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298-EXPLOSIF 19/03/09 14:41 Page 63 Par Aurélien Broussal Professeur de sport, double master en préparation physique et en entraînement sportif, Cercle Tissier Vincennes Site internet p.109 100% PHYSIQUE L ’explosivité est une qualité qui se situe à l’intersection de la force et de la vitesse : elle permet en effet d’exprimer avec promptitude un niveau de force important. En fait, il s’agit pour le préparateur physique de parvenir à réduire le temps nécessaire pour que le muscle parvienne au pic de force qu’il produit au cours d’une contraction. Les méthodes de développement portent tout autant sur la force que sur la vitesse. Si la vitesse est profondément ancrée génétiquement (la priorité d’entraînement demeure la force dont les gains escomptables sont nettement supérieurs), elle n’en reste en effet pas moins entraînable. Sa variété s’exprimera d’autant plus que les besoins en explosivité sont spécifiques aux disciplines (elles varient parfois même au sein d’un sport) et aux sportifs. Petit rappel physiologique… Les efforts courts et d’intensité maximale sont fournis principalement grâce à la filière anaérobie alactique, aussi appelée ATP-CP. Le fonctionnement de cette filière est dans son appellation : ne nécessitant pas forcément d’oxygène (anaérobie), avec une production minimale de déchets lactiques (alactique), c’est la créatine phosphate (CP) directement présente dans les muscles qui permet de produire de l’énergie. Au bout de quelques secondes, cet ATP-CP est épuisée, et il faut que l’organisme fasse d’avantage appel à une autre système de produire de l’énergie… CES FACTEURS QUI INFLUENCENT L’EXPLOSIVITÉ Divers facteurs influencent très nettement la capacité à produire un haut niveau de force dans un temps très court. ■ La composition musculaire Il est désormais admis que les athlètes possédant dès la naissance plus de fibres rapides seront à même de produire des contractions plus rapides et plus intenses que les sportifs disposant d’une dominantes de fibres lentes. L’impact de l’entraînement sur ce paramètre demeure très controversé, et de toutes façons limité. En effet, si la culture et la pratique sportive à long terme peut influencer les fibres mixtes (fibres alternatives, ni lentes ni rapides, mais capables de s’adapter), la probabilité d’une transformation des fibres lentes en fibres rapides semble très limitée. LE SAVIEZ-VOUS ? Le développement de l’explosivité est subordonné à deux conditions : ● L’engagement total de l’athlète, se traduisant par un effort maximal, voire sur-maximal. Il s’agit donc bien pour le sportif d’aller " leplus-vite-possible " au regard de la charge qu’il mobilise. ● La récupération complète, indispensable pour ne produire que des efforts à vitesse maximale. Si cette récupération maximale n’est pas respectée, l’intensité de travail chutera d’elle même, et l’athlète ne sera plus en situation de d’amélioration de l’explosivité. ■ Masse grasse Les extrêmes sont comme en tout inefficaces et dangereux pour le sportif. À RETENIR POUR L’ENTRAÎNEMENT ! Si un excès de graisDes temps d’effort très courts (jusqu’à 10 secondes), et des temps de récupérase n’est pas adapté à l’effort de vitesse, un tion très longs (il faut parfois observer plusieurs minutes, sans quoi le sportif ne muscle anormalement " séché " de sa masse récupère pas totalement, l’intensité qu’il engage dans sa série chute, et il passe sous grasse est un muscle incapable de produire un la dominance d’une autre filière énergétique). L’intensité de travail est quant à elle effort d’intensité maximale. Pire encore, c’est maximale. un muscle fragilisé. Une masse grasse compriSensations physiques liées au travail : se entre 6 et 10% pour les hommes, et entre 12 Difficulté à soutenir la cadence (pour une exécution technique de qualité) et 17% semble optimale. Défi, se battre avec soi même pour aller LE-PLUS-VITE-POSSIBLE Indicateurs pour l’arrêt du travail : Allongement du temps de réaction Chute de la vitesse d’exécution ou de la fréquence gestuelle Baisse de qualité technique du geste 63 MdM&F n°297 - Avril 2009 ■ L’âge L’âge a un impact extrêmement important sur le développement de la qualité de l’explosivité. 