Se protéger « comme tout le monde

Transcription

Se protéger « comme tout le monde
entreprise santé
Handicap et prévention
Se protéger « comme tout le monde »
L
Cette spécificité n’est pas forcément opposable à la mise en
œuvre de systèmes nouveaux »,
remarque Michel Colson,
ingénieur-conseil à la CRAM
Nord-Est. La blanchisserie et
le pressing dirigés par l’établissement en sont les meilleurs
exemples. La blanchisserie
notamment a évolué d’un système artisanal vers une forme
plus industrielle basée sur le
principe de l’asepsie (hygiène
biologique parfaite) en appliquant la méthode RABC (système d’analyse du risque et de
la maîtrise de la biocontamination) : à aucun moment les circuits du linge sale et du linge
© Yves Cousson/INRS
e handicap n’échappe pas
aux règles. Y compris en
matière de prévention des
risques professionnels. L’ESAT,
Élan argonnais de SainteMenehould, dans la Marne,
accueille des travailleurs ayant
des déficiences mentales avec
ou sans troubles du comportement. L’établissement offre
jusqu’à 94 places en équivalent
temps plein sur des activités
diverses : blanchisserie/pressing, entretien des espaces
verts, sous-traitance industrielle, restauration, travaux de
peinture. « La prise en compte
du handicap est intégrée à la
réflexion sur la prévention.
propre ne se croisent. Chaque
opérateur a suivi une for­mation
sur la manipulation des vêtements. Des guides illustrés par
l’image précisent la marche à
suivre. Les ma­chines à laver
sont chargées en zone sale,
déchargées en zone propre. Les
sas intermédiaires, accessibles
par des portes automatiques,
ne s’ouvrent jamais simultanément des deux côtés. Au
sol, chaque zone a sa couleur.
« Nous travaillons sur la transparence. Tout le monde est
informé des projets et actions
menées, mais la communication doit être claire et sûre, pour
ne perturber per­sonne. Il faut
également éduquer le moniteur à la prévention des risques
pour ensuite amé­nager des
séquences d’apprentissage et de
transmission d’un savoir-faire »,
explique Jean-Luc Bourdon,
directeur de l’ESAT.
Pour l’activité pressing, d’entrée
de jeu, il a été décidé de ne pas
utiliser le perchloro­éthylène.
Ce solvant classé cancéro­gène
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Une offre
complète
L
’association Élan
argonnais existe depuis
1970. Spécifiquement
organisée autour de la prise
en charge d’enfants
handicapés non scolarisés
au départ, elle comprend
aujourd’hui un secteur
enfants (institut
médico-éducatif, service
d’éducation spéciale et de
soins à domicile) et un
secteur adulte (ESAT, foyer
d’hébergement, foyer de
vie, foyer pour travailleur
handicapé vieillissant), soit
une offre complète dans
le domaine de la prise en
charge du handicap.
100 personnes sont
nécessaires à son
fonctionnement.
La capacité d’accueil est
de 300 personnes.
© Yves Cousson/INRS
En jouant la carte de l’innovation, l’Établissement
et service d’aide par le travail (ESAT) de SainteMenehould (Marne) a démontré que la gestion
du handicap et l’application d’une politique
de prévention ambitieuse pouvaient aller
de pair. C’est même un atout quand il s’agit
de conduire les personnes sur le chemin de
l’autonomie sociale et professionnelle.
Le moniteur, sensibilisé
à la prévention, doit ensuite
aménager des séances
d’apprentissage.
dure la crise. Le rôle de l’association est de faire accéder
des personnes handicapées,
momentanément ou durablement incapables d’exercer une
activité professionnelle dans
le secteur de production ordi­
naire ou en entreprise adaptée, à une structure protégée
et à des conditions de travail
aménagées ainsi qu’à une
vie sociale et professionnelle.
« Nous nous efforçons de les
faire s’épanouir dans une structure qui peut être un tremplin
vers l’autonomie sociale, expli-
que Philippe Destrez, directeur
de l’association Élan argonnais
(Cf. encadré). Une évaluation
continue portant sur les aptitudes intellectuelles et motrices,
les aptitudes à la vie sociale et
les aptitudes au travail permet
de mesurer avec objectivité la
progression mais aussi de prévenir la régression de la personne, d’ajuster les prises en
charge et de valider les potentiels qui conduisent à la recherche d’une intégration en milieu
ordinaire. »
Grégory Brasseur
Photos : Yves Cousson
© Yves Cousson/INRS
Les ateliers de l’ESAT
de catégorie 3 par l’Union
européenne n’a jamais eu sa
place en boutique… On lui a
préféré un procédé écologique,
mettant en œuvre des produits
lessiviels. C’est le premier pressing géré par un Établissement
et service d’aide par le travail à
fonctionner de la sorte. Il a été
ouvert sous forme d’un magasin classique de centre-ville,
ce qui constitue un élément
d’intégration déterminant.
Tant en matière d’activité que
de prévention des risques, il
est important que les personnes travaillant à l’ESAT soient
considérées « comme tout le
Les circuits de linge sale et de linge
propre ne se croisent jamais.
Ci-contre, des sas intermédaires
sont accessibles par des portes
automatiques.
monde ». Chaque semaine, une
personne de l’ESAT est conviée
à une réunion de temps de
parole. Elle s’exprime sans son
encadrant sur ce qui va et ne va
pas dans l’atelier. « C’est valorisant pour eux et entre dans le
cadre de la protection des salariés fragi­lisés », insiste Jean-Luc
Bourdon.
Autonomie sociale
et professionnelle
Des temps de soutien peuvent
également être aménagés
quand la personne ne va pas
bien ou qu’un événement la
perturbe au cours du travail.
Un éducateur spécialisé, une
psychologue ou un éducateur
sportif a pour mission de la
prendre en charge dans un
espace neutre le temps que
Espaces verts (3 encadrants, 12 à 18 opérateurs) :
• Agrément pour l’application de produits phytosanitaires.
• Formation de l’encadrement et des personnes sur les dosages
et l’utilisation des produits phytosanitaires.
Atelier peinture (2 encadrants, 8 personnes) :
• Prévention du travail en hauteur, montage d’échafaudage.
• Action risque chimique.
Restauration (3 encadrants, 8 opérateurs) :
• Conception d’une cuisine aux normes.
• Travail avec l’inspecteur du service d’hygiène.
L’ESAT sert 350 repas par jour, livre les établissements
de l’association ainsi que des collectivités et entreprises
locales…
Sous-traitance industrielle (4 encadrants, 40 à
50 personnes) :
• Travail avec un ergothérapeute sur les postes assis.
• Action gestes répétitifs et TMS (suivant les capacités et
le temps d’apprentissage, les personnes ont la possibilité de
tourner sur les différents postes. La limite est de ne pas prendre
le risque de mettre quelqu’un en échec).
• Travail sur l’hygiène.
Blanchisserie/pressing (4 encadrants, 16 opérateurs) :
• Respect de l’asepsie pour une hygiène biologique parfaite.
• Modernisation des équipements.
• Ouverture d’un pressing écologique sans perchloroéthylène.
Distribution de livrets de formation pour l’ensemble
des activités.
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