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PHILHARMONIE DE PARIS JOURNÉE D’ÉTUDE Vendredi 15 avril 2016 MUSIQUE, CONTESTATIONS, CONTRE-CULTURES VENDREDI 15 AVRIL 2016 JOURNÉE D’ÉTUDE 9H00-17H30 SALLE DE CONFÉRENCE – PHILHARMONIE MUSIQUE, CONTESTATIONS, CONTRE-CULTURES De la chanson engagée aux avant-gardes esthétiques les plus radicales, la musique a joué un rôle majeur dans les révolutions culturelles des années 1960 et 1970. Centrée sur l’Amérique du Nord et l’Europe, cette journée d’étude analyse les liens entre musique, contestations et contre-cultures dans une approche comparée, attentive aux circulations artistiques. Trois axes sont privilégiés : l’articulation entre discours politiques et créations esthétiques ; l’émergence de nouvelles scènes et sociabilités culturelles (festivals, performances, médiatisation) ; les dynamiques de consécration et de patrimonialisation des musiques contestataires. The revolution began with rock’n roll ? Musicologues, historiens et sociologues proposent une réflexion critique sur les pratiques musicales du « moment 68 » et la place de ces créations dans nos imaginaires contemporains. ACCUEIL 9H PRÉSENTATION DE LA JOURNÉE 9H30 Eric de Visscher, directeur du Musée de la musique, Cité de la musique - Philharmonie de Paris Stéphane Roth, directeur des Éditions, Cité de la musique - Philharmonie de Paris Anaïs Fléchet, directrice adjointe du Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines (CHCSC), université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines Jean-Claude Yon, directeur du Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines (CHCSC), université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines UNDERGROUND : LA MATRICE AMÉRICAINE Modération : Pascal Ory, Centre d’histoire sociale du XXe siècle, université Paris 1 Panthéon – Sorbonne, Centre national de la recherche scientifique (CNRS), UMR 8058 PROJECTION D’ARCHIVES DE L’INSTITUT NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL (INA) 9H45 LE PROJET UTOPIQUE : ROCK & CONTRE-CULTURE, USA 68 9H55 par Claude Chastagner, Département d’études anglophones, Études montpelliéraines du monde anglophone (EMMA), EA 741, université Paul-Valery Montpellier 3 3 LA PREMIÈRE CRITIQUE ROCK AMÉRICAINE ET LE VELVET UNDERGROUND 10H15 par Maud Berthomier, laboratoire Communication, information, médias (CIM), EA 1484, équipe Médias, cultures et pratiques numériques (MCPN), université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 UNE UTOPIE HIPPIE? LE WINDSOR FREE FESTIVAL (1972-1978) 10H35 CULTURE DE MASSE, MUSIQUES DISSIDENTES ? Modération : Didier Francfort, Institut d’histoire culturelle européenne – Bronislaw Geremek (IHCE) ; Centre de recherche sur les cultures et les littératures européennes (CERCLE), EA 4372, université de Lorraine PROJECTION D’ARCHIVES DE L’INSTITUT NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL (INA) 14H30 par Florence Tamagne, Institut de recherches historiques du septentrion (IRHiS), UMR 8529, université Lille 3 ; Centre d’histoire sociale du XXe siècle (CHS), UMR 8058, Université Paris 1 Panthéon – Sorbonne MUSIQUE CONTESTATAIRE : SCÈNES ALTERNATIVES EUROPÉENNES par Marilisa Merolla, Département des sciences sociales et économiques, université Sapienza de Rome, Italie Modération : Gérôme Guibert, UFR Arts & Médias, laboratoire Communication, information, médias (CIM), EA 1484, équipe Médias, cultures et pratiques numériques (MCPN), université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 PROJECTION D’ARCHIVES DE L’INSTITUT NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL (INA) THE MICRO-MOBILISATION OF PUNK IN LONDON, 1975-1976* CONTESTATIONS POLITIQUES ET ESTHÉTIQUES DANS LA GRÈCE DES COLONELS 14H40 15H par Panagiota Anagnostou, Institut d’histoire culturelle européenne – Bronislaw Geremek (IHCE) 11H35 11H45 par Nick Crossley, Département de sociologie, Mitchell Centre for Social Network Analysis School, School of Social Sciences, université de Manchester, Angleterre POUR UNE HISTOIRE DE LA SCÈNE PUNK EN FRANCE (1976-2016) LAÏCISATION ET