Community source
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Du logiciel libre au logiciel de communauté Un modèle de prédiction d’adoption dans le monde de l’éducation Jacky AKOKA, Isabelle COMYN-WATTIAU CEDRIC-CNAM et INT 292 Rue Saint Martin 75141 Paris Cedex 03, France [email protected] CEDRIC-CNAM et ESSEC [email protected] Abstract Open source software is now widely developed and used. In this paper, we describe a new paradigm based on a similar concept, the community source. We describe the main principles guiding the community source project. Then we propose a research model intending to predict the adoption of a community source project by education institutions and more specifically by higher education universities . Our model results from a tight combination of adoption models related to the open source phenomenon and those considering the e-learning domain. A pilot study has been conducted confirming the main hypotheses of our model. Future research will include a wide field study allowing us to verify the model hypotheses. Résumé Le succès des logiciels libres (Open Source Software) est incontestable. Dans cet article, nous présentons un courant voisin, celui du « logiciel de communauté » (Community Source). L’objectif de cet article est double. D’une part, nous présentons les principaux concepts et principes qui gouvernent le nouveau paradigme de logiciel de communauté. D’autre part, nous proposons un modèle permettant de prédire l’intention d’une organisation appartenant au monde de l’éducation à adopter ce nouveau dispositif. Ce modèle résulte d’une analyse de la littérature liée à l’ « open source » ainsi que celle relative à l’ «e-learning ». Nous construisons des hypothèses sur la base des résultats de recherche dans ces domaines. Une étude pilote a été menée pour valider ce modèle et ses variables. Cette étude confirme la pertinence des variables et la vraisemblance des hypothèses énoncées. La recherche future permettra de vérifier les hypothèses du modèle sur une base plus large notamment en termes de taille et de variétés d’organisations à inclure dans l’échantillon étudié. Keywords : open source software, community source, e-learning, adoption prediction model. Mots-clés : logiciel libre, logiciel de communauté, formation à distance, modèle d’adoption. 1 Introduction Le succès des logiciels libres (Open Source Software), introduits sur les marchés dès le début des années 1990, est incontestable. Il représente une alternative certaine aux logiciels propriétaires dont le marché est estimé à plus de 300 milliards de dollars [Khalak, 2000]. Il connaît aujourd’hui une maturité due essentiellement à son paradigme de base : mettre à la disposition des utilisateurs, un code source ouvert. Ce dernier peut être modifié de manière à permettre son évolution. Le logiciel est ainsi modifié par plusieurs utilisateurs et/ou développeurs en parallèle lui conférant plus de robustesse. Ce même paradigme implique que les utilisateurs d’une version peuvent exécuter, modifier, améliorer et diffuser le résultat de leurs travaux. Il est fondé sur la liberté d’exécution du logiciel, la liberté d’étudier son fonctionnement et de l’adapter à ses besoins propres, la liberté de redistribuer des copies à d’autres utilisateurs et enfin, celle de l’améliorer et de distribuer la version améliorée aux autres utilisateurs. Ces quatre libertés confèrent le caractère « libre » au logiciel concerné [Free Software Foundation]. A noter que ces logiciels libres ne sont pas réservés uniquement à des développeurs ou à des utilisateurs avertis. Des utilisateurs standards ont accès à des logiciels libres tels que OpenOffice ou Mozilla. La simplicité d’usage et l’interface intuitive qui caractérisent certains logiciels libres permettent de mettre à la disposition des utilisateurs des produits qui répondent correctement à leurs besoins. Ils permettent aussi une personnalisation plus aisée que dans certains logiciels propriétaires [Coppola et al., 2004]. Nous pensons aussi qu’ils offrent un degré de flexibilité plus important que celui qui caractérise les logiciels commerciaux. Enfin, ils autorisent des évolutions rapides des aspects fonctionnels et non fonctionnels. C’est un déclencheur de compétition au sein du marché des logiciels, tant en termes de prix que de qualité. Le phénomène des logiciels libres connaît quelques limites et fait l’objet de critiques. Ainsi, la Free Software Foundation considère que l’Open Source ne permet pas de protéger les libertés des utilisateurs. Le fait que le logiciel soit « libre » et non « gratuit » entraîne une limitation du développement du marché [Feller et al., 2000]. Un pas supplémentaire a été franchi en 2003 avec l’Open Source Initiative qui préconise