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AVANT-PROPOS "Contrairement à un préjugé fort répandu et dont la source est l'école, le théâtre n'est pas un genre littéraire. Il est une pratique scénique." Anne Ubersfeld Comment une telle accusation pouvait-elle ne pas provoquer, chez la jeune enseignante que je suis, un sursaut d'indignation et le désir de me pencher sur ce problème de l'étude d'un texte théâtral en classe de seconde pour mettre à jour les questions que cela ferait naître ? Intention d'autant plus facile à mettre en oeuvre que l'époque au programme de français en classe de seconde accorde une large place aux oeuvres théâtrales. Mais s'agit-il d'aborder un texte de théâtre exactement de la même façon qu'on peut appréhender une fiction romanesque - même si certaines conventions sont semblables - à l'intérieur d'une rubrique "lectures suivies et dirigées" ? Il est certain que la tentation est grande de vouloir faire apprécier aux élèves la vertu littéraire des oeuvres de nos Molière, Corneille, Racine. Or, il n'est de théâtre qu'au sein d'une réalité vivante dont la finalité réside dans la représentation scénique. Il est remarquable que les pièces de Molière soient au programme d'enseignement des collèges et des lycées (une par année). Cependant, depuis près de cent ans, la conception et la pratique de ce théâtre sont en perpétuelle évolution, ce qui engendre forcément de nouvelles lectures, de nouvelles propositions de mises en scène dont les auteurs (Jouvet, Vilar, Planchon, Vitez, Mnouchkine) ont acquis une notoriété indéniable et qui resituent le problème autour du rapport entre le texte et sa représentation. L'enseignement du français est-il si détaché du contexte historique, qui le conditionne pourtant, qu'il n'introduise pas ses réflexions au coeur de sa pratique ? La lecture des Instructions Officielles manifeste l'intérêt porté au texte théâtral et à ce qui lui est propre. Ainsi dans la partie consacrée à la lecture méthodique, il est déclaré : "Dans le cas, par exemple, d'un texte de théâtre (y compris les didascalies) la lecture méthodique n'oublie pas que le 1 théâtre n'est pas seulement un genre littéraire : il est un art du spectacle et une pratique scénique. Le professeur prend en compte les déterminations, structures et modes de fonctionnement propres au discours théâtral ainsi que les procédures spécifiques du langage dramatique." Il s'agira donc pour moi, et ce sera l'objet de ce mémoire professionnel, dans le cadre de l'étude d'une oeuvre intégrale, L'Ecole des Femmes de Molière, de prendre en compte à la lumière des nouvelles perspectives mues par les auteurs de théâtre et les metteurs en scène eux-mêmes et intégrées dans les Horaires, Programmes et Instructions, de donner aux élèves des notions sur ce que peut représenter une pièce de théâtre sans son mode de fonctionnement à la fois dramaturgique et scénique. Cet objectif est construit avec l'espoir d'initier, d'inciter des élèves, pas ou peu expérimentés dans ce domaine, à ouvrir les portes d'horizons nouveaux, avec l'espoir que le texte théâtral qui leur sera proposé ne soit pas uniquement l'objet d'une étude linéaire et mutilante mais qu'elle permettra, au sein de la classe, un développement de l'expression et de la communication, une autre connaissance des élèves, une occasion d'ouvrir l'école sur l'extérieur, par l'intervention d'autres partenaires, et la découverte non réservée à quelques heureux de ce que peut être une vraie représentation théâtrale. Le projet sera élaboré avec une classe de seconde du lycée Albert Châtelet, lycée de centre ville, réputé et convoité. L'analyse préalable menée sur les élèves arrivant des collèges environnants, ayant donc des contenus et des conditions d'enseignement du français très divers, nécessaire sans doute à la compréhension des succès et des échecs de l'entreprise, portera sur l'état de leurs connaissances ou de leur éventuelle pratique théâtrale scolaire et extra-scolaire. Ainsi, ayant dégagé quelques éléments de conclusion à partir des questionnaires fournis, nous pourrons sans doute mieux adapter la stratégie de la séquence d'enseignement. L'analyse est menée avec l'aide d'un professeur de collège, dont le travail sur le théâtre dans ses classes de troisième permet de mieux cerner les thèmes abordés. 2 I - RAISONS JUSTIFIANT LE CHOIX DE CETTE OEUVRE INTEGRALE 1) EN FONCTION DES INSTRUCTIONS OFFICIELLES La classe de seconde, est-il spécifié dans les instructions officielles, représente souvent une rupture avec les classes de collège. De là découle sa spécificité : c'est une classe "d'approfondissement et d'ouverture 1". Le choix d'une oeuvre théâtrale de Molière ne déroute pas les élèves habitués à en étudier une chaque année ou presque et la qualité ainsi que la difficulté de L'Ecole des Femmes permettent un véritable approfondissement de l'étude des lois régissant le genre théâtral. Cette oeuvre permet d'allier "perspectives historiques 2" de lecture, évocation "d'un environnement humain et culturel, voire de la vie quotidienne, autant que les circonstances économiques et politiques, sans négliger les codes et les conventions littéraires de l'époque 3". 1 . Instructions officielles des classes de seconde et première, p. 13. 2 . Ibid., p. 16. 3 . Ibid. 3 2) EN FONCTION DE LA PIECE ELLE-MEME L'Ecole des Femmes est la première grande comédie en cinq actes de Molière. Elle constitue donc un moment essentiel de l'histoire du théâtre français qui fait se rencontrer "la création d'un genre, la grande comédie classique, et l'affirmation d'un génie particulier, celui de Molière, auteur, acteur, et metteur en scène 4". Molière, qui jusque-là s'était essayé à la tragédie et au genre sérieux, sans aucun succès aux yeux de ses contemporains, propose une pièce écrite en vers, dont le thème basé sur les topoï de la farce traditionnelle relève encore davantage la complexité et l'ambiguïté du rôle du personnage principal : Arnolphe. Outre les reproches faits à Molière par ses pairs à propos de la cohérence du personnage, de l'unité de lieu, qui viennent enrichir une connaissance de la comédie et de ses principes, le débat très ancien sur l'interprétation de L'Ecole des Femmes peut favoriser une véritable discussion au sein de la classe. Les élèves seront-ils sensibles au jeu pathétique, voire tragique que l'on donna à Arnolphe dès le XIXème siècle ? Feront-ils d'Arnolphe un personnage digne de pitié, de sympathie ou au contraire retrouveront-ils les racines comiques et farcesques du personnage ? Feront-ils d'Agnès une vraie innocente ou une rusée ? On voit que l'histoire de la pièce elle-même, de la critique qui l'accompagne ainsi que des mises en scènes de Jouvet, Vitez, celle de la Comédie Française où Jean Le Poulain jouait le rôle-titre et la production télévisée avec Bernard Blier peuvent justifier et susciter la réflexion entreprise avec les élèves à propos de l'interprétation théâtrale. On peut ainsi à juste titre ne pas s'enfermer dans l'étude exclusive du texte mais prendre en compte tous les éléments signifiants du théâtre. 3) EN FONCTION DU GROUPE-CLASSE L'établissement dans lequel se situe la classe est un lycée d'enseignement général dont le recrutement est essentiellement urbain. Un effectif de 1250 élèves y est accueilli. Le lycée possède des classes préparatoires scientifiques, littéraires et commerciales. Les classes sont regroupées par options. Une classe de première d'adaptation est destinée à d'anciens élèves des classes de BEP qui désirent poursuivre leurs études dans l'enseignement général. La classe de seconde 5 compte 36 élèves, dont 26 viennent du collège Châtelet et 10 des collèges environnants. 6 élèves doublent leur classe. Les langues étudiées sont l'anglais en LV1, l'espagnol ou russe en LV2. 4 . Ecole des Lettres, 1er juin 1993, n° 13. 4 Les options choisies sont SES pour toute la classe, latin pour 12 élèves, latin et grec pour un élève, arts plastiques pour un élève. De quelle nature est l'expérience théâtrale des élèves de seconde 5 ? Un simple questionnaire nous en donnera une idée : Quelles pièces avez-vous étudiées les années précédentes ? Pièces citées : Le Médecin malgré lui ; Les Fourberies de Scapin ; L'Avare ; Le Bourgeois Gentilhomme ; Les Femmes savantes ; Le Cid. Avez-vous déjà assisté à une représentation théâtrale ? a) dans le cadre de l'école : 20 élèves sur 36 ont assisté à une représentation théâtrale en matinée scolaire ou dans le cadre d'un club théâtre présentant son spectacle à l'ensemble du collège. b) dans le cadre familial : 2 élèves sur 36 ont assisté à une représentation théâtrale avec leur parents. Une dizaine d'élèves ont assisté à une retransmission ou adaptation télévisée telles : Les Fourberies de Scapin, Georges Dandin ou Hamlet. Avez-vous eu l'occasion de "faire du théâtre" ? 20 élèves se souviennent avoir joué dans les classes de sixièmecinquième des extraits de comédies de Molière. 2 ou 3 élèves ont fait partie d'un club théâtre. On remarque donc : que tous ont "lu" une pièce de théâtre ; mais n'y a-t-il pas antinomie entre les caractéristiques de ce genre littéraire et l'activité de lecture nécessitée par les contraintes scolaires ? Il est difficile de s'imaginer spectateur à partir de son expérience de lecteur. que l'expérience de certains pourra servir et être utilisée dans le courant de la séquence afin que le dialogue s'instaure entre élèves et non pas seulement dans le sens unique professeur-élèves. que de nombreuses pièces de Molière sont connues. On ne part donc pas de rien à propos des thèmes et des pratiques théâtrales de l'auteur même si de nombreux points seront à préciser. 