Numéro 18
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Numéro 18
- Info n°18 ASPCo Octobre 2004 Spécial formation Comité ASPCo Roland Eiselé Président Christine Favre Vice-Présidente Martine Dubosson Trésorière ASSOCIATION SUISSE DE PSYCHOTHERAPIE COGNITIVE (ASPCo) SCHWEIZERISCHER VEREIN FUR KOGNITIVE PSYCHOTHERAPIE (SVKoP) ASSOCIAZIONE SVIZZERA Dl PSICOTERAPIA COGNITIVA (ASPCo) ASSOCIAZIUN SVIZERA DA PSICOTERAPIA COGNITIVA (ASPCo) SWISS ASSOCIATION FOR COGNITIVE PSYCHOTHERAPY (SACoP) LE MOT DU PRÉSIDENT DE LA COMMISSION DE LA FORMATION Chères et Chers Collègues, Pas facile de sortir à peine de l’été et d’être immédiatement ramené à la réalité d’une publication aussi sérieuse et engagée que ASPCo-INFO. Essayons donc d’être à la hauteur … Commission de la formation Prés. Lucio Bizzini Jacqueline Lalive Aubert Roland Eiselé Premier volet de la formation, l’enseignement de base. Nous sommes particulièrement satisfaits de l’évolution de ce programme. En effet, l’année 03-04 a marqué le début de la Formation Continue Universitaire (FCU) née de la collaboration entre le Département de Psychiatrie de la Faculté de Médecine de l’Université de Genève (Prof. F. Ferrero) et l’ASPCo. Cette nouvelle formation remplace donc notre formation de base (FB) dont la dernière volée conclura le cycle de 3 ans en juin 2005. Pour les deux dernières volées de la FB nous avons mis sur pied une passerelle qui permettra, à "nos chères têtes blondes" qui le souhaitent, d’obtenir également le diplôme universitaire, moyennant une année supplémentaire. Nous attendons l’accord de l’Université. Commission de la recherche Prés. Daniel Suter Roland Eiselé Christian Osiek Deuxième volet de la formation, le perfectionnement. Désormais les efforts de la Commission de la Formation de l’ASPCo (CF, composée de J. Lalive Aubert, R. Eiselé et moi-même) vont de plus en plus se concentrer sur le l’enseignement avancé. Roberto Ballerini Peter Bäurle Pierre-Henri Beuret Lusmila Myers-Arrázola Alain Souche Commission de l'information Prés. Eliane Jaquier Roland Eiselé Malin Tronje Pachoud Anna Zinetti Bertschy Roger Zumbrunnen Rédaction ASPCo-Info Anna Zinetti Bertschy Le programme perfectionnement 04-05 est particulièrement alléchant et innovateur. Les membres de la CF ont en effet cherché de nouvelles formules répondant aux exigences d’approfondissement de nos savoirfaire. Deux exemples: Le séminaire de 3 jours autour du thème du stress post-traumatique conduit par l’une des figures marquantes du traitement TCC des PTSD, le Prof. Edna Foa, spécialiste de renommée internationale, qui sera à Genève pour la première fois. Les inscriptions sont désormais closes, le nombre maximum de participants (32) requis par la formatrice a été rapidement atteint. Cela semble indiquer que des ateliers de 3 jours ciblés et donnés par des enseignants reconnus peuvent être envisagés à l’avenir sans trop de crainte. (… suite à la page 2) Comité International Christophe André, Charly Cungi, Gisèle George, Yvan Note, Christine Mirabel-Sarron, Alain Sauteraud, Mark Freeston (… suite de la page 1) ‚ Le retour de nos collègues C. Padesky et K. Mooney se fera sous la forme d’un atelier de 2 jours. Nous pensons que cela nous permettra encore davantage, nous en sommes certains, de profiter de l’extraordinaire capacité didactique des ces collègues, fidèles à la thérapie cognitive beckienne avant tout, mais également très ouvertes aux nouvelles approches cognitives. Dans cet éditorial je n’ai pas l’espace pour citer et promouvoir tous les ateliers du perfectionnement (ils sont 8 en tout, consultez le programme à la page 41 ou sur www.aspco.ch), mais je vous recommande tout particulièrement celui de Dan Stern qui parlera du "Moment présent en psychothérapie". La lecture du livre qui porte le même titre est un vrai bonheur (Odile Jacob, 2003): Il témoigne du parcours d’un psychothérapeute innovateur et créatif, une lecture passionnante qui va à la source même du travail thérapeutique, au-delà des différents modèles. Rappelons ici que D. Stern est membre honoraire de l’ASPCo. Nous avons choisi pour le moment l’option de ne pas exiger un minimum de formation afin de maintenir le statut de membre ordinaire. Ceci ne correspond pas à la philosophie conviviale et surtout de participation active et spontanée préconisée depuis … dix ans déjà. Mais la taille de l’ASPCo grandit d’année en année et nous allons probablement, cette année encore, dépasser les 300 membres. Nous invitons donc nos membres (ordinaires et candidats) a participer assidûment à notre perfectionnement, à nous proposer de nouvelles formules d’ateliers, de nouveaux thèmes, orateurs, etc. Nous aimerions arriver à atteindre un objectif de 2 séminaires par année par membre. Est-ce réaliste? En tout cas, participer à un atelier, outre l’aspect formateur, est un moment privilégié de rencontre et d’échange avec les autres collègues. A bientôt! En attendant, attentifs aux exigences de formation de nos membres, nous avons réalisé une enquête pour sonder vos desiderata de thèmes, invités, dates et endroits concernant les ateliers de perfectionnement. Vous trouverez les résultats dans ce numéro, à la page 42. Le troisième volet de la formation est consacré à la formation des enseignants et superviseurs. L’objectif visé, outre le maintien de cette qualité de la formation ASPCo reconnue par vos appréciations, est celui d’assurer le futur de l’Association. Se pose en effet la nécessité de progressivement rajeunir les rangs des enseignants et superviseurs locaux. Nous invitons donc tous ceux qui aimeraient enseigner ou superviser dans les TCC à se manifester. De notre part, nous avons déjà mis sur pied des séminaires avancés destinés à nos enseignants (ateliers de M. Freeston, atelier de A. Sauteraud). Nous allons également organiser des ateliers de supervision des superviseurs ainsi que renforcer les groupes d’intérêts (utilisation des rêves dans les TCC, enfants, etc..). Un dernier mot enfin pour évoquer le problème du curriculum pour l’obtention du titre de Spécialiste en psychothérapie FSP. Le tableau ci-dessous montre l’écart entre la FB (version FCU) et les exigences du titre FSP. 1. 2. 3. 4. 5. pratique clinique expérience personnelle connaissances / savoir faire supervision activité thérapeutique individuelle stage en clinique d’une année (FB idem FSP) 20h (FB) / 200h (FSP) 384h (FB) / 400 (FSP) 100h (FB) / 200h (FSP) 5 cas et 150h (FB) / 8 cas et 400 h (FSP) On constate que la différence la plus importante se situe au niveau de l’expérience personnelle, de la pratique clinique et de la supervision. Cela me paraît tout à fait logique. En effet, la pratique de la psychothérapie comporte un temps de formation qui peut s’estimer (depuis la fin des études post graduées) à 8–10 ans. Un curriculum organisé par une association ne peut prendre en charge la totalité des exigences: il ne peut qu’indiquer le chemin, mettre à disposition une formation de base solide, favoriser les contacts avec les enseignants et superviseurs, créer des connexions professionnelles. Cela amènera tout naturellement le candidat, dans le cas spécifique, à remplir les exigences de la FSP. Le parcours de l’apprenti thérapeute nécessite un encadrement clinique, théorique, mais surtout des choix personnels et des années de pratique indispensable. Ces dernières années nous avons constaté beaucoup de soucis et d’angoisse chez les collègues qui visent à devenir psychothérapeute. Quelque chose ne fonctionne pas dans le système de contrôle du curriculum. La formation de psychothérapeute ne devrait pas être source principalement (ou presque) d’émotions négatives, mais un parcours surtout dicté par l’esprit de découverte, de curiosité, d’analyse des ses points forts et faibles, du choix du modèle thérapeutique le plus adapté à son propre style relationnel, à ses modes de pensée et à son histoire personnelle. Lorsque mes jeunes (et moins jeunes …) collègues m’ont sollicité pour une supervision, un conseil, ou un travail personnel, j’ai été surtout amené, par rapport au curriculum de formation, à devoir les rassurer, à restructurer leur vision pessimiste de la compréhension de la commission ad hoc de la FSP, à gérer le stress engendré par les doutes quant à une issue favorable à ce cursus (vécu plutôt comme un pensum …). Notre rôle est de veiller à ce que cet état de choses change. C’est un des objectifs prioritaires que la Commission de la Formation s’est donné. Vous aurez bientôt des nouvelles. Au nom de Jacqueline et de Roland, bonne et fructueuse année de formation. Lucio Bizzini Président de la Commission de la Formation Contribution spéciale En cette année de jubilé, et en ouverture de ce numéro consacré à la formation, nous avons le plaisir de publier un article tout à fait original de Béatrice Weber Rouget, psychologue bien connue dans notre association notamment comme enseignante et superviseuse. Elle nous a fait l'amitié de présenter sa première psychothérapie cognitive et de revisiter ensuite avec son regard actuel, à savoir 10 ans plus tard!, son intervention et son évolution personnelle. Un grand merci pour cet effort et pour ce partage. ********** DIX ANS APRÈS … OU LE REGARD DU PSYCHOTHÉRAPEUTE SUR SA TOUTE PREMIÈRE PSYCHOTHÉRAPIE CONDUITE Béatrice WEBER ROUGET psychologue spécialiste en psychothérapie FSP, Membre ordinaire ASPCo Consultation Secteur 2 - Jonction (Hôpitaux Universitaires de Genève, HUG) Bd St-Georges 16-18, 1205 Genève [email protected] La célébration des 10 ans de l’ASPCo cette année me rappelle non seulement que le temps a passé mais également que ma "carrière" professionnelle de psychothérapeute s’est depuis aussi étoffée. L’envie de revenir sur ma toute première prise en charge psychothérapeutique m’a prise, comme un moyen, bien qu’égocentrique je l’admets, de mieux mesurer le chemin parcouru depuis. Cette envie a été d’autant plus réalisable que cette psychothérapie avait à l’époque fait l’objet de la rédaction d’un mémoire pour la formation en thérapie comportementale et cognitive suivie à Lyon (Diplôme universitaire sous la responsabilité du Dr Cottraux), lieu de "pèlerinage" des fervents croyants en cette approche qui ne disposaient alors sur Genève d’aucune possibilité de formation dans ce modèle. La création et l’essor de l’ASPCo a heureusement permis par la suite de remédier à ce manque flagrant. L’article que je propose ici vise à restituer dans les grandes lignes tant les tenants et aboutissants de la psychothérapie menée que les réflexions déclenchées par le rappel de cette expérience passée. ETUDE DE CAS Brève anamnèse Il s’agit d’un homme de 36 ans, d’origine latinoaméricaine, qui réside à Genève depuis 6 mois, grâce à une bourse d’étude lui permettant d’entreprendre une formation de perfectionnement pour diplomates. Depuis son arrivée en Suisse, il