Si vous êtes capable de photographier de la nourriture
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Si vous êtes capable de photographier de la nourriture
08 « Si vous êtes capable de photographier de la nourriture, vous êtes capable de tout photographier… » FOODPHOTO FESTIVAL VEJLE DENMARK C’est par ces paroles que l’organisateur Günther Beer a inauguré le troisième Food Photo Festival. Après le succès des deux éditions précédentes organisées à Tarragone (Espagne), le monde de la photo attendait l’évènement avec beaucoup d’impatience. Cette grand-messe de la photographie culinaire a eu lieu cette fois à Vejle, une modeste mais plaisante bourgade à une petite heure de route de Copenhague. Quelque 150 photographes food de 26 pays avaient répondu à l’appel. Les expositions photo, organisées un peu partout dans la ville, ont présenté 296 1516 galerie de photos une synthèse mondiale de ce qui se fait de mieux en matière de photographie culinaire. Pour Foodprint, c’est là un biotope idéal pour compléter chaque année notre extraordinaire galerie de photos avec des photos food hors du commun. La galerie dans Foodprint1516 se veut en effet un reflet sans prétention du travail quotidien des photographes food dans le monde entier. A Vejle, nous avons pu découvrir en avant-première les nouvelles tendances. Des photographes qui explorent des horizons totalement nouveaux partageaient en effet ici confraternellement leur travail. Au milieu de ce bouillonnement de créativité, des questions ont néanmoins été posées à propos de l’avenir qui est réservé aux photographes culinaires. Cet avenir est-il encore prometteur… ? C’est ce que nous nous sommes empressés de demander à Peter Steiner. Il est Art Director du magazine gastronomique allemand Der Feinschmecker. Une autorité, donc, dans le paysage médiatique culinaire. Il était ici en quête de nouveaux talents. Foodprint Peter, quelles nouvelles évolutions avez-vous déjà pu découvrir ici dans la photographie food ? Peter Steiner Les jeunes photographes ont clairement pris l’habitude de sortir du studio. Souvent, ils n’ont même plus de studio. La photographie culinaire ne se passe plus seulement dans des assiettes. En photographie culinaire également, storytelling est devenu le mot à la mode. Un reportage est désormais un récit et les photos doivent raconter une histoire. Les photos culinaires ne sont plus de la publicité. Les assiettes peuvent être légèrement salies, la nourriture déjà entamée. Le tout ne doit pas être trop clean. « Personnellement, je cherche pour Feinschmecker des photographes qui ne misent pas simplement sur ce qu’ils connaissent déjà, mais qui sont parfois un peu borderline. J’attends des jeunes photographes qu’ils ne se contentent pas d’imiter ce que la génération précédente faisait parfaitement. Je veux qu’ils sortent des images totalement nouvelles et inattendues. Pour des magazines gastronomiques, celles-ci peuvent même être un peu choquantes. Aujourd’hui, les lecteurs veulent voir de nouvelles choses. » Foodprint Les magazines culinaires se plaignent de souffrir terriblement de la concurrence d’internet. Y a-t-il un avenir pour eux et pour les photographes food ? P Steiner La mort des magazines et des livres est annoncée depuis des années. Pourtant, il est clair qu’ils n’ont pas encore poussé leur dernier soupir. Je crois même que c’est le contraire qui se passe, et qu’il continuera d’exister un marché pour les magazines et les livres. Par extension, la remarque est aussi valable pour la photographie. Les centaines d’images que nous avalons chaque jour sur internet sont éphémères et souvent de mauvaise qualité. Les photos que l’on contemple dans un magazine nécessitent en revanche davantage d’attention et doivent dès lors être parfaites. Par analogie avec la cuisine, disons que l’internet c’est de la fast communication et le magazine de la slow communication. La présentation sur écran et sous forme imprimée est aussi totalement différente. Techniquement, l’évolution en photographie ne s’arrêtera pas : toujours de nouveaux appareils et toujours de meilleurs logiciels. Mais au bout de compte, c’est celui qui pousse sur le bouton qui détermine le résultat final. La demande de belles photos food continue d’augmenter, donc les photographes (food) créatifs ont incontestablement un avenir selon moi. Foodprint Merci pour cette vision positive. Qui est aussi encourageante pour Foodprint. Nous restons en effet assurés de disposer d’une belle galerie de photos Joris Luyten 297