La structure sociale du Québec, XIXe siècle

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La structure sociale du Québec, XIXe siècle
La structure sociale du Québec,
XIXe siècle
Partie 5
Professeur : Christian Dessureault
L’étude des structures sociales
•
Les objectifs
• Déterminer le degré et la
nature des inégalités entre
les personnes dans une
société donnée
• Saisir le processus de
reproduction des inégalités
dans le temps
• Identifier les facteurs de
changement
• Les deux principaux
modèles de stratification:
– Le modèle marxiste
– Le modèle weberien
La plupart des travaux sur
la structure sociale du
Québec au XIXe siècle
empruntent à l’un ou
l’autre de ces deux modèles
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Le modèle marxiste : les concepts de
classes et de lutte de classes
• Le concept de classes
renvoie à la contradiction
fondamentale des intérêts
entre deux groupes
principaux d ’un mode de
production économique
dominant dans une société
(ex. le capitaliste et le
prolétaire dans le mode de
production capitaliste)
• La lutte entre les deux
classes fondamentales d’un
mode de production
constitue le moteur de
l’histoire
• Cette lutte conduit à une
transformation radicale de la
société et à l’avènement
d’un nouveau mode de
production dominant
Le modèle marxiste : les critères de
classement social
L’identification d’une personne à une classe spécifique de la
société et la place de cette classe dans la hiérarchie sociale
• La place et le rôle d’une personne ou d’un groupe dans le
système de production et d’échange (en dernière instance)
• Le revenu et la richesse d’une personne ou d’un groupe
• Le mode de vie et les valeurs
• Le poids dans le système politique
• La conscience de classes ou la conscience d’appartenir à
un groupe spécifique de la société
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Le modèle weberien : les fondements et
les critères de classement social
• Trois types distincts de • La complexité de la
hiérarchie sociale :
hiérarchie sociale :
• L’ordre économique : le
revenu ou la richesse
• L’ordre social : le prestige et
les valeurs
• L ’ordre politique : la place
dans l’organisation politique
et ses relations avec le
pouvoir
• Le rang d’une personne
peut varier d’un type de
hiérarchie à l’autre
• Aucun de ces trois types
de hiérarchie n’est à priori
déterminant par rapport
aux deux autres
Les principales questions de
débat dans l’historiographie
• Les critères de classement social
• Les rapports entre la structure sociale et la structure
économique
• La structure sociale, l ’appartenance ethnique et la question
nationale au Québec
• L’existence d’une véritable bourgeoisie industrielle
dynamique
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Les critères de classement social
dans les travaux sur le Québec
• La plupart des auteurs réfèrent aux critères marxistes de
classement des classes ou des groupes sociaux, tantôt comme
des critères déterminants, tantôt comme des critères importants
parmi d’autres.
• L’origine ethnique et la mentalité des acteurs constituent dans
plusieurs travaux des critères implicites de classement des
individus et des groupes dans la structure sociale (même chez
certains auteurs marxistes)
• L’importance de la dimension politique dans le découpage et
la définition des groupes sociaux dans la plupart des travaux
(amalgame des concepts de luttes de classe et de conflits
politiques)
La structure sociale est liée à la
structure économique dominante
• L’importance respective
du féodalisme, du
capitalisme marchand et
du capitalisme industriel
durant la période étudiée
• L’influence des cycles
économiques longs sur les
idéologies et les rapports
de classes à l’intérieur
d’une même structure
économique
• L’articulation des modes
de production dans la
transition du féodalisme
au capitalisme entraîne la
coexistence de classes
féodales et capitalistes
avant 1850
• L’impact du concept
d’économie paysanne sur
la structure sociale dans
les campagnes bascanadiennes
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La structure sociale, l’appartenance
ethnique et la question nationale
• De l’origine ethnique comme • La critique marxiste du
critère au concept de
concept de dédoublement de
dédoublement de la structure
la structure sociale
de classes selon
(G. Bernier)
l’appartenance nationale
• La rupture au tournant des
(G. Bourque et N. Laurinannées 1980 entre les
Frénette)
mouvements de gauche
• L’influence à la fin des
radicaux et les principaux
années 60 des travaux sur
promoteurs de l’idéologie
l’impérialisme et sur le
colonialisme. Rapport entre
nationaliste au Québec
luttes de classes et luttes de
libération nationale
L’oligarchie coloniale : l’alliance
des classes supérieures avant 1840
Une alliance des classes
supérieures : les dirigeants
coloniaux, les aristocraties
foncières et les grands
marchands
La bourgeoisie marchande
: classe conservatrice ou
progressiste ?