les conditions de distribution des produits logiciels [Open Source Initiative] : - distribution et redistribution gratuite des logiciels, - disponibilité des codes sources, - autorisation de modification des sources, - pas de discrimination envers des personnes ou des groupes de personnes dans l’utilisation du logiciel, - application des droits attachés aux logiciels à tous les utilisateurs, Ces conditions traduisent bien les tensions qui existent entre les adeptes du « Free Software » et ceux de l’ « Open Source ». Dans cet article, nous présentons un troisième courant, celui du « logiciel de communauté », appelé « Community Source ». Le développement des logiciels de communauté s’apparente à celui du libre dans le sens où le code source est ouvert et disponible gratuitement. Comme dans le cas du logiciel libre, l’utilisateur peut personnaliser le logiciel. Cette amélioration est mise à la disposition des autres utilisateurs. La différence principale est que le logiciel de communauté est fondé sur l’implication de l’organisation. Cette dernière accepte de consacrer du temps et des efforts de ses employés pour le développement d’un logiciel qui sera mis à la 2 disposition de l’ensemble de la communauté, par exemple éducative. Une autre différence provient du fait que l’utilisateur final n’est pas appelé à développer directement des améliorations aux logiciels. Les utilisateurs sont certes partie prenante de l’organisation mais ne consacrent pas de temps au développement des logiciels de communauté. Ce développement est du ressort des informaticiens et des développeurs ; et plus généralement, des spécialistes des technologies de l’information. Enfin, l’organisation qui se lance dans cette initiative peut bien sûr compter sur l’aide financière des gouvernements, des fondations ou des organisations aidant la recherche telles que le CNRS ou la National Science Foundation (NSF). L’objectif de cet article est double. D’une part, nous présentons les principaux concepts et principes qui gouvernent le nouveau paradigme de « Community Service Development » ou logiciel de communauté. D’autre part, nous proposons un modèle permettant de prédire l’intention d’une organisation à adopter ce nouveau dispositif. Le reste de cet article est organisé de la façon suivante : la section 2 est consacrée à la présentation du paradigme de « Community Source ». La section suivante est dédiée à la présentation de notre modèle d’adoption et des hypothèses sous-jacentes. Une première validation du modèle est présenté en section 4. On y trouvera aussi une analyse des principaux résultats obtenus à ce stade de l’analyse et de leurs implications. Enfin, nous concluons en section 5 et présentons des recherches futures. 2 Le paradigme du logiciel de communauté (‘community source’) Nous nous limitons dans ce paragraphe au phénomène de logiciel de communauté dans le monde de l’éducation. Plusieurs projets de logiciels de communauté sont actuellement réalisés et mis en œuvre au sein du monde éducatif. Parmi les projets les plus aboutis, citons celui de uPortal (www.uportal.org/) qui promeut l’utilisation de Java dans l’enseignement supérieur aux USA. UPortal est bien entendu développé en Java, il est « open source » et gratuit. Résultat du travail de l’organisation JA-SIG (Java Architecture – Special Interest Group), il est utilisé par de très nombreuses universités américaines comme portail destiné aux étudiants. Bien entendu, la communauté universitaire française y est très active. Elle participe à de nombreux développements. Pour faciliter l’intégration de nouveaux développements, l’université de Yale a réalisé un logiciel d’authentification. Toutes les universités membres peuvent personnaliser le portail qui devient peu à peu le web du campus. Des « outils de communauté » permettent d’établir des relations entre campus. Mentionnons plus particulièrement une réalisation de la communauté française, le portail ESUP, un espace numérique de travail [Antoine et al., 2003]. Il s’agit d’un environnement de travail numérique, permettant d’accéder à différentes sources d’information ainsi qu’à des ressources numériques. Il est accessible aussi bien aux enseignants-chercheurs, au personnel administratif ainsi qu’aux étudiants des universités membres. Il propose un « bureau virtuel », point d’accès unique à l’ensemble des applications des universités. Plusieurs universités participent à ce projet de logiciel de communauté, telles que les universités de Valenciennes, de Nancy, de Rennes, etc. Mentionnons aussi un autre environnement numérique de travail, libre et gratuit, le bureau virtuel de Mille, modèle d’infrastructure de logiciel libre en éducation (http://www.mille.ca). Un autre grand projet Open Source au sens