POLITISATION DU POP DANS L’ITALIE DES ANNÉES 1960 12H05 par Luc Robène, université de Bordeaux ; Théorie et histoire des arts et des littératures de la modernité (THALIM), université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, École normale supérieure, Centre national de la recherche scientifique (CNRS), UMR 7172 ; et Solveig Serre, Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ; Centre d’études supérieures de la Renaissance (CESR), université François-Rabelais de Tours, Centre national de la recherche scientifique (CNRS), UMR 7323 ; Centre de musique baroque de Versailles (CMBV) TROIS ÉTATS DE LA SCÈNE UNDERGROUND À LÉNINGRAD DANS LES ANNÉES 1970-1980 15H20 LE VELVET : D’UNDERGROUND À OVERGROUND 16H20 MOT FINAL 17H15 par Anna Zaytseva, Centre d’études des mondes russe, caucasien et centre-européen (CERCEC), École des hautes études en sciences sociales (EHESS), Centre national de la recherche scientifique (CNRS), UMR 8083 par Christophe Pirenne, Département arts et sciences de la communication, université de Liège ; département de musicologie, université catholique de Louvain par Anaïs Fléchet *Communication en anglais En partenariat avec le Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines (CHCSC, université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines), la Fondation des sciences du patrimoine, l’Institut universitaire de France (IUF) et l’Institut national de l’audiovisuel (INA). 4 5 MODÉRATEURS LE PROJET UTOPIQUE : ROCK & CONTRE-CULTURE, USA 68 Pascal Ory est professeur d’histoire contemporaine à l’université Paris 1 Panthéon – Sorbonne. Il enseigne également à Sciences Po Paris (école de journalisme) ainsi qu’à l’Ina SUP. Il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages portant sur l’histoire culturelle et politique des sociétés modernes. Parmi eux, on peut citer : La Belle Illusion. Culture et politique sous le signe du Front populaire 1935-1938, Paris, Plon, 1994, réédition, Paris, CNRS éditions, 2016 ; L’Histoire culturelle, Paris, PUF, 2004 et La culture comme aventure. Treize exercices d’histoire culturelle, Paris, Éditions Complexe, 2008 ; « Debussy, c’est la France ? Destin d’une musique et d’un auteur dans la littérature musicologique et musicale française d’une fin de guerre à l’autre », in Chimènes, Myriam, Laederich, Alexandra (dir.), Regards sur Debussy, Paris, Fayard, 2013 ; « Modernisme, fin de partie ? », Le Débat, 181, septembre-octobre 2014. Gérôme Guibert est maître de conférences en sociologie à l’Institut de la communication et des médias (ICM) (UFR Arts et Médias) de l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 où il est également directeur de la spécialité de master 2 Communication interculturelle et ingénierie de projets. Chercheur au sein du laboratoire Communication, information, médias (CIM), EA 1484, de l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 et chercheur associé au Groupe de recherche angevin en économie et management (GRANEM), UMR-MA 49, ses recherches portent principalement sur trois thématiques : les cultures musicales marginales, la dimension territoriale de la musique (« les scènes musicales locales »), et enfin les dynamiques associatives et la dimension culturelle de l’économie. Co-fondateur et directeur de la publication de la revue de recherche Volume ! depuis 2008 et responsable scientifique de la collection d’ouvrage « musique et société » (Éditions Mélanie Seteun), il est membre de l’International Association for Study of Popular Music (IASPM), branche francophone européenne. Claude Chastagner Département d’études anglophones, Études montpelliéraines du monde anglophone (EMMA), EA 741, université Paul-Valery Montpellier 3. Au cours de la seconde moitié des années 1960, de nouveaux groupes de rock apparaissent sur la côte Ouest des États-Unis. Ce mouvement musical est très lié aux différentes facettes de la contre-culture, depuis ses manifestations politiques jusqu’à son prosélytisme en faveur du LSD. Les sons que ces musiciens élaborent, les paroles de leurs chansons, leur attitude sur scène et hors