298-EXPLOSIF 19/03/09 14:41 Page 64 100% PHYSIQUE On observe une augmentation de la vitesse de contraction jusqu’à 25 ans, puis une diminution progressive jusqu’à 35 ans, avant une chute drastique entre 35 et 40 ans. L’âge idéal serait entre 12 et 17 ans pour un développement intensif chez les jeunes. PÉRIODES PRIVILÉGIÉES POUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA FORCE EXPLOSIVE selon Gilles Cometti, 2006 ÂGE 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 TEMPS DE RÉACTION VITESSE GESTUELLE PURE VITESSE GESTUELLE CONTRE RÉSISTANCE FRÉQUENCE GESTUELLE FRÉQUENCE DES APPUIS VITESSE ■ Le genre Comme pour l’ensemble des qualités physiques, un écart de performance majeur est constaté entre l’homme et la femme. Les différences culturelles, hormonales et génétiques donnent des records mondiaux environ 30% supérieurs pour les hommes sur une épreuve aussi explosive qu’un arraché. Ceci étant, maintenant que les femmes bénéficient d’une considération et d’un entraînement adapté, il s’avère qu’elles progressent aussi vite que les hommes, voire plus vite encore. Composante n°1 : LE PIC DE FORCE L’objectif est ici d’améliorer les paramètres de force-vitesse ou d’explosivité musculaire. Comme toute qualité composite, son développement peut s’envisager par un développement conjoint des deux qualités, ou un développement intense d’une de ses composantes. La vitesse étant profondément ancrée génétiquement (on peut espérer une dizaine de % d’amélioration dans le meilleur des cas), et aux vues des progrès escomptables en force (100% d’amélioration des performance de force n’a rien de surprenant), un sportif explosif, c’est avant tout un sportif fort. De plus, la force est la qualité qui va permettre à la vitesse de s’exprimer, au travers d’un recrutement musculaire toujours plus vif, intense, total. Envisagé de front avec le développement de la vitesse et ce dès le début de l’année, le travail de la force passera nécessairement par les différentes variantes d’endurance de force, de force maximale, et de puissance. ■ La technique Deux sportifs ne se comportent pas nécessairement de la même manière, quelle que soit la performance motrice concernée, la technique est alors déterminante dans l’efficience du déplacement. Le développement de la force reste la base de l’amélioration de l’explosivité Composante n°2 : L’ACCÉLÉRATION L’explosivité ne concerne pas seulement les membres inférieurs. Les pompes claquées et les pompes sautées alternées entre les steps sont de redoutables exercices pliométriques permattant le développement des qualités explosives des membres supérieurs. La capacité du sportif à augmenter sa vitesse gestuelle ou de déplacement de manière soudaine est déterminante. En clair, une fois le délais de réaction dépassé, il s’agit pour lui de produire une accélération. Cette qualité d’accélération peut être améliorée de diverses manières. Surcharger le sportif peut constituer un support d’entraînement concentrique très efficace. Le développement des muscles impliqués dans les différents paramètres de puissance du déplacement passe par 3 techniques principales : Le sprint en côtes La production d’une vitesse la plus élevée possible dans une montée est un moyen d’amélioration que l’on pourrait qualifier de " contre-vitesse ". Dans tous les cas, l’inclinaison de la pente ne doit pas détériorer le geste technique (de départ comme de course). La pente ne doit ainsi pas excéder 8 