du logiciel de communauté est OSPI (Open 3 Source Portfolio Initiative). C’est un projet collaboratif fondé sur le système de e-portfolio de l’université de Minnesota. Un e-portfolio est un dossier personnel électronique qui relate les acquis de formation et d’expérience d'une personne en vue d'une reconnaissance par un établissement d'enseignement ou un employeur. OSPI a été co-fondé par l’université de Delaware et le « r.smart group » (www.rsmart.com). C’est sans doute un des plus grands logiciels de communauté dans le monde de l’éducation. La participation au consortium est fondée sur la « méritocratie ». Ses objectifs sont : - créer et maintenir des logiciels de type e-portfolio, - construire une plate-forme permettant d’accélérer l’innovation e-portfolio pour l’enseignement l’apprentissage, - refléter les « bonnes pratiques » dans le domaine de e-portfolio, - influencer le mouvement « open source » dans l’éducation sur les principes de « Community Source », Un e-portfolio n’est pas seulement une application pour le monde de l’éducation. C’est aussi une application culturelle. Elle permet aux membres de la communauté de stocker des éléments relatifs à leur travail et pouvant servir aux membres de la communauté dans leur effort d’apprentissage tout au long de la vie. OSPI offre donc des portfolios d’apprentissage de source libre. Grâce à cette initiative, de nombreux portfolios scolaires ont été développés et mis à la disposition des écoles qui adhèrent aux principes de la communauté. Les enseignants sont appelés à utiliser ces e-portfolios pour y stocker des supports pédagogiques accessibles à des élèves dans un espace d’apprentissage. On assiste depuis peu à des regroupements de communautés de logiciels. Ainsi, le contenu d’OSPI se trouve sur le site de Sakai (http://sakaiproject.org/). OSPI utilise les outils collaboratifs de Sakai. Ce dernier est une communauté offrant un environnement collaboratif et d’apprentissage. C’est un produit « open source » gratuit, maintenu par toute la communauté Sakai. Il est très représentatif des « Community Sources ». Les membres sont des volontaires provenant d’organisations de différents continents. Il fonctionne aussi sur le principe de la « méritocratie ». Créé conjointement par le MIT, l’université du Michigan, l’université d’Indiana et l’univeristé de Stanford, il est le projet « Open Source – Community Source » le plus grand au monde. Dédié au e-learning, il compte plus de 100 institutions. Son objectif principal est de mettre à la disposition des membres de la communauté éducative, les applications et les outils qui leur sont associés. Enfin en Europe, Lubeck University of Applied Sciences en Hollande a pris l’initiative de créer un forum, principalement destiné aux pays européens intéressés par la formation à distance et tout au long de la vie. L’objectif de cette université néerlandaise est de construire une communauté d’apprentissage tenant compte des spécificités européennes. Comme nous le constatons, le mouvement « Community Source » est largement inspiré par les valeurs scolaires et universitaires de recherche et d’enseignement. Les portfolios d’origine universitaire constituent un élément décisif dans l’apprentissage à distance. Les portfolios des enseignants donnent à présent naissance à des portfolios d’étudiants mis à la disposition des membres de la communauté pour comprendre les difficultés d’apprentissages rencontrées, les réflexions personnelles sur la pédagogie, les travaux et présentations réalisés par eux. Malgré un nombre important et grandissant d’organisations qui ont adopté le phénomène de « Community source » (Annexe 1), il n’y a, à notre connaissance, aucune recherche permettant la compréhension de son rôle et surtout de son adoption par les institutions éducatives. C’est l’objet principal de cet article et, plus particulièrement, du paragraphe suivant. 4 3 Un modèle d’adoption dans le monde de l’éducation On constate encore des avancées jugées par beaucoup trop modestes dans l’utilisation des technologies pour l’enseignement à distance. Les premières études avaient montré que la réussite dans ce domaine était largement liée à une stratégie institutionnelle. Plus récemment, [Zellweger 2007] montre que l’adoption des technologies de l’information par la faculté obéit à un cycle : la mise à disposition du temps nécessaire a un impact sur les compétences disponibles, lesquelles vont permettre la conception de cours en ligne, qui va permettre le développement d’une expérience. La réflexion sur cette expérience va influer sur le temps disponible pour continuer l’expérience. Cela devient un cercle vertueux. La recherche a aussi identifié un ensemble de variables externes au cycle, mais qui sont corrélées aux différentes variables du cycle, comme l’existence d’incitations, des variables individuelles, l’expérience des pairs, l’infrastructure technique. Nous avons repris les variables pertinentes de ce modèle pour notre recherche sur les logiciels de communauté. Le développement de notre modèle d’adoption est fondé sur deux hypothèses : - la « Community Source » représente une instance (particulière) des communautés de pratique - bien que l’adoption du paradigme de Community Source concerne en premier lieu les organisations de type scolaire et universitaire , les acteurs de ces dernières jouent un rôle primordial dans cette adoption. 