scène contribuent à construire un monde alternatif, dénoncé en creux par l’émergence à New York et à Détroit d’un proto-punk rugueux et désabusé. Pourtant, si le regard porté sur le rock californien a pu se teinter d’ironie, son jeu avec les structures de l’imaginaire n’est-il pas la marque même d’une utopie aboutie, conçue comme un ici et maintenant expérimental plutôt que comme un idéal déterritorialisé inatteignable ? L’année 1968 nous sert de repère pour cette réflexion. Claude Chastagner est professeur de civilisation américaine à l’université Paul-Valéry de Montpellier. Ses recherches portent sur le rock et sur les musiques des différentes communautés ethniques étatsuniennes (bhangra, zydeco, tejano…). Il est l’auteur, entre autres, de La Loi du rock, Castelnau-le-Lez, Climats, 1998 ; Révoltes et utopies : militantisme et contre-culture dans l’Amérique des années soixante, Paris, PUF, 2011 et De la culture rock, Paris, PUF, 2011. Didier Francfort est professeur d’histoire contemporaine à l’université de Lorraine et directeur de l’Institut d’histoire culturelle européenne – Bronislaw Geremek (IHCE) (Château des Lumières, Lunéville). Après s’être intéressé, sous la direction de Maurice Agulhon, à l’histoire de la sociabilité, des migrations et de l’Italie, il s’est orienté vers l’histoire culturelle et l’approche historique comparée de la musique dans les sociétés contemporaines et les constructions d’identités. 6 7 LA PREMIÈRE CRITIQUE ROCK AMÉRICAINE ET LE VELVET UNDERGROUND UNE UTOPIE HIPPIE ? LE WINDSOR FREE FESTIVAL (1972-1978) Durant ses cinq premières années d’existence (1965-70), le Velvet Underground ne rencontre pas de succès commercial. Pourtant, son accréditation culturelle est déjà construite via les textes des premiers critiques rock américains. Dès 1966, Richard Goldstein écrit un article sur l’un de ses premiers concerts ; en 1968, une brève critique du second album paraît dans les feuilles du fanzine Crawdaddy ! et en 1969, Lester Bangs publie une longue chronique du troisième album dans le magazine Rolling Stone. Le Velvet n’aurait-il pas fait naître un nouveau type de critique musicale et, réciproquement, ne serait-il pas né de celle-ci ? Quel esprit commun entre ces deux scènes, musicale et critique, existe-t-il : un goût similaire pour la contestation, pour la radicalisation esthétique et la bohême ? Des idées annonciatrices du punk ? Dans cette perspective, cette communication offre une étude croisée de la musique du Velvet Underground et des travaux de la première critique rock de la même époque, tout en s’inscrivant dans le cadre théorique des popular music studies – Frith, Gendron, etc. Une étude de cas porte en particulier sur les écrits de Lester Bangs, notamment les interviews avec Lou Reed, qui ont joué un rôle central et initiateur dans l’histoire. Le 1er mai 1972, William Ubique Dwyer, s’exprimant au nom de la Brotherhood Commune, annonça au Royal Borough of New Windsor qu’il tiendrait, « par la Grâce de Dieu », un People’s Free Festival dans le Windsor Great Park, lors du week-end férié d’août. Aucune date de clôture n’était fixée, les festivaliers, dont le nombre potentiel était estimé entre un et cinq millions, étant seuls aptes à en décider. Cette annonce surprenante marqua le début d’un long rapport de force entre les tenants du People’s Free Festival et les autorités de Windsor. Ces tensions durèrent de 1972 à 1978, même si aucun festival ne se tint plus à Windsor après les heurts violents entre policiers et hippies de l’édition 1974. Si le Windsor Free Festival a moins marqué l’opinion publique que le festival de l’Île de Wight ou les festivals de Glastonbury et de Reading – qui ont survécu jusqu’à aujourd’hui –, il apparaît comme une référence majeure du mouvement hippie en Angleterre, à la croisée du pacifisme flower power et d’une évolution vers un activisme libertaire. Après avoir vu comment le Windsor Free Festival a pu légitimement se présenter comme un festival libre et gratuit, nous montrerons qu’il peut à la fois se définir comme un festival « pop » et un happening