à 10 degrés. Il est possible, dans ce cadre, de développer l’accélération sur 10 à 30 mètres, ou la production et le soutien de vitesse jusqu’à 90 mètres. La séance sera consacrée à une distance, ou les distances seront alternées au sein d’une séance (1 série sprint court / 1 série sprint long). Il est également intéressant, pour rapprocher le travail 64 MdM&F n°298- Mai 2009 298-EXPLOSIF 19/03/09 14:41 Page 65 de la réalité, de faire suivre la séquence de contre vitesse d’une séquence de vitesse normale voire spécifique (sprint + conduite de balle en football). Exemple de travail : 2 séries de 3 à 5 répétitions de 10 mètre en côte suivis de 10 mètres sur plat. Accélérations escaliers L’idée de départ est la même que celle des sprints en côtes : surcharger le sprint. Peu de recommandations autres que le strict respect des limites énergétiques de la vitesse (cf filière anaérobie alactique). Les marches ne doivent pas être Confronté à un manque de place ? Remplacez avantageusement le trop hautes ni trop petites. step par un BOSU et développez Une hauteur de 20 à 25 cm votre équilibre de concert avec votre explosivité. Pour cela, semble optimale, elle doit bondissez de droite à gauche être identique pour chacune en alternant, le pied restant en appui sur l’engin. des marches. Exemple de travail : 2 séries de 3 à 5 répétitions de 8 marches puis 10 mètres sur plat. Course lestée Plusieurs techniques existent : le gilet lesté, le chariot relié à une corde freinant la course, l’élastique, le parachute… Encore une fois, il est primordial que la surcharge ne perturbe pas la technique de course. Un excès de poids obligerait le sportif à adapter sa motricité, limitant la cohérence de la progression physique comme technique. Si il est parfois préconisé de travailler uniquement en situation de lest, l’approche la plus intéressante pour transférer les gains directement dans la course semble être celle de l’alternance charge/décharge. On pourra appliquer ce principe d’alternance entre les séries (une série en contre vitesse, une série sans contrainte), ou dans une même série (départ lesté puis relâche en survitesse). Exemple de travail : 2 séries de 3 à 5 départ en " starting-blocks " sur 6 foulées Composante n°3 : LA VITESSE ABSOLUE Comme nous l’avons déjà développé plus haut, la survitesse (ou vitesse assistée) vise à améliorer la fréquence d’appuis ainsi que la longueur des appuis du sportif. Cette création artificielle de vitesse dépassant les limites du sportif, permet de placer le système neuromusculaire dans un niveau de sollicitation qui permettra au sportif de surpasser ses limites de vitesse. Nous vous présentons ici quelques méthodes couramment utilisées pour développer la survitesse. LE SAVIEZ-VOUS ? Principes à respecter dans le développement de l’explosivité : 1. Plus que jamais, l’échauffement devra être profond et rigoureux. Néanmoins, ce dernier doit maintenir les ressources physiques de l’athlète intactes (l’échauffement ne doit donc pas trop se prolonger, et prévoir un protocole de récupération en vue de la séance) 2. Travailler sur un muscle frais. Le sportif ne doit pas avoir subit d’entraînement intense dans les 48 h qui précèdent la séance d’explosivité 3. Travailler sur un muscle sain. Annuler l’entraînement si l’athlète est fatigué, malade, déprimé… 4. Toujours contrôler la qualité du geste technique. L’exercice ne doit en aucun cas détériorer la technique gestuelle (double risque : blessure et perte d’efficacité à moyen terme). Course en pente descendante Plus que jamais, l’inclinaison de la pente ne doit pas dépasser 6 degrés (3 étant un minimum). Au delà de 7 degrés, le risque de chute augmente, la posture de course se dégrade, à tel point que le contact avec le sol dépasse le centre de gravité, produisant une attitude de " freinage " automatique. Afin de