s’isole en dehors des cours dans sa chambre ou dans des bibliothèques des organisations internationales pour travailler. Il s’accommode de ce style de vie jusqu’à un incident qui lui a fait perdre le peu de confiance qu’il lui restait et a provoqué une envie quasiirrépressible de tout plaquer pour repartir dans son pays, voire de se suicider. C’est alors qu’il s’adresse au centre de consultation ambulatoire de nos hôpitaux. Au cours d’un premier entretien, cet homme de petite taille, le visage fermé, le regard fuyant et caché par de grosses lunettes de vue, relate cet incident fatidique, la gorge serrée, dans un français parfaitement maîtrisé: Au cours d’un jeu de rôles simulant une interview avec des journalistes, je n’ai pas bien compris la consigne et alors que j’interprétais mon personnage, j’ai aperçu les sourires amusés des autres participants. Réalisant ma bévue, j’ai aussitôt senti l’angoisse et l’envie irrésistible de fuir. J’ai agi comme un débile mental, comme le plus sous-développé du monde. Cet état de panique en situation sociale, M.F. la connaît bien. A l’étranger comme délégué à l’ambassade depuis quelques années, il fait une première attaque de panique en situation sociale. La fuite lui apparaissant comme la seule solution, il monte dans le premier avion le ramenant dans sa famille. Le sens du devoir reprendra toutefois le dessus et il repartira en délégation à l’étranger. Mais dès lors, son attitude reste teintée d’une perte de confiance et d’un sentiment de honte. Par la suite, il ressentira à deux reprises encore cette anxiété incontrôlable, au cours de manifestations officielles qu’il quitte alors précipitamment. Ces expériences traumatisantes retentissent sur son moral, sa confiance en lui et engendrent de nombreux évitements de situations sociales. Une première expérience thérapeutique, menée à cette époque et semblant combiner, aux dires du patient, relaxation et soutien, va lui permettre de rester en poste à l’étranger et de participer à quelques cocktails mais j’avais perdu confiance en moi et remettais en question ma vie et ma profession. Le patient fait remonter à son enfance ses difficultés relationnelles et affirme avoir toujours eu des problèmes d’appartenance à un groupe hormis sa famille qu’il qualifie de très soudée et refermée sur elle-même. Il s’identifie à sa mère, conservatrice et pieuse, qui voit la vie comme une obligation: elle est le centre de la famille autour duquel gravitent ses 5 enfants, son mari et ses propres sœurs. Le père, petit commerçant, est décrit comme ouvert et optimiste. Elève brillant, au bénéfice de plusieurs licences universitaires, M.F. a très tôt misé sur la réussite professionnelle, laissant peu de place aux relations amicales et amoureuses. A son retour au pays, après sa mission comme délégué à l’étranger, il décide de redoubler d’efforts pour ne pas rester dans la petite bureaucratie et s’épanouir sur le plan personnel. La trentaine passée, il aménage alors dans un petit studio mais mange encore tous les soirs chez ses parents et y passe les week-ends. Parallèlement, il entretient depuis plusieurs années une relation sentimentale peu satisfaisante avec une femme elle aussi très réservée et de 10 ans son aînée. Cette existence bien tranquille est interrompue par son départ pour Genève. Analyse fonctionnelle Je me contenterai de restituer ici la partie synchronique de la grille SECCA. Situation: nous parvenons difficilement à préciser les situations anxiogènes, tant les évitements et la réduction du champ d’expérience, rétrécissent son niveau de prise de conscience du problème. Il se sent mal à l’aise dans de nombreuses circonstances, en groupe ou à deux, qu’il doive donner une image et remplir un rôle conforme à son statut diplomatique ou qu’il se trouve dans un contexte relationnel plus informel, sans tâche précise à résoudre ou fonction à assumer. Il redoute alors que ses interlocuteurs engagent la conversation sur des thèmes qu’il ne maîtrise pas et n’ose pas exprimer des choses personnelles en dehors de son contexte familial. Emotion: il décrit une anxiété intense accompagnée de symptômes variés, allant jusqu’à l’envie de vomir, des sensations d’évanouissement et de déréalisation. Sa thymie dépressive, comprend tristesse, frustration et sentiment d’impuissance. Cognition: les monologues intérieurs tournent autour d’idées de catastrophe sociale (anticipations anxieuses de type Je vais me comporter de manière ridicule, Ils verront que je suis incompétent, Ma réputation sera faite, Je perdrai mon travail et finirai ma vie au crochet de mes parents) et d’incompétence (Je suis nul, Je suis le plus débile mental du monde, Je ne suis pas à la hauteur pour ce métier). Le patient établit spontanément des liens entre ses cognitions et son choix précoce et valorisé par sa famille de tout axer sur les études et la perfection (A trop vouloir être un penseur parfait, je suis devenu un handicapé de la relation). Il incrimine aussi son caractère timide conjugué à un complexe d’infériorité, ainsi que sa famille surprotectrice et refermée sur ellemême. Finalement, il mentionne une première expérience d’abandon des études par peur d’échouer aux examens qui aurait aussi contribué à renforcer son sentiment d’incompétence et ses comportements d’évitement. Comportement: avec beaucoup d’effort, il parvient parfois à dépasser ses conduites d’évitement et de retrait. Il surinvestit les activités intellectuelles, solitaires. Dans son pays, il se contente d’une vie bien rangée, entre son travail et sa famille, ponctuée par des rares sorties. Des attitudes passives et de dépendance (notamment à sa famille) le caractérisent. Anticipation: le contact avec autrui (ou la perspective d’un tel contact à venir) provoque des sensations intenses et incontrôlables, aggravées par la crainte que l’autre puisse s’en apercevoir et découvrir son incompétence. L’autre est là pour le juger et avoir des attentes qu’il ne parviendra pas à satisfaire. Et la déchéance sur le plan social s’ensuivra inéluctablement. au pays, il nous est impossible de lui proposer un traitement de groupe malgré les avantages de cette modalité de traitement. Dans ce contexte, nous planifions d’emblée le nombre de séances et insistons sur la nécessité de participation active, notamment sous forme d’auto observation et de réalisation des tâches à domicile. Hypothèses et contrat thérapeutique A l’issue de 4 entretiens hebdomadaires d’investigation initiale (anamnèse, analyse fonctionnelle, psychométrie, explication de l’approche cognitive-comportementale et contrat thérapeutique), nous examinons ensemble quelle conceptualisation du problème nous pouvons formuler. Spontanément, le patient trace des liens entre sa recherche de perfection, conjuguée à son manque de confiance en lui et sa perception de l’autre comme source de critiques et d’attentes importantes, et son anxiété dans les situations sociales. Celle-ci, avec les nombreux évitements qu’elle entraîne, conforte son sentiment initial d’incompétence et d’échec. Dans cette compréhension partagée de ses difficultés, la dépression, présente bien que pas trop invalidante, apparaît comme secondaire à l’anxiété sociale qui est alors prise comme problème-cible sur lequel travailler au cours des séances. D’emblée, la thérapie dans son intégralité a été conditionnée par la demande principale du patient, à savoir terminer cette année d’étude entamée à Genève et la réalité temporelle de son retour au pays dans 6 mois. Nous distinguons ainsi le problème immédiat et ponctuel lié à son séjour en Suisse et une problématique plus large concernant son mode de vie en général et les changements auxquels il aspire: meilleur équilibre entre activités professionnelles et de loisirs, se comporter de manière plus active et indépendante, fonder une famille… L’importance de sa persévérance dans la confrontation aux situations redoutées malgré le malaise généré est soulignée grâce à l’explication faite au patient du principe théorique d’exposition auquel il adhère parfaitement. Acceptant de jouer le jeu, il se dit prêt à ne parvenir que progressivement à maîtriser son anxiété à l’aide de cette technique, et ceci d’autant plus que dans un premier temps, un traitement pharmacologique (Xanax) a été instauré. La demande du patient est cependant d’en réduire progressivement la dose. Compte tenu de la disponibilité limitée de M.F. en dehors de ses cours et de son proche retour Plusieurs méthodes seront adoptées au cours du traitement, de manière plus ponctuelle ou durable. Le patient ayant pu bénéficier antérieurement de la relaxation et se montrant disposé à reprendre ce type de pratique, nous introduisons cette technique notamment avec l’idée de pouvoir effectuer une désensibilisation systématique. Celle-ci visera dans un premier temps à travailler en imagination et de manière graduelle des situations anxiogènes pas forcément affrontées ou difficiles à reproduire dans le contexte quotidien ou de la séance, pour permettre secondairement la généralisation de chaque étape de la désensibilisation à la vie réelle, avec une meilleure maîtrise de l’anxiété. L’exposition in vivo se justifie quant à elle par le désir du patient de faire face à ses obligations dans le cadre de ses études à Genève et par l’impossibilité d’aborder graduellement ou en imagination certaines situations anxiogènes avant qu’elles ne se produisent. Parfois, l’immersion s’imposait alors par elle-même. Au-delà de la restructuration cognitive obtenue indirectement au travers des expositions, des techniques cognitives ont été adoptées à différents moments de la thérapie pour aborder plus directement le système de croyance du patient, mieux identifier ses pensées automatiques pour ensuite les remettre en question ou en extraire les thèmes sous-jacents de danger et de perfection dans le but de les relativiser. Enfin, le recours à des techniques d’affirmation de soi a aussi été choisi pour développer un système de croyance plus assertif et améliorer des compétences sociales et de communication pour certaines limitées (telles de formuler une demande, entretenir une conversation, exprimer des sentiments). Au cours de la phase pré-thérapeutique, le patient évaluait quotidiennement ses phobies, ses attaques de paniques spontanées et son anxiété diffuse. Puis, à 3 reprises (début, milieu et fin de traitement), il a complété l’auto évaluation des phobies, l’inventaire de dépression (Beck 21), de même qu’une échelle d’affirmation de soi (Rathus). L’échelle d’évaluation des phobies, panique et anxiété diffuse était encore remplie chaque semaine du traitement. Déroulement de la thérapie La thérapie proprement dite se déroulera sur 21 séances, à un rythme hebdomadaire. J’en présente les lignes générales et ai choisi de grouper les séances en fonction des techniques