3.1 « Community source » et communauté de pratique Les communautés de pratique sont généralement définies comme « des groupes de personnes liées de manière informelle par le partage d’expériences et la passion d’un objectif partagé » [Wenger et al., 2000]. Deux éléments caractérisent ces communautés : la pratique et l’identité des membres de la communauté. Ces deux éléments contribuent à créer un environnement collaboratif destiné à l’échange de connaissances, des savoirs et des savoir-faire entre les membres de la communauté. Deux dimensions caractérisent donc les communautés de pratique : - un espace identitaire qui structure la participation à la communauté [Wenger, 1998]. C’est cet espace qui donne sens et motivation au travail [Soulier, 2004]. - une pratique partagée qui détermine les formes d’échange et d’acquisition des connaissances et des savoir-faire [Lave et al., 1991]. Le monde de l’éducation représente, à travers ses valeurs, ses objectifs et ses contraintes, une communauté de pratique caractérisée par les deux dimensions décrites plus haut. En adhérant aux principes des « Community Sources », des institutions éducatives créent de facto un espace identitaire ouvert mais structuré. Les enjeux de formation, et plus particulièrement de la formation tout au long de la vie, constituent une motivation d’adhésion à cet espace collaboratif. En s’engageant à développer et améliorer des applications liées à l’apprentissage et répondant aux besoins communs, les membres de la communauté partagent une pratique liée à l’acquisition et à la diffusion des connaissances. 3.2 L’adoption : phénomène individuel ou collectif ? Dans la plupart des communautés de pratique, l’adhésion et la participation est avant tout un 5 acte individuel. [Wenger et al., 2002] considèrent qu’il existe trois niveaux de participation dans une communauté de pratique : le noyau dur, les membres actifs et les membres périphériques. Dans les « Community Source », une telle segmentation est impossible. En effet, il existe deux niveaux de participation : organisationnelle et individuelle. L’organisation adhère à la communauté. Elle s’engage à dégager les ressources, essentiellement humaines, pour participer au projet commun. A leur tour, les individus choisis par l’organisation s’engagent à remplir les tâches qui leur incombent. En cas de défaillance, l’organisation doit pourvoir à leur remplacement. A la différence des communautés de pratique, nous avons donc deux niveaux de participation. En réalité, il y a une symbiose entre les individus et leur organisation. Il existe entre eux une communauté d’intérêts. Ce sont « deux parties d’un même tout mutuellement construit » [Bredo, 1994]. L’assimilation de la « Community Source » à une communauté de pratique et celui du « tout mutuellement construit » à celui de membre de la communauté, nous permet de développer un modèle d’adoption fondé sur ces deux principes. 3.3 Le modèle de prédiction de l’intention d’adoption Les modèles classiques d’adoption, notamment ceux utilisés dans le domaine du marketing, définissent le processus d’adoption en trois étapes : la prise de connaissances, l’intérêt, la prise en mains. Ces trois étapes sont ensuite éventuellement suivies du processus d’adoption [Williams 1997 ; Kotler 1984]. Ces modèles sont difficiles à exploiter dans notre domaine, dans la mesure notamment où il s’agit d’un environnement collaboratif et non concurrentiel. Le modèle d’innovation de Rogers [Rogers, 2003] n’est pas adéquat car il est utile pour cibler une population d’ « early adopters », aptes à introduire le phénomène nouveau dans un contexte donné. On pense naturellement à mobiliser la théorie néo-institutionnelle [DiMaggio & Powell, 1991] qui structure l’intention d’adoption selon trois formes de pression : normatives, coercitives et mimétiques. Dans notre contexte toutefois, le phénomène de communauté n’obéit guère qu’éventuellement aux facteurs mimétiques. Enfin, la théorie de la structuration s’applique naturellement à l’ « open source » [Giddens, 1987]. Elle aborde l’appropriation d’une technologie de l’information et de la