politique, avant d’analyser les raisons de sa disparition finale. Docteure en littératures et civilisations comparées et sciences humaines de l’université de Poitiers, en cotutelle avec l’université Concordia de Montréal, Maud Berthomier est aujourd’hui (après deux années d’enseignement à l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3) chercheuse associée au laboratoire Communication, information, médias (CIM), dans l’équipe Médias, cultures et pratiques numériques (MCPN) de l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3. Florence Tamagne est maîtresse de conférences en histoire contemporaine à l’université Lille 3, chercheuse à l’Institut de recherches historiques du septentrion (IRHIS), UMR 8529, et chercheuse associée au Centre d’histoire sociale du XXe siècle (CHS), UMR 8058. Spécialiste de l’histoire des homosexualités, elle a notamment publié Histoire de l’homosexualité en Europe. Berlin, Londres, Paris, 1919-1939, Paris, Seuil, 2000 et Mauvais genre ? Une histoire des représentations de l’homosexualité, Paris, EDLM, 2001. Elle termine actuellement son habilitation à diriger des recherches sur « Rock, jeunesse et politique. France, GrandeBretagne, Allemagne (années 1950-années 1970) ». Avec Arnaud Baubérot, elle co-anime depuis cinq ans le séminaire « Histoire sociale du rock ». 8 9 Maud Berthomier Laboratoire Communication, information, médias (CIM), EA 1484, équipe Médias, cultures et pratiques numériques (MCPN), université Sorbonne Nouvelle – Paris 3. Florence Tamagne Institut de recherches historiques du septentrion (IRHiS), UMR 8529, université Lille 3 ; Centre d’histoire sociale du XXe siècle (CHS), UMR 8058, Université Paris 1 Panthéon – Sorbonne. THE MICRO-MOBILISATION OF PUNK IN LONDON, 1975-1976 Nick Crossley Département de sociologie, Mitchell Centre for Social Network Analysis, School of Social Sciences, université de Manchester, Angleterre. This presentation will discuss the formation of a ‘punk world’ in London between late 1975 and the end of 1976. Several explanations of punk will be outlined and it will be argued that a satisfactory understanding of the emergence of punk must look at the network linking its key protagonists. Original research on this network will be presented and discussed. The presentation draws from a recent book devoted to this topic: Crossley, Nick, Networks of Sound, Style and Subversion: the Punk and Post-Punk Worlds of Manchester, London, Liverpool and Sheffield, 1975-1980, Manchester, Manchester University Press, 2015. Cette communication a pour sujet l’émergence d’un « univers punk » à Londres vers la fin de l’année 1975 et l’année 1976. Se fondant sur le fait qu’une bonne compréhension de la naissance du punk passe nécessairement par une étude approfondie des liens et interconnections entre les principaux acteurs de ce mouvement, plusieurs explications sont proposées. Sont ainsi présentées des recherches originales et novatrices sur ce « réseau », l’ensemble s’appuyant sur le récent ouvrage de Nick Crossley : Networks of Sound, Style and Subversion: the Punk and Post-Punk Worlds of Manchester, London, Liverpool and Sheffield, 1975-1980, Manchester, Manchester University Press, 2015. Nick Crossley est professeur de sociologie à l’université de Manchester et co-fondateur du Mitchell Centre for Social Network Analysis School, School of Social Sciences. Il est, entre autres, l’auteur de Networks of Sound, Style and Subversion: the Punk and Post-Punk Worlds of Manchester, London, Liverpool and Sheffield, 1975-1980, Manchester, Manchester University Press, 2015. POUR UNE HISTOIRE DE LA SCÈNE PUNK EN FRANCE (1976-2016) Luc Robène Université de Bordeaux ; Théorie et histoire des arts et des littératures de la modernité (THALIM), université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, École normale supérieure, Centre national de la recherche scientifique (CNRS), UMR 7172. Solveig Serre Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ; Centre d’études supérieures de la Renaissance (CESR), université François-Rabelais de Tours, Centre national de