5 II - CONSTRUCTION DE LA SEQUENCE 1) QUELS SONT LES OBJECTIFS CHOISIS ? a) Allier l'étude des signifiants textuels et non textuels Il s'agit en effet d'intégrer les diverses dimensions du texte de théâtre à la réflexion didactique. On trouve dans les Instructions Officielles des classes de première des éléments pour cette étude : "Le professeur prend en compte les déterminations, structures et modes de fonctionnement propres au discours théâtral ainsi que les procédés spécifiques du langage dramatique. Il peut notamment étudier l'ordre d'entrée en scène des personnages, les rapports de force, la dynamique du jeu, la répartition des espaces de paroles, les diverses situations et formes de dialogues, la distribution et l'enchaînement des répliques, la double (ou multiple) destination de la parole théâtrale, la présence et la fonction des personnages muets, etc. 5" On y ajoutera une étude sémiologique de la gestuelle et de l'espace car la structure du théâtre n'est pas réductible aux seuls modes d'analyse conçus pour le récit. Comme l'écrit André Helbo : "Un texte représenté, la question se pose de déterminer l'influence du système verbal au sein de la représentation 6." Le texte peut paraître comme premier, élément éternel et cela particulièrement dans le cas du théâtre classique or "il ne faut pas perdre de vue que la spatialisation d'un contenu conceptuel entraîne une altération de celui-ci. 7" Il s'agit donc d'éviter une lecture rhétorique du texte théâtral mais plutôt de "trouver les procédures pour décrire l'investissement permanent de créativité qui le fomente 8". 5 . IO classes de seconde, première, terminale, p. 31. 6 . André HELBO, Les Mots et les Gestes. 7 . Ibid. 8 . Ibid. 6 b) Construire un sens par les instruments de la lecture méthodique Justification de l'utilisation de la lecture méthodique L'objectif est ici de rendre les élèves partenaires autant que faire se peut du projet qui guidera l'étude. Il s'agit d'éviter les traditionnelles séances qui se suivent et se ressemblent et risquent d'aboutir à un enlisement dans des questions d'ordre psychologique ou moral, à un monologue unilatéral dispensant un savoir extérieur à l'élève et finalement au texte. Il faudrait plutôt développer "un pouvoir-lire et un pouvoir-dire très concrets sur lequel il deviendra possible de construire, d'induire d'autres remarques, d'autres travaux 9". Ainsi les élèves pourront peut-être maîtriser un objet, une pièce structurée avec rigueur répondant aux règles et aux conventions de la grande comédie. La lecture est une entreprise de construction de sens comme le rappelle sans ambiguïté cette phrase des IO de première (1988) : "Il va de soi qu'une signification n'est pas donnée ni à donner d'avance, qu'une interprétation se cherche et se construit dans le contact permanent avec le texte." Cette construction se bâtira sur la culture, l'expérience, la personnalité des élèves et, comme l'ajoute G. Langlade, "cette activité de construction de sens des lecteurs est elle-même le produit du fonctionnement du texte 10". Le schéma proposé par cet auteur, et dont je retiendrai quelques termes marquant les étapes du travail de lecture, manifeste le caractère évolutif et actif de la réflexion demandée aux élèves : - Identification-mobilisation ; - Construction de sens ; - Explicitation ; - Fixation ; - Réalisation ; - Réinvestissement. Notions à acquérir - Prise de conscience du schéma de la communication et de la double destination de la parole théâtrale ; - Approfondissement de la connaissance des codes théâtraux : scène d'exposition, répliques et didascalies, rythmes et structures de la pièce ; - Le personnage de théâtre ; - Le schéma actantiel ; - Le langage de la comédie et de la farce ; - Notions de mise en scène. 9 . Jean-Michel ADAM, Lire en quatrième, Larousse. 10 . Gérard LANGLADE, L'Oeuvre Intégrale, tome 1, CRDP Toulouse. 7 2) DEROULEMENT DES SEANCES Séance n° 1 : Test de lecture, le schéma actantiel. Séance n° 2 : Portrait d'Arnolphe Hypothèses de lecture proposées par les élèves à partir de l'analyse du portrait. Séance n° 3 : La scène d'exposition Lecture méthodique de l'acte I, scène 1 : "Et que prétendez-vous qu'une sotte... Je ne vous dis plus un mot." Séance n° 4 : Le personnage d'Agnès 1) Un personnage comique (vu par Arnolphe) : Un personnage en dehors de la norme par sa naïveté, son ingénuité. Lecture méthodique de l'acte I, scène 1 : "Chacun a sa méthode... On me doit condamner." Séance n° 5 : Le personnage d'Agnès 2) Un personnage en quête du bonheur. Lecture méthodique de l'acte II, scène 5 : La première découverte de l'amour. Séance n° 6 : Le personnage d'Agnès 3) Agnès, une femme d'esprit ? Vue par Horace. étude de l'acte III, scène 4. 4) Agnès, une femme qui impose ses désirs : étude de l'acte V, scène 4. Séance n° 7 : Deux exposés d'élèves suivis d'une reprise. 1) Condition et éducation de la femme au temps de Molière à partir de l'étude des "Maximes". 2) La farce dans L'Ecole des Femmes. Séance n° 8 : Arnolphe, du type à la parodie burlesque 1) Lecture méthodique de l'acte III, scène 5 : monologue d'Arnolphe découvrant son amour. Séance n° 9 : Arnolphe, du type à la parodie burlesque 2) Lecture méthodique de l'acte IV, scène 1 : nouveau monologue d'Arnolphe exprimant encore son amour mais aussi son impossibilité à faire évoluer ses sentiments. Séance n° 10 : La scène de dénouement Projection du film L'Ecole des Femmes dans la version de la Comédie Française avec Bernard Blier et Isabelle Adjani, suivie d'une discussion. Utilisation de deux séances de modules 1) Exercices concernant la respiration, l'articulation, l'intonation, le volume, aboutissant à la lecture d'une tirade de l'acte III, scène 2. 2) Propositions par les élèves de mises en scène sur l'acte IV, scène 1 et application. Prolongements Exposés sur l'espace théâtral antique, élisabéthain, classique, contemporain ainsi que sur la connaissance de quelques metteurs en scène. 8 J'ai essayé de respecter le nombre de séances imparti par les I. O. Le travail en début de séquence fut assez lent car on était en début d'année et il était nécessaire de passer du temps à l'aide méthodologique. La prise de notes, la vérification individuelle des cahiers, des réponses aux questions sont autant de passages obligés lors du premier trimestre qui permettent aux élèves de se raccrocher à des activités familières mais sur lesquelles il est bon d'insister. D'autre part, j'ai choisi un rythme de deux ou trois séances par semaine afin de ne pas diluer l'étude dans le temps. Ainsi les élèves pouvaient plus facilement se servir du cours précédent dans la mesure où il était rapproché. 9 III - ANALYSE DE LA MISE EN OEUVRE PEDAGOGIQUE ET DU PROCESSUS D'APPRENTISSAGE 1) L'ENTREE DANS L'OEUVRE a) Le schéma actantiel Afin d'éviter un questionnement vague, qui aurait débouché sur des remarques impressionnistes, j'ai préféré faire le lien avec une recherche qui leur était familière : celle du schéma narratif appliqué au théâtre, c'est-à-dire la reconnaissance des forces qui s'affrontent dans l'histoire. Les élèves ont d'abord travaillé sur de simples étiquettes qu'ils devaient remplir en indiquant le nom des personnages principaux et les relations sociales et familiales qui les unissaient. Puis on s'est efforcé d'élargir le champ de réflexion en montrant que plusieurs personnages pouvaient jouer 10 un même rôle dans la pièce. Ainsi, Alain et Georgette, l'innocence d'Agnès, l'étourderie d'Horace sont des adjuvants au désir d'Arnolphe. Mais ils peuvent également être opposants : Horace, par la force de son amour, Agnès, par sa recherche naturelle du bonheur. La notion d'actant apparaît ainsi et le schéma suivant est proposé par les élèves : Destinateur : volonté de se marier de peur d'être cocu Destinataire : Sujet : Arnolphe Adjuvants : Alain et Georgette l'innocence d'Agnès l'étourderie d'Horace lui-même Objet : Agnès Opposants : la force de l'amour la recherche naturelle du bonheur par Agnès L'intérêt est de construire avec les élèves "un schéma de l'action"11 qui repère d'emblée ce qui fait agir les personnages. On évite également tout développement psychologique et statique sur les personnages car l'accent est mis sur le couple central et la dynamique qui les unit. "La flèche exprime littéralement un "mouvement" qui passe du sujet vers l'objet et qui peut prendre des formes aussi diverses que l'amour, l'appropriation, la destruction. 12" Les élèves n'ont aucun mal à déterminer le sujet, l'objet, les adjuvants, les opposants lorsqu'il s'agit du nom des personnages. En revanche, la tâche est plus ardue lorsqu'il faut identifier des éléments abstraits tels l'innocence d'Agnès ou sa recherche naturelle du bonheur. Quant au couple destinateur-destinataire, il est nécessaire d'éclaircir le vocabulaire en posant deux questions : destinateur : à cause de qui ou de quoi le sujet agit-il ? destinataire : pour qui ou pour quoi le sujet agit-il ? L'avantage de cette réalisation est qu'elle amène les élèves à étudier la liste des personnages, qui apporte un certain nombre d'informations. Outre le nom et le prénom, elle indique le statut social. La question de la justification de l'ordre dans lequel ils sont nommés étant posée, les élèves remarquent à juste titre que ce n'est pas celui de l'entrée des personnages ni même celui d'une hiérarchie sociale de l'époque de Molière. La liste 11 . M. DESCOTE, J. JORDY, G. LANGLADE, Le Projet pédagogique en français, CRDP Toulouse, p. 161. 12 . J. -P. RYNGAERT, Introduction à l'analyse du théâtre, Bordas. 11 reconstitue en fait le trio traditionnel : le barbon - la jeune amante - son amant (au sens du XVIIème siècle). L'adjectif "innocente" accolé au nom d'Agnès pose problème aux élèves. Certains y verront un synonyme de naïve, d'autres, latinistes, y retrouveront l'héritage étymologique "sans connaissance" et feront parfaitement le lien avec le titre L'Ecole des Femmes. Agnès, dont on n'avait pas encore parlé prend le devant de la scène et d'objet qu'elle était, elle devient sujet en quête du bonheur avec Horace. Arnolphe, représentant de l'idéologie dominante de son époque, devient le suprême opposant. Les élèves prennent conscience de la complexité des enjeux qu'aurait pu masquer la simple narration de l'intrigue. Cela éveille leur curiosité, car tout n'est pas donné d'avance, ils ont le sentiment qu'une signification est à construire et constitue leur première attente de lecture. b) Analyse des modes d'existence et de caractérisation d'un personnage Arnolphe Etude sur l'ensemble de l'oeuvre On ne peut nier que les enjeux définis précédemment sont complexes et des élèves pouvant se décourager, j'ai trouvé bon de revenir aussitôt après à une recherche plus concrète. Je me suis inspirée du procédé de la lecture tabulaire, sans toutefois systématiser le principe et sans proposer un tableau exhaustif. Le choix des indications à relever aurait été opéré de façon autoritaire et un travail long et fastidieux n'aurait trouvé que difficilement justification aux yeux des élèves. Aussi me suis-je contentée, m'inspirant des quelques questions proposées dans L'Oeuvre Intégrale de G. Langlade, à propos de L'Illusion Comique, de leur demander de définir l'importance du personnage par un compte du nombre de scènes dans lesquelles figure Arnolphe, d'analyser son temps de parole par rapport à celui d'Agnès, d'examiner par une étude des temps verbaux si le personnage a l'initiative ou non de la parole et de l'action. Les résultats caractéristiques sont clairs : Arnolphe est présent dans trente et une scène sur trente-deux et donc dans tous les actes. Il est, de plus, le seul à monologuer : sept monologues. Agnès est présente dans neuf scènes : les élèves remarquent rapidement l'évolution qui se fait : - A. I, sc. 3 : Questions d'Arnolphe, réponses très rapides d'Agnès. - A. II, sc. 5 : Tirades d'Agnès plus longues mais ne faisant que répéter au style direct sans aucune marque personnelle d'appropriation du discours le récit de sa rencontre avec Horace. 