communication (TIC) en explicitant les interactions entre les individus et la structure sociale de l’organisation. Nous n’avons pas retenu cette théorie car notre propos n’est pas lié à la structure sociale de l’organisation. La théorie du capital humain [Becker, 1993] tend à lier la capacité d’une organisation à adopter une innovation à la disponibilité d’experts en son sein. Les experts mettent à la disposition de l’organisation leurs compétences, leurs expériences et leurs savoirs. La « community source » est un moyen privilégié d’échanger et de partager ces savoirs et savoirfaire. En conséquence, les institutions scolaires ou universitaires ne peuvent adopter et adhérer à une communauté de logiciel que si elles possèdent des ressources humaines capables de comprendre les besoins des utilisateurs, et les technologies mises en œuvre. Cette adoption ne sera possible que si ces ressources humaines sont capables de déployer les applications développées en commun avec les autres membres de la communauté et de gérer leurs usages au sein de leurs institutions. Il en est de même en ce qui concerne la maintenance de ces applications. Notre première hypothèse est donc la suivante : La disponibilité de ressources humaines est positivement corrélée à l’intention de l’institution éducative à adopter les logiciels de communauté. A noter que le recours à des compétences externes, notamment 6 auprès des sociétés de service, est incompatible avec le paradigme de « Community Source ». En conséquence, toute organisation ne disposant pas de compétences internes ne peut donc adopter les logiciels de communauté. Remarquons que les ressources humaines nécessaires à la personnalisation, au déploiement et à l’utilisation des logiciels de communauté, sont de deux sources différentes : les spécialistes de la pédagogie c’est-à-dire les enseignants, futurs utilisateurs du système, et les experts informatiques détenteurs de l’expertise, c’est-à-dire les informaticiens. Ces deux groupes de personnes peuvent être caractérisés par leur expertise dans leur domaine respectif et leur degré d’implication dans les projets de logiciel de communauté. En ce qui concerne la disponibilité de ces deux catégories d’experts, les deux hypothèses suivantes peuvent être formulées : H1 : La disponibilité de ressources humaines internes est (positivement) corrélée à l’accès à des experts en technologies de l’information. H2 : la disponibilité de ressources humaines internes est (positivement) corrélée à l’accès à des enseignants. Disposer d’experts dans le domaine de la pédagogie et des technologies de l’information n’entraîne pas nécessairement une motivation de ces derniers quant à la participation à des projets de logiciel de communauté. En revanche, cette motivation et la disponibilité jouent un rôle crucial dans la capacité de l’organisation à adopter et à participer aux projets de logiciels de communauté. En conséquence, quatre nouvelles hypothèses sont à vérifier : les deux premières caractérisent le lien entre la disponibilité des experts et leur motivation : H3: la disponibilité d’enseignants est corrélée à l’intention de participer à un projet de logiciel de communauté. H4 : la disponibilité d’informaticiens est corrélée à l’intention de participer à un projet de logiciel de communauté. Les deux autres hypothèses relient cette motivation à l’intention d’adopter des projets de logiciels de communautés. H5 : la motivation des enseignants est corrélée positivement à l’intention d’adopter des logiciels de communauté. H6 : la motivation des informaticiens est positivement corrélée à l’intention d’adopter les logiciels de communauté. Si ces deux hypothèses (H5 et H6) sont avérées, toute institution d’enseignement doit alors s’interroger sur les moyens de mettre en place les conditions de cette motivation. Il est clair que les incitations individuelles sous toutes les formes possibles (dégagement d’heures, primes, reconnaissances, promotions, budgets complémentaires, etc.) devraient jouer un rôle déterminant dans l’attitude des experts, tant pédagogues qu’informaticiens, face à un projet de logiciel de communauté. Nous formulons donc deux hypothèses supplémentaires : H7: la motivation des enseignants est positivement corrélée à l’existence d’incitations de la part de leurs institutions. H8 : la motivation des informaticiens est positivement corrélée à l’existence d’incitations de la part de leurs institutions. Enfin, sur la base des recherches menées dans le domaine du « e-learning », il apparaît important de prendre en considération un ensemble de variables individuelles qui vont influer sur la motivation des personnes, tant enseignants qu’informaticiens. Les variables individuelles généralement prises en compte dans ces recherches sont principalement les valeurs personnelles, la capacité d’innovation, l’expérience et les objectifs pédagogiques poursuivis par les personnes. On formule ainsi les deux hypothèses suivantes : H9 : les variables individuelles peuvent influencer positivement ou négativement la motivation des enseignants. H10 : les variables individuelles peuvent influencer positivement ou négativement la motivation des informaticiens. 