Mouche de l`olivier Des solutions en perspective, applicables en bio

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Mouche de l`olivier Des solutions en perspective, applicables en bio
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Mouche de l’olivier
Des solutions en perspective,
applicables en bio
La mouche de l’olivier est bien le principal souci des oléiculteurs… Avec un hiver 2006 particulièrement doux,
la récolte 2007 a parfois été fortement altérée, notamment en bio. Mais de nouveaux traitements, naturels,
déjà employés ou encore en phase de test, promettent des jours meilleurs.
■ « Bien sûr que la mouche de
l’olive est présente, même ici à
450 m d’altitude ! », déplore
Richard Favre, oléiculteur pluriactif
implanté non loin du petit bijou de
village qu’est Bonnieux, dans le Vaucluse, sous la « forêt des cèdres ». Si
l’arboriculteur, « bio dans l’âme,
mais pas encore sur le papier » n’est
pas à plaindre en termes de localisation, d’exposition, de climat et de ressources naturelles, le principal
problème reste celui de la mouche de
l’olivier, comme pour de nombreux
autres oléiculteurs, présents ce jour-là
à l’occasion d’une journée technique
organisée par le Groupement de
recherche en agriculture biologique
en Avignon.
La solution pour combattre la
mouche ? Richard Favre s’interroge
toujours. Il n’a pas traité cette année et
il a récolté des olives piquées, car
l’automne a été long et favorable à la
mouche. Il souhaite mettre en place la
technique du piégeage, ne serait-ce
que pour faire du comptage. Même si
cette solution, déjà bien connue, donne
satisfaction, d’autres issues existent.
Certaines sont déjà applicables,
d’autres sont testées et promettent de
bons résultats.
F. RABUT/PIXEL IMAGE
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Piégeage massif :
intéressant sur
un parcellaire « isolé »
Technique déjà bien connue, le piégeage se réalise avec des attractifs
alimentaire, sexuel (phéromones) ou
chromatique (couleurs attractives).
François Warlop du Grab précise que
cette technique est intéressante dans
le cas de Richard Favre car le parcellaire est isolé de toute autre exploitation, ce qui limite les risques d’att r a c t i o n d e s p a r c e l l e s vo i s i n e s .
L’utilisation est en revanche « dangereuse » sur des petites parcelles de
moins d’1 ha, surtout en présence
d’autres vergers non protégés. Cette
méthode reste partiellement efficace,
Parcelle d’oliviers
de Richard Favre,
orientée sud-est
et à l’abri
de toute pollution
(verger isolé).
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étant donné que la mouche a un cycle
qui s’étend de mai à novembre (avec
3 générations, on arrive à des effectifs importants à l’automne). En complément, le pâturage des troupeaux
juste après la récolte (pratiqué par
Richard Favre) est utile, car outre
l’apport en matière organique et l’entretien du couvert végétal, les troupeaux consomment des olives et donc
les larves peuvent encore s’y trouver.
La volaille joue ce même rôle et
constitue par conséquent un allié
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important du producteur ! Une action
mécanique sous les arbres peut aussi
gêner les pupes dans le sol, mais son
action semble plus limitée.
Insecticides
naturels testés
L e S p i n o s a d , m a t i è r e a c t ive d u
Synéis ® est un insecticide naturel
homologué depuis 2006 sur mouche
de l’olive, mais non encore autorisé
en bio. Le traitement est localisé (sur
pomme, olivier…), ce qui nécessite
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Repères
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Dégustation de l’huile d’olive
vierge extra « La récolte
des amis », dont les olives
ont été pressées il y tout juste
un mois et demi.
1/4 H Plantin/Pomme Sival
▼
du matériel d’application adapté
(pour faire de grosses gouttes). Le
traitement est limité à 4 applications
pour freiner l’apparition de résistances à la molécule et nécessite une
utilisation préventive, si l’on veut être
vraiment efficace. La filière espère
une autorisation prochaine en bio
(démarches en cours par la firme), les
résultats obtenus sur les parcelles
étant plutôt concluants.
L’EXPLOITATION
DE RICHARD FAVRE
Oliveraie de Richard Favre : terrain riche en matière organique (bergerie
auparavant installée), orienté sud-est à 450 m d’altitude, parcelles à l’abri
de toute pollution. Sol : argiles, limons.
➜ 7 ha d’oliviers en conduite biologique (mais non certifiés), plantés
entre 1998 et 2001. Variété dominante : Aglandau. Production AOC.
➜ Pas d’irrigation, pas d’enherbement.
➜ Plan de fertilisation : analyses de sols tous les deux ans effectuées avec
un bureau d’études. Vergers parfois pâturés, fumier récupéré et composté,
en apport régulier. Complément avec de l’Orga 3 (3-2-3 + 4 MgO), à raison
d’1 kg par arbre sur les jeunes arbres. Analyses foliaires (détection
de carences) : complément avec du Protaminal.
