biens et des personnes, organise le système judiciaire et veille à la sécurité extérieure du territoire. L’Etat assure toujours son rôle d’arbitre institutionnel et demeure le gardien de la cohésion sociale. Cependant, la sphère de plus en plus limitée de son intervention publique, incite désormais l’Etat, à s’investir dans un rôle de stratège afin de faire face aux incertitudes majeures (crise financière, mondialisation de l’économie, conflits internationaux,…) qui jouent sur l’environnement institutionnel, social et économique du pays. L’Etat doit alors définir des domaines de priorité pour anticiper les évolutions majeures auxquelles le pays pourrait être confronté. A cet effet, il impulse les politiques publiques et coordonne leurs interventions, en lien avec les différentes institutions ou collectivités publiques, pour apporter les réponses institutionnelles aux enjeux et défis à venir. Si la période « des trente glorieuses » a permis un interventionnisme fort et important dans de multiples domaines consacrant la notion « d’Etat-providence », la configuration institutionnelle, 49 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » économique et sociale actuelle a fait place au rôle d’un « Etat-stratège », porteur d’orientations stratégiques pour assurer le pilotage institutionnel du pays. II - Les domaines d’adaptation réglementaire des régions Parmi les domaines d’intervention de droit commun de la région, nous allons examiner les principales incidences réglementaires qu’apporte le projet de loi sur les champs de compétences de droit commun de la région, mais aussi sur les nouveaux domaines transférés aux régions selon les propositions du projet de loi . A ce titre, le CESER formulera ses observations. A - Les compétences de droit commun Pour chacune de ces compétences, nous allons répertorier les différents schémas directeurs avec leurs orientations stratégiques ainsi que les principales interventions qui relèvent des dispositions de ces documents de planification. Nous présenterons ensuite les modifications ou évolutions éventuelles de l’exercice du pouvoir règlementaire régional, apportées par le projet de loi. DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE Documents stratégiques : • Le Schéma Régional de Développement Economique (SRDE) : Les orientations stratégiques de ce schéma visent les finalités suivantes : - La promotion de l'emploi pour tous et l'insertion des jeunes ; - Le développement des offres de services pour la population ; - Le développement de l'attractivité du Limousin par la diffusion d'une image renouvelée ; - L'accroissement de la compétitivité des entreprises, le développement des filières ; - Le soutien à la création-transmission-reprise d'entreprises ; - Les complémentarités économiques à l'échelle locale ; - La valorisation des ressources forestières, agricoles, touristiques et patrimoniales. Les principales interventions : Les principales aides aux entreprises concernent les domaines suivants : - L’amélioration énergétique et environnementale ; - La création d’emplois ; - La création et reprise d’entreprise ; - Le développement d’entreprise et projets d’investissements ; - Le développement international ; - L’innovation,… Eléments de contexte apportés par le projet de loi : 50 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Le projet de loi confère à la région le premier rôle dans le soutien au développement économique, notamment par l’aide aux petites et moyennes entreprises et entreprises de taille intermédiaire. La région a vocation à accompagner la croissance de ces entreprises, à renforcer leur capacité à innover et à exporter. Le Conseil régional devient la collectivité qui détient de plein droit la responsabilité de la compétence du développement économique sur le territoire régional. A cet effet, elle élabore le 1schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation qui définit les orientations dans ce domaine, et qui veille à la complémentarité des interventions de l’ensemble des collectivités concourant au développement de l’économie, sur l’ensemble du territoire régional. Ce document qui a un caractère prescriptif, définit les axes et orientations concernant : - Les aides aux entreprises ; - Le soutien à l’internationalisation ; - L’aide à l’investissement immobilier ; - L’aide à l’innovation. La valeur prescriptive de ce document d’orientation et de planification implique que les interventions des autres collectivités (métropoles, communes ou leurs groupements) doivent être en cohérence par rapport aux orientations du schéma régional en matière économique. Le projet de loi apporte une consolidation du pouvoir règlementaire régional par sa situation de chef de file de droit pour le soutien et le développement de l’économie régionale. Le projet de loi, par les dispositions de 2l’article 4, consacre la région en tant que chef de file en matière de développement touristique. A ce titre, elle élabore le schéma régional de développement touristique qui fixe les objectifs stratégiques d’aménagement, de développement et de promotion du territoire régional. Cependant ce document n’a pas valeur prescriptive. L’avis du CESER Le CESER constate que le projet de loi a donné au schéma régional de développement économique un renforcement de l’exercice réglementaire régional par son caractère prescriptif. Cette notion implique en effet que les décisions et actes des autres collectivités, sur l’ensemble du territoire régional, doivent être en conformité avec les orientations de la région, en matière de développement économique, y compris pour les métropoles. Le CESER approuve cette situation qui apporte une consolidation du pouvoir règlementaire de la Région, afin de la consacrer comme acteur majeur pour le soutien et le développement au tissu économique régional. Cette synergie de l’ensemble des interventions des différentes collectivités amènera une meilleure efficience de l’action publique territoriale par une complémentarité nécessaire et utile des différentes entités décentralisées qui concourent au développement économique. 1 2 Cf. Annexe VII Cf. Annexe VII 51 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Ce principe de spécialisation des compétences associé au caractère prescriptif du schéma doit engager une rupture avec la notion de clause de compétence générale qui générait souvent une intervention publique territoriale désordonnée et peu lisible auprès des acteurs économiques. Par ailleurs, le CESER souhaite que les orientations du futur schéma régional du développement économique prennent en compte, l’ensemble des composantes territoriales avec leurs spécificités. Ces dispositions doivent favoriser un dynamisme économique sur l’ensemble du territoire en soutenant fortement les zones les plus éloignées de la métropole, afin de contribuer à la solidarité des territoires, notamment par un système de péréquation financière infrarégional. Pour l’exercice du pouvoir règlementaire d’adaptation relatif aux aides économiques, telles que le déplafonnement des taux des aides publiques, le CESER observe que ces modifications ne pourront pas aller à l’encontre des règlements européens. Cette situation de la primauté du droit de l’Union européenne sur les règles nationales risque de réduire considérablement le champ d’initiative réglementaire régional dans ce domaine d’intervention spécifique en matière de développement économique. FORMATION Documents stratégiques : • Le Contrat de Plan Régional de Développement des Formations Professionnelles (CPRDFP) : Le contrat de plan régional de développement des formations professionnelles a pour objectif d’offrir et de développer des filières de formation professionnelle, de réaffirmer les principes d’une orientation et d’une formation tout au long de la vie, en lien avec le développement social et économique du territoire régional. A ce jour, des plans catégoriels sont en cours d’élaboration tels que le schéma régional des formations sanitaires et sociales de 2ième génération, le schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et le contrat d’objectifs et de moyens avec l’Université. Les principales interventions : Les différentes orientations énoncées par le contrat de plan régional de développement des formations professionnelles concernent les domaines suivants : - Politique de formation professionnelle continue pour les demandeurs d’emploi par le financement de dispositifs spécifiques ; - Elaboration de la carte de l’apprentissage, et des formations professionnelles initiales en lien avec l’Etat ; - Financement des centres de formation d’apprentis et politique d’aide aux employeurs ; - Financement des organismes de formation des secteurs sanitaire et social ; 52 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » - Investissements immobiliers : CFA, Lycées, Université,… ; - Politique de développement auprès de l’enseignement supérieur et de la recherche ; - Aide individuelle aux apprenants : apprentis, lycéens, étudiants,… Eléments de contexte apportés par le projet de loi : L’article 11 du projet de loi consacre le transfert de propriété des collèges, jusqu’alors gérés par les départements, aux régions à compter du 1ier septembre 2017. A cet effet, elles assument toutes les obligations liées à la gestion de ce parc immobilier scolaire. Au titre de la sectorisation des collèges, la région est compétente pour arrêter la localisation, la capacité d’accueil, le secteur