12 - A. III, sc. 2 : Tirades longues d'Arnolphe, Agnès se contente de lire les Maximes. - A. IV, sc. 5 : Après une tirade assez longue, Agnès finit par prendre le dessus. Elle est cette fois dotée d'une parole propre et procède à une énonciation claire et lucide de soi : "Oui, je l'aime". Le duo s'exprime sous forme de stichomythies et est suivi d'une tirade solitaire d'Arnolphe déclarant son amour, à qui, si ce n'est à luimême. - A. V, sc. 9 : Les élèves ne manquent pas de repérer l'absence d'Arnolphe à la dernière scène après un "ouf ! " "euh ! " "quoi ! " selon les éditions. Réflexions sur cette étude Les élèves voient donc d'emblée le problème qui s'exprime sous forme concrète d'un nombre de scènes à compter. Ils prennent conscience qu'il ne s'agit pas de tirer des conclusions basées sur des impressions mais au contraire de s'appuyer sur des indices, de trouver des traces, ce qui évite la confusion personne-personnage. Cette étude du personnage permet également à la classe de feuilleter le livre. Cela leur donne une occasion supplémentaire de se repérer, de manipuler le livre, de trouver un sens à l'intérieur du livre et non à l'aide d'une psychologie extérieure et toujours réductrice. Ce qui ne m'empêchera pas, bien entendu, de signaler aux élèves que le nom d'Arnolphe est lui-même significatif puisqu'il désigne par tradition "le cocu". Mais cette notation culturelle n'intervient qu'après l'analyse de la fréquence des apparitions d'Arnolphe. Agnès La possibilité d'une définition des personnages les uns par rapport aux autres apparaît, notamment pour Agnès pour laquelle les élèves voient avec satisfaction le succès de l'entreprise aux dépens de celle d'Arnolphe et retrouvent une fin dont ils ont l'habitude dans les pièces de Molière étudiées antérieurement. Le couple amoureux est réuni et a su déjouer l'autoritarisme paternel. Cependant, la classe ne semble pas sensible à la différence entre un dénouement tel que celui du Bourgeois Gentilhomme et celui de L'Ecole des Femmes. Un élève rappelle alors que dans le cas du Bourgeois Gentilhomme comme dans celui du Malade imaginaire, le père est dupé et heureux de l'être, tandis qu'Arnolphe n'a devant lui que la vision tragique d'un amour qui lui échappe. Bilan conçu avec les élèves Une pause est nécessaire afin de proposer une synthèse et de mettre en évidence les thèmes apparus. Le rappel est fait par les élèves et la "mise en 13 mots" par moi-même pour donner plus de clarté au propos et préciser l'enjeu technique du débat. Cela permet de vérifier que la classe suit le cours de la réflexion, de lui faire reformuler les attentes de lecture. Nous avons une comédie dont l'un des personnages principaux, Arnolphe, se révèle plus complexe que le simple cocu de la farce ou de la Commedia dell' Arte. Questions : Quelle est la nature de l'évolution constatée chez ce personnage ? En quoi est-il représentant de ce qu'instaure Molière : la grande comédie ? Comment interpréter le rôle ? L'Ecole des Femmes n'est pas simplement l'histoire d'Arnolphe mais d'un rapport de force entre une idéologie dominante et le désir de naître à la vie d'une femme. Comment Agnès incarne-t-elle ce dernier point ? Quelques objections a posteriori L'étude s'est faite à partir du couple Arnolphe-Agnès et a laissé dans l'ombre les autres personnages de la pièce. Nous n'avons pas constitué à proprement parler un "système des personnages" comme le préconise Anne Ubersfeld dans Lire le Théâtre ou de façon plus imagée chez Richard Monod "une constellation de personnages, microcosme structuré dans lequel ils sont totalement interdépendants". Préférant ne pas éparpiller les données, j'ai écarté de l'étude préalable les personnages de Chrysalde, d'Horace, d'Alain et de Georgette. L'opposition complexe entre Chrysalde et Arnolphe est étudiée dans le courant des séances. Si des attentes de lecture ont été formulées à propos des personnages et de l'intrigue, tout en essayant de respecter la spécificité du genre théâtral, je n'ai pas fait porter l'attention des élèves au début de l'étude sur le genre de la comédie. On aurait pu mobiliser les connaissances acquises sur le théâtre, celui du XVIIème en particulier, dans les classes antérieures et faire situer la comédie sérieuse entre la farce traditionnelle et la tragédie. Or, dans ma séquence, cette notion fut amenée de façon magistrale. Autres stratégies d'entrée dans l'oeuvre (paratexte) La première lecture fut solitaire puisque j'ai donné le texte à lire trois semaines à l'avance sans imposer de questionnaire préalable. Ce choix fut guidé par la grande pratique de lecture de la plupart des élèves. Or la découverte personnelle d'une oeuvre littéraire et a fortiori théâtrale ne va pas forcément de soi. Aussi aurait-on pu travailler davantage sur le paratexte, étudier notamment les différentes illustrations des éditions dont disposaient les élèves. Elles sont riches en indices et leur confrontation permet d'entrer directement dans le problème de la représentation et de l'interprétation. Y a-t-il un décor ? Quels personnages sont représentés ? 14 L'édition classique Larousse ancienne présente Arnolphe et Agnès avec un jeu de regards divergents alors qu'une édition plus récente propose un dessin d'Agnès, un bandeau sur les yeux qu'elle tente d'enlever. Comme le signale G. Langlade 13, "les activités sur le paratexte auctorial, éditorial et critique permettent de faire apparaître les diverses représentations associées par les élèves à l'oeuvre, à son auteur, à son époque... et favorise ainsi l'identification de "l'objet à lire". Elles stimulent l'élaboration d'attentes de lecture en favorisant la mobilisation des savoirs sur les oeuvres littéraires et d'expérience de lectures antérieures." 2) LECTURE METHODIQUE D'EXTRAITS : QUELS OBJECTIFS ? QUELS INSTRUMENTS ? Après avoir fait travailler les élèves sur l'ensemble de l'oeuvre afin d'en repérer les structures, il semblait normal et essentiel d'étudier quelques extraits. "Mise au service de la saisie de l'oeuvre dans sa globalité, la lecture méthodique d'extraits s'avère très féconde, tant pour favoriser sa lecture que pour donner des prises à son étude."14 a) Les principes qui ont guidé ma démarche Je relèverai quelques éléments du chapitre : "Qu'est-ce qu'une lecture méthodique ?" des Horaires, Programmes et Instructions de classes de seconde. Ce qu'elle tend à mettre en oeuvre. : - L'observation objective, précise, nuancée des formes ou des systèmes (grammaire, morphologie, syntaxe, lexique, champ lexical, sémantique, énoncé et énonciation, images, métaphores et métonymies) ; - L'analyse de l'organisation de ces formes et la perception de leur dynamisme au sein du texte ; - La construction progressive d'une signification du texte à partir d'hypothèses de lecture dont la validité est soigneusement vérifiée ; - La constatation, dans une synthèse, de ce qui fait l'unité complexe et profonde du texte et de l'oeuvre en question. b) La lecture méthodique d'un extrait de la scène d'exposition Justification du choix La scène d'exposition, comme l'incipit romanesque, contient les indices permettant la saisie des hypothèses de lecture. Elle apporte au lecteur, ou 13 . G. LANGLADE, L'Oeuvre intégrale, I, CRDP Toulouse. 14 . Ibid. 15 plutôt au spectateur, des éléments d'information sur l'intrigue, sur les codes théâtraux, le genre comique ou tragique de la pièce. Le choix de cette scène doit permettre aux élèves de vérifier les hypothèses de lecture conçues de façon plus générale, de dépasser le niveau psychologisant de l'explication traditionnelle, grâce à sa position privilégiée dans la pièce, afin de se concentrer sur une dynamique proprement théâtrale. Cette étude doit permettre également une prise de conscience de l'organisation de l'étude telle qu'elle est suggérée pour l'épreuve anticipée de français. Nous pouvons suggérer par exemple : - introduction : situation du texte, attente de lecture ; - lecture expressive à haute voix ; - identification (type-énonciation-sujet) et organisation du texte ; - étude précise des centres d'intérêt privilégiés du texte ; - conclusion : appréciation personnelle. Compte tenu de ce point de vue, toute la scène ne peut être étudiée car elle est trop longue. On laissera de côté les premiers vers qui présentent un dialogue entre Chrysalde et Arnolphe à propos de considérations générales sur le mariage, pour n'en retenir que la dernière partie, du vers 81 au vers 123, où Arnolphe indique à son ami sur quoi il fondera sa méthode : l'infaillibilité d'une méthode qui consiste à refuser à sa femme l'accès au savoir. 