Le contrôle des
pouvoirs économique
et politique
La conception de
l’ordre social
L’attachement à
l’empire et la défense
du protectionnisme
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La grande bourgeoisie marchande
Le commerce extérieur et l’exploitation des
ressources naturelles de la colonie (les fourrures et
le bois)
L’insertion dans les réseaux commerciaux à
l’échelle de l’empire britannique
L’ambivalence politique de la classe marchande : la
proximité du pouvoir et la fidélité à la Couronne
britannique
La place marginale des marchands canadiensfrançais au sein de la grande bourgeoisie coloniale
L ’Église catholique avant 1840
• À moyen terme, la
Conquête de 1760 a
perturbé l’évolution de
l ’Église catholique
– Nomination des évêques
– Recrutement du clergé
– Reconnaissance des
privilèges économiques
• À plus long terme, la
Conquête a renforcé la
position élitaire de l’Église
dans la société canadiennefrançaise
• Le contrôle d ’un appareil
institutionnel imposant
• La possession de biens
fonciers
• Le pouvoir de taxation privé
• L’idéologie conservatrice
proche du pouvoir politique
• Un leadership contesté
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L’essor de la petite-bourgeoisie
– L’émergence du
groupe est lié à l’essor
de l’économie
– La cohésion et le
leadership du groupe
reposent sur l’action
politique
– Un groupe social
diversifié ou une
alliance de classes
• Ce groupe occupe un
échelon intermédiaire
entre l’oligarchie coloniale
et les classes populaires :
culture, richesse et statut
social
• Partisan du changement
social ou défenseur de
l’Ancien Régime
La petite bourgeoisie : idéologie
et action politique
L’action politique vise :
• Le pouvoir de cette classe
repose sur la
démocratisation des
institutions politiques
• L’idéologie libérale du
groupe et ses limites
– L’égalité des droits
politiques
– La liberté de parole
– La liberté d’entreprise
– La liberté des échanges
– La propriété privée ?
– Devenir le principal porteparole du peuple
– Contester le favoritisme de
l’État colonial
– Revendiquer la
démocratisation des
institutions politiques
– Défendre les institutions
nationales (droit civil,
régime seigneurial)
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La coalition des élites 1840-1900
• L’essor de la bourgeoisie industrielle et de la
bourgeoisie financière : continuité ou rupture ?
(Naylor et McDonald)
• Le poids social de l’Église catholique
• La division de la petite-bourgeoisie
– Le ralliement de la majorité au projet économique et
politique de la bourgeoisie coloniale canadienne
– La contestation et le radicalisme d’une minorité (les
Rouges)
La grande bourgeoisie dans la
seconde moitié du XIXe siècle
• Les principales assises économiques : le commerce
extérieur, la finance, le transport maritime et ferroviaire,
les travaux publics, la production industrielle et la
spéculation foncière
• Un recrutement de plus en plus endogène même s’il existe
encore des cas de self-made men
• Une bourgeoisie majoritairement anglophone et de plus en
plus montréalaise.
• La faction dominante de la grande bourgeoisie canadienne
: un rayon d’action à l’échelle canadienne, voire impériale.
• La création d’un espace bourgeois (la ségrégation
spatiale)et d’un mode de vie (architecture, consommation,
mœurs, philanthropie, etc.)
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Les moyenne et petite bourgeoisies
La moyenne bourgeoisie
• Les assises économiques :
des entreprises à une
échelle réduite dans les
mêmes secteurs que la
grande bourgeoisie.
• Le rayon d’action : la
province, voire la région.
• La composition plus
diversifiée du groupe :
origine ethnique, les villes
de Montréal et de Québec,
les diverses régions.
La petite bourgeoisie
• Des assises économiques
modestes: commerce
local, crédit privé, petite
entreprise spéculation
foncière,services
professionnels, etc.
• La fonction
d’intermédiaires pour les
grande et moyenne
bourgeoisies
• L’importance du rôle
politique dans les
institutions locales et
régionales
Le débat autour de l’existence d’une véritable
bourgeoisie industrielle canadienne
• Selon R. T. Naylor, les
assises de cette classe
demeurent le commerce et la
finance. Elle est davantage
intéressée à profiter des
activités de financement et
d’échanges qu’à développer
un secteur autonome de
production industrielle. Cette
classe conservatrice a freiné
l’émergence d’une
bourgeoisie industrielle
typiquement canadienne
indépendante du capital
américain.