de recrutement et le mode d’hébergement des élèves. L’avis du CESER : Le champ de la formation n’est concerné que par la partie immobilière des établissements scolaires ; avec l’augmentation de la gestion du parc immobilier liée au transfert de propriété des collèges. A cet effet, la région aura la gestion des établissements scolaires, collèges et lycées, assurant ainsi un niveau unique de gestion de ces établissements sur l’ensemble du territoire régional. Le CESER estime que cette situation d’unicité de gestion devrait amener, en principe, une simplification et une meilleure rationalisation financière pour une politique d’investissements immobiliers afférents à la gestion des établissements scolaires. Cependant, le CESER attire l’attention sur la situation potentielle d’éloignement géographique des centres de décision par rapport à la gestion immobilière de l’ensemble des établissements scolaires, qui pourrait entrainer une différenciation de traitement pour des sites situés sur des zones périphériques. Le CESER sera aussi attentif à la situation des personnels territoriaux, titulaires et contractuels, et à l’évolution de l’emploi attaché à la gestion technique des établissements scolaires Si la responsabilité principale de la formation initiale relève de l’Etat, le pilotage de la formation professionnelle tout au long de la vie est une compétence dévolue aux régions par les différentes lois de décentralisation. Le CESER constate le silence du projet de loi concernant le domaine de la formation professionnelle, par l’absence de toute référence aux contrats de plan régionaux de développement des formations professionnelles conclus, par l’ensemble des régions. Le CESER avait déjà émis des observations sur les 1enjeux de ce contrat de plan régional des formations professionnelles, dans le cadre d’une saisine du Conseil régional en 2010, en évoquant le caractère prescriptif qui devait caractériser cette contractualisation entre l’Etat et la Région Limousin. 1 « Les enjeux du contrat de plan régional de développement des formations professionnelles » (2011-01), Rapporteur : M. Pierre CAPY 53 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » A ce titre le CESER ne peut que réitérer ses recommandations qui concernaient, notamment, les observations suivantes : - L’engagement des signataires par le caractère prescriptif de cette contractualisation ; - Le renforcement de la concertation des différents 1acteurs (notamment dans le domaine agricole) ; - La coordination et la complémentarité de l’offre de formation ; - L’anticipation des besoins des secteurs professionnels ; - La problématique de l’orientation ; - L’ancrage de la formation professionnelle au sein des territoires,… Le CESER estime que le caractère prescriptif d’une contractualisation entre les acteurs institutionnels de l’emploi et de la formation apportera une meilleure efficience et réactivité pour une politique publique régionale de formation professionnelle en faveur des différents publics : apprentis, demandeurs d’emploi,… Le CESER observe que le domaine de l’apprentissage qui est une des composantes du champ de la formation professionnelle, pourrait être un exemple de l’exercice du pouvoir règlementaire d’adaptation. Il existe une 2aide financière uniforme pour favoriser le recrutement des apprentis au sein des entreprises de moins de 11 salariés. Les 3chiffres actuels montrent une baisse des effectifs liée à une situation économique fortement dégradée. Une solution pour entraver cette baisse d’effectifs serait certainement une politique d’aide financière différenciée qui prenne en compte les spécificités de certaines entreprises ou secteurs afin de favoriser le recrutement des futurs apprentis. Cette stratégie incitative doit passer par une nécessaire adaptation des aides régionales aux besoins des entreprises en fonction de leurs spécificités. Le pouvoir d’adaptation trouverait là un périmètre idéal pour exercer une politique d’aide financière adaptée au tissu régional des petites entreprises. Enfin, le CESER s’interroge sur la pérennité de la politique d’aides individuelles aux apprenants, organisée par la Région Limousin (gratuité des manuels scolaires, fonds social pour les lycéens,...) dans le cadre de la création du futur Conseil régional Aquitaine-Limousin-PoitouCharentes ? Le CESER souhaite la poursuite d’une politique qualitative d’égalité des chances par les aides individuelles aux apprenants, telle qu’elle est organisée actuellement par la Région Limousin. Le CESER affirme tout autant son intérêt à la poursuite de la politique régionale pour le monde associatif, à travers le dispositif des 4emplois associatifs. Ces différentes illustrations (gratuité des manuels scolaires, emplois associatifs,…) ont montré des politiques volontaristes de soutien à un secteur et/ou à une catégorie de publics. La création de la future région ne doit pas 1 « Accès à l’emploi des personnes en situation de handicap en Limousin » (2013-07), Rapporteurs : MM Jean pierre GAILLARD et Claude VIROLE : page 134 et suivantes 2 Prime régionale pour l’apprentissage de 1000 €, pour les contrats conclus à partir de janvier 2014 en faveur des entreprises de moins de 11 salariés 3 Effectifs d’apprentis en limousin pour la période 2009-2010 : 3855, 2011- 2012 : 3792 ; 2012-2013 : 3710 4 « Les emplois associatifs en limousin » (2014-02), Rapporteurs : MM. Arnaud BRUZAT et Jean michel GAY 54 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » compromettre ces initiatives réglementaires, voire les supprimer, mais au contraire engager la continuité de ce pouvoir réglementaire en faveur de telles politiques. AMENAGEMENT DU TERRITOIRE Documents stratégiques : • 1 Schéma Régional d’Aménagement et de Développement Durable du Territoire (SRADDT) Ce schéma régional est un document de stratégie global, issu des évaluations et prospectives « Limousin 2007 » et « Limousin 2017 ». Il s’inscrit dans une vision de continuité territoriale, comme un outil d’aménagement du territoire, dont l’Etat doit en être le garant. A ce titre, le SRADDT doit être un outil fédérateur pour relever trois défis : - Relever le défi démographique, avec l’objectif de poursuivre et d’amplifier le regain de population : il s’agit de développer une politique d’accueil et de garder en Limousin le potentiel que représentent les jeunes générations. Il s’agit également de conserver un territoire solidaire, où la qualité de vie, la grande qualité environnementale et le dynamisme de l’économie sont facteurs d’attractivité. - Affronter le défi énergétique et climatique : c’est un défi planétaire que le Limousin ne peut ignorer. Réduire la dépendance du Limousin aux énergies fossiles et s’adapter au changement climatique ne peut que contribuer à l’amélioration de la qualité de vie de chacun. C’est aussi le meilleur moyen pour le Limousin de conforter son image d’excellence environnementale et d’offrir un champ nouveau pour le développement économique. - Affirmer un Limousin ouvert, connu et reconnu : ce troisième défi est celui de l’ouverture et de la mondialisation. La mondialisation est porteuse de difficultés, mais elle peut être aussi source d’opportunités pour la région. Le Limousin doit s’inscrire dans cette société globalisée et en être acteur. La déclinaison de ce schéma régional de l’aménagement du territoire pour les questions liées au transport se traduit par l’élaboration du schéma régional des infrastructures et des transports 2(SRIT). L’objectif du SRIT est d’optimiser les réseaux et équipements existants et de favoriser la complémentarité entre les différents modes de transport, ainsi que la coopération entre les opérateurs. Elaboré avec le concours des autorités organisatrices de transport, collectivités et associations, ce schéma identifie les priorités en matière de transports régionaux : l’intégration du Limousin au sein des grands axes de déplacements européens, le désenclavement des zones les plus isolées, l’amélioration des conditions de déplacements, la réalisation d’une véritable 1 « Schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire » (01-2009), Rapporteur de l’avis : M. Jacques REGNIER 2 « Schéma régional d’infrastructures de transport » (2008), Rapporteur : M. Roger GORCE 55 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » ouverture routière et le renforcement du réseau de villes. Instauré par l’article 68 de la loi Grenelle 2, l’Etat et la région Limousin ont élaboré le schéma régional Climat-Air-Energie dont les objectifs, en matière de lutte contre le changement climatique, sont : - La réduction de 25 % des consommations énergétiques ; - La réduction de 18 % des émissions de gaz à effet de serre (enjeu du report modal) ; - Une production d’énergies renouvelables à hauteur de 55% des consommations régionales. Les principales interventions : - Conforter et soutenir les territoires de projet du Limousin dans un souci de cohésion et de solidarité régionales ; - Faire de la qualité de l’environnement et du cadre de vie un atout du limousin ; - Promouvoir l’épanouissement des limousins par l’accès à la culture et au sport ; - Renforcer l’attractivité des territoires par l’offre culturelle et de pratiques sportives et relever le défi de la démographie par une politique volontariste d’accueil ; - Poursuivre l’ouverture du Limousin par le développement des infrastructures et des nouvelles technologies de l’information. Eléments de contexte apportés