16 Acte I, Scène 1 CHRYSALDE Et que prétendez-vous qu'une sotte, en un mot... ARNOLPHE Épouser une sotte est pour n'être point sot. Je crois, en bon chrétien, votre moitié fort sage ; Mais une femme habile est un mauvais présage ; 85 Et je sais ce qu'il coûte à de certaines gens Pour avoir pris les leurs avec trop de talents. Moi, j'irais me charger d'une spirituelle Qui ne parlerait rien que cercle et que ruelle, Qui de prose et de vers ferait de doux écrits 90 Et que visiteraient marquis et beaux esprits, Tandis que, sous le nom du mari de Madame, Je serais comme un saint que pas un ne réclame ? Non, non, je ne veux point d'un esprit qui soit haut, Et femme qui compose en sait plus qu'il ne faut. 95 Je prétends que la mienne, en clartés peu sublime, Même ne sache pas ce que c'est qu'une rime ; Et s'il faut qu'avec elle on joue au corbillon Et qu'on vienne à lui dire à son tour : "Qu'y met-on ? " Je veux qu'elle réponde : "Une tarte à la crème" ; 100 En un mot, qu'elle soit d'une ignorance extrême ; Et c'est assez pour elle, à vous en bien parler, De savoir prier Dieu, m'aimer, coudre et filer. CHRYSALDE Une femme stupide est donc votre marotte ? ARNOLPHE Tant, que j'aimerais mieux une laide bien sotte 105 Qu'une femme fort belle avec beaucoup d'esprit. CHRYSALDE L'esprit et la beauté... ARNOLPHE L'honnêteté suffit. CHRYSALDE Mais comment voulez-vous, après tout, qu'une bête Puisse jamais savoir ce que c'est qu'être honnête ? Outre qu'il est assez ennuyeux, que je crois, 110 D'avoir toute sa vie une bête avec soi, Pensez-vous le bien prendre, et que sur votre idée La sûreté d'un front puisse être bien fondée ? 17 115 Une femme d'esprit peut trahir son devoir ; Mais il faut pour le moins qu'elle ose le vouloir ; Et la stupide au sien peut manquer d'ordinaire, Sans en avoir l'envie et sans penser le faire. ARNOLPHE A ce bel argument, à ce discours profond, Ce que Pantagruel à Panurge répond : Pressez-moi de me joindre à femme autre que sotte 120 Prêchez, patrocinez jusqu'à la Pentecôte Vous serez ébahi, quand vous serez au bout, Que vous ne m'aurez rien persuadé du tout. CHRYSALDE Je ne vous dis plus mot. 18 Déroulement de la séance et analyse Ce qui précède Le texte a été lu par les élèves et quelques questions ont orienté la recherche. Qui parle à qui ? Quel pronom revient régulièrement dans la tirade d'Arnolphe (vers 81 à 102) ? Quel trait de caractère cela révèle-t-il ? Un champ lexical parcourt ce passage. Lequel ? Relevez-en les termes. Situation de l'extrait dans l'oeuvre Les élèves semblent avoir souvent pratiqué cet exercice en collège. Il a été facilité par le fait qu'un groupement de textes sur l'incipit romanesque a été étudié en début d'année. Les élèves n'ont eu aucune difficulté à situer avec précision l'extrait, et le terme d'exposition survient très vite. Arnolphe expose à Chrysalde ses conceptions de l'épouse parfaite qui montrent d'emblée son obsession du mariage et de la tromperie. C'est bien un thème de la farce et le personnage d'Arnolphe se situe donc dans cette interprétation. Identification - aspectuelle du texte : repérage du dialogue, de la présence d'un personnage ami, confident qui permet de donner à l'exposition un tour plus rapide, plus naturel, d'éviter l'ennui et l'artifice d'une tirade explicative. Ainsi quelques notions théoriques sur les caractéristiques générales de l'exposition sont remises à jour à partir de l'observation du texte. - de la situation d'énonciation du texte : l'omniprésence du "je" est notée, ce qui semble confirmer le schéma actantiel qui situait Arnolphe comme le destinataire de l'action. Cette prédominance est accompagnée de la répétition du verbe savoir. Qu'annoncent tant de confiance en soi, tant de volonté autoritaire, si ce n'est un futur abusé ? Les élèves trouvent cette idée à partir des souvenirs que leur procure l'étude du Bourgeois Gentilhomme, de L'Avare, ou du Malade Imaginaire. Difficultés : elles viennent des explications nécessaires à donner sur l'écart entre l'exposition traditionnelle et celle de L'Ecole des Femmes, particulièrement longue et qui dévoile l'enjeu de la comédie sans donner vraiment l'idée de l'intrigue. J'ai tenu néanmoins à insister sur ce point pour montrer la spécificité du texte, pour ne pas tout rapporter à un schéma connu et prévisible. Il ne s'agit pas de donner aux élèves l'habitude d'expliquer un texte par un autre texte. Tout n'est pas dans tout et il y a intérêt à leur faire observer qu'une lecture méthodique doit bannir les généralités, les exposés tout faits que l'on "plaque" sur n'importe quel texte ayant quelque ressemblance avec celui que l'on est en train d'étudier. 19 Centre d'intérêt du texte Une fois détaché le caractère non conventionnel de cette exposition, le caractère fonctionnel du discours qui suscite la question : "Est-ce que les prétentions d'Arnolphe vont aboutir ? ", je privilégie un centre d'intérêt pour éviter l'éparpillement. Ainsi, nous montrons comment Arnolphe apparaît aux spectateurs dans cet extrait. Cela m'a semblé un moyen d'éviter l'analyse psychologique en resituant le problème de l'étude d'un personnage au niveau théâtral, en insistant sur la diction de certains vers. Cela permet aussi d'introduire cette notion essentielle au genre : celle de la double destination de la parole théâtrale. Nous y reviendrons par la suite. Je fais relire certains passages par des élèves volontaires pour faire entendre la suffisance du personnage dans le "Épouser une sotte...", le ton définitif et provocateur de la réplique "Où l'honnêteté suffit...". Faire émettre un ricanement ou obtenir un simple silence après "en bon chrétien" permet de faire constater qu'Arnolphe ne croit en rien à la sagesse de la femme de Chrysalde. Quant à l'épisode de la "tarte à la crème", qui ne fait rire qu'Arnolphe, il provoque, dans la classe, une réaction d'antipathie vis-à-vis du personnage. Ainsi le portrait, à relativiser, d'un "réactionnaire antiféministe" s'impose aux élèves. On insiste aussi sur l'absence d'Agnès qui renforce l'attente du public et le plaisir qu'il savourera en voyant se dégonfler ce personnage si caricatural. Récapitulation Il semble nécessaire de récapituler afin que les élèves ayant participé puissent prendre en notes quelques éléments essentiels, à savoir le rôle dynamique de cette exposition, les attentes inscrites dans le discours d'Arnolphe sur sa future déconvenue, sur le caractère farcesque voire trivial de la scène et des possibilités de mise en scène que cela suppose. c) Le repérage des champs lexicaux Instrument essentiel à la construction d'un sens, le travail sur le lexique me semble indispensable à bien des égards. Il m'a permis de rendre compte de la notion de personnage burlesque et héroï-comique à propos d'Arnolphe sans donner à ce savoir un tour trop extérieur et dogmatique. Quelques questions se posent cependant en ce qui concerne son application au texte théâtral. Observation J'ai souvent fait appel à cet exercice de groupement de mots se rapportant à une même notion, notamment lorsqu'à A. III, sc. 5, le monologue d'Arnolphe manifeste un retournement de situation et qu'il passe, parlant d'Agnès, d'un langage farcesque à un discours de type 20 tragique : "Je me mortifie", "désespoir", "peine mortelle", "funeste", "je souffre", "donnez-moi la constance". Le relevé fait apparaître de façon évidente le thème de la mort, et ce qui était comique jusqu'à présent se voit qualifié de "mortel". Ce caractère tragique est renforcé par l'équivalence établie au vers 987 entre l'amour et l'honneur. Faire relever ensuite un vocabulaire de registre plus familier : "j'enrage", "je crève", "m'être si fort coiffé", faire relever des figures de style telles que l'hyperbole de l'expression "Je souffletterais mille fois mon visage", montrer par l'usage du mot "usurpée" que l'honneur est remplacé par le droit permet aux élèves de comprendre que ce que l'on prenait pour un sentiment tragique se transforme rapidement en crise de jalousie, ressort de la comédie. On peut montrer alors que la proximité et le mélange des deux registres de langage définissent le caractère burlesque du personnage d'Arnolphe, comme le dit R. Picard : "Il n'existe pas de tragédie du cocuage. 15" L'absence de distance du personnage par rapport à lui-même et la distance du spectateur par rapport au personnage fondent le comique de la scène. 15 . R. PICARD, "Molière, comique ou tragique ? Le cas d'Arnolphe" in Revue d'Histoire Littéraire de la France, sept.-déc. 1972. 21 Acte III Scène 5 ARNOLPHE Comme il faut devant lui que je me mortifie ! Quelle peine à cacher mon déplaisir cuisant ! Quoi ? pour une innocente un esprit si présent ! 980 Elle a feint d'être telle à mes yeux, la traîtresse, Ou le diable à son âme a soufflé cette adresse. Enfin me voilà mort par ce funeste écrit. Je vois qu'il a, le traître, empaumé son esprit, Qu'à ma suppression il s'est ancré chez elle ; 985 Et c'est mon désespoir et ma peine mortelle. Je souffre doublement dans le vol de son coeur, Et l'amour y pâtit aussi bien que l'honneur. J'enrage de voir ma prudence trompée. 990 Je sais que, pour punir son amour libertin, Je n'ai qu'à laisser faire à son mauvais destin, Que je serai vengé d'elle par elle-même ; Mais il est bien fâcheux de perdre ce qu'on aime. Ciel ! puisque pour un choix j'ai tant philosophé, 995 Faut-il de ses appas m'être si fort coiffé ! Elle n'a ni parents, ni support, ni richesse ; Elle trahit mes soins, mes bontés, ma tendresse : Et cependant je l'aime, après ce lâche tour, Jusqu'à ne me pouvoir passer de cet amour. 1000 Sot, n'as-tu point de honte ? Ah ! je crève, j'enrage Et je souffletterais mille fois mon visage. Je veux entrer un peu, mais seulement pour voir Quelle est sa contenance après un trait si noir. Ciel, faites que mon front soit exempt de disgrâce ; 1005 Ou bien, s'il est écrit qu'il faille que j'y passe, Donnez-moi tout au moins, pour de tels accidents, La constance qu'on voit à de certaines gens ! 