7 Outre les compétences humaines en informatique, les recherches sur le « e-learning » montrent qu’un facteur clé de succès est l’existence d’une infrastructure technologique fiable. Nous posons donc l’hypothèse suivante : H11 : l’existence d’une infrastructure technologique fiable est positivement corrélée à l’intention d’adopter un projet de logiciel de communauté. Enfin, en intégrant les variables de contrôle liées à la taille de l’institution éducative et de ses services informatiques, le modèle de prédiction de l’intention d’adopter un logiciel de communauté est présenté à la Figure 1. Motivation des enseignants Existence d’une infrastructure technique fiable H5 H7 H2 H9 Incitations Existence de ressources humaines internes Variables individuelles H10 Disponibilité H3 des enseignants H11 Intention d ’adopter un logiciel de communauté H4 H1 H8 Disponibilité des informaticiens Motivation des informaticiens H6 Taille de l’institution Taille de l’équipe informatique Figure 1. Le modèle de la recherche 4 L’étude pilote Nous avons défini un questionnaire permettant de vérifier les hypothèses énoncées plus haut. Puis nous avons entrepris une étude pilote dans le but d’évaluer et de calibrer notre modèle, avant de la valider sur une grande échelle, et de tester le questionnaire. Nous avons donc interrogé une vingtaine d’acteurs, appartenant à une institution universitaire, ayant une longue tradition de la formation à distance. Le questionnaire comporte à la fois des questions ouvertes et des questions fermées. L’appartenance de cette institution à la communauté éducative française, le besoin en logiciels innovants et les pressions du ministère de tutelle, amènent cette institution à réfléchir à l’adoption de logiciels de communauté. Les acteurs de l’institution tant enseignants que personnels administratifs sont au fait des nouvelles technologies appliquées à l’éducation. Les moyens financiers limités qui leur sont octroyés les ont, de plus, conduit à rechercher les solutions innovantes de nature à éviter la dépendance vis-à-vis des éditeurs de logiciels. Les personnes interrogées représentent à la fois des enseignants-chercheurs et des ingénieurs et techniciens en informatique. Les enseignants interrogés couvrent les disciplines de 8 l’informatique et de la gestion. Leur expérience d’enseignant varie entre un et trente ans. L’échantillon comporte autant d’hommes que de femmes. Certains ont expérimenté des plates-formes de formation à distance et développé des outils pédagogiques, d’autres ne l’ont pas encore fait. Les premiers résultats sont résumés ci-dessous. Le concept de « Community Source » reste largement inconnu, ce qui est surprenant dans le contexte universitaire. Toutefois, l’idée leur semble attrayante. Ce même concept paraît restreindre le concept plus « ouvert » d’ « open source », avec lesquels, en revanche, ils sont familiers ou, au moins, sensibilisés. C’est une analyse rapide car la communauté qui se forme autour d’un tel projet intègre toute institution ou personne qui adhère à ses valeurs, ses principes ou ses objectifs. Une condition importante est mentionnées plusieurs fois : la désignation d’un chef de projet. C’est un projet transversal qui repose sur différentes entités de l’institution. Il implique une formation adéquate et une incitation du « top management ». A noter qu’il reste encore un nombre extrêmement restreint d’enseignants pour lesquels la pédagogie la meilleure, hors présentiel, est le livre. Quant à nos hypothèses, les premiers résultats indiquent que l’hypothèse de Becker sur le capital humain formulée est de nouveau vérifiée. Dans notre modèle, l’hypothèse de Becker est décomposée en quatre hypothèses H1, H2, H3 et H4 qui lient l’intention d’adopter un logiciel de communauté à la disponibilité des acteurs, laquelle est corrélée avec l’existence de ressources humaines internes. Le capital humain d’une organisation, lorsqu’il est disponible, constitue un prédicteur solide de l’intention d’adoption d’un projet de logiciel de communauté. Il y a donc une corrélation positive entre la disponibilité de ressources humaines internes et l’intention de participer aux projets de logiciels de communauté. Ce résultat rejoint celui de [Li et al., 2005] pour les logiciels libres. Il en est de même en ce qui concerne l’accès