par le projet de loi : L’article 6 du projet de loi fait du schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire, un document de planification majeur qui participe à l’égalité et à la promotion des territoires. Ce document élaboré par la région a valeur prescriptive. Il organise les orientations stratégiques et objectifs du développement régional dans les domaines de l’aménagement du territoire, de la mobilité et de la lutte contre les évolutions climatiques liées au réchauffement. Ce document se substitue aux différents schémas existant dans ces domaines. A ce titre, il regroupe le schéma régional de l’intermodalité, le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie, le plan régional de prévention et de gestion des déchets ainsi que le schéma régional de cohérence écologique. Le caractère prescriptif de ce schéma directeur concerne, notamment, les documents d’urbanisme tels que les schémas de cohérence territoriale ou les plans locaux d’urbanisme. L’avis du CESER Le CESER constate une volonté de simplification en regroupant plusieurs plans catégoriels au sein d’un schéma global d’aménagement et de développement du territoire, dans un but affiché d’une meilleure cohérence et complémentarité des interventions des différents acteurs publics pour ces domaines. Le CESER observe aussi la politique de concertation large avec l’Etat, les autres collectivités et les chambres consulaires pour l’élaboration de ce schéma. Le caractère prescriptif de ce document de planification est conféré par l’approbation du représentant de l’Etat en région. 56 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Le CESER estime qu’au niveau de l’aménagement du territoire, l’Etat doit conserver et jouer un rôle moteur, en lien avec les collectivités publiques pour assurer une politique partagée et efficiente en matière d’aménagement et de développement durable du territoire régional. B - Les champs des nouvelles compétences LA VOIRIE DÉPARTEMENTALE Eléments de contexte apportés par le projet de loi : L’article 9 du projet de loi confie à la région la gestion de la voirie relevant des départements, ce transfert doit s’opérer au 1ier janvier 2017. Cette situation renforce le rôle structurant de la région en matière d’aménagement du territoire et s’inscrit dans une logique de complémentarité avec les compétences déjà exercées par la région en matière de transport. L’avis du CESER : Le CESER prend acte de ce transfert de compétences qui devrait intervenir en 2017 et s’interroge sur les moyens budgétaires qui vont accompagner la mise en place de ces nouvelles compétences. Le CESER demande expressément aux Pouvoirs publics de porter une attention soutenue à la situation des personnels territoriaux qui sont concernés par ce transfert de compétences, dans le respect de leurs statuts. LES TRANSPORTS SCOLAIRES Eléments de contexte apportés par le projet de loi : L’article 8 confie à la région la responsabilité des transports non urbains routiers, ainsi que l’organisation et le fonctionnement des transports scolaires, à compter du 1ier septembre 2017. Ces nouvelles compétences résultent de l’environnement institutionnel opéré par ce projet de loi qui organise le transfert de nombreux champs de compétences du Conseil général vers d’autres collectivités, dont la région. L’avis du CESER : Le CESER prend acte de ces autres transferts de compétences et s’interroge plus globalement sur les conséquences de la disparition programmée de l’échelon départemental décentralisé, à travers les Conseils généraux. Le CESER souhaite que cette évolution, opérée par la loi, ne génère pas des situations d’absence de proximité sociale auprès des citoyens et d’affaiblissement de cohésion territoriale. 57 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Conclusion Le Conseil régional a saisi le CESER à propos du pouvoir réglementaire d’adaptation régional et de l’éventuelle autonomie normative dont pourraient disposer les collectivités régionales. Cette question s’est trouvée posée en lien avec le projet de loi portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République qui est l’un des principaux textes de l’acte III de la décentralisation. En effet, la question relative au pouvoir réglementaire d’adaptation des régions doit s’analyser à l’aune de l’organisation politique de notre pays, et non pas à travers le prisme réducteur d’un projet de loi en cours de discussion devant le Parlement. La France est un Etat unitaire, caractérisé par l’unicité de son organisation institutionnelle, même si celle ci est décentralisée. A ce titre, la loi et le pouvoir réglementaire national relèvent des prérogatives de puissance publique de l’Etat, qui n’ont pas vocation à être partagées avec les collectivités décentralisées. Cette logique d’Etat unitaire fait qu’on ne peut pas opposer les collectivités territoriales à l’Etat, car elles font partie intégrante de l’organisation institutionnelle et politique de notre pays. Le projet de loi apporte un renforcement du pouvoir réglementaire régional, par la spécialisation de l’exercice des compétences associée à la mise en œuvre de schémas d’orientation et de planification à caractère prescriptif, concernant le développement économique et l’aménagement et le développement durable du territoire. Ce nouvel environnement réglementaire est une source d’opportunités pour la mise en œuvre et l’organisation de politiques territoriales au plus prés des territoires, des acteurs économiques et des administrés. Cependant, le projet de regroupement des régions actuelles1, montre un certain nombre d’interrogations par rapport à l’exercice du pouvoir normatif régional. A cet effet, le phénomène de métropolisation pourrait être source de fractures infrarégionales au sein d’un vaste territoire régional recomposé. Le CESER souhaite que la future région, à travers l’ensemble de ses prérogatives, assure un équilibre entre le fait métropolitain et les territoires en périphérie et anime des solidarités territoriales au sein du périmètre géographique régional. Il ne doit pas y avoir la « France des métropoles » et la « France des périphéries », ce qui consacrerait une concurrence entre territoires infrarégionaux et entre les futures régions. ********** 1 La première lecture pour ce projet de loi portant sur le regroupement des régions propose, notamment, la création d’une nouvelle région : Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes 58 ANNEXES Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » ANNEXES Annexe I : Liste des auditions réalisées Annexe II : Composition du groupe de travail Annexe III : Copie du courrier de la saisine du 18 mars 2014 Annexe IV : Extraits du texte de la Constitution du 4 octobre 1958 Annexe V : Extraits de la loi organique n°2003-704 du 1 ier août 2003 relative à l’expérimentation par les collectivités territoriales Annexe VI : Extraits de la loi n°2002-92 de 22 janvier 2002 re lative à la Corse Annexe VII : Extraits du projet de loi portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République Annexe VIII : Déclarations prononcées en séance plénière 61 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Annexe I : liste des auditions réalisées PERSONNALITES / FONCTIONS – ORGANISMES - Définition des enjeux, organisation et calendrier prévisionnel des DATE DE LA REUNION 19 mai 2014 travaux - Audition de Mme Nadine Poulet - Gibot Leclerc, Maître de conférences en droit public, Université de Limoges - Réunion du groupe de travail : premières réflexions et 19 juin 2014 25 juin 2014 1ier juillet 2014 orientations, propositions d’auditions complémentaires - Audition de M. Robert SAVY, Président du Conseil régional du 9 septembre 2014 Limousin pour la période de 1982 à 2004 - Audition de M. Maurice BORDE, personnalité qualifiée, Directeur Général des Services du Conseil régional du Limousin pour la 12 septembre 2014 période de 2000 à 2013 62 - Réunion du groupe de travail : validation partielle de l’avis - Validation de l’avis 17 septembre 2014 9 octobre 2014 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Annexe II : composition du groupe de travail NOMS PRENOMS ORGANISMES REPRESENTES ALLARD Annick Union Régionale des Associations Familiales (URAF) BARAT Geneviève Personnalité qualifiée BARBAUD-VAURY Patricia FSU BORDE Maurice Personnalité qualifiée BOUZET Maryse Union régionale CFDT BRANDY Jean-Claude Fédérations régionales du Bâtiment et des Travaux Publics BRUNAUD Patrice CCIR du Limousin BRUZAT Arnaud Conseil Régional des Jeunes CAPY Pierre Centre Régional Information Jeunesse (CRIJ) CAQUOT Marie Christine Union régionale CGT-FO CHEZALVIEL Pierre Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles COINAUD Pierre CGPME COSTE Pascal Chambre régionale d’agriculture CROZAT Jean pierre Comité régional CGT DESTEVE Julie Personnalité qualifiée EYROLLE Jaqueline Comité régional CGT FRAISSE Jérôme Chambre Régionale de l’Economie Sociale (CRES) GAY Jean Michel Union régionale CFE-CGC GENDRAUD Marie Antoinette Union Professionnelle Artisanale Régionale (UPAR) GRAND Jean Paul RSI GROLEAU Christian Fédération régionale des chasseurs GOUPY Bernard Chambre régionale d’agriculture GORCE Roger Comité régional CGT HORY Céline Pôles de compétitivité JACOPE Jean Confédération paysanne du Limousin JANOT Philippe Union régionale CGT-FO LAVENT Christian Chambre régionale de métiers et de l’artisanat LEFRERE Gilles Union régionale CGT-FO LEGRAND Anna Comité régional CGT