la recherche scientifique (CNRS), UMR 7323 ; Centre de musique baroque de Versailles (CMBV). Notre communication présente les grandes lignes du projet de recherche que nous menons depuis maintenant deux ans : Punk is not dead (PIND), une histoire de la scène punk en France, 1976-2016. Résolument interdisciplinaire, notre projet cherche à relever un triple défi : celui d’un objet illégitime (dans la société et dans le champ académique français), vulnérable (urgence de la recherche liée à la fragilité des acteurs) et paradoxal (en raison de la nature même du punk). Reposant sur trois hypothèses principales – le temps, l’espace, la cohérence paradigmatique – et mobilisant la notion de scène comme prisme d’analyse, il cherche à revisiter la pertinence des périodisations et des ruptures qui participent à définir et à organiser la scène punk en France, à dépasser le spectre d’un phénomène réduit à l’évidence culturelle anglo-américaine et à étudier comment s’élaborent et se négocient les frontières entre une culture hégémonique et une culture restreinte de la subversion. Luc Robène est historien, professeur à l’université de Bordeaux, chargé de cours à l’École normale supérieure de Cachan ainsi qu’à Sciences-Po Bordeaux. Il est membre de l’unité mixte de recherche Théorie et histoire des arts et des littératures de la modernité (THALIM) UMR 7172. Ses recherches portent sur l’histoire de la culture et des pratiques culturelles en France et en Europe (XVIIIe - XXIe siècles). Solveig Serre est historienne et musicologue, ancienne élève de l’École nationale des chartes, chargée de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et chargée d’enseignement à l’École polytechnique et à l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3. Ses recherches portent sur l’histoire des institutions culturelles en France (XVIIIe- XXIe siècles) et sur l’histoire de la scène punk en France. 10 11 MUSIQUE CONTESTATAIRE : LAÏCISATION ET POLITISATION DU POP DANS L’ITALIE DES ANNÉES 1960 Marilisa Merolla Département des sciences sociales et économiques, université Sapienza de Rome, Italie. La musique est un vecteur exceptionnel pour recréer l’atmosphère de ce que les historiens italiens ont défini comme la grande trasformazione, c’est-à-dire le changement majeur provoqué par le miracle économique de la seconde moitié des années 1950 au sein de la société et qui a fait de l’Italie rurale un des états les plus industrialisés au monde. Au début des années 1960, le pop contribue de manière décisive à transformer le pays alors en cours de laïcisation. Outre l’exaltation du bien-être et de ses symboles, la musique témoigne aussi des aspects négatifs de la modernisation. Ainsi, les nouveaux chansonniers italiens révèlent la fracture profonde qui frappe l’optimisme triomphant des premières années 1960. En effet, le défi de la modernité est très difficile à gagner, bien que relevé par la classe politique qui y répond à travers une utilisation optimum et consciente des anciens et des nouveaux médias. Preuve en est la révolution de 1968, qui explose dans l’ensemble du monde occidental comme une crise générationnelle et cause en vérité un profond bouleversement politique et social. Cette rupture, qui s’aggrave dans les années 1970, est relayée par le pop qui devient alors la « musique contestataire » des années de plomb. Marilisa Merolla est professeure d’histoire contemporaine et directrice de la Music Making History Research Unit de l’université Sapienza de Rome. Ses recherches portent sur les liens entre politique, médias et sociétés avec une attention particulière accordée au son comme source historiographique. Elle est l’auteure de nombreux articles et ouvrages dont : Rock’n’roll, Italian way. Propaganda americana e modernizzazione nell’Italia che cambia al ritmo del rock (1954-1964), Roma, Coniglio Editore, 2011 et Italia 1961. I media celebrano il Centenario della nazione, Milano, Franco Angeli, 2004. 