cognitivo-comportementales qui y étaient plus particulièrement adoptées. Séances 1 à 7 Très tôt, nous instaurons l’apprentissage de la relaxation afin de permettre au patient de mieux gérer son anxiété et de débuter assez rapidement la désensibilisation systématique. Il faudra plusieurs séances et la pratique à domicile aidée par une cassette pour obtenir un niveau satisfaisant de relaxation. Conjointement, le travail d’auto observation est encouragé. Le patient consignera ses observations dans un petit carnet qui le suivra tout au cours du traitement et permettra notamment de constater les progrès effectués au niveau de sa prise de conscience. Pour la désensibilisation systématique, après avoir établi la hiérarchie des situations, en isolant 14 items allant du plus facile (assister seul à un spectacle) au plus anxiogène (faire un exposé devant un groupe de personnes inconnues), nous commençons à présenter les items les moins chargés d’anxiété dès la 3ème séance de thérapie. Il faudra 5 séances, au rythme de 2 à 3 items par entretien, pour parvenir au bout de la hiérarchie. En parallèle à cette désensibilisation, et en fonction des réalités quotidiennes du patient, nous discutons des situations anxiogènes qu’il sera amené à affronter. Nous abordons alors ses anticipations anxieuses (peur de ne pas tenir le coup, de se comporter de manière ridicule et être la risée de tout le monde, …). En évitant de le rassurer, nous encourageons l’exposition à la situation redoutée notamment comme une occasion d’auto observation et de cotation du niveau d’anxiété. Ces séances initiales vont également permettre d’affiner sa compréhension du problème, avec explication du processus simplifié ainsi: Activation du schéma d’anticipation? émotions/sensations? Fuite ou évitement? Renforcement du sentiment d’incompétence et d’échec. Peu à peu, le patient ne considère plus son problème comme un amalgame de choses inextricables mais comme une suite logique sur laquelle il peut agir à plusieurs étapes du cercle vicieux pour en modifier l’automatisme. Ce nouveau sens de contrôle lui permet d’entreprendre dès la 3ème séance de traitement une lente diminution des anxiolytiques. Les tâches à domicile, outre l’exposition aux situations sociales le plus souvent en rapport direct avec les items de la hiérarchie déjà travaillés, consisteront le plus souvent à instaurer des activités plaisantes (assister à une soirée tropicale, à une pièce de théâtre, ...). Nous tirerons profit des opportunités qui se présentent spontanément dans son quotidien et notamment de l’existence d’un co-locataire avec lequel il va pouvoir mettre en pratique des scènes travaillées (manger sous le regard d’autrui, engager et maintenir une conversation informelle, …). Séances 8 à 10 Un nouvel incident (un étudiant lui pose une question sur son exposé à laquelle il ne peut répondre) va être l’occasion d’introduire le modèle explicatif des attaques de panique et la technique du contrôle respiratoire, le patient ne parvenant pas comprendre la survenue de sensations physiologiques extrêmement gênantes (vertiges, …) lors d’anxiété. Il y adhère aussitôt. Conjointement, nous entamons un travail de restructuration cognitive dans le but de mieux identifier ses pensées automatiques relatives à des schémas de danger social et d’incompétence (Je suis le plus débile mental du monde, Je ne serai jamais à la hauteur des attentes de mon pays, Ils vont voir que je suis nul). Nous parvenons à mettre le doigt sur certaines croyances de type Si je ne suis pas toujours parfait dans tout alors je ne vaux rien, Il faut à tout prix éviter les contacts sociaux car ils n’amènent que des malheurs. Nous l’encourageons à développer des pensées alternatives, tant par rapport à l’incident récent survenu que par rapport à d’anciennes situations consignées dans son carnet d’auto observation. La validité, en terme d’avantages et inconvénients à court et à long-terme, des règles de fonctionnement identifiées, est discutée afin de les relativiser. Le patient éprouve beaucoup de plaisir à jongler avec les idées, les hypothèses alternatives et, lui rappelant son penchant tout particulier pour les activités intellectuelles, nous insistons sur la nécessité du testing dans la réalité avec notamment la désobéissance à certaines règles et le constat des incidences sociales réelles. Hormis la pratique régulière à domicile, en dehors des situations d’exposition, de la relaxation en vue de pallier au retrait toujours en cours des anxiolytiques, nous proposons aussi d’effectuer des autoobservations axées sur ses difficultés de communication et d’affirmation de soi, dans la perspective de débuter un mini-travail d’assertivité. Séances 11 à 19 Depuis une semaine, le traitement pharmacologique a été définitivement interrompu, sans le moindre regain d’anxiété: ceci constitue pour M.F. un signe positif en faveur d’un plus grand sentiment d’efficacité personnelle. C’est dans cet esprit que se déroulent les séances suivantes, axées principalement sur l’affirmation de soi et la restructuration cognitive. Nous discutons des raisons pour lesquelles nous nous comportons de manière affirmée ou non. Le patient pense que le fonctionnement sur-protecteur et fermé de sa famille a limité les occasions d’apprentissage, et que les modèles d’imitation à sa disposition n’étaient pas propices au développement de l’assertivité. Par ailleurs, la construction de croyances particulières liées à la méfiance, la politesse et la retenue a aussi été favorisé. Divers jeux de rôles permettant de mettre en scène des situations décrites comme difficiles par le patient (engager une conversation, exprimer des demandes et des refus, exprimer et répondre à des critiques) seront réalisés en cours de ces séances. Nous aurons alors recours à l’enregistrement vidéo pour filmer ces scènes et bénéficier de la vidéo confrontation. Ces enregistrements sont l’occasion d’améliorer les aspects verbaux et non verbaux de la communication mais aussi et surtout de travailler les anticipations anxieuses du patient (p.ex. Peur que la conversation dévie sur un sujet qu’il ne maîtrise pas) et son souci de la perfection (p.ex. Devoir toujours tout connaître sur tout et s’exprimer avec les termes exacts). Son regard auto-critique et son perfectionnisme sont aussi mis en évidence lors du feed-back vidéo, le patient apprenant peu à peu à s’habituer à son image et à devenir plus clément envers lui-même. Nous relevons toutefois l’aspect général très formel et protocolaire de ses attitudes et encourageons une plus grande spontanéité. Parallèlement, le patient expérimente les acquis dans la réalité lorsque des situations se présentent. Lorsque nous lui suggérons de provoquer des opportunités de s’exposer et d’expérimenter des nouvelles attitudes, nous nous heurtons à sa passivité et son évitement, encore bien manifestes avec des Si l’occasion se présente alors je…. Nous examinons les conséquences d’une telle attitude et il conclut: Ca va être dur mais vous faites bien de me pousser, à mon retour au pays, je devrai me pousser tout seul. Les derniers jeux de rôles joués montrent que le patient reste maladroit et peu spontané bien qu’ayant gagné une certaine assurance, notamment dans les conversations. Lors de ce travail d’affirmation de soi, nous nous montrons particulièrement attentifs à ne pas renforcer le perfectionnisme du patient, en travaillant l’acceptation de compétences pas toujours optimales. Nous discutons de ses acquis, de la nécessité de poursuivre la mise en pratique régulière et du chemin qu’il reste à faire. Il ajoute: Je ne peux pas passer de l’handicapé de la relation au parfait communicateur, et est-ce le but, ce qui semble être à la fois une belle preuve de sa pensée en tout ou rien et d’un début de relativisation de ses postulats perfectionnistes. Séances 20 et 21 Lors de ces 2 séances de bilan de fin de thérapie, nous passons en revue les acquis et les techniques principales utilisées pour améliorer son sentiment d’efficacité personnelle, relativiser certaines règles rigides de fonctionnement, ainsi que modifier son appréhension et évitement des situations sociales. En perspective de son retour au pays, nous abordons les problèmes résiduels et la nécessité de ne pas abandonner les efforts (seul ou accompagné d’un thérapeute) sous prétexte qu’il se retrouve dans un milieu connu et sécurisant. Il relève les désavantages de la passivité et du perfectionnisme: Pour évoluer tant sur le plan professionnel que privé, je dois me bouger, j’ai enfin réalisé qu’à trop vouloir la perfection, j’ai sacrifié le bon. En dépit de l’approche des examens finaux, il se dit relativement détendu et content: Avec votre aide, j’ai pu terminer l’année et cette thérapie est devenue aussi importante pour moi que la réussite de la formation. Un cadeau (terrine de fleurs) qu’il nous offre non sans maladresse vient appuyer ses paroles de reconnaissance: Je suis emprunté mais n’aurais jamais pu offrir de fleurs il y a 6 mois. Nous esquissons tous deux un sourire d’amusement, de connivence et d’encouragement. Résultats et conclusions de l’époque Pour des motifs temporels, le patient étant amené à retourner dans son pays, des rencontres post-thérapeutiques de relance traditionnellement intégrées au traitement n’ont pu avoir lieu, ce qui limite l’interprétation à long-terme de l’effet thérapeutique. Les scores obtenus aux différentes échelles de mesure lors de l’évaluation de début, milieu et fin de traitement, indiquent une amélioration de la symptomatologie tant dépressive (BDI respectivement de 17, 8 et 5) qu’anxieuse au cours de la thérapie. L’auto évaluation des phobies parle en faveur d’une diminution des scores phobiques (agoraphobie: 6, 3 et 3; sang et blessure: 18, 11 et 7; phobie sociale: 22, 15 et 10), des éléments anxieux et dépressifs (score total passant de 29 à 15 puis à 9), de même que du degré de gêne liée au comportement phobique (8, 4 et 3). Pour résumer la fiche d’auto évaluation quotidienne des phobies, panique spontanée et anxiété diffuse, après une légère augmentation des scores lors des 15 jours précédant le démarrage à proprement parler du traitement, elle suit une courbe descendante ponctuée de quelques pics, mais plus d’attaque de panique franche, souvent imputables à des événements extérieurs stressants. Pour revenir sur la légère augmentation des scores à ce dernier instrument pendant la période préthérapeutique d’investigation, elle semble, sur la base des explications fournies par le patient, être imputable à un biais de désirabilité sociale combiné à une prise de conscience alors limitée de l’ampleur des troubles par le patient en raison de ses nombreux évitements. Le même phénomène s’observe au Rathus (total de -13, -22 et -10 respectivement pour les 3 évaluations), les scores indiquant