Hôpital de Port-Louis : rencontre avec des super
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Hôpital de Port-Louis : rencontre avec des super
Hôpital de Port-Louis : rencontre avec des super-héros et des super-héroïnes ! (1) Les établissements de Port Louis et Riantec sont un seul et même hôpital mais qui se trouve sur ces deux sites, car un temps, le Maire de Port-Louis avait refusé l’agrandissement du site de Port-Louis. Actuellement, il y a le projet de réunir les deux unités dans un même bâtiment à Riantec. Le site de PortLouis serait alors vendu à la ville ou à des promoteurs. Les héros et héroïnes du secteur de la santé de Port-Louis. Sur Riantec il y a le Service de Soins et Réadaptation, la médecine court séjour, l’Unité de Soins de Longue durée, les lits d’EHPAD (Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes) sont répartis entre les 2 sites Riantec et Port Louis. En janvier 2011 (année à vérifier), il y a eu transformation d’une grande partie des lits d’Unités de Soins de Longue Durée ( USLD) en EHPAD . Du fait du maintien à domicile le plus longtemps possible, les personnes qui arrivent en institution sont de plus en plus dépendantes. Le maintien à domicile est une bonne chose mais du coup lorsque les personnes arrivent, elles ont plus de besoins. Or, comme il y a de moins en moins de personnels, cela aggrave considérablement la qualité de la prise en charge. De plus, on assiste à une demande de plus en plus importante en traçabilité des soins avec un affichage en termes d’exigences de qualité. Si nous sommes des héros, alors il faut neutraliser tous les zéros ! François – AMP Malheureusement, tout cela diminue le temps disponible avec les patients. La conséquence est la dégradation de la prise en charge et une perte d’autonomie de plus en plus rapide des personnes âgées. Leur lien social est rompu. Par exemple, des patients sont levés 4 heures par jour ou pas du tout. Du coup, il y a épuisement des personnels, des maladies avec un accroissement de l’absentéisme, des maladies professionnelles pas toujours reconnues, des invalidités, des départs prématurés en retraite pour inaptitude. Il y a eu 145 % d’augmentation des accidents du travail ; chutes, piqures, problèmes aux épaules, au dos… « Ca nous arrive souvent d’être 3 soignants pour 36 personnes pour faire la toilette, le lever, l’habillage… On rend les personnes grabataires. On leur fait perdre leur autonomie. » « Il y a des personnes qui nous culpabilisent alors que les problèmes viennent de l’organisation du travail et du manque de moyens humains.….. » « Quand des cadres vont dans le sens des personnels on peut être sûr qu’ils vont tomber malades. » « Quand tu travailles sur de l’humain, tu as forcément une autre vision que l’administration qui est uniquement sur des chiffres. On n’est pas sur la même planète. » « Pourtant, c’est sûr un jour, il va arriver un truc grave….. et le directeur est garant du bien être des résidents et des personnels. » « Ce qui se passe…. Ça fait peur…. Et dire qu’on sera vieux aussi un jour, on ne veut pas vivre cela. » « On est sur le fil du rasoir – dans les services, la charte de la bientraitance est affichée partout mais on est à l’opposé de la charte, on est dans la maltraitance. » De fait, la pression sur les personnels s’accroit. On observe de l’agressivité, des troubles psychiques chez des agents qui culpabilisent de ne pas pouvoir faire leur travail correctement. Tout cela heurte en effet l’éthique des personnels. Ils ont le sentiment de ne pas respecter la dignité humaine des résidents. Un comité éthique a été mis en place par la direction…. Mais « plus on en parle – moins en en fait ». Tout le monde en souffre. Les représentants du personnel subissent des pressions. Tout est fait pour casser les équipes. Plus personne ne cadre l’organisation du travail. Les cadres partent ailleurs souvent victimes de burn-out . Les médecins aussi partent. Des rumeurs circulent, avec de fausses informations qui créent de la division entre les personnels. Dans le même temps, la Direction impose des changements de mentalités. Elle ne parle plus de patients ou de résidents mais de clients. Cela génère des nouvelles exigences de la part des familles. « Ce qu’on appelait des