➜ Contre les problèmes de brunissement des olives : sulfate de calcium
au niveau du sol, eau oxygénée en foliaire. Bilan jugé « plutôt très positif ».
➜ Récolte : 1,3 t en 2007 (une partie du verger taillée donc non
productive) ; 3.5 t en 2006. Cueillette manuelle (pour l’instant).
Matériel à tester (témoignage) : pelikan, très adapté pour les petits
arbres (passage sous les arbres avec un filet de 2 m de large).
➜ Vente directe exclusivement, et en totalité. La commercialisation
s’effectuant dans de bonnes conditions, Richard Favre prévoit d’agrandir
son verger de 2 000 arbres.
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Zoom
LE POINT SUR LES TRAITEMENTS AUTORISÉS
En 2007, « beaucoup d’insecticides chimiques ont disparu et on assiste
à une avancée en termes d’application localisée », indique Célia Gratraud, technicienne oléicole à l’Afidol.
Voici un aperçu des techniques et traitements autorisés aujourd’hui en agriculture conventionnelle et probablement à l’avenir (horizon 2010).
Contre la mouche :
➜ insecticides chimiques : deltaméthrine, diméthoate, lambda-cyhalothrine ;
➜ insecticide spécifique pour une application localisée : spinosad (demande en AB).
➜ insecticide chimique : fénoxycarbe ;
➜ mesures prophylactiques (taille…) ;
➜ auxiliaires naturels : Metaphycus species, Scutellista.
Contre la teigne :
➜ insecticide biologique : Bacillus Thuringiensis à la première génération.
Et pour 2010 ? :
Avec le plan de réduction des matières actives chimiques, il ne devrait plus rester
que la deltaméthrine contre la mouche. L’Afidol recherche une alternative au diméthoate. À ajouter : insecticides
biologiques (argiles, spinosad), lâchers de Psyttalia lounsburyi, techniques couplées ou non à du piégeage massif.
Pour la cochenille et la teigne, il ne devrait pas y avoir d’évolution notoire.
À noter que d’autres travaux de lutte
biologique, initiés par l’Inra, démarrent dès 2008. Il s’agit de travaux de
lâchers de Psyttalia lounsburyi,
insecte parasite importé d’Afrique
par l’EBCL 1. Il reste à savoir si la
petite guêpe africaine s’implante bien
dans nos conditions climatiques (et si
elle atteint un niveau de parasitisme
satisfaisant).
Elle attire essentiellement un parasite
de la mouche de l’olive qui se développe aussi sur la mouche de l’Inule !
Il est souhaitable d’essayer de l’implanter entre deux rangs, pour un verger assez large. Des semis en bandes
florales (50 espèces) ont démarré en
2004 sur un réseau de vergers, afin
d’évaluer si elles peuvent attirer des
insectes capables de limiter les populations de ravageurs.
L’association de plantes
favorise les luttes
Les argiles
disponibles en 2009 ?
Le principe de l’agroécologie n’est
pas nouveau, encore faut-il trouver la
bonne plante qui hébergera un hôte
prédateur de la mouche. Sur ce sujet,
l’Inule (Inula viscosa) donne de bons
résultats, indique François Warlop.
Tous les oléiculteurs en ont entendu
parler, mais pour l’instant les argiles
sont interdites en France pour une
utilisation phytosanitaire sur olivier
(mais elles sont autorisées sur poirier
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par exemple). Il s’agit essentiellement de kaolinite. Employée aux
États-Unis (d’abord contre les coups
de soleil) et ayant montré une bonne
efficacité sur ravageurs (psylle du
poirier, pucerons…), l’idéal est d’appliquer l’argile sur les oliviers à partir de mai jusqu’à la récolte, à raison
de 30 kg par hectare. En France, deux
argiles (une américaine et une française) sont testées. « Les résultats
sont prometteurs », relève François
Warlop. « Avec 5 à 8 traitements et
un pulvérisateur assez puissant et
bien réglé, on arrive à de bons résultats ». La preuve en est qu’avec un
test en 2007 sur un champ non traité,
90 % de la récolte a été abîmée,
contre 20 % avec traitement par de
l’argile. Celle-ci n’engendre aucun
résidu toxique (ceci est bon à savoir
pour les olives de tables, qui mériteront toutefois un lavage exhaustif !),
et n’empêche pas la photosynthèse
(couche poreuse, mais perméable). Il
est nécessaire que le verger soit toujours blanc pour repousser les
mouches, et pour que la couche argileuse déposée les empêche de
pondre.
Seule incertitude, on ne peut pas
pour l’instant évaluer correctement
le coût de l’utilisation des argiles,
puisqu’en France la matière est
toujours interdite. Néanmoins, pour
une argile américaine à 1,70 euro/kg,
sachant qu’il faut effectuer 10 traitements et en passer 30 kg/ha, le calcul
est vite fait…
Florence Rabut, remerciements
à François Warlop, du Grab Avignon
(1) : www.ars-ebcl.org