en milieu de traitement une réduction de l’assertivité, alors que cliniquement le patient se débrouille mieux. L’amendement progressif de la dépression, sans qu’aucune technique n’ait été directement appliquée à cette symptomatologie, nous conforte dans notre hypothèse de départ, voyant la dépression comme secondaire au problème cible de l’anxiété sociale. Pour ce qui est des objectifs thérapeutiques, en ce qui concerne la demande immédiate et ponctuelle du patient, la partie est gagnée puisqu’il a pu clore la formation entreprise. La baisse progressive de la pharmacothérapie, jusqu’à l’arrêt en milieu de traitement, sans recrudescence de la symptomatologie anxieuse, constitue également un élément positif quant aux bénéfices tirés par le patient du travail thérapeutique entrepris. Par rapport à un objectif de vie plus large, le laps de temps imparti au traitement était trop limité pour modifier de manière conséquente des habitudes et croyances de base présentes depuis de longues années. Toutefois, cette thérapie a probablement donné une impulsion, en favorisant de nouvelles réflexions, l’acquisition de stratégies de coping plus efficaces et surtout l’expérience d’une relation thérapeutique positive. Le patient est reparti dans son pays, muni que quelques pistes pour poursuivre le travail entrepris. LE REGARD DU PSYCHOTHÉRAPEUTE 10 ANS PLUS TARD Dix ans plus tard, la psychothérapeute que je suis devenue porte un regard tour à tour curieux, critique et clément sur la prise en charge de son premier patient. Je vais à présent tâcher de vous restituer l’essentiel de ce regard, en mettant de l’ordre dans les impressions survenues à l’évocation de cette expérience. Tout d’abord, je considère que ce patient a joué un rôle assez déterminant, me permettant d’effectuer une toute première expérience thérapeutique positive, dans un contexte motivant et sécurisant. Je réalise notamment à quel point la pathologie présentée a suscité et suscite encore chez moi un vif intérêt et une curiosité constante qui se manifestent notamment par la lecture d’articles divers s’y rapportant. C’est donc avec un certain enthousiasme (Padesky & al, 1995, parlent de Therapist’s straightforward curiosity about the client’s experiences, thoughts and feelings, p 6) pour la pathologie présentée que j’ai pu m’engager dans ce premier suivi, ce qui a certainement contribué à l’évolution favorable du traitement et à la qualité de la relation qui s’est très vite installée entre le patient et moimême. Ensuite, le style personnel du patient, dépendant, "obéissant", collaborant, a rendu la démarche plus facile, évitant que j’aie à me confronter à des "opérations de sécurité" (Safran & al, 1990), "styles motivationnels" ou "organisations cognitives" (termes chers aux constructivistes, pour une synthèse en français de cette approche voir numéro spécial sur les thérapies constructivistes de la Revue Francophone de Clinique Comportementale et Cognitive, 4(3), 1999) trop déstabilisants pour un thérapeute novice. Il aurait été difficile, pour la clinicienne débutante que j’étais, de faire face à un patient par exemple extrêmement narcissique, peu collaborant ou manipulateur. De plus, la structure dans laquelle j’exerçais, au sein d’une équipe de pluri-professionnels qualifiés et la confiance qui m’était témoignée par les responsables médicaux m’ayant adressé le patient (je remercie au passage ici plus particulièrement les Dr Jacqueline LaliveAubert et Roland Eiselé) m’assuraient le cadre contenant, la "base suffisamment sécure" pour m’aventurer dans cette expérience nouvelle et passionnante. Revenons à présent sur quelques points évoqués plus haut. Traitements et instruments spécifiques de la phobie sociale En ce qui concerne la prise en charge de la phobie sociale, ayant entre temps eu l’occasion de croiser le modèle de Clark (1997) et la selffocused exposure therapy (brièvement exposée dans l‘ASPCo-Info n°10), j’aurais rapidement tendance à penser qu’aujourd’hui, je traiterais ce patient autrement, de manière plus focalisée et spécialisée sur le trouble anxieux présenté. Rappelons qu’à l’époque, l’affirmation de soi en setting de groupe, était préconisée pour cette pathologie en particulier. Mais à cette date déjà, j’avais des difficultés à réduire la phobie sociale à un "déficit" de compétences, à un manque de savoir faire, préférant alors voir la problématique en terme d’"inhibition", "de blocage" (André, 2001a et b), le traitement visant alors plutôt à amener le patient à "oser faire". Reprenant les mots de Sénèque cité par André & al (1995), Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas les faire. C’est parce que nous n’osons pas les faire qu’elles sont difficiles. A ce propos, les scores du patient au Rathus, bien que le situant du côté passif et évitant, n’étaient toutefois pas extrêmes et ne permettaient selon moi pas de rendre compte de l’ampleur de l’anxiété et des évitements chez ce patient. Pour cette raison, le recours à l’exposition et l’usage de la vidéo m’étaient parus importants, surtout pour confronter le patient, l’habituer à des situations autrement évitées et à son image. Avec les années, je pense toutefois avoir gagné en assurance, en créativité, en humour, et je me montrerai probablement moins frileuse et plus confiante dans les ressources des patients, en favorisant d’emblée et au maximum les expositions in vivo (en séance et en dehors des séances), comme David Clark et Christophe André savent si bien le faire. Un autre changement concernant une plus grande spécificité pour la phobie sociale se rapporte aux choix d’instruments psychométriques, dans la mesure où j’aurais recours actuellement à d’autres échelles, notamment la Liebowitz (Yao & al, 1999) et l’échelle d’estime de soi sociale (Bouvard, 1999), auxquelles je rajouterais probablement un instrument d’évaluation du fonctionnement social, tel que l’échelle de Sheehan (Sheehan Disability scale, Sheehan & al, 1996) ou le Questionnaire de fonctionnement social (Zanello & al, 2003), souvent fortement perturbé chez les phobiques sociaux (Sheehan & al, 1996; Montgomery, 1996). Une telle évaluation, qui ne reposerait pas uniquement sur la mesure des symptômes mais qui prendrait aussi en considération d’autres aspects importants (le fonctionnement social, la qualité de vie, …), serait plus compatible avec la littérature actuelle (Tharwani & al, 2001; Placchi, 1997; Maercker & al, 2002) qui recommande d’apprécier l’impact des symptômes sur le quotidien et sur la satisfaction du patient, de même que de mesurer l’effet d’un traitement sur ce type de variables et pas seulement sur l’amélioration symptomatique. Compétence thérapeutique En abordant cette question de la technique spécifique à laquelle recourir, je fais inévitablement aussi référence à la compétence du thérapeute, à sa maîtrise d’outils propres à son orientation thérapeutique. La compétence du thérapeute à délivrer une méthode spécifique de traitement a d’ailleurs donné lieu en thérapie cognitive au développement d’un instrument de mesure connu s’y rapportant (Cognitive Therapy Scale de Young & Beck), dans un contexte de prise de conscience grandissante de l’importance des caractéristiques et des compétences du thérapeute sur l’issue de la thérapie. Comme le rappellent Padesky & al (1995), citant notamment Thase (1994) et Derubeis & al (1990), les meilleurs résultats thérapeutiques semblent être obtenus par des thérapeutes compétents manifestant une adhésion fidèle aux protocoles de traitement de thérapie cognitive. Dans le cas notamment de troubles névrotiques (Kingdon & al, 1996, cités par Davidson & al, 2004) et de la schizophrénie (Scott & al, 2001, cités par Davidson & al, 2004), le degré d’adhésion du thérapeute à un modèle thérapeutique particulier, de même que ses compétences, semblent avoir une influence positive à long-terme sur les résultats cliniques. Pour rendre compte de la compétence du thérapeute, ses années de formation et de pratique, ou en d’autres termes son degré d’expertise, sont souvent invoqués. Une étude récente, conduite dans le cadre d’un traitement bref structuré, montre toutefois que les compétences du thérapeute ne reposent pas forcément sur des caractéristiques personnelles telles que la qualification professionnelle (psychothérapeute hautement entraîné), l’âge ou le genre (Davidson & al, 2004). Il semblerait néanmoins que le modèle thérapeutique et le degré d’expertise du thérapeute dans l’application des techniques thérapeutiques spécifiques permettaient de rendre compte d’une proportion non négligeable de la variance expliquée dans le résultat thérapeutique, et ceci notamment lors de cas plus difficiles à traiter (Crits Christoph & al, 1991, cités par Davidson & al, 2004). Dans le cadre de la recherche sur l’efficacité des thérapies notamment cognitives, le développement grandissant de manuel de traitement (p.ex Padesky et al 1995) fournissant des explications détaillées et conseils précieux pour enseigner ces compétences et ainsi maximiser l’amélioration clinique des patients, devrait contribuer à limiter la variabilité liée au thérapeute. Du point de vue strictement clinique, l’existence de tels protocoles permet de rassurer et d’orienter le thérapeute, surtout lors des premières prises en charge. Comme le rappellent Padesky & al (1995), bien des thérapeutes cognitivistes débutants se montrent pressés d’avancer et passent alors trop rapidement sur le processus d’enseigner aux patients les compétences fondamentales considérées dans les études d’efficacité comme liées à un meilleur résultat thérapeutique et une réduction des risques de rechutes. Une autre étude (Milne & al, 1999) évaluant des différences entre des thérapeutes cognitivistes novices ou plus experts, s’est intéressée au contenu sur lequel les thérapeutes font porter leur travail, ou plus précisément l’importance qu’ils accordent respectivement à du matériel intrapersonnel (monde interne avec les pensées, les schémas) ou plus environnemental (contexte et support social, facteurs de stress, voire même la culture et l’idéologie du milieu dont est issu le patient) pour rendre compte des difficultés présentées et tenter d’exercer une influence dessus lors du traitement. Ils concluent que les thérapeutes cognitivistes débutants ont plus tendance à sous-estimer ces aspects environnementaux que les thérapeutes plus confirmés qui, bien que continuant à adhérer le mieux possible au protocole de traitement, sont plus susceptibles de flexibilité et donc d’utiliser leur "flair" pour une pratique clinique plus efficace, qui les conduirait lorsque nécessaire à s’éloigner des aspects formels du traitement cognitif pour englober aussi une perspective plus environnementale. Alliance thérapeutique Au-delà de la question de savoir à quelle technique thérapeutique