résidents – ce sont maintenant en effet des numéros et des chiffres – le soin en soi n’existe plus, c’est le tarif qui compte. » « Du temps où il y avait des missions de services publics, ce qui faisait que ça fonctionnait, c’était la mission. C’est ce sens du service public qui faisait le lien entre les personnels. Notre sens du service public, c’est «On ne vend pas, on donne ». « C’est la direction qui veut vendre – qui parle d’efficience – le problème, c’est que finalement ce sont ces transformations qui créent la déficience du système. Si on ne prend pas bien quelqu’un en charge, au lieu de l’autonomiser, on finit par le mettre en situation de dépendance. » « Toutes ces évolutions font beaucoup de casse au niveau des soignants. ….. Et au lieu de gagner de l‘argent, en fait ce système fait plutôt du gaspillage. » « Alors que si on nous laissait faire ce qu’on a appris, ce qu’on sait bon pour les résidents….. des économies seraient faites. Mais ce n’est pas d’actualité, On n’est plus dans l’humain. ..La direction actuelle n’est jamais venue sur notre lieu de travail. » Actuellement, il y a 300 agents dont 35 % sont en contrats précaires. Les CDD sont renouvelés pendant des années. On demande beaucoup à cette catégorie de personnels parce qu’ils sont flexibles. IL y a aussi les Contrats aidés. Ce sont des emplois pas chers, utilisés pour les tâches pour très peu de temps : l’hôtellerie, le ménage, l’animation. « Evidemment, il y a beaucoup de temps partiels imposés – on utilise la souffrance humaine en invoquant l’insertion. Alors qu’on n’est pas dans la logique de faire de l’insertion comme autrefois avec les CES (Contrats Emplois Solidarité.) » « Cela crée de la discontinuité. Il y a eu par exemple 7 personnes en contrats aidés qui se sont succédé en animation. C’est déstabilisant pour les résidents. » Par ailleurs, on observe ce qu’on appelle des glissements de tâches. Par exemple, les Assistants de Services Hospitaliers (ASH) font le travail des aides-soignants. …. Et personne ne bénéficie de formation. Tout se dégrade –les aides-soignants sont de plus en plus recrutés en contrat de droit public, c’est à dire que le nombre de personnes qui sont titulaires est en baisse. Sinon, les hôpitaux de Quimperlé, Charcot, le Faouët, Port-Louis ont être regroupés avec le Centre Hospitalier Bretagne Sud (Hôpital du Scorff) . Cela va créer un Groupement Hospitalier de Territoire qui n ‘aura plus rien à voir avec la Fonction Publique telle qu’on la connait. « Une des conséquences pour nous, c’est par exemple la cuisine qui est actuellement sur place – avec 20 emplois environ et qui va être supprimée au profit d’un Groupement d’Intérêt Public (GIP) cuisine industrielle. L’objectif est de détruire le service public au profit d’un système privé. » « Ce n’est pas du tout ce qu’on veut. Ce que nous voulons, c’est ne plus travailler en mode dégradé et que soit assuré le remplacement des agents absents. Actuellement une personne absente n’est pas remplacée pendant les trois premiers jours de l’arrêt. » Travailler tous les jours à l’hôpital, c’est faire de la belle politique. Ludo- aide-soignant « Aujourd’hui les résidents ont les fait survivre, on ne les fait pas exister. Les personnes âgées, si on ne s’en occupe pas, si on ne leur parle pas, elles se dégradent et très rapidement, elles meurent….. » « Il y a quand même quelque chose qui fonctionne bien, c’est le service de maintien à domicile – ça ne se passe pas trop mal – le maintien à domicile, ce sont les soignants qui s’adaptent et pas l’inverse, c’est pour cela que ça va mieux. On a moins de pression, plus de temps de prise en charge, pas trop de taches annexes. Le côté relationnel est différent et il permet de maintenir quelque chose – on est quelquefois le seul lien social des personnes qu’on va voir. » « Il faut faire en sorte que les personnes âgées vivent le plus longtemps possible mais bien…. C’est à la manière dont les personnes âgées sont traitées qu’on mesure la qualité d’une société. » Un jour, dans plusieurs années, on regardera les statistiques et on se demandera pourquoi il y a eu autant de morts dans les années 2010. Il est nécessaire de revenir à un système de soin garanti par l’état. La tarification à l’acte incite les cliniques