22 Critique de la démarche - L'aspect positif fut la participation des élèves pour l'acquisition d'une notion difficile et nouvelle pour eux. - Pratique de l'intertextualité. L'intérêt réside également dans l'étude intertextuelle qu'elle engendre puisque les références au monologue tragique sont indispensables. Leur repérage donne la possibilité aux élèves d'approfondir leur pratique de lecteur. G. Genette déclare du reste : "L'intertextualité est (...) le mécanisme propre à la lecture littéraire. Elle seule, en effet, produit la signifiance, alors que la lecture linéaire, commune aux textes littéraires et non littéraires, ne produit que le sens. 16" La lecture d'un texte doit permettre de comprendre les conditions de production et de réception de l'oeuvre qui n'est pas un phénomène isolé. L'occasion est idéale de repérer à l'intérieur même des dialogues et monologues les caractéristiques des deux genres qui s'unissent : farce et tragédie. On pourrait du reste soit proposer un texte de Corneille présentant de façon manifeste les caractères du tragique, en complément, lors d'un module, ou en prolongement, à la fin de l'étude de l'oeuvre intégrale. - L'aspect plus négatif est que le cours s'est terminé sous la forme d'un cours magistral. De plus, il me semble que l'aspect théâtral fut en partie oublié. Aussi, après réflexion, cette étude sur le vocabulaire est-elle le meilleur moyen de définir la spécificité du texte théâtral ? Si l'on avait abordé le texte par le jeu théâtral proprement dit, on aurait fait sans doute apparaître ce même phénomène. Il serait plus efficace de montrer en quoi les mots sont porteurs de la représentation, en quoi la théâtralité peut naître du discours. Quelques gestes : agenouillement du désespoir, ou gestes saccadés de la colère, manifestent le mélange des genres dans le monologue. d) Typologie : problème du monologue Objectif 1 : relier monologue et action La présence de sept monologues dans la pièce impose une étude avec les élèves de ce type de discours et de son rôle dramatique. Mon but consiste essentiellement à faire prendre conscience que le monologue fait partie intégrante et de l'action et du spectacle. Objectif 2 : donner des outils d'analyse Le monologue est une forme conventionnelle qui se rencontre aussi bien dans la comédie sérieuse que dans la tragédie. Je désire donc munir mes 16 . G. GENETTE, Sémiotique de la Poésie, Seuil, 1982. 23 élèves d'une grille de questions susceptibles de les aider à aborder n'importe quel monologue mais également à trouver la spécificité de chacun. Question données aux élèves : − Pourquoi le personnage est-il seul en scène ? − A quoi sert cette solitude ? − Dans le cas d'un monologue informatif, quel sentiment exprime-t-il ? quel est le ton choisi ? (lyrique, pathétique, élégiaque, comique) quels effets de style ? (anaphores, hyperboles,...) − Dans le cas d'un monologue délibératif, comment le héros s'adresse-t-il à lui-même ? quelles sortes d'arguments sont évoqués ? − En quoi le monologue fait-il progresser l'action ? − Quelle image donne-t-il au personnage ? Réalisation Après avoir redéfini le terme de monologue, c'est-à-dire un moment où le personnage est seul sur scène et exprime ses pensées, ses intentions, ses sentiments, on fait le rapprochement avec "l'analyse romanesque qui permet de faire connaître le personnage de l'intérieur. 17" Les axes de lecture proposent ensuite de comprendre quelle idée du personnage est exprimée et en quoi il fait avancer l'action. On intègre à la réflexion le récit court fait par Arnolphe de son entrevue si décevante pour lui et si triomphante pour Agnès. Une étude des temps utilisés (passé, présent, futur antérieur et futur) permet facilement aux élèves de dégager la structure de ce monologue composé d'un récit suivi de l'exposition des sentiments amoureux d'Arnolphe et finalement de sa décision de tenter l'impossible pour s'approprier définitivement Agnès. Le champ lexical du désir amoureux fait dire aux élèves que pour la première fois Arnolphe considère Agnès comme un être désirable. Ils remarquent l'exagération du vocabulaire "bouillants transports", "s'enflammait". Ils rappellent qu'il s'agit là d'une figure de style, l'hyperbole. Ils notent aussi l'emploi d'un vocabulaire moins noble, "bile", "mitonner", "s'amourache" et reconnaissent le côté burlesque d'Arnolphe qui ne peut s'empêcher de traiter de l'amour de façon triviale. L'étude de l'alexandrin : "Et cependant jamais je ne la vis si belle", avec son rythme régulier 4-2/4-2, son allitération en [3], la rime féminine tempère le propos. Ainsi, sans nier une douleur véritable à Arnolphe qui lui confère un côté pathétique, on insiste sur l'effet comique du personnage. 17 . P. LARTHOMAS, Le langage dramatique, PUF, p. 372. 24 Le dernier point de l'étude porte sur le caractère théâtral de ce monologue. Dans un premier temps, il est considéré dans son intérêt dramatique puisqu'Agnès se met à exister physiquement aux yeux d'Arnolphe qui commence à percevoir l'échec de son système. On remarque bien que sa décision d'agir à la fin relance l'action. Et on note aussi la fausse évolution puisqu'Arnolphe s'obstine à ne pas changer d'attitude. Dans un deuxième temps, on tente de dégager la qualité scénique. Les élèves remarquent le comique de mots et de situation relativement facilement mais pas le comique de gestes. L'absence de toute didascalie, si ce n'est le nom du personnage, peut expliquer la difficulté. Il s'agit de détecter les indications scéniques et gestuelles derrière les mots. Je les aide alors à relever des expressions telles que "j'ai peine à demeurer en place" qui conduisent à imaginer un acteur s'agitant en tous sens ou arpentant la scène de long en large. Le déictique "ces" ainsi que l'adverbe "là-dedans" indiquent quelques gestes également. 25 Acte IV Scène 1 ARNOLPHE J'ai peine, je l'avoue, à demeurer en place, Et de mille soucis mon esprit s'embarrasse, 1010 Pour pouvoir mettre un ordre et dedans et dehors Qui du godelureau rompe tous les efforts. De quel oeil la traîtresse a soutenu ma vue ! De tout ce qu'elle a fait elle n'est point émue ; Et bien qu'elle me mette à deux doigts du trépas, 1015 On dirait, à la voir, qu'elle n'y touche pas. Plus en la regardant je la voyais tranquille, Plus je sentais en moi s'échauffer une bile ; Et ces bouillants transports dont s'enflammait mon coeur Y semblait redoubler mon amoureuse ardeur ; 1020 J'étais aigri, fâché, désespéré contre elle : Et cependant jamais je ne la vis si belle, Jamais ses yeux aux miens n'ont paru si perçants, Jamais je n'eus pour eux des désirs si pressants ; Et je sens là dedans qu'il faudra que je crève 1025 Si de mon triste sort la disgrâce s'achève. Quoi ? j'aurai dirigé son éducation Avec tant de tendresse et de précaution, Je l'aurai fait passer chez moi dès son enfance, Et j'en aurai chéri la plus tendre espérance, 1030 Mon coeur aura bâti sur ses attraits naissants, Et cru la mitonner pour moi durant treize ans, Afin qu'un jeune fou dont elle s'amourache Me la vienne enlever jusque sur la moustache, Lorsqu'elle et avec moi mariée à demi ? 1035 Non, parbleu ! non, parbleu ! Petit sot, mon ami, Vous aurez beau tourner : ou j'y perdrai mes peines, Ou je rendrai, ma foi, vos espérances vaines, Et de moi tout à fait vous ne vous rirez point. 26 Analyse Mobilisation de savoirs spécifiques et réinvestissement La lecture méthodique, outre le caractère spécifique de chaque texte qu'elle cherche à rendre, doit également apporter aux élèves les moyens d'acquérir de l'autonomie dans leur démarche d'analyse littéraire. Dans le cas qui nous occupe, il s'agit de développer des compétences littéraires, des savoirs mais aussi d'aiguiser leur regard de spectateurs et finalement de leur faire prendre conscience du type de communication qui s'engage lors d'une représentation. La situation peut paraître paradoxale puisque l'on est en quelque sorte prisonnier d'un texte dont on doit percevoir le champ de savoirs qu'il recouvre, mais en même temps un travail, une construction, des mises en rapport doivent s'élaborer qui permettent réellement l'interprétation. La lecture n'est pas seulement "réception" des textes mais "action sur eux" 18. Le fait d'emmagasiner des savoirs et des savoir-faire facilite et augmente la compétence du lecteur ou même du spectateur. Au cours de la séance, les élèves ont eu l'occasion de réinvestir à la fois des techniques et des savoirs. Techniques concernant l'approche d'un texte Il m'a semblé que les élèves font peu à peu l'apprentissage d'un questionnement spécifique au théâtre et conscient de son organisation. Ainsi ils prennent l'habitude de ne pas identifier un monologue comme un moment d'arrêt, mais comme une partie intégrante de l'action. Ils lisent plus facilement la totalité du texte qui leur est proposé. Ils repèrent avec aisance l'emploi des temps du début à la fin, les rimes féminines et masculines, les registres de langue, sans s'arrêter à quelques vers mais prenant bien en considération l'ensemble du texte. La grammaire devient un véritable outil d'analyse. Cela permet de leur ôter l'idée que grammaire et littérature sont deux domaines totalement étrangers. La participation est active et générale au sein de la classe car des questions "faciles" se mêlent à d'autres plus complexes. On essaie de mettre en place des niveaux de lecture où chacun puisse se repérer. La réflexion et l'interrogation sur le ton du texte leur devient familières. Je me rends compte que les résultats sont probants lorsque je pars de l'étude des invariants du texte. Lexique du théâtre En annexe n°1, se trouve une liste de termes que les élèves ont appris et savent réutiliser. Des termes techniques sont indispensables. Au cours de la 18 . M. P. SCHMITT, A. VIALA, Savoir Lire, Didier, p. 17. 