spécifique avoir recours, n’oublions pas que la psychothérapie ne se résume pas à l’usage et la maîtrise d’outils, aussi efficaces soient-ils. La relation ou alliance thérapeutique est également considérée comme un facteur majeur de réussite de traitement. Cette alliance thérapeutique, considérée parmi les facteurs communs aux diverses approches thérapeutiques, peut être définie selon Mahoney (p 10, 1999) comme une relation de travail faite de confiance, de respect mutuel et d’attention, qui représente le véhicule central du changement. Du fait que cette alliance repose sur la contribution de 2 partenaires, il est important, bien que difficile, de distinguer ce qui est attribuable respectivement à l’un ou l’autre des protagonistes (Trepka & al, 2004). Construction de l’identité A ce propos, pour revenir à la thérapie avec M.F. il serait intéressant de pouvoir identifier ce qui me caractérisait dans cette dyade particulière, de ce qui était ma signature personnelle (pattern) de l’époque avec d’autres patients (à un niveau synchronique) et enfin ce qui serait resté de manière stable dans mes relations aux autres, et notamment mes patients aujourd’hui (plus diachronique). La référence ici encore à des notions constructivistes me paraît pertinente. Tout d’abord, l’idée que le thérapeute et son client sont des systèmes complexes qui se construisent et se développent eux-mêmes dans le cadre de leurs interactions mutuelles, et de leurs relations avec leurs contextes de vie et avec d’autres systèmes (Mahoney, p 10, 1999). Par ailleurs, l’identité n’est plus construite en dehors des relations et les relations ne peuvent se réduire à des rencontres entre des identités bien établies. Au contraire, chaque relation va modifier l’identité de chacun des partenaires (Gergen & Kaye, 1997, cités par Dodet, p 44, 1999). Bien que je doive alors concevoir la construction de mon identité comme influencée par chacune des rencontres humaines que j’ai pu faire, et notamment avec mes patients, je ne peux me concevoir tel un caméléon en perpétuelle mutation. Un noyau stable doit bien me caractériser, conformément à cette notion d’organisation cognitive de personnalité qui est la modalité spécifique que chaque individu a de structurer de façon tout à fait personnelle et auto référentielle les expériences émotionnelles et la multiplicité des informations produites lors de ses interactions avec l’environnement (Guidano & Liotti, 1983, cités par Bondolfi & Bizzini, p 20, 1998). On peut évoquer aussi les règles tacites plus profondes qui représentent pour chaque individu des points de repère invariants dans la perception de soi, de sa propre identité et de la continuité dans le temps du sens de soi (Guidano, 1987, cité par Bondolfi & Bizzini, p 20, 1998). A la lumière de ces concepts, soulignant à la fois la co-construction des identités au sein des interactions humaines et celle d’une certaine permanence, stabilité du sens de soi au travers des situations et du temps, il est difficile d’imaginer à la fois que je sois restée la même, donc que je conduise ce jour les thérapies tout comme je les conduisais à mes débuts, et que j’aie vraiment pu être à l’époque si différente de ce que je suis maintenant. N’avais-je pas alors déjà comme principal bagage mon "identité et style personnels" (permanence et cohésion de soi) que j’apportais dans cette relation avec le patient et qui me caractérisent dans mon rapport au monde et aux autres? Confiance du thérapeute en ses propres ressources et en celles du patient Avec le temps, les patients successifs et les superviseurs très professionnels dont j’ai pu bénéficier, sans négliger l’influence d’une thérapie personnelle et des expériences de vie traversées depuis, ont fait de moi une clinicienne probablement plus empathique mais également plus avertie, audacieuse, osant s’aventurer dans des prises en charges "moins catholiques", faisant plus confiance à son intuition et surtout aux capacités du patient de traverser des étapes et crises douloureuses, tout en continuant à se construire. A ce propos, Mahoney (p 10, 1999) parle du respect de la sagesse du système vivant, capable de trouver ses propres moyens de gérer des difficultés. De plus, la lecture des travaux sur les processus interpersonnels en psychothérapie (Safran & al, 1990) ont aussi permis d’éclairer mon travail, en abordant aussi plus directement avec les patients des aspects de la relation établie entre nous, ce qui n’était que peu le cas avec M.F. La perturbation comme source de changement Pour terminer, toujours à la lumière des travaux constructivistes et de concepts tels que l’activité, les processus auto-organisationnels et l’interaction patient-thérapeute, il semble que ce dernier, outre le recours à des stratégies thérapeutiques spécifiques, doive aussi faire preuve d’une grande flexibilité et capacité à rythmer ses interventions en fonction du moment organisationnel dans lequel se trouve le patient. Le psychothérapeute sera alors amené à assumer une fonction déstabilisatrice" (proposant des défis) à certains moments et "stabilisatrice" (sécure et rassurant) à d’autres (Mahoney, 1999). A ce propos, il paraît assez clair que dans la thérapie relatée ici, j’ai dû recourir à la fonction stabilisatrice et visant à redonner un semblant de "contrôle" au patient qui s’est présenté initialement très démuni et en perte de repères, alors que vers la fin du traitement, les discussions ont visé à vouloir perturber le système et les habitudes du patient lors de son retour au pays. Je voudrais ici faire un parallèle avec le schéma des 3 zones du modèle d’assertivité (Schuler, 1996) découvert seulement quelques années après cette thérapie, schéma très utile auquel j’ai souvent recours dans mes traitements et qui peut être élargi audelà du concept d’assertivité. Il semblerait en effet qu’avec ce patient, j’aie tenté, en abordant son retour au pays, de l’encourager à sortir de sa "zone de confort" dans laquelle il s’était enfermé (habitudes favorisant le sentiment de sécurité, repli sur sa famille) pour explorer de nouvelles choses (entrer dans une "zone de risque") et pouvoir ainsi progresser. REMARQUES FINALES Parvenue à la fin de cet article, je voudrais encore préciser un dernier élément. Il a trait au cadeau reçu à l’issue du suivi. Outre le fait que celui-ci ne représentait pas un investissement financier important, la valeur symbolique du geste (tant en terme d’exercice d’exposition que de remerciements pour cette agréable collaboration) ont contribué au fait que je ne me voyais pas le refuser. C’est toutefois avec une certaine pointe d’autodérision que je souhaite maintenant préciser la nature du cadeau: il s’agissait d’une terrine florale composée de … cactus! Sur le moment, je n’ai pas jugé nécessaire d’en parler à mon superviseur. Aujourd’hui, je ne peux m’empêcher, en repensant à cette thérapie, de m’interroger sur le sens à donner à cette histoire de piquants. Je vous laisse y réfléchir. Personnellement, je suis assez contente de me dire qu’en TCC, il y a plusieurs hypothèses alternatives possibles et qu’en plus, dans cette approche, on n’a pas recours à l’interprétation! Il me reste à souhaiter que ce regard partagé ici avec vous sur mon histoire de thérapeute ait suscité chez vous l’envie de considérer, si ce n’est déjà fait, votre propre parcours et les relations significatives qui l’ont jalonné. Et mes toutes dernières pensées vont à ce patient que je ne remercierai jamais assez de m’avoir donné l’opportunité de faire cette première expérience constructive pour mon identité de thérapeute et qui, je le souhaite, coule aujourd’hui des jours heureux en étant "moins handicapé de la relation". Références André C (2001a). Thérapie comportementale et cognitive des phobies sociales. ASPCo-Info, 8, 2-6. 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Ci-après nous avons le plaisir de publier neuf résumés de suivis TCC faits par des collègues ayant terminé leur formation de base en 2004. BRAVO À TOUTES ET À TOUS POUR VOTRE COLLABORATION ET UN GRAND MERCI D'AVOIR RÉPONDU FAVORABLEMENT À L'INVITATION DE PARTAGER DANS CE JOURNAL UN BOUT DE VOTRE EXPÉRIENCE. ********** THERAPIE COMPORTEMENTALE DIALECTIQUE: UNE APPROCHE DU TROUBLE DE PERSONNALITÉ BORDERLINE Présentation de Mlle F. Rosetta NICASTRO Psychologue, Candidate ASPCo Programme CARE, Service de Psychiatrie Adulte – Secteurs Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), 8 rue du XXXI Décembre, 1207 Genève [email protected] Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site ********** THERAPIE COMPORTEMENTALE DIALECTIQUE: UNE APPROCHE DU TROUBLE DE PERSONNALITE BORDERLINE Présentation de Mlle C. Florence GUENOT Psychologue FSP, Candidate ASPCo Service psychosocial, 56 avenue Général-Guisan, 1700 Fribourg [email protected] Vignette clinique non publiée sur le site ********** TCC EN 12 SÉANCES D’UNE PHOBIE DE L’AVION Maria BOUCHERIE Psychologue dipl., spéc. en psychologie clinique, candidate ASPCo Consultation des Eaux-Vives - Secteur 1 SPA-S / Dpt de Psychiatrie (HUG) Rue du XXXI-Décembre 36 - 1207 Genève HREF="mailto:maria.boucherie@hcuge" MACROBUTTON HtmlResAnchor [email protected] Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site ********** PRÉPARATION AU TRAITEMENT CHEZ UN PATIENT SOUFFRANT DE TOC Nadia ORTIZ Psychologue FSP, Candidate ASPCo Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), Service de Psychiatrie Adulte Unité Psychiatrique Hospitalière Adulte (UPHA), 5-DL, Hôpital Cantonal ET Consultation secteur 3-Servette, 91 rue de Lyon, 1203 Genève [email protected] Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site ********** TCC DE L’INSOMNIE CHEZ UNE REQUÉRANTE D’ASILE Ariel EYTAN Psychiatre FMH, Candidat ASPCo Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG), Service de Psychiatrie Adulte Unité Psychiatrique Hospitalière Adulte (UPHA), 5-DL, Hôpital Cantonal 24, rue Micheli-du-Crest – 1211 Genève 14 Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site ********** TCC SUR LES RUMINATIONS APRÈS UN ÉCHEC PROFESSIONNEL Hélène REY RUF Psychologue FSP, Candidate ASPCo Cabinet - rue Carteret 6 -1202 Genève [email protected] Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site ********** THÉRAPIE COGNITIVE ET COMPORTEMENTALE D’UNE INSOMNIE Corinne TIHON IVANYI Psychologue, Candidate ASPCo 4 ch. Castoldi, 1224 Chêne-Bougeries [email protected] Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site ********** APPORT DE LA TCC DANS UN SETTING PARTICULIER: LA PRÉPARATION PSYCHOLOGIQUE AU BY-PASS GASTRIQUE Murielle REINER psychologue FSP, Candidate ASPCo Service de l'Enseignement Thérapeutique pour Maladies Chroniques (SETMC), Annexe Thury Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) Hôpital Cantonal – 24 rue Micheli-du-Crest - 1211 Genève 14 [email