LE MORVAN PERROT Isabelle Organismes de la culture LIMOUSIN Jean-Pierre CCIR du Limousin Président du CESER Limousin LERESTEUX Patrick Union régionale des fédérations d’œuvres laïques LEYRAT Alain Union régionale CFDT MAZERM Cathy Limousin Nature Environnement MERPILLAT Jean Louis Union régionale CGT-FO MONCHAMBERT Stéphane Professions libérales Rapporteur du groupe de travail NEMPON Michel Union régionale CFDT NESTI Jean Louis CCIR du Limousin 63 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » NEXON Solange Chambre régionale de métiers et de l’artisanat PERIE Jean Louis MEDEF POIRSON François Chambre Régionale de l’Economie Sociale (CRES) POUYAUD Michel UNSA PREVOST Martine Professions libérales PRIOLET Jean Claude Union régionale des fédérations de pêche et de protection du milieu aquatique Auvergne-Limousin RAYNAUD Annie Claude Personnalité qualifiée dans le domaine de l’environnement ROCHE Alain UPAR ROZIER Serge Union régionale CGT-FO SABOURDY Marie Annick Chambre Régionale d’Economie Sociale / Mutualité SALAVIALE Véronique Comité régional CGT SARRE Michel Centre régional de la propriété forestière du Limousin et Boislim TERREFOND Michel Comité Régional Olympique et Sportif (CROS) TERRIER Gérard Centre Hospitalier Universitaire de Limoges VAREILLE Jean Claude Enseignement supérieur et de recherche VIROLE Claude CREAHIL Vous trouverez, ci après, à titre d’information la liste des personnalités qui ont participé aux différentes auditions relatives au groupe de travail « La place du Limousin dans la nouvelle organisation territoriale » M. Raymond ARCHER, Président du Groupe UMP et apparentés Groupes politiques du Conseil Régional du Limousin M. Christian AUDOUIN, Président du Groupe Limousin Terre de Gauche M. Marc HORVAT, Président du Groupe Europe Ecologie Les Verts M. Gérard VANDENBROUCKE, Président du Groupe Socialiste M. Gérard BONNET, Président du Conseil Général de la Corrèze Conseils Généraux du Limousin Communautés d’Agglomération M. Jean-Jacques LOZACH, Président du Conseil Général de la Creuse Mme Marie-Françoise PEROL-DUMONT, Présidente du Conseil Général de la Haute-Vienne M. Michel BREUILH, Président de la Communauté d’Agglomération de Tulle M. Frédéric SOULIER, Président de la Communauté d’Agglomération du Bassin de Brive M. Philippe ALLEE, Doyen de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines Université de Limoges Mme Nathalie BERNARDIE-TAHIR, Professeure de Géographie M. Frédéric RICHARD, Directeur de Géolab Limoges 64 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Annexe III : Copie du courrier de la saisine du 18 mars 2014 65 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Annexe IV : Extraits du texte de la Constitution du 4 octobre 1958 PRÉAMBULE ARTICLE PREMIER La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée. La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales. LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE ARTICLE 13 Le Président de la République signe les ordonnances et les décrets délibérés en conseil des ministres. Il nomme aux emplois civils et militaires de l'État. Les conseillers d'État, le grand chancelier de la Légion d'honneur, les ambassadeurs et envoyés extraordinaires, les conseillers maîtres à la Cour des comptes, les préfets, les représentants de l'État dans les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 et en NouvelleCalédonie, les officiers généraux, les recteurs des académies, les directeurs des administrations centrales sont nommés en conseil des ministres. Une loi organique détermine les autres emplois auxquels il est pourvu en conseil des ministres ainsi que les conditions dans lesquelles le pouvoir de nomination du Président de la République peut être par lui délégué pour être exercé en son nom. Une loi organique détermine les emplois ou fonctions, autres que ceux mentionnés au troisième alinéa, pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés. LE GOUVERNEMENT ARTICLE 21 Le Premier ministre dirige l'action du Gouvernement. Il est responsable de la défense nationale. Il assure l'exécution des lois. Sous réserve des dispositions de l'article 13, il exerce le pouvoir réglementaire et nomme aux emplois civils et militaires. 66 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Il peut déléguer certains de ses pouvoirs aux ministres. Il supplée, le cas échéant, le Président de la République dans la présidence des conseils et comités prévus à l'article 15. Il peut, à titre exceptionnel, le suppléer pour la présidence d'un conseil des ministres en vertu d'une délégation expresse et pour un ordre du jour déterminé. DES RAPPORTS ENTRE LE PARLEMENT ET LE GOUVERNEMENT ARTICLE 34 La loi fixe les règles concernant : - les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques ; la liberté, le pluralisme et l'indépendance des médias ; les sujétions imposées par la défense nationale aux citoyens en leur personne et en leurs biens ; - la nationalité, l'état et la capacité des personnes, les régimes matrimoniaux, les successions et libéralités ; - la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ; la procédure pénale ; l'amnistie ; la création de nouveaux ordres de juridiction et le statut des magistrats ; - l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ; le régime d'émission de la monnaie. La loi fixe également les règles concernant : - le régime électoral des assemblées parlementaires, des assemblées locales et des instances représentatives des Français établis hors de France ainsi que les conditions d'exercice des mandats électoraux et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales ; - la création de catégories d'établissements publics ; - les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires de l'État ; - les nationalisations d'entreprises et les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé. La loi détermine les principes fondamentaux : - de l'organisation générale de la défense nationale ; - de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ; - de l'enseignement ; - de la préservation de l'environnement ; - du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales ; - du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale. Les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l'État dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. Des lois de programmation déterminent les objectifs de l'action de l'État. 67 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Les orientations pluriannuelles des finances publiques sont définies par des lois de programmation. Elles s'inscrivent dans l'objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques. Les dispositions du présent article pourront être précisées et complétées par une loi organique. ARTICLE 37 Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire. Les textes de forme législative intervenus en ces matières peuvent être modifiés par décrets pris après avis du Conseil d'État. Ceux de ces textes qui interviendraient après l'entrée en vigueur de la présente Constitution ne pourront être modifiés par décret que si le Conseil constitutionnel a déclaré qu'ils ont un caractère réglementaire en vertu de l'alinéa précédent ARTICLE 37-1 La loi et le règlement peuvent comporter, pour un objet et une durée limités, des dispositions à caractère expérimental DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ARTICLE 72 Les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi, le cas échéant en lieu et place d'une ou de plusieurs collectivités mentionnées au présent alinéa. Les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon. Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences. Dans les conditions prévues par la loi organique, et sauf lorsque sont en cause les conditions essentielles d'exercice d'une liberté publique ou d'un droit constitutionnellement garanti, les collectivités territoriales ou leurs groupements peuvent, lorsque, selon le cas, la loi ou le règlement l'a prévu, déroger, à titre expérimental et pour un objet et une durée limités, aux dispositions législatives ou réglementaires qui régissent l'exercice de leurs compétences. Aucune collectivité territoriale ne peut exercer une tutelle sur une autre. Cependant, lorsque l'exercice d'une compétence nécessite le concours de plusieurs collectivités territoriales, la loi peut autoriser l'une d'entre elles ou un de leurs groupements à organiser les modalités de leur action commune. Dans les collectivités territoriales de la République, le représentant de l'État, représentant de chacun des membres du Gouvernement, a la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois. 68 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » ARTICLE 72-3 La République reconnaît, au sein du peuple français, les populations d'outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d'égalité et de fraternité. La Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Mayotte, Saint Barthélemy, SaintMartin, Saint-Pierre-et-Miquelon, les îles Wallis et Futuna et la Polynésie française sont régis par l'article 73 pour les départements et les régions d'outre-mer, et pour les collectivités territoriales créées en application du dernier alinéa de l'article 73, et par l'article 74 pour les autres collectivités. Le statut de la Nouvelle-Calédonie est régi par le titre XIII. La loi détermine le régime législatif et l'organisation particulière des Terres australes et antarctiques françaises et de Clipperton. ARTICLE 72-4 Aucun changement, pour tout ou partie de l'une des collectivités mentionnées au deuxième alinéa de l'article 72-3, de l'un vers l'autre des régimes prévus par les articles 73 et 74, ne peut intervenir sans que le consentement des électeurs de la collectivité ou de la partie de collectivité intéressée ait été préalablement recueilli dans les conditions prévues à l'alinéa suivant. Ce changement de régime est décidé par une loi organique. Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées au Journal officiel, peut décider de consulter les électeurs d'une collectivité territoriale située outre-mer sur une question relative à son organisation, à ses compétences ou à son régime législatif. Lorsque la consultation porte sur un changement prévu à l'alinéa précédent et est organisée sur proposition du Gouvernement, celui-ci fait, devant chaque assemblée, une déclaration qui est suivie d'un débat. ARTICLE 73 Dans les départements et les régions d'outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit. Ils peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités. Ces adaptations peuvent être décidées par ces collectivités dans les matières où s'exercent leurs compétences et si elles y ont été habilitées, selon le cas, par la loi ou par le règlement. Par dérogation au premier alinéa et pour tenir compte de leurs spécificités, les collectivités régies par le présent article peuvent être habilitées, selon le cas, par la loi ou par le règlement, à fixer elles-mêmes les règles applicables sur leur territoire, dans un nombre limité de matières pouvant relever du domaine de la loi ou du règlement. Ces règles ne peuvent porter sur la nationalité, les droits civiques, les garanties des libertés publiques, l'état et la capacité des personnes, l'organisation de la justice, le droit pénal, la procédure pénale, la politique étrangère, la défense, la sécurité et l'ordre publics, la monnaie, le crédit et les changes, ainsi que le droit électoral. Cette énumération pourra être précisée et complétée par une loi organique. La disposition prévue aux deux précédents alinéas n'est pas applicable au département et à la région de La Réunion. 69 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Les habilitations prévues aux deuxième et troisième alinéas sont décidées, à la demande de la collectivité concernée, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. Elles ne peuvent intervenir lorsque sont en cause les conditions essentielles d'exercice d'une liberté publique ou d'un droit constitutionnellement garanti. La création par la loi d'une collectivité se substituant à un département et une région d'outremer ou l'institution d'une assemblée délibérante unique pour ces deux collectivités ne peut intervenir sans qu'ait été recueilli, selon les formes prévues au second alinéa de l'article 724, le consentement des électeurs inscrits dans le ressort de ces collectivités. ARTICLE 74 Les collectivités d'outre-mer régies par le présent article ont un statut qui tient compte des intérêts propres de chacune d'elles au sein de la République. Ce statut est défini par une loi organique, adoptée après avis de l'assemblée délibérante, qui fixe : - les conditions dans lesquelles les lois et règlements y sont applicables ; - les compétences de cette collectivité ; sous réserve de celles déjà exercées par elle, le transfert de compétences de l'État ne peut porter sur les matières énumérées au quatrième alinéa de l'article 73, précisées et complétées, le cas échéant, par la loi organique ; - les règles d'organisation et de fonctionnement des institutions de la collectivité et le régime électoral de son assemblée délibérante ; - les conditions dans lesquelles ses institutions sont consultées sur les projets et propositions de loi et les projets d'ordonnance ou de décret comportant des dispositions particulières à la collectivité, ainsi que sur la ratification ou l'approbation d'engagements internationaux conclus dans les matières relevant de sa compétence. La loi organique peut également déterminer, pour celles de ces collectivités qui sont dotées de l'autonomie, les conditions dans lesquelles : - le Conseil d'État exerce un contrôle juridictionnel spécifique sur certaines catégories d'actes de l'assemblée délibérante intervenant au titre des compétences qu'elle exerce dans le domaine de la loi ; - l'assemblée délibérante peut modifier une loi promulguée postérieurement à l'entrée en vigueur du statut de la collectivité, lorsque le Conseil constitutionnel, saisi notamment par les autorités de la collectivité, a constaté que la loi était intervenue dans le domaine de compétence de cette collectivité ; - des mesures justifiées par les nécessités locales peuvent être prises par la collectivité en faveur de sa population, en matière d'accès à l'emploi, de droit d'établissement pour l'exercice d'une activité professionnelle ou de protection du patrimoine foncier ; - la collectivité peut participer, sous le contrôle de l'État, à l'exercice des compétences qu'il conserve, dans le respect des garanties accordées sur l'ensemble du territoire national pour l'exercice des libertés publiques. Les autres modalités de l'organisation particulière des collectivités relevant du présent article sont définies et modifiées par la loi après consultation de leur assemblée délibérante. ARTICLE 74-1 70 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Dans les collectivités d'outre-mer visées à l'article 74 et en Nouvelle-Calédonie, le Gouvernement peut, par ordonnances, dans les matières qui demeurent de la compétence de l'État, étendre, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de nature législative en vigueur en métropole ou adapter les dispositions de nature législative en vigueur à l'organisation particulière de la collectivité concernée, sous réserve que la loi n'ait pas expressément exclu, pour les dispositions en cause, le recours à cette procédure. Les ordonnances sont prises en conseil des ministres après avis des assemblées délibérantes intéressées et du Conseil d'État. Elles entrent en vigueur dès leur publication. Elles deviennent caduques en l'absence de ratification par le Parlement dans le délai de dixhuit mois suivant cette publication. ********** 71 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Annexe V : Extraits de la loi organique n°2003-704 du 1ier août 2003 relative à l’expérimentation par les collectivités territoriales Dans le titre unique du livre Ier de la première partie du code général des collectivités territoriales, il est inséré un chapitre III ainsi rédigé : « Chapitre III « Expérimentation » « Art. LO 1113-1. - La loi qui autorise, sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution, les collectivités territoriales à déroger, à titre expérimental aux dispositions législatives régissant l'exercice de leurs compétences, définit l'objet de l'expérimentation ainsi que sa durée, qui ne peut excéder cinq ans, et mentionne les dispositions auxquelles il peut être dérogé. « La loi précise également la nature juridique et les caractéristiques des collectivités territoriales autorisées à participer à l'expérimentation ainsi que, le cas échéant, les cas dans lesquels l'expérimentation peut être entreprise. Elle fixe le délai dans lequel les collectivités territoriales qui remplissent les conditions qu'elle a fixées peuvent demander à participer à l'expérimentation. « Art. LO 1113-2. - Toute collectivité territoriale entrant dans le champ d'application défini par la loi mentionnée à l'article LO 1113-1 peut demander, dans le délai prévu à l'article précédent, par une délibération motivée de son assemblée délibérante, à bénéficier de l'expérimentation mentionnée par cette loi. Sa demande est transmise au représentant de l'Etat qui l'adresse, accompagnée de ses observations, au ministre chargé des collectivités territoriales. Le Gouvernement vérifie que les conditions légales sont remplies et publie, par décret, la liste des collectivités territoriales autorisées à participer à l'expérimentation. « Art. LO 1113-3. - Les actes à caractère général et impersonnel d'une collectivité territoriale portant dérogation aux dispositions législatives mentionnent leur durée de validité. Ils font l'objet, après leur transmission au représentant de l'Etat, d'une publication au Journal officiel de la République française. Leur entrée en vigueur est subordonnée à cette publication. « Art. LO 1113-4. - Le représentant de l'Etat peut assortir un recours dirigé contre un acte pris en application du présent chapitre d'une demande de suspension ; cet acte cesse alors de produire ses effets jusqu'à ce que le tribunal administratif ait statué sur cette demande. Si le tribunal administratif n'a pas statué dans un délai d'un mois suivant sa saisine, l'acte redevient exécutoire. « Art. LO 1113-5. - Avant l'expiration de la durée fixée pour l'expérimentation, le Gouvernement transmet au Parlement, aux fins d'évaluation, un rapport assorti des observations des collectivités territoriales qui ont participé à l'expérimentation. Ce rapport expose les effets des mesures prises par ces collectivités en ce qui concerne notamment le coût et la qualité des services rendus aux usagers, l'organisation des collectivités territoriales et des services de l'Etat ainsi que leurs incidences financières et fiscales. « Chaque année, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport retraçant l'ensemble des propositions