TROUBLE DU DÉFICIT D`ATTENTION (TDA/H) ET VIE DE COUPLE

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TROUBLE DU DÉFICIT D`ATTENTION (TDA/H) ET VIE DE COUPLE
TROUBLE DU DÉFICIT D’ATTENTION (TDA/H) ET VIE DE COUPLE
PAR KATHLEEN NADEAU Ph. D.
www.michelgiroux.net
Comme, dans notre pratique, nous rencontrons de plus en plus d'adultes
déficients attentionnels, nous sommes confrontés non seulement avec les
problèmes du TDA mais aussi avec les problèmes et le stress que le TDA
amène dans le couple. Plusieurs groupes de soutien ont surgi aux USA
pour aider les parents d'enfants DA/H. Les conjoints des déficients
attentionnels ont eux aussi besoin d'aide mais rien n'existe pour eux à ce
moment-ci. Nous espérons que cet article attirera l'attention sur les
conjoints de déficients attentionnels et incitera ces derniers, les conjoints, à
rechercher de l'aide pour mieux fonctionner dans leur couple.
Comment sont les conjoints des déficients attentionnels? Il ne peut y avoir
d'autre réponse à une question aussi générale que: «Ça dépend.» On
retrouve toute la gamme des problèmes dans les familles des DA. À une
extrémité du continuum, on retrouve les couples où les deux partenaires
sont DA. Dans de tels couples, le problème évident est la situation de
confusion et de crise perpétuelle. Les deux conjoints ont tendance à agir
sans réfléchir, sans planifier, ce qui amène la confusion au quotidien. «Mais
je croyais que tu allais conduire John à sa pratique de soccer! Ne sais-tu
pas que ma voiture est en réparation cette semaine? - Tu ne m'as jamais
dit que tu faisais réparer ta voiture. Ne te souviens-tu pas que mon cours
d'éducation physique commence cette semaine et que tu as promis de
conduire John au soccer?» Pour de telles familles, le traitement consiste à
se concentrer sur des techniques d'organisation simples, structurées,
pratiques, pour chacun des membres. Chaque conjoint est davantage
conscient du manque de planification de l'autre que de ses propres oublis,
et les conflits surgissent habituellement d'un blâme mutuel.
Cependant, la grâce salvatrice de ces familles tient au fait qu'aucun des
deux conjoints ne s'attend ou n'exige de l'autre un haut niveau de clarté ou
d'organisation. Si les deux sont relativement à l'aise dans la confusion et
les signaux contradictoires, alors la tension est à son plus bas niveau.
Toutefois, des problèmes surgissent fréquemment. Il est possible que
aucun des conjoints ne sachent faire un bon usage de son temps, ne
puisse suivre à la trace les états financiers ou les consultations médicales,
prévoir les dépenses à venir, ou assurer le bon fonctionnement de la
voiture. Les situations de crise sont donc nombreuses.
Bien qu'il existe de tels couples, la situation la plus fréquente est celle où
un adulte DA a un conjoint structuré et organisé. Vu leurs difficultés à gérer
leur vie quotidienne, les adultes DA ont souvent tendance à s'associer avec
des «organisateurs». Ce dernier (cette dernière) sera celui (ou celle) qui
prendra les rendez-vous chez le dentiste ou le médecin, qui contactera les
ouvriers d'entretien, qui équilibrera le compte de banque, et qui se chargera
de régler les impôts. Souvent cette relation prendra l'allure d'une relation
mère-fils ou père-fille où un des conjoints fonctionne à plein régime alors
que l'autre est maintenu dans un rôle d'irresponsable, de dépendant.
Dans un tel couple, les problèmes surgiront pour diverses raisons. L'un ou
l'autre des deux conjoints finit par nourrir des rancunes. L'«organisateur»
finit par s'attendre et à exiger davantage de participation de la part de son
conjoint. Cette situation se produit souvent lorsque arrivent les enfants et
que les responsabilités s'accroissent. Celui des deux qui s'est occupé
d'entretenir la maison et d'équilibrer le budget est de moins en moins
capable de le faire et d'assumer les multiples responsabilités qu'amènent
les enfants. La tension et les conflits s'accumulent au fur et à mesure des
frustrations de l'«organisateur». Le conjoint DA, avec la meilleure intention
du monde, consent à assumer davantage de responsabilités.
Malheureusement, vu son peu d'expérience et ses piètres qualités
organisationnelles, il assumera sa tâche à peu près, à la dernière minute;
souvent même, il oubliera. Ce que l'autre interprètera en disant: «Tu t'en
fous, n'est-ce pas? Tu t'attends à ce que je fasse tout!»