protected] Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site ********** "JE NE SUPPORTERAIS PAS D’ÊTRE ANXIEUX!" UNE APPROCHE TCC DE MONSIEUR S. Emna RAGAMA-PARDOS Psychologue FSP, Candidate ASPCo Hôpitaux Universitaire de Genève (HUG) - Service de Psychiatrie Adulte, Secteur 3 Servette Centre de Thérapies Brèves - 89, rue de Lyon - 1203 Genève [email protected] Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site Vignette clinique non publiée sur le site . • ACTIVITÉS DES MEMBRES … • ACTIVITÉS DES MEMBRES … • ACTIVITÉS DES MEMBRES … Cette rubrique vise à mieux faire connaître les membres entre eux. L'idée est de profiter du journal pour se faire connaître, mais aussi pour connaître qui d'autre travaille dans des domaines proches, ou encore se faire une idée de qui fait quoi et où, afin p.ex. de mieux cibler des adressages … ou pour d'autres raisons encore !! Dans ce numéro, le thème est la pratique de la TCC en groupe. Cinq expériences nous sont parvenues (nous remercions vivement chaque contributeur), trouvez-les ci-après. ********** Nous animons actuellement un groupe d'affirmation de soi à la Consultation des Eaux-Vives au sein du Service de Psychiatrie Adulte des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG). Il s'agit d'un groupe intersectoriel fermé, composé de 6 à 10 participants (hommes et femmes) âgés de 18 à 65 ans. Le groupe a lieu de manière hebdomadaire et dure environ 12 séances sans compter les 2 séances de rappel qui ont lieu 1 mois et 6 mois après la fin de la prise en charge. Chaque séance aborde un thème précis correspondant aux différentes compétences sociales que les patients désirent améliorer. Les thèmes sont: "dire bonjour", "engager une conversation", "poursuivre et mettre fin à une conversation", "faire une demande", "refuser quelque chose", "faire une critique", "recevoir une critique", "faire un compliment" et "recevoir un compliment". Le groupe s'adresse à des personnes présentant de réelles difficultés à faire valoir leurs droits, désirs et opinions ainsi qu'une difficulté à communiquer de manière satisfaisante. Il est basé sur une approche cognitivocomportementale et vise 3 objectifs principaux: • "mieux communiquer" (entraînement aux compétences sociales) • "penser autrement" (restructuration cognitive) • "mieux gérer les situations anxiogènes" (exposition aux situations anxiogènes par le biais de jeux de rôles et d'enregistrement vidéo durant les séances) ********** Maria Boucherie et Delphine Morand Candidates ASPCo [email protected] [email protected] Je suis psychologue FSP et travaille dans un cabinet privé avec des logopédistes à Versoix. Je travaille essentiellement avec des enfants et des adolescents. J'utilise la TCC en individuel et également en groupe. Actuellement, un groupe d'affirmation de soi avec deux adolescentes est en cours et un autre pour enfants va débuter très prochainement. Le groupe d'affirmation de soi pour enfants et adolescents se focalise sur ces objectifs: "ne pas fuir", "mieux communiquer" et "penser autrement". On travaille dans le groupe selon les trois axes en suivant le modèle de la TCC pour adultes: l'exposition aux situations anxiogènes, l'entraînement aux compétences sociales et la restructuration cognitive. TCC en groupe fonctionne bien avec des enfants qui ont entre 9 et 12 ans et lorsque les deux sexes sont représentés. Les enfants candidats pour des groupes d'affirmation de soi sont souvent plus timides que leurs pairs et présentent en général une faible estime de soi. Parfois, ils sont gonflés voire provocateurs pour masquer leur malaise, parfois ils éprouvent une gêne à être en relation avec leurs pairs et des difficultés face aux apprentissages. Je constate que lors des groupes d'affirmation de soi pour enfants et adolescents, les jeux de rôles, les modèles et l'exposition à des situations anxiogènes fonctionnent bien et donnent de bons résultats. Mon expérience à ce jour est celle avec des enfants et adolescents de 7 à 16 ans. J'essaie d'équilibrer au mieux les groupes, d'un maximum de quatre enfants, selon l'âge et la problématique de chacun. Je remarque que la Pierina Rogg Bazzano Membre ordinaire ASPCo [email protected] www.fayards.ch ********** Il y trois ans nous mettions sur pied notre premier groupe d'affirmation de soi. Nous avons poursuivi cette activité au rythme de deux groupes par an et abordons actuellement notre sixième session. Les groupes se composent de six participants aux maximum et se déroulent sur huit à dix séances hebdomadaires d'une heure trois quart. Nos groupes sont mixtes avec une prédominance de femmes (moyenne d'âge entre 35 et 40 ans) exposant des degrés de difficulté plus ou moins importants dans leurs comportements d'affirmation de soi, tendant plutôt sur le versant inhibé. Lors d'un cycle de sessions plusieurs thématiques sont abordées. Les deux premières séances rappellent les bases d'une bonne communication ainsi que les conséquences délétères du cercle vicieux découlant des comportements inhibés et agressifs. Les séances suivantes se centrent sur des situations d'interactions sociales types tels que demandes, refus, critiques, compliments et conversations. Nous encourageons la participation active de chaque patient lors des jeux de rôle ainsi que par l'apport d'expériences personnelles, et proposons un entraînement des méthodes pratiquées entre les séances. Un facteur de bon pronostic réside dans la compliance aux tâches à domicile, en effet, telle que la conduite d'un véhicule, un comportement affirmé s'acquiert avec l'accumulation d'expériences. Nous considérons comme critères d'exclusion les troubles suivants: sur l'axe I, dépression et phobie sociale trop intenses, ou troubles addictifs non stabilisés; sur l'axe II, personnalité paranoïde et antisociale. Enfin, il nous arrive d'inclure dans ces groupes un(e) thérapeute en formation TCC. Nous avons beaucoup de plaisir à animer conjointement ces groupes d'affirmation de soi et partageons le projet d'organiser un nouveau groupe orienté sur la gestion du stress dès 2005. ********** Giulio Corazza et Laurent Mammana Membres ordinaires ASPCo [email protected] [email protected] Je pratique, depuis 1999, la TCC en groupe à la Clinique la Métaire de Nyon. Il s'agit d'un groupe journalier, semi-ouvert, qui fait partie d'un programme de traitement pour des patients dépressifs et anxieux durant leur hospitalisation. Ce programme, où la thérapie cognitive de groupe constitue l'intervention thérapeutique principale, dure environs 4 semaines et est limité à 8 patients. Durant l'hospitalisation, le patient participera à deux types de groupes. Le groupe cognitif a lieu trois fois par semaine et est centré sur les difficultés que les patients vivent dans l'ici et maintenant. Vu qu'il s'agit d'un groupe qui peut être composé au même moment par des personnes qui suivent les groupes depuis quelques semaines et des personnes qui viennent de commencer, le contenu des séances ne peut pas suivre un agenda fixe et préétabli pour l'ensemble des groupes. Nous travaillons par contre sur des thèmes définis ensemble au début de chaque semaine, en fonction des problèmes évoqués par les patients. ont également lieu deux fois par semaine. Le but est de préparer les patients à la sortie en les encourageant à se confronter à leurs difficultés réelles dans leur contexte habituel. Si un patient imagine une difficulté pour réussir son objectif, nous utilisons le groupe pour le préparer au moyen de jeux de rôles ou d'autres techniques adaptées. Je pense que ces groupes offrent aux patients une possibilité de briser l'isolement lié à la maladie et à l'hospitalisation et d'apprendre que leur souffrance n'est pas due à une faiblesse de caractère ou à un manque de courage. L'exploration et la remise en question des pensées automatiques et des schémas dépressogènes est également largement facilitée par l'apport des autres membres et permet aux patients d'expérimenter in vivo que leurs pensées ne sont pas des vérités absolues. L'échange avec les autres patients leur permet également de relativiser leurs difficultés et de trouver de nouvelles stratégies pour appréhender leurs problèmes. Des groupes de préparation et d'évaluation des week-ends pendant lesquels les patients se fixent et évaluent des objectifs pour le week-end Malin Tronje Pachoud Membre ordinaire ASPCo [email protected] ********** Groupe penser et faire autrement. C’est avec ce nom que j’ai conduit jusqu’au mois passé et pendant un an et demi un groupe cognitivo-comportemental à thèmes tournants dans un centre de crise à Genève (Centre de Thérapies Brèves, Service de Psychiatrie Adulte Secteur 4, Hôpitaux Universitaires de Genève). L’objectif était d’offrir un espace structuré de réflexions et d’expériences nouvelles, en groupe, autour de thèmes définis, pour des patients souffrant de pathologies diverses (le plus souvent: troubles dépressifs, troubles anxieux, troubles de la personnalité, troubles de l’adaptation, mais aussi troubles psychotiques). Pour pouvoir inclure rapidement de nouveaux patients, les entrées dans le groupe pouvaient se faire chaque semaine dans la première des deux séances du module. Les différents modules offerts avaient comme thème: "penser et faire autrement", "comprendre et gérer le stress", "comprendre et améliorer l’estime de soi", "comprendre et s’entraîner à l’affirmation de soi", "stratégies pour affronter les problèmes", "cultiver l’optimisme", "apprentissage du bonheur". Entre les deux séances de chaque module un exercice de mise en pratique était proposé et cette expérience était discutée ensemble lors de la séance suivante. La recommandation était de participer à plusieurs modules. Cette expérience a montré l’utilité de cette approche avec des personnes traversant une crise psychologique importante. Le feed-back des patients a souvent porté sur les connaissances et les compétences gagnées avec ce groupe, ainsi que sur les progrès significatifs qu’ils ont enregistré par rapport à leurs difficultés. Des remaniements institutionnels indépendants du groupe auront malgré tout eu raison de cet espace qu’il n’était plus possible de reconduire avec la nouvelle année académique, malheureusement! Cela dit, d'autres horizons s'ouvrent avec la préparation d'un groupe TCC avec des jeunes patients souffrant de psychoses débutantes dans le cadre de la consultation spécialisée Jade (aussi au Service de Psychiatrie Adulte des HUG), défi stimulant! Anna Zinetti Bertschy Membre ordinaire ASPCo [email protected] ********* Psychothérapie cognitive comportementale en groupe. Depuis de nombreuses années nous proposons des groupes d'affirmation de soi, indiqués pour des patients présentant une phobie sociale. Les groupes sont fermés et comprennent une quinzaine de séances hebdomadaires de 2 heures. Les techniques employées sont