préserver à " coup sur " la qualité de la technique de course, l’idéal est de démarrer à plat (l’athlète se lance), de poursuivre sur une légère descente (ce qui permet une accélération supra maximale), et éventuellement de terminer de nouveau sur du plat, permettant : (1) une restructuration de la technique de course, (2) un transfert direct du niveau de tension neuro-musculaire dans un sprint normal. PROPOSITION D’EXERCICE EN DESCENTE, LES TROIS 15 : 15 m plats – 15 m descente – 15 m plats Sur cadre guide, avec un partenaire qui freine le retour de la barre, il est très intéressant de libérer la répulsion jusuq’au lâché de barre en cherchant à l’envoyer le plus haut possible 65 MdM&F n°298- Mai 2009 298-EXPLOSIF 19/03/09 14:41 Page 66 100% PHYSIQUE Travail cyclique à haute vitesse sur place Les exercices de « marelle » sont les meilleures illustrations de la pliométrie que j’appelle « coordonnée » Cette méthode permet plus d’impulsions par secondes qu’un travail de sprint, en libérant la fréquence gestuelle. George B. Dintiman préconise une combinaison avec la course en descente pour en améliorer l’efficacité. PROPOSITION D’EXERCICE DE FRÉQUENCE STATIONNAIRE : 8 séries de montées de genoux de 6 secondes (r=2’) Sur place, le travail d’accélération en fréquence peut s’effectuer en montées de genoux à vitesse maximale Améliorer sa force pliométrique POUR ALLER PLUS LOIN… L’enchaînement des contenus pliométriques dans la séance peut s’envisager de diverses manières. Ma suggestion est basée sur l’évolution vers la course : Pliométrie coordonnée (marelle, gammes d’athétisme…) : travail d’éveil pliométrique et de réactivation des schémas corporels Pliométrie verticale (sauts de bancs, contrebas…) : montée en intensité progressive en variant les hauteurs Pliométrie horizontale (multibonds, foulées bondissantes…) : transition vers la vitesse de course La pliométrie est un régime enchaînant une contraction concentrique et excentrique dans le délai le plus court possible. Elle constitue l’un des outils les plus efficaces pour améliorer sa vitesse. Il est possible de l’envisager séparément (préparation physique générale dissociée), ou associée avec d’autres exercices, généraux ou spécifiques (préparation physique associée). Une fois les principes d’intensité, de récupération et de prévention respectés, les possibilités de combinaisons sont infinies. RÉUNIR LES COMPOSANTES DANS DES MOUVEMENTS À SOLLICITATION D’ENSEMBLE Un mouvement d’ensemble est un exercice au cours du quel le sportif va utiliser l’ensemble de ses chaînes musculaires au service d’une production de force et/ou de de vitesse. Le support privilégié du préparateur physique est alors l’halterophilie et les différents éducatifs qui la composent. Dans la perspective du développement conjoint de la force et de la vitesse au service de l’explosivité, l’halterophilie propose : ● une triple extension hanches-genoux-chevilles réalisée à vitesse max. ● un développement de la force explosive et la force de démarrage du train inférieur (arraché, épaulé et jeté) et supérieur (jeté) en poussée. ● un développement de la force explosive en tirage du train supérieur (arraché et épaulé). ● une implication de la majorité de la musculature, du bout des orteils jusqu’au bout des doigts. ● un développement de l’équilibre statique et de la proprioception dans un mouvement de force. ● un apprentissage du placement préventif de la colonne vertébrale. MdM&F PROPOSITION DE DÉVELOPPEMENT DE L’EXPLOSIVITÉ EN ÉPAULÉ DÉPART MI-CUISSE : 4 séries de 3 répétitions à vitesse maximale. 3 minutes de récupération POUR ALLER PLUS LOIN ● Georges Dintiman, Tom Tellez et Robert D. Ward : " Sports Speed " ● - Donald Chu – " Jumping into plyometrics " Le travail de pliométrie verticale peut s’effectuer en bondissant SUR et ENTRE les steps 66 MdM&F n°298- Mai 2009