27 séance sont intervenus les mots "acteur", "didascalies", "dénouement", "aparté"... Les concepts - Le personnage de la comédie : un type Les élèves s'étaient intéressés à la possible évolution d'Arnolphe. En effet, c'est un personnage complexe, qui essaie d'échapper à son destin, ne serait-ce qu'en changeant de nom pour prendre celui d'un noble : M. de la Souche. Son langage qui semble parfois tiré de celui d'un héros élégiaque et galant ne suffit pourtant pas à cacher le ridicule qui revient à chacune de ses prétentions. Les élèves ont très bien compris le système qui fait se côtoyer langage noble et gaulois. Ils savent en tirer les conséquences et ne pas tirer le personnage vers une interprétation uniquement pathétique. Ils remarquent à juste titre le caractère grotesque d'un être qui pense maîtriser le monde et son entourage, qui en personnage type de la comédie, restera entier et immuable dans son erreur ou dans son vice. Cela les empêche d'assimiler la personne au personnage et les force à reconnaître que ce dernier ne se construit que dans et par le texte. L'on peut dire que l'explication de la scène 1 de l'acte IV s'est enrichie des explications et découvertes précédentes. - Conventions théâtrales : le traitement du temps, le hors-scène Un court récit est inclus dans le monologue : la pratique est courante dans L'Ecole des Femmes. Nous avons, dès les premières scènes, eu l'occasion de définir le récit comme une narration dans un système temporel passé, coupé du moment de l'énonciation. Nous avons vu que cette opposition est difficile à mettre en oeuvre au théâtre. Aussi, dans le monologue, les élèves comprennent qu'il s'agit moins de raconter un fait que d'observer l'effet produit sur le locuteur. Ils peuvent ainsi dégager la fonction dramatique que pourrait avoir l'événement vécu sur Arnolphe tant ébranlé par sa nouvelle découverte. Le rapport entre le récit et la règle de l'unité de lieu et du temps dans le théâtre classique était connu de la plupart des élèves. On peut donc aller plus loin et montrer qu'ici l'entracte ou le changement d'acte est justifié de façon cohérente. L'auteur gagne du temps sur l'événement pour pouvoir insister sur le résultat. La distinction entre le temps de la fiction et celui de la représentation apparaît donc. Les élèves saisissent au travers de ces critères la non coïncidence de la durée du spectacle et de celle de l'action. Une spécificité essentielle au théâtre est mise à jour : le lien étroit du texte et de sa représentation, la nécessaire complémentarité des deux moments pour éclairer ou construire un sens au texte. On peut insister sur le perpétuel renouvellement de ses significations 28 grâce à l'interprétation. (Du reste, lorsque les élèves s'essaieront à la mise en scène, ils s'en rendront compte.) Réflexion sur la démarche et autres propositions - Le problème de l'énonciation dans le texte théâtral On pourra sans doute reprocher le caractère un peu trop dirigé de l'explication. Il aurait peut-être été préférable de partir d'une réflexion plus proprement théâtrale que celle du monologue et de montrer à partir de la situation de communication particulière l'enjeu de ce début d'acte. Voici un schéma montrant comment se constitue l'échange : se parle à Arnolphe lui-même didascalies Metteur en scène Acteur spectateur Molière Arnolphe est le propre récepteur de son message, mais se parlant à lui-même, il se parle à voix haute. Au théâtre, les propos tenus sur la scène ont en fait pour récepteur le spectateur qui interprète des paroles qui ne lui sont pas adressées et qui expriment les réflexions intérieures du personnage. On peut donner quelques repères sur la distinction de trois types de récepteurs19qui seront utiles pour l'étude d'autres scènes : - Le récepteur direct auquel s'adresse l'émetteur. - Le récepteur indirect dont l'émetteur connaît la présence et dont il sait qu'il entend les propos qu'il tient. - Le récepteur indiscret dont l'émetteur ignore la présence. Le spectateur fait partie de cette dernière catégorie. Ainsi la première question à poser serait : "qui parle à qui ?" Cette double destination de la parole théâtrale est à relier à la visée éducative et critique de la comédie qui peignait le ridicule des moeurs pour les corriger. On voit comment ce savoir sur la comédie peut être intégré à une réflexion sur le fonctionnement scénique et non pas être imposé de l'extérieur. Pour en revenir au monologue proprement dit, on peut mesurer l'effet possible sur le spectateur qui prend sûrement plaisir à voir s'exécuter ce qu'il avait prévu ou simplement pressenti. Il aurait été possible de commencer à étudier cette scène en attirant l'attention 19 . cf. M. MOUGENOT, Parcours de lecture George Dandin, Bernard Lacoste, p. 12 29 des élèves sur le jeu théâtral proprement dit, et de définir la position du spectateur ainsi que le regard qu'il porte sur le personnage. De cette façon, le côté pathétique et grotesque d'Arnolphe aurait été dégagé de la perception du spectateur. 3) ACTIVITES DE PROLONGEMENT a) Exposés Ils ne constituent pas un prolongement à proprement parler puisque j'ai tenu à les intégrer au déroulement des séances. Pour éviter la lassitude entraînée par la succession de cours dont la démarche était identique ou presque, il me paru bon d'inviter les élèves à participer activement à l'élaboration de cette séquence. Six élèves se sont proposés pour traiter : - les uns de l'éducation des femmes au temps de Molière, - les autres de la farce dans L'Ecole des Femmes. Outre le fait que ces deux thèmes, l'un culturel et historique, l'autre théâtral, me semblaient essentiels à une compréhension plus complète de l'oeuvre, les objectifs de cette expérience étaient aussi d'ordre méthodologique. Les principes en furent donnés aux élèves sous forme de consignes : - Temps de parole impératif : un quart d'heure, 20 minutes maximum. - Appréciation de la clarté de l'expression orale - Des notes non rédigées et non lues. - Un exposé structuré dont le plan apparaîtra au tableau. J'ai fourni à chacun des groupes des indications bibliographiques afin de faciliter le travail de recherche au CDI (Encyclopédie Universalis, Histoire mondiale de la femme, articles sur la préciosité dans une histoire de la littérature, article "comédie" dans Pour pratiquer les textes de théâtre, etc.). J'ai insisté par ailleurs sur le fait de prendre de nombreux exemples dans L'Ecole des Femmes pour ne pas donner un tour trop abstrait aux exposés. Le plan de l'exposé n° 1 fut structuré autour des 3 points suivants : 1. Que nous apprennent les Maximes sur l'idée de la femme qui a cours au XVIIème siècle ? 2. La condition de la femme au XVIIème siècle le mariage ; le droit. 3. La préciosité définition d'un style de vie ; personnage de romans ; 30 la poésie précieuse ; un langage. Plan de l'exposé n°2 1. La comédie italienne 2. La préciosité caractéristiques générales dans L'Ecole des Femmes - thèmes - personnages - situations Les élèves volontaires ont essayé de "jouer le jeu", de ne pas regarder de façon continue leurs notes. Ainsi leurs camarades ont pu, eux, prendre des notes. La reprise n'a donc servi qu'à préciser quelques points : - La représentation que donne Molière des femmes par l'intermédiaire des discours tenus par les personnages et par Molière lui-même. - Insistance sur le langage de la farce, sur la composition éclatée de l'alexandrin. b) Utilisation des modules Première séance : exercices respiratoires, vocaux L'idée d'une séance consacrée à des exercices respiratoires, vocaux puis de lecture s'est imposée à moi après avoir assisté à une séance d'échauffement dans une classe d'option théâtre du lycée T, conduite par M. R., professeur tuteur. Une formation personnelle en culture vocale me rendait apte à préparer l'exercice. Cependant le besoin s'en faisait ressentir à l'intérieur même des cours où j'avais remarqué la difficulté pour une grande partie du groupe à s'exprimer oralement par peur des autres ou de soimême et par manque d'habitude. L'objectif était donc d'aider les élèves à prendre la parole plus spontanément, à émettre des sons plus audibles, à améliorer la qualité de leur lecture à voix haute. On peut également penser que ces exercices rentrent dans le cadre d'une préparation à l'épreuve orale du français en classe de première. La démarche fut d'utiliser l'heure réservée aux modules, particulièrement adaptée à l'exercice étant donné l'effectif réduit de la classe. Elle consista également à faire prendre conscience des différents paramètres qui entrent en jeu lors de l'émission d'un message. La disposition de la classe changée (table ronde) favorisa l'instauration d'un climat de confiance. 31 Exercices respiratoires. Prise de conscience de deux formes de respirations : - abdominale - thoracique D'abord assis, inspiration et expiration, on vide l'air à fond. Silence exigé d'où concentration On se détend (étirement des bras, bâillements) Exercices vocaux. Exercices concernant la maîtrise de l'articulation et le volume de la voix. Sur le phonème [a], on tient le son en haussant la voix progressivement jusqu'à tonitruer, on s'arrête brusquement. Exercices phonétiques et articulatoires. Prise de conscience de l'émission de consonnes, sonores, occlusives et constrictives nasales et alvéolaires - mi la no mi la no... (chanté). Expression des semi-consonnes - we want whisky Exercices de lecture. A partir de l'acte IV, scène 2 de L'Ecole des Femmes. Insistance sur la respiration : D'abord essayer de lire le plus loin possible en une seule émission d'air, sans tenir compte du ton. Puis intonation, surtout à partir des vers 680 et suivants "Vous devez bénir l'heure de votre destinée, Contempler la bassesse où vous avez été, Et dans le même temps admirer ma bonté ....... Votre sexe n'est là que pour la dépendance : Du côté de la barbe est la toute puissance." Ton doctoral, insistance sur la prononciation des consonnes, insistance sur le rythme de l'alexandrin, caricatural ici : " Du côté de la barbe est la toute-puissance." Prise de conscience de l'accent tonique, de la césure. Analyse Satisfaction évidente des élèves à l'issue de cette séance. Seule, une élève très émotive a eu une réaction de peur qui s'est traduite par des pleurs. La prise de parole dans la classe a été par la suite beaucoup plus aisée. Un autre rapport s'est instauré avec la classe. En ce qui concerne la relation entre le texte, sa lecture, et sa signification, les élèves admettent que lire ou jouer un texte c'est essayer de retrouver sa dynamique, mais aussi d'imposer un projet sur l'oeuvre (les cours ultérieurs montreront qu'il y a loin de la théorie 32 à la pratique). Comme l'écrit Danièle Rancière 20 : Æ La mise en voix exige une lecture expressive, le lecteur doit décider, sans hésiter, de l'intonation, ce qui suppose que l'attention à la lettre du signifiant se double d'une attention constante à l'esprit du signifié (...) il ne s'agit pas (...) de faire concurrence à l'atelier théâtre, il s'agit de renouer avec une pratique de la lecture (...) qui supposait que tout texte était écrit non seulement pour être lu (...) mais pour être entendu, proféré Ø. Deuxième séance : approche de la mise en scène Toujours dans le cadre des modules et au milieu de la séquence, afin que ces exercices fassent partie intégrante de l'entreprise de construction de sens, et ne soient pas considérés comme un moment récréatif, j'ai tenté sur un monologue de faire toucher du doigt les problèmes de la mise en scène et de l'acteur. La notion de metteur en scène est pour eux totalement vide de sens. Il s'agit donc de leur montrer comment s'opère l'union du texte à la mise en scène pour donner naissance au théâtre. Démarche. Choix du monologue Acte IV Scène 1 pour prolonger la lecture méthodique de cet extrait, pour focaliser l'intérêt des élèves sur la construction du personnage, pour mettre sur scène et appliquer concrètement la notion comique/tragique/burlesque. Consignes Donnez des indications scéniques concernant cette scène en vous appliquant à la lumière, au décor, aux objets, aux gestes et mimiques du personnage. Réalisation - Formation d'un arc de cercle : les élèves spectateurs - 2 élèves volontaires : l'un présente sa proposition de mise en scène, l'autre essaie d'appliquer. De façon générale, les élèves ont surtout insisté sur l'intonation et les gestes d'Arnolphe. Le décor ou les objets leur ont semblé inutiles. Quelquesuns ont donné des indications sur la luminosité. Cela peut s'expliquer dans le sens où cette séance succédait au travail sur l'expression orale. Ils ont sans doute voulu appliquer ce qu'ils avaient étudié. (Propositions de mise en scène des élèves : cf. annexe n° 2) La scène doit selon eux se trouver dans l'obscurité pour montrer le désespoir d'Arnolphe. Certains trouvent utile de faire asseoir Arnolphe sur 20 . RANCIERE (Danièle), "La lecture sans métaphore", in Le Français aujourd'hui n° 103. 