• L.R. McDonald conteste
la distinction trop nette
faite entre la bourgeoisie
commerciale et la
bourgeoisie industrielle,
entre le conservatisme de
l’une et le modernisme de
l’autre. Selon lui, le
transfert du capital
commercial au capital
industriel a constitué un
facteur important et
dynamique de
l’industrialisation au
Canada.
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La montée de l’Église catholique
(1840-1900)
L’accroissement du nombre de prêtres et de
communautés religieuses
Le renforcement de l’encadrement du clergé et des
fidèles
Le renouveau du discours et des pratiques
La condamnation de l’idéologie libérale
Le contrôle direct des institutions publiques
L’intervention sur la scène politique
La diffusion de l’idéologie ultramontaine
Les classes populaires rurales
Avant 1850
Les écarts de richesse •
– L’essor du fermage
•
– L’émergence du
prolétariat rural
•
– Le développement de
l’artisanat rural
•
Après 1850
La croissance des
niveaux de vie
La consolidation de la
propriété paysanne
Le recul des journaliers
ruraux
Le recul de l’artisanat
rural
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Les classes populaires urbaines : la
formation de la classe ouvrière
– L’essor de la production
marchande
– La persistance de la
production de type
artisanal avant 1850
– La division du travail et la
spécialisation des tâches
– L’émergence de la classe
ouvrière
• L’arrivée massive de
nouveaux immigrants
• La reproduction sociale et
familiale dans le monde
artisanal
• L’exode des ruraux vers
les villes
Les premiers conflits et les premiers
mouvements ouvriers
• Les premiers conflits
ouvriers ne sont ni
encadrés, ni structurés. Ce
sont plutôt des révoltes
spontanées de travailleurs
et des mouvements de
résistance des artisans
devant l’essor du
capitalisme industriel.
• (ex. grève du canal
Lachine)
4 L’organisation de la
résistance artisanale
devant les changements
technologiques et la
déqualification du travail
4 Les premières associations
ouvrières et les solidarités
communautaires : les cas
des mouleurs
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Les premiers syndicats et la prise de
conscience de la condition ouvrière
•
•
•
L’implantation d’organisations
ouvrières américaines : l’Union
nationale des mouleurs et des
Chevaliers de Saint-Crépin
L’influence déterminante sur le
syndicalisme québécois de la
fin du siècle de deux grandes
organisations : les Chevaliers
du travail et les syndicats
internationaux des métiers
affiliés à la Fédération
américaine du travail
La collaboration et les conflits
des organisations ouvrières
•
•
•
•
La levée des interdits légaux sur les
associations syndicales (la loi
fédérale de 1872)
De la condamnation initiale par la
hiérarchie catholique (Mgr
Taschereau, évêque de Québec) à
une certaine ouverture (Mgr Fabre,
évêque de Montréal)
La Commission royale d’enquête
sur les relations entre le capital et le
travail (1886-1889)
La loi québécoise des manufactures
de 1885 : limiter les heures de
travail (72,5 pour les hommes et 60
pour les femmes et les enfants) et le
travail des enfants (12 ans pour les
garçons et 14 ans pour les filles)
Les femmes et la transition au
capitalisme
Les femmes dans la
société patriarcale
traditionnelle
Le recul de la
condition et du statut
des femmes dans la
période de transition
au capitalisme
Quelques exemples du
recul au Bas-Canada:
– L’élimination du
douaire
– Les femmes et le droit
de vote
– Le nom des femmes
dans les documents
officiels
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Les Amérindiens : de l’alliance à
l’assistance1820-1870
1760-1820
L’alliance
La distribution des
présents annuels
L’arbitrage des conflits
Les facteurs
– La dimension militaire
de l ’alliance
– Le rôle économique
des Amérindiens
L’assistance
– L’aide matérielle
– La sédentarisation
– L’intégration
Les facteurs
– Le recul des rôles
militaire et économique
– La croissance de la
population coloniale
– L’exploitation forestière
Vers le nouveau système d ’assistance et
de tutelle des Amérindiens
Les premières mesures d’assistance
Le rapport de la commission d’enquête de 1842
Les modalités du système au Bas-Canada en 1850
– La création d’un commissaire pour les territoires indiens
– L’adoption d’une loi sur les Indiens (cette loi comprend une
première définition juridique du statut d’indien)
– La création officielle des réserves
– L’introduction du concept d’émancipation en 1859
– L’A.A.N.B.de 1867 accorde au gouvernement fédéral la
juridiction des affaires indiennes
– Le gouvernement s’immisce dans l’organisation politique des
Autochtones en imposant le mode des conseils de bande
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