à choisir les soins qui rapportent et à laisser les autres. « Sinon, au niveau politique, il faudrait des perspectives claires, nettes et précises. On a été choqué de voir des députés Front de Gauche qui ont voté l’état d’urgence. » « La politique doit donner une vision du monde et présenter des alternatives au plus proche du terrain. Les partis politiques doivent venir sur le terrain et être à l’écoute des personnes. Du coup, il faudrait lier syndicalisme et politique…. La limite est de plus en plus difficile à tracer entre les deux. » « En ce qui nous concerne, les gens doivent prendre conscience de ce qui se passe dans les hôpitaux – se demander ce qu’il y a de l’autre côté, du côté qu’on ne voit pas, celui des soignants – On entend des personnes qui se plaignent d’attendre aux urgences….. Il faudrait qu’elles sachent pourquoi elles attendent…… » On aimerait que les familles osent dénoncer davantage les choses anormales– qu’elles viennent avec nous pour agir, pour changer ce qui ne va pas. Ca commence à changer il y a de plus en plus de familles qui osent intervenir (il y a aussi des familles qui portent plainte ou qui enlèvent les patients de l’hôpital parce qu’on leur a vendu du rêve ailleurs… ) Ils reviennent souvent quelques temps après. Les soignants aussi sont de plus en plus nombreux à oser dénoncer…. On sort de la logique domination de la direction / soumission des agents. Quelques semaines après ces échanges, une réunion publique, prévue de longue date par le syndicat CGT, s’est tenue en présence d’une centaine de personnes dont plusieurs membres de familles de résidents. Le récit fait par les personnels et les familles, souvent très émouvant, a permis de prendre la mesure de la souffrance des uns de ne pouvoir faire leur travail correctement et des autres de savoir leur parent pris en otage par des politiques gestionnaires et budgétaires inhumaines. De cette réunion, est issu le projet de mettre en place un collectif de défense de l’hôpital avec des personnels, des membres des familles de résidents et des citoyens du secteur. (1) La commission-santé de l’AFGPAP ( Association des Amis et Partisans du Front de Gauche du Pays d’Auray et de Port-Louis) reçoit des membres du bureau du syndicat CGT de l’Hôpital de Port-Louis. L’objet de cette rencontre était de permettre un échange mutuel d’informations. Pour la commission-santé de l’APFGPAP, il s’agissait en particulier de s’informer sur la situation de l’hôpital et sur les luttes des personnels. L’idée était aussi de mettre en œuvre une autre manière de faire de la politique en donnant la parole à « ceux qui font, à ceux qui savent ». Par ailleurs, Ludovic était suppléant de Didier Cornil pour le binôme Front de Gauche aux élections départementales sur le canton. L’association a souhaité s’intéresser à ce qu’il porte en tant que syndicaliste et professionnel. Après la rencontre, une des personnes qui exerce en tant qu’aide-soignante à l’hôpital a avoué avoir été très touchée qu’on s’intéresse à ce que les personnels vivent au quotidien. « C’est la première fois depuis que je travaille qu’on m’écoute et qu’on me pose des questions sur ce que je vis au boulot». Les membres de l’association AFGPAP ont bien eu, de leur côté, le sentiment que ces personnes qui se battent non pas pour défendre des intérêts catégoriels mais pour la dignité des anciens, pour que la personne âgée soit reconnue et respectée dans notre société comme une personne, sont bien des super-héros du quotidien, des super-héros de la résistance aux politiques d’austérité et ni plus ni moins que les gardiens du principe d’humanité mis en péril par les logiques mortifères du capitalisme financier. Les personnes suivant étaient présentes à la rencontre: les invités : Ludo Aide-soignant hôpital de Port-Louis, Hélène Aide Médico Psychologique (AMP), Pascale Aide-soignante service gériatrie, François AMP en service fermé dédié aux personnes qui sont atteintes par la maladie d’Alzheimer, Béatrice aidesoignante à l’Ephad de Port-Louis, Hélène infirmière service médecine, soins de suite et palliatifs, Stéphanie Agent de service hospitalier dans l’unité de soins de longue durée; pour l’association : Alain, Annette, Claudine, Eric, Françoise, René ( Didier excusé).