33 une chaise afin de faciliter le mouvement (Arnolphe s'assoit, se met debout, tourne autour de la chaise). Quant au personnage, ils sont prolixes en explication. Ils veulent faire ressentir par l'intonation, la prononciation, la colère, le désespoir d'Arnolphe. Aucun ne propose des gestes comiques. Comment expliquer cela alors qu'ils ont par ailleurs reconnu les aspects farcesques de la pièce ? Faire rire est certainement pour eux beaucoup plus difficile. Les élèves de cet âge ont peur du regard des autres. L'heure n'est plus au cabotinage, aussi ont-ils préféré s'en tenir au pathétique. Ce que j'ai essayé d'apporter. J'ai cité ce propos de Stanislavski à propos des pièces de Tchékhov : Æ Composer une mise en scène signifie rendre matériellement évident le sens profond de l'oeuvre Ø. J'ai insisté sur le passage du sens que l'on donne à telle ou telle phrase ou même tirade à la réalisation concrète. J'ai tenté d'axer leur choix de mise en scène selon deux pôles : soit réaliste - ou naturaliste - (croyance dans le 4ème mur : la scène a 3 côtés, le quatrième est le public. Décor fidèle, objets concrets...), soit symboliste, caractérisé par "un refus du temps de la représentation et du personnage 21" (comédien en noir, décor nu etc.). J'ai tenté de leur faire justifier le rôle dramaturgique de la lumière, qui agrandit ou au contraire minimise les effets. De même pour l'objet qui peut favoriser leur imagination et qui de toute façon doit être choisi en fonction de ce qu'il doit signifier : simple élément décoratif, élément suggestif d'une condition sociale, de la préoccupation d'un personnage, ou élément dramaturgique comme dans Les Chaises de Ionesco 22. c) Projection du film L'Ecole des Femmes La célèbre interprétation de L'Ecole des Femmes avec Bernard Blier et Isabelle Adjani m'a semblé suffisamment intéressante pour être passée à des élèves et susciter une discussion. Deux solutions s'offraient à moi : - soit la retransmission complète de la pièce. - soit l'utilisation de certaines scènes à divers moments de la séquence. La première solution fut choisie pour des raisons d'ordre matériel (disponibilité de la salle de T.V.). La projection eut lieu après la deuxième séance de cours. 21 22 . Roselyne PUTEGNOT, "Pratiques pédagogiques", in Théâtre et Mise en scène. . cf. L'Ecole des Lettres I, n° 12, 1982/83. 34 Déroulement. Durée du film : 2h15. Un questionnaire succinct est distribué aux élèves. 1. Quelle différences voyez-vous entre votre lecture de l'oeuvre et sa représentation ? 2. Notez quelques détails qui vous frappent sur les décors, les costumes, la lumière. 3. Y a-t-il des éléments que vous avez mieux compris lors de cette diffusion ? Lors de la discussion qui suit, les élèves remarquent en premier lieu : - que la mise en scène ne respecte pas l'unité de lieu, - que la diction gomme la métrique, le phrasé est en effet moderne. Ils ont apprécié la compréhension facile de l'ensemble. Ils sont tous frappés par l'intonation pathétique de l'acteur jouant Arnolphe, au moment de l'expression de sa souffrance, et de la découverte de son amour. Le rôle est en effet davantage de l'ordre du pathétique que du comique. Agnès leur apparaît moins sotte après le film qu'après leur lecture. Difficultés apparues Les élèves ont du mal à comprendre qu'il s'agit là d'un parti pris de mise en scène, et ont tendance à confondre auteur et metteur en scène. D'autre part le cinéma requiert une autre compétence d'analyse que celle que nécessite le théâtre. En effet, si lors d'un spectacle, l'assistance est en relation directe avec des êtres vivants, si l'émotion s'inscrit dans cette relation collective à l'acteur, il n'en est rien au cinéma où un intermédiaire supplémentaire vient s'intercaler : le cadreur de l'image qu'il propose restreint le champ de vision, focalise l'intérêt sur des éléments précis. Il instaure une relation plus individualiste, moins vivante à l'acteur. On ne donne donc pas une bonne image de ce qu'est le théâtre par ce genre d'expérience. C'est pourquoi j'ai organisé un voyage à Paris pour la représentation au théâtre Marigny d'Hamlet par la compagnie de Francis Huster avec le questionnaire en annexe n° 3. d) Prolongement : exposition sur l'espace théâtral A la fin de l'étude, il me semblait dommage de fermer le dossier théâtre. J'ai donc voulu élargir la réflexion, ouvrir l'oeuvre sur un champ de questions spécifiques au théâtre. Les élèves, tout à fait volontaires pour réaliser un exposé, m'ont encouragée à continuer dans ce sens. Avec le partenariat efficace du CDI du lycée Châtelet, nous avons décidé de monter 35 une petite exposition sur l'espace théâtral de l'antiquité à nos jours, ainsi que sur l'oeuvre de quelques metteurs en scène (Jouvet, Vilar, Stanislavski). Et profitant de l'actualité, sur celle de J.-L. Barrault. Les élèves sont motivés parce que leurs recherches vont aboutir à une ouverture de leur classe. Ils sont ravis de sortir du cadre strict de la salle de classe, de présenter des travaux à d'autres élèves. La démarche pour réaliser leur dossier leur est indiquée. - Recherche de documents (préparés par avance). - Bibliographie. - Recherche des idées principales, des photos et dessins à reproduire. - Synthèse. - Mise en page. 4) PROBLEMES LIES A L'EVALUATION L'évaluation fait partie de la démarche d'apprentissage. Elle est nécessaire dans le processus de fixation des connaissances culturelles mais aussi pour l'acquisition de méthodes de travail. Nous distinguerons quatre moments de l'évaluation : - évaluation initiale ou évaluation diagnostique, - évaluation formative, - évaluation sommative, - évaluation différée. a) Évaluations réalisées Évaluation initiale Le premier contrôle fut établi à partir de l'oeuvre uniquement. Il visait surtout à connaître la cohérence des premières analyses ou attentes de lecture des élèves (annexe 4). Évaluation en cours de séquence Elle est constituée dans le cadre du cours même par la vérification orale des acquis grâce aux réinvestissements que les élèves sont capables de faire : - par une interrogation orale, rapide au début de cours sur ce qui a été traité lors du cours précédent. - par le corrigé des questionnaires donnés d'un cours à l'autre (cf. annexe n° 6). 36 Évaluation finale A la fin de la séquence, un contrôle portant sur toute la pièce ainsi que sur la notion de mise en scène a été fait. (cf. annexe n° 6). b) Résultats et analyse Résultats : satisfaisants en ce qui concerne les deux premiers types d'évaluation. En effet, moyenne au contrôle initial 13/20, participation active durant toute l'étude. Élèves qui se portent volontaires pour rappeler les notions vues antérieurement. Bon réinvestissement des notions durant les cours. En revanche, résultats plus décevants lors de l'évaluation finale, surtout en ce qui concerne les propositions de mise en scène où les élèves ont encore confondu auteur et metteur en scène. Évaluation diagnostique L'analyse du personnage d'Arnolphe me semblait riche en ce sens, et il me paraissait plus adéquat de partir d'une interrogation sur la pièce ellemême que sur tout ce qui aurait pu constituer une connaissance antérieure des élèves sur le langage scénique, l'auteur, la comédie etc. Il me paraît que l'évaluation diagnostique ne doit faire peur aux élèves et surtout de façon injuste si elle porte sur des savoirs que tous n'auraient pas acquis. On respecte sans doute mieux ainsi le caractère hétérogène d'une classe de seconde. Cependant cette technique n'est pas totalement satisfaisante car elle ne permet pas une véritable perception des connaissances culturelles que les élèves sont capables de mettre en jeu devant le texte. Cela a été fait oralement mais sans doute de façon informelle. Peut-être aurait-il fallu distribuer un questionnaire comportant quelques notions de base sur le langage scénique et les conventions dans le théâtre du XVIIème siècle, quitte à ne pas noter puisque cela ne repose pas sur un cours réalisé ensemble. Évaluation formative Elle doit permettre de relever d'éventuelles difficultés afin d'y remédier. Elle n'est donc pas "notée" à proprement parler mais s'établit plutôt à partir d'une discussion dans la classe. Les questionnaires ont permis un suivi individuel des élèves, l'occasion pour certains de parler, de participer à l'oral trouvant plus facile de prendre la parole à partir d'une réflexion écrite. Les différentes lectures méthodiques ont permis une maîtrise progressive de l'exercice. A chaque fois, en effet, se posait la question de la pertinence de l'utilisation de tel ou tel outil d'analyse. 