centrées sur les objectifs suivants: "ne pas fuir ou éviter", "gérer les émotions", "mieux communiquer", et enfin "explorer ou modifier les pensées dysfonctionnelles". Une large part est faite à l'approche comportementale avec des expositions aux situations anxiogènes, lors de jeux de rôle enregistrés en séance et revus en groupe et aussi lors de séances organisées dans des lieux publics, en ville, ainsi que lors des tâches accomplies par les participants dans la vie quotidienne. Un entraînement aux compétences et habiletés sociales représente un aspect important du traitement. Enfin un temps de restructuration cognitive pour restaurer une meilleure estime de soi, développer un système de croyances plus assertif, modifier les cognitions négatives ou peu fonctionnelles. Les études de résultats publiées pour ces traitements par différentes équipes, et aussi notre expérience, ont montré l'importance d’utiliser des techniques comportementales pour traiter la phobie sociale. Barbara Busino et Roland Eiselé Membres ordinaires ASPCo [email protected] è Thème pour le prochain micro-trottoir « Traitez-vous les troubles alimentaires? » Faisant preuve d'assertivité, ne manquez pas de nous adresser quelques lignes décrivant votre pratique des troubles alimentaires avec la TCC. Votre texte paraîtra dans le numéro de février prochain accompagné de celui des autres collègues qui utilisent cette pratique … N'oubliez pas le délai d'envoi des textes, fixé au 15 janvier 2005 Eliane Jaquier et Malin Tronje Pachoud [email protected] [email protected] ANNONCES DE CONGRÈS, FORMATIONS • New Orleans (USA), 18-21 novembre 2004 38th Annual Convention of the AABT www.aabt.org • Paris (F), 16-18 décembre 2004 (ATTENTION: nouvelles dates) 32èmes Journées scientifiques de Thérapie Comportementale et Cognitive (AFTCC) www.aftcc.org [email protected] • Canterbury (UK), 2005 Conférence annuelle de la BABCP www.babcp.com/canterbury/index_cant2005.htm • Göteborg (S), 13-17 juin 2005 5th International Congress of Cognitive Psychotherapy (IACP) in confluency with … IX World Congress on Constructivism [email protected] [email protected] www.congrex.se/ICCP2005 • Washington (USA), 17-20 novembre 2005 39th Annual Convention of the AABT www.aabt.org • Thessaloniki (Grèce), 22-25 septembre 2005 35ème Congrès de l’EABCT. CBT: the art of an integrative science [email protected] www.gacbp.com • Paris (F), 20-23 septembre 2006 36ème Congrès de l’EABCT. Patient and therapist creativity in psychotherapy www.eabctparis2006.com • Chicago (USA), 16-20 novembre 2006 40th Annual Convention of the AABT www.aabt.org • Barcelona (E), 11-15 juillet 2007 World Congress of Behavioral and Cognitive Therapies (EABCT) ATELIERS DE PERFECTIONNEMENT ASPCo agenda octobre 04 - juin 05 Edna Foa 28-30 octobre 2004 SÉMINAIRE DE PERFECTIONNEMENT SPÉCIALISÉ Diagnosis and treatment of PTSD Attention: places limitées Charles Morin 29 janvier 2005 Traitement des troubles du sommeil Jacques Montangero 11-12 mars 2005 Utilisation des rêves en psychothérapie cognitive I Viviane Schekter Diane Roth 23 avril 2005 Travailler avec les patients violents Gisèle George 30 avril 2005 TCC avec les enfants Daniel Stern 21 mai 2005 Le moment présent en psychothérapie Christine Padesky Kathleen Mooney 27-28 mai 2005 CBT of personality disorders Charly Cungi 11 juin 2005 25 juin 2005 Le cannabis 8ème Journée clinique de l’ASPCo Comme habituellement, vous recevrez toujours à l'avance pour chaque atelier une info détaillée et le formulaire d'inscription ... 6 Lieu Info Les ateliers ont généralement lieu le samedi de 9h à 17h Bât. les Champs, 2ème étage, Belle-Idée, Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) 2, ch. Du Petit-Bel-Air - 1225 Chêne-Bourg / Genève Lucio Bizzini [email protected] ( 022 327 78 07 Dans le dernier numéro figurait un questionnaire visant à connaître vos attentes, vos désirs, vos préférences en matière d’ateliers de perfectionnement. Voici ce que vous nous en avez dit … ********** RÉSULTATS DE L'ENQUÊTE POUR LES ATELIERS DE PERFECTIONNEMENT ASPCo Quelques mots pour vous présenter les résultats de l'enquête sur le perfectionnement. Tout d'abord un grand merci à tous ceux d'entre vous, nombreux car N=58, qui ont consacré un peu de leur été à répondre à ce questionnaire. On peut déjà noter que les participants à l'enquête se sentent très concernés par la formation, 47 % ont participé à plus de 7 ateliers au cours de ces 3 ans, 41% à plus de 3 et 12% jusqu'à 2 ateliers. Qu'est-ce qui guide le choix de participer à un atelier? Pour la majorité d'entre vous, le contenu de l'atelier est le critère de choix par excellence, vient ensuite toujours en lien avec le contenu "un thème proche de sa pratique personnelle" puis le formateur. Le plaisir de retrouver des collègues, la date de l'atelier ou la découverte d'un thème nouveau ne semblent, en revanche, pas être des critères de choix importants. Quelles sont les raisons qui freinent la participation aux ateliers? Avant tout, et cela correspond bien au mal chronique de notre temps, "le manque de temps"! L'éloignement également, vous oblige à renoncer ou à être plus sélectif dans votre choix de formation continue. A côté de ces facteurs pratiques, le programme des ateliers peut freiner votre participation à un atelier. Quelles améliorations pourrait-on envisager? Relevons en premier lieu que pour la majorité d'entre vous la formule actuelle convient bien. La proposition qui semble la plus attrayante est celle d'avoir des ateliers mixtes dont le matin est réservé à des aspects théorico-cliniques et l'après-midi à des supervisions de cas. Changer de jour ou de lieu ne semblent pas perçu comme une façon d'améliorer le perfectionnement. Par rapport aux thèmes que vous souhaitez voir traiter, la relation thérapeutique est celui qui recueille le plus de demande, les autres intérêts portent sur des techniques thérapeutiques particulières, la supervision et le développement personnel. Le mot du président de la formation, Lucio Bizzini Les résultats confirment que la formation est globalement appréciée dans sa proposition actuelle (le 88% des répondeurs sont des assidus de la formation). Toutefois sur environ 200 membres, seulement le 30% a répondu. Qu’en pense la sempiternelle «majorité silencieuse»? Je pars du principe (attribution positive) qu’elle pense comme la minorité disciplinée, laquelle suggère à l’avenir de poursuivre sur la même route en mettant plus particulièrement l’accent sur la relation thérapeutique et sur la supervision. Message entendu, un gros effort sera fait de ce côté là. Promis! Lusmila Myers-Arrázola & Christine Favre Membres du Comité NOTES DE LECTURE D'HIER ET D'AUJOURD'HUI … Cette rubrique se propose d’attirer l’attention sur des parutions récentes. Elle aimerait également rappeler à notre mémoire des textes fondateurs qui inspirent notre activité quotidienne sans que nous ayons toujours conscience de ce que nous devons à leurs auteurs. La rubrique est ouverte à tous. Envoyez vos propositions à Roger Zumbrunnen, responsable de la rubrique, par courrier (rue de l’Athénée 22 – 1206 Genève), par fax (022 346 50 06) ou par e-mail ([email protected]). ********** • Evolution des modèles cognitifs de l’Etat de Stress Post-Traumatique (ESPT) une revue récente Si l’on essaie de retracer l’histoire des modèles cognitifs de l’état de stress post-traumatique (ESPT, ou PTSD selon l'acronyme en anglais) comme le fait Tim Dalgleish dans l’article que nous signalons ici 1, une tendance évolutive semble se dégager de la littérature: tandis que les premières approches se sont contentées de prévoir un seul format de représentation mentale, les approches récentes se caractérisent par l’intégration de plusieurs formats différents, elles sont - pour utiliser le terme de l’auteur - de type multireprésentationnel. Trois formats de représentation ont dominé les discours dans ce domaine et se retrouvent, sous une forme ou sous une autre, dans la plupart des théories récentes de l’ESPT: (1) les schémas, dont l’avantage principal est qu’ils permettent de modéliser des connaissances abstraites sur soi et le monde; (2) les représentations analogues (p.ex. images) et propositionnelles (p.ex. phrases), qui permettent de modéliser les informations non-verbales et verbales sur le traumatisme et ses conséquences; et (3) les réseaux associatifs, qui permettent de modéliser les connexions entre les différents types d’information. Dalgleish T (2004). Psychological Bulletin, 130, 228-260. 1 Toutes les références mentionnées se trouvent dans cet article. Tim Dalgleish est chercheur et clinicien au "Medical Research Council Cognition and Brain Sciences Unit" à Cambridge (UK). Quels sont les avantages liés à l’intégration de ces formats de représentation dans un seul modèle? On peut en recenser au moins trois. (1) Augmentation de la valeur descriptive: un modèle à plusieurs formats de représentation est mieux à même de refléter le tableau clinique de l’ESPT. Rappelons par exemple le fait que des souvenirs traumatiques peuvent prendre la forme de flashbacks et de cauchemars (représentations analogues) ou de narrations (représentations propositionnelles), et qu’un décalage entre les deux versions peut créer de la confusion et ainsi contribuer au trouble. (2) Augmentation de la valeur explicative: l’interaction entre les différents formats de représentation fournit des explications différenciées pour l’évolution du trouble, y compris dans un cadre thérapeutique. Pour prendre un exemple, la présence d’indices de rappel du traumatisme pourrait raviver des souvenirs imagés de l’incident et, par voie d’un réseau associatif, déclencher une réponse de stress intense (représentations analogues); cette réponse pourrait être évaluée comme noncontrôlable, ce qui risquerait de renforcer un schéma d’incompétence ou d’impuissance. Dans le contexte d’une thérapie, l’interaction entre les formats de représentation serait susceptible de prendre une issue inverse: la réduction de la réaction de stress au cours de l’exposition à des stimuli rappelant le traumatisme pourrait conduire à une re-évaluation de la symptomatologie comme étant plus contrôlable; un tel reappraisal pourrait ensuite se répercuter de manière favorable sur des représentations schématiques de compétence dont dispose le patient. (3) Augmentation de la valeur heuristique: un modèle à formats multiples est en mesure de générer des hypothèses utiles, tant dans un contexte de recherche fondamentale que dans un contexte d’application clinique. En s’inspirant du modèle à deux formats de représentation développé par Brewin & al (1996), Holmes & al (2004) ont par exemple montré que le développement de représentations propositionnelles d’un film sur un événement traumatique est susceptible de diminuer la fréquence de souvenirs intrusifs