De la même façon parfois, l'autre conjoint finit par maugréer contre le
contrôle que l'organisateur exerce sur lui ou sur elle. Souvent, c'est un
schème répandu, les adultes DA apprennent à mieux s'organiser quand ils
arrivent dans la trentaine. Le conjoint «organisateur», et parfois contrôlant,
sur qui on avait l'habitude de se fier dans les années précédentes, sera
peut-être perçu alors comme un dominateur. Le conjoint DA acquiert de la
maturité et finit par s'affirmer; il ou elle aura alors l'impression que les
attentes de l'autre sont opprimantes et inutiles. Il ou elle aura le sentiment
que son enthousiasme et sa spontanéité sont constamment remis en cause
par son conjoint plus attentionné et plus sûr de lui.
La thérapie de couple devra viser à aider chacun des conjoints à changer
de rôle. L'«organisateur» craindra peut-être de perdre son utilité et
ultimement de perdre l'amour de son conjoint. Autant l'«organisateur» finira
par trouver pénible la responsabilité qu'il ou elle a choisi d'assumer, autant
aussi il ou elle sera sûr-e que l'autre ne peut pas se passer de lui ou d'elle.
En thérapie, l'«organisateur» apprendra qu'il peut avoir une autre valeur
pour son conjoint et que le rôle de pseudo-parent ne convient plus. D'autre
part, le conjoint DA apprendra qu'il ne peut pas simplement manifester son
désir que l'autre cesse de le superviser; il doit aussi assumer la part des
responsabilités qu'il veut voir son conjoint céder.
1. Gestion du budget. Vu leur manque d'organisation et leur peu
d'attention aux détails, les adultes DA peuvent facilement perdre la tête
dans des questions financières. Ils sont incapables de prévoir les dépenses
importantes à venir. Aussi, les maisons d'adultes DA sont souvent
encombrées d'objets hétéroclites qui n'ont plus leur utilité: des équipements
d'exercice physique qui accumulent la poussière, de dispendieuses
caméras utilisées une fois et oubliées par la suite. Les difficultés financières
ne sont pas dûes nécessairement à des achats compulsifs mais plutôt à
une piètre organisation. Factures accumulées jamais payées. Un manque
de crédit occasionné par une attitude délinquante de ne jamais payer ses
factures. Un mauvais dossier financier qui finit par créer un problème quand
vient le temps des rapports d'impôt. Des retraits au guichet automatique
jamais comptabilisés. Des chèques sans fonds par manque de prévoyance.
Souvent le conjoint DA doit admettre et accepter qu'il a besoin d'un certain
contrôle et d'un support externe tel qu'une conjointe payeuse de factures,
qu'il n'a besoin que d'un montant fixe d'argent de poche chaque semaine,
qu'il ne doit pas avoir une carte de crédit plafonnée trop haut.
2. Le fouillis et la désorganisation. L'ordre et la propreté sont souvent
des questions chroniques dans les couples dont un des partenaires est DA.
À cause d'un manque d'organisation, d'énormes quantités de déchets
peuvent s'accumuler. On laisse la paperasse s'accumuler avec l'intention
d'y mettre de l'ordre «un de ces jours». Des accessoires de jeu ou de loisir
seront rangés «temporairement» dans le vivoir ou la chambre à coucher et
y resteront. La conjointe aura beau supplier de faire le ménage, ses
supplications resteront lettre morte pendant des années. Ce qui sera
souvent interprété comme un refus entêté de la part du conjoint DA ne sera
en fait qu'une incapacité de planifier, de structurer et de compléter ce qui
semble être une tâche impossible. Certains couples en arrivent à un
compromis en créant une «chambre à désordre» dont on gardera la porte
fermée. La solution n'est jamais simple.
Les «organisateurs» finissent par croire qu'ils donnent toujours sans jamais
recevoir. Ils finissent par croire aussi que tout repose sur leurs épaules. Ils
auront beau critiquer, se plaindre et, à l'occasion, se bagarrer, ils finiront
toujours par avoir l'impression que «si une chose doit être faite, c'est eux
qui doivent la faire». Ils deviennent tellement prisonniers de leur rôle de
sauveur qu'ils ont l'impression que personne à la maison ne peut répondre
à leurs besoins. La thérapie dans de tels cas doit permettre au conjoint non
DA d'avoir le contrôle sur le temps et la manière dont les choses doivent
être faites. [...]
3. Les oublis. Voilà une des caractéristiques du TDA: les oublis et les
absences d'esprit. Depuis le fait de se verrouiller à l'extérieur de sa voiture
ou de laisser la liste d'épicerie à la maison, les difficultés peuvent aller
jusqu'à oublier de noter et de se souvenir des dates importantes ou des
rendez-vous importants. Le conjoint non DA connaîtra les nombreuses
déceptions d'anniversaires oubliés ou d'engagements non remplis.