12 CONTESTATIONS POLITIQUES ET MUSICALES DANS LA GRÈCE DES COLONELS Panagiota Anagnostou Institut d’histoire culturelle européenne – Bronislaw Geremek (IHCE). En Grèce, la dictature des Colonels a freiné les espoirs d’un changement politique vers la démocratisation du pays et l’effervescence culturelle du début des années 1960. Outre l’interdiction des partis politiques et des rassemblements, la persécution et la torture des membres de la gauche, les Colonels imposent, ou plutôt maintiennent et renforcent, la censure. Dans le domaine musical, de nombreux compositeurs engagés voient leurs créations interdites (c’est le cas pour l’ensemble de l’œuvre de Theodorakis) ou sont contraints à l’exil. Dans ce contexte politique, des chants du passé – dits « traditionnels » d’Asie Mineure et des îles de la mer Égée, ainsi que de rebetiko des années 1930 – sont réinterprétés et investis de nouvelles significations participant à la construction d’une « tradition de rébellion ». Cette communication invite à réfléchir autour de la symbolique politique de certaines musiques. Panagiota Anagnostou est diplômée en science politique et en sociologie. Ses recherches relèvent de la sociologie politique et traitent des configurations identitaires et mémorielles dans la musique populaire. Elle a soutenu une thèse de doctorat sur la musique populaire grecque (XIX-XXe siècles), intitulée « Les représentations de la société grecque dans le rebetiko » à Sciences Po Bordeaux. Elle s’intéresse actuellement aux pratiques musicales des migrants comme expression et participation politiques et est chercheuse associée à l’Institut d’histoire culturelle européenne – Bronislaw Geremek (IHCE). 13 TROIS ÉTATS DE LA SCÈNE UNDERGROUND À LÉNINGRAD DANS LES ANNÉES 1970-1980 LE VELVET : D’UNDERGROUND À OVERGROUND Christophe Pirenne Département arts et sciences de la communication, université de Liège ; département de musicologie, université catholique de Louvain. Le rock (et ses « valeurs » contestatrices) a-t-il contribué à « miner » le système soviétique de l’intérieur ? Posons la problématique dans le sens inverse : comment certaines formes de contestation ont-elles émergé dans les milieux rock en tant que contournement des contraintes économiques et politiques imposées par l’État ? Comment les différentes façons d’y faire face adoptées par les acteurs du rock ont – pour reprendre l’expression de Bourdieu – favorisé l’émergence de « générations artistiques » distinctes, voire opposées ? Plusieurs étapes historiques se dessinent ainsi. En 1993, lorsque le Velvet Underground se reforma pour une tournée européenne, il fut accueilli à Prague par le dramaturge Vaclav Havel qui venait d’accéder à la présidence de la République tchèque. Avec d’autres intellectuels, il avait découvert le Velvet à la fin des années 1960 par le biais de disques achetés en contrebande. Après le printemps de Prague, lorsqu’il devint un auteur interdit et qu’il entra en dissidence contre le pouvoir communiste, la musique du groupe devint à la fois une forme de réconfort et un acte de résistance politique. Si cette portée politique se comprend, la chronologie étonne davantage. Lorsque Havel découvre le Velvet de l’autre côté du rideau de fer, le groupe est quasiment inconnu dans les pays du bloc de l’Ouest. Aucun de ses albums n’est entré dans le top 100 et les deux derniers n’ont même jamais figuré dans aucun hit-parade. Dans le domaine des musiques populaires, où le succès est avant tout une question d’arithmétique, cette inexistence médiatique interpelle. Comment le Velvet a-t-il acquis sa réputation de « troisième groupe le plus important des années 1960 » (Christgau, 2001) ? Comment est-il passé de l’Underground à l’Overground ? C’est à cette question que l’on tente de répondre en examinant les œuvres du groupe, le contexte de leur éclosion et l’action de quelques médiateurs. Anna Zaysteva Centre d’études des mondes russe, caucasien et centre-européen (CERCEC), École des hautes études en sciences sociales (EHESS), Centre national de la recherche scientifique (CNRS), UMR 8083. Après une relative indifférence et permissivité des autorités (telle que la tolérance de la « création amateur » dans les Maisons de la