aux experts en pédagogie et en technologies de l’information. Plus l’institution dispose en nombre suffisant de ressources internes, plus elle trouve parmi elles des experts en pédagogies et en technologies de l’information. La motivation des experts joue un rôle crucial dans le processus d’adoption. Plus la motivation est grande, plus l’intention de participer est affirmée. A l’inverse, sans une motivation affirmée, l’intention décline. La condition sine qua non pour cette motivation semble être l’existence d’incitations (hypothèses H7 et H8), notamment le temps alloué pour le projet. L’hypothèse H11 ne trouve pas beaucoup d’écho dans ces entretiens. Enfin, nous n’avons pas pu mesurer l’effet de la taille de l’institution et de ses services informatiques sur l’intention d’adoption. Ces résultats nous encouragent à retenir en l’état le modèle proposé. Il reste alors à entreprendre une étude à grande échelle auprès de plusieurs institutions d’éducation. Dans ce but, nous avons réalisé les tâches suivantes : la rédaction d’un questionnaire servant de base à nos interviews, - la définition précise des métriques et des échelles de mesure, - la définition et la composition de l’échantillon visé, - une réflexion sur les méthodes d’analyse des données qui seront recueillies, notamment pour tester le modèle global. 5 Conclusion et recherche future Dans cet article, nous avons défini et analysé le concept relativement neuf de logiciel de communauté. Nous l’avons comparé à celui du logiciel libre et celui du logiciel ouvert. Nous avons aussi tenté de faire le lien avec le concept de communauté de pratique. Enfin, nous 9 avons rapproché la recherche sur ce thème de la recherche relative à la formation à distance (e-learning). Une analyse de l’existant, notamment via Internet, nous a fait prendre conscience de l’ampleur du phénomène de “community source”, même si celui-ci est peu connu en France. Il est, de toute évidence, appelé à se développer notamment dans le monde de l’éducation. Sur la base des recherches antérieures sur les sujets connexes, nous avons proposé un modèle dédié au concept de logiciel de communauté, permettant de prédire l’intention d’adoption de ce concept par une institution universitaire. Nous avons effectué une première validation du modèle au moyen d’une étude pilote. La recherche future nous permettra de compléter cette validation par une enquête à grande échelle. Devant les pénuries que connaissent les institutions scolaires et universitaires, le concept de logiciel de communauté nous semble promis à un brillant avenir, dans la mesure où il représente un moyen très riche de mutualiser les compétences et les ressources tant humaines que technologiques et organisationnelles. Il va de soi qu’un tel projet n’est pas uniquement un projet informatique, mais aussi un projet organisationnel. Tout manque de volonté et/ou d’implication de l’institution serait largement pénalisante, de même que les facteurs de blocage liés aux individus. Une autre recherche future concerne l’étude de ce même phénomène hors du secteur de l’éducation. References [Antoine et al., 2003] Antoine J.M, Avelin J.G, Bourges, R, ESUP Portail, un ENT universitaire, JRES, Journées Réseaux, Lille, 2003. 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[Williams, 1997] Williams, L., Information technology adoption: Using classical adoption models to predict AEI software implementation. Journal of Business Logistics. 1997. [Zellweger 2007] Zellweger Moser, F. Faculty Adoption of Educational Technology, Educause Quarterly, Number 1, 2007. ANNEXE 1 Exemples de ressources relatives aux “community sources” 1) Ressources générales School Forge http://www.schoolforge.net EduForge http://eduforge.org/ FOSS (Free and Open Source Software) Primer http://www.iosn.net/education/foss-education-primer UNESCO’s Free Open Sources Software for e-Learning http://www.unesco.org/iiep/virtualuniversity/forums2.php?queryforums_id=9&querychap ter=1 K12 Linux in Schools Project http://k12os.org Open Source Schools News http://opensourceschools.org/ Free Software Foundation http://www.fsf.org Creative Commons http://creativecommons.org Making Decisions about Open Source for K12 http://www.netc.org/openoptions/ Open Source Now http://www.redhat.com/opensourcenow/ Open Source Opens Learning http://www.rsmart.com/assets/OpenSourceOpensLearningJuly2004.pdf The Cathedral and the Bazaar http://www.catb.org/~esr/writings/cathedralbazaar/cathedral-bazaar/index.html Open Source Initiative http://www.opensource.org/index.php Open CD Project http://www.msad71.net/OpenSource/Open_Source_Links.html Red Hat Academy http://www.redhat.com/training/academy/ 11 2) Ressources dédiées aux enseignants Google Web-based tools