d'expérimentation et demandes formulées au titre de l'article LO 1113-2 que lui ont adressées les collectivités, en exposant les suites qui leur ont été réservées. « Art. LO 1113-6. - Avant l'expiration de la durée fixée pour l'expérimentation et au vu de son évaluation, la loi détermine selon le cas : 72 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » « - les conditions de la prolongation ou de la modification de l'expérimentation pour une durée qui ne peut excéder trois ans ; « - le maintien et la généralisation des mesures prises à titre expérimental ; « - l'abandon de l'expérimentation. « Le dépôt d'une proposition ou d'un projet de loi ayant l'un de ces effets proroge cette expérimentation jusqu'à l'adoption définitive de la loi, dans la limite d'un an à compter du terme prévu dans la loi ayant autorisé l'expérimentation. Mention est faite de cette prorogation au Journal officiel de la République française. « En dehors des cas prévus ci-dessus, l'expérimentation ne peut être poursuivie au-delà du terme fixé par la loi qui l'avait organisée. « Art. LO 1113-7. - Le Gouvernement, agissant par voie de décret en Conseil d'Etat, autorise, sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution, les collectivités territoriales à déroger, à titre expérimental, aux dispositions réglementaires régissant l'exercice de leurs compétences. Ce décret contient les précisions mentionnées à l'article LO 1113-1. « Les collectivités territoriales peuvent demander à bénéficier de l'expérimentation prévue par le décret mentionné à l'alinéa qui précède, dans les conditions et selon les procédures définies à l'article LO 1113-2. Les actes d'une collectivité territoriale dérogeant aux dispositions réglementaires sont soumis au régime défini à l'article LO 1113-3 et peuvent faire l'objet d'un recours du représentant de l'Etat dans les conditions exposées à l'article LO 1113-4. Le décret en Conseil d'Etat mentionné au premier alinéa précise les modalités d'évaluation des dispositions prises sur le fondement de l'autorisation. « Le Gouvernement adresse au Parlement un bilan des évaluations auxquelles il est ainsi procédé. « L'expérimentation ne peut être poursuivie au-delà de l'expiration du délai mentionné par le décret en Conseil d'Etat qui l'avait autorisée, si elle n'a fait l'objet, par décret en Conseil d'Etat, de l'une des mesures prévues à l'article LO 1113-6. » ********** 73 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Annexe VI : Extraits de la loi n°2002-92 de 22 janvier 2002 relative à la Corse DE L'ORGANISATION ET DES COMPÉTENCES DE LA COLLECTIVITÉ TERRITORIALE DE CORSE Chapitre Ier : Du régime juridique des actes de l'Assemblée de Corse Article 1 Les articles L. 4424-1 et L. 4424-2 du code général des collectivités territoriales sont remplacés par trois articles L. 4424-1, L. 4424-2 et L. 4424-2-1 ainsi rédigés : « Art. L. 4424-1. - L'Assemblée règle par ses délibérations les affaires de la Corse. Elle contrôle le conseil exécutif. « L'Assemblée vote le budget, arrête le compte administratif, adopte le plan d'aménagement et de développement durable de Corse. « Art. L. 4424-2. - I. - De sa propre initiative ou à la demande du conseil exécutif, ou à celle du Premier ministre, l'Assemblée de Corse peut présenter des propositions tendant à modifier ou à adapter des dispositions réglementaires en vigueur ou en cours d'élaboration concernant les compétences, l'organisation et le fonctionnement de l'ensemble des collectivités territoriales de Corse, ainsi que toutes dispositions réglementaires concernant le développement économique, social et culturel de la Corse. « Les propositions adoptées par l'Assemblée de Corse en application de l'alinéa précédent sont adressées au président du conseil exécutif qui les transmet au Premier ministre et au représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse. « II. - Le pouvoir réglementaire de la collectivité territoriale de Corse s'exerce dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues par la loi. « Sans préjudice des dispositions qui précèdent, dans le respect de l'article 21 de la Constitution, et pour la mise en oeuvre des compétences qui lui sont dévolues en vertu de la partie Législative du présent code, la collectivité territoriale de Corse peut demander à être habilitée par le législateur à fixer des règles adaptées aux spécificités de l'île, sauf lorsqu'est en cause l'exercice d'une liberté individuelle ou d'un droit fondamental. « La demande prévue à l'alinéa précédent est faite par délibération motivée de l'Assemblée de Corse, prise à l'initiative du conseil exécutif ou de l'Assemblée de Corse après rapport de ce conseil. Elle est transmise par le président du conseil exécutif au Premier ministre et au représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse. « III. - De sa propre initiative ou à la demande du conseil exécutif, ou à celle du Premier ministre, l'Assemblée de Corse peut présenter des propositions tendant à modifier ou à adapter des dispositions législatives en vigueur ou en cours d'élaboration concernant les compétences, l'organisation et le fonctionnement de l'ensemble des collectivités territoriales de Corse, ainsi que toutes dispositions législatives concernant le développement économique, social et culturel de la Corse. « Les propositions adoptées par l'Assemblée de Corse en application de l'alinéa précédent sont adressées au président du conseil exécutif qui les transmet au Premier ministre et au représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse. [Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel n° 2001-454 DC du 17 janvier 2002.] « V. - L'Assemblée de Corse est consultée sur les projets et les propositions de loi ou de décret comportant des dispositions spécifiques à la Corse. 74 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » « Elle dispose d'un délai d'un mois pour rendre son avis. Ce délai est réduit à quinze jours en cas d'urgence, sur demande du représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse. Le délai expiré, l'avis est réputé avoir été donné. « Les avis adoptés par l'Assemblée de Corse en application du présent V sont adressés au président du conseil exécutif qui les transmet au Premier ministre et au représentant de l'Etat dans la collectivité territoriale de Corse. Les avis relatifs aux propositions de loi sont transmis par le président du conseil exécutif au Premier ministre ainsi qu'aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat. « VI. - Par accord entre le président de l'Assemblée de Corse et le représentant de l'Etat, celui-ci est entendu par l'Assemblée sur les suites que le Gouvernement entend réserver aux propositions, demandes et avis mentionnés aux I à IV. « Cette communication peut donner lieu à un débat sans vote. « Art. L. 4424-2-1. - Les propositions, demandes et avis adoptés par l'Assemblée de Corse en application des I à IV de l'article L. 4424-2 sont publiés au Journal officiel de la République française. » ********** 75 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Annexe VII : Extraits du projet de loi portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République DES RÉGIONS RENFORCÉES CHAPITRE UNIQUE Le renforcement des responsabilités régionales Article 1er Suppression de la clause de compétence générale et pouvoir règlementaire des régions Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié : 1° Le deuxième alinéa de l'article L. 1111-10 est s upprimé ; 2° L'article L. 4221-1 est ainsi modifié : a) Le premier alinéa est complété par les mots : « dans les domaines de compétences que la loi lui attribue. » ; b) Le deuxième alinéa est supprimé ; c) Au troisième alinéa, après les mots : « de la région » sont ajoutés les mots : « , l'accès au logement, l'amélioration de l'habitat » ; d) Il est complété par trois alinéas ainsi rédigés : « Le pouvoir réglementaire de la région s'exerce dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues par la loi. « Un conseil régional ou, par délibérations concordantes, plusieurs conseils régionaux peuvent présenter des propositions tendant à modifier ou à adapter des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur ou en cours d'élaboration concernant les compétences, l'organisation et le fonctionnement de l'ensemble des régions. « Les propositions adoptées par les conseils régionaux en application de l'alinéa précédent sont transmises par les présidents de conseil régional au Premier ministre et au représentant de l'État dans les régions concernées. » ; 3° L'article L. 4433-1 est ainsi modifié : a) Le premier alinéa est complété par les mots : « dans les domaines de compétence que la loi lui attribue. » ; b) Le deuxième alinéa est supprimé ; c) Au troisième alinéa, après les mots : « de la région » sont ajoutés les mots : « , l'accès au logement, l'amélioration de l'habitat ». d) Il est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Le pouvoir réglementaire de la région s'exerce dans le cadre des compétences qui lui sont dévolues par la loi. » 76 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Article 2 (extraits) Développement économique I. - Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié : 1° Le premier alinéa de l'article L. 1511-1 est rem placé par six alinéas ainsi rédigés : « I. - La région est la collectivité territoriale responsable, sur son territoire, de la définition des orientations en matière de développement économique. « Le schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation définit les orientations en matière d'aide aux entreprises, de soutien à l'internationalisation et d'aides à l'investissement immobilier et à l'innovation des entreprises. Il organise la complémentarité des actions menées, sur le territoire régional, par les collectivités territoriales et leurs groupements en matière d'aide aux entreprises. Il veille à ce que ces aides ne contribuent pas aux délocalisations d'activités économiques au sein de la région ou d'une région limitrophe. « Le schéma fait l'objet d'une concertation au sein de la conférence territoriale de l'action publique mentionnée à l'article L. 1111-9-1 et avec les organismes consulaires. Il est adopté par le conseil régional dans l'année qui suit le renouvellement général des conseils régionaux. « Les orientations en matière d'aide aux entreprises, de soutien à l'internationalisation et d'aides à l'investissement immobilier et à l'innovation des entreprises applicables sur le territoire d'une métropole visée au titre Ier du livre II de la cinquième partie du code ou sur le territoire de la métropole de Lyon sont adoptées conjointement par les instances délibérantes de la métropole concernée et de la région. A défaut d'accord, les orientations adoptées par la métropole concernée prennent en compte le schéma régional. Elles sont adressées à la région dans les six mois qui suivent l'adoption du schéma régional. « Le schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation, y compris ses orientations applicables sur le territoire d'une métropole visée au titre Ier du livre II de la cinquième partie du code ou sur le territoire de la métropole de Lyon, est approuvé par arrêté du représentant de l'Etat. « Les actes des collectivités territoriales et de leurs groupements en matière d'intervention économique sont compatibles avec ce schéma. Les actes des métropoles et de la métropole de Lyon sont compatibles avec les seules orientations du schéma applicables sur leur territoire » ; V. - Le présent article est applicable à compter du 1er janvier 2016. Article 4 (extraits) Tourisme « La région est chargée d'organiser, en qualité de chef de file au sens de l'article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales, les modalités de l'action commune des collectivités territoriales et de leurs groupements dans le domaine du tourisme. « Elle élabore le schéma régional de développement touristique qui fixe les objectifs stratégiques d'aménagement, de développement et de promotion touristiques. Le schéma précise les actions des collectivités, notamment en matière de promotion, d'investissement et d'aménagement touristique du territoire. 77 Conseil Economique, Social et environnemental du Limousin « Décentralisation et pouvoir réglementaire » Article 6 (extraits) Aménagement du Territoire Le chapitre Ier du titre V du livre II de la quatrième partie du code général des collectivités territoriales est remplacé par les dispositions suivantes : Chapitre Ier « Le schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire » « Art. L. 4251-1. - Un schéma est élaboré dans chaque région, à l'exception de la région d'Ile-de-France et, outre-mer, des régions et des collectivités qui exercent les compétences de celles-ci. « Ce schéma constitue le projet d'aménagement et de développement durable du territoire régional. A cet effet, il fixe les orientations stratégiques et les objectifs régionaux à moyen ou long terme en matière d'utilisation de l'espace et dans les domaines du logement, de l'intermodalité des transports, de la maîtrise et de la valorisation de l'énergie, de la lutte contre le changement climatique, de la pollution de l'air, de la prévention et de la gestion des déchets. « Il peut également fixer ces orientations et objectifs dans d'autres domaines contribuant à l'aménagement du territoire lorsque des dispositions législatives attribuent dans ce ou ces domaines une compétence exclusive de planification, de programmation ou d'orientation à la région et que le conseil régional, par la délibération prévue au I de l'article L. 4251-5, décide de l'exercer dans ce cadre. « Dans chacun de ces domaines que doit ou que peut couvrir le schéma, celui-ci tient lieu du document sectoriel de planification, de programmation ou d'orientation correspondant prévu par la loi. « Ces orientations et objectifs sont déterminés en respectant les finalités énumérées par les articles L. 110 et L. 121-1 du code de l'urbanisme. Pour les domaines dans lesquels la loi institue un document sectoriel auquel le schéma se substitue, ils reprennent les éléments essentiels du contenu dudit document tel que défini par la loi. Ils sont présentés dans le rapport général du schéma. « Ce rapport précise les principales modalités de mise en œuvre des orientations et les indicateurs permettant d'apprécier la réalisation des objectifs. ********** REMERCIEMENTS Le CESER Limousin remercie toutes les personnes qui ont contribué à nourrir la réflexion sur ce dossier lors de la tenue des différentes auditions devant le groupe de travail. ********** 78 Annexe VIII : Déclarations prononcées en séance plénière Déclaration de M. Gilles LEFRERE au nom du groupe Force Ouvrière Déclaration du Groupe FORCE OUVRIERE Monsieur le Président, Mes Cher(e)s Collègues, Nous souhaitons une fois encore dire notre désapprobation à l’égard de cette possibilité offerte aux régions d’appliquer la loi républicaine de façon différencié d’une région à l’autre en faisant fi de l’unicité de traitement des citoyens sur l’ensemble du territoire français. On nous rétorquera, en se donnant bonne conscience, que la différence est facteur d’égalité, dès lors que les territoires sont de facto pluriel et fort différend d’une région à l’autre, nous répondrons donc que plutôt qu’agir sur les effets, il vaudrait mieux s’attaquer aux causes sans pour cela détruire une république qui souffre déjà de son incapacité à unifier, à solidariser, à construire une vision commune pour que les citoyens vivent la réalité de l’égalité contenue dans le triptyque de nos édifices publics. On donne ainsi aux pouvoirs locaux la capacité d’édicter leurs propres règles, certes dans un cadre, mais avec le sentiment profond que l’état, la république est trop monolithique pour prétendre unifier un pays qui en a pourtant cruellement besoin. Les fractures existantes dans notre pays ne seront pas réduites par la méthode employée, celle-ci contribuera à accentuer encore les failles déjà profondes qui sillonnes notre société et qui mine la cohésion nationale. Notre pessimisme est grand et nous ne pouvons admettre que la cohésion des politiques publiques, que les péréquations de toutes sortes tant utile à notre territoire ne soient plus considérée comme un facteur de réussite et de développement des solidarités. Nous voterons contre le rapport qui nous à été présenté, non, parce qu’il ne dit pas suffisamment les enjeux, mais parce qu’il les délimite justement trop bien. Je vous remercie. Déclaration de M. Jean pierre CROZAT au nom du Comité Régional CGT LIMOUSIN COMITE REGIONAL CGT LIMOUSIN Maison du Peuple 24, rue Charles Michels B. P. 3907 87039 LIMOGES CEDEX 1 Téléphone : 05.55.79.52.47 – Télécopie : 05.55.33.42.58 E mail : [email protected] Plénière du 4 novembre 2014 Décentralisation et pouvoir réglementaire Monsieur le Président, Cher-e-s Collègues, Mesdames, Messieurs, En l'espace d'un mois l'exécutif régional a saisi 2 fois le CESER, au cours du 1er trimestre 2014, suite aux projets gouvernementaux d'une réforme institutionnelle et de décentralisation qui sont de nature à modifier sensiblement le fonctionnement de l'institution régionale . Un premier rapport de notre assemblée sur la nouvelle organisation territoriale a été établi, et, a validé lors de la plénière du 10/10/2014 le périmètre retenu pour la nouvelle région Aquitaine, Poitou Charentes, Limousin. Aujourd'hui, nous devons émettre un nouvel avis sur la décentralisation et l'évolution du pouvoir réglementaire qui pourrait être dévolu aux régions. Nous voici, en fait, si l'on tient compte du rapport d'étape, au troisième tome d'un dossier qui, selon nous, aurait pu se suffire d'une approche globale et aurait permis d'envisager de manière synthétique les différentes hypothèses et propositions contenues dans ces documents. C'est d'ailleurs ce qu'a fait le CESER d'Aquitaine. Dès lors, le groupe CGT s'est interrogé sur l'intérêt ou non d'intervenir aujourd'hui en raison de la redondance de ces travaux qui, au final, n'apportent guère de perspectives au regard des enjeux réels qui se posent dans le contexte économique et social actuel. En effet, il est difficile, dans ces conditions, de ne pas se répéter tant les tenants et aboutissants de la réflexion sur ces deux rapports sont amenés à se recouper et constituent de fait le même sujet. Ceci a été patent, notamment lors des auditions où des intervenants sont sortis, avec parfois une certaine malice, du cadre qui leur était dévolu pour souligner les limites de l'exercice qui leur était proposé. Au demeurant, nous avons lu avec intérêt le document à l'examen aujourd'hui dont le mérite essentiel est de nous proposer un historique du processus de décentralisation et de ces différentes étapes. A ce titre, nous saluons une fois de plus la forte implication et la qualité des travaux des chargés d'études du CESER. Le document souligne de manière pertinente les