37 Évaluation sommative Elle ne peut se concevoir qu'en fin d'étude afin d'apprécier les connaissances que les élèves ont acquises sur l'oeuvre. J'ai choisi la forme de l'interrogation écrite, bien que celle-ci puisse paraître un exercice scolaire un peu lassant pour les élèves, ce qui expliquerait peut-être les mauvais résultats. Mais les impératifs de notes trimestrielles m'ont poussée à choisir cette méthode. Cependant, sur le point précis de la confusion finale auteur/metteur en scène, celle-ci dépend peut-être d'un manque d'exercices mettant en jeu la créativité des élèves. Sans doute aurait-il été profitable de faire écrire une saynète avec didascalies par les élèves eux-mêmes qui auraient pu alors appréhender plus clairement les problèmes de la spécificité d'un texte théâtral. Évaluation différée 23 Mon projet pédagogique prévoit un groupement de textes sur le théâtre moderne, de l'absurde (Ionesco : un extrait de Rhinocéros, les Chaises ; Beckett : un extrait de En attendant Godot). Je pourrai alors, bénéficiant du temps écoulé et donc de la maturation des élèves, réellement évaluer leur capacité à réinvestir leurs connaissances théâtrales. 23 . Expression tirée de L'Oeuvre intégrale, CRDP Toulouse. 38 CONCLUSION J'ai tenté par la multiplicité et la variété des exercices de faire ressentir le lien étroit que le texte entretenait avec la représentation. J'ai essayé de montrer que l'explication méthodique d'un texte de théâtre ne pouvait se passer de ces considérations et qu'elle répondait bien à l'un des buts qu'elle s'est assignés : prendre en compte la spécificité de chaque genre. L'étude d'une pièce de théâtre favorise une démarche créative de la part de l'enseignant comme de celle des élèves et les approches multiples encore non exploitées dans le cadre de cette année le seront certainement dans la suite de ma réflexion. 39 ANNEXES 40 Annexe 1 : lexique du théâtre Acteur Personnage Metteur en scène Représentation Pièce Acte Entracte Scène Didascalie Intrigue Noeud dramatique Dénouement Deus ex machina Péripétie Exposition In medias res Quiproquo Théâtre dans le théâtre Thème Aparté Monologue Tirade Stichomythie Équivoque Règle des trois unités 41 Annexe 2 voir pages 59 à 61 de l'original. Photocopier, réduire. 42 Annexe 3 43 Annexe 5 : lire un spectacle de théâtre Répondez à ce questionnaire avec soin. Puis rendez-le moi. Il sera corrigé et noté. A. Wacrenier. Bon spectacle ! Titre de la pièce : ............................................................................................... Nom de l'auteur : .............................................................................................. Date de la représentation : .............................................................................. Nom du théâtre où est donnée la représentation : .............................................................................................................................. Nom du metteur en scène : ............................................................................. Nom de l'auteur des décors ou de la scénographie : .............................................................................................................................. Nom des acteurs principaux avec en regard celui des personnages qu'ils interprètent. .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. Caractérisez le quartier où se trouve le théâtre .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. Quel type de salle ? à l'italienne en rond fixe mobile Faites un croquis 44 Fauteuils velours ou banquettes bois? Les décors : Que représentent-ils ? ...................................................................................... .............................................................................................................................. - Matériaux : .................................................................................. - Couleurs : .................................................................................... - Indiquent-ils précisément une période historique ?............... Les lumières : vives sombres évolutives La musique : enregistrée présence d'un orchestre Bruitages : lesquels ? Les costumes : Décrivez-les Indiquent-ils une époque précise ? Le public : Âge ............................................... Vêtements .............................................................................. ses réactions : Rires Applaudissements Silences Rappels Autres La mise en scène Relevez un effet de mise en scène sur une réplique .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. Relevez des gestes significatifs du personnage principal .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. Quels effets spéciaux accompagnent les apparitions du fantôme ? .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. .............................................................................................................................. 45 Traitement des apartés A qui Polonius devrait-il s'adresser ? ............................................................ A qui s'adresse-t-il effectivement ? ................................................................ A quoi le voyez-vous ? .................................................................................... Le texte dit vous paraît-il : poétique ? archaïque ? moderne ? 46 Annexe 4 : évaluation initiale Lecture d'une oeuvre intégrale : L'Ecole des Femmes de Molière 1 - Remplissez les étiquettes vides par le nom des personnages de la pièce et indiquez sur les flèches les relations familiales et sociales qui existent entre eux (5 points) 2 - Qui a dit ? (3 points) "Votre sexe n'est là que pour la dépendance Du côté de la barbe est la toute puissance." ................................................................................................................................ "Il le faut avouer, l'amour est un grand maître ; Ce qu'on ne fut jamais il nous enseigne à l'être" ................................................................................................................................ "Le moyen de chasser ce qui fait du plaisir ?" ................................................................................................................................ 3 - Faites un portrait d'Arnolphe en donnant des indications sur son âge, sa situation sociale, ses intentions et l'idée qu'il se fait d'une bonne épouse. Vous rédigerez votre réponse en soignant la présentation, en composant des paragraphes, en vous appuyant sur des exemples tirés de la pièce. (12 points) 47 Annexe 5 : questionnaires donnés aux élèves Pour l'étude de l'acte I scène 1 1. Du v. 81 à 102, deux portraits de femmes sont dessinés : lesquels ? Relevez les termes qui marquent l'opposition. 2. Quel pronom est omniprésent dans cette tirade ? 3. Quel type de verbe revient fréquemment en début de vers ? Qu'est-ce que cela marque sur l'état d'esprit d'Arnolphe ? Pour l'étude de l'acte II scène 5 1. Faites un plan justifié de la scène. (par exemple en repérant l'aspect visuel de la page.) 2. Quel style est utilisé par Agnès ? (direct, indirect, indirect libre ? ) 3. Quel type de comique reconnaissez-vous dans cette scène ? 4. L'entremetteuse parle au vers 516 de "coup fatal". Qu'entend par là Agnès ? Qu'aurait-elle dû comprendre ? Pour l'étude de l'acte III scène 4 (v. 940 à 960) (Épisode de la lettre) 1. Rappelez ce qui justifie qu'Horace se confie à Arnolphe. 2. Que sait le spectateur qu'Horace ne sait pas ? Quel effet cela produitil ? 3. Dans la lettre d'Agnès quels verbes marquent "l'éveil" d'Agnès ? Pour l'étude de l'acte V scène 4 1. Faites le plan de cette scène. 2. Que remarquez-vous quant à l'évolution de la prise de parole de chacun des personnages ? 3. Expliquez : "Chez vous le mariage est fâcheux et pénible" (v 1516). Pour l'étude de l'acte III scène 5 1. Relevez dans cette tirade le champ lexical de la souffrance. 2. Quel ton donne-t-il à cette scène ? 3. Quels termes emploie Arnolphe pour parler d'Agnès ? Quel changement cela apporte-t-il à propos du regard qu'il porte à présent sur Agnès ? Pour l'étude de l'acte IV scène 1 1. Qu'a découvert Arnolphe entre la scène 5 de l'acte III et ce début d'acte ? 2. Relevez les temps utilisés dans ce monologue et dégagez-en la structure. 3. Relevez le champ lexical du désir amoureux. A quels registres de langue peut-il se rapporter ? 48 Annexe n° 6 : Devoir surveillé de seconde L'Ecole des Femmes de Molière 1 - Quelles sont les caractéristiques de la farce et de la commedia dell'arte ? (2 points) 2 - En quoi Arnolphe se rattache-t-il à ces deux genres ? (4 points) 3 - Qu'est-ce qui fait d'Arnolphe, personnage comique, le doublet d'un héros cornélien ? Illustrez d'exemples précis. (4 points) 4 - Quelles sont les conventions qui régissent le traitement de l'espace et du temps dans le théâtre classique ? Comment Molière s'adapte-t-il à ces règles ? Donnez des exemples précis tirés de la pièce L'Ecole des Femmes. (4 points) 5 - Comment évoluent le dialogue et la prise de parole entre Arnolphe et Agnès ? Quels rapports de farce expriment-ils ? Comment cette évolution se manifeste-t-elle dans la typographie, l'enchaînement des répliques et les formes de dialogue ? (3 points) 6 - Si vous étiez metteur en scène, comment feriez-vous travailler l'actrice qui jouerait le rôle d'Agnès ? Fondez votre réponse sur un exemple précis. (3 points) 49 BIBLIOGRAPHIE Ouvrages ADAM (J.-M.) : Lire en quatrième, Larousse. BOISSINOT - MOUGENOT : Techniques du français. (Tome 1 de Langages littéraires). CANOVA (Marie-Claude) : La Comédie, Hachette. CORVIN (Michel) : Molière et ses metteurs en scène d'aujourd'hui, Presses universitaires de Lyon. HELBO (André) : Æ Les Mots et les gestes Ø, in Essais sur le théâtre, PUL. LARTHOMAS (P.) : Le Langage dramatique. Ouvrage collectif : Le Théâtre, Bordas. Ouvrage collectif : Pour pratiquer les textes de théâtre, Deboeck-Duculot. PUTEGNAT (Roselyne) : Æ Théâtre et mise en scène Ø, in Pratiques pédagogiques. ROUBINE (J.-J.) : Théâtre et mise en scène 1880-1980, PUF. RYNGAERT (Jean-Pierre) : Introduction à l'analyse du théâtre. SCHMIDT : Savoir lire, Viala Didier. UBERSFELD (Anne) : Lire le théâtre, Ed. Sociales. UBERSFELD (Anne) : L'Ecole du spectateur. Articles : Articles tirés des Cahiers Pédagogiques, n° 70 sur le théâtre : n° 230 231 : Pedagogia dell'arte, n° 51 : Théâtre et enseignement. Articles tirés de l'Ecole des Lettres, Années 1982 et 1983. Æ Théâtre acte IV Ø, in Le Français Aujourd'hui, revue de l'Association Française des Enseignants de Français. 50