http://www.google.com/intl/en/options/ Zoho Writer (Web-based word processing) http://www.zohowriter.com OpenOffice (http://openoffice.org) the cross-platform productivity suite includes a word processor, spreadsheet, presentation manager, and drawing program, works transparently with a variety of file formats, including those of Microsoft Office. AjaxWrite13 http://us.ajax13.com/en/index.jsp Worldlabel.com http://www.worldlabel.com/Pages/openoffice-template.htm Free templates for OpenOffice documents JotSpot Live (Live group notetaking tool) http://www.jotlive.com/ StarOffice Suite (free to education) http://www.sun.com/software/star/staroffice/index.xml No license fees for education, a leading alternative office suite that offers word processing, spreadsheet, presentation, drawing, and database capabilities, and export to PDF in a familiar-looking interface. 3) Autres ressources PrimoPDF http://www.primopdf.com/ Amaya (http://www.w3.org/Amaya/) Web editor tools hosted by W3C Blender (http://www.blender3d.org/cms/Gallery.55.0.html) 3D graphics creation suite for modeling, animation, rendering, game creation and more. BlueFish (http://bluefish.openoffice.nl) Web editor tools Celestia (http://www.shatters.net/celestia/) free space simulation Centre (http://www.miller-group.net/) the open source, free student information system that tracks student demographics, includes a scheduler and gradebook, maintains attendance records and transcripts, creates calendars, and displays student photos. Student billing and cafeteria modules are also available. Debian Linux (http://www.debian.org/) Free operating system Fedora (http://fedora.redhat.com/) Free operating system Free Mind (http://freemind.sourceforge.net/wiki/index.php/Main_Page) Brainstorming and mind mapping software that also outlines and organizes links and can exports to html format. Gimp (http://www.gimp.org) Cross platform graphic software for photo retouching, image composition and image authoring. Gliffy (http://www.gliffy.com/) Create and share diagrams on the Web Graphic Converter (http://www.graphic-converter.net/download.htm) Graphics software that allows users to open, view, resize, and edit in multiple images formats. GRASS (http://grass.itc.it) Graphical Resource Analysis Support System for analyzing GIS data formats. ImageJ (http://rsb.info.nih.gov/ij) Java-based image processing tool developed at the National Institute of Health for use in science and math. Jacuba Charts (Play with data and create attractive charts online) http://charts.jacuba.com/ http://www.jotlive.com/Koha (http://www.katipo.co.nz/solutions/koha/) Library circulation, cataloging, and acquisitions system Moodle (http://moodle.org/) is a course management system designed to help educators create online courses with a ground in constructionist pedagogy. 12 Mozilla / Firefox 1.0 (http://www.mozilla.org/products/firefox/) the browser offers a built-in popup blocker, protection from spyware, and smart search features and imports favorites, and settings from other browsers. NVU Web Editor (http://www.nvu.com/ )WYSIWYG editing of pages, makes word processor..Integrated file management via FTP. Simply login to your web site and navigate through your files, editing web pages on the fly, directly from your site. Odeo (for recording and sharing audio) http://odeo.com/ OSPI (http://www.theospi.org/) Open Source Portfolio Initiative Quanta Plus (http://quanta.kdewebdev.org/) Web development tools Sakai Project (http://www.sakaiproject.org) Online course management system Shibboleth (http://shibboleth.internet2.edu/) Allows teachers and pupils remote, secure access to online content from multiple providers using the same password, eliminating the need to remember multiple passwords. Squeak (http://www.squeak.org/index.html) Media authoring and educational games for children StarLogo (http://education.mit.edu/starlogo) Programmable modeling environment creating in the MIT Media Lab. Thunderbird (http://www.mozilla.org/products/thunderbird/) email system offering intelligent spam filters, built-in RSS reader, quick search, and more Tux Paint (http://www.newbreedsoftware.com/tuxpaint/) A free drawing program designed for children ages 3 and up, featuring an attractive and simple interface, and graphics and sound effects that get played as the user interacts. TUX&GNU@school http://www.fsfeurope.org/projects/education/tgs/tagatschool8.en.html WebMail (http://www.webmail.us/) Hosted email, an Outlook-style interface, a choice email box sizes, virus protection and spam filters Weft QDA (http://www.pressure.to/qda/) for coding and analyzing qualitative data http://www.zohowriter.com/ThinkFree http://www.thinkfree.com/common/main.tfo Zamzar (free file conversion) http://zamzar.com/ 13