obstacles rencontrés au fil des années pour la mise en œuvre d'une délégation aux collectivités territoriales du pouvoir réglementaire qui se heurte de manière quasi systématique aux institutions de la république, en particulier au conseil constitutionnel, mais aussi à l'Europe. Ceci étant, la CGT renouvelle son opposition tant sur la forme que sur le fond à une réforme qui va atteindre de manière significative le quotidien des citoyennes et des citoyens et plus particulièrement de celles et ceux des territoires les plus éloignés d'une métropole qui ne manifeste d'ores et déjà que peu d'intérêt pour le nouveau périmètre qui lui est imposé. L'objectif déclaré du gouvernement est d'adapter notre pays à la compétition européenne et mondiale. La ligne est claire, elle s'inscrit avant tout dans le cadre de la réduction drastique des dépenses publiques avec comme corollaire la dégradation du maillage territorial . Rappelons à cet égard que lors de la présentation du rapport annuel de la Cour des Comptes, son président estimait le 11/02/2014 que deux secteurs pouvaient réaliser d'importantes économies : la sécurité sociale et les finances locales. Dans les faits, F. Hollande répond surtout aux injonctions de la Commission Européenne laquelle exigeait en 2013 « de prendre des mesures destinées à améliorer les synergies et les économies entre les différents niveaux de l'administration, central, régional et local ». Les mesures de rigueur prises par la France en 2014 n'ayant pas satisfait la Commission cette dernière a appelé à fixer un calendrier « clair » pour la réforme territoriale. Réforme précisons le qui ne faisait pas partie des 60 propositions du candidat Hollande pour la présidentielle ! Nous déplorons, dans ces conditions, le passage en force du gouvernement qui s'appuie sur un débat parlementaire accéléré. Nous contestons la logique qui nous est présentée dans le rôle d'affirmation des métropoles qui va mettre en concurrence les quelques territoires dits d'excellence. Mais qui dit territoire d'excellence dit aussi souvent territoire de relégation sociale. Dans cet esprit, n'est-on pas en droit de se demander si dans cette configuration le Limousin ne sera pas le parent pauvre de l'Aquitaine ? Nous dénonçons avec force les fondements d'une démarche d'austérité qui au travers de la réduction de la dépense publique va prélever 11Mds € sur les collectivités locales. Nous notons cependant que le rapport prend la mesure de certains de ces différents aspects. Il pointe les écueils que porte cette réforme pour le Limousin tant en ce qui concerne l'absence de moyens financiers (p47) que les déséquilibres liés à la métropolisation, à l'éloignement des populations des lieux de décision. Il interpelle aussi sur la mise en danger de mesures telles que la gratuité des livres scolaires ou le soutien au tissu associatif (p 54) très important dans notre région. En revanche, il ne propose pas de réflexion sur le rôle de l’État et la remise en cause de la notion de service public qui est en train de se mettre en place au travers notamment des maisons de l’État et des maisons de service au public. Projets de nature à vider le secteur public de ses prérogatives pour transférer au privé des missions assurées à l'origine par la collectivité et ses agents. Nous insistons une fois encore sur l'absence de consultation publique et la nécessité d'une large concertation sociale et citoyenne intégrant un bilan contradictoire des précédentes phases de décentralisation. Le danger dans ces dossiers c'est de vouloir en faire une affaire d'initiés, d'experts, ce à quoi s'emploient certaines forces politiques en concertation avec le Medef. Sur le rapport lui-même nous ne pouvons pas nous satisfaire d'un projet de loi qui permettrait aux conseils régionaux de contourner la loi en s'adressant directement au premier ministre. Ceci dans le plus grand mépris de la représentation nationale dont le Parlement se doit d'être le garant. Retour à un système féodal de baronnies où les décisions se prennent dans l'entre soi et les connivences des sensibilités politiques du moment. Dans ces conditions ne vaudra-t-il pas mieux être conseiller régional que député pour faire la loi ? S'agissant du point sur la clause générale de compétences, la CGT plaide clairement pour son maintien. En effet, elle permet à une collectivité d’intervenir en dehors de ses compétences fixes dès lors que l’intérêt local le justifie. Elle offre la souplesse nécessaire à l’adaptation des services publics aux impératifs de l’intérêt général. Par ailleurs, cette clause confère aux collectivités une véritable dimension politique. Elles ne sont pas réduites au rôle de simple gestionnaire de services publics locaux dans le cadre de compétences strictement énumérées. Enfin, la clause de compétence générale donne tout son sens au principe de libre administration des collectivités territoriales, encadré par son inscription dans le cadre des lois et règlements de la République. Nous notons que le CESER Aquitaine émet également des réserves sur ce point en indiquant page 11 de son rapport sur le même sujet que la suppression de la compétence générale : « présente le risque de cloisonner les porteurs de projets dans des logiques sectorielles (,,,) au moment où on prône une certaine transversalité qui participe d'une approche pluridisciplinaire » Nous ajouterons que ledit CESER Aquitaine nous laisse sans illusion sur l'intérêt qu'il perçoit d'un rapprochement avec le Limousin. Il considère en effet dans sa conclusion que le périmètre géographique des régions n'est pas encore définitivement adopté puisqu'à ce jour ce dernier a connu 3 versions. Il précise en outre que les limites définitives dans lesquelles s'inscriront ses compétences l'obligeront à apprécier la pertinence du redécoupage en lien avec les écosystèmes qui caractériseront le territoire régional (p31). Nos collègues affirment qu'avec ses 250 kms de côte océane l'Aquitaine s'insère sur un axe de développement territorial qui l'associe à Poitou-Charentes notamment dans le cadre de l'économie de la mer. S'agissant du Limousin le document précise que les synergies peuvent sembler moins évidentes hormis les flux économiques que nous avons relevés dans notre précédent rapport ainsi qu' une complémentarité en matière de céramiques techniques et le partage d'un PNR. Mais l 'Aquitaine souligne qu'elle participe à un autre axe de développement particulièrement dynamique avec Midi Pyrénées (Aerospace valley, Agri Sud Ouest, environnement avec la gestion de l'eau et le lien de la chaîne pyrénéenne avec les zones de montagne et leur piémont) et ne souhaite pas être enfermée dans des périmètres géographiques exclusifs notamment en raison de l'importance des coopérations transfrontalières avec l'Espagne (GECT Aquitaine -Euskadi). Pour terminer, le groupe CGT relève une approche plus critique dans ce rapport au regard du précédent qui est à mettre au bénéfice du groupe de travail. Pour autant, la conclusion se positionne clairement dans la continuité de la réforme territoriale proposée, et, constitue de fait un outil pour sa mise en œuvre. Dans ces conditions nous voterons contre ce dossier en cohérence avec notre positionnement sur l'ensemble de cette réforme, et nous invitons l'ensemble des salarié-e-s et la population à se mêler de cette affaire où tout a été fait pour les en écarter. Pour le groupe CGT Jean Pierre Crozat Déclaration de M. Patrick LERESTEUX au nom d’UFOLIM Mr le Président, Madame la représentante du Préfet de région, Mesdames messieurs, chers Collègues La Ligue de l’enseignement et, ici sa représentation régionale, a toujours exprimé son attachement à l’unité républicaine de notre démocratie. Par l’engagement citoyen de ses bénévoles et professionnels, par ses projets et ses actions notre réseau associatif entend participer de cette volonté commune d’un égal accès de tous aux services publics, à la solidarité comme au développement de la richesse régionale. C’est pourquoi, sans chercher à opposer l’intérêt général national à la notion d’intérêt général régional, qu’il conviendrait de d’avantage de reconnaitre, nous tenons à exprimer notre réserve vis à vis de cette perspective d’un pouvoir réglementaire régional permettant « une appréciation diversifiée des lois de la république ». Bien sur, nous entendons, en tant qu’acteur associatif, qu’il y a nécessité d’une réflexion sur la vie démocratique et l ‘expression citoyenne. Mais nous disons notre préoccupation quant au creusement des inégalités dans notre pays et, pour le sujet qui nous concerne, quand au risque de mise en concurrence des collectivités régionales comme des collectivités locales. Une telle orientation législative supposerait, à minima, le renforcement du contrôle citoyen, notamment vis à vis d’un phénomène que chacun peut observer aussi bien au niveau national qu’au niveau européen, je veux parler du lobby puissant des intérêts privés des grandes entreprises transnationales auprès du législateur, phénomène qui pourrait trouver sa déclinaison régionale. C’est pour ces raisons que je m’abstiendrai, une abstention symbolique, indépendamment de la qualité du rapport présenté. P.Leresteux UFOLIM ********** Conseil Économique, Social et Environnemental du Limousin 27, boulevard de la Corderie CS 3116 87031 LIMOGES CEDEX 05.55.45.19.80 [email protected] Retrouvez cette étude et l’ensemble des travaux du CESER Limousin sur www.ceserlimousin.