culture), les années 1970 voient apparaître nombre de règlements restrictifs : seuls les groupes « professionnels » sous contrat avec les Philharmonies d’État sont rémunérés. Dès lors, une répression s’abat, amenant une partie du milieu rock à descendre dans un underground doté de réseaux clandestins, mais jouissant dès lors d’une plus grande liberté esthétique. La première moitié des années 1980 est marquée par la mise en place de formes plus fines de contrôle. Ainsi, le Rock-club de Léningrad, fondé en 1981, fut une œuvre commune de certains activistes rock (en quête de reconnaissance) et de la Maison intersyndicale de la création amateur – sous la surveillance « bienveillante » du KGB local. Une nouvelle esthétique dite « new wave de Léningrad » émerge. Refusant la contestation frontale, elle véhicule un message métaphorique, un langage d’Ésope fuyant tout contexte ou symbole soviétique. À partir de 1986, une scission éclate au sein du Rockclub, entre les « anciens » et les « nouveaux » dénommés « protest-pop » qui surfent sur la vague de la protestation, voire la devançant. Vers 1988-1989, à l’heure où la société soviétique bénéficie d’élections démocratiques et de débats politiques ouverts, le rock protestataire subit une obsolescence symbolique (et une dévaluation économique). Une des façons d’y faire face consiste en une « affirmation subversive », une esthétique de la dérision et de détournement parodique des symboles et des objets sacrés du système politique en pleine déliquescence. Christophe Pirenne est professeur de musicologie à l’université de Liège ainsi qu’à l’université catholique de Louvain où il enseigne l’histoire de la musique et les politiques culturelles. Ses recherches sur l’histoire du rock l’ont amené à écrire de nombreux articles et ouvrages, notamment un livre intitulé Le Rock progressif anglais (1967-1977), Paris, Honoré Champion, 2005 et Une histoire du Rock, Paris, Fayard, 2011. Dans le domaine des politiques culturelles, il travaille plus particulièrement sur la notion de bassin culturel. Anna Zaytseva est docteure en sociologie, associée au Centre d’études des mondes russe, caucasien et centre-européen (CERCEC), UMR 8083. Ses recherches portent principalement sur diverses formes de contestation artistique et politique ainsi que sur les industries créatives, friches et autres lieux culturels, dans une perspective comparative. Elle est l’auteure de nombreux articles, notamment : « La légitimation du rock en URSS dans les années 19701980 », Cahiers du Monde russe, 2008 ; « Le rock, origine de la démocratisation en URSS ? », La vie des idées, 2011 ; « Faire la part entre l’art et l’activisme : les protestations spectaculaires dans la Russie contemporaine (2000-2010) », Critique Internationale, Presses de sciences po, 2012 ; « D’une utopie de « l’entre-deux » à une marchandisation irrégulière : temps sociaux de quelques lieux de rassemblement à Saint-Pétersbourg dans les années 1990-2010 », Temporalités, 22, 2015, https://temporalites.revues.org/3289. 14 15 C I T É D E L A M U S I Q U E - P H I L H A R M O N I E D E PA R I S 01 4 4 8 4 4 4 8 4 2 21 , AV E N U E J E A N - J A U R È S 7 5 019 PA R I S P H I L H A R M O N I E D E PA R I S . F R R E T R O U V E Z L A P H I L H A R M O N I E D E PA R I S S U R F A C E B O O K , T W I T T E R E T I N S TA G R A M R E T R O U V E Z L E S C O N C E R T S S U R L I V E . P H I L H A R M O N I E D E PA R I S . F R R E S TA U R A N T L E B A L C O N (PHILHARMONIE - NIVEAU 6) 01 4 0 3 2 3 0 01 - R E S TA U R A N T- L E B A L C O N . F R L E S G O U R M A N D I S E S D E L ’ AT E L I E R ( P H I L H A R M O N I E - R E Z - D E - PA R C ) 01 4 0 3 2 3 0 0 2 CAFÉ DES CONCERTS PA R K I N G S Q - PA R K ( P H I L H A R M O N I E ) 18 5 , B D S É R U R I E R 7 5 019 PA R I S PA R K I N G I N D I G O ( C I T É D E L A M U S I Q U E ) 2 21 AV. J E A N - J A U R È S 7 5 019 PA R I S Couverture © Flavor Paper / www.flavorpaper.com • Imprimeur BAF - E.S 1-1041550 - 2-1041546 -3-1041547 (CITÉ DE LA MUSIQUE) 01 4 2 4 9 7 4 7 4 - C A F E D E S C O N C E R T S . C O M