4. Les retards continuels (Chronic lateness). Les retards continuels sont
étroitement liés aux oublis. Les adultes DA sont de piètres gestionnaires de
leur temps. Ils ont tendance à s'engager tellement à fond dans une chose
qu'ils en oublient tout le reste. Souvent ils sous-estiment le temps qui sera
nécessaire à une activité. Surchargeant leur agenda, ils se précipiteront
d'un engagement à un autre et seront constamment en retard. Même dans
une journée relativement bien planifiée, pour des adultes DA, il existe
toujours des possibilités d'être en retard. S'ils pensent qu'ils ont tout leur
temps, ils essaieront de gagner 10 minutes de sommeil, de lire un autre
article dans leur quotidien du matin, ou encore ils prendront le temps
d'arrêter au dépanneur en cours de route. Il est trop facile pour le conjoint
d'un adulte DA de voir dans ces retards constants un manque de
prévoyance surtout lorsque l'adulte en question déteste lui-même qu'on le
fasse attendre. La personne qui fait attendre les autres sur une base
quotidienne sera elle-même impatiente et frustrée si on la fait attendre.
5. Déménagements et changements d'emploi fréquents. Les adultes DA
ont toute une histoire d'ennuis avec leur superviseur et leurs collègues de
travail, ce qui engendre souvent toute une suite d'emplois occasionnels.
Les déménagements et les changements d'emploi engendreront à leur tour
l'ennui, l'impatience ou les attentes irréalistes. Parfois la décision de
déménager sera prise de façon impulsive sans considération des
conséquences. Même lorsque le conjoint DA conserve longtemps le même
emploi, sa vie professionnelle n'en sera pas moins caractérisée par la
frustration et les conflits perpétuels.
6. Problèmes relationnels. Certains adultes DA ont acquis fort peu de
sociabilité et portent souvent peu d'attention aux indicateurs sociaux. Ainsi,
un adulte DA plutôt volubile ne se rend pas toujours compte que la
personne avec qui il parle a perdu intérêt dans son trop long monologue.
D'autres ennuis relationnels surgiront du fait que l'adulte DA n'a pas appris
à émettre ses opinions d'une manière diplomatique. Au moment d'un
désaccord, par exemple, l'adulte DA se laissera emporter par une vague
d'émotions fortes et ne se rendra pas compte de son comportement
offensant ou inapproprié. Aussi les adultes DA sont souvent portés à
interrompre les autres dans les conversations. De tels schèmes de
comportement n'occasionnent pas que des problèmes aux adultes DA, ils
mettent parfois aussi les conjoints dans l'embarras.
Le diagnostic et le traitement du TDA des adultes sont essentiels. L'aide
psychologique en combinaison avec une médication est essentielle.
L'adulte DA doit reconnaître ses zones problématiques et en assumer la
responsabilité; il (elle) doit découvrir des stratégies lui permettant
d'améliorer son organisation et sa mémoire. La consultation peut aider à
faire prendre conscience des ennuis interpersonnels que l'individu devra
s'efforcer d'améliorer au travail autant qu'à la maison.
Contrairement à ce qu'on a souvent entendu dans le passé, les adultes DA
peuvent grandement bénéficier d'une médication. Cependant la médication
du TDA des adultes n'est pas chose simple et elle doit être prise en charge
par un médecin, souvent un psychiatre ou un neurologue expérimenté dans
le traitement du TDA des adultes.
La thérapie de couple peut s'avérer extrêmement utile. On peut y aborder la
question de «l'utilisation du TDA en tant qu'excuse». On peut aider les
partenaires à mieux solutionner leurs problèmes, à mieux identifier les rôles
qu'ils ont été amenés à jouer, et à améliorer leur relation. La thérapie de
couple aide également le conjoint à ne pas prendre trop au sérieux les
problèmes occasionnés par un TDA de manière à désamorcer des
problèmes chroniques.
TDA/H: Trouble de l'attention (déficit d'attention) avec ou sans hyperactivité
(AD(H)D: Attention
Deficit(Hyperactivity) Disorder DA/H: déficient-e attentionnel-le avec ou sans hyperactivitéTitre original: «If Your
Spouse Has ADD - What It's Like to Be Married to Someone with ADD» Paru dans A.D.D. Reader, a collection
of short, easy-to-read articles by nationally-prominent authorities... p.74s produit et distribué par ADDult Support of Washington
for Adults with A.D.D. Traduction: GLM, novembre 2002Ce matériel éducatif est rendu disponible grâce à la courtoisie de Darryl
Peterson et de Attention Deficit Disorder Resources, un organisme sans but lucratif qui a son siège social à Tacoma dans l'État de
Washington et dont l'objectif est d'aider les personnes déficientes attentionnelles à réaliser leur plein potentiel. Notre abondante
documentation ainsi que notre revue trimestrielle sont en vente à l'adresse suivante: ADD Resources, 223 Tacoma AveS, #100,
Tacoma, WA. 98402. - Tél.: (253) 759-5085 - Courriel (en anglais): [email protected] - Site web: www.addresources.org.