concernant ce film (représentations analogues). Traduit en termes thérapeutiques, ceci voudrait dire que la contextualisation narrative (représentations propositionnelles) de l’incident traumatique devrait être encouragée au cours du traitement, car celle-ci serait susceptible de bloquer l’activation automatique des souvenirs imagés (représentations analogues). Quelle est la direction que l’évolution des modèles cognitifs de l’ESPT pourrait ou devrait prendre à l’avenir? Dalgleish mentionne un argument en faveur du développement d’une macro-théorie qui serait encore plus abstraite que les modèles actuels: à côté de l’ESPT au sens strict, il existerait tout un éventail d’autres réactions à des traumatismes (p.ex. des formes d’anxiété, de dépression, d’abus de substance ou encore de troubles de la personnalité; Joseph & al, 1997), et ce ne serait qu’au prix d’une plus grande abstraction que de tels tableaux cliniques pourraient être intégrés dans les modèles existants. Mais est-ce qu’abstraction rime avec application? A l’encontre d’idées reçues qui sont partagées par beaucoup de praticiens, Dalgleish répond par l’affirmative. Afin d’illustrer ce point, il évoque l’un des modèles les plus complexes de la dépression, celui des sous-systèmes interagissants proposé par Teasdale et Barnard (1993), qui ne comporte pas moins de neuf formats de représentation. Malgré cette complexité, il a contribué au développement de la thérapie cognitive basée sur la méditation (Teasdale, 1999), comme quoi le mariage entre théorie et pratique peut réussir. Ralph Erich Schmidt Psychologue diplômé, Candidat ASPCo ********** • La TCC est la forme de psychothérapie la plus efficace! C’est un rapport très officiel qui l’affirme. Et alors? En février 2004, un groupe d’experts mandaté par l’Inserm à la demande du Ministère français de la Santé, a publié un volumineux rapport (près de 600 pages)2 sur l’efficacité de trois catégories de psychothérapie: psychodynamique/psychanalytique, cognitivocomportementale et systémique/familiale. Le groupe était composé de tenants de chaque approche (Jean Cottraux pour la TCC) et de spécialistes de la rechercher dans le domaine de la psychothérapie. Il a basé ses travaux sur l’examen d’environ 1000 études contrôlées et de méta-analyses issues de la recherche "Psychothérapie, trois approches évaluées". Éditions Inserm, ISBN 2-85598-831-4, 568 pages, février 2004. 2 internationale, et a évalué l’efficacité de chaque approche pour 16 pathologies ou groupes de pathologies (schizophrénie, troubles de l’humeur, troubles anxieux, troubles du comportement alimentaire, troubles de la personnalité, etc.) chez les adultes et chez les enfants. Il ressort de cette étude que la TCC est efficace, selon les critères retenus, dans la plupart des troubles, la thérapie familiale dans certains (schizophrénie, anorexie) et la thérapie psychodynamique dans une ou deux catégories seulement (personnalité borderline). Dans les comparaisons entre deux formes de psychothérapie, la TCC s’est avérée le plus souvent plus efficace que la thérapie psychodynamique ou que la thérapie familiale. Il faut relever qu’aucune étude n’a montré de phénomène de substitution de symptômes. La publication de ce rapport a provoqué un tollé de la part des milieux psychanalytiques français, qui ont violemment attaqué le travail des experts, dénonçant notamment son caractère tendancieux (pro-TCC) et outrancièrement non scientifique. Cette critique est piquante si on pense au refus de nombre de psychanalystes de se conformer aux règles de la méthode scientifique! On attend de voir maintenant si les pouvoirs publics français vont tirer les conséquences de ce document, qu’ils ont euxmêmes commandité dans l’idée d’y voir plus clair dans la jungle touffue et souvent obscure de la pratique psychothérapeutique. Et en Suisse? Il y a quelques années, l’OFAS avait lancé un grand chantier dans ce domaine, en demandant à chaque école de psychothérapie de fournir la preuve scientifique de son efficacité si elle entendait que les traitements inspirés de sa méthode soient remboursés par les caisses-maladie. La Lamal exige en effet que, pour être à la charge de l’assurance-maladie, les traitements soient adéquats, efficaces et économiques. Depuis, on n’a plus entendu parler de ce projet qui semble avoir disparu des priorités des responsables fédéraux de la santé, qui sont pourtant désespérément à la recherche de moyens de freiner les coûts de la santé. En attendant, c’est la collectivité qui continue de payer chaque année des milliers d’heures de psychothérapie dont l’efficacité reste à établir … Jusqu’à ce que, croulant sous la charge financière, la collectivité décide de cesser de payer TOUTE forme de psychothérapie? Le rapport de l'Inserm est disponible sur internet sous la forme d’une synthèse de 60 pages à l’adresse http://www.inserm.fr/servcom/servcom.nsf/0/1b 232b2b2519d63fc1256e460045f1ee/$FILE/synt hese%20psychotherapie.pdf Et sous la forme d’un résumé de 5 pages à l’adresse http://www.inserm.fr/servcom/servcom.nsf/0/1b 232b2b2519d63fc1256e460045f1ee?OpenDocu ment ********** Roger Zumbrunnen Membre ordinaire ASPCo • Ah si le père de Mozart avait été membre de l’ASPCo … Voici le récit pittoresque d’une tentative de thérapie basée sur l’exposition in vivo, effectuée par deux valeureux pionniers bien avant l’existence de la formation ASPCo. Hélas, la thérapie fut un échec. A vous de trouver pourquoi, puisque vous avez bénéficié d’une formation … Patient Thérapeutes Diagnostics un certain Wolfgang Amadeus (thérapie déléguée) Andreas Schachtner (trompettiste FST, ami de la famille) sur délégation de Leopold M (père de Wolfgang et Marianne) axe I: phobie spécifique (trompette) axe II: génie (grave) "Dans une lettre à Marianne Mozart, Andreas Schachtner écrivait en avril 1792 à propos de Wolfgang: ‘Presque jusqu’à sa dixième année, il eut un effroi irraisonné de la trompette, surtout quand on la jouait seule sans aucun accompagnement: il suffisait qu’on lui montre une trompette, cela lui faisait le même effet que si on lui avait mis sur le cœur un pistolet chargé. Votre père voulut un jour le délivrer de cette terreur enfantine et me dit de jouer près de lui, malgré son refus. Mon Dieu! Je n’aurais jamais dû obéir! A peine eut-il perçu le timbre éclatant de l’instrument qu’il pâlit, commença à s’évanouir et si on avait continué, certainement, il aurait eu des convulsions!" (Lechevalier, 2003, p. 195 3). Mais, tout compte fait, il est peut-être heureux que cette thérapie ait échoué. Car, qui sait, un succès thérapeutique nous aurait peut-être privés des œuvres géniales à venir, si Mozart était devenu un trompettiste virtuose. Josiane PRAZ Psychologue FSP, Membre ordinaire ASPCo 3 Lechevalier B (2003). Le cerveau de Mozart. Paris: Odile Jacob. i … ANNONCE … ANNONCE … ANNONCE … ANNONCE … Le dernier livre de Christophe André sort en librairie en octobre 2004 … Ne le manquez pas !!! RETENEZ LE DELAI REDACTONNEL DU PROCHAIN NUMERO 15 janvier 2005 Pour rappel, toutes les contributions spontanées sont les BIENVENUES ! Elles permettent un meilleur dialogue entre membres ! PS: N'oubliez pas de vous faire connaître à travers le micro-trottoir (voir page 38) ASPCo-Info n°18 – Spécial formation – octobre 2005 Sommaire Le mot du Président de la Commission de la Formation, par L Bizzini ........................................ p. 1 Contribution spéciale Dix ans après … ou le regard du psychothérapeute sur sa toute première psychothérapie conduite, par B Weber Rouget ................................................................................... p. 4 Contributions de fin de formation de base ASPCo • Thérapie comportementale-dialectique: une approche du trouble de personnalité borderline, présentation de Mlle F, par R Nicastro ............................................ p. 15 • Thérapie comportementale-dialectique: une approche du trouble de personnalité borderline, présentation de Mlle C, par F Guénot .............................................. p. 17 • TCC en 12 séances d'une phobie de l'avion, par M Boucherie ............................................... p. 19 • Préparation au traitement chez un patient souffrant de TOC, par N Ortiz .............................. p. 21 • TCC de l'insomnie chez une requérante d'asile, par A Eytan .................................................. p. 24 • TCC sur les ruminations après un échec professionnel, par H Rey Ruf .................................. p. 26 • Thérapie cognitive et comportementale d'une insomnie, par C Tihon Ivanyi ......................... p. 28 • Apport de la TCC dans un setting particulier: la préparation psychologique au by-pass gastrique, par M Reiner ......................................................................................... p. 30 • "Je ne supporterais pas d'être anxieux!", une approche TCC de M.S. par E Ragama-Pardos ............................................................................................................. p. 32 Micro-trottoir: activités des membres TCC en groupe .................................................................................................................................... p. 35 Annonces de congrès, formations, …............................................................................................... p. 40 Ateliers de perfectionnement ASPCo Agenda octobre 04 – juin 05 ............................................................................................................... p. 41 Résultats de l'enquête sur les ateliers de perfectionnement ASPCo par L Myers-Arrázola et C Favre ....................................................................................................... p. 42 Notes de lecture d'hier et d'aujourd'hui • Evolution des modèles cognitifs de l'Etat de Stress Post-Traumatique, par RE Schmidt ....... p. 43 • La TCC est la forme de psychothérapie la plus efficace! C'est un rapport très officiel qui l'affirme. Et alors? Par R Zumbrunnen ............................................................................. p. 44 • Ah si le père de Mozart avait été membre de l'ASPCo … Par J Praz .................................... p. 46 Annonce .............................................................................................................................................. p. 47 Sommaire ........................................................................................................................................... p. 48 Adresse de contact ASPCo Secrétariat ASPCo Rédaction ASPCo-Info Roland Eiselé Président de l'ASPCo 5, ch. Malombré 1206 Genève Joana Iadaresta 38, Av. de Crozet 1219 Châtelaine Anna Zinetti Bertschy 4, ch. de la Ruite 1252 Meinier ( 022 789 01 56 ( + fax 022 796 39 82 [email protected] [email protected] www.aspco.ch [email protected]